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Guerre

Emmanuel Macron en mission pour l’OTAN en Roumanie et Moldavie

La France relève entièrement du dispositif de l’OTAN.

Avec l’Allemagne, la France est un des deux principaux sous-chefs de l’OTAN. Parfaitement inféodée aux États-Unis, le véritablement commandeur, la France a pour mission d’encadrer l’intégration de pays plus secondaires, en profitant au passage pour prendre une petite part du gâteau. C’est le sens de la tournée d’Emmanuel Macron en Roumanie, puis en Moldavie.

La Roumanie est membre de l’OTAN, et la Moldavie en est un satellite direct, avec au pouvoir un régime pro-Union européenne (malgré une partie du pays qui a fait sécession) et des traités de coopération avec l’OTAN.

Emmanuel Macron, avec une mise en scène typique du régime américain (nuit dans la tente plutôt qu’à l’hôtel, footing le matin, discours sur le tarmac dos aux troupes), s’est donc rendu sur place pour appuyer encore plus le clivage avec la Russie.

Il s’agit de s’assurer que ces pays frontaliers restent bien dans le giron occidental, alors que l’Ukraine est en train d’être dépecée malgré les discours hypocrites « souhaitant » une victoire ukrainienne. Et quand on dit « rester dans le giron », il faut comprendre « être prêts à la guerre ».

La Russie est définitivement considérée comme ennemi et dans le cadre de la bataille pour le repartage du monde, il faut encadrer les esprits pour qu’ils soient unilatéralement tournés vers une guerre possible avec la Russie. Nous sommes, en juin 2022, définitivement entrés dans une période où cela est assumé. Les discours faisant croire à une défense de la paix sont du passé.

Sur la base militaire de l’OTAN à Constanta où elle déploie son armée, la France est venue expliquer qu’il faut se préparer à l’affrontement guerrier. Il est question de l’Ukraine, mais c’est surtout le prétexte pour maintenir la pression, et assumer une nouvelle étape.

« Aux portes de notre Union européenne, se joue une situation géopolitique inédite, donc oui, pour toutes ces raisons, le contexte politique et les décisions que l’Union européenne et plusieurs nations devront prendre, se justifient de nouvelles discussions en profondeur et de nouvelles avancées.

Je pense que nous sommes à un moment où nous avons besoin d’envoyer des signaux politiques clairs, nous Union Européenne, à l’égard de l’Ukraine et du peuple ukrainien dans un contexte où il résiste de manière héroïque depuis plusieurs mois ».

La France n’enverra pas de soldats ni d’armes ultra-modernes en Ukraine. Mais elle continue avec les autres pays de l’OTAN d’acheminer le minimum nécessaire pour que la situation dure le plus possible. La superpuissance américaine a besoin que la pression guerrière soit maintenue et renforcée.

En attendant, la Roumanie est sommée de moderniser son armée, et en particulier sa force navale, pour appuyer les positions de l’OTAN en mer Noire. L’industrie militaire française, bien sûr, est là pour signer les contrats, alors que l’armée française s’installe parallèlement.

Le ministre des Armées Sébastien Lecornu a donc signé une lettre d’intention avec son homologue Vasile Dincu pour « développer les capacités » de la force navale roumaine grâce au « savoir-faire industriel français et la crédibilité opérationnelle » de la Marine française.

La Roumanie ne dispose que de trois frégates multi-usage, dont deux qui ont été achetées d’occasion à l’armée britannique, et sept corvettes, dont trois qui datent de l’époque soviétique. Elle n’a pas de sous-marin, si ce n’est un classe Kilo, qui ne navigue plus depuis la fin des années 1990.

On remarquera au passage qu’il y a depuis 7 ans un contrat en cours avec le groupe français Naval Group, mais qui bloque pour des raisons contractuelles. Selon la presse roumaine, il s’agirait de la responsabilité de la construction, que le chantier naval de Constanta ne souhaite pas assumer, souhaitant simplement exécuter les constructions pour le compte de Naval Group.

On peut très largement supposer que la lettre d’intention signée entre la France et la Roumanie a notamment pour objet de débloquer la situation. D’autant plus que selon le ministre roumain de la Défense, la Roumanie a besoin maintenant « d’un programme beaucoup plus complexe ».

Le contrat initial prévoit la construction de corvettes Gowind de Naval Group, avec des capacités anti-sous-marine et anti-aérienne avec des technologies françaises, et dans les standards de l’OTAN. Cela ne suffit pas vu la tendance à la guerre, particulièrement en mer Noire.

La Roumanie a officiellement fait part de sa volonté d’avoir au moins trois sous-marins. Une option était posée en 2018 sur du matériel allemand, mais le budget n’était pas là. Tel n’est plus le cas en 2022, avec maintenant 2,5% du PIB de la Roumanie pour les dépenses militaires. L’industrie française est prête à profiter de la manne, du moment que cela est encadré par l’OTAN et que cela va dans le sens de la superpuissance américaine.

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Écologie

Un secrétariat d’État à la Condition animale ?

C’est du charity-business qui n’a honte de rien.

Une dizaine d’artistes de variété et de personnalités liés à la télévision ont écrit une lettre ouverte à la nouvelle premier ministre Élisabeth Borne pour demander « un secrétariat d’État à la Condition animale ».

La lettre n’a aucun contenu, elle ne porte aucune valeur, elle ne dit absolument rien. Elle est à l’image de notre époque : aussi vide que prétentieuse. On a des gens qui, sous prétexte qu’ils sont connus, exigent que le gouvernement réponde à leur préoccupation pour les animaux, une préoccupation n’allant bien entendu pas très loin.

Éventuellement, ces gens pourraient user de leurs moyens financiers et de leur notoriété pour faire des campagnes en faveur de l’adoption dans les refuges, pour mettre en valeur les gens donnant de leur temps et de leur vie pour enquêter sur le sort des animaux dans les cirques, dans des fermes, ou même chez des particuliers.

Mais non, toutes ces gens sont des consommateurs comme les autres et exigent donc que cela tombe du ciel : ils ont quelques sentiments pour les animaux, alors ils « réclament » à la premier ministre un secrétariat d’État. Mais pour faire quoi ? Pour y mettre qui ? Nul ne le sait. Mais par magie, il suffirait de quelqu’un dans un bureau à Paris avec son cabinet dédié pour que soit saisie « l’opportunité extraordinaire de nous réconcilier avec le monde animal ». Quelle mauvaise blague.

Avoir des hauts-le-cœur quand à la situation des animaux dans notre société, c’est bien. C’est même quelque-chose de naturel, tellement leur sort est ignoble. Personne ne peut décemment prétendre être une personne civilisée et pacifique sans avoir une sentiment de colère immense, ou de rage, ou les deux, à la vue d’un camion remplis d’animaux entassés pour l’abattoir. Pareil pour l’idée d’un chien abandonné, d’un chat frappé, d’un cheval vivant seul dans un champ minuscule.

Très bien, très bien, mais tout cela ne donne pas le droit de se prétendre légitime pour parler au nom des animaux et distribuer de la poudre à mettre dans les yeux des gens pour faire croire que les choses avancent.

D’ailleurs, il faut un toupet immense, et un décalage incroyable d’avec le réel, pour avoir accepté parmi les signataires quelqu’un venant du monde de l’exploitation animale :

« Fabienne Thibeault, chanteuse – commandeur du Mérite agricole, ambassadrice des Races agricoles menacées et des Bonnes Pratiques d’élevage »

Cela en dit très long, cela dit même tout. On est là dans une tentative d’instaurer un capitalisme à visage humain, pour neutraliser les contradictions. La question animale porte en elle celle du rapport général à la Nature et il s’agit d’occuper le terrain de manière artificielle, avec des pseudos réformes. Il s’agit de faire semblant d’aimer les animaux, pour être contre les animaux en définitive.

Voici le document, paru dans Le Parisien.

« Lettre ouverte à Madame Élisabeth Borne, Première ministre de la République

« Madame la Première ministre,

Nous avons l’honneur d’intervenir auprès de vous, persuadés que vous disposez pour les cinq années à venir d’une opportunité extraordinaire de nous réconcilier avec le monde animal.

Il semble nécessaire de mettre en place une politique animale efficace et moderne.

C’est la raison pour laquelle les signataires figurant au bas de cette lettre vous prient instamment de réfléchir à la création d’un secrétariat d’État à la condition animale.

Ce serait la preuve d’une grande avancée, pour que la France, pays des droits de l’Homme, devienne aussi le pays des droits de l’animal.

En effet, toute réforme, projet de loi, dans quelque domaine que ce soit, doivent veiller à ce que dans tous leurs aspects, les principes énoncés ci-dessus soient pleinement respectés.

C’est donc une réflexion politique au sens noble du terme qu’il est urgent de faire, et nous vous lançons un appel à cet égard.

La grandeur d’une nation et son progrès moral peuvent être jugés à la manière dont les animaux sont traités. Mohandas K. Gandhi.

Nous vous prions d’agréer, Madame la Première ministre, en l’expression de notre profonde considération »

Les signataires

Raphaël Mezrahi, humoriste et acteur ; Jean-Jacques Debout, compositeur – chanteur ; Chantal Goya, chanteuse ; Jean-Marie Bigard, humoriste ; Laurent Baffie, humoriste ; Vincent Lagaf’, humoriste ; Mikelangelo Loconte, chanteur ; Francis Lalanne, poète auteur – compositeur – interprète ; René Manzor, scénariste et auteur ; Emmanuel Laureau, éditeur ; Fabienne Thibeault, chanteuse – commandeur du Mérite agricole, ambassadrice des Races agricoles menacées et des Bonnes Pratiques d’élevage ; Sophie Darel, artiste de scène – présentatrice TV ; Marc Menant, journaliste – écrivain ; Gavroche, chanteur ; Delphine Wespiser, Miss France 2012 et chroniqueuse TV, Stone, artiste ; Mario d’Alba, artiste ; Emmanuel Ludot – avocat à la cour d’appel de Reims. »

Ce ne sont pas ces « personnalités » qui libéreront les animaux de leur sort. C’est au peuple de le faire, en puissant la force dans ce qu’il a de plus profond mais aussi de plus puissant en lui : son antagonisme avec la société bourgeoise, qui est dénaturée, corrompue, égocentrée et de plus en plus barbare.

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Guerre

La France pousse la Grèce à la guerre contre la Turquie

La mer Égée est au cœur de la bataille pour le repartage du monde.

Cela fait des années et des années que la Grèce et la Turquie se toisent du regard, s’invectivent, s’accusent, se provoquent, etc. Et la France est pleinement partie prenante de ces tensions.

En 2020, l’opposition entre la Grèce et la Turquie a pris une nouvelle tournure, au point que le risque de guerre s’est avéré imminent. La France est intervenue militairement au côté de la Grèce, et a dénoncé sans vergogne la Turquie, jetant ainsi de l’huile sur le feu. Puis elle s’est officiellement alliée à la Grèce.

Un nouvel épisode de cette saga guerrière s’est produit mardi 31 mai 2022. En arrière plan, il y a la Turquie qui reproche à la Grèce de sur-armer ses îles proches du territoire continental turc en mer Égée. Le ministre turc des Affaires étrangères a fait une déclaration choc à ce sujet, dans laquelle il dit notamment :

« La Grèce a violé le statut de ces îles et doit les désarmer. Sinon, un débat sur leur souveraineté commencera ».

Autrement dit, la Turquie reproche à la Grèce de ne pas respecter ses engagements historiques et menace de ne plus lui reconnaître ces îles. Rappelons que ce qui intéresse la Turquie ce ne sont pas ces îles en elles-mêmes, mais leurs eaux territoriales adjacentes.

Cela fait que la Turquie pourrait profiter de la situation pour enfin s’approprier des eaux (et leur sous-sol) qu’elle considère comme les siennes depuis des années. Le problème, on l’aura compris, c’est que justement si la Grèce sur-arme les îles en question, c’est précisément parce que de son côté elle considère que sa souveraineté est menacée.

De quelque manière qu’on prenne le problème, ce ne peut être que l’escalade. Il ne manque plus qu’une étincelle pour que le baril de poudre qu’est cette situation, explose. Et la France a clairement pris parti, et assumera s’il le faut un conflit militaire avec la Turquie, ce qu’elle souhaite même en fait, considérant que c’est un adversaire à sa portée.

D’où une prise de position unilatérale pour la Grèce, comme l’a annoncé Emmanuel Macron, dans une série de remarques à la presse sur cette question, lors d’un sommet européen. Il a parlé de la souveraineté territoriale de la Grèce, qu’il faut absolument défendre face à la Turquie.

Alors ce n’est pas nouveau, certes. La France est déjà engagée militairement auprès de la Grèce face à la Turquie, elle a déjà participé à des manœuvres en août 2020 avec trois avions Rafale, la frégate La Fayette et un hélicoptère. Et donc, surtout, la France a un pacte d’intervention avec la Grèce, comme nous l’expliquions ici en octobre 2021.

Mais nous sommes dans une situation de crise. La France, qui est une puissance en perdition, doit être de plus en plus agressive pour continuer à exister sur la scène internationale. Alors elle se pose comme gendarme de la Méditerranée, qu’elle considère comme sorte de prolongement naturel de son passé impérial puis colonial, avec le Liban comme aboutissement.

En pratique cependant, la France n’agit nullement comme un gendarme, elle n’arbitre rien dut tout mais prend clairement part à un conflit. Ce conflit fait partie des grands points d’accroche mondiaux pouvant mener à une nouvelle grande guerre mondiale.

Pour l’instant, la situation est même relativement figée, en raison de la complexité de la formation de grands blocs, nécessaire historiquement à la dégénération en une guerre mondiale. Concrètement, si on prend la question Ukrainienne, on voit tout de suite que cela freine tant la Grèce que la Turquie. Les deux sont dans la même position, au sein de l’OTAN donc tournée vers l’Ukraine en raison de leur soumission à la superpuissance américaine, mais en même temps ils sont chacun naturellement tournés vers la Russie avec la perspective d’exister de manière plus puissante en étant du côté de la Russie.

Tant la Grèce que la Turquie ont une position bien moins tranchante que les autres membre de l’OTAN vis-à-vis de la Russie. La Grèce est accusée d’aider objectivement la Russie à contourner les blocus, via ses ports. La Turquie assume officiellement de bloquer l’élargissement de l’OTAN contre la Russie, en raison du soutien suédois aux forces kurdes indépendantistes.

Cela peut néanmoins changer à tout moment, car personne ne décide de rien. C’est la crise qui décide de tout et précipite la monde. Toutefois, il est clair que la France participe activement à envenimer la situation en mer Égée, poussant objectivement la Turquie dans les bras de la Russie, et tirant la Grèce vers elle pour qu’elle se soumette avec elle entièrement à l’OTAN… avec l’espoir de bousculer la Turquie.

