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Politique

Hauts-de-France: l’union autour de Karima Delli ou le suicide anti-populaire

Soutenir Karima Delli dans les Hauts-de-France, c’est tourner le dos aux travailleurs. C’est littéralement suicidaire.

« L’union de la gauche, c’est possible ! » : c’est la réaction de l’hebdomadaire L’OBS à l’union électorale PS-PCF-LFI-EELV pour les régionales de juin 2021 dans les Hauts-de-France, la députée européenne EELV (et présidente de la commission du transport et du tourisme au Parlement européen) Karima Delli étant la tête de liste.

Sauf qu’il n’y a rien qui soit de Gauche là-dedans. Il suffit de lire le communiqué commun de cette union pour le voir. Le climat, l’emploi, changer la vie des gens, cela ne veut strictement rien dire alors qu’on est en pleine crise sanitaire, que le peuple se tourne vers Marine Le Pen parce qu’il espère des changements très profonds, que le capitalisme est en crise et qu’en plus les grandes puissances vont dans le sens de la guerre !

Faut-il que la Gauche gouvernementale soit composée de bobos pour se placer dans les Hauts-de-France derrière quelqu’un qui, sur son compte Facebook, pour le 8 mars, journée de la femme, propose la vidéo d’une interview d’une patronne de pêche, celle d’une cheffe d’entreprise racontant comment lancer une « boîte », celle d’une étudiante en sociologie parlant d’une « société patriarcale », celle d’une directrice artistique qui fait des astuces Business et Motivation…

C’est une blague, jamais les travailleurs n’abandonneront l’extrême-Droite pour une telle candidate. C’est du suicide.

Europe Ecologie Les Verts a de plus très clairement comme ambition de faire de la Gauche son satellite. L’idée est que la France est en majorité de droite ou libérale, par conséquent seul un candidat libéral d’EELV peut l’emporter à la présidentielle, et donc toute la Gauche gouvernementale doit prêter allégeance.

La Gauche gouvernementale pourrait dire qu’il est hors de question de liquider sa propre histoire, mais l’attrait des élections est trop fort et elle a donc choisi de se soumettre. C’est inacceptable.

Une autre interprétation est impossible, car les Hauts-de-France sont historiquement un bastion populaire qui a toujours puissamment irrigué la Gauche. Le PCF prétend avoir un candidat à la présidentielle de 2022, La France Insoumise entend lever un nouveau mouvement populaire… De telles prétentions s’avèrent mensongères si dans le principal endroit de France où la Gauche peut faire exploser la situation, on se place derrière EELV !

Quand on pense en plus que La France Insoumise se veut totalement opposé aux socialistes, alors qu’il accepte un accord électoral avec comme découpage des places un tiers d’écologistes, un tiers de socialistes et le reste pour le PCF et La France Insoumise ! C’est une capitulation totale et la raison en est toute trouvée : il ne s’agit pas de faire triompher idées, mais de chercher des configurations pour avoir plus de poids lors de la présidentielle et pour une participation gouvernementale.

N’ayant pas de principes, la Gauche gouvernementale raisonne en termes d’opportunités. C’est un suicide dans un contexte de crise et ce n’est pas comme cela que les travailleurs seront arracher à l’extrême-Droite, sans parler d’affirmer un programme de Gauche pour la démocratie et le peuple.

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Politique

Régionales en Hauts-de-France : union PS-PCF-LFI-EELV autour de Karima Delli

Une unité électorale a été réalisée pour les régionales des 13 et 20 juin 2021 dans les Hauts-de-France.

Voici le communiqué de presse au sujet cette union électorale qui marque une soumission de la Gauche gouvernementale à EELV, un suicide anti-populaire. Suit le communiqué de Génération-s qui soutient l’union électorale.

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Guerre

Militarisme: la France réalise le premier exercice militaire spatial européen

La France contribue à la tendance à la guerre, et en premier lieu dans l’espace.

La militarisation de l’espace est un aspect essentiel de la tendance à la guerre. Et la France est au premier rang ici avec un exercice militaire spatial, le premier d’un pays de l’Union européenne. L’exercice a été présenté comme suit :

« Piloté par le Commandement de l’espace (CDE) de l’armée de l’Air et de l’Espace (AAE), cet exercice tactique et opératif d’entraînement aux opérations spatiales militaires se déroule au Centre national d’études spatiales (CNES) à Toulouse.

AsterX rassemble une cinquantaine de participants dont les experts opérationnels des différentes unités du CDE : le Centre de commandement et de contrôle des opérations spatiales (C3OS) de Paris, le Centre militaire d’observation par satellite (CMOS) de Creil, et le Centre opérationnel de surveillance militaire des objets spatiaux (COSMOS) de Lyon. »

Le nom ridicule de l’exercice, qui vise à le rendre « sympathique » par la référence à la bande dessinée Astérix avec ses Gaulois beaufs, fait également référence au premier satellite français, Astérix, lancé en 1965. Ce nom choisi en 1965 fut choisi pour masquer le nom initial, A-1, pour Armée-1.

Le satellite Astérix n’avait en effet qu’une seule fonction : fournir des données sur son lanceur mis en place par le Centre interarmées d’essais d’engins spéciaux. On est ici dans le développement des missiles balistiques inter-continentaux, en parallèle avec la recherche spatiale, l’un n’allant pas sans l’autre.

Désormais les choses sont encore plus ouvertement assumées. Le colonel Christophe Michel, directeur de l’exercice « AsterX 2021 », a harangué ses troupes lors de l’inauguration de l’exercice, qui dure du 8 au 12 mars 2021, en concluant de la manière suivante :

« Vous êtes des combattants du spatial. »

C’est totalement fou : les militaires présentent ouvertement leur bellicisme et il n’existe strictement aucune opposition à ce niveau. Cet exercice est d’ailleurs un vrai wargame. Les quatre jours d’exercices résument quatre semaine de bataille spatiale, avec 10 000 objets spatiaux, 5 applicatifs opérationnels,18 événements spatiaux.

Il n’est nul besoin de préciser que la principale cible d’un tel wargame est la Russie. Officiellement, ce n’est pas dit tel quel :

« Le scénario spécialement imaginé va s’intensifier : sur un continent fictif, une crise géopolitique prend progressivement de l’ampleur entre deux régions. L’objectif : surveiller l’activité et répondre aux possibles attaques spatiales. »

Sauf que dans le scénario, la France n’est pas l’une de ces deux régions : elle a une alliance avec l’un des deux protagonistes et intervient pour l’épauler. D’où on l’aura compris la présence de représentants de l’armée américaine – de la Space Force mise en place par Donald Trump – pour assister au wargame, avec à l’arrière-plan la ligne du nouveau président américain Joe Biden de briser la Russie avant de s’attaquer à la Chine. Des représentants allemands sont également présents.

D’ailleurs, le Commandement de l’espace de l’armée de l’Air et de l’Espace – c’est le nom officiel depuis 2020 – centralise ses forces à Toulouse, lieu du wargame, et dans cette même ville va s’installer dans les deux ans le Centre d’excellence de l’OTAN pour le domaine spatial. C’est là une chose inacceptable et ce serait un suicide de la Gauche que de ne pas combattre la mise en place d’un tel centre.

Et il n’est guère difficile de deviner ce qui se trame : il y a la volonté d’affronter la Russie dans des domaines bien précis. Il faut également se rappeler de la récente provocation militaire française dans la région de la mer noire. Tout se tend de plus en plus et la France est en première ligne dans la militarisation, dans la mise en place des perspectives concrètes de guerre.

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Politique

Allemagne: la Gauche historique balayée dans Die Linke

Les courants de la Gauche historique ont perdu pied dans le principal parti de la gauche de la Gauche en Allemagne.

Die Linke est le parti à gauche des socialistes en Allemagne ; il est né en 2007 des restes du parti dominant au sein de la République Démocratique Allemande et d’une scission de gauche des socialistes à l’Ouest. Sa ligne est celle d’une sorte d’alliance socialiste-communiste pour un socialisme démocratique, avec comme identité la Gauche historique. Il est à ce titre opposé au régime, même si son approche est réformiste.

Dans les sondages, Die Linke est à 8%, les Socialistes et les Verts tous les deux à 17%. La pression pour une « grande coalition » de ces partis est ainsi très grande. Les tenants de la Gauche historique refusent d’écouter les sirènes gouvernementales, au nom des principes, mais les courants post-modernes pensent pouvoir « peser » sur les questions sociétales… D’où un renversement de majorité au congrès (réalisé en ligne) de Die Linke de la fin février 2021, avec des conséquences ébranlant profondément ce parti depuis, au point que la question d’une scission est sur la table.

En effet, sur les 44 membres de la direction, aucun ne relève des courants de la Gauche historique ; en pratique cette dernière ne représente plus que 20% de Die Linke, principalement à travers :

  • la Plate-forme communiste, qui veut que le marxisme soit assumé, avec une culture très liée à celle de la RDA (Sahra Wagenknecht en est issue) ;
  • la Gauche socialiste, dont l’esprit est à peu près celui du programme commun français de 1981.

La Gauche historique a été battue par les multiples autres courants post-modernes appuyés par les « centristes » de la « gauche en mouvement » dont l’objectif est très clairement la participation à un gouvernement avec les Socialistes et les Verts. Un important soutien à cette démarche est la Gauche anticapitaliste, qui rassemble des gens très à gauche, mais dans un esprit éclectique, souvent philo-trotskiste.

Autrement dit, il y a un véritable conflit de ligne. Il y a d’un côté ceux pour qui Die Linke ce sont des valeurs bien ancrées et d’autres pour qui c’est un levier « émancipateur ». Les tenants de la Gauche historique posent de ce fait la question de la scission de manière ouverte notamment en raison de la question du militarisme et de l’OTAN. Pour eux, il est hors de question d’accepter la « neutralité » de l’État et du régime, pas question de cautionner l’armée allemande.

