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Contre l’américanisation de la société française

Toute initiative politique a des fondements qui s’inscrivent comme partie du problème ou partie de la solution. Les rassemblements à l’appel du collectif « la vérité pour Adama » à Paris, Marseille, Lille, Lyon… s’inscrivent dans une tentative d’américanisation de la vie politique française et même de la société. Selon cette idée, la Gauche devrait disparaître et a fortiori ses idées, ses traditions, au profit d’agrégations semi-anarchistes d’esprit identitaire.

 

« Mort d’Adama Traoré : vivez en direct le rassemblement interdit devant le palais de justice de Paris » : Le Figaro n’a pas manqué d’envoyer un journaliste filmer le rassemblement parisien, avec la possibilité de commenter, ce qui a donné lieu bien sûr à un défouloir raciste et réactionnaire.

L’occasion était trop belle. Un rassemblement « interdit » mais qui a lieu quand même, avec une initiative venant des milieux postmodernes, dans le cadre d’une tentative de se raccrocher à ce qui ébranle les États-Unis : on a tous les ingrédients pour renforcer la Droite.

L’idée n’est même pas de dénoncer les réponses de la Gauche, mais de la nier, en disant qu’elle n’existe que sous la forme, hors-sol, de protestations parcellaires, forcées, agitatrices. Donald Trump a cherché à faire la même chose aux États-Unis en dénonçant les « antifas » qui seraient à l’origine des émeutes un peut partout dans le pays.

C’est-à-dire qu’en agissant ainsi, les commentateurs du Figaro font comme leurs inverses postmodernes ayant manifesté : ils poussent à l’américanisation de la vie politique et de la société.

Le principe est simple : les idées sont dans la société comme si celle-ci était une bourse et il faut pousser pour conquérir des parts de marché. C’est une vision libérale du monde, où les individus sont des consommateurs qu’il faut satisfaire afin qu’ils s’orientent vers les produit.

Eric Zemmour est un très bon exemple de produit puisqu’il dit ce que son public veut entendre, lui-même étant totalement creux, il suffit d’essayer de lire ses livres odieusement mal écrit (eu égard à ses prétentions) pour le constater. On en connaît d’autres : Dieudonné, Emmanuel Macron, Nicolas Hulot…

Le contraste est complet avec les années 1980. François Mitterrand, Georges Marchais, Valéry Giscard d’Estaing… avaient un haut niveau d’éducation et une vraie vision du monde. Ils étaient opportunistes, parfois jusqu’au paroxysme comme Jacques Chirac, mais ils avaient une base réelle. Aujourd’hui, il n’y a plus que des marionnettes.

Les Français ont beaucoup ri quand Ronald Reagan, un acteur de qualité relativement faible, a été élu président des États-Unis. Mais les Français ne valent presque pas mieux désormais. Tout est dans le « presque » cependant. Car la tentative d’américanisation de la société ne réussira pas. La classe ouvrière a trop de traditions et ainsi elle ne s’intéresse pas plus au collectif « la vérité pour Adama » qu’aux gilets jaunes. Elle vit sa vie, irréductible, passive, mais incorruptible.

Et quand elle commencera à bouger, cela ne sera certainement pas pour expliquer que les trans sont la figure révolutionnaire de notre époque, que les blancs sont des « souchiens », que la France des années 1960 était un paradis, que le drapeau national est la solution, que distribuer des gâteaux est de la subversion, que l’armée est la solution, que le hooligan au look neutre mais branché est la forme la plus aboutie de la rébellion, etc. etc.

Toute cette agitation forcenée de la Droite et des milieux postmodernes est en total décalage avec la réalité. Avec la réalité du Covid-19, car de tels rassemblements sont incohérents sur le plan de la protection sanitaire. Avec la réalité de la crise économique sur laquelle la France capitaliste va se fracasser. Avec la réalité de la classe ouvrière qui est là pour instaurer le Socialisme.

Mais il est vrai que ni la Droite, ni les milieux postmodernes ne veulent le Socialisme. Cela tombe bien : le Socialisme ne veut pas d’eux non plus.