C’est la bataille pour le repartage du monde.

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Société

Stade de France : faillite de l’État et indécence du ministre de l’Intérieur

La France s’enlise.

La France, qui plus est dans sa région capitale où vivent plus de 12 millions de personnes, s’est avérée incapable d’organiser un simple match de football avec quelques dizaines de milliers de supporters anglais et espagnols.

Rappelons que ce match, qui est chaque année en Europe le match de football le plus prestigieux de la saison, a commencé avec 37 minutes de retard, alors que des milliers de supporters du Liverpool FC n’étaient toujours pas dans l’enceinte. Ce n’est qu’à la toute fin de la première mi-temps, soit 1h30 après l’heure prévue du début de la rencontre, que tous (ou presque) les possesseurs d’un billet étaient à leur place.

Quelle débandade pour la France, qui s’imaginait récolter les lauriers en organisant ce match prévu initialement à Saint-Pétersbourg, mais relocalisé en raison de l’invasion russe de l’Ukraine.

Rien n’allait ce soir-là : les stadiers étaient extrêmement peu nombreux, avec aucun d’entre eux pour guider les gens. La communication visuelle pour l’accès aux différentes portes du stade était faible ou inexistante, d’ailleurs des portes étaient fermées sans information pour les personnes concernées, et de nombreux tourniquets ont été mis hors service par le passage de faux billets (ou en tous cas supposément faux).

Les témoignages expliquant cela sont innombrables. La presse étrangère s’en régale tellement c’est une occasion en or de clouer le bec aux Français traditionnellement si arrogants. Mais il n’y a pas que cela : il y a dans la presse étrangère, qui reflète (de manière imparfaite et désorientée) l’opinion publique de chaque pays, un haut le cœur face à un tel plantage.

Car évidemment, personne n’est à l’abri et chacun des voisins de la France sait être aussi concerné par cet genre de ratage accompagnant et renforçant la crise du capitalisme. Certes, il y a le plaisir (tout à fait compréhensible) de critiquer les Français, mais il y a aussi et surtout un profond dégoût pour ce qui menace toutes les sociétés capitalistes avancées, c’est-à-dire le chaos.

De quoi tout cela est-il le nom, si ce n’est d’un capitalisme à bout de souffle, incapable de fournir la main d’œuvre suffisante à un événement de masse, ni d’assurer la fiabilité de ses opérations, et s’enfonçant alors dans le désordre ?

Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a affirmé lors d’une conférence de presse où il était sommé de s’expliquer sur la situation que :

« Le mal à la racine à l’origine [sic] de la situation samedi soir : une fraude massive et industrielle. »

C’est faux. Le mal à la racine est l’absence de stadiers suffisamment nombreux et formés, combiné à un système défaillant de lecture des billets. C’est une réalité peu connue, mais qui va l’être de plus en plus : la France peine à recruter du personnel de sécurité fiable, voire à en recruter tout court.

Plus personne ne veut faire cela, tellement c’est devenu un métier insupportable et dangereux, en raison de l’agressivité qui se généralise, ainsi que de la violence systématique. La solution a été de compter sur des immigrés censés être moins regardants, mais eux non plus ne veulent plus, ou pas à ce prix-là.

Et comme dans le même temps, en raison du capitalisme, il y a de plus en plus de marchandises et de flux à surveiller, alors cela engendre un manque flagrant de personnel.

C’est cela le premier problème du Stade de France samedi 28 mai 2022. Alors les forces de l’ordre, comme d’habitude, ont dû compenser comme elles pouvaient en mettant la pression. Cela n’a fait qu’empirer la situation, car les supporters (essentiellement du côté anglais) se retrouvaient pris dans des goulots d’étranglement en raison des dispositifs policiers, ce qui gênait les flux.

Puis, quand tout cela a dégénéré, la police a dû employer (relativement) la force, surtout du gaz lacrymogène, pour gérer la foule, une foule forcément en colère de ne pas pouvoir entrer au stade malgré le billet (payé au prix fort qui plus est).

C’est alors que des bandes de délinquants et criminels, soit des jeunes venant des quartiers environnants, soit des migrants des bidonvilles autour du périphérique, sont venus enfoncer le clou de cette ambiance de chaos : tabassage, coups de couteau, et vol de téléphone, de billet, de papiers d’identité, etc. Certaines images et récits de ces razzias sont effroyables, c’est particulièrement vrai dans la presse espagnole qui en a beaucoup parlé.

Mardi 31 mai, six personnes ont été jugées en comparution immédiate à Bobigny pour ces actes, alors que 48 personnes avaient été placées en garde à vue pour ces mêmes motifs.

Il ne faut pas s’en étonner. Le département de la Seine-Saint-Denis relève clairement du tiers-monde et se rapproche toujours plus du Bronx des années 1980 et 1990. C’est ce qu’avait rappelé il y a peu l’ancien football Thierry Henry, qui est un célèbre consultant à la télévision outre-manche :

« Techniquement, faites attention, le stade est situé à Saint-Denis. Saint-Denis, ce n’est pas Paris. Croyez-moi, vous ne voulez pas être à Saint-Denis, ce n’est pas la même chose que Paris… »

Il aurait fallu des moyens importants pour encadrer et assumer un tel événement en Seine-Saint-Denis, défini par Emmanuel Macron comme « la Californie sans la mer ». Mais la France en est manifestement devenue incapable.

Et autre signe des temps, de la décadence de l’État : l’attitude abjecte du ministre de l’Intérieur. Gérald Darmanin aurait dû immédiatement être démis de ses fonctions après un tel raté. Au contraire, celui-ci persiste et signe pour expliquer qu’il a tout bien fait, mais que tout est la faute des britannique qui se sont mal comporté :

« Il n’y a singulièrement que dans le football et avec certains clubs anglais qu’il y a ces événements »

On est là dans le populisme pour faire peur aux gens ayant en tête les hooligans d’il y a trente ans, alors que désormais le football anglais est totalement encadré et policé. Le hooliganisme anglais, avec ses groupes de choc, n’existe plus, à part éventuellement dans les divisions inférieures et encore.

En cause également selon le ministre de l’Intérieur, 30 000 à 40 000 supporters du Liverpool FC avec des faux billets ou sans billet, et 70% des billets présentés au pré-filtrage qui étaient faux. Ce chiffre est délirant, et n’est corroboré par rien du tout d’officiel. Comme si 30 000 à 40 000 fraudeurs refoulés du stade aurait pu disparaître par enchantement !

Car les abords du stade étaient vides une fois tout le monde rentré à l’intérieur vers 22h30, alors personne ne peut croire un tel chiffrage absolument gigantesque. Il faudrait d’ailleurs des moyens industriels pour un tel déploiement de faux billets et les polices anglaise et française auraient forcément vu quelque-chose en amont, aussi faibles soient-elles.

D’après l’AFP et RMC Sport, la Fédération française de football (organisatrice de l’événement pour le compte de l’UEFA) a pour sa part donné un tout autre chiffre lors d’une réunion lundi au ministère des Sports : 2 800  faux billets.

Et encore que cela inclut probablement un grand nombre de bugs des machines elles-mêmes. Un de joueurs du match, l’Ecossais Andy Robertson, a lui-même raconté avoir donné des billets à des proches, qui ont été considérés comme falsifiés, alors qu’ils étaient vrais.

Ce qui s’est passé samedi 28 mai 2022 aux abords du Stade de France à Saint-Denis est très significatif. C’est l’expression de manière crue d’une réalité qui est en cours depuis des années, mais qui s’est définitivement installée avec la crise sanitaire : la France est devenue une société en décomposition, avec un capitalisme qui se casse la figure, avec une puissance publique de moins en moins capable d’organiser le vivre-ensemble.

Et malgré que tout le monde soit conscient de cette réalité, tout le monde continue de faire semblant… pour l’instant.

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Société

Permis à points : le gouvernement va dans le sens des chauffards

Libéraux et fachos contre la sécurité routière.

Le ministère de l’Intérieur a annoncé par voie de presse qu’il menait une réflexion pour assouplir le Code de la route. Et l’Élysée a fait savoir que le Président est d’accord. Il s’agirait de ne plus retirer un point aux conducteurs sanctionnés d’un excès de vitesse considéré comme « petit », c’est-à-dire de moins de 5 km/h au-dessus de la vitesse réglementaire.

Le gouvernement prétend, en se basant sur un rapport de la Cour des comptes, qu’en lâchant du lest ici, il pourrait éventuellement gagner ailleurs et améliorer la sécurité routière. C’est irrationnel, et mensonger, mais tellement typique des mœurs libérales qui polluent la France et les Français, incapables de discipline collective.

C’est irrationnel, car dans la pratique, les excès de vitesse de moins de 5 km/h sont déjà considérés comme petits, et donc peu sanctionnés. C’est le principe du permis à point. On en a 12 (ou seulement 6 pendant les trois premières années de permis), et si on en perd un, il est automatiquement renouvelé au bout de six mois (sauf nouvelle infraction, évidemment).

Où est le problème dans ces conditions ? A moins de vouloir aller dans le sens des gens qui roulent systématiquement vite et qui prétendent que ce n’est pas si grave ! Il ne faudrait surtout pas perturber la petite bulle auto-centrée qu’est l’habitacle de leur voiture chérie…

Ajoutons également le fait que dépasser la vitesse de 5 km/h, cela signifie avoir déjà dépassé deux marges. La première, c’est le compteur de la voiture, qui surestime la vitesse réelle. La seconde, c’est l’abattement automatique de la vitesse retenue par les appareils de mesure, pour considérer une marge d’erreur. Jusqu’à 90 km/h, c’est 5km/h. Au delà, c’est un pourcentage.

Concrètement, il faut rouler à 56 km/h en vitesse réelle pour être sanctionné d’une vitesse retenue à 51 km/h. Et donc, à l’affichage sur le compteur de la voiture, on est en général déjà à 60 km/h.

À grande vitesse, l’écart est plus important. Il faut rouler à 116 km/h vitesse réelle (donc plutôt à 120 km/h sur le compteur de la voiture) pour une vitesse retenue de 111 km/h. Il faut rouler à 137 km/h vitesse réelle (donc au-delà de 140 km/h sur le compteur de la voiture) pour une vitesse retenue de 131 km/h.

Et encore, cela ne concerne que les radars fixes automatiques, qui sont annoncés par un panneau, ainsi que par des applications GPS ou des cartes (ce qui devrait êtres interdit !!). Pour les radars mobiles, c’est-à-dire les contrôles qui ne sont pas annoncés (en tous cas tant qu’ils ne sont pas détectés par les délinquants de la route sur les applications), les abattements sont plus importants encore…

Pour une vitesse retenue de 51 km/h, il faut alors rouler à 61 km/h, donc au-delà des 60 km/h sur le compteur de la voiture). Pour une vitesse retenue de 81 km/h, il faut rouler à 91 km/h, donc au-delà des 90 km/h sur le compteur de la voiture). Pour une vitesse retenue de 131 km/h, il faut rouler à 143 km/h, donc plus proche des 150 km/h sur le compteur de la voiture).

Et donc, quand bien même l’automobiliste se serait laissé aller à ce « petit » excès de vitesse, il ne perd qu’un seul point sur 12, qu’il récupérera dans 6 mois. Mais c’est encore trop, et le gouvernement français a la bonne idée de se dire qu’on pourrait assouplir cela…

Mais dans quel monde vivent ces gens ? Ils ne lisent pas les rapports de terrains de la police et de la gendarmerie, qui font remonter des comportements de plus en plus dangereux sur la route depuis la période du confinement ? C’est comme si un nombre important de conducteurs s’était totalement débridés, sur le mode « après moi le déluge », ce qui est typique d’une société en décomposition.

D’ailleurs, nul besoin de constater un rapport ou une enquête de police ou gendarmerie : il suffit d’être à bord d’une voiture ne serait-ce qu’une heure, en ville ou à la campagne c’est pareil, pour constater un nombre incroyable d’excès de vitesse flagrants et de comportements dangereux en tout genre.

Seulement, comme la majorité des gens est quand même relativement prudente, que les moyens sont mis pour les infrastructures, que les véhicules eux-mêmes sont calibrés pour assumer de gros accidents, alors cela donne au final des chiffres d’accidents considérés comme « acceptables ». Bien loin du carnage des années 2000, ou pire encore du massacre de masse des années 1970 (18 000 morts en 1972, ainsi que des dizaines de milliers de blessés dont des très graves).

Il n’y a rien d’acceptable à la situation actuelle. En ôtant la suppression de point pour les « petits » excès de vitesse, le gouvernement va clairement dans le sens des chauffards. Car ce sont eux qui sont à un point près sur leur permis, mais certainement pas les gens normaux qui n’ont aucune inquiétude de n’avoir que 11 points pendant 6 mois.

Remarquons également une chose très significative : ce sont surtout les chauffards qui ont de l’argent qui verraient leur impunité augmenter. Car l’amende forfaitaire reste, jusqu’à 135 euros, en général plutôt 45 euros. Cela est dissuasif pour les gens normaux, mais pas pour ceux qui roulent déjà dans une grosse voiture et ont des moyens. Ils ne sont pas à 50 ou 130 euros près, surtout s’ils ne risquent rien pour leur permis.

Qui plus est que cela plaît beaucoup aux fachos. Le Rassemblement national trouve la suggestion du gouvernement très bien, tout comme le mouvement d’Eric Zemmour. Celui-ci est d’ailleurs sur ce plan un fou furieux, ouvertement pro-chauffards.

Pour lui, il faut arrêter « la chasse à la vitesse », remettre en place les 90 km/h sur les routes secondaires, supprimer les limitations sur autoroute, interdire aux maires de limiter à 30 km/h dans certaines rues ou quartiers.

On nage ici en plein délire. Et cela pose une question de fond : comment vivre en démocratie avec ces gens là, comment la cohabitation est-elle possible ? La Gauche, forcément, porte la Sécurité routière et le renforcement du Code de la route, par une guerre aux chauffards. Mais ces derniers, que feraient-ils si la Gauche (la vraie) était au pouvoir ? Prendre les armes, pour défendre leur droit à se croire seul au monde sur les routes ? Ce n’est pas absurde d’imager un tel scénario, loin de là.

Car il y a sur cette question de la sécurité routière un véritable clivage au sein de la société française. D’un côté le camp démocratique, assez important numériquement mais très faible politiquement et culturellement. Et de l’autre le camp des fachos et des libéraux, qui ont clairement l’hégémonie politique et culturelle, et qui travaillent la société au corps pour la souiller, saper son unité, déstructurer ses bases.