En théorie, le congrès ne modifie pas ce positionnement, dont les tenants de la Gauche historique se veulent les garde-fous. En pratique, le basculement est fait. Car tel n’est pas du tout l’essentiel pour les courants comme la Gauche émancipatrice, le Réseau de la gauche réformiste, etc., pour qui ce qui prime, ce sont les réformes sociétales. Entre maintenir des valeurs « passéistes » et accepter l’exigence des Socialistes et des Verts de soutenir l’armée allemande et l’OTAN, le choix est fait discrètement mais sûrement…

On trouve à l’arrière-plan l’expression d’un changement de génération. Les nouvelles générations, largement influencées par les courants post-modernes, se situent en dehors des traditions du mouvement ouvrier et sont de ce fait étrangères à la Gauche historique. Il y a également un poids croissant des milieux petits-bourgeois, au grand dam des tenants de la Gauche historique qui pensent qu’à continuer comme cela Die Linke se coupera entièrement de la classe ouvrière.

Il y a également la question Est-allemande. Il y a dix ans, la moitié des 60 000 membres vivait dans l’Est du pays, désormais ce sont 38%. Die Linke s’est toujours appuyé largement sur des bastions Est-allemands, désormais il a réussi à intégrer le paysage allemand en général, mais au prix d’être devenu un mouvement « témoignage » sans perspective stratégique.

D’où les deux options : revenir aux fondamentaux et surtout à la classe ouvrière, ou aller dans un sens de participation gouvernementale comme satellite des Socialistes et des Verts.

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Société

Les femmes ont besoin de principes pour se protéger du cannibalisme social

Le capitalisme propose une société « ouverte » qui est le masque du spontanéisme profitant forcément à la décadence, notamment aux dépens des femmes.

L’agression de féministes lors d’un cortège le 7 mars 2021 est une énième expression du caractère nihiliste du sponténisme d’ultra-gauche, qui se prétend plus radical que tout et foule perpétuellement aux pieds les principes démocratiques. On lit de manière fort juste dans l’article de Charlie Hebdo Quand des « antifas » s’en prennent à des féministes lors d’une manifestation que:

« Sur place, on a pu constater en fin d’après-midi qu’un des membres de ce groupe menaçait même d’envoyer une bouteille de verre sur les militantes.

Ce ne serait pas drôle sans un gloubi-boulga idéologique. Les « antifas » accusent aussi les militantes présentes d’être transphobes. Marguerite Stern, ancienne Femen connue pour ses propos parfois controversés sur les trans, et qui tenait une pancarte « Vive le sexe féminin », a été l’objet d’attaques. Elle a même reçu en message privé ce genre de menaces : « Ne te pointe pas à la manif si tu ne veux pas recevoir du sperme de meuf trans dans la tronche . » Du grand féminisme. »

Gloubi-boulga idéologique : l’expression est bien choisie. Car il n’y a rien d’intelligent, rien de construit, aucun appui historique ou culturel. C’est seulement de la prétention, de la vanité viriliste ou estudiantine. Et c’est pourquoi la Femen Inna Shevchenko – les femens dont elle fait partie ont également été agressées – a tort de dire :

« Enfin, indépendamment de mon admiration et de ma solidarité avec toutes les féministes, je suis terrifiée de voir l’orthodoxie idéologique croissante au sein du mouvement féministe maintenant aussi en France. Je suis terrifiée par tous les dogmes… et en cette #JourneeDesDroitsDesFemmes j’espère que le féminisme ne deviendra pas prisonnier du dogmatisme et de la polarisation. »

C’est erroné de dire cela. Car qui peut se permettre justement l’absence de dogmes, de valeurs, de principes ? Ceux qui abusent, justement. Les femmes perdent toujours quand il n’y a pas un cadre bien établi. Il est étonnant qu’Inna Shevchenko ait d’ailleurs une telle conception libérale alors qu’en même temps elle constate que :

« Les racines de notre combat [celui des Femen] viennent d’Europe de l’Est, d’Ukraine, nous n’avons pas une vision romantique de la prostitution. »

Car pourquoi l’Ukraine a-t-elle été transformée en bastion international de la prostitution ? Justement parce qu’il n’y avait plus de cadre social, plus de « dogme », c’est-à-dire de valeurs bien définies. Et dans ce chaos complet, la prostitution l’emporte. C’est ce qu’a cherché à montrer notamment le réalisateur Lukas Moodysson dans le film de 2002 Lilya 4-ever.

Dès qu’il n’y a plus de cadre, le cannibalisme social se répand. Les profiteurs se lancent, cherchant à utiliser les autres, à les exploiter. Et au lieu d’avoir des valeurs positives, culturelles, tournées vers les animaux et pacifiques, on a le clan, la brutalité, l’invective, les comportements véhéments. Lilya 4-ever a profondément marqué les esprits par la présentation du cannibalisme social se développant là où le tissu social a été détruit.

Les « antifas » – qui sont en fait des anarchistes n’ayant rien à voir avec le véritable antifascisme historique des socialistes et des communistes – reflètent parfaitement un tel cannibalisme par leur esprit d’agression, leur style emprunté aux ultras des stades de football. On est là dans la décomposition de la petite-bourgeoisie, alors que le capitalisme se ratatine.

Les femmes peuvent-elles éviter alors les dogmes et éviter la polarisation ? Pas du tout, elles doivent la prendre en main. Sinon, cela se fera à leurs dépens.

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Politique

Une semaine de questions sur le barrage à Marine Le Pen au second tour des Présidentielles

Le quotidien Libération a ouvert la boîte de Pandore en ce début de mois de mars 2021.

Au sens strict, la une de Libération avec « J’ai déjà fait barrage, cette fois c’est fini » date du 27 février 2021, mais les réactions ont suivi pendant toute la semaine et ont vraiment occupé les esprits. Et pour cause : Marine Le Pen est donnée perdante au second tour de la présidentielle de 2022 face à Emmanuel Macron avec 48% contre 52%. La différence est si faible qu’elle fait froid dans le dos et en plus on observe aisément que Marine Le Pen a compris qu’elle ne devait rien dire afin de ne pas se discréditer, le temps travaillant pour elle.

Son idée, c’est de paraître comme un recours qui assumerait de ne pas aller au conflit, qui ne modifierait pas les institutions, bref comme la continuité mais dans le changement. C’est un peu le programme commun de 1981 mais inversé. Elle a compris qu’elle avait perdu à la présidentielle de 2017 en raison de son refus de l’euro, voire de l’Union européenne. Les propos qui fâchent passent donc à la trappe.

Et, malheureusement, le refus catégorique de Marine Le Pen qui existait de par le passé s’effondre, surtout à Gauche. La raison est toute trouvée. Comme on le sait, la Gauche historique est d’une faiblesse complète. Les gens se définissant comme étant de gauche sont ainsi désorientés, largement poreux au libéralisme, au relativisme, etc. On trouve donc d’innombrables idiots utiles de l’extrême-Droite.

Tout est une question de mise en perspective.

Pour les gens liés à la Gauche historique, il faut faire barrage à Marine Le Pen au second tour, quitte à voter pour un libéral ou un conservateur. La question ne se pose pas ou plus exactement elle ne se pose plus. Les socialistes et les communistes ont appris de l’expérience historique si dramatique en Italie et en Allemagne. La réponse au fascisme s’appelle l’antifascisme et l’antifascisme est un front.

Il ne s’agit pas de soutenir Emmanuel Macron mais de ne pas se comporter face au fascisme comme Gribouille qui choisit de se protéger de la pluie en se jetant à l’eau.

Ce choix est celui des courants d’ultra-gauche (les anarchistes et les trotskistes), qui ont toujours par principe refusé l’antifascisme. Selon eux, l’antifascisme est une trahison. Il y a également désormais dans ce camp La France Insoumise, dont les dirigeants prennent un malin plaisir à ne surtout pas dire qu’il faut faire coûte que coûte barrage à Marine Le Pen. Enfin, il y a les courants post-modernes qui, focalisés sur l’écriture inclusive, les trans et les migrants, n’ont jamais ouvert un livre d’Histoire et ne s’intéressent de toutes façons pas au mouvement ouvrier.

Ultra-gauche, populistes et post-modernes servent dans les faits littéralement de cinquième colonne. Ils banalisent l’extrême-Droite, ils contribuent à ce que les terrains lui soient abandonnés, ils proposent ni plus ni moins que de lui laisser l’appareil d’État.

Une telle position est inacceptable et la fracture va toujours être plus claire alors qu’on va vers l’élection présidentielle. Elle va consister en un véritable affrontement de ligne. Il faut avoir conscience de cela alors que les enjeux se font toujours plus grands avec la crise.

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Gestion de la pandémie: la France est en train de vivre une révolution culturelle de droite

Cynisme et attentisme: la France a la même stratégie que le Brésil face au Covid-19, la population étant libérale et impatiente.

Le premier ministre Jean Castex a pris jeudi 4 mars 2021 la parole pour annoncer, comme d’habitude désormais, que le gouvernement surveillait la situation. Allons donc ! Ce qui se passe est très simple. La France est de droite et s’assume. Finies les prétentions à se préoccuper des plus faibles, à disposer d’un système de santé développé et à protéger, etc. Désormais, on gère de loin, on est pragmatique, on est cynique.

Contrairement à des pays comme l’Allemagne et l’Autriche qui confinent, qui testent et qui tracent, la France a ainsi choisi l’option brésilienne. Elle aura hésité : la Gauche a de beaux restes en France. Mais ce sont des restes. Donc, on attend que cela se passe en espérant une solution miracle, on laisse passer la maladie de manière mesurée, juste ce qu’il faut pour que cela ne dérape pas, du moins on l’espère.

