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La guerre à venir contre les drogues de synthèse en France

En 2023, les drogues de synthèse n’existent que de manière marginale en France. Considérer qu’il existe un 24 heures sur 24 du capitalisme aboutit toutefois inévitablement à l’affirmation que celles-ci vont s’imposer et s’installer.

Elles répondent en effet à toutes les exigences de ce 24 heures du 24 du capitalisme. Faciles àa produire, faciles à distribuer, elles répondent aux atteintes des populations totalement déboussolées vivant dans le capitalisme avancé. Le zombie drogué est le pendant du zombie consommateur. Mais pas seulement : même pour travailler, les drogues sont devenues un support parfois nécessaire pour tenir le choc.

C’est là justement où les drogues de synthèse forment un saut dans la barbarie. Elles combinent fuite, dimension « récréative », intensité forcenée. Anti-douleur ou excitation rapide, mise de côté des angoisses, oubli des souffrances et coup de boost : voilà pour résumer la « magie » des drogues de synthèse. En fait, le capitalisme triomphant a tout simplement modifié le rapport aux drogues.

Le paysage métropolitain s’accompagne forcément de personnes en perdition, brisées dans la misère par les drogues

Les drogues sont, historiquement, en effet un fétichisme des débuts de l’humanité, où les consciences primitives des premiers Hommes, dans un environnement froid et hostile, découvraient les joies et les peines. Cela a donné les notions de paradis et d’enfer, le chamanisme préfigurant le monothéisme.

Et les drogues qu’on pouvait trouver naturellement étaient utilisées comme support au sein de religions établies. Ces drogues bouleversaient les esprits et ce bouleversement chimique était imaginé comme un accès à l’au-delà. Par la suite, se détachant de la dimension mystique, l’humanité a développé des drogues récréatives, se faisant piéger par le cannabis ou l’opium. Ici, on est dans une fuite assumée de la réalité, dans une optique de nervosité effacée.

La bataille de Palikao en 1860 marque la victoire franco-anglaise sur la Chine pour la forcer à accepter la consommation d’opium par sa population

Tout a changé depuis. La fin du 20e siècle a été marqué par le développement important de la chimie dans le domaine des drogues, avec surtout naturellement la superpuissance américaine, par les laboratoires des grandes entreprises pharmaceutiques, mais également l’armée américaine. On a notamment Alexander Shulgin qui a dressé un véritable catalogue des drogues de synthèse.

Puis, l’expansion capitaliste massive de 1989 à 2020 a permis un accès facile et aisé au matériel et aux matières premières pour fabriquer des drogues de synthèse. Après une première période artisanale criminelle, notamment romancée dans une série typiquement décadente comme « Breaking bad », on est désormais passé au niveau industriel.

Encore fallait-il un terreau pour cela. Il a été fourni par la crise sanitaire au sein de la superpuissance américaine. Le caractère misérable des soins accordés a permis à certaines entreprises de diffuser en masse des anti-douleurs. Outre que cela a provoqué de l’accoutumance et des décès, cela a été la porte ouverte à un trafic d’anti-douleurs produits dans des laboratoires mexicains avec des matières premières achetées en Chine.

En 2023 l’une des options américaines est une intervention militaire contre le Mexique afin de stopper les cartels

Il va de soi que la superpuissance chinoise était bien consciente des enjeux qu’on trouve ici, tout comme avec TikTok dont l’utilisation est largement restreinte dans son pays d’origine. Les drogues sont un vecteur d’importance stratégique ; un autre exemple significatif est la production massive désormais par la Syrie d’une drogue de synthèse, le captagon.

Et, donc, la crise des « opioïdes » est massive aux Etats-Unis désormais ; avec 90 000 morts par an, San Francisco envahi par des zombies en quête de « Fentanyl », le désastre est complet. Mais c’est également un modèle.

Une drogue de synthèse, en effet, ne nécessite pas de disposer de matières premières agricoles, comme pour le cannabis et le pavot. Pas besoin d’une agriculture maîtrisée, pas besoin de les transporter clandestinement non plus. Les quantités demandées sont de plus infimes. Rien que les saisies américaines de fentanyl en 2022, 4,5 tonnes, suffiraient à tuer l’ensemble de la population américaine.

2 mg de Fentanyl est déjà une dose létale pour la majorité des gens; la pièce américaine est un équivalent de nos cents et a 19 mm de largeur seulement

Jusqu’à présent, les experts bourgeois relativisent tout cela, en disant qu’aux Etats-Unis, il y a une dépendance aux anti-douleurs, qui n’existe pas ailleurs. Sauf qu’en réalité, il y avait juste un développement inégal et maintenant le fléau installé, il va se systématiser. Déjà en septembre 2023, l’Agence régionale de santé (ARS) de La Réunion constatait que les drogues de synthèse étaient présentes (protonitazène et étonitazène, plusieurs centaines de fois plus puissants que l’héroïne et la morphine). La Réunion connaît également les cannabinoïdes synthétiques, une version synthétique du cannabis sous forme de poudre, d’huile, de liquide ultra-concentré.

Et l’État, prisonnier de la forme en raison de sa nature bourgeoise décadente, a souvent un train de retard. Il faut en effet que la combinaison chimique employée pour une drogue de synthèse soit interdite officiellement de la part d’un Etat. Ce n’est pas la drogue qui est interdite, mais telle ou telle forme chimique. Il suffit donc parfois aux criminels de jouer sur quelques éléments pour contourner la loi. Cela permet un espace énorme pour les dealers qui vendent massivement sur internet des « sels de bain », de « l’engrais », de « l’encens », sans rien risquer, en inventant une nouvelle forme de drogue chaque semaine !

Avec de la « créativité » perverse. Une drogue comme la 3-MMC combine les effets de la cocaïne, de la MDMA et des amphétamines. C’est l’une des drogues mise en avant dans les soirées LGBT « Chemsex », des orgies avec utilisation massives de drogues qui ont largement été mises en avant dans la presse « branchée ». Les drogues de synthèse, ce n’est plus l’ancien monde du cannabis (d’ailleurs lui-même largement modifié en fait), de la cocaïne et du LSD. C’est un « horizon nouveau » pour le 24 heures sur 24 du capitalisme.

La discothèque berlinoise du Berghain ouverte en 2004 a joué un rôle significatif dans l’idéologie des drogues chimiques « branchées »

La fuite en avant dans les drogues synthétiques correspond tout à fait au rythme capitaliste, tant du point de vue du producteur que du consommateur. Il est capable de répondre à toutes les situations, tous les besoins. C’est une tendance inéluctable. Le Rapport européen sur les drogues 2023 constate lui-même que les drogues de synthèse s’affirment. La mondialisation du phénomène se lit également quand on voit l’avancée du tramadol en Afrique de l’Ouest et du Centre (où 10 % de la population consomme du cannabis par ailleurs). La méthamphétamine est en train de se lancer massivement au Mexique, alors qu’elle est déjà fortement présente en Asie de l’Est et du Sud-Est.

Dans un tel panorama, il est évident que seul le Socialisme peut proposer une réponse, car la réponse ne peut qu’être collective. Destruction militaire des mafias et refonte culturelle de la population, voilà la solution nécessaire, qui ne peut être mise en place que par le peuple en armes, car rien ni personne ne doit échapper au processus d’éradication du fléau.

Le Nouvel Ordre nécessaire implique un combat acharné et sans pitié contre les drogues de synthèse, cette sinistre réalité si conforme au 24 heures du 24 du capitalisme. Tout compromis sur ce plan, avec les drogues en général même, ramène au vieux monde. A la différence ici que les « vieilles » drogues étaient des fuites à rejeter, et que les nouvelles relèvent d’une participation coûte que coûte à un monde en perdition.

De la drogue en mode petit-bourgeois passif ou aristocrate prétentieux, déjà méprisable et condamnable, on passe aux drogues pour « tenir », pour se « précipiter », pour « aller de l’avant ». C’est là un accompagnement du capitalisme du 24 heures sur 24 de la vie quotidienne et donc un ennemi complet.

Et ce seront les femmes qui seront en première ligne contre le fléau : les mafias sont constitués d’hommes, les consommateurs sont en quasi totalité des hommes. Ce n’est pas pour rien !

Mikhail Devyatov, Sportives, URSS 1953
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La révolution, c’est le sursaut de civilisation

La conscience d’autrui n’est pas possible dans une société qui ne le permet pas. Ainsi, dans la société tribale de chasseurs-cueilleurs, les rapports avec l’extérieur sont très limités, et lorsqu’ils surviennent, ils prennent la forme de la méfiance, voire d’une défiance en l’absence de confiance.

Confiance dans la société et stabilisation de la vie sociale sont la base même de la civilisation qui trouve à s’exprimer à travers la succession des modes de production.

Le mode de production capitaliste a été ici un formidable stabilisateur de la vie quotidienne et, en élargissant à tous les niveaux la division sociale du travail, il a également participé à la diffusion générale de la confiance dans les relations interpersonnelles.

Mais on l’aura compris, survient en creux la question de la lutte des classes.

La civilisation est toujours portée par un mode de production à travers une classe, passée de dominée à dominante, avant d’entrer elle-même en décadence, incapable de porter et de continuer la civilisation et finisse par cela même renversée.

Une révolution est toujours une expression de la continuation de la civilisation, menacée d’effondrement du fait que son ancien support historique, la classe dirigeante, s’est transformée en classe historiquement dépassée.

Cette continuation s’exprime de manière dialectique et non mécanique : ce n’est pas simplement le fait que les « riches ont tout et les pauvres rien », mais que les travailleurs d’un mode de production donné (esclaves, paysans asservis, travailleurs salariés) contribuent activement à un niveau de raffinement dont il sont exclus du fait du rapport d’exploitation-aliénation.

Quand les esclaves de l’Égypte romaine extraient le granit nécessaire aux somptueuses colonnes du panthéon de Rome, ils participent à bâtir une architecture d’un grand raffinement bien qu’ils soient eux-mêmes placés dans des conditions en-deçà du niveau de civilisation.

Et la majorité des esclaves dans l’Empire romain étaient issus des peuples barbares qui, au Ve siècle, le mèneront à la chute sans pour autant avoir, à cette époque, les moyens matériels immédiats pour faire continuer la civilisation (qui trouvera son chemin dans l’Islam).

C’est là que l’Histoire de la civilisation se lie à la lutte des classes de manière dialectique, et non mécanique : il ne suffit pas de renverser une classe décadente pour continuer la civilisation, faut-il encore en avoir les moyens sociaux, politiques et culturels.

À ce titre, la révolution soviétique représente un sursaut de civilisation. Elle sauve le raffinement de l’être humain, ayant basculé dans la violence généralisée, le pourrissement de l’âme, la décadence absolue de la première guerre mondiale. Il suffit de relire ce passage du célèbre article « Socialisme ou barbarie » écrit en 1915 par Rosa Luxemburg pour voir la portée civilisationnelle d’Octobre 1917 :

« Souillée, déshonorée, pataugeant dans le sang, couverte de crasse ; voilà comment se présente la société bourgeoise, voilà ce qu’elle est.