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L’insoutenable récupération française de l’affaire Georges Floyd par le collectif «la vérité pour Adama»

Le collectif « la vérité pour Adama » qui appelait hier à un rassemblement n’avait aucune volonté de solidarité internationale pour la révolte populaire américaine. C’était une manœuvre opportuniste pour profiter de l’élan en cours et cela a particulièrement marché avec plus de 20 000 personnes à Paris malgré l’interdiction, dont pratiquement que des jeunes, beaucoup d’artistes, et des rassemblements dans plusieurs autres grandes villes.

Les milliers de jeunes présents aux rassemblements d’hier en France avaient probablement beaucoup de bons sentiments. Mais l’enfer est pavé de bonnes intentions comme le dit l’expression et en l’occurrence, en matière d’enfer, le collectif « la vérité pour Adama » est particulièrement détestable. Sa récupération de l’affaire Georges Floyd en est d’autant plus odieuse tant les deux situations n’ont rien à voir.

Mais cela n’intéresse personne, car les gens en France ont décidé depuis longtemps d’arrêter de se poser des questions et de réfléchir. Il est vrai qu’il est bien plus confortable et conforme à la mentalité consumériste du capitalisme de fonctionner par raccourcis et de s’imaginer que la France aurait « son » George Floyd. Elle serait, de fait, sur le même plan que les États-Unis. C’est depuis longtemps un rêve pour la jeunesse française d’être américaine et c’était là une occasion en or. Peu importe finalement que l’affaire Adama Traoré ait en fait déjà quatre ans et ait déjà bénéficié d’une large audience médiatique.

Il faut dire que le PCF, malgré son état de mort cérébrale, arrive encore à avoir une certaine influence pour une partie du pays et avait totalement validé cela. Il soutient depuis longtemps le collectif « la vérité pour Adama », qu’il a même invité à son congrès. Tout comme l’ultra-gauche et les anarchistes d’ailleurs, qui adorent ce collectif, ainsi que tout ce que la place parisienne compte de médias artistiques/culturels censés êtres « progressistes », en fait surtout postmodernes.

Le collectif « la vérité pour Adama » n’a donc pas eu besoin de prendre de pincettes hier et a ouvertement assumé de tout ramener à lui. Tout est mis sur le même plan qu’aux États-Unis, avec dans l’appel au rassemblement le titre « je n’arrive plus à respirer » et en sous-titre « Adama Traoré/juillet 2016 – Georges Floyd/mai 2020 ».

« Je n’arrive plus à respirer » est la transcription du slogan américain « I can’t breathe », car c’est ce que criait désespérément Georges Floyd alors que le policier le maintenait fermement au sol pendant près de 9 minutes, jusqu’à le tuer, en pleine rue devant tout le monde.

Assa Traoré, la sœur d’Adama Traoré, aimerait faire croire que son frère a dit exactement la même chose en 2016 et que les deux affaires sont similaires, relevant de la même brutalité raciste. C’est cependant une fiction. Pourquoi ? Car Adama Traoré n’était pas maintenu au sol pendant 9 minutes sur la place publique pendant une banale intervention. Il avait tenté de fuir plusieurs fois à un contrôle de gendarmerie, qui ne le concernait d’ailleurs même pas, et n’est pas mort pendant l’interpellation mais plus tard, dans le véhicule de la gendarmerie.

La gendarmerie était venue ce jour-là pour interpeller son frère pour une affaire particulièrement sordide d’escroquerie sur personne en curatelle, donc particulièrement vulnérable. Il a été condamné pour cela, et d’ailleurs les condamnations pour diverses affaires délinquantes détestables sont particulièrement nombreuses dans la famille, y compris pour Adama. Les faits sont connus et très documentés pour qui prend la peine de se renseigner.

Le jour de sa mort, Adama Traoré était présent à proximité de l’interpellation de son frère et a pris peur, puis s’est enfui à vélo. La gendarmerie a d’abord réussi à l’interpeller en raison de sa fuite et à lui passer les menottes à une main. Il s’est à nouveau enfui en courant suite à l’intervention d’un ami à lui.