Il n’y a en France aucune démarche collective, aucun esprit de corps. L’individualisme est la règle dans les comportements. La crise sanitaire aurait pu (et dû) être un détonateur d’une force collectiviste ; au lieu de cela on a son contraire. Le résultat est sans appel. Il y a en France 87 542 décès liés au Covid-19, soit à peu près autant qu’en Russie (87 823) et plus qu’en Allemagne (71 711), de populations plus nombreuses (respectivement 66, 146 et 81 millions).

Si on prend le nombre de morts par rapport à la population, la France se situe dans la perspective brésilienne et américaine, et encore faut-il souligner qu’initialement un certain nombre de décès n’ont pas été attribués au covid-19, en France comme dans bien des pays d’ailleurs.

Morts quotidiennes par million de personnes, source : Our world in data

C’est une sacrée preuve que la Gauche est inexistante en France en terme d’idéologie et de pression. C’est le capitalisme qui décide. Et le capitalisme décide avec ce qu’il peut. On se rappelle de cette histoire : il avait été dit au départ que les masques ne servaient rien, parce que la France n’en avait pas, puis quand il y en a eu cela a été obligatoire. C’est un excellent exemple des faiblesses françaises.

On peut également prendre le rythme des vaccinations. La France est devant les Pays-Bas, mais derrière la Belgique, l’Italie, l’Autriche, l’Allemagne, la Roumanie, l’Espagne, le Portugal, la Slovaquie, la Turquie, le Chili, les Etats-Unis, sans parler bien entendu du Royaume-Uni et d’Israël, qui sont à la pointe en ce domaine.

Or, le capitalisme français prétendait être au poste de numéro 1 dans le domaine de la santé. Cela a toujours été un vecteur essentiel du consensus pro-capitaliste en France. Le système de santé, efficace et universel, a toujours été un levier d’une importance capitale pour l’acceptation du capitalisme « à visage humain ». Il y a là une transformation radicale, dont tout le monde se moque.

Le déclassement français est également patent rien qu’avec les tests. La France n’est pas capable de se mobiliser à travers les institutions et le personnel. Pourtant là aussi son aura s’appuyait beaucoup sur l’efficacité de son administration. Il y a ici une défaite terrible.

La France ne trace d’ailleurs pratiquement personne par manque de personnel et d’initiative des gens eux-mêmes ! On devrait pourtant tester en masse et tracer. On ne fait rien de cela. On fait un confinement partiel, laissant des gens mourir en espérant que cela passe.

Tests quotidiens pour mille personnes, source : Our world in data

Pourtant, le nombre de gens malades qui progresse exige clairement une action dure, claire, nette, sans ambiguïtés. Mais l’État recule devant le refus des gens et devant ses propres faiblesses, alors que le capitalisme se satisfait très bien de cela parce que de toutes façons il vit au jour le jour.

Cas confirmés par million de personnes, Tests quotidiens pour mille personnes, source : Our world in data

Qu’est-ce qui découle de cela ? Que les gens sont individualistes et que face aux faiblesses intrinsèques du régime, les capitalistes les plus agressifs vont exiger une reprise en main, pour réaffirmer la France comme grande puissance. C’est une révolution culturelle de droite qui est en train de se produire.

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Politique

L’Arménie étranglée avec l’assentiment français

La France se présente comme l’amie de l’Arménie, et les Arméniens pensent que cela est vrai. Mais la France est une grande puissance…

Une école détruite à Stepanakert au Nagorny-Karabagh

L’amitié entre la « France » et « l’Arménie » remonterait au Moyen Âge. Ainsi, le dernier roi d’Arménie repose à Paris, plus précisément dans la basilique Saint-Denis, au côté des rois de France, dont il est le seul souverain à partager la nécropole.

Bien sûr, tout cela relève de pures allégations orientalistes, puisque si le Lusignan chypriote Léon VI est bien mort en exil à Paris, il ne fut roi que d’un Royaume des Arméniens de Cilicie quasiment fictif, sur lequel il ne régna même qu’au milieu des pires complots féodaux et que pour quelques mois, avant la chute finale de sa capitale, Sis, dans l’indifférence générale des Arméniens de l’époque.

Et si son cénotaphe trône aujourd’hui dans la nécropole royale française, ce n’est que par un obscur choix fait en 1817, en plein essor du romantisme, du fait du Conservateur des Monuments français de l’époque, Alexandre Lenoir.

Saint Denis (Île-de-France), nécropole royale de la basilique, Léon V. Lusignan couché, roi d’Arménie (Source Wikipedia)

Mais ce symbole est puissant, autant pour les Arméniens exilés en France, que pour comprendre l’imaginaire orientalisant qui entoure l’Arménie dans l’esprit des institutions françaises. Derrière l’idée d’Arménie, il y a celle de la Croisade, de l’Orient latin, de la profonde influence française en Orient, qui au-delà même du temps des Croisades, lie François Ier, Napoléon Bonaparte, puis encore Napoléon III, jusqu’aux mandats français en Syrie avec traité de Sykes-Picot, l’épisode du Musa Dag, etc…

Pour les Arméniens, la France, c’est la seconde patrie, le refuge, la protectrice des « Chrétiens d’Orient », la Légion et le sauvetage des rescapés du Musa Dag, la terre d’accueil des survivants du Génocide. Il y a cependant la réalité, celle de la France comme grande puissance…

Pour bien situer les choses, la stratégie actuelle de l’État français dans le Caucase est clairement de mettre tout en œuvre pour arrimer l’Azerbaïdjan aux alliés de l’OTAN. Ainsi, si la Russie reste encore le principal partenaire commercial de l’Azerbaïdjan, avec 16% de son commerce extérieur, la France n’en représente que 2%. Mais c’est une part en constante augmentation. Plus encore, si on considère les autres pays de l’Union européenne, cette part atteint presque 15%. Cela passe à 20% si on ajoute les États-Unis, voire 33% si on ajoute la Turquie.

L’Azerbaïdjan (source Wikipedia)

La France importe massivement du pétrole d’Azerbaïdjan, la part de ces importations a même augmenté de 20% en 2020. En échange, la France fournit du matériel de défense, c’est-à-dire de l’armement, officiellement pour sécuriser les sites de productions pétroliers. Tout type de marchandises confondues, les échanges commerciaux entre les deux pays représentent des centaines de millions d’euros de trafic, près de 750 millions à en croire les chiffres officiels.

Mais cela est encore sans même tenir compte des contrats de défense en tant que tels et des « licences » accordées dans ce domaines, qui se montent à plus de 200 millions rien que pour 2019, dont du matériel de tir de missiles et d’alerte. En outre, un contrat est en cours de négociation pour équiper la marine azérie de corvettes porte-hélicoptères de classe « Gowind », déjà commandés par les États du « bloc » pro-saoudien allié à la France (Égypte, Émirats Arabes Unis), pour près de 500 millions d’euros.

C’en est au point, que lorsque le président Emmanuel Macron était allé au sommet de l’Organisation Internationale de la Francophonie, organisé en 2018 à Yerevan par la République d’Arménie, il avait fallu envoyer l’ancien président Nicolas Sarkozy « rassurer » le dictateur azerbaïdjanais Ilham Aliev sur les intentions et les orientations de l’État français.

L’Arménie maintient une Artsakh autonome, mais l’Azerbaïdjan qui a récupéré les territoires autour entend s’en débarrasser à moyen terme (source : Wikipédia)

Il y a aussi bien entendu la question des données récoltées durant la guerre au Karabagh, qui a été un modèle du genre de la guerre anti-populaire : avec la situation d’une armée déployée dans un « théâtre » profondément hostile, mais qui parvient par un engagement militaire conventionnel à imposer sa victoire par la brutalité de son avance technologique, en évitant les agressions sur les populations civiles trop directes et médiatisées, et en se contentant d’occuper un terrain tenable car dépeuplé, mais stratégique pour étrangler la population civile hostile à plus long terme.

L’Arménie à ici complètement échoué sous ce rapport, en se laissant corrompre par la supposée protection de ses alliés, notamment la Russie, et par la conviction de la supériorité de ses troupes.

Si la guerre avait été une guerre populaire, elle aurait été un bourbier meurtrier pour l’Azerbaïdjan, mais ce scénario a été évité, stratégiquement par l’Azerbaïdjan, volontairement par l’Arménie, mal préparée à cette guerre et dont la population, et notamment la jeunesse, ne s’est pas mobilisée en masse pour défendre le Karabagh.

L’Arménie paie ici le prix de ses illusions et d’années de corruption orchestrées par des militaires vendus à la Russie en particulier, qui ont transformé Yerevan en casino, détruit les services publics et abandonnés les campagnes à la misère, tout en se présentant comme le bouclier du peuple à grand renfort de propagande militariste, qui a irrigué la culture populaire.

La région de la gorge du Hunot au Karabagh

Massivement, la population n’a pas adhéré à ce nationalisme outrancier et corrompu. Par la migration ou par les magouilles, elle a cherché à survivre et à résister, avant le grand soulèvement de 2018 qui a emporté le régime. C’est aussi ce soulèvement, incarné par la personne de Nikol Pashinyan, l’actuel dirigeant de l’Arménie, que la Russie a fait payé en laissant se faire presque jusqu’au bout, sinon avec son accord et son soutien, l’agression azérie.

Mais aujourd’hui, les militaires arméniens tentent de se remettre en selle, en accusant le régime de Pashinyan d’être ni plus ni moins « turc ». On voit sur les réseaux sociaux et même dans les médias du pays se multiplier les soi-disant nouvelles montrant ici un manifestant pro-Pashinyan « avec un accent turc », ou là une soi-disant intrusion de militaires des forces spéciales turques dans tel village isolé. Le tout alors que la Turquie d’Erdogan souffle sur les braises en soutenant Pashinyan…

Toutes ses manœuvres ne peuvent pas passer à côté de l’État major français, bien renseigné sur le Caucase du sud et l’Arménie. Ce qui se joue ici, c’est tout simplement une épuration ethnique concertée au Karabagh, que la France impérialiste laisse faire de facto, au nom de ses intérêts.