Ce n’est pas lorsque, bien léchée et bien honnête, elle se donne les dehors de la culture et de la philosophie, de la morale et de l’ordre, de la paix et du droit, c’est quand elle ressemble à une bête fauve, quand elle danse le sabbat de l’anarchie, quand elle souffle la peste sur la civilisation et l’humanité qu’elle se montre toute nue, telle qu’elle est vraiment. »

Car il faut bien s’imaginer que si historiquement tout appareil d’État est affaire de conditionnement social en vue de faire correspondre la psyché des gens avec une vie plus stable, plus pacifiée, quel sens cela a t-il dans une tranchée pleine de boue, dévastée et sous le feu d’une artillerie avec des obus produits à la chaîne ?

De la mission civilisatrice, l’État en est revenu à sa seule fonction de « domination de classe », dilapidant le meilleur de la civilisation dans les prétentions étroites d’un capitalisme ayant atteint son stade impérialiste. La civilisation exige alors de bâtir un nouvel Ordre pour sauvegarder la civilisation : c’est le sens des Soviets.

C’est pourquoi face à l’effritement de la civilisation, il y a toujours deux options : l’une conservatrice qui veut rétablir l’ordre pourrissant mais qui a porté autrefois l’élan, et l’autre, révolutionnaire, qui vise l’établissement d’un nouvel Ordre fondé sur la cohérence, l’harmonie, la rationalité à tous les étages. Il faut relire cet interview d’un membre de la Gauche prolétarienne en 1970, dont les propos sonnent juste actuellement :

« Dès qu’on refuse la société actuelle, sous les prétextes les plus divers, on se figure qu’on est maoïste alors que ce n’est pas ça. Une société communiste c’est bien plus contraignant qu’une société capitaliste.

C’est plus facile à supporter qu’une société capitaliste, parce que c’est plus juste, mais pour l’instant c’est pas le cirque : il ne faut pas compter là-dessus pour faire tout ce qu’on voudra.

Moi, c’est ce que je souhaite parce que le capitalisme, c’est aussi le désordre. On exploite mal les richesses. Personne n’en profite. Il y a des gens qui crèvent à côté de richesses inexploitées. Il y a des parties de la France inondées de constructions et d’autres désertiques.

Toutes ces conneries-là, c’est le désordre, et pour moi, le communisme c’est l’ordre. »

La révolution c’est la capacité de la classe exploitée à s’organiser pour s’approprier le meilleur de la civilisation et le faire se continuer historiquement en l’enrichissant de nouveau.

On comprend donc que si la question de la propriété des moyens de production est importante – il faut bien avoir les moyens matériels pour réaliser la civilisation, l’enjeu central est avant tout le pouvoir d’État – il faut surtout avoir les moyens administratifs et policiers pour sauvegarder puis élever la civilisation.

Car, en réalité, limiter la révolution à la transformation de la propriété des moyens de production, c’est rester dans une forme de gauchisme qui limite la révolution à une « émancipation sociale » et non pas à la continuation-élévation de la civilisation, qui relève forcément de la question du pouvoir d’État.

Si la civilisation est un processus qui se déroule dans les interstices culturels des rapports sociaux, elle est avant tout conditionnée et garantie par l’appareil d’État.

L’État est en première instance l’expression de la complexification de la société, et en cela la garantie de relations sociales pacifiées et raffinées grâce aux règles et lois qu’il impose. En dernière instance, il est l’expression d’une classe qui en domine une autre. L’État est donc à la fois une garantie universelle et en même temps une expression spécifique, conjoncturelle, reliée à une classe.

C’est la raison pour laquelle la continuation de la civilisation prend la forme à un moment donné de l’Histoire de la violence qui vise en remplacement d’un État par un autre.

Car la révolution ce n’est pas simplement le processus de transformation d’une classe exploitée et dominée en une classe dominante, c’est aussi et surtout le passage d’une classe dirigée à une classe dirigeante. Et pour diriger, il faut orienter, fournir un axe, une perspective. Cela ne peut que relever de la civilisation en tant que condensée du meilleur de l’Humanité dans les mœurs, dans les manières de vivre.

Mise en valeur de Pouchkine en URSS

Il a bien fallu la violence révolutionnaire à la fin du XVIIIe siècle pour que le processus de civilisation ne s’éteigne pas dans une élite aristocrate toujours plus repliée sur elle-même, s’appropriant le meilleur du raffinement royal pour mieux le dilapider dans la décadence.

Lorsque la noblesse d’épée, l’aristocratie terrienne d’ancien régime entre en décadence aux alentours du XVIe siècle, l’avant-garde de la bourgeoisie s’est déjà solidement implantée dans l’appareil administratif de la monarchie, lui donnant sa forme absolutiste.

C’est qu’elle s’apprête à devenir une classe dirigeante et à assumer la continuité de la civilisation : les bourgeois lettrés manient le droit et le code romain, cet héritage de la civilisation leur ouvrant la voie à l’administration de l’État moderne.

C’est la raison pour laquelle Lénine a tant insisté sur le rôle de la conscience et de l’idéologie car en s’appropriant le meilleur de la culture et de la science, la classe ouvrière acquiert une conscience de classe qui doit exprimer une supériorité par rapport à la bourgeoisie décadente.

On ne peut comprendre le rejet par la social-démocratie historique des attentats individuels, représentatifs d’un retour aux temps des seigneurs féodaux où des individus « se font justice », « défendent l’honneur des pauvres » sur le mode d’une « vengeance de classe » qui n’a aucun sens du point de vue de la civilisation.

C’est là d’ailleurs un précieux critère pour faire le tri quant à la violence qui s’exprime dans la société.

La violence relève de la civilisation lorsqu’elle s’impose d’emblée comme une violence d’État, du moins à prétention étatique. S’opposer à un chauffard, à un trafiquant de drogue, à des incivilités en tous genres, c’est faire preuve du sens de l’État. La violence qui a le sens de l’État, c’est celle qui porte en elle la perspective d’un Ordre qui sait sauvegarder les règles de la vie courante, les bonnes mœurs.

De manière plus collective, la violence révolutionnaire représente le condensé d’un nouvel Ordre en cours de formation qui cherche à s’imposer pour sauver le raffinement, le beau et le bon et le généraliser à tous.

On ne peut pas comprendre la victoire soviétique contre le nazisme sans saisir cet aspect civilisationnel. Car la force de l’URSS, ce ne fut pas seulement que le peuple laborieux s’était émancipé socialement, mais qu’il avait accédé à l’ordre socialiste.

Mieux, l’élévation générale du niveau culturel et intellectuel de la classe ouvrière à travers sa scolarisation et l’alphabétisation généralisée, mais également tout le travail culturel éducatif a fait du peuple un participant actif de la civilisation.

Cela se lit bien dans la construction du métro de Moscou dans les années 1930, mais aussi dans les nombreux abribus pour autocars qui se veulent une expression esthétique avancée.

De fait, la défense d’un tel ordre revêtait une dimension historique et morale capitale, indomptable, face à un régime nazi célébrant le glauque et le baroque.

La défense de la civilisation comprise dans un sens révolutionnaire revêt l’aspect d’un programme politique en soi car il est possible et nécessaire de décliner l’envergure classique-civilisationnelle à l’ensemble des champs des rapports sociaux : en art donc, mais aussi dans le langage, les manières de manger, de s’exprimer, de se déplacer.

Il est possible et nécessaire d’en faire un étendard de sa vie quotidienne : les exploités sont le rempart à la décadence, car ils méprisent un ordre qui vacille et fait se diluer progressivement les acquis de la civilisation. Il faut se vivre comme un rempart et un défenseur de cette dernière.

À l’aune du déni des effets la pandémie et du réchauffement climatique, de la tendance à une nouvelle guerre mondiale, de l’effritement des règles de vie au quotidien, de la mocheté des villes, de la nullité dans les arts, de la compression des sensibilités : Socialisme pour la civilisation ou barbarie.

« Nous sommes placés aujourd’hui devant ce choix : ou bien triomphe de l’impérialisme et décadence de toute civilisation, avec pour conséquences, comme dans la Rome antique, le dépeuplement, la désolation, la dégénérescence, un grand cimetière ; ou bien victoire du socialisme, c’est-à-dire de la lutte consciente du prolétariat international contre l’impérialisme et contre sa méthode d’action : la guerre.

C’est là un dilemme de l’histoire du monde, un ou bien – ou bien encore indécis dont les plateaux balancent devant la décision du prolétariat conscient. Le prolétariat doit jeter résolument dans la balance le glaive de son combat révolutionnaire : l’avenir de la civilisation et de l’humanité en dépendent. »

Rosa Luxemburg, Socialisme ou barbarie, 1915
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L’avenir de la circulation passera par le train

C’est une question de civilisation.

Dans l’avenir, on peut gager sans risque, et tout particulièrement en France qui a déjà une certaine tradition en la matière, que le train aura une place centrale dans la circulation des personnes et des marchandises.

A grande échelle, il n’y a pas de moyens de transport terrestre aussi efficace que le train. Il a joué un rôle historique pour le développement de la société, par le capitalisme. Mais le capitalisme l’a relativement mis de côté, au profit des voitures et des camions, bien plus conformes finalement aux exigences du capital (pas de planification, fonctionnement en flux tendu, atomisations des acteurs économiques, privatisation des intérêts, aucune considération pour la planète et la santé de la population, etc.).

C’est tout le problème du capitalisme, qui favorise des solutions individuelles, alors qu’il faut en réalité des moyens collectifs. Il est plus naturel pour lui de se tourner vers la circulation routière, qui laisse les gens seuls face à leur besoin de se mouvoir.

Besoin d’ailleurs accru par l’existence d’une contradiction entre la ville et la campagne, qui force beaucoup de personnes plus éloignées des cœurs économiques que sont les villes à faire de longs trajets pour aller travailler. C’est ce qui explique pourquoi la voiture et le camion sont bien plus choyés par le capitalisme que les transports collectifs.

Mais le train jouera un rôle capital à l’avenir, tant sa capacité à réduire la taille du monde est importante. Les masses ont et auront besoin d’un réseau ferroviaire développé pour ne plus rouler en voiture…

Les Français de demain devront organiser démocratiquement le secteur des transports, ce qui n’est pas une mince affaire tant la situation actuelle est critique. Cette réorganisation de la société, et donc par extension de la façon de se déplacer, devra absolument avoir l’écologie comme horizon. Cela exigera de se battre contre l’étendue toujours plus vaste du réseau routier et ses millions de voitures et de camions dégazant en permanence au rythme imposé par un capitalisme qui exige que chacun s’organise à sa manière de son côté, dans un flux ininterrompu, 24 heures sur 24, 7 jours sur 7.

Le train est plus rapide que la voiture. Il est aussi moins polluant et incommensurablement moins dangereux. Il permet de faire déplacer un très grand nombre de personnes en un temps record, avec une dépense énergétique moindre, là où les autoroutes connaissent des bouchons, un rendement énergétique catastrophique, des accidents au quotidien, avec des chauffards qui font trop souvent la loi…

Les masses ont besoin de trains plus performants, en plus grand nombre, plus confortables ! Il faudra rouvrir des lignes, en créer de nouvelles, procéder à la mise en place du train et ses dérivés comme le tramway comme moyens de transports principaux de la population. Tout cela bien sûr doit être couplé avec les autres moyens de transport que sont le vélo, l’avion ou encore le bateau. Il faut ajouter évidemment à cela la marche à pied, qui dans des villes et des campagnes correctement aménagées selon les besoins du peuples, et non ceux du capitalisme, sera un moyen de déplacement privilégié.