A la Gauche d’être à la hauteur et saisir l’enjeu, s’en donner les moyens. La sécurité routière est une question démocratique fondamentale. Chaque attaque du Code de la route au nom des chauffards doit être considérée avec la plus grande importance, tellement cela oriente la société française et sa destinée immédiate. On ne peut pas être de gauche en 2022 si on ne voit pas ça.

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Réflexions

« Surtout ne touchez à rien »

C’est la devise des Français.

Ce qui manque à la Gauche historique en France pour se développer, c’est une capacité approfondie à saisir les mentalités. Transformer le monde, c’est transformer les gens et pour cela faut-il les connaître. Naturellement, si on considère que les gens sont des « individus », là on ne peut arriver à rien à part accompagner le capitalisme. Mais si on considère que les gens sont des animaux, des animaux sociaux avec un parcours particulier, alors on peut dégager les tendances principales qui existent.

En l’occurrence, il est tout à fait flagrant que les gens ne veulent plus entendre parler de quoi que ce soit qui pourrait les remettre en cause, à quelque niveau que ce soit. C’est un sentiment naturel de leur part, puisqu’ils assimilent, tels des animaux précisément, la stabilité à la maîtrise de leur environnement : donc la stabilité, donc la protection.

C’est pourtant là fondamentalement trompeur car l’humanité, de par ses capacités d’intervention, a modifié radicalement son environnement, provoquant des mouvements sur le long terme. Sans une compréhension adéquate de ces mouvements, on vit au jour le jour en attendant le déluge. Et voilà justement que l’avenir, sous la forme du réchauffement climatique, de la pollution, de la fatigue générale dans un capitalisme exacerbé, de la guerre… commence à s’annoncer.

Alors les gens, au lieu de prendre le problème à bras le corps, adoptent comme devise « surtout ne touchez à rien », avec l’espoir que cette fuite dans nulle part permette d’éviter l’inévitable. Il y a l’idée de passer individuellement entre les mailles du filet, de se dire que cela arrivera à d’autres que soi. Bref, le principe est simplement de chercher à se rassurer à tout prix.

C’est très exactement la mentalité qui prime fin mai 2022. C’est la tendance générale au sein de la société française. Et on peut sentir une vraie précarité dans les esprits français qui portent cette tendance. Il y a un certain stress, une fragilité psychologique qui affleure, le basculement n’est pas très loin.

Cela est fondamentalement inquiétant. En même temps, il était temps qu’on arrive à un moment où enfin le capitalisme périclite, où son hégémonie totale sur les esprits s’affaiblit. Cela ne veut pas dire que cette hégémonie ait disparu, bien au contraire. En fait, elle se renforce même parallèlement au fait qu’elle s’affaiblit alors que les gens sont perdus. Les gens perdus par le capitalisme rebasculent dans le capitalisme, pour être encore plus perdus, et ainsi de suite.

Impossible également de savoir encore comment cela va tourner, puisque bien entendu le fait de vivre dans un capitalisme hyper-développé amène les gens à être incapables de se poser, ayant pris l’habitude de consommer, de sur-consommer à grande vitesse, sans effort intellectuel prolongé, sans implication « spirituelle » au sens où l’esprit se tourne sérieusement, entièrement vers quelque chose.

C’est là le portrait véritable de toute une période… En espérant qu’elle ne soit pas toute une époque historique, celle d’un effondrement du capitalisme sur des décennies, dans des déséquilibres en série, sanitaires et militaires, sociaux et économiques, avec une décadence intellectuelle et culturelle en filigrane.

Tout dépend ici des prolétaires. Le grand développement du capitalisme depuis 1989, avec l’effondrement de l’empire soviétique et l’intégration de la Chine comme usine du monde, a permis également la corruption d’une large partie des gens dans le tiers-monde, même si leur vie quotidienne est bien souvent chaotique et pauvre. Alors ce sont les prolétaires des pays riches qui, de par leur parcours, peuvent reprendre le flambeau de la contestation du capitalisme, depuis l’intérieur du monstre. Encore leur faut-il décrocher de toutes les traditions petites-bourgeoises qu’ils ont développé.

Quelle étrangeté que ce capitalisme réellement ébranlé et pourtant si stable en raison des prolétaires, de leur passivité complète, de leur participation au capitalisme. C’est tout le paradoxe du moment.

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Guerre

Taïwan: nouvelle escalade entre la Chine et les États-Unis

C’est une nouvelle provocation américaine.

Jusqu’à présent, les États-Unis ne s’étaient jamais engagés formellement à défendre militairement Taïwan en cas d’initiative de la République populaire de Chine. C’est la doctrine du « Taiwan Relation Act » datant de 1979 : le soutien aux dirigeants de l’île de Taïwan est assumé, ainsi que la fourniture d’armes, mais pas le soutien à l’indépendance de l’île, ni l’engagement militaire formel contre la République populaire de Chine. C’est une position d’équilibriste, pour peser sans pour autant faire de ce bout de terre dans le Pacifique une question menaçant la stabilité américaine.

Tout cela tenait jusqu’à présent, alors que les États-Unis étaient encore marqués par l’hyper-tension de l’époque de la guerre froide avec l’URSS et que, depuis les années 1980, les relations commerciales sino-américaines sont passées au cœur du capitalisme.

Mais le monde a définitivement changé depuis la crise sanitaire de 2020 et la stabilité mondiale, toute relative qu’elle pouvait être, est ébranlée. C’est pour cela qu’à l’automne 2021, le président américain Joe Biden avait déjà franchi une ligne rouge en affirmant que les États-Unis prenait l’engagement de défendre Taïwan. Il était vite recardé par sa propre administration, tellement le sujet est brûlant, dangereux. Le chef du Pentagone avait rappelé qu’il n’était pas question d’intervenir autrement que par la fourniture d’armes.

Joe Biden s’était ensuite corrigé lui-même quelques semaines après en précisant qu’il n’encourageait pas l’indépendance de l’île et qu’il fallait maintenir le statut-quo avec la République populaire de Chine.

Mais l’Histoire avance à grands pas et Joe Biden a finalement remis une pièce dans la machine à provocation le 23 mai 2022. C’est à l’occasion d’une tournée au Japon (le Japon, opposé à la République populaire de Chine, est très proche des dirigeants de l’île de Taïwan) que le président américain a finalement assumé d’envoyer définitivement en l’air 40 ans de jeu d’équilibre sur le sujet.

À la question d’un journaliste sur l’éventuel soutien militaire des États-Unis à Taïwan en cas d’attaque par la République populaire de Chine, il a répondu : « yes ». Ce n’était pas une question au passage, mais il y avait tout un enjeu international et très sérieux à cette discussion depuis Tokyo, alors qu’il était également question de dénoncer des coopérations militaires entre la Russie et la Chine.

Joe Biden a fait le parallèle avec l’Ukraine, assumant totalement la position de gendarme du monde de la superpuissance américaine :

« Cela (l’intégration de Taïwan à la République populaire de Chine) disloquerait toute la région et serait une autre action similaire à ce qui s’est passé en Ukraine. Donc, le fardeau est encore plus fort. »

De fait, l’escalade est assumée, car il était question en plus de cela lors de cette visite d’un accord militaire avec le Japon pour, de manière officielle, surveiller l’activité militaire navale de la République populaire de Chine dans la région.

De son côté le gouvernement chinois de Pékin assume lui-aussi la surenchère. Concrètement, la diplomatie chinoise accuse les États-Unis de pousser les indépendantistes taïwanais à la confrontation (en raison de l’élan que leur procure l’annonce d’un soutien américain) tout en expliquant que le conflit militaire sera assumé s’il le faut. La République populaire de Chine considère que la question de Taïwan relève de sa souveraineté nationale et explique en réponse à Joe Biden qu’elle est fermement décidée à la défendre, l’incitant à « ne pas sous-estimer sa ferme détermination ».

Ce sont clairement les contours d’une guerre mondiale qui se dessinent, avec cette contradiction de plus en plus forte, et surtout assumée, entre les deux blocs que forment la superpuissance américaine et son challenger la superpuissance chinoise.

Tant que le développement chinois profitait surtout aux États-Unis et son hégémonie mondiale, la question de Taïwan était relative, servant simplement de contre-poids. Maintenant que la Chine est devenue une superpuissance assumant la concurrence pour le leadership mondial, la contradiction est explosive et la question de Taïwan devient incontournable.

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Société

Pap Ndiaye, un militant racialiste à l’Éducation nationale

Il n’est pas tourné vers l’Afrique, mais vers les grandes universités américaines.

Immédiatement après son entrée en fonction comme ministre de l’Éducation vendredi 20 mai 2022, Pap Ndiaye a donné le ton :

« je suis peut-être un symbole, celui de la méritocratie, mais aussi, peut-être aussi, celui de la diversité. Je n’en tire nulle fierté, mais plutôt le sens du devoir et des responsabilités qui sont désormais les miennes. »

Il n’en tire aucune fierté, mais il en parle quand-même dans sa prise de parole de quelques minutes, sans que cela n’ait de rapport avec l’Éducation nationale. Voilà qui illustre très bien la perspective de Pap Ndiaye : il est un militant racialiste à l’américaine, avec une bonne dose d’indigénisme à la française. Tout ce qui compte, c’est de focaliser sur la couleur de peau, de manière identitaire, voire franchement raciste.

Il y a pourtant une tradition républicaine bourgeoise en France qui est de ne pas parler de sa couleur de peau, car ce n’est pas important, et surtout cela ne doit pas être un sujet. Il peut être parlé des origines, d’un parcours personnel lié à l’immigration et à l’intégration à la France, mais nullement pour en faire un sujet principal, surtout pas d’entrée de jeu.

Prenons un exemple très concret et tout aussi récent : la nouvelle ministre de la Culture Rima Abdul Malak. Elle est née dans un pays arabe, le Liban, et arrivée en France à 10 ans. Mais ce n’est pas un sujet dans sa prise de parole après son entrée en fonction. Elle a plutôt parlé de la culture, félicitant au passage sa prédécesseure pour avoir récité du Molière, du Racine, du Joachim du Bellay, bref la culture classique française.

Précisément ce que rejette Pap Ndiaye et la mouvance racialiste post-moderne qu’il incarne. Et ce, de manière caricaturale. Alors l’extrême-Droite s’est régalée après son entrée en fonction, tellement son parcours est grossier et grotesque : participation à des réunions « interdites aux blancs » et discours sur le « racisme d’État », dénonciation de la Police nationale comme marquée par un « racisme » institutionnel, discours sur les « violences policières », etc.

Il fait d’ailleurs partie des gens ayant soutenu de très près les militants racialistes du comité Adama Traoré. Il a pour référence les racialistes Franz Fanon et Aimé Césaire, qui tous deux assument un ethno-différentialisme profondément marqué. Et tout comme eux, il est totalement intégré et inséré dans les grandes institutions françaises. Son parcours scolaire est absolument lisse, dans des établissements très bourgeois : lycée Lakanal de Sceaux, classes préparatoires au Lycée Henri-IV de Paris, École normale supérieure à Saint-Cloud, agrégation d’histoire, thèse d’histoire aux États-Unis et enfin maître de conférences à l’EHESS.

C’est là, dans ce bastion de la « gauche » postmoderne, qu’il a développé son créneau universitaire racialiste, focalisant sur la couleur de peau de la peau des gens. Il a pour cela écrit un livre au titre évocateur : La Condition noire : essai sur une minorité française, tout en étant partie prenante du « Conseil représentatif des associations noires de France (Cran) ».

Pap Ndiaye est un racialiste tellement forcené qu’il était opposé à la suppression du mot « race » dans la Constitution française en 2018. Voici le verbiage universitaire dont il faisait usage dans Le Monde pour justifier sa position :

« Même s’il est évident que la « race » n’existe pas d’un point de vue biologique, force est de constater qu’elle n’a pas disparu dans les mentalités : elle a survécu en tant que catégorie imaginaire historiquement construite, avec de puissants effets sociaux.

Même si l’intention est louable, abolir la « race » dans les sciences sociales ou la Constitution ne fera pas disparaître les discriminations fondées sur elle. L’usage de la catégorie raciale n’implique pas un engagement ontologique douteux du législateur ou du chercheur sur l’existence des « races », mais l’utilisation pragmatique d’une catégorie située pour décrire des phénomènes discriminatoires. »

Et donc, cette personne est maintenant ministre de l’Éducation nationale. Cela en dit très long sur l’état de décomposition morale et politique de la France. C’est là un aspect évident de la crise, car une telle personne avec un telle discours aurait été impensable il n’y a ne serait-ce que dix ans. La France s’américanise, mais pas dans le bon sens : elle copie dans ce qu’il y a de pire le monstre qu’est la superpuissance américaine, et elle va s’effondrer aussi brutalement qu’elle.

On notera au passage que Jean-Luc Mélenchon trouve cela très bien. Selon lui, Pap Ndiaye est un « grand intellectuel », et sa nomination relève de « l’audace ». Ce n’est pas étonnant : on assiste en France à un découpage à l’américaine entre « Républicains » et « Démocrates », Emmanuel Macron tentant d’unir pour l’instant les uns et les autres, en lessivant le reste. Et Pap Ndiaye représente typiquement ces gens voulant ré-impulser le capitalisme au moyen de réformes sociétales.

Comment ne peut-on pas le voir d’ailleurs ? C’est tellement évident que le capitalisme, s’il un a côté conservateur, de repli nationaliste-belliciste, a également un côté cosmopolite – relativiste de toute morale pour oeuvrer à élargir son marché. Ne pas voir cela c’est ne pas regarder le capitalisme dans sa contradiction interne qui saute pourtant aux yeux !

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Guerre

Système MAMBA : la France prend possession militairement de la Roumanie

La Roumanie est une base militaire de la France, pour le compte de l’OTAN.

En raison du conflit en Ukraine, l’armée de terre, avec la mission « Aigle », a déployé en Roumanie un groupement tactique interarmes de 500 hommes. Ils proviennent du 126e Régiment d’Infanterie de Brive-la-Gaillarde, du 27e bataillon de chasseurs alpins d’Annecy, du 93e Régiment d’Artillerie de Montagne de Grenoble, du 2e Régiment Étranger de Génie de Saint-Christol et du 4e Régiment de Chasseurs de Gap.

Ce groupement est épaulé par 300 militaires belges et agit dans le cadre de la Force de réaction rapide de l’OTAN, que la France dirige actuellement.

Ces unités sont basées à Constanta au bord de la mer noire et elles sont spécialisées dans l’environnement montagneux. L’objectif opérationnel est évident : la région séparant la Roumanie de l’Ukraine, qui traverse la Moldavie, est montagneuse. Il s’agit de pouvoir s’y déployer rapidement, dans le cadre d’une intervention directement contre la Russie, soit vers Odessa (sur la Mer Noire), soit en abordant les plaines qui remontent ensuite au Nord vers Kiev.