La gendarmerie l’a retrouvé finalement alors qu’il s’était caché et a procédé à l’interpellation. C’est cette intervention qui est dénoncée par sa famille, et notamment sa sœur qui est la principale porte-parole du collectif demandant la « vérité ».

La gendarmerie, mais aussi sa famille à l’origine, l’a décrit comme particulièrement fragile et avec des problèmes médicaux liés à la respiration. Les rapports des « experts » du côté de la gendarmerie documentent cela et disent qu’il est mort pour cette raison, à cause de son essoufflement excessif suite à ses courses et sa résistance pendant l’interpellation, forcément houleuse. Les rapports des « experts » du côté de la famille disent par contre que cela n’a rien à voir et qu’il est mort à cause de la brutalité de l’interpellation.

Le collectif « la vérité pour Adama » en tire ensuite la conclusion que la police est raciste en France (alors qu’il s’agit en plus d’une interpellation de gendarmerie, ce qui n’a strictement rien à voir) et milite depuis quatre ans pour défendre cette thèse.

On a ainsi, quels que soient les faits concernant l’interpellation elle-même ce jour-là, une mise en scène totale. Cela était particulièrement flagrant hier soir avec ces propos ouvertement mensongers d’Assa Traoré devant des milliers de jeunes, qui l’ont applaudi :

« Mon frère est mort le jour de son anniversaire. Il a mis son bob, il a mis sa chemise à fleur, il a pris son vélo et il est sorti faire un tour. Mais en France, un noir ne peut pas sortir faire un tour de vélo. »

De tels propos sont insupportables tellement ils sont délirants, comme si la France de 2020 était l’Afrique du Sud de l’apartheid, comme si la police interpellait au hasard des personnes de couleurs noire dans la rue, juste par plaisir raciste. C’est exactement la même chose que les élucubrations récentes de la bourgeoise Camilia Jordana, inventant des « massacres » de travailleurs le matin en banlieue, du fait de leur couleur de peau.

Et cela indique une chose très simple : ces gens ne veulent pas de la lutte des classes, ils veulent des combats identitaires. Ils accompagnent l’effondrement d’une société sans projet collectif, où les individus sont atomisés et s’agrègent par « choix » ou par « identité ». Rien de bon ne peut provenir de cela.

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Comment l’affaire George Floyd indique que les États-Unis sont en crise totale

Il faut porter un regard sérieux sur les États-Unis, à rebours donc des populismes de gauche français trop enclins à faire de la France des États-Unis en miniature avec le même racisme, la même misère, les mêmes problématiques identitaires communautaires ou de « genre », etc. La crise qui se révèle, c’est celle d’un pays bien différent de la France et qui se révèle également à bout de souffle, mais d’une autre manière.

Si l’on regarde l’ampleur des arrestations aux États-Unis, on se dit que les émeutes qui y ont eu lieu n’ont pas une réelle envergure, qu’on a simplement une poussée de révolte conséquente à un acte plein d’injustice et de cynisme de la part de la police.

Ce serait là un raccourci. Les condamnations pénales américaines sont d’une ampleur bien autre qu’en France et le filet social est faible ou nul. Par conséquent, se lancer dans une telle bataille reflète qu’au fond de la société américaine, il s’est passé quelque chose.

C’est une rupture avec l’idéalisme d’Obama et l’image États-Unis modernes et en transformation. L’élection de Trump avait déjà été une réponse populiste, cette fois on a une réponse en termes de lutte de classe. Et ce qui l’a permis, il ne faut pas se leurrer, c’est la crise du coronavirus et ses conséquences économiques.

Le système économique américain profite d’une vaste précarité qui se survit à elle-même car les gens à la marge de la classe ouvrière trouvent des emplois ici ou là, leurs salaires misérables permettant des vagues permanentes d’initiatives capitalistes.