La voiture et les camions quand à eux devront se contenter d’une place limitée, là où ils sont vraiment utiles : pour le déplacement des personnes très isolées à la campagne, pour les transports urgents de proximité (police, ambulance, travaux, etc.), pour les derniers kilomètres du transport de marchandise tant dans les villes que les campagnes.

Le mot d’ordre sera simple : aucune proposition s’appuyant sur les responsabilités d’individus coincés dans le statu quo ne saurait être considérée comme une solution aux problèmes qui se poseront à l’avenir. Quelques soient les problématiques, il devra toujours y avoir une réponse à l’échelle de la société elle-même, et le train en fera partie.

Sortir de la civilisation de l’automobile pour fonder une nouvelle civilisation du train, tel doit être le programme de la Gauche !

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L’humanité n’aura plus qu’un pays, qu’une seule langue

C’est le sujet le brûlant de l’humanité actuelle et, pour cette raison, il a totalement disparu des discussions. C’est un paradoxe dialectique qui montre que l’Histoire est prête!

Si vous demandez à quelqu’un si la France existera encore dans 500 ans, il vous répondra oui. S’il y aura encore des blancs et des noirs, il dira oui. Tout au plus y aura-t-il la reconnaissance que des choses puissent arriver, que certains pays peuvent donc disparaître.

Mais l’idée d’une humanité unifiée au niveau mondial a totalement disparu. Cet idéal des Lumières, de la Gauche historique s’est évaporé. Pour les gens, c’est même inconcevable.

Et en même temps, l’humanité n’a jamais été autant mélangée, métissée, « mondialisée » que ces trente dernières années. Rien que la pandémie, vécue consciemment par l’humanité (contrairement à la grippe dite espagnole par exemple), a montré la futilité des frontières.

Ces mêmes gens qui reçoivent des paquets du bout du monde, commandés sur internet qui est un réseau mondial, qui connaissent des personnes de toutes les couleurs de peau… pensent que l’unification mondiale n’est pas possible !

Drapeau de la République Soviétique de Chine durant les années 1930 : « Prolétaires et peuples opprimés du monde, unissez-vous! »

La mondialisation capitaliste a provoqué un mélange favorable à l’unification mondiale. Mais comme celle-ci est contraire au capitalisme, il y a deux poussées contraires. La première, c’est l’idéologie LGBT et les discours « inclusifs » qui nient les différences de culture, afin d’imposer un cosmopolitisme consommateur. La seconde, c’est le repli nationaliste, communautaire.

Les deux ne n’opposent pas du tout, malgré les apparences. Dans tous les pays occidentaux, ces deux camps s’opposent en effet pour l’opinion publique, y compris violemment. Cependant, leurs intérêts communs les font se rejoindre.

Par exemple, en France, tant les pro-LGBT les plus furieux que les nationalistes les plus agressifs se rejoignent pour mettre en valeur l’Ukraine, l’Otan et la guerre à la Russie. Le facho homophobe et l’anarchiste libéral dans les mœurs sont unis dans leur même détestation du tiers-monde et de tout principe collectif « autoritaire ».

C’est tellement vrai qu’ils ont le même rêve. Les fachos rêvent de communautés autonomes sur une base raciale. Et le modèle de la « gauche de la gauche »? Ce sont les ZAD comme à Notre-Dame-des-Landes, le Rojava en Syrie, les zapatistes au Mexique, éventuellement des Indigènes en Inde, etc. On parle ici dans tous les cas de repli communautaire, avec une organisation au niveau communautaire, dans un esprit communautaire assumé.

Pour les moins « radicaux » qui visent une participation au gouvernement, c’est mis au niveau de la France : il faudrait une France comme communauté indépendante. Mais ça reste communautaire.

C’est le refus de la grande fusion mondiale.

Les armoiries de l’URSS : « Prolétaires de tous les pays, unissez-vous! »

Ce qui est intéressant, c’est qu’au début des années 1990, les Français pensaient plutôt que la France allait s’effacer dans une communauté européenne unifiée, qu’on aurait désormais un passeport européen. Tout cela semble si loin, alors que l’Union européenne s’est développée! Cela montre bien que le capitalisme ne peut plus unifier. Il unit quand ça l’arrange, mais il cherche toujours à surtout séparer.

Les partisans du socialisme ont inversement toujours souligné que l’humanité allait fusionner. Tous le pays allaient s’unir, se mélanger ; l’humanité parlerait une seule langue, produite de l’unification de l’humanité.

Il est évident du point de vue de la Gauche historique que, en l’an 3000, il n’y aura plus ni blancs, ni noirs, ni jaunes, ni de couleur de peau quelconque. Tout le monde sera tellement métissé que cela ne voudra plus rien dire. Quant à la France, évidemment qu’elle n’existera plus. Elle aura cédé la place à un autre pays, bien plus grand, et espérons le même, il n’y aura plus qu’un seul pays. Toutes les barrières nationales seront tombées.

Affiche soviétique des années 1920: « Bientôt l’univers entier sera à nous »

L’utilisation du mot « internationaliste » par la Gauche historique a précisément ce sens-là. Il a été déformé, sous l’effet du trotskisme et de l’anarchisme, sur un mode « la négation des pays », « au-delà des nations ». Mais ce n’est pas du tout le concept. L’internationalisme est prolétarien : le prolétariat mondial est ce qui compte réellement, et l’unification de l’humanité va avec la victoire de la révolution mondiale.

Et la victoire de la révolution mondiale indiquera le passage à la colonisation spatiale : telle était officiellement le point de vue de l’URSS, avec la figure majeure que fut théoricien de l’astronautique Constantin Tsiolkovsky. Le principe de la planète comme Biosphère, avec Vladimir Vernadsky, va en ce même sens.

Une seule planète, une seule humanité. La fin des barrières ethniques, nationales, tout comme les barrières tribales et claniques sont tombée de par le passé. Et une nouvelle aventure pour l’humanité : sa diffusion dans le Cosmos.

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Le nouvel ordre relancera l’opéra

L’opéra est l’expression puissante de la grandeur de la civilisation. C’est un art d’un grand raffinement, produit du travail immense de la part d’artistes forcément de très haut niveau, formés avec minutie pendant de nombreuses années depuis le plus jeune âge et bénéficiant d’un cadre de travail hors-norme. Qu’un orchestre symphonique s’accorde avec une scène où le chant et le théâtre doivent se mêler harmonieusement n’est pas une mince affaire. Qu’il en faut du travail pour jouer La flûte enchantée de Mozart !

Le jeu en vaut largement la chandelle quand on sait à quel point cela peut littéralement soulever une salle, bouleversant profondément chaque spectateur dans ce qu’il a de plus intime, le grandissant culturellement et moralement. Historiquement, la bourgeoisie, particulièrement en France, a très bien compris cela et elle a largement porté l’opéra. Cela pour asseoir son prestige et sa stature de classe dominante, mais aussi car elle se développait elle-même réellement à travers la culture classique.

Pourtant, le rythme, à la fois lent et puissant, et la profondeur des œuvres, qui sont l’inverse de la superficialité, ont fait que l’opéra a de moins en moins correspondu culturellement au capitalisme. L’art lyrique est bien trop raffiné pour le capitalisme avalant tout sur son passage et lissant tous les rapports pour en faire des marchandises consommables et jetables.

Alors, l’opéra est devenu totalement marginal, existant seulement grâce à un financement public gigantesque. Globalement, l’opéra en France, c’est 80 % de subvention et 20 % de recettes de billetterie ! Absolument aucun autre secteur culturel ne connaît un tel privilège. Mais le monde a changé, c’est la crise et même l’opéra, pourtant si prestigieux, ne résiste pas à la grande lessiveuse capitaliste.

Le constat est très simple : de moins en moins de public, de plus en plus de coûts fixes. L’opéra passe donc à la trappe.

L’offuscation des directeurs des opéras de Lyon, Montpellier, Toulouse ou Bordeaux fait l’actualité en 2023, alors que ceux-ci dénoncent le désengagement de l’État. C’est que l’heure est grave, tellement la société française est décadente et incapable d’assumer le meilleur de la civilisation. Comme le disait déjà en 2021 Jean-Philippe Thiellay, ancien directeur adjoint de l’Opéra de Paris, dans son livre L’Opéra s’il vous plaît :

« L’art lyrique peut disparaître corps et biens, c’est une certitude. »

Le ministère de la Culture est formel lui aussi. L’opéra, ainsi que la musique classique, n’intéressent plus personne, encore moins parmi les 15-28 ans qui désertent ; la bourgeoisie française n’éduque plus sa propre jeunesse !

Les cris d’alarme se multiplient. Le directeur de l’opéra de Rouen, responsables du syndicat regroupant la plupart des maisons lyriques, n’y va pas par quatre chemins :

« Nous allons connaître une hécatombe, à bas bruit »

Il faut dire que l’Opéra de Rouen Normandie a fermé exceptionnellement pendant six semaines entre avril et mai 2023 pour raisons budgétaires…

L’annonce la plus marquante a probablement été celle de l’opéra de Lyon annonçant au mois d’avril 2023 l’annulation pure et simple de plusieurs représentations estivales, pour limiter la casse et préserver la saison 2023-2024.

Il y a eu aussi l’Opéra National du Rhin annonçant l’annulation de deux représentations du Conte du tsar Saltane en mai à Mulhouse… remplacé par une seule représentation, mais en version concertante, c’est-à-dire seulement la musique. Les masses de subventions de Strasbourg, Mulhouse et Colmar, ainsi que de la région Grand-Est et de l’État, ne suffisent plus.

En tout en 2023 en France, ce serait 26 productions d’opéras annulées et plus de 120 représentations déprogrammées. L’équivalent de la saison de deux maisons lyriques. C’est une véritable débandade, une catastrophe nationale, qui est surtout un effondrement culturel. Car il ne faut pas s’y tromper : le problème n’est pas celui des subventions, mais du public.

S’il y a du public, il y a de l’opéra. S’il n’y a plus de public, la bourgeoisie peut faire semblant un temps avec des subventions massives, mais cela ne tient pas éternellement.

Il n’y a décidément plus rien à sauver de ce vieux monde. Ce qui se jouera, c’est donc une grande révolution culturelle, pour imposer un nouvel ordre, qui sera capable d’assumer et de porter la civilisation. Ce dont la bourgeoisie décadente n’est plus capable, submergée qu’elle est par le capitalisme en crise.

Forcément, l’opéra tiendra une place de choix dans le nouvel ordre, car il sera porté par les masses, éduquées et développées culturellement, moralement, cherchant encore plus à se développer culturellement et moralement par l’opéra ! Il en sera de même pour la culture classique en général, qu’il faudra réhabiliter et développer à nouveau après la grande hécatombe de notre époque décadente.

Le socialisme, ce sera le retour à l’opéra et à la célébration des orchestres symphoniques ! Ce sera la production de nouvelles œuvres lyriques, populaires, réalistes, célébrant la nature. Ces œuvres seront des expressions puissantes de la grandeur de la civilisation.