Il y a également un groupement aéronaval formé autour du porte-avions Charles de Gaulle avec la mission « Clemenceau 22 » centrée sur la région méditerranée et l’espace aérien roumain. En plus de ses avions de chasse Rafale, la France déploie un avion de patrouille maritime Atlantique 2 dans la zone économique exclusive de la Roumanie.

En termes d’effectifs et de matériel, tout cela est relativement faible. En pratique cependant, cela verrouille totalement la situation sur le plan militaire, faisant de la France la dirigeante des opérations en Roumanie, au nom de l’OTAN. Autrement dit, c’est l’armée française qui décide militairement en Roumanie, avec l’armée roumaine et le régime roumain totalement subordonnés.

Cela laisse donc les mains libres au militarisme forcené de l’armée française dans le cadre de l’OTAN, et celui-ci continue sa course folle. Une nouvelle étape a ainsi été franchie avec l’annonce le 19 mai 2022 du déploiement du système de défense sol-air MAMBA, ainsi que d’un Centre de management de la défense dans la 3e dimension.

C’est là du matériel et un dispositif très importants, de dernière génération avec notamment le missile intercepteur Aster 30 annoncé comme étant capable de détruire une cible à plus de 100 km de distance.

Cela sert à contrôler entièrement la région avec une bulle de défense. Et si on comprend bien les choses, cela signifie inversement que la Roumanie devient une base d’attaque retranchée, comme elle l’a été après la première guerre mondiale. De fait, la France, en tant que force de l’OTAN, annonce maintenant qu’elle prend entièrement possession du territoire roumain.

Voici comment c’est présenté par l’état-major de l’armée française dans son communiqué :

« Mis en œuvre par une centaine d’aviateurs, le MAMBA est un système d’arme sophistiqué qui peut assurer une bulle de protection au profit des forces qui opèrent dans la zone de couverture.

Afin d’augmenter l’efficacité du système et pour répondre aux besoins de l’Integrated air and missile defence de l’Otan, celui-ci est connecté et intégré via une liaison de données tactiques au système de défense roumain et à celui de l’Otan ».

La Roumanie est colonisée militairement par la France, au nom de l’OTAN, pour braquer des missiles et des militaires directement contre la Russie. Voilà ni plus ni moins que la situation au printemps 2022, où chaque grande puissance (ici la France pour le compte de la superpuissance américaine), dispose ses pions, joue ses cartes.

Sous nos yeux de manière on ne peut plus nette, se dessinent les contours d’un grand conflit mondial généralisé, avec la France totalement embarquée dedans via l’OTAN. Et il n’y a personnes pour s’y opposer en France. Le pacifisme, la guerre à la guerre, n’intéresse personne, comme si les sanglantes leçons du 20e siècle n’avaient servi à rien. C’est une catastrophe ! Et il faut la combattre.

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Guerre

L’atlantisme anti-Russie et le nationalisme pro-Russie

Deux tendances au sein de la bourgeoisie française.

Immédiatement après l’annonce officielle de la Finlande et de la Suède de leur volonté d’intégrer l’OTAN, le président français Emmanuel Macron a exprimé son soutien. Surtout, il a tenu à préciser que la France se tiendra à leurs côtés en cas d’agression.

Le communiqué officiel insiste fortement :

«Tout État qui chercherait à tester la solidarité européenne, à travers une menace ou une agression contre leur souveraineté par quelque moyen que ce soit, doit avoir la certitude que la France se tiendra aux côtés de la Finlande et de la Suède»

Au fond, cela n’a pas de sens. Ces deux pays sont déjà ouvertement proches de l’OTAN, donc la donne ne change pas. Et puis c’est la nature même de leur prochaine intégration à l’OTAN que d’engager un soutien militaire obligatoire en cas d’agression. Agression qui est fictive de toute façon. La Russie ne menace aucunement ces deux pays, cela n’a rien à voir avec le cas de l’Ukraine, que la Fédération de Russie considère comme relevant de ses prérogatives, et elle avait annoncé depuis très longtemps ses intentions. Depuis 2014 au moins.

Ce n’est donc pas le fond qui compte, et encore moins la réalité. Ce qui compte, c’est la forme, la propagande atlantiste, pour faire monter la pression contre la Russie et préparer les esprits à l’affrontement. Ici, Emmanuel Macron prend parti de manière belliciste, il joue des gros bras face à la Russie qui joue des gros bras elle aussi. La Finlande et la Suède ne seront bientôt plus que des prétextes à la guerre, et il n’y a personne pour prôner l’apaisement.

Emmanuel Macron se permet tout cela, car il y a un consensus immense en France sur l’allégeance à la superpuissance américaine et son organisme militaire qu’est l’OTAN. Il suffit de regarder les élections législatives 2022 : la question de la guerre n’existe tout simplement pas. Emmanuel Macron peut agir totalement librement, en première ligne pour faire le jeu de l’OTAN, selon les intérêts américains (par définition).

Il y a un problème toutefois, c’est que ce consensus unilatéralement pro-américain ne colle pas ni avec les intérêts, ni avec la vision de toute une partie de la haute bourgeoisie française. C’est, pour faire simple, la haute bourgeoisie française qui est par définition même nationaliste, plutôt d’extrême-droite, qui pense que la France doit maintenir et renforcer son rang de grande puissance du capitalisme de manière autonome, et donc ne pas faire allégeance aux États-Unis.

C’était la ligne du Général de Gaulle, ligne que la Gauche à l’époque dénonçait comme étant nationaliste, relevant pratiquement du fascisme. Ce qui était vrai. Mais qu’est-il advenu de cette expression nationaliste de la haute bourgeoisie française en 2022 ?

L’élection présidentielle a été de ce point de vue très significative. Tant Marine Le Pen qu’Eric Zemmour avec autour de lui Marion Maréchal étaient censés porter cette ligne nationaliste réticente face à l’OTAN. Et dans le contexte de la guerre en Ukraine, cela signifiait dénoncer l’hystérie anti-Russie, relativiser le rôle de la Russie, au moins la mettre dos à dos avec les États-Unis, etc.

Mais personne ne l’a fait. Marine Le Pen en a été incapable, alors qu’elle avait là un boulevard. Eric Zemmour lui s’est révélé quasiment plus atlantiste qu’Emmanuel Macron. Ces gens sont pourtant habituellement naturellement tournés vers Vladimir Poutine et son populisme « non aligné ». Mais la pression atlantiste en France était immense, ils se sont fait écraser.

Il était pourtant facile d’au moins critiquer le régime ukrainien, et surtout ses bataillons nazis. D’ailleurs, nous à Agauche.org l’avons fait souvent, et depuis très longtemps, bien avant l’invasion russe de février 2022, que nous avons annoncé dès avril 2021.

D’où une diffusion par la bande, en mode indirect, de la ligne nationaliste. Il n’y a eu que Sud Radio pour assumer dans certaines émissions cette ligne nationaliste pro-Russe, ou en tous cas pas anti-Russe. Cela n’a pourtant été qu’un bruit de fond pendant des mois, jusqu’à tout récemment, avec le témoignage d’Adrien Bocquet reflétant une offensive idéologique.

Celle-ci était très bien ficelée, avec un ton très naturel pour être bien convainquant. Adrien Bocquet a expliqué à quel point il avait vu des nazis en Ukraine, alors qu’initialement il était juste là pour aider, candide, du moins à ce qu’il dit. Suite à l’émission, beaucoup de gens ont décidé de découvrir qu’il y avait des hordes de nazis en Ukraine, liés au régime en place.

Cela ne doit rien au hasard. Il y a derrière cette « découverte » l’expression de cette partie nationaliste de la bourgeoisie française qui veut reprendre la main, en tous cas gagner des positions, exister à nouveau.

Et pour ceux qui doutaient du caractère politique de l’intervention d’Adrien Bocquet sur Sud Radio, celui-ci a remis ça lundi 16 mai. De manière très lisse et maîtrisée cette fois-ci, sans le ton faussement naïf, en colère, naturel et amateur de la première fois.

Il reprend tous les éléments uns par uns, de manière très professionnelle. C’est extrêmement politique, l’opération politique est indéniable. D’autant plus qu’entre temps, Adrien Bocquet a été invité par la chaîne YouTube (très professionnelle là encore) de Valeurs Actuelles, le média de l’extrême-droite française sur un mode traditionnel.

La Gauche ne doit pas être dupe de ce jeu de l’extrême-droite, tout comme elle doit combattre avec la plus grande fermeté l’Atlantisme et le bellicisme du régime en place, porté par Emmanuel Macron réélu.

Dans la nuit sombre, il faut un phare pour y voir, clair : tel doit être le rôle de la Gauche, pour servir les gens, pour ouvrir la voie. Le monde dans lequel nous vivons est complexe, mais il y a une chose qui est simple et qui doit servir constamment de boussole, c’est la lutte des classes. Ce qui sert la bourgeoisie ne sert par la classe ouvrière, et inversement. Le point de repère en tant qu’objectif doit toujours être le Socialisme !

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Guerre

Henri Guaino donne des arguments pour justifier la guerre

Il dit à la bourgeoisie ce qu’elle a besoin d’entendre.


Henri Guaino est une des principales figures du néo-gaullisme en France, remportant beaucoup de succès intellectuel et médiatique pendant les années 2010. Il a été conseiller spécial de Nicolas Sarkozy alors président de la République, écrivant ses discours les plus marquants, et il en garde une grande aura à Droite (malgré qu’il soit souvent considéré comme trop social, voire presque de gauche).

Lorsqu’il prend la parole, cela est en tout cas très écouté et apprécié dans la bourgeoisie française. Ses propos sont considérés comme une sorte de synthèse un peu piquante de ce qu’il faut penser pour « la France » telle que la conçoit la bourgeoisie française, en tous cas ses franges les plus puissantes, et disons, traditionnelles. Autrement dit, on ne parle pas là des ultra-modernistes, des entrepreneurs startupers fascinés par la silicon valley et l’idéologie LGBT, mais de gens qui lisent chaque jour Le Figaro avec une grande attention, qui envoient leurs enfants dans les établissements les plus prestigieux pour en faire forcément, d’une manière ou d’une autre, les administrateurs de la société française.

Voici ce qu’explique Henri Guaino à cette bourgeoisie française, dans un article du Figaro du vendredi 13 mai au titre lyrique : « Ukraine : nous marchons vers la guerre comme des somnambules ».

Il raconte ni plus ni moins que la guerre est inévitable, que la rupture avec la Russie est bien trop consommée, que la tendance est inaltérable. Cela en dit très long sur l’état d’esprit pouvant régner dans la bourgeoisie française, pour qu’Henri Guaino assume un ton aussi unilatéral, et que le Figaro le reprenne et le mette en avant sur son site pendant tout le week-end.

Henri Guaino le néo-gaulliste se pose de manière extérieure et supérieure à la situation, précisément car l’idéologie qu’il incarne a pour objet de placer la France de manière extérieure et supérieure au grand concert des nations marqué par les conflits d’intérêts.

C’est une fable bien sûr, car la France depuis 1848 n’est pas et n’a jamais été en dehors du capitalisme mondial, elle n’est pas « neutre », c’est au contraire une championne de l’exportation de ses capitaux, c’est une championne des délocalisations et du made in China, c’est une championne de la fabrication et de la vente de matériel militaire, etc.

C’est également une fable que la position d’Henri Guaino se voulant au-dessus de la mêlée, constatant avec bravoure et philosophie la terrible situation. Mais que dit-il précisément ?

Il commence par expliquer qu’en 1914, personne ne voulait la grande boucherie de la guerre mondiale, mais que cela s’est fait par un enchaînement tragique historique. Il dit ensuite que c’était la même chose pour la seconde guerre mondiale, et qu’on a par contre échappé au pire pendant la guerre froide grâce à l’intelligence des dirigeants de l’époque (dont le Général de Gaulle est censé faire partie).

Tout cela pour introduire l’idée que c’est exactement ce qu’il se passe actuellement avec la guerre en Ukraine. Henri Guaino n’hésite pas à mettre l’OTAN et la Russie dos à dos, ce qui dénote dans le Figaro, furieusement atlantiste et anti-Russie depuis le mois de février. Mais justement, c’est son rôle que de servir de poil à gratter pour dire ce qu’il faut entendre dans la bourgeoisie.

Et la bourgeoisie française entend donc ce qu’elle a besoin d’entendre : ce n’est pas de sa faute, mais elle va aller à la guerre. Voilà tout.

Bien sûr, Henri Guaino est très fin dans sa façon de le dire. Il fait mine de demander où est la voix de la France comme en 2003 pour dire « non » à la guerre en Irak, pour surtout sous-entendre ensuite que c’est trop tard, et que « nous marchons vers la guerre comme des somnambules ».

Évidemment, il a raison de constater la tendance à la guerre, il a raison de dire que la superpuissance américaine, avec sa façon d’acculer la Russie, de la poussée dans ses retranchements, ne peut que déclencher le pire.

Mais Henri Guaino n’est pas un socialiste, il n’est pas pour la grande union des peuples du monde derrière le drapeau rouge pour le pacifisme en écrasant les fauteurs de guerre. Henri Guaino est un néo-gaulliste, et donc sa tendance naturelle est l’expression du nationalisme français, reflet de la position de puissance secondaire mais majeure qu’est la France et son capitalisme.

Alors, pas de pacifisme, pas de rejet concret et actif du bellicisme : juste un beau discours pour la bourgeoisie française, afin qu’elle affûte ses arguments disant qu’elle ne fait que constater les choses et est entraînée malgré elle par l’Histoire, et bientôt la guerre.

D’ailleurs, le terme « bientôt » est impropre, car la France participe déjà activement et concrètement à une guerre contre la Russie depuis février 2022. Une guerre politique, culturelle et économique. Mais aussi une guerre militaire avec des livraisons d’armes et du conseil militaire (en plus de l’envoi probable d’officiers et de pseudo-mercenaires).

Henri Guaino ne dénonce pas concrètement la position de la France, il ne fait qu’acter le fait que la France est bien trop insérée dans ses liens avec l’OTAN et qu’elle ne pourra pas faire autrement que d’aller dans le sens de la guerre aux côtés de la superpuissance américaine. C’est ici concrètement un échec de sa position néo-gaulliste modérée. Cela souligne de ce fait la menace d’une ligne néo-gaulliste ultra-agressive émergeant de la haute bourgeoisie refusant la rétrogradation de la France comme puissance de second rang se plaçant unilatéralement derrière la superpuissance américaine.

Toutefois, quelles que soient les options, c’est en tous cas la guerre qui se profile. A moins que la Gauche, reflétant la classe ouvrière consciente, renverse la table et fasse la guerre à la guerre.