L’Arménie

Le régime français défend-t-il donc l’Arménie, donc en l’espèce l’État arménien et les populations arméniennes du Caucase ? Certainement pas. Même après la guerre de cet automne, la France prétend maintenir une position « équilibrée » selon les termes de sa diplomatie. C’est-à-dire que le business avec Bakou continue de se développer, y compris au plan militaire.

En février 2021, on a ainsi vu une délégation de parlementaires français venir parler affaires avec le régime d’Aliev, et prendre la pose sur le mémorial des « martyrs azéris » de la guerre contre l’Arménie, puis déposer une couronne aux pieds de la statue du père d’Ilham Aliev, Heydar Aliev, qui a dirigé l’Azerbaïdjan de 1993 à 2003, son fils lui ayant succédé.

Pendant, ce temps, le fond d’aide gouvernemental français qui « structure » l’aide apporté à l’Arménie a simplement accordé une aide matérielle consistant en de l’équipement médical et l’envoi de quelques personnels. L’Élysée, qui a pris en charge directement cette aide, ne communique même pas sur le montant total alloué, d’ailleurs constitué de l’aide déjà prévue, avec une courte rallonge, notamment alimenté par des dons de municipalités.

Ainsi, la ville de Paris a alloué en tout 80 000 euros, la ville de Lyon 30 000 et celle de Strasbourg 15 000, pour ne prendre que des exemples de grandes villes où les Arméniens sont nombreux. Ces sommes sont de fait dérisoires, même de simples associations sont parvenues à rassembler plus d’argent que certaines de ces villes et de toute façon, cela ne pèse rien en balance des intérêts commerciaux avec l’Azerbaïdjan et ses pétrodollars.

Rappelons que dans le même temps, Ilham Aliev annonçait depuis la ville conquise sur les Arméniens de Chouchi/Shusha une pluie d’investissement sur les territoires annexés en signe de leur nouvelle appartenance nationale : il est ainsi prévu un aéroport international, une nouvelle autoroute, des infrastructures touristiques, des musées…

Chouchi/Shusha en 1865

Il faut que les Arméniens de France regardent en face cela. La France approuve sans le dire trop ouvertement la fuite dans l’ordre des populations arméniennes du Karabagh. C’est bien ainsi que ce « réglera » le problème venant perturber les intérêts économiques. Il sera temps ensuite de partager ce que l’on peut de l’influence dans le Caucase entre les uns et les autres, et c’est ce « grand jeu » là qui compte pour les grandes puissances.

Mais le plus lamentable, c’est que cela convient aussi aux Arméniens. Et en particulier aux Arméniens de France. On les voit applaudir devant l’aide somme toute dérisoire accordée par la France, comme ils ont applaudi à ce vote parlementaire ridicule de la « reconnaissance de la République d’Artsakh » qui ne coûte rien. On les voit imaginer que la France aurait encore les moyens d’assurer un rôle en faveur des Arméniens, si seulement les Français pouvaient se « réveiller », si seulement les Arméniens pouvaient « s’unir » dans un lobby parlant d’une seule voie.

C’est là ne pas assumer la réalité caucasienne.

Carte des peuples du Caucase (source : Wikipédia)

Seule la perspective d’une grande fédération des peuples caucasiens peut faire exploser le nationalisme pantouranien et le régime corrompu d’Aliev. L’avenir des Arméniens, c’est la Fédération TransCaucasienne, démocratique et populaire, seule à même de faire se lever de l’Ararat à la Caspienne, de l’Araxe à l’Elbrouz, l’aube d’une nouvelle ère pour tous les peuples d’Orient.

Tout le reste est une fiction romantique paralysant face au jeu des grandes puissances utilisant le principe de diviser pour régner. Tout comme dans les Balkans, la haine interethnique est un outil pour le repartage du monde par les grandes puissances. Tout comme dans les Balkans, seule une Fédération populaire démocratique est la solution.

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Guerre

1 830 milliards de dollars de dépenses en armement en 2020

La crise n’a pas freiné du tout la poursuite de la course aux armements, bien au contraire.

Les dépenses en armement avaient atteint 1,85 % du PIB mondial en 2019, en 2020 cela a consisté en 2,08 % du PIB mondial. Naturellement, le PIB mondial s’est contracté avec l’ouverture de la crise, alors il faut regarder les chiffres eux-mêmes. On voit alors qu’on a 1 830 milliards de dollars de dépenses militaires, soit… 3,9 % de plus que l’année précédente. La folie continue.

C’est il est vrai une croissance moindre qu’entre 2018 et 2019, avec 4,4 %, mais cela n’est qu’un très léger ralentissement de la croissance des dépenses militaires. Mais cela ne change rien au fond et même, l’explosion des tensions aboutit au même phénomène qu’avant les première et deuxième guerres mondiales. Chaque protagoniste cherche à ne pas présenter toutes ses cartes.

Concrètement, on doit en fait considérer qu’il y a une accélération de ces dépenses, en sachant qu’il est très difficile d’en cerner les contours. Si du côté américain, les 738 milliards de dollars de dépenses sont relativement clairs, bien qu’une partie soit clairement opaque, c’est encore plus vrai pour la Chine. Celle-ci dépenses officiellement 193,3 milliards de dollars en 2020 pour les affaires militaires, mais c’est en réalité davantage. Une bonne partie est maquillée.

Cela est vrai d’ailleurs pour tout le monde. Il ne s’agit pas seulement du fait que le complexe militaro-industriel concerne parfois des productions en apparence purement civiles, comme c’est flagrant en Chine. Il s’agit surtout du fait que la guerre du 21e siècle implique un haut degré de professionnalisation et un très haut niveau de technologie.

Ce qui fait que les entreprises travaillant sur l’intelligence artificielle ou les systèmes autonomes ne peuvent aujourd’hui pas travailler avec l’armée, tout en étant intégrées à long terme dans les stratégies militaires. La guerre au Nagorny-Karabagh, avec son emploi stratégique de drones, est un exemple de comment, à un moment donné, l’armée choisit de systématiser une nouvelle option.

Il y a également un autre aspect qui compte, celui de la disponibilité matérielle de ce dont a besoin le complexe militaro-industriel. En apparence, les dépenses militaires françaises (55 milliards de dollars), britanniques (61,5 milliards de dollars), allemandes (51,3 milliards de dollars) et russes (60,6 milliards de dollars) sont sensiblement les mêmes. En pratique, les dépenses russes sont dans leur nature proportionnellement supérieurs, de par l’écosystème monopoliste et les matières premières disponibles, ainsi que des salaires moins élevés.

Cela ne change rien au fait qu’on est sensiblement au même niveau ici et qu’on a d’un côté l’ogre américain, de l’autre la Chine cherchant à lui prendre sa place de superpuissance hégémonique, mais encore très loin derrière. Puis, on a une série de pays puissants, prêts à en découdre, mais obligés d’établir des alliances dans tous les cas. D’ailleurs, les pays européens de l’OTAN sont en moyenne passées de 1,25 % du PIB en 2014 pour les dépenses militaires à 1,64 % du PIB en 2020. L’objectif est de généraliser les 2%.

On a donc une généralisation du militarisme, un approfondissement, une systématisation. C’est la marche à la guerre.

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Politique

Espagne : l’affaire Pablo Hasél

Une arrestation, des manifestations de protestations qui tournent à l’affrontement… L’affaire du rappeur Pablo Hasél reflète une situation bien particulière.

Ce qui est intéressant quand on voit comment l’affaire Pablo Hasél est présentée en France, c’est qu’on voit à quel point il y a une méconnaissance profonde de l’importance de se tourner vers l’Histoire et la culture pour comprendre les phénomènes. Les commentateurs français ne font aucun effort et réduisent l’affaire à un rappeur qui aurait tenu des propos vindicatifs à l’encontre du roi et qui serait tombé dans une machinerie judiciaire sans cœur. Sous-entendu : ce n’est pas en France que cela risque d’arriver.

En réalité, l’affaire Pablo Hasél s’appuie sur le fait qu’il y a en Espagne deux gauches radicalement séparées. En France, malgré les énormes différences sur le plan des idées, il y a toujours eu une sorte d’attraction-répulsion allant du Parti socialiste à l’ultra-gauche. Ce n’est pas le cas en Espagne où il existe un problème de fond : l’acceptation ou non de la transition démocratique à la suite de la mort de Franco.

Une gauche a dit : c’est une vraie transition, on s’intègre dans les institutions, le passé c’est le passé. Une autre a dit : on refuse, c’est fictif, c’est un Etat fasciste ayant pris un masque moderniste. C’est à cette seconde gauche qu’appartient Pablo Hasél, qui dans ses chansons met les pieds dans le plat. Il dénonce le régime comme fasciste, les policiers comme une sorte de milice nazie, et surtout il intègre dans ses propos une valorisation d’ETA, du PCE(r) et des GRAPO.

Une affiche de la mouvance du PCE(r)

ETA, c’est (ou plus exactement c’était) Euskadi Ta Askasuna, l’organisation militaire indépendantiste basque ; le PCE(r) c’est (ou plus exactement c’était) le Parti Communiste d’Espagne (reconstitué) qui a généré les GRAPO, les Groupes de Résistance Antifasciste du Premier Octobre, pareillement une organisation militaire. On parle ici d’un très grand nombre d’actions armées, y compris meurtrières, datant d’après la mort de Franco.

On notera ici qu’on dit « ETA » quand on en parle à gauche, et certainement pas « l’ETA » comme le font les médias ; cette petite nuance permet déjà de repérer qui en parle sérieusement ou pas. Et, donc, Pablo Hasél fait référence à ces groupes armés, parce qu’ils ont continué la lutte après la transition démocratique qu’il considère comme fictif.