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La décivilisation, expression de la décadence de l’ordre bourgeois

Poser la question de la civilisation et de la décivilisation, c’est poser la question de l’Ordre social. Car tout ordre se doit de générer les conditions pour faire continuer et élever le niveau de civilisation : c’est le propre du développement de l’Humanité.

Quand on parle d’Ordre, on parle d’une manière d’ordonner la vie sociale de façon à ce qu’il soit garanti au plus grand nombre une vie quotidienne à peu près stable par rapport aux conditions historiques données.

L’instabilité sociale est le contraire d’un Ordre social et plus l’instabilité sociale est importante, plus les conditions d’élévation de la civilisation s’affaissent. Le processus de civilisation ne s’établit pas sur plusieurs années, il se réalise sur plusieurs décennies, si ce n’est plusieurs siècles ; cela demande nécessairement calme et stabilité.

La capacité de l’être humain d’élever le niveau de civilisation correspond donc à sa manière d’ordonner les comportements humains. Ou comme le décrit le sociologue Norbert Elias, penseur de la question qui a toutefois sanctuarisé l’ordre bourgeois comme gage du niveau de civilisation :

« La stabilité particulière des mécanismes d’autocontrainte psychique qui constitue le trait typique de l’habitus de l’homme « civilisé » est étroitement liée à la monopolisation de la contrainte physique et à la solidité croissante des organes sociaux centraux. C’est précisément la formation de monopoles qui permet la mise en place d’un mécanisme de « conditionnement social », grâce auquel chaque individu est éduqué dans le sens d’un autocontrôle rigoureux. »

Par « monopole », il faut entendre ici le lent processus de formation d’un appareil d’État entre les 13e et 18e siècles. Il faut ici rappeler justement la double dimension de l’appareil d’État qui s’il est l’expression de la domination d’une classe par une autre et également le reflet du nécessaire conditionnement des individus à des rapports sociaux plus sophistiqués.

C’est ainsi que lorsque les États du monde ont déclaré des confinements de population entre 2019 et 2020 pour lutter contre la pandémie de Covid-19, ils exprimaient non pas une domination de classe mais la continuité de la civilisation.

Les mesures de contrainte étaient en réalité une manière de contraindre les individus dans le cadre d’une société moderne où la fluidité des échanges et la mobilité sont la règle. Évidemment, les États l’ont fait dans les conditions d’un Ordre marqué par l’accumulation capitaliste et l’échange marchand, ayant pour conséquences les désordonnements qui ont suivi et continuent à s’exprimer dans les années qui suivent.

Déjà, des portions réduites de la population ont manifesté des comportements de décivilisation, avec le refus de l’autocontrainte. Ces gens ont rejeté un phénomène qui pourtant s’est déroulé sur plusieurs siècles : celui de la formation de règles publiques garanties par un organisme central contre l’intérêt privé de seigneurs locaux, se cristallisant ensuite dans des comportements jusqu’à en devenir automatiques.

Or, la question est de saisir aujourd’hui d’où vient de manière générale le refus de l’autocontrainte ? Est-ce un leg du passé, du temps d’avant la formation d’un appareil d’État centralisateur, où les petits seigneurs régnaient en maîtres sur leurs territoires ? Ou bien est-ce le produit des conditions de la société capitaliste moderne ?

Une personne qui circule à vive allure en scooter ou sur une trottinette électrique sur un trottoir piéton est-il un petit seigneur ou un individu forcené du capitalisme ?

Évidemment, cela relève en premier lieu des conditions de la société de consommation moderne. Car lorsqu’on parle de l’autocontrainte, il y a indirectement l’idée d’une plus grande subtilité des individus dans leurs relations sociales, une sorte de raffinement.

À travers la ville et l’échange marchand, le capitalisme a développé puissamment les espaces publics/collectifs à travers desquels est nécessaire un raffinement de son comportement, mais en même temps arrivé à un stade de son développement il en est une entrave.

Il suffit de prendre un grand magasin de vêtements dans un centre-ville pour s’en rendre compte. D’un côté, il y a un fourmillement d’individus qui veillent à ne pas mal se comporter mal face aux autres en respectant les codes d’usage comme ne pas essayer les habits devant tout le monde, garder une distance à la caisse, etc. Mais de l’autre côté si quelque chose grippe la mécanique, cela se ressent dans les individus qui deviennent plus aigres, plus raides, plus aigris, avec jamais bien loin un risque de dérapage, de petits conflits.

Si cela est dans l’ADN de la consommation capitaliste à ses débuts, la généralisation de la société de consommation a amené à une généralisation de l’esprit d’immédiateté qui, s’il est entravé, risque de générer des formes de brutalité, de grossièreté, même minimes.

Être raffiné, c’est savoir prendre le temps car c’est intellectualiser son rapport au monde, sa manière de vivre, de se nourrir, de se vêtir, d’aimer, d’apprécier l’autre. À l’heure des applications de rencontre, de livraison de repas à domicile, de l’écoute accélérée de musique, de la généralisation du format série, c’est toute la base de la civilisation qui s’affaisse.

Si la civilisation est le long processus de formation d’une autocontrainte psychique, avec l’attention et le temps requis, elle se heurte à société capitaliste-marchande qui, en plus d’être ultra-accélérée, va jusqu’à effacer ses propres conditions de production pour mieux fétichiser la valeur. Comment ne pas voir qu’une telle société arrivée à maturité formate des esprits dans le sens d’une décivilisation ?

Le règne abouti du fétichisme marchand, c’est l’âge d’individus narcissiques qui évoluent dans un monde abstrait. C’est l’âge de l’individu qui se moque du réel : il évolue à sa guise dans un monde sans que ne soient plus exigées ni contraintes, ni barrières quelconques, si ce n’est celles de ne pas entraver le bon écoulement des marchandises.

Et il n’est pas difficile également de comprendre que lorsque le pire de cette société de consommation moderne, soit le culte de l’égo indépendant de tout et le pire de la société féodale, soit le culte de l’honneur guerrier, se rencontrent, il y a un cocktail parfait pour des phénomènes de dé-civilisation. C’est l’individu-roi à base d’avancées guerrières, qui consomme ses échappées chevaleresques.

Il s’agit là d’une expression d’un mode de production capitaliste arrivé à maturité en ce qu’il a développé une consommation outrancière d’objets inutiles grâce au maintien d’une large partie du globe dans une situation féodale, avec pour résultat la combinaison des pires horreurs en termes de comportements.

Et comme l’État actuel est une émanation de cette société, il est évident que les institutions publiques sont à la peine pour maintenir le niveau de civilisation exigé par l’époque. Elles sont à la dérive et cela se voit en de multiples manières, des autorisations de construction délirantes au relativisme sur les incivilités sur la route jusqu’à l’acceptation-encadrement des trafics de drogue, de la pornographie, le délaissement des victimes de harcèlement scolaire…

Cela peut apparaître décalé et en même temps tout le monde comprend bien que les choses s’effondrent avec une société repartie sur les braises d’une pandémie qui n’a fait se générer aucun bilan social et culturel.

Vu du futur, tout ceci sonnera comme une évidence…

L’évidence que la société humaine développée du 21e siècle s’effondrait sur elle-même du fait de l’affaissement des vecteurs d’autocontraintes psychiques dû à un mode de production capitaliste pleinement développé.

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Défendre l’intégrité psychique face au capitalisme

L’intégrité de son propre psychisme est l’une des plus grandes avancées de la civilisation. Pour être soi-même, pour assumer entièrement sa personnalité, il faut ne pas être manipulé au point de voir son propre esprit déformé. Or, il est évident que le capitalisme a totalement changé sa nature sur ce plan. Le protestantisme, la religion capitaliste par excellence, a été le grand vecteur de l’affirmation de la personnalité, à rebours des influences féodales nocives. Le consumérisme généralisé, dont l’idéologie LGBT est un aspect, se présente comme l’aspect contraire du protestantisme, puisqu’on est censé en permanence remettre en cause son identité, la re-consommer perpétuellement.

Il n’est pas bien difficile de comprendre que le monde post-covid, ce sont des métropoles occidentales où c’est la grande foire aux identités, avec de la fuite en avant d’autant plus puissante qu’il y a la grande liquidation de tout ce qui est héritage historique, passé de l’humanité, transmission de valeurs. Il n’y a en soi rien de nouveau, mais avec la crise commencée en 2021, tout s’est précipité. Et les gens, en France, témoignent d’une immense fatigue à l’été 2023. C’est la flemme généralisée, l’incapacité à percuter dans son esprit, à prendre des responsabilités autres que celles exigées par la consommation et son corollaire, le travail dans le capitalisme.

Ce qui est très intéressant, c’est qu’au final, l’attitude des gens, leur humeur, leur positionnement, est très exactement le contraire de ce qu’on voit représenté dans les affiches et peintures soviétiques de la première partie du 20e siècle. Dans ces affiches et peintures, on voit des gens décidés, certains d’être à leur place, plein d’entrain. Leur position humaine est l’exact opposé de ce qu’on vit actuellement.

Maria Bri-Bein, Opératrices du télégraphe, URSS, 1933

Autrement dit, le capitalisme actuel nie la possibilité de l’ordre, tout autant que l’URSS de la première moitié du 20e siècle proposait un nouvel ordre. Le contraste est saisissant. Les affiches et peintures et soviétiques reflétant ce nouvel ordre étaient déjà incompréhensibles pour les gens subissant le capitalisme dans les années 1980. Mais alors en 2023, c’est tout simplement inconcevable. Le caractère décidé qu’on y voit ne peut être compris que comme rigides, bornés, passés, par des gens désormais libéraux à tous les niveaux. Dans le capitalisme, on doit être en mesure de changer d’avis à n’importe quel moment, sans raison. C’est la démesure de l’ego, la toute puissance de la consommation. Alors célébrer l’affirmation de quelque chose de prolongé ayant du sens en soi : quelle horreur pour les gens à l’image du capitalisme !

Affiche de 1934 de Maria Bri-Bein à destination de la population sibérienne khakasse, promouvant le dépassement du patriarcat, de l’illettrisme, des formes moyenageuses.

Ce qui est marquant, c’est de voir que l’individu capitaliste est incapable de protéger son intégrité psychologique, psychique, et qu’il va d’autant plus dénoncer le « totalitarisme » socialiste que justement le socialisme permet de fournir une base réelle à la personne en tant que telle. L’individu capitaliste verra d’autant plus la personne socialiste comme un « robot » qu’elle-même est entièrement façonnée par les mass medias, les grandes entreprises, les réseaux sociaux, la terreur de la consommation.

C’est que l’individu capitaliste est corrompu, toutes ses valeurs cèdent inéluctablement devant l’élargissement du marché capitaliste, à moins d’un positionnement idéologique, culturel, qui soit d’un niveau suffisant, et d’une rupture subjective assez marquée. On sait bien comment le jeune rebelle adolescent se vend aisément au capitalisme une fois adulte, en raison d’une incapacité à faire face à tous les aspects fondamentaux du capitalisme. Le monde du travail et la famille se posent comme des défis immenses ! Ils peuvent être relevés, encore faut-il être en mesure de batailler. Qui ne le fait pas se fait corrompre.

La personne socialiste, à l’inverse de l’individu capitaliste, est incorruptible. L’interaction réciproque avec la société organisée est trop forte. La dialectique entre le peuple et la société – la démocratie – l’emporte. Il n’y a alors plus de passivité, de nihilisme, de relativisme.