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Société

Suite à la guerre en Ukraine, la GPA n’est plus illégale en France

La GPA s’impose de plus en plus à la société française

Il y a les lois, et puis il y a la façon dont la bourgeoisie les contourne. C’est très connu en ce qui concerne la fiscalité, avec tout un tas de combines pour payer moins d’impôts, cacher telle ou telle richesse, etc.

C’est aussi le cas avec la GPA. Normalement, c’est interdit en France et le gouvernement ne compte pas revenir dessus. En pratique, le droit est régulièrement torpillé à coup de missiles anti-démocratiques, pour piétiner la loi et reconnaître cette pratique barbare.

Initialement, c’est très simple. Les bourgeois trouvent une mère « porteuse » à l’étranger avec qui ils combinent pour qu’elle abandonne son enfant, puis ils l’adoptent et obligent la justice française à reconnaître leur combine.

Seulement voilà, il y a la guerre. En effet, l’Ukraine, qui est un pays pauvre, est un bastion de la GPA. Il y a de nombreuses cliniques pour cela avec un business très structuré. C’est très facile pour des bourgeois français de se rendre là-bas et de récupérer l’enfant qu’ils ont acheté à une femme, dont le corps et ses neufs mois de gestation sont considérés comme une marchandise. L’enfant lui-même, d’ailleurs, est de fait une marchandise dans ces conditions.

Les bourgeois ayant recours à une telle pratique ne reculent devient rien, ils disposent d’énormes moyens. Alors, pour ne pas voir leur projet d’achat remis en cause par la guerre, certains ont fait venir les mères « porteuses » ukrainiennes concernées pour accoucher en France.

C’est arrivé au moins trois fois, en avril et en mai, et probablement deux autres fois encore. Mais personne n’a de chiffres quant à d’autres cas, car tout cela est mené dans la plus grande opacité, avec la complicité des autorités qui laissent faire. On n’arrête pas le business.

Le procédé est très simple. Le couple acheteur fait venir la mère « porteuse » en France, il suffit de dire qu’elle est réfugiée de la guerre. Cette dernière accouche sous X et abandonne l’enfant, tandis que le père biologique (puisqu’il a donné ses gamètes pour une insémination artificielle, une PMA) reconnaît l’enfant. Puis il y a une procédure d’adoption lancée par l’autre personne du couple.

Et le tour est joué.

L’État civil se rend donc complice de la GPA en acceptant de nier l’existence de la mère ukrainienne, qui a pourtant accouché devant témoin sur le territoire français, et dont on a accepté l’abandon de son enfant pour une raison commerciale.

C’est littéralement une importation de la GPA en France, car l’État français laisse objectivement faire cela sur son propre sol. La GPA peut donc rester interdite en France pendant des années, peu importe car les bourgeois ayant recours à cette pratique barbare savent comment contourner la loi sans être inquiétés.

De fait, la GPA n’est plus illégale en France avec un nouveau cap franchi.

Il y avait eu l’arrêt de la Cour de cassation en octobre 2019 reconnaissant les GPA faites à l’étranger et le concept délirant de « mère d’intention », il y avait une décision de la cour d’appel de Rennes en novembre 2019 ordonnant la transcription complète de l’état-civil farfelu de six enfants nés à l’étranger dans le cadre d’une GPA, puis il y a eu dans la foulée, de manière encore plus délirante en décembre 2019, la Cour de cassation reconnaissant des enfants avec deux « pères » ou deux « mères »…

Il y a eu ensuite la loi sur la « PMA pour toutes », qui faisait officiellement des enfants une marchandise et qui gravait dans le marbre le concept délirant de « parent d’intention ».

Il y a maintenant en 2022 des GPA en France.

Quel cynisme que ce soit au prétexte de la guerre en Ukraine. La nation ukrainienne sert déjà de chair à canon pour le capitalisme occidental mené par la superpuissance américaine. Voilà maintenant que des femmes ukrainiennes sont importées, il n’y a pas d’autre mot, sur le territoire français pour y imposer la GPA.

C’est une nouvelle victoire du turbocapitalisme, dans l’indifférence la plus totale de la population française. Une pierre de plus à la généralisation de la société de consommation capitaliste qui est parallèle à une crise menant le monde à la guerre.

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Politique

La Gauche 3R et l’alliance électorale NUPES

La distinction est importante.

La création de l’alliance électorale « NUPES » par Jean-Luc Mélenchon a provoqué une onde de choc dont on cerne mal encore l’impact historique. Il reste néanmoins que cela provoque un regain d’affirmation d’une partie de la Gauche qu’on va qualifier de 3R : rationaliste, réformiste, républicaine.

C’est indéniablement une bonne chose. Il ne sera rien construit en France à gauche sans des gens rationnels, voulant établir une base programmatique. On peut bien entendu discuter du programme. Cependant, pour cela il faut déjà pouvoir discuter à ce niveau. Vous imaginez-vous pouvoir discuter du programme avec Jean-Luc Mélenchon ? Certainement pas.

Le rêve de Jean-Luc Mélenchon, c’est de faire comme le président vénézuélien Hugo Chávez au début du 20e siècle avec son émission de télévision Aló Presidente, où des gens appellent et le chef fait une réponse spontanée, et bien souvent prolongée, dans un grand étalement populiste.

La Gauche 3R – rationaliste, réformiste, républicaine – n’a pas du tout ce rêve, qu’elle trouve même foncièrement gênant, voire sortant franchement du cadre de la Gauche. On parle ici de gens qui exigent un certain niveau de conscience, se situant dans la tradition des « socialistes français », en acceptant positivement ce qui s’est passé après 1920, notamment le Front populaire.

C’est même d’ailleurs une référence essentielle, parce que cela ancre les radicaux de gauche dans le camp de la Gauche, de l’antifascisme. Pour cette Gauche 3R en général, d’ailleurs, les radicaux de gauche font partie de la « Maison » parce que la République française peut selon eux être transformée en « République sociale ».

Mais il y a des nuances car certains sont républicains avant d’être rationalistes ou réformistes, d’autres réformistes avant d’être républicains ou rationalistes, etc. Cela fait que sur le plan des idées, on va ainsi de gens foncièrement réformistes et toujours désireux de participer à un gouvernement quel qu’il soit, à des gens espérant sincèrement qu’on en arrive au socialisme par la République. Ces nuances s’expriment ainsi par de multiples appareils politiques.

Sur le plan des organisations, on a la Gauche Républicaine et Socialiste, mais également le Mouvement Républicain et Citoyen, les Radicaux de Gauche – LRDG, la Nouvelle Gauche Socialiste, désormais tous unies dans une Fédération de la Gauche Républicaine ; on a également une partie significative du Parti socialiste. Arnaud Montebourg peut être rattaché à cette approche, c’est d’ailleurs un bon exemple, avec Manuel Valls, de gens « républicains » avant tout.

Et à cette liste il faut ajouter des organisations d’orientation révolutionnaire qui se veulent le prolongement, au sens d’un dépassement de cette position socialiste française : le PRCF, le PCRF, le PCF(MLM), le PCOF. C’est finalement ce qui est appelé la « Gauche programmatique » sur agauche.org, au sens le plus large.

Aussi, ce qui se pose comme question, c’est : l’alliance électorale NUPES va-t-elle anéantir le camp de la Gauche programmatique, ou pas ? Une partie des socialistes ne le veut pas, mais leur option est la sortie par la Droite, soit directement auprès d’Emmanuel Macron comme avec Manuel Valls, ou dans une position de centre-gauche qui n’a rien du tout de socialiste, comme avec François Hollande.

Que vont faire les autres ? C’est là ce qui va être d’une importance historique certaine. La question est ici électorale, mais pas seulement, d’ailleurs elle peut ne pas l’être.

Ce qui compte, c’est l’affirmation d’un espace pour la Gauche programmatique – sans quoi c’est le champ libre au populisme contestataire, à une post-gauche décomposée, se calquant consciemment ou non sur les Démocrates américains et leur fascination pour les « droits individuels » convergeant avec la modernisation du capitalisme.

Nous vivons clairement un moment clef. Il faut le comprendre et ne pas passer à côté des exigences historiques.

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Guerre

L’île de Taïwan, au cœur de la tempête guerrière à venir

C’est un point de friction, et cela ne va aller qu’en s’accentuant.

La République populaire de Chine considère l’île de Taïwan comme une « province rebelle » devant revenir dans le giron chinois « de gré ou de force ». C’est ce qu’explique régulièrement le président Xi Jinping et c’est la grande actualité militaire de la région indo-pacifique.

Inversement, Taïwan s’appelle officiellement la République de Chine et considère la République populaire de Chine comme illégitime. Sa revendication est l’entièreté de la Chine ! En substance, il ne s’agit pas tant de voisins rivaux que de concurrents chinois.

Lors de la fondation de la République populaire de Chine en 1949 par les communistes menés par Mao Zedong, le gouvernement de la bourgeoisie chinoise bureaucratique vendue aux occidentaux, le Kuomintang (Parti nationaliste chinois), s’est établi sur l’île de Taïwan tout en cherchant appui auprès du Japon et des États-Unis. Jusqu’en 1971, c’est la République de Chine (Taïwan) qui occupait le siège chinois à l’ONU.

Bien sûr, c’est de l’Histoire, quoique récente. Mais en théorie, l’indépendance de « Taïwan » n’a jamais été proclamée par personne et les deux pays se disputent toujours la légitimité de l’entièreté du territoire chinois. En pratique toutefois, Taïwan a maintenant une existence autonome, avec une culture chinoise qui lui est relativement propre. Celle-ci est notamment marquée par ses liens avec le Japon, qui a possédé l’île de 1895 à 1945.

La question taïwanaise est très importante au japon, pour des raisons économiques surtout et l’influence pro-Taïwan est particulièrement marquée et reconnue au sein du Parti libéral-démocrate japonais au pouvoir. L’Association d’échanges Japon-Taïwan est très influente dans les deux pays, en économie mais aussi pour les questions militaires.

On peut dire également, voire surtout, que Taïwan existe parce que l’île est dans le giron des États-Unis, la superpuissance américaine l’ayant appuyé d’abord pour faire contre-poids aux communistes, et ensuite comme État tampon face à l’expansionnisme chinois. Dans les années 1950 et 1960 les États-Unis ont porté l’économie de l’île à bout de bras ; ils ont ensuite participé à sa militarisation forcenée.

Il existe une loi américaine datant de 1979, le Taiwan Relations Act, qui garantit la fourniture d’armes et d’équipements militaires au gouvernement de l’île, pour assurer sa « capacité d’autodéfense ». Cela fait que les États-Unis ne se sont jamais engagés formellement à défendre Taïwan en cas d’invasion de la République populaire de Chine, mais qu’en même temps ils font tout pour peser militairement.

Le parallèle avec la situation de l’Ukraine depuis 2014 est évident, sauf que là cela dure depuis 1949. Mais contrairement à l’Ukraine qui est un pays pauvre, Taïwan fait partie des pays riches (la CIA classe l’île parmi les pays développés) et l’industrie électronique notamment place l’île au 15e rang mondial des pays en ce qui concerne le PIB par habitant.

Qui dit pays riche et totalement inséré dans le capitalisme mondial, dit forcément pays à la grande capacité militaire.

Rien que sous le mandat de Donald Trump, qui a poussé la militarisation grandissante de l’île, le gouvernement de la République de Chine (Taïwan) a commandé 108 chars M1A2 Abrams, 11 systèmes d’artillerie M142 HIMARS, 66 F-16 Viper, des drones MQ-9B SeaGuardian, 135 missiles de croisière AGM-84 SLAM ER, de 400 missiles antinavires RGM-84L-4 Harpoon Block II, 100 systèmes de défense côtière Harpoon, 1.649 missiles anti-char ainsi que 250 missiles sol-air portables Stinger. Depuis, en août 2021, l’administration de Joe Biden a autorisé la vente de 40 obusiers de 155 mm M109A6 dit Paladin.

Il y a toutefois des tensions sur les chaînes d’approvisionnement de certains composants ; la forte demande en missiles anti-chars et anti-aériens en raison de la guerre en Ukraine perturbe les livraisons à Taïwan. Ce qui fait dire publiquement à l’armée américaine que la République populaire de Chine pourrait en profiter pour attaquer l’île de Taïwan. Comme si l’étau se resserrait, ou bien également pour pousser la Chine à la faute.

En mars dernier déjà, l’amiral Philip Davidson, qui est le chef du commandement Pacifique des États-Unis, avait expliqué la chose suivante :

« Initialement nous avions prévu que la Chine puisse tenter d’envahir Taïwan d’ici 2050, dorénavant nous pensons qu’elle le fera avant 2030”.

Voilà la situation, qui n’est au passage qu’un point d’accroche parmi d’autre dans cette vaste zone indo-pacifique, qui est le coeur géographique de la grande bataille pour le repartage du monde, qui pourrait tout à fait dégénérer en une troisième grande guerre mondiale conventionnelle.

En attentant, l’armée chinoise multiplie les provocations en pénétrant avec des engins militaires dans la zone d’identification de défense aérienne de Taïwan. C’est arrivé 370 fois depuis le début de l’année 2022 avec rien que pour la journée du 6 mai 2022, douze avions de combat et deux bombardiers. Ce type d’incursions avaient été de 380 en 2020, puis 969 en 2021.

Évidemment, du point de vue de la République populaire de Chine, cela n’est pas une provocation car elle considère qu’elle est chez elle. D’ailleurs, il n’y a pas de violation du droit international ni du territoire de l’île ; ce que le gouvernement de l’île de Taïwan considère comme sa zone d’identification de défense aérienne est définie par lui-même et diffère de son espace aérien. Cette zone court jusqu’aux rivages chinois.

Mais de fait, cela oblige Taïwan à faire décoller des avions pour intercepter et identifier. C’est une technique de harcèlement, pour user le matériel adverse, prendre des informations sur sa capacité à réagir, le faire céder psychologiquement, le pousser à la faute, etc.

Inversement, on peut également dire que la guerre en Ukraine, qui est en fait une guerre entre l’OTAN et la Russie menée par l’intermédiaire de l’Ukraine et sur le dos de la population ukrainienne, sert de laboratoire américain pour mener une guerre conventionnelle sans la mener officiellement.

Ce qui est fait en Ukraine, avec la fourniture relativement discrète d’armes, de formations, voire de personnel de commandement pendant des années, puis ouvertement depuis février 2022, peut tout à fait servir de modèle pour faire la même chose avec Taïwan. L’île servant alors à l’OTAN de moyen indirect de mener une guerre à la superpuissance chinoise.

Cette stratégie est quasiment assumée publiquement de toutes manières. Le chef d’état-major des armées américaines Mark Milley a affirmé récemment devant le Sénat américain que “la défense de Taïwan devra être assurée par les Taïwanais eux-mêmes”, sur le modèle de l’Ukraine, qui sert de chair à canon contre la Russie. L’île de Taïwan doit donc servir de chair à canon contre la Chine, et la superpuissance américaine cherche à faire la même chose avec le Vietnam et les Philippines.