Or, on s’en doute, l’Etat espagnol ne tolère pas plus de parler positivement des GRAPO que l’Etat italien n’autorise de parler des Brigades Rouges ou l’Etat allemand de la Fraction Armée Rouge. La sanction dans ces pays est immédiate : c’est soutien à une organisation terroriste, donc amendes, voire prison, à quoi s’ajoute un sacré paquet d’ennuis administratifs. Pablo Hasél a ainsi commencé à avoir des problèmes en 2011, il a été condamné à deux ans de prison en 2014, en raison qui plus est de ses dénonciations et insultes à l’encontre de la monarchie.

On notera qu’il n’est pas le seul à avoir été condamné pour cela. Pour ce même « soutien » aux GRAPO, treize rappeurs collectif La Insurjencia ont été condamnés, tout comme le rappeur Valtònyc désormais réfugié en Belgique. De nombreuses autres personnes ayant fait sur les réseaux sociaux des remarques ou des blagues considérées comme pro-terroristes ont pareillement subi les foudres de la justice espagnole.

Pablo Hasél a finalement vu sa peine réduite à neuf mois de prison et devant être arrêté, il s’est réfugié avec cinquante étudiants à l’Université de Lérida le 15 février 2021, pour finalement être interpellé le lendemain.

Cela a provoqué des manifestations violentes pratiquement chaque soir pendant deux semaines à Barcelone, ainsi qu’à Bilbao, Madrid, Valence. On l’aura compris : c’est la gauche ne reconnaissant pas le régime qui proteste. Le drapeau mis en avant est celui de la République espagnole, l’Etat espagnol est considéré comme fasciste ou terroriste, etc.

Inversement, l’avocate de Pablo Hasél, Alejandra Matamoros, s’est vue accusée par l’Association des victimes du terrorisme, le 1er mars 2021, de soutenir le terrorisme. Et la maire de Barcelone, Ada Colau, qui est de gauche, a dénoncé les violences, tout comme le chef du gouvernement Pedro Sánchez, un socialiste : on l’aura compris il y a un vrai clivage. Certaines forces libérales appellent à libérer Pablo Hasél pour mettre justement fin à tout cela, comme 200 personnes du monde culturel (Pedro Almodóvar, Javier Bardem…) , mais en Espagne c’est trop polarisé à la base pour que cela soit aussi simple.

Surtout que l’Etat espagnol n’est pas idiot et voit bien que l’affaire Pablo Hasél recompose toute une scène d’indépendantistes de Galice, du Pays Basque, de Catalogne, de communistes anti-régime plus ou moins pro-PCE(r), etc. Avec la crise, il y a une reprise de l’antagonisme et l’affaire Pablo Hasél a remis à l’ordre du jour une problématique censée avoir totalement disparu.

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Société

Covid-19: vers un passeport sanitaire

Si on regarde bien, on voit que les États commencent à agir conformément à l’idée que la crise sanitaire s’installe dans la durée.

L’Autriche, laboratoire de l’Allemagne pour la crise sanitaire, a mis en place des mesures qui sont très révélatrices. D’abord, la grande majorité de la population dispose à 5-10 minutes de chez elle du moyen de se faire tester gratuitement. Ensuite, cinq tests antigéniques par semaine vont être donnés aux gens pour se tester chez eux. Enfin, quand on va chez le coiffeur, on doit avoir fait un test auparavant, alors que dans les transports et dans les magasins, il faut un masque de type FFP2.

Cerise sur la gâteau, le chancelier Kurz a demandé que soit mis en place un passeport vaccinal. Cela signifie bien entendu qu’on est parti là pour un processus long, d’au moins six mois – un an. Et si l’Autriche le fait et que cela fonctionne, l’Allemagne suivra. La chancelière allemande Angela Merkel a de fait dans la foulée demandé un certificat de vaccination numérique à l’échelle européenne. C’est une tendance lourde. Rappelons que l’Allemagne est confinée alors que ses chiffres sont bien moins mauvais que ceux de la France.

On voit mal la France ne pas être obligée de suivre, alors que la Grèce et Chypre mettent en place un passeport vaccinal. D’ailleurs, du côté français, le secrétaire d’État aux Affaires européennes Clément Beaune a également parlé dimanche 28 février 2021 du passeport vaccinal, demandant par contre que soient listés les tests effectués, et pas seulement le vaccin. Pourtant, le gouvernement et le président avaient bien précisé qu’un tel passeport n’était pas du tout à l’ordre du jour, que c’était une idée non conforme aux principes français, etc.

Ce n’est pas du tout l’orientation que prennent les choses. En clair : les tests feront partie de la vie quotidienne et il faudra montrer patte blanche pour différentes activités. Pour aller au restaurant, il faudra un test ou une vaccination, dans certains pays même une vaccination obligatoire. On peut ne pas se faire vacciner… mais alors, pas de restaurant.

Encore faut-il mettre cela techniquement en place. Il faut trois mois pour cela grosso modo. Les vacances d’été sont pour bientôt et bien entendu la pression est grande pour aller en ce sens. Seulement voilà, la vaccination en Europe ne va pas vite, c’est le moins qu’on puise dire. Bref, tout est enlisé ! La crise sanitaire s’installe dans le paysage…

Naturellement, une telle chose est inaudible pour les Français qui s’imaginent depuis un an que les choses vont s’arranger dans les trois semaines. D’où le grand problème du gouvernement pour gérer des Français régressifs. Déjà que mettre en place le couvre-feu à 18 heures est une galère, que mettre en place un confinement relève de la gageure, alors instaurer des mesures sur le long terme de manière ouverte…

Mentionnons ici la démagogie d’Anne Hidalgo. Elle a demandé, en tant que responsable de la ville de Partis, un confinement de trois semaines pour que tout redémarre normalement ensuite. C’est de la pure démagogie : comme si la région parisienne n’existait pas, comme si un tel confinement suffirait. Non, le fond du problème, ce sont les Français, indisciplinés, individualistes, relativistes. Le Covid-19 met à nu toutes les failles d’une société française pourrie par le capitalisme.

Il va donc falloir boire le calice jusqu’à la lie. Les Français ont récusé le collectivisme : ils en paient le prix.

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Écologie

Vegan oui… mais non, confort oblige

Le prestige du véganisme, mais sans son contenu, parce que bon le confort avant tout ! Un exemple belge.

Ah, le confort ! Et qu’il est désagréable, le 21e siècle, avec ses exigences. Car les choses ont pris une telle ampleur, qu’on ne peut pas faire semblant dans sa vie quotidienne. Il faut être en accord avec ce qu’on met en avant comme valeur. Sinon quel sens cela a ?

Au détour de l’actualité, on a cette nouvelle a priori fort sympathique, qui vient de Belgique :

« Des actions contre l’expérimentation animale dans des université

Le collectif Extinction Rebellion Animal (XR Animal) a mené des actions dans plusieurs universités belges samedi afin de protester contre l’expérimentation animale. Il dénonce «l’opacité, les mensonges et le déni de démocratie» pratiqués par ces institutions universitaires. »

La lutte contre l’expérimentation animale est essentielle, elle est si rare pourtant, donc on est heureux de voir cela. Puis on va voir ce que raconte « XR Animal » et on voit qu’en fait on peut selon ce groupe tout à fait consommer des produits testés sur les animaux. Pardon ? On lutte contre les tests sur les animaux et on peut utiliser des produits testés sur les animaux ?

Et il faut le voir, le site, on dirait un site de vegans activistes. Sauf qu’en fait c’est mensonger, totalement mensonger, et en même temps assumé, conformément à une époque où c’est l’image qui compte, pas le contenu.

« Le collectif XR Animal est inclusif (vegans, végétarien•ne•s, flexitarien•ne•s, carnistes). 

Faut-il être vegan pour faire partie d’XR Animal ?

Nous faisons partie d’un système idéologique qui a façonné notre relation aux animaux et à la nature, créant de la dissonance cognitive. Détricoter ce système idéologique au sein de nos comportements fait partie d’un cheminement individuel et collectif dont nous ne connaissons pas l’issue.  

Il ne faut pas être vegan pour faire partie d’XR Animal et le véganisme n’est pas la finalité ultime d’XR Animal.

Par contre, il te faut être ouvert•e et t’engager à remettre en cause le système idéologique qui sous-tend ta relation à l’animal et à sortir de la dissonance cognitive. Cette liberté intérieure retrouvée amènera naturellement à une cohérence interne et à de nouveaux comportements alimentaires (mais pas que). »

Vegan oui… mais non, confort oblige. Le prestige de la lutte contre l’expérimentation animale, oui. Le prestige du caractère strict du véganisme, oui. Mais le véganisme, non. Que c’est pathétique ! Si ce n’était pas aux dépens des animaux, ce serait risible. Là, c’est tout simplement ignoble.

Et c’est vraiment propre à la période que nous vivons. On trouve, par exemple, des gens qui se disent révolutionnaires en France et dont la principale activité consiste à proposer gratuitement des denrées alimentaires dans des quartiers populaires. C’est bien étrange, surtout quand on voit le parcours d’une telle activité.

On a un mode d’action qui relève de la religion, en l’occurrence catholique, avec comme but au moyen de la charité d’encadrer les gens. C’est bien connu. L’extrême-Droite identitaire l’a repris ces vingt dernières années, avec des maraudes pour se donner une image sociale. Et ces dernières années des gens d’extrême-Gauche le reprennent, en s’imaginent originaux et surtout révolutionnaires. C’est n’importe quoi. Mais tellement typique de la période actuelle !

C’est l’heure du consommable. Je veux avoir le prestige du révolutionnaire, mais je ne veux pas aller en prison, je veux rester professeur. Je veux avoir le prestige du véganisme, mais hors de question d’être strict. Hors de question d’être strict en quoi que ce soit d’ailleurs.

Tout cela est aussi vide que laid.

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Guerre

Vers la guerre contre la Russie

La Chine d’accord, la Russie d’abord : telle est la ligne américaine désormais et la France est de la partie.