Affiche de Maria Bri-Bein de 1941, avec une citation de l’écrivain Demian Bedny : « Nous jurons à nos maris, les hommes héroïques, que nous forgerons les armes jour et nuit, et remplirons la tâche d’aider le front »

La clef, c’est bien entendu le travail, la production. C’est là qu’on voit le rôle pernicieux de l’idéologie LGBT, véritable sous-produit du capitalisme financier s’infiltrant à tous les niveaux. Le capitaliste rentier ne sait pas quoi faire, alors il joue avec lui-même. Il nie la transformation, la production, et s’imagine changer les choses en investissant. Le « transexuel » s’imagine alors investir de la pensée sur son corps et le « changer ». C’est l’illusion digne de l’opération visant à acheter une marchandise avec une carte bleue en s’imaginant que l’argent n’existe pas dans le processus. On peut appeler ça de la pensée magique.

Car l’intégrité psychique ne va pas sans l’intégrité physique. C’est un tout. Et le capitalisme agresse tout, il veut tout s’approprier. Tout doit relever du marché, sans limites ni limitations. Aucune intégrité ne peut donc exister, il faut que tout le monde soit à disposition. Et il faut vite changer d’avis, vite choisir, vite consommer, toujours plus vite. La lecture d’un livre un peu long se voit toujours plus banni dans le capitalisme, alors que la vision de vidéos ultra-rapides triomphe forcément.

Le capitalisme nie le prolongement, la production ; il sacralise l’éphémère, le consommable. Le capitalisme est né comme développement de la coopération dans la production, comme affirmation de l’intégrité personnelle. Il se meurt comme effondrement et dispersion dans la consommation, dans le fétichisme de l’ego, dans le culte sordide de l’individu. La décadence dans le capitalisme est la preuve du besoin historique du Socialisme.

Affiche de Maria Bri-Bein de 1933 à destination des travailleurs de choc : étudier la technologie, maîtriser la science

L’intégrité psychique doit être défendue, le capitalisme doit être combattu. Si on veut s’assumer comme être humain complet, il faut développer ses facultés et cela ne peut se faire que par le socialisme, donc pour le socialisme. Laisser son psychisme se contaminer par le capitalisme, c’est tomber dans le pessimisme, le relativisme, le nihilisme. C’est pourquoi il faut agencer sa vie en fonction de la perspective historique du socialisme, pourquoi il faut calibrer ses actions en fonction des nécessités culturelles, politiques pour le socialisme.

L’être humain entier, complet, affronte la corruption permanente du capitalisme : il ne refuse pas le combat, il le pose historiquement, il assume l’inéluctable victoire de la nouvelle humanité !

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Un nouvel ordre pour une nouvelle armée !

Avec la crise du capitalisme, les rivalités entre grandes puissances ont refait surface. On ne compte plus les points de tensions dans le monde et, de la guerre en Ukraine à l’opposition entre la Chine et les États-Unis en rapport à Taïwan, la guerre est devenue une actualité permanente.

Cela terrifie les gens d’autant plus qu’ils ont cru en la fable des années 1990 du « village planétaire » d’où la guerre entre États serait exclue. Cette époque est révolue.

Le problème est que la conscience de cette fin de séquence historique oblige les opinions à réfléchir à la guerre et son corolaire, l’armée, alors même qu’ils s’en sont éloignés. En France, la fin du service militaire obligatoire en 1996 a renforcé cet éloignement, qui se traduit aujourd’hui par une sorte de paralysie générale.

Pourtant, on ne peut vraiment s’intéresser à la politique sans passer par un programme militaire, car comme le dit la formule célèbre de Clausewitz, la guerre est « la continuation de la politique par d’autres moyens ».

La question est alors de savoir quelle position la Gauche historique développe à propos des questions militaires en général et de la défense en particulier ?

On sait que Jean Jaurès était partisan de l’abolition de l’armée de métier, séparée du corps civil. En bon héritier de la Révolution française commencée en 1789, notamment avec la défense nationale de 1792-1793 contre les armées royalistes, il plaidait pour la formation de milices civiles territorialisées.

En réalité, poser la question ainsi est erroné.

Du point de vue de la Gauche historique, de la même manière qu’elle a su dénoncer la prétention de l’Etat à apparaitre neutre et arbitre des lutte de classe, l’aspect militaire n’a jamais été détaché de la question de la nature du pouvoir.

L’armée, fusse-t-elle « populaire » à l’instar d’une milice territoriale, n’en sera pas moins au service d’un ordre déliquescent à tous les points de vue. C’est ce que rappelait Lénine.

« A propos de la milice, nous devrions dire, pour donner une réponse concrète et pratiquement indispensable : nous ne sommes pas pour la milice bourgeoise, mais seulement pour une milice prolétarienne. Par conséquent, « pas un sou et pas un homme », non seulement pour l’armée permanente, mais aussi pour la milice bourgeoise, même dans des pays tels que les États‑Unis ou la Suisse, la Norvège, etc. » 

Aujourd’hui en France, une milice à la mode helvétique s’inscrirait en continuité d’initiatives telles que les « voisins vigilants » et leur mentalité de petit propriétaires replié sur leur pavillon et leur jardin. Alors même qu’il n’y a à côté de cela, aucun engagement d’envergure collective sur le délitement social…

La question militaire est donc conditionnée à la question de l’Ordre et de son Pouvoir qui s’inscrivent nécessairement dans un certain sens de l’Histoire. C’est la raison pour laquelle Mao Zedong a pu dire que « le parti commande aux fusils et il ne faut jamais permettre que les fusils commandent au parti ».

Il est toujours question de savoir ce que l’on défend et pourquoi : ainsi était-il juste d’assumer la guerre pour l’Ordre républicain porté par la Gauche contre la réaction fasciste en 1936 en Espagne. Ou pour prendre un autre exemple : la France ne s’est-elle pas effondrée à l’été 1940 parce qu’elle était, entre autres choses, à bout de souffle malgré tout son matériel militaire ?

Par conséquent, la seule perspective est de participer à la formation d’un Nouveau Pouvoir au service d’un Nouvel Ordre qui vaille la peine d’être défendu. Et la réalité actuelle, c’est que les français sont au bord du craquage psychique.

Une « guerre de haute intensité » exige pourtant une grande discipline collective et de l’abnégation déterminée par une morale au service d’une Cause. Une chose dont la France, mais également les États-Unis, sont bien incapables, minés par des décennies de lessivage par la société de consommation.

Nouvel Ordre, Nouveau Pouvoir, Nouvelle Morale : c’est à partir de là que peut commencer un débat sur les questions militaires, y compris par rapport à la question de la « défense nationale » contre les autres puissances.

Car il est évident qu’une France nouvelle sur tous les plans aurait à se confronter à des pays encore marqués par l’ancien ordre des choses. La défense militaire devient alors une nécessité d’époque car portant une nouvelle dynamique.

Les guerres se remportent lorsqu’elles sont justes et elles sont justes lorsqu’elles sont justifiées par la tendance de l’Histoire. Les armées républicaines françaises ont gagné sur les monarchies, c’était là le sens de l’Histoire, tout comme le peuple soviétique a remporté sur le IIIe Reich, représentant l’ultime sursaut de défense d’un ordre décadent.

C’est d’ailleurs ce qui s’est passé du côté ukrainien dans les premiers mois de l’invasion avant de se retourner en son contraire : de la défense nationale, on est passé principalement à une guerre par procuration pour le compte de l’Occident contre la Russie. Et la justesse de la Cause est devenue secondaire par rapport aux rivalités de grande puissance, marquant de son empreinte toute la stratégie militaire.

L’attente d’une « contre-offensive ukrainienne » au printemps 2023, entièrement déterminée par les moyens militaires occidentaux, en est la dernière preuve éclatante.

Ainsi donc, la question militaire est d’abord et toujours avant tout une question politique liée à l’Ordre que l’on défend.

Aujourd’hui, l’Ordre en France se délite socialement de tous les côtés, la morale ne sait plus porter rien de sérieux au plan culturel, l’architecture dans les villes françaises vire à l’immonde, il y a une absence de considération pour la nature et les animaux, les comportements anti-sociaux sont monnaie courante, sans même parler de ces travailleurs exploités dans des tâches abrutissantes et ces poches de pauvreté, etc.

Sérieusement, qu’y a t-il à défendre au juste actuellement en France, ce pays où les gens délaissent la politique, ne s’engagent nullement ? Il n’y a que les esprits fascistes pour penser que le fait militaire soit à même de relancer la société : c’est l’inverse qui est vrai ! D’ailleurs, les pays qui avaient construit un Nouvel Ordre, socialiste, à l’instar de la Russie ou de la Chine, ont justement liquidé la Cause dans les années 1960-1970 en laissant penser que la direction des choses en revenait à l’État seul, lui-même orienté par l’armée.

La seule chose qu’il faille défendre est la formation d’un nouvel État pour être en mesure de défendre une nouvelle société à même d’accompagner un nouvel élan de civilisation. Alors la défense militaire devient un horizon valable.

Une armée qui de fait sera nouvelle et sera marquée par de nouveaux rapports : la fin de la séparation d’avec la société civile, la féminisation des cadres dirigeants, la suppression de la culture de l’héroïsme patriarcal, l’élection des officiers et généraux, la soumission absolue de la technique à l’art humain de l’organisation, l’élévation du degré de conscience générale de chaque soldat pour une prise de décision démocratique, etc.

Toute réflexion militaire qui ne pose pas la question de la nature de l’Ordre défendu est étrangère au programme militaire à gauche. La défense d’un Ordre vacillant ne peut être que porté par une armée vacillante : c’est peut-être la clef pour construire un nouvel Ordre socialiste qui vaille la peine d’être défendu, coûte que coûte, vaille que vaille.

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« Il y a pire que la mort »

Savez-vous pouquoi il y a des révolutions ? Parce qu’il y a des moments dans l’Histoire où on sait qu’il faut mettre sa vie en jeu. Et si on le fait, c’est qu’on a compris qu’il y a pire que la mort.

Bien entendu, tout le monde le sait en général. Pour certains, c’est d’ailleurs une cruelle réalité, et il faut affronter le monde avec tellement de douleurs !

L’aliénation, l’indifférence, l’isolement, l’humiliation, l’incapacité à trouver comment développer ses facultés… La vie dans le capitalisme est brutale, agressive, monstrueuse.

Pour autant, tant qu’on peut vivre, on le fait. Pourquoi risquer la prison, la torture, la désocialisation, lorsqu’on peut vivre sa vie avec ses petites joies, ses petites peines ? Après tout, ça vaut le coup, personnellement, d’avoir une existence où l’on profite.

Et, de toutes façons, tout le monde fait pareil. Pourquoi alors entrer en rupture et se singulariser ? En plus, le capitalisme habitue à ne pas avoir ni engagements, ni responsabilités. Rompre avec tout cela, c’est bien difficile !

Les êtres humains sont des animaux comme les autres : ils dépendent d’une situation pour être poussée dans telle ou telle direction. Tant qu’un mode de production le permet, les gens acceptent donc ce qu’il y a.

Quand par contre c’est intenable, que vraiment c’est invivable, alors on assume qu’il y a pire que la mort. Et quoi, on va tous se suicider ? Bien sûr que non. Alors, c’est la révolution.