On assiste là à des événements qui se précipitent en raison de la crise ; il n’y a pas de capitalisme sans aboutissement à la guerre pour le repartage du monde. Et le camp de la paix, porté par le prolétariat mondial, est terriblement faible !

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Politique

Le contenu des accords entre La France insoumise et Génération.s, EELV, le PCF et le PS

Il n’y a aucun contenu réel, juste de la soupe électoraliste.

Après un long dénouement, la direction du Parti socialiste menée par Olivier Faure a scellé un accord avec La France Insoumise de Jean-Luc Mélenchon pour les élections législatives de juin 2022. Cela vient conclure la suite d’accords avec Génération.s, EELV et le PCF, qui reprennent toujours la même trame, et lance définitivement la « NUPES » (Nouvelle union populaire écologique et sociale). L’idée étant qu’il faut une alliance électorale multiforme, avec un consensus pour appuyer un Jean-Luc Mélenchon premier ministre afin de conduire la coalition parlementaire si elle devenait majoritaire.

On remarquera en premier lieu que dans chacun des accords, il est question de l’Union européenne et que cela a été primordial dans les discussions (sauf pour le PCF). Il faut dire que Jean-Luc Mélenchon avait été très loin ces dernières années dans le phrasé populiste anti-Europe, alors qu’au contraire Génération.s, EELV et le PS sont des inconditionnels de « l’Europe » (une partie du PCF est également sur cette ligne pro-« Europe »).

Il est flagrant ici que La France Insoumise et le PCF ont capitulé en renonçant à critiquer l’institution européenne dans ses fondements. Certes, tous deux le faisaient sur un mode populiste et quasi-nationaliste, et pas de manière socialiste, donc réelle, mais il y avait l’idée que cela était incontournable.

C’est d’autant plus vrai aujourd’hui en mai 2022 que, depuis plusieurs semaines, l’Union européenne s’illustre par sa vassalité totale à la superpuissance américaine et à l’OTAN sur la question de la guerre en Ukraine. Cela n’est pas nouveau, mais c’est devenu évident, et surtout, indéfendable pour la Gauche (la vraie !).

La France Insoumise et le PCF s’en moquent, tout comme le PS, EELV, Génération.s. Ils n’en parlent pas, comme ils ne parlent pas de l’OTAN. Jean-Luc Mélenchon premier ministre et sa majorité parlementaire « NUPES » sortiraient-ils de l’OTAN, ou du commandement intégré de l’OTAN ?

Ou bien poursuivraient la guerre économique, culturelle et militaire contre la Russie ? Et d’ailleurs, quelle sera la position pendant ces 5 prochaines années, alors que les contradictions entre la superpuissance américaine et sa concurrente chinoise vont s’accentuer ?

Voilà un sujet fondamental, éminemment politique, qui permet concrètement de déterminer une position de gauche (la première, contre l’OTAN), et une autre qui ne l’est pas (la seconde, qui ne dit rien à propos de l’OTAN). Et l’option qui a été prise est celle de la contorsion social-populiste au sujet de l’Union européenne, en faisant croire que la France pourrait être dedans… Tout en n’y étant pas vraiment.

Les accords disent (sauf celui avec le PCF) que la France doit rester dans l’Union européenne et garder l’euro comme monnaie, mais… qu’elle peut choisir quelles règles européennes elle respecte ou non. Il faut « être prêts à désobéir à certaines règles européennes » est-il expliqué dans tous les accords, telle une bande d’enfants gâtés et capricieux voulant l’argent de poche des parents, mais ne surtout pas faire la vaisselle, ni ranger sa chambre.

On remarquera le jeu d’équilibriste dans la rédaction de l’accord avec le PS, qui en dit long sur la nature opportuniste et fourre tout de la « NUPES » :

« Du fait de nos histoires, nous parlons de désobéir pour les uns, de déroger de manière transitoire pour les autres, mais nous visons le même objectif : être en capacité d’appliquer pleinement le programme partagé de gouvernement et respecter ainsi le mandat que nous auront donné les Français. »

La seconde chose notable, c’est que les accords insistent sur une liste de revendications à prétentions sociales, avec une liste particulièrement détaillée dans l’accord avec le PS. Il y a à chaque fois la hausse du SMIC à 1400 euros, le retraite à 60 ans, le blocage des prix sur les produits de première nécessité, une « garantie d’autonomie pour les jeunes » (soit un revenu sans travailler ?). L’accord avec le PS précise l’abrogation de la loi El Khomri et des « contre-réformes du code du travail et de l’assurance chômage ».

La revendication « d’éradication de la pauvreté » est présente dans tous les accords, sauf celui avec le PS. Est-ce par rejet de l’utopie, ou bien par rejet du flou d’une telle formulation qui ne veut, il est vrai, pas dire grand chose ? Toujours est-il qu’il est fait comme si la crise n’existait pas, et qu’il n’est jamais parlé de capitalisme.

Le programme, c’est ouvrez les portefeuilles, l’argent va couler à flot grâce à toujours plus de dette publique « sociale ». Il est laissé entendre que la France connaît une grande vague de pauvreté et que ces gens sont là pour y remédier. Pourtant, le capitalisme tourne à plein régime dans un des pays les plus riches du monde, et les marchandises coulent à flot dans toutes les couches de la société, même les plus précaires. Le décalage avec la réalité est immense.

Anecdotique, mais révélateur, il y a cette petite phrase dans l’accord avec le PS :

« lutte contre l’ubérisation du travail avec la présomption de salariat pour les travailleuses et travailleurs des plateformes. « 

Cela dénote, car c’est une revendication très précise, alors que tout le reste est d’ordre général. Par les plateformes, il faut comprendre les plateformes de livraison de repas et de courses par des auto-entrepreneurs, presque toujours immigrés, très souvent sans statut légal de livreur, voire de présence légale sur le territoire français.

Une revendication de gauche devrait être évidemment l’éradication de ce type de « service », de ce business de la flemme qui pollue les villes avec des nuées de scooters ou de vélos roulant sans aucune lumière. Mais non, les « socialistes » et les « insoumis » trouvent cela très bien d’avoir des immigrés leur apportant un repas ou des courses à domicile, et souhaitent donc renforcer cela au point qu’il le précise dans leur accord général pour les élections législatives. Des domestiques ? Oui, mais avec un CDI !

C’est pathétique, et surtout très loin de la réalité concrète, objective, des classes populaires en France, et particulièrement de la classe ouvrière. Cela n’a rien de gauche, cela n’a rien d’un programme pour changer la vie.

Enfin, et surtout, il y a la question de l’écologie. Là, l’escroquerie est immense, et c’est même à peine croyable de voir que ces gens n’ont même pas fait semblant de s’y intéresser.

Il y a des choses à dire à foison, avec des grandes lignes nettes et précises à tracer sur des sujets fondamentaux. Par exemple sur les zones humides, qu’il faut sanctuariser, sur l’automobile, dont il faut préparer la fin du règne, sur les animaux en général, à propos aussi de la chasse, des zoo, des refuges, etc.

Il y a surtout le réchauffement climatique, et si on a une prétention écologique la moindre des choses est de présenter au moins dans les grandes lignes comment changer le bilan carbone de la France. Tel n’est pas le cas, bien au contraire, car l’écologie n’est qu’un prétexte. C’est du greenwashing électoral. Cela ne fait l’objet que d’une seule phrase, aussi floue qu’insignifiante, dans chacun des accords.

Celui avec le PS :

« L’affirmation d’un impératif de justice écologique, qui se décline à travers une démarche de planification, pilotée par de nouveaux indicateurs de progrès humain ainsi que la règle verte. »

Celui avec le PCF :

« Une véritable planification écologique et démocratique, par l’application de la règle verte. »

Celui avec EELV :

« Nous défendons ensemble la mise en place d’une véritable planification écologique par l’application d’une règle verte (ou d’une règle d’or climatique) pour répondre à l’urgence climatique et environnementale. »

Celui avec Génération.s :

« Nous défendons ensemble la mise en place d’une véritable planification écologique pour répondre à l’urgence climatique et environnementale. »

C’est lamentable, ces gens sont lamentables et même criminels, on ne peut que souhaiter qu’ils se prennent une immense claque électorale, tant l’escroquerie est immense. Et dire qu’il y a des gens pour soutenir une telle escroquerie morale, intellectuelle, culturelle, politique !

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Politique

La Gauche sauvera-t-elle la face aux élections législatives 2022 ?

La Gauche française est dirigée par des cancres politiques.

La Gauche s’est fait torpiller à l’élection présidentielle. C’est entièrement de sa faute, car elle n’a pas su convaincre, ni même simplement s’adresser aux gens. Il se pose maintenant la question de savoir quoi faire pour sauver la mise à l’Assemblée nationale, avec les élections législatives prévues pour le mois de juin 2022.

La France insoumise de Jean-Luc Mélenchon, dans la foulée de sa troisième place au premier tour de la présidentielle, a tenté de forcer la main à tout le monde et d’obliger au rassemblement unilatéral sous sa bannière. De surcroît, avec la prétention de pouvoir rafler la mise et d’obtenir une majorité de gouvernement.

Cela ne peut pas marcher évidemment, car chacun sait qu’il n’y a aucun report mécanique du vote « utile » qu’a été Jean-Luc Mélenchon vers un vote local pour tel ou tel député étiqueté, sous la bannière mélenchoniste, « Union populaire ». Cela vaudrait si Jean-Luc Mélenchon était président, mais pas en étant arrivé troisième, donc deuxième des perdants.

Seule une union large de tous les groupements de gauche, ou vaguement de gauche, ou issus de la Gauche, peut créer éventuellement une dynamique électorale, permettant un ralliement massif prenant effet sur les candidatures locales dans chaque circonscription. C’est ce que savait très bien faire le Parti socialiste en son temps, emmenant avec lui tout un tas de vassaux politiques, y trouvant chacun très bien leur compte.

La France insoumise de Jean-Luc Mélenchon saura-t-elle en faire autant ? Peut-être, mais le temps presse et rien de concret n’a abouti fin avril. C’est que la France insoumise paye chèr son positionnement magmatique, censé ouvrir la porte à n’importe qui, n’importe comment. Car en vérité, ce genre de chose à gauche suscite surtout beaucoup de méfiance, étant considérée comme floue. Et comme le dit l’expression (expression inappropriée car injustement méprisante pour les loups) : quand c’est flou c’est qu’il y a un loup.

Toujours est-il que c’est la France insoumise qui a la main, à défaut d’autre chose, tant toutes les autres forces sont ridiculement faibles, et isolées. Alors il y a des tractations, ou en tous cas il est parlé de tractations. Le PCF de Fabien Roussel (qui était avec Jean-Luc Mélenchon aux élections d’il y a cinq ans) tente de vendre à prix d’or son ralliement derrière une barrière commune, en faisant des comptes d’apothicaires.

Il faut additionner les 7 millions de voix de Jean-Luc Mélenchon aux 3 millions obtenues par Anne Hidalgo, Yannick Jadot et lui-même, pour faire 10 millions au moins, et facilement 11 millions, dit-il. Mais pour cela le PCF veut au moins 16 investitures, alors que la France insoumise ne lui en propose que 11, toutes concernant des « sortants ». C’est donc 5 qui manquent, le compte n’y est pas.

Du côté du Parti socialiste et d’Europe Écologie-Les Verts, le problème est bien plus politique. Il y a la considération, comme l’a fort habillement résumé le socialiste Jean-Christophe Cambadélis, que la proposition d’union ne porte pas tant sur une « coalition » que sur une « reddition ».

Et en effet, on entend tous ces gens se critiquer par médias interposés, mettre sur la table leurs divergences, poser des « lignes rouges », etc. Mais n’ont-ils jamais fait de politique avant ? Est-ce vraiment si difficile pour eux de discuter autour d’une table et de venir présenter publiquement quelques points majeurs pour créer des dynamiques locales dans chaque circonscription ?

D’ailleurs, on se demande bien pourquoi une telle coalition n’a pas existé avant. D’Europe Écologie-Les Verts à la France insoumise, du PCF au PS, en passant par Génération-s, Place publique, La Gauche républicaine et socialiste, La Gauche démocratique et sociale, etc., tous ces gens disent peu ou prou la même chose sur l’immense majorité des sujets. Ils portent les même valeurs, rejettent les mêmes valeurs.

La France insoumise d’ailleurs a tenté le coup, en mettant en avant seulement trois points incontournables : la retraite à 60 ans, la 6e République, la planification écologique.

Cela ne va pas chercher bien loin et c’est largement suffisant. Alors on peine à comprendre pourquoi ce n’est pas déjà réglé depuis une semaine au moins. La Gauche, ou ce qu’il en reste, semble se diriger vers une nouvelle humiliation électorale plutôt que de se retrousser les manches et y mettre un minimum du siens avec une ligne pourtant ultra minimaliste et facile.

Mais quelqu’un comme Julien Bayou préfère raconter :

« Nous c’est très simple : on a des convictions, elles sont à prendre ou à laisser. Nous sommes prêts à discuter d’une coalition, de grandes mesures programmatiques qui font un projet de gouvernement, simplement si vous me dites qu’il faut sortir de l’Europe et reprendre le nucléaire, ce sera sans nous, c’est très simple. »

Ok, mais alors dans ce cas, pourquoi ne pas plutôt faire alliance avec Emmanuel Macron, et ne pas faire perdre du temps à la Gauche ? A moins que ce soit là justement le rôle de tous ces gens : affaiblir la Gauche de l’intérieur, pour la faire disparaître ?

En attendant, il n’y a aucune dynamique démocratique locale qui soit possible, tant tout le monde est suspendu à d’hypothétiques négociations nationales, qui sont menées, ou prétendument menées, par de piètres dirigeants politiques.

Tout cela est bien fade, et très loin du peuple. Mais si encore cette Gauche avait des valeurs et s’accrochait à des principes solidement ancrés. Cependant, pas du tout, il n’y a aucune valeur, par exemple personne ne parle jamais des animaux, et il n’y aucun principe, le refus de la guerre et le rejet de l’OTAN devrait pourtant en être un fondamental.

L’addition s’annonce très salée pour juin prochain.

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Guerre

La Russie évoque le risque de guerre nucléaire alors que l’OTAN organise un sommet à Ramstein

La troisième guerre mondiale qui se prépare.

Mardi 26 avril 2022, le maire de Kiev Vitali Klitschko a fait démonter une statue symbolisant l’amitié entre les peuples d’Ukraine et de Russie. Située sous l’Arche de l’amitié entre les peuple, elle représente un travailleur russe et un travailleur ukrainien qui tiennent un symbole soviétique ; il est écrit « amitié entre les peuples ». Le maire de Kiev s’est félicité que pendant le démontage, la tête du travailleur russe soit tombée au sol… C’est « symbolique » a-t-il dit.