Le grand problème des guerres entre grandes puissances, c’est la démagogie qui va avec. La France prétendait lutter en 1914 contre le « militarisme » allemand et après ce serait la paix pour tous, la guerre serait la dernière des guerres, puisqu’il n’y aurait plus de militarisme. L’Allemagne prétendait lutter contre la barbarie tsariste. Et ainsi de suite.

Les choses n’ont pas changé. La propagande est immense contre la Russie, la Chine et la Turquie. Il s’agit de pays dont les régimes sont critiquables, bien entendu, mais cela n’est ici que le prétexte pour la guerre. Si demain l’armée professionnalisée française rentrait dans un petit conflit avec la Turquie, l’appui nationaliste serait immense ! Si demain il y avait une mobilisation contre la Russie, cela serait présenté comme avec l’objectif de « pacifier » l’Europe !

Et la tension monte. Si Donald Trump représentait la ligne du cavalier seul américain contre la Chine, Joe Biden représente la ligne de l’alliance occidentale contre la Russie. Joe Biden vient ainsi d’affirmer que :

« Les États-Unis n’acceptent pas et n’accepteront jamais la prétendue annexion de la péninsule, et nous nous tiendrons aux côtés de l’Ukraine contre les actions agressives de la Russie »

L’annexion est effectivement illégale aux yeux du droit international, même si historiquement la Crimée n’a rien d’ukrainienne. Il est juste de demander le retrait russe. Mais il est évident que c’est là un prétexte. Depuis l’élection de Joe Biden à la présidence américaine, l’offensive propagandiste anti-russe ne cesse pas. Mi-février, l’État estonien a publié une longue analyse dénonçant la Russie, mais aussi la Chine ; il est dit que :

« Toute la population mondiale hors de la Russie est une cible potentielle [des opérations de guerre psychologique montées par la Russie]. »

Il est également dit que grosso modo c’est le moment : l’économie russe a profondément reculé avec la crise, le régime est instable ! D’où la présence de diplomates de l’Union européenne aux manifestations en faveur de l’opposant Alexeï Navalny à Moscou, au début février. Ceux-ci ont été expulsés.

D’où le survol le 17 février 2021 de la mer Noire par la France, au moyen d’un ravitailleur KC-135 et de deux Mirage 2000, une nacelle ASTAC déployée pour établir une cartographie des éléments électromagnétiques… Provoquant une interception russe pour faire repartir les avions concernés.

D’où, également, la présence d’une unité d’artillerie de l’armée américaine en mars en France pour des exercices au camp de Canjuers, dans le cadre d’un exercice avec le  93e régiment d’artillerie de montagne. Ce camp est le plus grand champ en tir d’Europe de l’Ouest, où l’obus BONUS Mk 2 va être présenté.

De tels événements sont extrêmement graves, naturellement. C’est l’expression de la tendance à la guerre, poussée par la crise. Et la France est en première ligne. Elle veut sa part du gâteau dans le repartage du monde. Seuls ceux qui croient en le capitalisme peuvent prétendre qu’on ne va pas inéluctablement à la guerre (à moins qu’un immense mouvement de masse l’en empêche).

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Société

Covid-19 : des Français lassés, blasés, régressifs, prêts pour le général Pierre de Villiers

Les Français, corrompus par le capitalisme dans leur vie quotidienne, veulent revenir au monde d’avant, à tout prix. Ils récusent toute remise en cause possible.

Des gens rassemblés devant des bars, des jeunes faisant soirées sur soirées, alors que de toutes façons un grand nombre de libertés sont prises quant au couvre-feu de 18 heures : les villes sont le lieu de comportements anti-sociaux en série. Vivant au rythme d’un capitalisme concernant tous les aspects de la vie quotidienne, les gens n’en peuvent plus, ils exigent de consommer, d’aller au cinéma, d’aller dans les cafés, d’aller au restaurant, etc.

Aucun ne se dit : bon, il faut se poser et comprendre quelle est la nature de la situation. Non, au contraire même, tout est fait pour nier la réalité et faire comme si de rien n’était. Si initialement la question écologique que pose l’émergence de la pandémie était posée, elle a désormais totalement disparu. Tout a disparu d’ailleurs, il n’y a qu’un seul objectif : reprendre sa vie d’avant.

C’est une faillite morale tout autant qu’une faillite intellectuelle. Les gens ont des postures régressives, ils ne veulent pas prendre de responsabilités. Ils veulent payer ou voter pour que des gens décident à leur place. McDonald’s doit décider de ce qui est vendu, TF1 de ce qui est vu et le gouvernement gérer les affaires courantes. Et le capitalisme est si fort que le gouvernement est critiqué pour ne pas obéir autant aux attentes qu’une entreprise le ferait.

En cette fin février 2021, on comprend pourquoi l’État n’a pas décidé d’un nouveau confinement : par ses réseaux, il savait que la société n’était pas prête. On a donc une double peine : une société infantilisée et un État perdant totalement pied dans sa gestion de l’ordre social. Si donc on doit définir l’objectif de la Gauche, cela doit être : changer les gens, changer l’État.

Mais dans quel ordre ? Pour changer l’État, il faut que les gens se bougent, que l’État soit porté par le peuple, pas par une bureaucratie inféodée au capitalisme et surtout aux grandes entreprises. Mais le peuple ne veut rien entendre et rien faire.

On est donc bien parti pour une relance de l’État par l’intermédiaire de l’extrême-Droite, avec le sauveur suprême qui va proposer les solutions clef en main et les Français lui diront : oui, mon général !

Il est déjà prêt, d’ailleurs. Joseph Macé-Scaron, qui vient de l’extrême-Droite et qui est un ancien journaliste du Figaro et de Marianne, va sortir en mai un ouvrage intitulé L’Appel du général. Son personnage principal est le général Pierre de Villiers.

Il ne faut pas se leurrer : c’est là le reflet de ce qui va s’orchestrer. La France dépolitisée, infantilisée, s’en remet au général : comme avec Napoléon Bonaparte, avec Napoléon III, avec Clemenceau, avec Pétain, avec de Gaulle !

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Culture

Daft Punk 1993 – 2021

Le duo electro-house iconique en France a décidé de mettre un terme à son existence.

En France, Daft Punk est intouchable. On dit d’ailleurs les Daft Punk, comme s’il s’agissait de cousins, de gens à la fois proches et loin. La musique des Daft Punk a réussi le tour de force d’être puissamment développée et tout à fait accessible. On est dans la quintessence de la French Touch, avec une musique cérébrale et entraînante.

L’annonce de la dissolution des Daft Punk a donc provoqué une avalanche de réactions, même des Sapeurs Pompiers de Paris, d’autant plus qu’une vidéo (tirée de leur film Electroma) a été utilisée comme « épilogue ».

Les Daft Punk ont-ils réellement eu tant de valeur que cela ? C’est à vrai dire discutable et on peut comprendre par exemple l’avis disant que les Daft Punk n’ont fait que décliner un son electro et house émergeant à l’époque, faisant tout comme Johnny Hallyday pour le rock. Si Around the world est brillant avec d’ailleurs une vidéo formidable, One more time est une prostitution régressive de la culture club.

Pareillement, si Da Funk reflète un haut niveau, tout comme bien entendu Revolution 909, avec une vraie culture club, Harder Better Faster Stronger est un variant commercial, où toute âme est écrasée au profit d’un filtrage du son aseptisé. C’est ce qui a été appelé la « House filtrée », un euphémisme pour décrire de la House dégradée pour passer commercialement. Il ne faut pas oublier que l’ignoble Music Sounds Better With You vient du groupe Stardust, un éphémère groupe de la mouvance des Daft Punk avec d’ailleurs un de leurs membres.

Il n’est pas difficile de voir que Thomas Bangalter et Guy-Manuel de Homem-Christo ne sont jamais sortis de cette contradiction entre une tendance ouverte à aller dans le sens de la pop commerciale et facile, et une culture club très développée. D’un côté, ils élargissaient le son des clubs fondés sur la House music, de l’autre ils la démolissaient comme le fit à la même époque la radio parisienne FG.

Les fans de la première heure regretteront ainsi inlassablement le premier album Homework (1997) alors que les succès commerciaux s’alignaient avec un second album Discovery qui a été un succès commercial gigantesque en 2001.

Human after All en 2005 n’a ensuite aucun impact avec son minimalisme répétitif sans orientation : les Daft Punk ont cru se préserver de la corruption avec leurs casques les préservant de la notoriété, mais ce n’est pas en section VIP à Ibiza qu’on progresse artistiquement parlant. D’où une tentative de redresser la barre avec la très réussie bande originale du film Tron Legacy en 2010 et un album s’orientant vers une néo-disco, Random Access Memories, en 2013.

Il est étonnant que depuis 2013 les Daft Punk aient été comme paralysés, alors que le meilleur était clairement devant eux. Il y avait un nouvel horizon.

Mais c’est que Daft Punk sont avant tout le produit de leur époque. Ce sont des gens de milieux bourgeois disposant de matériel et profitant de l’émergence de la techno, apportant leur contribution mais n’ayant jamais été capable de se dépasser et de prendre le parti des gens. Le succès commercial a été trop grand, la conscience politique et culturelle trop faible. Ils ont préféré faire des remix, des collaborations. Ils ont été incapables de produire le chef d’œuvre attendu.

Leur dissolution est d’ailleurs une capitulation. Le son électro a tellement évolué, que ce soit par le Hip Hop ou l’alternative R’n’b, sans parler de la musique électro en général, que les Daft Punk se sont retrouvés hors sol et hors jeu. Quand on voit qu’en 2017 la fanfare militaire du défilé du 14 juillet a repris Daft Punk devant Emmanuel Macron et Donald Trump…

Les Daft Punk restent donc emblématiques, mais ils reflètent surtout un énorme ratage. Ils accompagnent l’intégration – désintégration de la culture House Music en France. Avec donc, des morceaux populaires indéniables, mais une simplicité devenant simplisme. C’est une sacrée défaite culturellement parlant et une preuve de la capacité de corruption du capitalisme.