La crise du coronavirus a enrayé la machine pour les couches les plus pauvres. La conséquence en est une incertitude complète pour ces couches marginalisées. Ce sont elles, souvent noires (ou latinos), qui ont saisi l’affaire George Floyd, en comprenant ce que cela symbolise : leur propre écrasement.

C’est un retour de la lutte des classes et c’est cela qui a provoqué un électro-choc aux États-Unis, comme on le voit au moyen d’un critère national très spécifique : la dramatisation. Les États-Unis, ainsi que certains autres pays tels la Suède mais avec des différences bien entendu, se veulent des pays ensablés dans leur stabilité, dans leur bulle.

Les attentats du 11 septembre ont justement été une lecture pragmatique inversant cette conception, ce qui n’est pas étonnant de la part d’islamistes qui sont le produit inversé des États-Unis. Cela a très bien « fonctionné » au sens où la réponse a été le psychodrame national, si l’on met bien entendu de côté que cette action était en soi spectaculaire mais sans autre contenu qu’un idéalisme religieux assassin.

L’affaire George Floyd est un même psychodrame national. C’est désormais ancré dans l’Histoire, parce qu’il y avait tous les ingrédients pour une convergence d’un esprit de soulèvement contre la situation. Donald Trump, par son style et sa décadence complète, annonçait déjà la fin d’une époque.

Les États-Unis sont en roue libre et il n’y a plus de perspective, tout est trop atomisé, fragmenté, déstructuré. D’ailleurs, on parle là-bas de « communauté » et même plus au sens strict de société : un quartier est une « communauté », les noirs sont une « communauté », il y aurait une « communauté » LGBT, bref on l’a compris l’ultra-libéralisme a réduit la vision du monde à des affinités électives.

La « gauche » postmoderne reflète tout cela et en France on sait qu’elle a conquis une hégémonie, lessivant les valeurs de la Gauche historique, du mouvement ouvrier. La CIA et Google célèbrent les LGBT, mais ce serait « révolutionnaire » en soi d’en relever !

Cette atomisation américaine s’accompagne toutefois de monopoles surpuissants et d’un gigantesque complexe militaro-industriel. Pour maintenir la baraque et continuer le « rêve américain », il y a donc la tendance à la guerre et l’ennemi est déjà identifié : c’est la Chine.

On assiste à un tournant mondial et les États-Unis, principale puissance du monde depuis 1918, superpuissance gendarme du monde depuis 1945 (avec l’URSS ultra-militariste des années 1960-1980, puis seule), se retrouvent au cœur de celui-ci. C’est le début de sa fin.

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Les États-Unis au bord du précipice

« Les États-Unis au bord du précipice » : c’est le titre de la Une du Washington Post alors que le pays connaît une crise qui ramène aux années 1990 ou plus encore aux années 1960. La crise sanitaire et la crise économique ont mené à l’explosion une société empêtrée dans une violence généralisée. L’empire américain commence à tomber comme un château de cartes.

Les États-Unis sont particulièrement touchés par la crise économique consécutive à la crise sanitaire du Covid-19, alors que la crise de 2008 avec déjà frappé durement toute une frange populaire du pays.

Cela a beau être la première puissance mondiale, la plus riche, la situation y très difficile déjà à la base comme on le sait, avec des inégalités terribles, un système de santé défaillant, des mafias rongeant le pays, une violence généralisée à tous les niveaux, un communautarisme exacerbé, une défaillance complète dans le système éducatif et la culture en général, etc.

Le meurtre de George Floyd a dans un tel contexte mis le feu aux poudres. Âgé de 46 ans, un policier lui a coupé la respiration en maintenant son genou sur son coup pendant 8 minutes et 46 secondes, sous les yeux des passants estomaqués, et alors que l’homme à terre hurlait qu’il n’arrivait pas à respirer. Le policier en question était déjà concerné par 18 plaintes en raison de son comportement violent.

L’intervention faisait suite à la dénonciation par un commerçant de l’usage supposé d’un faux billet de 20 dollars, dans un quartier populaire de Minneapolis. Autant dire qu’on reconnaît bien la folie du système américain, ultra violent, avec un système pénitentiaire gigantesque, une militarisation générale de la société, une fuite en avant dans la déchéance culturelle qui confine à la folie furieuse.