En effet, quel symbole d’affront contre les peuples et contre l’Histoire. Quel symbole d’engrenage guerrier et de haine nationaliste.

Dans le même ordre idée, le buste du maréchal Joukov, qui fut chef d’État-major de l’armée rouge pendant la seconde guerre mondiale, a été détruit à Kharkiv.

De fait, il n’y aura pas de retour en arrière tant la pression est immense, d’un côté comme de l’autre.

En Russie, il y a eu ces derniers jours une campagne médiatique, présentée comme le reflet d’une pression populaire, exigeant de frapper plus fort en Ukraine, en visant notamment les infrastructures ferroviaires. Il a ensuite été expliqué que le régime a cédé à cette pression populaire en procédant à des frappes allant dans ce sens, alors que ce n’était pas dans les plans initiaux de l’état-major.

Ce récit n’est pas forcément faux. Le régime russe a longuement présenté son opération spéciale en Ukraine comme visant à « libérer » la population du nazisme et du nationalisme anti-Russe, et à se prémunir de l’OTAN. Alors la population russe l’a pris au sérieux et exige maintenant d’aller au bout, et vite.

Sauf qu’en face, il y a effectivement l’OTAN, qui a totalement vassalisé l’Ukraine politiquement depuis 2014, et militairement depuis février 2022. Elle y déverse des tonnes et des tonnes de matériel de guerre, voire de conseillers spéciaux militaires, de mercenaires, pour ne surtout pas qu’il y ait un règlement rapide du conflit et une partition, par un traité.

De fait, d’une manière ou d’une autre, aucun des deux camps n’a intérêt ou la possibilité d’envisager une issue au conflit dans l’immédiat, alors ce ne peut qu’être l’escalade. C’est ce qu’a reconnu le ministre russe des Affaires étrangères, dans le cadre de la venue d’António Guterres le Secrétaire général de l’ONU à Moscou mardi 26 avril 2022.

Sergueï Lavrov s’est longuement exprimé sur le sujet, accusant directement et frontalement les États-Unis et l’Europe de vouloir mettre en place un monde « unipolaire » depuis des années, avec l’Ukraine utilisée comme base avancée anti-Russie, y compris sur le plan de la culture. Il a expliqué avoir évoqué avec António Guterres comment des pays comme la France manœuvraient pour mettre en place de nouvelles institutions internationales sans la Russie et les pays opposés aux États-Unis, remplaçant de fait l’ONU.

Il a expliqué que la Russie est prête aux pourparlers de paix, mais que l’Ukraine fait semblant de négocier la paix, alors qu’en fait il y a les Américains derrière pour jeter de l’huile sur le feu.

C’est alors qu’il a parlé de l’arme nucléaire, dans des termes effrayants, non pas car ils seraient menaçant de sa part, mais parce qu’ils reconnaissent de fait une situation menant au pire, et donc à une guerre nucléaire.

Il a rappelé la position russe, qui est le principe de l’inadmissibilité de la guerre nucléaire. Mais il a expliqué ensuite qu’il y a un risque d’emballement en raison de la situation :

« Je ne veux pas alimenter ce risque de manière artificielle. Beaucoup aimeraient cela. Mais le danger est grave, réel. Et nous ne devons pas le sous-estimer. »

En fait, Sergueï Lavrov considère concrètement (et à juste titre) que l’OTAN est en guerre avec la Russie, de manière indirecte, mais réelle :

« L’OTAN, en substance, est engagée dans une guerre avec la Russie via un intermédiaire et elle arme cet intermédiaire. Cela signifie la guerre. »

Un tel propos a une signification historique immense, c’est un jalon évident sur le chemin vers une troisième guerre mondiale.

Pendant ce temps les plus hauts représentant de l’administration américaine en ce qui concerne la Diplomatie et la Défense, après s’être rendus directement à Kiev la veille, étaient en Allemagne mardi 26 avril sur une base militaire américaine, celle de Ramstein, la plus grande base militaire américaine en dehors des Etats-Unis, d’une superficie de 1400 hectares, avec 52 000 militaires actifs.

Il a été expliqué que les États-Unis sont prêts à « remuer ciel et terre » pour faire gagner l’Ukraine contre la Russie, que tant l’Ukraine que ses alliés de l’OTAN croient fermement en une possibilité de victoire.

Et cette déclaration a été faite dans le cadre d’une réunion avec des représentants des ministères de la Défense et des états-majors des armées de 43 pays, dont la France. On parle ici des 30 pays de l’OTAN, ainsi que du Japon, de la Corée du Sud, de l’Australie, de la Nouvelle-Zélande, à quoi s’ajoutent Israël, le Qatar et la Jordanie, ainsi que le Kenya, le Libéria, le Maroc et la Tunisie.

Un grand optimisme est de rigueur, ce qui se lit d’ailleurs dans les médias, même Le Figaro parlant de la « perspective » de la victoire de l’Ukraine sur la Russie.

Pourtant, concrètement, sur le terrain militaire l’Ukraine n’a pas d’avancée significative et ne fait que subir les choix opératifs de l’armée russe. Cette dernière, de fait, n’est pas dans une guerre totale et mobilisant tout le pays, mais dans une grande opération militaire avançant lentement mais sûrement, avec tout un tas de précaution pour les évacuations humanitaires (massives), l’encadrement humanitaire des civils sur place, des frappes contre des objectifs très précis, des ratissages de quartiers entiers à la recherche des ennemis ukrainiens cachés, etc.

Autrement dit, à moins d’une intervention directe de la part de l’OTAN, l’Ukraine n’a aucun moyen de quoi que cela soit contre la Russie, en tous cas dans la partie orientale du pays. Donc, quand les États-Unis assument totalement la possibilité de victoire ukrainienne, cela ne peut qu’être par le renforcement de l’intervention de l’OTAN, et contre tout accords négociés sous l’égide de l’ONU.

Et c’est ce que reconnaît Sergueï Lavrov parlant d’un risque d’emballant menaçant d’une confrontation nucléaire.

Il ne s’agit pas ici d’être pro-Russe plutôt que pro-OTAN, ni même d’avoir de quelconques illusions sur la force et le rôle de l’ONU pour régler quoi que cela soit. Il s’agit d’envisager les choses rationnellement et sérieusement, en voyant la tendance irrémédiable à l’emballement dans un grand conflit guerrier mondial par ce qui est mis en place concrètement.

Ce qui se joue, ce n’est pas les décisions bonnes ou mauvaises de tels et tels dirigeants mondiaux, c’est une crise profonde de la société, du capitalisme, à l’échelle mondiale, qui fait que tout tend forcément vers la guerre pour un grand repartage du monde.

S’y opposer est un devoir, c’est même le dernier honneur de la Gauche, à moins de s’effondrer totalement et perdre plus de 100 ans d’acquis et de leçons du 20e siècle. S’y opposer, concrètement en France, cela signifie dénoncer l’OTAN et son rôle perfide, c’est donc aussi dénoncer le régime en France et son interventionnisme guerrier en Ukraine et contre la Russie.

Dénoncer la 3e guerre mondiale nucléaire qui se prépare ne doit pas être une position abstraite et lointaine, c’est au contraire une bataille concrète et immédiate ici en France, pour la paix, contre l’OTAN.

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Guerre

Les États-Unis lancent leur grande opération anti-chinoise

Les discours sont de plus en plus agressifs et militaristes.

Nous cessons de le répéter ici. La grande actualité mondiale est la grande bataille pour le repartage du monde qui se dessine, avec comme aspect principal la concurrence entre la superpuissance américaine, dominante, et la superpuissance chinoise en devenir, son challenger.

La guerre en Ukraine ne fait qu’exacerber les tensions existantes, avec quasiment chaque jour un nouveau palier qui est franchi dans les hostilités. Les États-Unis, puissance hégémonique, notamment en raison de la puissance du dollar, exigent que le monde entier s’aligne sur son discours et ses intérêts. Ils exigent que tout le monde rejette l’invasion russe en Ukraine en faisant allégeance à l’OTAN. Ce que la Chine ne fait pas, bien au contraire.

Depuis le début, elle n’a pas condamné l’opération russe, ni mit en place de sanctions. Au Conseil de sécurité de l’ONU, la Chine s’abstient dès qu’il y a un vote condamnant la Russie. Alors les Américains tapent du poing sur la table et désignent de plus en plus ouvertement la Chine comme étant l’alliée de la Russie, et donc l’ennemie des États-Unis. Et par extension, de l’Union européenne.

Le 13 avril, il y a eu une déclaration marquante de la secrétaire d’État américaine au Trésor Janet Yellen, menaçant la Chine sur cette question. Tout simplement, elle menace la Chine de faire la même chose qu’avec la Russie, c’est-à-dire de l’exclure du système économique mondiale organisé autour du dollar et de l’idéologie du libre échange.

« L’attitude du monde à l’égard de la Chine et sa volonté d’embrasser une intégration économique plus poussée pourraient bien être affectées par la réaction de la Chine à notre appel à une action résolue contre la Russie. »

La Chine de son côté ne fait rien contre ces menaces, car cela sert ses intérêts de puissance challenger. On peut même dire que la Chine profite de la situation pour abattre ses cartes et avancer sur ses positions. Mardi 19 avril, le ministère des Affaires étrangères de la Chine a officialisé la signature d’un accord-cadre de coopération en matière de sécurité avec le ministre des Affaires étrangères des îles Salomon.

On est là en plein jeu des grandes puissances. L’archipel situé dans le Pacifique est minuscule, avec moins de 700 000 habitants, et dépend historiquement de la couronne d’Angleterre. Mais la Chine s’y positionne depuis des années, au grand dam de l’Australie, et il y a à chaque fois des reculs et des avancées, dans un sens ou dans l’autre.

Cette fois, c’est l’Australie qui perd, à tel point que son vice-Premier ministre Barnaby Joyce a dit de manière très significative : « Nous ne voulons pas d’un petit Cuba au large de nos côtes. » Alors les États-Unis s’en sont mêlés, car ils ne veulent évidemment pas d’une base avancée chinoise dans cette partie du Pacifique.

Les discours sont d’une grande violence, assumant totalement la question de la guerre. Une délégation américaine s’est rendue sur place et a communiqué vendredi 22 avril sur le fait que les États-Unis riposteraient « en conséquence » en cas de « présence militaire (chinoise) permanente » sur l’île.

Dans le camp américain, la France n’est pas en reste, avec le ministère des Affaires étrangères dénonçant « l’opacité des dispositions de l’accord » entre la Chine et les îles Salomon, dénonçant ouvertement les « ambitions chinoises comme acteur de la sécurité régionale », comme si la Chine était par définition un ennemi, quoi qu’elle fasse.

Et c’est comme cela chaque jour ou presque, avec à chaque fois un nouveau prétexte américain pour dénoncer le camp chinois, ou inversement un prétexte chinois pour s’affirmer comme puissance rivale du camp américain. Tout cela se renforce irrémédiablement, dans un tourbillon de propagande et d’escalades menant à la guerre.

Exemple marquant d’escalade, la DIA, l’agence américaine spécialisée dans le renseignement militaire à l’étranger, explique que la Russie et la Chine possèdent des lasers en mesure de neutraliser les satellites situés en orbite basse autour de la Terre, et bientôt seraient en mesure d’atteindre les satellites plus hauts, notamment le système GPS. La Chine de son côté assume tout à fait de travailler en ce sens. Tout comme la Russie, qui a déjà déployé un missile antisatellite avec un test en conditions réelles en novembre 2021.

De la même manière, la Chine pousse pour affirmer avoir les moyens de rivaliser avec les États-Unis, avec récemment la question d’une arme anti-navire de type hypersonique. Mardi 19 avril encore, des images d’un tel missile ont opportunément fuitées sur internet via des canaux chinois.

Cela est ensuite assumé dans la presse chinoise à destination occidentale, depuis Hong Kong, avec un analyste militaire chinois de Pékin vantant une capacité de déni et d’interdiction d’accès dans le but de contrer l’hégémonie navale américaine, ce qui sous-entend la capacité à détruire un porte-avion.

Puis il y a un chercheur à l’institut de science et de technologie militaire Yuan Wang, donc un personnage lié au régime chinois, qui explique que si la Chine communique là-dessus, c’est en fait pour empêcher Taïwan de s’imaginer que la situation mondiale est une opportunité pour elle. Ce chercheur dit :

« Pékin craint que l’assistance militaire américaine à l’Ukraine et une récente visite d’une délégation du Congrès américain à Taïwan ne fassent croire à Taipei que Washington pourrait fournir la même aide en cas de conflit entre le continent et Taïwan. »

C’est du billard à trois, quatre, cinq bandes. Les États-Unis font croire que la Chine a les capacités de faire ceci, alors que la Chine gonfle les muscles sur cela pendant que les Américains nient autre chose, pour enfoncer encore plus le clou sur un autre aspect, ce que la Chine reprend et déforme pour aller dans son propre sens, etc.

En tous cas, c’est pour l’instant surtout la guerre en Ukraine qui cristallise ces tensions, et il faut bien avoir conscience du fait que la situation est extrêmement tendue, que la rivalité entre les deux camps et de plus en plus assumée et irrémédiable.

Vendredi 22 avril, la vice-secrétaire d’État Wendy Sherman était à Bruxelles pour, avec les européens, mettre à nouveau la pression sur la Chine et dénoncer son soutien objectif à la Russie, parlant de « manipulation répétée de l’information par la Chine, notamment en propageant la désinformation de Moscou » sur la guerre en Ukraine.

Le camp américain est ultra agressif, n’acceptant aucune remise en cause du discours et de la vision des choses de l’OTAN. Mais ce n’est pas que de la diplomatie vague et lointaine, il y a des menaces concrètes.

Wendy Sherman a ouvertement parlé de possibilité de sanctions :

« Nous avons été très transparents (envers la Chine à propos de) ce que nous faisons (contre la Russie) en termes de sanctions, pour donner une idée du menu dans lequel nous pourrions choisir si la Chine décidait d’apporter un soutien matériel ».

De tels propos sont extrêmement grave, ils devraient faire la Une de l’actualité et être dénoncés massivement par la Gauche, vent debout contre la guerre mondiale et pour la paix entre les peuples.

Les États-Unis viennent directement sur le sol européen pour propager une hostilité hyper agressive contre la Chine et pousser presque ouvertement les Européens à l’affrontement. Mais il n’y a rien, absolument aucune opposition, la guerre mondiale se prépare tranquillement sans aucune remise en cause. Au contraire, tout porte à croire que ce sera bientôt l’Union sacrée pour la guerre, comme avant 1914. Cette fois pas contre l’Allemagne, mais la Chine. Avec la guerre contre la Russie comme première étape.