Ce n’est pas faire de l’existentialisme que dire cela. C’est simplement voir que la vie, ce n’est pas que l’économie, c’est aussi la psychologie, la situation nationale, la culture, la famille, les amis, bref tout ce qui fait que l’humanité, génération après génération, continue d’exister.

C’est pour cette raison que Karl Marx, lorsqu’il a écrit Le capital, n’a jamais dit que le capitalisme allait s’effondrer de telle ou telle manière. Il a dit que le capitalisme allait être enrayé dans sa course aux profits, parce qu’il veut toujours plus de profits et que le taux de profit est toujours moins satisfaisant. Cela conduit aux guerres, pour prendre les profits du voisin.

Mais il n’a jamais établi de plan détaillé, en disant : à tel moment tout s’effondre. Car un mode de production est renversé lorsqu’il ne tient plus, ce qui dépend de beaucoup de facteurs.

On peut prendre la révolution française en exemple. Elle a eu lieu pour des motifs qui sont peu clairs, finalement. Au fond, pourtant, c’est le mode de vie dominant qui était considéré comme intenable. Il y a alors, « pire que la mort » et la vie devant l’emporter, c’est la bataille pour la grande transformation du mode de vie.

En attendant, les gens qui disent qu’il y a pire que la mort… font peur. On comprend qu’ils ont vécu des choses si dures qu’ils tiennent on ne sait trop comment. Si on regarde bien, dans le capitalisme, de toutes manières, la plupart sont à la limite de s’effondrer psychologiquement, mentalement. Ils tiennent par la force de l’habitude.

Ce qui compte, c’est de faire comprendre que la dépression a une raison historique. C’est le mode de vie qui est erroné dans ses fondements. Si on le devine, sans le comprendre avec les bons outils, on se perd, on est désorienté, on n’a plus de repères. Les sectes et différentes religions jouent là-dessus en proposant un au-delà fabuleux et rassurant.

Karl Marx parlait avec justesse de la religion comme « opium du peuple », et il le faisait en soulignant qu’il y a un besoin de cet opium, pour « tenir » dans un monde horrible.

« La misère religieuse est à la fois l’expression de la misère réelle et la protestation contre cette misère réelle.

La religion est le soupir de la créature opprimée, l’âme sensible d’un monde insensible comme elle est l’esprit de situations sans esprit. Elle est l’opium du peuple.

Le dépassement de la religion comme bonheur illusoire du peuple est l’exigence de son bonheur réel. L’exigence de renoncer aux illusions sur son état, c’est l’exigence de renoncer à un état de choses qui a besoin de ces illusions.

La critique de la religion est donc en germe la critique de la vallée de larmes, dont la religion est l’auréole glorieuse. »

A la situation historique où il y a pire que la mort, la religion donne comme réponse : il y a mieux que la vie. C’est un mensonge. Tout comme sont des mensonges les fuites dans le consumérisme forcené, l’alcool, les drogues, le style décadent « hédoniste » LGBT, etc.

La vraie réponse, c’est de se tourner vers l’Histoire, et donc la culture. Il y a tellement des choses à découvrir, à apprendre ! C’est là ce qui donne du sens à l’existence, qui fait progresser des facultés, sa sensibilité.

Le monde pourrait, devrait être totalement différent. Il faut le transformer, et non pas se mutiler soi-même sous une forme ou une autre. La vie doit l’emporter ! Voilà ce qui compte réellement, ce qu’il ne faut jamais perdre de vue.

Et lorsque les masses s’emparent de ce principe, elles sont invincibles et changent le cours des choses, afin qu’il soit en adéquation avec le bonheur possible historiquement, à tous les niveaux de la vie quotidienne.

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Contre les éléments anti-sociaux, la rééducation par le travail

Seul le travail dans le socialisme peut rééduquer les éléments anti-sociaux.

Plus le capitalisme s’enfonce dans la crise, plus la violence anti-sociale, notamment issue des couches marginalisées de la population, explose. Et si le peuple porte en horreur ce type de comportements, il n’en reste pas moins que comme ailleurs, c’est la lutte des classes qui doit primer dans la solution à apporter.

Et la lutte des classes est un processus complexe dans lequel le peuple est parfois piégé dans des solutions en apparence populaire, mais en réalité opposées à ses intérêts. On peut penser ici à cette idée bien trop répandue selon laquelle c’est l’armée, avec le service militaire, qui servirait à éduquer la jeunesse, notamment celle la plus désocialisée, à la discipline qu’exige la vie en société.

C’est une proposition politique traditionnellement de droite comme solution clé en main à la fois au resserrement idéologique autour de la nation et comme solution éducative.

Dans une récente interview au Figaro, le ministre des armées Sébastien Lecornu justifie l’augmentation des réservistes mais aussi le service national universel en entremêlant cette idée bien militariste du lien entre discipline sociale et engagement existentiel au service de la nation :

On appelle parfois à la rescousse, pour la cohésion de la société, les valeurs militaires d’éthique, de collégialité, de discipline. Mais il ne faut jamais oublier d’où elles viennent. Ces valeurs se sont forgées autour de la notion d’un sacrifice qui peut être ultime. Cela étant dit, est-ce que dans l’histoire on a pu demander aux armées d’accomplir des tâches annexes, notamment en matière d’insertion professionnelle ? La réponse est oui avec, par exemple, le service militaire adapté en Outre-mer ou les Epide. Est-ce que des expérimentations peuvent avoir lieu pour encadrer une jeunesse délinquante dans un parcours de réinsertion ? Oui, c’est déjà le cas et c’est un engagement du président.

C’est que dans le confort des métropoles impérialistes, l’armée n’est plus vue que comme un service spécial qui ne peut être engagée au plan militaire que lors d’opérations dans des conflits asymétriques lointains, dont on ne sait pas grand chose de toute façon.

Evidemment pour la bourgeoisie, l’enjeu c’est bien de renforcer l’armée pour garantir la place de la France comme grande puissance dans le monde, et pour masquer cette idée, il est plutôt insister sur le caractère « sociale » de l’armée. Et cela passe a priori, parce que, au fond, pourquoi ne pas être en même temps une sorte de prolongement de l’éducation nationale, une sorte de stage où l’on serait sévère avec les jeunes et où on leur apprendrait à faire leur lit ?

Or, réduire le service militaire à cela c’est complètement fermer les yeux sur le fait que l’armée, c’est surtout là où on est formaté pour pouvoir massacrer sans état d’âme les soldats d’une nation adverse sur le champ de bataille. C’est cela en réalité la finalité de toute cette discipline et c’est d’ailleurs ce dont se rendent compte certains parents ou adolescents ayant accepté le service national universel.

C’est une formidable machine d’endoctrinement où l’on doit accepter de soumettre potentiellement d’autres peuples par les armes, pour le « bien » de la nation française. L’idée qu’à l’armée il n’y a « ni classe, ni race » relève d’ailleurs de ce bricolage idéaliste pour faire de la nation le seul pivot des aspirations des uns et des autres.

La bourgeoisie revient en force avec cette idée puisqu’elle se retrouve confrontée à la réalité d’une société pétrie dans le libéralisme jusqu’à la nausée, jusqu’au délitement total.

Comment espérer se montrer dissuasif ou maintenir sa domination en ayant une population qui s’en fiche de tout, qui espère juste ne pas être dérangée dans sa consommation ? Malgré tout, elle se doit d’assurer la concorde sociale au sens d’une vie en société qui ne soit pas minée par les comportements individuels anti-sociaux.

Comme dans le capitalisme il est impossible de planifier et d’organiser la production sociale, il ne reste que l’enrôlement militaire comme perspective, ce qui a pour effet indirect de renforcer le militarisme dans un contexte ou prédomine la tendance à la guerre mondiale.

On voit ici tout le caractère opportuniste d’un mouvement comme la France Insoumise qui ne cesse d’insister sur le rétablissement du service militaire comme perspective d’intégration sociale.

On est là à mille lieux de l’héritage du mouvement ouvrier qui veut que les membres d’une société ne sont intégrés que parce qu’ils coopèrent dans et par la production sociale, non pas dans une pseudo solidarité organique qui n’est rien d’autre qu’une approche fasciste du monde.

Quoi de mieux pour être intégré et rééduqué que participer à un effort pour construire une infrastructure collective pour le bien de tous ? La finalité n’est pas le mensonge de la grandeur de la nation, mais la soumission de l’individu et de son égo au progrès collectif.

On voit bien ici tout le mal engendré par le populisme car là où l’intuition populaire pour l’engagement militaire est juste, c’est concernant le besoin de discipline et de valeurs collectives. En effet, la multiplication des comportements anti-sociaux exige une prise en main des question d’éducation de la jeunesse et de la vie en société.

Mais cela ne doit pas passer par une remise en ordre militariste, pilotée par en haut mais par une organisation de la société à la base pour rééduquer et réintégrer ses propres éléments en son sein. Et cela s’appelle ni plus ni moins que le socialisme, avec sa philosophie centrale du travail comme grande mesure salvatrice.

Car on ne peut remettre tout le monde au travail sans passer par la remise en ordre de la société et sans en avoir les moyens sociaux et culturels, bref sans avoir la classe ouvrière au pouvoir. Voilà pourquoi seule la Gauche historique est à même de proposer une solution juste et durable pour en finir avec les comportements anti-sociaux sur la base du pacifisme, du Socialisme !

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«La prostitution, plaie et honte de notre civilisation»

Voici un petit article très intéressant, issu d’une rubrique du journal Le Populaire (organe du Parti Socialiste SFIO) daté du 5 juin 1934 et évoquant le sujet de la prostitution.

1934. Une militante socialiste s’adresse à une militante contre la prostitution, qu’elle veut convaincre de rejoindre la lutte politique, générale, contre le capitalisme. Quand elle évoque la prostitution, son point de vue est simple, clair, net et précis : la prostitution est la plaie et la honte de notre civilisation.

Voilà le point de vue de la Gauche historique, affirmant la morale prolétarienne contre la décadence bourgeoise et la corruption des corps et des esprits par le grand marché capitaliste. Voilà qui est littéralement opposé à l’ultra-gauche libérale libertaire et décadente, défendant la prostitution et agressant même des féministes opposées à la prostitution.

Cet article est issu de la rubrique « La militante – tribune des femmes socialistes » du journal Le Populaire daté du 5 juin 1934 :

Le « redressement moral »

J’ai rencontré une protagoniste du droit de vote pour les femmes dans un préau d’école un soir de scrutin. Le lieu n’était pas très propice aux conversations et encore moins aux discussions, car c’était au moment du dépouillement des bulletins de vote. Nous étions dans une atmosphère de grande surexcitation, de sorte qu’entrecoupé par des cris d’une foule houleuse et énervée, notre entretien ne fut pas long.

J’eus juste le temps d’apprendre que mon interlocutrice appartenait également à la Ligue du « Redressement moral ». Cette ligue tient, paraît-il, à rester en dehors de la politique, et ne désire que s’occuper des questions concernant la prostitution. Sa tâche principale est le relèvement de la moralité.