Et, dans ce contexte, il y a le racisme, qui a profondément reculé mais dispose de solides bastions, notamment dans certaines polices, comme à New York. Personne n’a été dupe sur la dimension raciste du meurtre de George Floyd.

Il y a eu, heureusement, une explosion populaire, signe que tout n’est pas perdu dans un pays plus qu’à la dérive. Des manifestations accompagnées d’émeutes ont éclaté dès le lendemain, dénonçant un crime raciste et une violence policière systématique à l’encontre des personnes noires dans le pays.

Jeudi dernier, le poste de policer dont était originaire le groupe de policiers intervenants, qui ont été licenciés, avait été évacué par les forces de l’ordre en prévision d’une mobilisation populaire, puis effectivement incendié dans la nuit. Depuis, la ville s’est embrasée pendant toutes la semaine dernière, menant à l’intervention de la garde nationale alors que les émeutes se sont développées…

Et généralisées à tout le pays avec des manifestations dans 140 villes du pays et plus de 4000 personnes arrêtées dans une trentaine de villes différentes, dont près d’un millier à Los Angeles. C’est peu, mais en fait la mobilisation a débordé un régime américain ne sachant pas exactement encore quoi faire à part essayer de bloquer la diffusion des initiatives.

La capitale Washington a décrété un couvre-feu, ainsi que la ville de New-York et de très nombreuses autres villes. La Garde nationale a été déployée dans une quinzaine d’États. Le président Donald Trump a quant à lui parlé dans la semaine de tirer à balle réelle sur les manifestants en raison des pillages, assumant une posture martiale et ouvertement brutale.

Inversement, des personnalités notamment sportives, des grandes marques comme Nike, des religieux, des policiers… prennent ouvertement le parti des manifestants. On a même, aujourd’hui mardi, un « Black Out Tuesday » (mardi où l’on arrête tout) organisé par les grandes maisons de disque Sony Music, Warner Music Group et Universal Music, ainsi que de nombreux labels indépendants, en faveur de « changements significatifs » dans la société.

Cependant, de telles initiatives limitent la question à celle du racisme et appelant de manière ininterrompue à l’arrêt des violences. Difficile de ne pas voir en effet que la toile de fond est celle d’un système à bout de souffle.

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La restructuration de Renault exige une bataille ouvrière

La crise a frappé et Renault a décidé de lancer une première salve de suppressions d’emplois. La brutalité anti-ouvrière commence. Mais en face, il n’y a aucune expérience, à part les contre-projets syndicaux. La rupture va être difficile, amère, très dure à tous les niveaux.

Finie la rigolade. Car ce qu’ont fait les syndicats jusqu’à présent en France, c’est accompagner les choix des entreprises en prétendant les améliorer. Maintenant, c’est le dégraissage, la pressurisation, l’écrasement. Il va falloir choisir son camp : ou assumer la Gauche (historique), ou continuer à suivre les décisions des entreprises en toute servitude.

Ce que fait Renault est exemplaire. En alliance avec Nissan, le groupe a décidé de supprimer 15 000 emplois sur trois ans, afin de récupérer deux milliards d’euros sur trois ans. C’est une vision à court terme typique des capitalistes, puisque la vraie richesse vient du travail des ouvriers. Si on les supprime, c’est autant de profits en moins, cependant les capitalistes ne voient pas cela, évidemment, puisqu’ils ne pensent pas les exploiter !

En France, 4 600 postes sont concernés. Cela semble peu, mais cela représente tout de même 10 % des emplois de Renault en France. L’usine de Choisy-le-Roi (Val-de-Marne) va être fermée, Renault reculant devant les fermetures des sites de Flins (Yvelines), Maubeuge (Nord), Dieppe (Seine-Maritime) et la Fonderie de Bretagne à Caudan (Morbihan).