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Politique

« Marine le peuple » balayée par « Emmanuel McKinsey »

Nier la crise ne la fera pas disparaître.

Le temps de sa (longue) campagne présidentielle, Marine Le Pen a cédé la présidence de son parti à Jordan Bardella. Celui-ci est un excellent orateur et on imagine qu’il aurait produit une bien meilleure prestation qu’elle en débattant face à Emmanuel Macron, mais là n’est pas le sujet. Il y a par contre un bon mot, typiquement français dans sa forme (à la fois subtile et grotesque, à la fois léger et piquant), qu’a sorti Jordan Bardella pour lancer la campagne de l’entre deux tours : « Emmanuel McKinsey, ou Marine Le Peuple ! »

C’est très bien vu, cela résume exactement ce deuxième tour de l’élection présidentielle et a fortiori le débat du mercredi 20 avril 2022. Emmanuel Macron assume totalement la posture qui lui a été façonnée et dessinée par son entourage issu du cabinet de conseil McKinsey, ainsi que de tout un tas de riches donateurs en 2017 issus du monde de l’entreprenariat. C’est très facile à voir et à comprendre, son libéralisme à prétention rassurante et « inclusif », à l’américaine, en est exactement le produit. C’est, autrement dit, de la pure communication. Parler d’Emmanuel McKinsey est pertinent.

En face, il y a donc Marine Le Pen, censée représenter le peuple. Évidemment, ce n’est pas vrai dans le fond. Mais il y a toutefois, dans la forme, quelque-chose de tout à fait conforme et cohérent avec la situation des classes populaires françaises. Clairement, Marine Le Pen a choisi d’incarner une femme française moyenne, ou « de base » comme cela se dit parfois, de manière péjorative mais significative. Cette Française « de base » donc, est mère de famille, concernée par la quotidien économique, son « pouvoir d’achat », sa liberté de mettre ou ne pas mettre le masque, l’insécurité, sa désolation face aux éoliennes ou aux femmes voilées, etc.

En fait, en tentant d’incarner « le peuple », Marine Le Pen a surtout incarné la rancœur, qui est un sentiment extrêmement puissant et répandu dans la France populaire de 2022. Toutes ses interventions, presque chacune de ses réactions à Emmanuel Macron et ses propositions lors du débat, n’ont consisté qu’en de la rancœur face à ce qu’il a représenté pendant cinq ans, voir dix ans si l’ont compte qu’il est dans la lignée directe de François Hollande.

En ce sens, le bon mot « Marine le peuple » de Jordan Bardella illustre tout à fait la situation. Et comme on ne gouverne pas un pays comme la France avec de la rancœur, alors Marine Le Pen s’est faite balayer par Emmanuel Macron, solide, extrêmement sûr de lui et de sa légitimité. Suffisamment arrogant pour apparaître crédible, suffisamment courtois pour ne pas apparaître hostile.

Disons la chose d’une autre manière, beaucoup plus politique. En fait, Marine Le Pen n’a pas assumé son programme. Elle n’assume pas d’être nationaliste ; sa prestation lors du débat était à peine gaulliste, alors qu’elle est censée être une néogaulliste, qu’elle a théorisé cela depuis des années, et mis en pratique cela depuis 2012, soit dix années.

C’est flagrant surtout sur la question de la Russie et de la guerre en Ukraine. Si Marine Le Pen assumait son programme, si elle assumait d’être une néogaulliste, elle aurait dénoncé vent debout Emmanuel Macron comme marionette américaine vendue à l’OTAN, voulant entraîner la France dans une guerre à la Russie.

Si Marine Le Pen assumait d’être une gaulliste à prétention sociale, elle aurait torpillé Emmanuel Macron avançant ses bons chiffres du chômage, en lui répondant que cela est maquillé par le fait qu’énormément d’emplois sont en fait des CDD ou des missions d’intérim, très précaires, mal payés, ne permettant pas une stabilité au capitalisme français.

Marine Le Pen en a été incapable, car ce qui se joue en réalité est bien trop important pour elle. En effet, derrière l’apparente solidité du système, autrement dit la grande stabilité, en surface, du capitalisme en France, il y a une crise monstrueuse qui se prépare.

Face à cela, il n’y a pas le choix, il faut assumer des grandes idées, il faut cogner fort. Soit avec le Socialisme, en s’appuyant sur la Gauche historique, comme nous le proposons, soit avec le fascisme, ce que Marine Le Pen n’a pas osé faire, alors que c’est pourtant sa ligne.

Marine Le Pen ne pèse donc pas bien lourd avec son nationalisme light, son gaullisme timide, face à un Emmanuel Macron très arrogant dans sa défense des institutions, de son mandat, de sa politique. En effet, il croit profondément en ce qu’il raconte. Il croit très probablement que l’insécurité n’est qu’un sentiment et que les chiffres sont faussés par le fait que de plus en plus de femmes portent plainte contre leurs maris grâce à ses mesures. Il croit vraiment que les 600 milliards de dettes « covid », qui s’ajoutent à l’immense dette structurelle de l’État français, ne sont pas un soucis. Il croit vraiment que la guerre contre la Russie menée par l’OTAN est une bonne chose, etc.

Alors il passera, il sera (très) probablement à nouveau président pendant cinq ans, car la rancœur « populaire » de Marine Le Pen ne pèse pas lourd face à son assurance bourgeoise.

La question maintenant est : faut-il s’en réjouir, ou le déplorer ? Évidemment, on ne peut qu’être rassuré face à cette évidence que le fascisme en France n’est pas mûr, que le nationalisme comme proposition ne s’incarne pas et que Marine Le Pen va très probablement échouer.

Mais pour autant, il ne suffit pas de nier la crise pour la faire disparaître. Alors la situation va se tendre, politiquement, culturellement, socialement, militairement. Et il y a, après Marine Le Pen, toute une nouvelle génération en embuscade pour proposer une nouvelle et solide proposition nationaliste, tendanciellement fasciste, pour le pays.

Concrètement, l’échec de Marine Le Pen en 2022 fera le lit des succès à venir des Marion Maréchal, Guillaume Peltier, Nicolas Bay, Jordan Bardella, etc.

Mais inversement, la crise fait que la Gauche historique, celle de la classe ouvrière et de la bataille internationale pour le Socialisme et la paix entre les peuples, va de nouveau être à l’ordre du jour, gagner des positions, devenir crédible.

C’est sur cela qu’il faut compter, principalement. Et il ne faut pas s’imaginer que c’est très lointain. Rien qu’avec la situation politique internationale, il y a quelque chose d’explosif. Emmanuel Macron va (très) probablement être réélu triomphalement dimanche 24 avril 2022, et cela sera un signal très fort pour l’OTAN, et toute la clique des dirigeant prônant la guerre à la Russie.

La tension va donc continuer de monter, la crise va l’emporter, dans tous les domaines, à commencer par la guerre et la crise économique l’accompagnant. Telle est la véritable actualité, ce à quoi il faut profondément et sérieusement s’intéresser. Maintenant, tout de suite !

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Politique

Présidentielle 2022 : le programme national et social de Marine Le Pen

National et social, mais pas socialiste.

A plusieurs reprises, Eric Zemmour a qualifié le programme de Marine Le Pen comme étant de gauche. En effet, selon le premier, qui est tenant d’une droite libérale et ouvertement anti-ouvrière, il faut assumer à fond de dégommer tout ce qui est bien public, et ce au profit du privé, de l’entreprenariat et des entreprises en général.

Ce n’est pas l’approche de Marine Le Pen qui relève pour sa part du gaullisme et qui a une orientation qu’on peut et doit qualifier de néogaulliste. Cela signifie qu’elle tiendra toujours à appuyer sur le fait d’être concernée par les préoccupations économiques des classes populaires et de la petite-bourgeoisie, symboliquement avec une approche sociale des choses, concrètement de manière corporatiste.

Autrement dit, elle défend un État fort, qui ait une vocation protectrice vis-à-vis des personnes les plus faibles, qui soit acteur de l’économie, quitte à envisager une forme de « planification », ou plus exactement de prévision au service des grandes entreprises, dans certains secteurs. Cela n’a rien de nouveau, ni de soviétique, c’est l’essence même du gaullisme, qui organise une sorte de fusion entre l’État et les grandes entreprises monopolisant des pans entiers de l’économie.

Un tel programme rend hystérique un libéral tenant d’une droite classique (et dure) tel Eric Zemmour, qui pour sa part considère que par principe, tout ce qui relève de la puissance publique est négatif, que tout ce qui relève de l’État, en dehors des fonctions régaliennes (police, justice, armée et administration générale du pays), est forcément mauvais.

Ainsi, Marine Le Pen n’est pas du tout de gauche et ne s’inscrit aucunement dans la perspective historique de la Gauche. Être de Gauche, cela signifie se battre pour le Socialisme, c’est-à-dire une société où ce sont les ouvriers qui ont le pouvoir, avec une bourgeoisie qui est mise au pas pour disparaître en tant que classe. Être de Gauche, cela signifie donc assumer la lutte de classe, contre la bourgeoisie.

Tel n’est pas le cas de Marine Le Pen, qui n’envisage pas, au contraire, de s’en prendre à la bourgeoisie en tant que classe, et d’assumer la prise du pouvoir par la classe ouvrière. Pour Marine Le Pen, il n’y a pas de contradiction entre le fait d’assumer un État ayant une vocation sociale et protectrice, et en même temps d’assumer vouloir servir les entreprises, et donc le développement de la bourgeoisie dans la société.

Cela amène à des incohérences, comme par exemple le fait de vouloir baisser la TVA (à 5,5%) sur l’énergie. Si Marine Le Pen était de Gauche, elle ne chercherait pas d’abord à faire baisser des recettes fiscales (et donc baisser le revenu public, commun), mais s’en prendrait d’abord aux grandes entreprises comme TotalEnergie pour rogner sur ses profits (16 milliards de dollars de bénéfices en 2021).

Sur de nombreux aspects, le programme de Marine Le Pen est de fait très libéral, dans une perspective très similaire à celle d’Emmanuel Macron ou Valérie Pécresse, tout en n’allant pas aussi loin qu’Eric Zemmour. Voyons ainsi les principales mesures concernant l’économie, le « pouvoir d’achat », les revenus de la population, mises en avant par Marine Le Pen.

Certaines mesures ont une vocation sociale, tournées vers les classes populaires ou dites « moyennes » :

– réindexation des retraites ;

– doublement de l’allocation pour les familles isolées ;

– déconjugalisation de l’allocation adulte handicapé ;

– baisse les droits de succession et suppression en deçà de 300 000 euros de biens immobilier.

On pourrait ajouter la suppression de la redevance télévisuelle, mais il s’agit là surtout au fond d’une question culturelle et « sociétale » plutôt que strictement économique.

Tout le reste de son programme économique par contre est orienté vers la bourgeoisie, la défense de la bourgeoisie, de l’accumulation de capital par la bourgeoisie, et non pas de la société et du bien commun.

La mesure phare actuellement est la baisse de la TVA sur tous les produits énergétiques, qui comme dit n’a pas de sens social. Il y a ensuite la suppression de l’impôt sur le revenu pour les moins de 30 ans. Ce n’est pas une mesure de gauche : pourquoi des jeunes bourgeois ne contribueraient-ils pas au budget de la collectivité de part leur revenu ? Ce n’est pas normal. Si les jeunes de moins de trente ans ont un revenu suffisant et peuvent participer à l’impôt sur le revenu, c’est au contraire une bonne chose d’un point de vue de Gauche.

Il y a ensuite des mesures incitatives pour soutenir les entreprises à augmenter les salaires de 10 %. Ici, « l’incitation » consiste en fait à baisser les charges, et donc la contribution des entreprises (et de leurs dirigeants, cadres, etc.) à la collectivité. Ce n’est pas une mesure de gauche.

Elle propose également la suppression de l’impôt sur la fortune immobilière, car c’est un « impôt sur l’enracinement ». Marine Le Pen ne veut pas s’en prendre aux bourgeois français qui possèdent une fortune immobilière. C’est très clair.

Elle veut mettre en place un impôt sur la fortune financière, reprenant l’assiette de l’ancien ISF à laquelle sont ajoutée les œuvres d’art acquises depuis moins de dix ans, mais de laquelle sont enlevés la résidence principale ou unique pour le cas de ceux qui sont locataires de leur résidence principale, les monuments historiques et, bien sûr dit-elle, l’outil de travail.

C’est là encore très clair, il s’agit de ne surtout pas s’en prendre à la bourgeoise et de ne pas rétablir l’impôt de solidarité sur la fortune qui concernait justement les grandes villas ou grands appartements parisiens, les entreprises familiales, etc.

Dans le même genre, pour garantir la transmission du patrimoine bourgeois dans les familles, elle veut les droits de succession pour les entreprises, si les descendants s’engagent à ne pas céder l’entreprise héritée pendant 10 ans.

En fait, Marine Le Pen, si elle veut un État fort, elle est aussi, voire surtout, intéressée par un capitalisme fort. Les entreprises, les entreprises, les entreprises : voilà ce qui l’intéresse. Et voici donc sa mesure la plus significative sur la question économique : « diriger l’épargne des Français vers l’investissement privé des entreprises » en créant un fonds souverain français, rémunéré de 2 % par an, pour que les Français deviennent somme toute tous des bourgeois et investissent dans « des entreprises stratégiques ».

Elle dit ainsi que les Français doivent devenir « actionnaires de la Maison France. »

Ce l’inverse d’un point de vue de Gauche, et c’est précisément ce qui fait d’elle une nationaliste puisqu’elle prétend que la question sociale se résoudrait grâce à un capitalisme « national », c’est-à-dire tourné vers son propre pays et hermétique/réfractaire aux capitalismes étrangers.

Dans la même veine, Marine Le Pen s’intéresse beaucoup aux petites entreprises et a des cadeaux à leur faire : suppression de la cotisation foncière des entreprises (CFE) et, pour ce qui concerne des « zones de relocalisation », suppression de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S). Cela représente, selon son chiffrage, pas moins de 10 milliards d’euros de cadeau à ces entreprises, et donc d’argent en moins pour la collectivité.

Voilà qui est tout à fait de Droite, tout à fait conforme au capitalisme, aux intérêts de la bourgeoisie, petite, moyenne, et même grande, qui n’est pas touchée par Marine Le Pen. Jamais elle n’envisage que son gouvernement oblige l’augmentation des salaires pour les ouvriers et les employés. Jamais elle n’envisage que son mandat serve à une meilleur représentation dans la société des ouvriers et des employés.

Marine Le Pen est ainsi une néo-gaulliste, proposant non pas simplement de moderniser le capitalisme comme Emmanuel Macron, mais de le ré-impulser.