Je regrette la brièveté de notre entretien. Mais dans l’espoir que notre page retient parfois l’attention de mon interlocutrice, j’essayerai de le continuer ici tout en tirant les conclusions logiques. Si j’en avais eu le temps, j’aurais demandé : « Comment cette ligue prétend-elle, dans les cadres du régime actuel, faire un véritable redressement ? Quels remèdes préconise-t-elle pour le relèvement de ces « créatures immorales » que vous dites en marge de la société, de cette société pourtant si coupable envers ces malheureuses ? »

Vous savez sûrement, madame, que l’on ne peut apporter des remèdes efficaces aux maux de toute sorte sans en rechercher les causes. Vous connaissez, bien entendu, les faits principaux amenant ces femmes à la prostitution, plaie et honte de notre civilisation.

Ces pauvres filles sont tantôt des bonnes séduites par le patron ou le fils de la maison et abandonnées à leur sort, tantôt c’est la grande misère de leur famille qui pousse les jeunes filles à faire commerce de leur corps, souvent les travailleuses des magasins ne gagnent qu’un salaire dérisoire, alors qu’elles sont obligées d’être mises plus que correctement.

Nous, femmes socialistes, nous les connaissons tous ces phénomènes aboutissant à l’immoralité forcée ; mais ce que nous savons aussi, c’est que la véritable cause de toutes les misères de l’humanité, y compris la prostitution, réside dans le régime même que nous subissons. C’est seulement en changeant la structure sociale et économique de la société que l’on arrivera à un réel « redressement de la moralité » et non en prêchant simplement une moralité que les circonstances rendent si difficile d’observer.

J’étais d’accord avec mon interlocutrice pour revendiquer le droit de vote.

Mais, contrairement à ce que pensent les féministes, le vote n’est pas pour nous un but, mais un moyen devant servir à l’affranchissement total de la femme. En amenant les femmes sur l’arène politique, surtout celles qui appartiennent à la classe travailleuse, celles qui fournissent le plus grand contingent de ces parias – objet des préoccupations des dames patronnesses – on arrivera à mieux leur faire comprendre leur propre intérêt, et elles verront qu’il est nécessaire pour elles de travailler à l’émancipation des classes opprimées et de préparer l’établissement du régime socialiste, qui, seul, fera disparaître le chômage et la misère, facteurs essentiels de la prostitution.

Ainsi la femme contribuera à l’instauration d’une vie saine et morale, que les conditions actuelles de vie rendent impossible.

Hélène EPSTEIN.

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8 mars, la Cause des femmes: une exigence culturelle

C’est la Gauche politique qui a posé la date du 8 mars. C’est la Gauche politique qui fait vivre cette date. Car la condition féminine est réelle et par conséquent dépend du capitalisme. Promouvoir la libération de la femme implique de passer par le dépassement du capitalisme pour exiger un changement culturel réel.

Le 8 mars est la journée internationale des femmes, qui a été conceptualisée et mise en avant par le mouvement ouvrier, à travers l’Internationale socialiste des femmes. L’URSS, en reconnaissant officiellement cette date en 1921, lui a donné un élan général. La date précise du 8 mars a d’ailleurs été choisie par Lénine, en référence à une grève d’ouvrières du textile au tout début des révolutions russes de 1917.

Tout cela n’est pas que symbolique ou une question de mémoire. C’est une question de culture. Car tout passe pour les femmes par la culture, cette dernière déterminant que tel ou tel comportement soit valorisé, dévalorisé, légal, interdit.

Or, il y a une culture de la violence sexiste, dont la prostitution et la pornographie sont des vecteurs – et en même temps des fondements. Le capitalisme véhicule cette culture, comme toutes celles qu’il peut transformer en monnaie sonnante et trébuchante. Le capitalisme produit même des poupées sexuelles « enfant ». Car le capitalisme vend n’importe quoi.

Le féminisme bourgeois admet que le capitalisme est une bourse aux cultures et tente de renverser les tendances, comme les Femen en manifestant torse nue. C’est une conception totalement erronée, à la fois car jouant sur la sexualisation et admettant qu’il y aurait une « bourse aux idées ».

En réalité, il faut une culture fondée sur la civilisation, une culture féministe fondée sur la civilisation, écrasant la culture non féministe fondée sur le capitalisme. La Cause de la femme est toujours concrète : elle est celle des femmes dans la réalité. Et cette réalité n’est pas un « patriarcat » abstrait, mais une culture individualiste où les hommes tirent leur épingle du jeu en profitant des restes du vrai patriarcat ayant existé dans le passé.

Dans une société individualiste, pourquoi les hommes feraient-ils des efforts, si en plus les femmes sont encore largement aliénées par les valeurs du passé elles-mêmes ? Il suffit de regarder les femmes en France en 2020 pour voir que la très grande majorité, voire pratiquement la totalité, accepte les règles du jeu beauf, ne comptent aucunement se remettre en cause pour devenir féministe.

Elles préfèrent savoir dans quelle mesure leur partenaire est beauf pour le manœuvrer individuellement. Le premier ennemi des femmes, c’est elles-mêmes aliénées, car le capitalisme aliène tout le monde, individualise tout. L’enterrement de vie de jeune fille est typiquement une tradition petite-bourgeoise de femmes qui, par définition même, est totalement anti-féministe de par sa dimension régressive.

Seules des femmes offensives, assumant la cause démocratique de l’égalité hommes-femmes, peuvent taper du poing sur la table et exiger une transformation culturelle concrète, car portée par le peuple.

Les mesures institutionnelles comptent, mais tout le monde sait que sans la dimension culturelle, cela ne va pas assez loin, cela s’effrite, cela disparaît. La Cause des femmes peut reculer. Elle recule d’ailleurs dans le monde, comme toute la Cause démocratique, la Cause du Socialisme.

Qui veut la Cause des femmes sait que c’est une Cause démocratique, liée à la question démocratique en général, donc au Socialisme. Le seul féminisme possible porte la culture – et donc se fonde sur la classe ouvrière, qui elle seule peut porter une culture en rupture avec les modèles dominants.

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Nouvel ordre Politique

L’Appel de Stockholm (1950)

Le 18 mars 1950, le Congrès mondial des partisans de la paix, impulsé par les communistes, lançait l’Appel de Stockholm, un manifeste pour la paix qui eut un retentissement énorme. Il faisait suite à une dynamique mondiale importante dans toute la Gauche européenne, avec le Congrès mondial des intellectuels pour la paix à Wrocław en Pologne en 1948 puis les Assises pour la paix et la liberté à Paris.

En France, 14 millions de personnes signèrent la pétition liée à l’Appel de Stockholm, ainsi que 560 millions de personnes dans toute l’Europe. Ce fut un moment important pour la Gauche, marquant l’émergence d’un mouvement de masse en faveur de la paix, à l’époque où les États-Unis lançaient la construction de la bombe H.

C’est de cette époque et de cette dynamique que provient la fameuse colombe comme symbole de la paix, dessinée par Pablo Picasso. Le premier signataire de l’Appel fut le scientifique communiste français Frédéric Joliot-Curie, en tant que Président du Congrès mondial des partisans de la paix.

« APPEL

Nous exigeons l’interdiction absolue de l’arme atomique, arme d’épouvante et d’extermination massive des populations.

Nous exigeons l’établissement d’un rigoureux contrôle international pour assurer l’application de cette mesure d’interdiction.

Nous considérons que le gouvernement qui, le premier, utiliserait, contre n’importe quel pays, l’arme atomique, commettrait un crime contre l’humanité et serait à traiter comme criminel de guerre.

Nous appelons tous les hommes de bonne volonté dans le monde à signer cet appel.

— Stockholm, 19 mars 1950 »

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Culture Nouvel ordre

La grande chanson ouvrière « L’Internationale »

L’Internationale est la grande chanson historique du mouvement ouvrier. En voici les paroles et une version chantée.

Debout, les damnés de la terre
Debout, les forçats de la faim
La raison tonne en son cratère,
C’est l’éruption de la faim.
Du passé faisons table rase,
Foule esclave, debout, debout
Le monde va changer de base,
Nous ne sommes rien, soyons tout.

C’est la lutte finale ;
Groupons nous et demain
L’Internationale
Sera le genre humain.

Il n’est pas de sauveurs suprêmes
Ni Dieu, ni César, ni Tribun,
Producteurs, sauvons-nous nous-mêmes
Décrétons le salut commun.
Pour que le voleur rende gorge,
Pour tirer l’esprit du cachot,
Soufflons nous-mêmes notre forge,
Battons le fer tant qu’il est chaud.

L’État comprime et la Loi triche,
L’impôt saigne le malheureux ;
Nul devoir ne s’impose au riche ;
Le droit du pauvre est un mot creux
C’est assez languir en tutelle,
L’Égalité veut d’autres lois ;
« Pas de droits sans devoirs, dit-elle
Égaux pas de devoirs sans droits. »

Hideux dans leur apothéose,
Les rois de la mine et du rail
Ont-ils jamais fait autre chose
Que dévaliser le travail ?
Dans les coffres-forts de la banque
Ce qu’il a crée s’est fondu,
En décrétant qu’on le lui rende,
Le peuple ne veut que son dû.

Les rois nous saoulaient de fumée,
Paix entre nous, guerre aux Tyrans
Appliquons la grève aux armées,
Crosse en l’air et rompons les rangs !
S’ils s’obstinent ces cannibales
A faire de nous des héros,
Ils sauront bientôt que nos balles
Sont pour nos propres généraux.

Ouvriers, paysans, nous sommes
Le grand parti des travailleurs,
La terre n’appartient qu’aux hommes,
L’oisif ira loger ailleurs.
Combien de nos chairs se repaissent !
Mais si les corbeaux, les vautours,
Un de ces matins disparaissent,
Le soleil brillera toujours.

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Nouvel ordre Politique

Le programme du Front Populaire (1936)

Le programme de revendications immédiates que publie le Rassemblement populaire résulte d’un accord unanime entre les dix grandes organisations qui composent le Comité national de Rassemblement :

Ligue des Droits de l’Homme,

Comité de Vigilance des Intellectuels Antifascistes,

comité mondial contre le fascisme et la guerre (Amsterdam-Pleyel),

Mouvement d’Action combattante,

Parti Républicain Radical et Radical-Socialiste,

Parti Socialiste S.F.I.O.,

Parti Communiste,

Union socialiste et Républicaine,

Confédération Générale du Travail,

Confédération Générale du Travail Unitaire.

Il s’inspire directement des mots d’ordre du 14 juillet Les partis et organisations, groupant des millions d’êtres humains, qui ont juré de rester unis, aux termes du serment, « pour défendre les libertés démocratiques, pour donner du pain aux travailleurs, du travail à la jeunesse et, au monde, la grande paix humaine » ont cherché ensemble les moyens pratiques d’une action commune, immédiate et continue.

Ce programme est; volontairement limité aux mesures immédiatement applicables.

Le Comité national entend que chaque parti, chaque organisation, participant au Rassemblement populaire, puisse se joindre à l’action commune sans rien abdiquer de sa doctrine, de ses principes, et de ses fins particulières. Il s’est astreint, d’autre part, à présenter des solutions positives aux problèmes essentiels, actuellement posés devant la démocratie française.