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Culture

Ingmar Bergman : Une passion (1969)

C’est un film qu’on ne peut affronter que si l’on sait être simplement soi-même. Un film traversé par la détresse, la violence, l’aliénation, par la passion les transcendant.

Une passion est une œuvre magistrale d’Ingmar Bergman. C’est un film en noir et blanc, comme il sait si formidablement les élaborer, mais il est en couleur. On n’y perd donc rien en termes d’intensité et on y gagne en termes de réalisme.

Cela rend encore plus envahissante la présentation de la nudité psychologique et de la détresse, d’autant plus que la question du rapport aux animaux revient inlassablement. Et tout cela est présenté, de manière très posée, comme si de rien n’était, à travers des psychologies, lorsqu’un être se lie à un autre, se retrouve sur de nouveaux rails.

Ne pas réfléchir à ces rails, c’est se laisser embarquer par ses peurs, par la violence de l’implosion sociale, celle des conflits internationaux. C’est d’ailleurs sur ce plan un film tout à fait engagé, au sens réel du terme, sans formalisme aucun. Et Une passion, c’est avant tout un film sur l’aliénation, avec des êtres montrés tels qu’ils sont, sans fard, et ne parvenant qu’avec difficulté à distinguer les contours de leur propre vie.

Une passion est ainsi un film titre d’une difficulté d’approche assez exemplaire au sens où, sans réelle maturité relationnelle, sans l’habitude de se confronter aux visages et d’en lire le sens profond, on est incapable d’en cerner les liens posés dans le film et on a l’impression de faire face à un kaléidoscope indigeste d’images hivernales.

Le film a le rythme d’une avalanche, sans esthétisation formaliste et tout en art, où la souffrance psychologique est présentée dans son élan, avec ses nuances, ses efforts, ses liaisons humaines. La présence de la musique de Johann Sebastian Bach reflète cette introspection humaine, qu’on retrouve chez le réalisateur russe soviétique Andrei Tarkosvki.

Cette référence à Bach est bien entendu, à travers le luthéranisme suédois, une affirmation de la vie intérieure.

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Culture

Les Balkans pleurent Djordje Balasevic

Tous les Balkans sont frappés au coeur par la perte de Djordje Balasevic, leur immense chansonnier populaire.

Nous sommes en 1998 et le chanteur Djordje Balasevic, qui vient de Serbie, est en concert à Sarajevo, ville qui a été assiégée par la Serbie lors de la fratricide guerre née de l’implosion de la Yougoslavie. Les menaces ont été nombreuses de la part de Serbes, mais lui a simplement dit:

« Sarajevo a eu peur pendant des années, je peux bien avoir peur deux jours »

C’était une affirmation internationaliste de la plus haute valeur de celui qui a composé la merveilleuse chanson anti-guerre « Samo da rata ne bude », un terrible appel à ce qu’il n’y ait pas la guerre, que tout arrive, mais pas la guerre!

Qu’il ne s’arrête pas de pleuvoir, que le temps recule, que les étoiles changent sauvagement leurs courses, que les océans débordent, que les montagnes se déplacent, que les vents emportent tout, que les volcans se réveillent, mais pas la guerre!

https://www.youtube.com/watch?v=tJS_5LR3Mb8&feature=youtu.be

Cette chanson date de 1987. Et à cette époque, tout le monde savait déjà que la Yougoslavie allait s’effondrer et qu’on allait s’égorger. La haine avait été redynamisée par les poisons nationalistes assassinant les cœurs des peuples de ce pays. Seule une poignée, comme Djordje Balasevic, a toujours refusé de se définir autrement que comme yougoslave.

On trouve d’ailleurs sur la page youtube de cette vidéo un commentaire qui résume cet esprit balkanique, avec les drapeaux des successeurs à la Yougoslavie et des petits cœurs. Il est difficile de comprendre en France ce qu’un tel acte a de terriblement subversif, au point d’être physiquement dangereux pour la personne l’ayant publié. La haine la plus implacable a hypnotisé les peuples de l’ex-Yougoslavie, avec un chauvinisme criminel, démesuré, assassin.

Lorsqu’il y a eu la finale France-Croatie à la coupe du monde en 2018, Novak Djokovic (qui est Serbe) a expliqué qu’il aimerait voir la Croatie gagner. Malgré qu’il soit un tennisman parmi les meilleurs mondiaux et très respecté pour cela en Serbie, les réactions ont été terribles. Les nationalistes sont extrêmement puissants, violents, dans un pays corrompu où les mafias sont omniprésentes et les meurtres politiques nombreux, où l’émigration est massive, où plus rien ne tient.

Mais il reste un petit noyau dur, populaire et internationaliste, qui parfois reprend le dessus. Lorsqu’il y a eu l’annonce de la mort de Djordje Balasevic, le 19 février 2021 des suites du COVID, toute la Serbie en a parlé. Mais pas seulement : c’est vrai également de tous les pays de l’ex-Yougolsavie. Ils ont été obligé d’en parler, tellement Djordje Balasevic est respecté du peuple, pour ce qu’il représente.

Il a été le fer de lance culturel de la partie non contaminée par le nationalisme fou et assassin que Djordje Balasevic dénonçait déjà en 1988, comme ici dans Requiem.

« Si jamais je passe dans les rues avec ton nom
Je pense toujours à cette chanson
Je ne la change plus depuis des années
Ce vieux refrain dont plus personne n’en a besoin
Et les gens se rappellent mal des chansons, commandant [Tito]…

Il reste dans les livres et les histoires sur nous
Les Balkans [sont] à la fin d’une époque
Chaque tribu se dessine une frontière
Toutes veulent leur propre camp
Les rêves fondent comme les glaciers, commandant…

Aux frontières il y a de nouveau des drapeaux
Le monde est comme ailleurs
Et les enfants sont enlevés des cours pour voir les ouvriers affamés
Et où sommes-nous, les naïfs
Pourquoi nous sommes-nous soulevés en entendant « Hej Sloveni »
[« Hé, les Slaves » : chanson tchèque de 1834 devenu l’hymne de l’unité slave,
adoptée en Yougoslavie en 1945 et finalement reconnu hymne officiel en 1977]

Comme si nous avions été inventés avec cette histoire…
Les temps sont durs pour les gars comme moi
Qui s’occupent de leurs affaires…
Je ne suis pas une marionnette dont on peut faire ce qu’on veut
Je n’ai que la Yougoslavie…

Djordje Balasevic était un vrai Yougoslave : d’une mélancolie romantique engloutissant tout, burlesque, emporté et avec une profonde fibre sociale populaire, ancré forcément dans les mélodies populaires et horrifiées par les phénomènes superficiels lessivant la culture (comme l’est en grande partie le « turbo folk »). Né en Voïvodine, largement marqué par la Hongrie (et avec une importante population hongroise), il a porté pendant plusieurs décennies des chansons populaires, accessibles et hautement développées.

« Je n’aime pas le mois de janvier ni les diables de l’hiver blanc
Partout dans la neige je vois les mêmes traces de petits pas
A nombre de trente et qui sait partant lentement

Je ne vais plus désormais rue Dositej
Je ne sais pas où c’est quand quelqu’un me demande où elle est
Les deux-cent six pas à cette rue
Que je n’ai jamais compté

Je ne t’ai jamais protégé
Je ne t’ai jamais caressé
Je n’ai jamais pris soin de toi
J’ai marché sur ton amour
J’ai simplement tout compté »

On a tout dit de son caractère national quand on voit son album Dnevnik starog momka. Chaque chanson consiste en un nom féminin, la première lettre de chaque formant « Olja je najbolja », soit Olja est la meilleure : il s’agit évidemment de sa femme Olivera.

La perte de Djordje Balasevic marque la fin d’une époque. Le rêve yougoslave a été englouti par les nationalismes, la situation est dramatique. Et les problèmes remontent à loin : à Tito qui a fait le choix du bloc occidental à la fin des années 1940 et monté indirectement les peuples les uns contre les autres (ce que Djordje Balasevic n’a pas vu), et au-delà aux divisions provoqués auparavant par l’Autriche-Hongrie et l’empire ottoman…

Djordje Balasevic est un jalon sur le long parcours de l’amitié et de l’unité des peuples des Balkans… Son dernier concert aura eu lieu en décembre 2019 à Zagreb, en Croatie. Tout un symbole.

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Politique

L’échec du rassemblement du 20 février 2021 de Génération Identitaire

Malgré une énorme médiatisation, très peu de monde s’est mobilisé contre la dissolution de Génération Identitaire. Heureusement, même si cela montre que la France est hors sol.

Génération Identitaire, avec ses thèses « occidentalistes », a eu ces derniers temps un énorme succès dans les rangs de la Droite, développant également sa présence médiatique. Et pourtant, alors que le gouvernement entend dissoudre cette structure, elle n’a réussi à mobiliser samedi 20 février 2021 qu’autour de 1500 personnes à Paris.

Marine Le Pen avait pourtant elle-même protesté contre la mesure d’interdiction. Elle a, il est vrai, interdit aux cadres du Rassemblement national de s’y rendre. Rien n’empêchait cependant à la base du Rassemblement National ou à des gens de Droite de s’y rendre. Le 20 février 2021 aurait pu être une catastrophe historique, un jour clef pour l’union de la Droite et de l’extrême-Droite.

Heureusement, cela n’a pas été le cas. Mais nullement en raison de l’antifascisme. C’est le capitalisme lui-même qui a bloqué Génération Identitaire. Car en France, la politique se consomme et aucune structure n’arrive à exister en tant que tel.

Si l’on omet quelques très rares structures, forcément petites, qui œuvrent opiniâtrement à maintenir un cadre intellectuel et culturel, tout ce qui marche ne propose que du consommable. C’est vrai à l’extrême-gauche anarchiste ou anarchisante comme à l’extrême-droite, avec d’ailleurs une convergence dans le populisme consensuel. D’où les inévitables récoltes d’aliments pour des gens ayant socialement décroché, sur le mode de la charité chrétienne.

Quant au reste, si une action n’est pas utilisable par une personne présente pour une valorisation individuelle sur Facebook, Twitter ou Instagram, avec possibilité de la « liker », elle n’amène personne, elle n’intéresse personne, c’est comme si elle n’existait pas.

Or, qu’en reste-t-il derrière? Pas grand chose. Génération Identitaire paie ici le prix de sa superficialité : à ne proposer que du consommable, on devient soi-même consommation. D’où que le 20 février 2021 à Paris, il y avait même moins de manifestants que d’adhérents à Génération Identitaire (environ 2800 revendiqués). On ne fait pas de la politique en proposant une mentalité de petits groupes affinitaires jouant sur le folklore.

Tout cela n’est pas forcément rassurant pour autant. Car le fascisme, ce n’est pas tout le monde en uniforme, mais simplement la mort de la société civile, l’effondrement de toute capacité à prendre des responsabilités politiques et culturelles. Le fascisme, c’est une société d’individus isolés, relativisant tout, avec un Etat prenant des décisions technocratiques prétendument conforme aux intérêts des gens.

Si donc tant mieux que les gens n’aient pas choisis Génération Identitaire, ils ne l’ont pas pour autant pas choisi. En fait, ils sont indifférents. Et cela c’est terriblement dangereux. C’est la preuve que les Français sont prêts à confier leur sort à un sauveur suprême, qu’ils veulent refiler les clefs du pouvoir pour mener une vie individuelle tout à fait isolée.

Et c’est là un danger très concret, avec les élections présidentielles en 2022.

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Société

Les cinq salauds du Conseil scientifique qui veulent confiner les personnes âgées et les plus fragiles

Reflet du social-darwinisme, des membres du conseil scientifique publient un article en anglais afin de pousser au confinement des personnes âgées et des plus fragiles. C’est ignoble.

C’est une initiative à peine croyable. Cinq membres du Conseil scientifique ont décidé de s’exprimer en faisant fi de cette structure, mais en s’en arrogeant le prestige. Ils ont poussé le caractère anti-démocratique de leur initiative jusqu’au bout, en publiant leur point de vue en anglais, dans une revue médicale britannique, The Lancet : « Immune evasion means we need a new COVID-19 social contract« .

C’est là chercher à poignarder le peuple dans le dos, en avançant les pions du social-darwinisme de manière masquée. C’est ignoble.

Car que disent ces gens ? Ils disent ce que disent les pires gens en France depuis le début de la pandémie : il y en a assez de maltraiter la vie quotidienne de la majorité au nom des plus vieux et des plus fragiles. Ces derniers n’ont qu’à se mettre de côté. Heureusement, une telle position a provoqué un haut-le-cœur démocratique. C’était tellement ignoble que cela a été considéré comme immédiatement inacceptable.

Mais comme la situation est délétère depuis plusieurs mois et qu’il y a un grand tournant à Droite du pays, la thèse revient en force. C’est le reflet du social-darwinisme, d’une logique fasciste. C’est marche ou crève. Et afin de se justifier, les auteurs avaient besoin d’un prétexte : ils l’ont avec les variants. Puisque tout recommence, alors il faut tout changer et faire ce qui a été raté depuis le début : mettre les personnes âgées et les plus fragiles de côté, et tant pis pour elles.

Il en va de l’économie, disent les auteurs, il en va des jeunes, et de toutes façons les gens en ont assez, ils ne font plus confiance aux gouvernements, alors autant y aller et leur faire accepter des mesures moindres en mettant les personnes âgées et les personnes fragiles de côté. De toutes façons, disent-ils, de mars à juin 2020, 96% des morts additionnels liés au COVID-19 ont concerné des patients âgés de plus de 70 ans.

Tel est le cynisme de l’immunologue Jean-François Delfraissy (par ailleurs président du Conseil scientifique), de Franck Chauvin (président du Haut Conseil pour la santé publique), de l’anthropologue Laëtitia Atlani-Duault, de l’infectiologue Denis Malvy, du virologue Bruno Lina.

Et la conclusion de leur texte est sans ambiguïtés :

« Nous, scientifiques qui travaillons contre le COVID-19, devons avoir le courage de nous adresser à ceux qui sont au pouvoir, qui portent la responsabilité ultime pour les politiques choisies et leurs conséquences.

Si cette responsabilité est esquivée ou retardée, le jour inévitable de l’addition à payer pourrait être terrible. »

Telle est la menace absolument caractéristique du social-darwinisme, le chantage du fascisme : laissez-nous être anti-social, sinon le caractère anti-social refoulé reviendra de manière encore plus violente !

Quels salauds ! Il faut s’opposer à eux. Et se rappeler du pasteur Martin Niemöller:

« Quand ils sont venus chercher les juifs
je n’ai rien dit
car je n’étais pas juif.

Quand ils sont venus chercher les communistes
je n’ai rien dit
car je n’étais pas communiste.

Quand ils sont venus chercher les syndicalistes
je n’ai rien dit
car je n’étais pas syndicaliste.

Et quand ils sont venus me chercher
il n’existait plus personne
qui aurait voulu ou pu protester… »

 

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Société

Le CNRS en défense des études « postcoloniales » et « intersectionnelles »

Le CNRS refuse de suivre la ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche qui a mit les pieds dans le plat sur le terrain glissant des valeurs post-modernes.

Le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) est une sorte d’immense usine à gaz, mêlant cooptation, népotisme, recherches bidons et réel travail de très haut niveau, le tout à la fois au service de l’idéologie dominante et des entreprises. 32 000 personnes dont 11 000 chercheurs, 13 500 ingénieurs et techniciens, œuvrent à étudier dans tous les domaines, avec un budget de 3,4 milliards d’euros, en toute indépendance.

Né en 1939, c’est en effet une entité bureaucratique, s’auto-satisfaisant, payant mal mais prestigieuse, brillante parfois, parasitaire souvent, relevant entièrement de l’appareil d’État moderne. C’est à ce titre que Frédérique Vidal, ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche, a fait appel au CNRS le 16 février 2021. Elle demande « un bilan de l’ensemble des recherches » sur un thème très particulier : « l’islamo-gauchisme à l’université ».

Le CNRS se veut neutre, au service de l’État et de la population, etc. On fait donc appel à lui pour légitimer l’idéologie dominante.

Or, naturellement, la petite-bourgeoisie intellectuelle du CNRS converge avec ce qu’on appelle improprement l’islamo-gauchisme et qui consiste en réalité en l’idéologie post-moderne. Cette idéologie est née d’ailleurs dans les universités françaises, avec des auteurs comme Jean-Paul Sartre, Michel Foucault, Gilles Derrida, Frantz Fanon, Jean Baudrillard, Jacques Derrida, Roland Barthes, Julia Kristiveva, Jean-François Lyotard, etc.

Le CNRS a donc publié un communiqué exprimant sa fureur idéologique : on ne doit pas toucher à l’idéologie post-moderne !

On lit ainsi :

« L’islamogauchisme », slogan politique utilisé dans le débat public, ne correspond à aucune réalité scientifique.

Ce terme aux contours mal définis, fait l’objet de nombreuses prises de positions publiques, tribunes ou pétitions, souvent passionnées.

Le CNRS condamne avec fermeté celles et ceux qui tentent d’en profiter pour remettre en cause la liberté académique, indispensable à la démarche scientifique et à l’avancée des connaissances, ou stigmatiser certaines communautés scientifiques.

Le CNRS condamne, en particulier, les tentatives de délégitimation de différents champs de la recherche, comme les études postcoloniales, les études intersectionnelles ou les travaux sur le terme de « race », ou tout autre champ de la connaissance.

Le CNRS dit ensuite qu’il est prêt à obéir à la ministre, évidemment, mais dans un autre cadre, celui des « Recherches sur les radicalisations, les formes de violence qui en résultent et la manière dont les sociétés les préviennent et s’en protègent ».

Tout cela est très révélateur. Il rappelle les dénégations de journaux comme Le Monde pour qui « l’idéologie du genre » n’existerait pas. Cela a deux aspects. D’un côté, c’est hypocrite car ces gens savent très bien que la bourgeoisie paye toute une série d’intellectuels pour produire les valeurs post-modernes à la chaîne. L’art contemporain, la psychanalyse, la théorie de la « transidentité », l’écriture inclusive… sont des fantasmagories produites par des universitaires et diffusée par les avant-gardes du turbocapitalisme.

De l’autre, ces gens s’imaginent réellement progressistes en raisonnant en termes de droits individuels. Ils se définissent d’ailleurs souvent de gauche ou s’imaginent s’y rattacher. Ils croient en leurs propres mensonges.

Frédérique Vidal, ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche, a donc mis les pieds dans le plat. On sait bien d’ailleurs comment Emmanuel Macron relève lui-même de l’idéologie post-moderne. Il suffit de se rappeler de la fête de la musique à l’Elysée en 2018. Seulement, le capitalisme a trop ébranlé la société et le gouvernement aimerait essayer de mettre des garde-fous.

Mais comment mettre des garde-fous alors que tout l’appareil d’État a été le support du relativisme, du libéralisme, du scepticisme ? D’où la demande incohérente de la ministre et, inversement, le renforcement sans commune mesure des conservateurs et de l’extrême-Droite ces derniers temps, avec Éric Zemmour, Marion Maréchal, Michel Onfray, Pascal Praud, etc.

Le libéralisme va à son paroxysme alors que le capitalisme va à la guerre et qu’ainsi les nationalistes ont le vent en poupe. Comme dans dans les années 1920-1930. Et face à cela, il y a un seul camp : celui de la Gauche historique.