C’est ainsi que, dans l’ordre politique, il définit les mesures indispensables pour assurer le respect de la souveraineté nationale, exprimée par le suffrage universel, et pour garantir les libertés essentielles (liberté d’opinion et d’expression, libertés syndicales, liberté de conscience et laïcité) – que, dans l’ordre international, il pose les conditions nécessaires à la sauvegarde et à l’organisation de la paix, suivant les principes de la Société des Nations – et que, dans l’ordre économique et financier, il s’attache à lutter, dans l’intérêt des masses laborieuses et épargnantes, contre la crise et contre les organisations fascistes qui l’exploitent pour le compte des puissances d’argent.

Ces problèmes d’économie et de finance, d’une si haute importance actuelle, le Rassemblement populaire se refuse à les résoudre séparément : il veut atteindre les causes des moins-values fiscales en agissant contre la crise, et compléter son action contre la crise par l’amélioration du crédit public et privé.

Le Rassemblement populaire souligne qu’un grand nombre des revendications qu’il présente figurent déjà dans les plans et programmes élaborés par les organisations syndicales de la classe ouvrière.

Il ajoute que ces revendications urgentes, et par là même restreintes, si elles apportent une première modification au système économique actuel, devront être complétées par des mesures plus profondes pour arracher définitivement l’Etat aux féodalités industrielles et financières.

En tous les ordres de problèmes, le Rassemblement, a cherché des solutions de justice, seules conformes aux principes de la démocratie : justice égale pour tous dans l’application des lois pénales – justice fiscale – justice pour les indigènes dans les colonies – justice internationale, dans le cadre et suivant l’esprit de la Société des Nations.

S’il a été possible au Comité national du Rassemblement populaire d’aboutir à des formules unanimes, c’est que les partis et organisations qui le composent ont collaboré amicalement dans un esprit de conciliation et de synthèse. Aux masses populaires de soutenir à présent ces revendications et de les faire triompher. Quand ce programme commun aura passé dans la réalité, un grand changement sera obtenu : la liberté sera mieux défendue, le pain mieux assuré, la paix mieux garantie.

De tels biens sont assez précieux pour que tout soit subordonné à la volonté de les conquérir.

C’est à cette volonté revendicatrice que le Rassemblement populaire fait appel. Qu’elle se traduise par une cohésion étroite, où se prolonge la fraternité du 14 juillet, et qu’elle signifie à tous, en France et hors de France, que la démocratie est invincible dès qu’elle reprend sa vigueur créatrice et sa puissance d’attraction.

REVENDICATIONS POLITIQUES

I – Défense de la Liberté

1 – AMNISTIE GÉNÉRALE.
2 – CONTRE LES LIGUES FASCISTES :

a) Désarmement et dissolution EFFECTIVE des formations paramilitaires, conformément à la loi.

b) Mise en vigueur des dispositions légales en cas de provocation au meurtre ou d’attentat à la sûreté de l’Etat.

3 – ASSAINISSEMENT DE LA VIE PUBLIQUE, notamment par les incompatibilités parlementaires.

4 – LA PRESSE

a) Abrogation des lois scélérates et des décrets-lois restreignant la liberté d’opinion;

b) Réforme de la presse par l’adoption de mesures législatives :

1° qui permettent, la répression efficace de la diffamation et du chantage ;

2° qui puissent assurer aux journaux des moyens normaux d’existence, qui les obligent à rendre publique l’origine de leurs ressources, qui mettent fin aux monopoles privés de la publicité commerciale et aux scandales de la publicité financière, et qui empêchent enfin la constitution de trusts de presse.

c) Organisation des émissions radiophoniques d’Etat en vue d’assurer l’exactitude des informations et l’égalité des organisations politiques et sociales devant le micro.

5 – LIBERTÉS SYNDICALES :

a) Application et respect du droit syndical pour tous.

b) Respect du droit des femmes au travail.

6 – L’ÉCOLE ET LA LIBERTÉ DE CONSCIENCE :

a) Assurer la vie de l’école publique, non seulement par les crédits nécessaires, mais par des réformes telles que la prolongation de la scolarité obligatoire jusqu’à 14 ans et la mise en pratique, dans l’enseignement du second degré, d’une sélection indispensable comme, complément de la gratuité.

b) Garantir à tous, élèves et maîtres, la pleine liberté de conscience, notamment par le respect de la neutralité scolaire, de la laïcité et des droits civiques du corps enseignant.

7 – LES TERRITOIRES COLONIAUX : Constitution d’une Commission d’enquête parlementaire sur la situation politique, économique et morale dans les territoires français d’outre-mer, notamment dans l’Afrique française du Nord et l’Indochine.

II – Défense de la Paix

1 – Appel à la collaboration du peuple et notamment des masses laborieuses pour le maintien et l’organisation de la paix.

2 – Collaboration internationale, dans le cadre de la Société des Nations, pour la sécurité collective, par la définition de l’agresseur et l’application automatique et solidaire des sanctions en cas d’agression.

3 – Effort incessant pour passer de la paix armée à la paix désarmée, d’abord par une convention de limitation, puis par la réduction générale, simultanée et contrôlée des armements.

4 – Nationalisation des industries de guerre et suppression du commerce privé des armes.

5 – Répudiation de la diplomatie secrète, action internationale et négociations publiques pour ramener à Genève les Etats qui s’en sont écartés, sans porter atteinte aux principes constitutifs de la Société des Nations : sécurité collective et paix indivisible.

6 – Assouplissement de la procédure prévue par le Pacte de la Société des Nations pour l’ajustement pacifique des traités dangereux pour la paix du monde.

7 – Extension, notamment à l’Europe orientale et centrale, du système des pactes ouverts à tous, suivant les principes du Pacte franco-soviétique.

REVENDICATIONS ÉCONOMIQUES

I – Restauration de la capacité d’achat supprimée ou réduite par la crise

CONTRE LE CHÔMAGE ET LA CRISE INDUSTRIELLE : Institution d’un fonds national de chômage. Réduction de la semaine de travail sans réduction du salaire hebdomadaire. Appel des jeunes au travail par l’établissement d’un régime de retraites suffisantes pour les vieux travailleurs Exécution rapide d’un plan de grands travaux d’utilité publique, citadine et rurale, en associant à l’effort de l’Etat et des collectivités l’effort de l’épargne locale.

CONTRE LA CRISE AGRICOLE ET COMMERCIALE : Revalorisation des produits de la terre, combinée avec une lutte contre la spéculation et la vie chère, de manière à réduire l’écart entre les prix de gros et les prix de détail.

Pour supprimer la dîme prélevée par la spéculation sur les producteurs et les consommateurs ; création d’un office national interprofessionnel des céréales.

Soutien aux coopératives agricoles, livraison des engrais au prix de revient par les offices nationaux de l’azote et des potasses, contrôle et tarification de la vente des superphosphates et autres engrais, développement du crédit agricole, réduction des baux à ferme.

Suspension des saisies et aménagement des dettes.

Mise au point de la révision des billets de fonds de commerce.

En attendant l’abolition complète et aussi rapide que possible de toutes les injustices que les décrets-lois comportent, suppression immédiate des mesures frappant les catégories les plus touchées dans leurs conditions d’existence par ces décrets.

II – Contre le pillage de l’épargne

Pour une meilleure organisation du crédit. Réglementation de la profession de banquier.

Réglementation du bilan des banques et des sociétés anonymes.

Réglementation nouvelle des pouvoirs des administrateurs des sociétés anonymes.

Interdiction aux fonctionnaires retraités ou en disponibilité d’appartenir aux conseils d’administration des sociétés anonymes.

Pour soustraire le crédit et l’épargne à la domination de l’oligarchie économique, FAIRE DE LA BANQUE DE FRANCE, aujourd’hui banque privée, LA BANQUE DE LA FRANCE :

Suppression du Conseil des Régents.

Élargissement des pouvoirs du Gouverneur, sous le contrôle permanent d’un conseil composé de représentants du pouvoir législatif, de représentants du pouvoir exécutif et de représentants des grandes forces organisées du travail et de l’activité industrielle, commerciale et agricole.

Transformation du capital en obligations, des mesures étant prises pour garantir les intérêts des petits porteurs.

III. – Assainissement financier.

Révision des marchés de guerre en liaison avec la nationalisation des industries de guerre.

Répression du gaspillage dans les administrations civiles et militaires.

Institution de la caisse des pensions de guerre.

Réforme démocratique du système des impôts comportant une détente fiscale en vue de la reprise économique, et création de ressources par des mesures atteignant les grosses fortunes (progression rapide de la majoration du taux de l’impôt général sur les revenus supérieurs à 75 000 francs – réorganisation de l’impôt successoral – taxation des profits des monopoles de fait en évitant toute répercussion sur les prix de consommation).

Suppression de la fraude sur les valeurs mobilières, par la mise en vigueur de la carte d’identité fiscale votée par les Chambres, en l’accompagnant d’une amnistie fiscale.

Contrôle des sorties de capitaux et répression de leur évasion par les mesures les plus sévères, allant jusqu’à la confiscation des biens dissimulés à l’étranger ou de leur contre-valeur en France.

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Le bel hymne du Parti Socialiste en 1977

Au milieu de l’année 1977, le Parti Socialiste tenait son congrès à Nantes, au Parc des expositions. Cela fut le prétexte à l’instauration d’un hymne, avec des paroles écrites par Herbert Pagani et une musique du Grec Míkis Theodorákis, deux artistes particulièrement engagés.

Les paroles sont une célébration de l’utopie et de la possibilité de réaliser celle-ci.

Les voix des femmes et les voix des hommes
Ont dû se taire beaucoup trop longtemps
Ne croyons plus aux lendemains qui chantent
Changeons la vie ici et maintenant
C’est aujourd’hui que l’avenir s’invente
Changeons la vie ici et maintenant

Prendre la parole
Décider nous-mêmes
Libérer nos vies des chaînes de l’argent
Écrire notre histoire à la première personne
Être enfin des hommes et non des instruments

France socialiste puisque tu existes
Tout devient possible ici et maintenant

Ne versons plus au nom de leur puissance
Notre sueur, nos larmes, notre sang
Les travailleurs travaillent pour la France
Pas au profit de quelques possédants
Pour partager les fruits de l’abondance

Changeons la vie ici et maintenant
Prendre la parole
Décider nous mêmes

Libérer nos vies des chaînes de l’argent
Faire du bonheur notre monnaie courante
Maîtriser la science et dominer le temps

France socialiste puisque tu existes
Tout devient possible ici et maintenant

Il nous faudra reprendre en main nos villes
Qui ne sont plus que des ghettos géants
Où le printemps n’a plus le droit d’asile
Où meurent les vieux, les arbres, les enfants
C’est dans nos propres murs qu’on nous exile

Changeons la vie ici et maintenant
Prendre la parole
Décider nous-mêmes

Libérer nos vies des fleuves de ciment
pour ne plus mourir de l’air que l’on respire
Et pour pouvoir vieillir auprès de nos enfants

France socialiste puisque tu existes
Tout devient possible ici et maintenant

Un siècle meurt, un millénaire commence
Plus de prisons, de cages et de camps
Tendons la rose rouge de l’espérance
Aux opprimés de tous les continents
L’histoire est là qui nous offre une chance

Changeons la vie ici et maintenant
Libérer la femme
Libérer l’école
Donner la parole aux frères émigrants

Ecrire notre histoire à la première personne
Être enfin des hommes et non des instruments

France socialiste puisque tu existes
Tout devient possible ici et maintenant.