À Maubeuge, plusieurs milliers de personnes se sont rassemblées d’ailleurs samedi 30 mai, à l’appel de l’l’intersyndicale (CGT, CFDT, CFTC, CFE-CGC, SUD), ce qui est évidemment très bien sachant que cette usine, comme les autres restantes, va faire l’opération d’une « revue stratégique ».

Il faut lutter, car quand la directrice générale par intérim de Renault, Clotilde Delbos, présente ce projet comme « vital », cela veut dire que ce qui va être arraché, c’est de la chair ouvrière, cette chair à canon de la crise.

Naturellement, il est expliqué que l’entreprise compte sur les retraites et les départs volontaires, qu’il n’y aurait pas de licenciements secs, etc. En réalité, c’est un dégraissage en règle. Voyons les faits : Renault va passer en trois ans d’une production de 4 millions de véhicules par an à 3,3 millions. Nissan va quant à elle baisser sa production de deux millions de véhicules !

C’est une chute terrible. Que vont-ils faire par exemple de l’usine de Douai, qui peut produire 400 000 véhicules, mais n’en produit que 80 000 ? Finis, disparus, envolés les rêves de Carlos Ghosn de faire de Renault-Nissan le premier groupe mondial !

Les syndicats dénoncent évidemment le « gâchis » et l’absence de « stratégie » de l’entreprise, jouant ici un rôle puissamment néfaste, comme à leurs habitudes, car c’est de crise qu’il s’agit. Qu’auraient-ils voulu, de toutes façons ? Une entreprise capitaliste florissante ? On voit comment les syndicalistes sont prisonniers de leur statut.

Maintenant, la chose est entendue. Soit les ouvriers se révoltent, soit ils se font broyer. Croire qu’en une telle période on peut peser sur les orientations comme dans les années 1970-1980, il faut être syndicaliste pour l’imaginer en toute naïveté, en toute traîtrise.

Syndicaliste, ou bien archevêque. Ou bien élu local. Bien la peine pour les syndicats de dénoncer la politique, de la rejeter, pour se retrouver sur la même longueur d’ondes que ceux qui n’ont aucune vue d’ensemble et encore moins une vue d’ensemble ouvrière.

D’ailleurs, le nouvel exécutif du groupe, Luca de Meo, arrive en juillet seulement, mais on ne l’attend pas pour prendre les décisions. Car il y a urgence. Les syndicalistes croient au capitalisme, donc ils ne le voient pas. Les capitalistes, eux, ont senti le vent du boulet et savent que la crise a reculé avec les aides de l’État pour mieux revenir après.

Il faut donc vite trouver de quoi tenir… Se débarrasser des ouvriers. Finies les recherches avec des coûts faramineux. On est désormais dans le capitalisme qui se survit à lui-même, et il fait ce qu’il peut… et ce qu’il veut, à moins d’une opposition politique. Il va falloir commencer à abandonner ses illusions et à lutter !

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François Ruffin, successivement démocrate, opportuniste, démagogue

Démagogue assumé représentant l’aile ultra-populiste de La France Insoumise, François Ruffin abat ses cartes. Il vise désormais clairement les élections présidentielles et se présente par conséquent comme « constructif ».

François Ruffin est un être révoltant pour toute personne de gauche, car il imite le contenu de celle-ci à travers des postures et des caricatures. Il est totalement à l’extérieur du mouvement ouvrier, tout en se prétendant « populaire » ; machiavélique de bout en bout, il dénonce les puissants mais fait bien en sorte de ne pas dénoncer la chasse à courre. C’est d’autant plus grave qu’il vient de Picardie, où il y a une réelle tradition ouvrière. François Ruffin est d’autant plus connu qu’il a réalisé une OPA populiste et qu’il contribue au démantèlement des traditions ouvrières.

Il passe maintenant à la seconde étape. Le 3 juin, il sort un gros ouvrage de quasi 300 pages, Leur folie nos vies La bataille de l’après, avec comme stratégie d’appeler à l’union de la gauche et des écologistes afin de terminer « la parenthèse libérale ». Il calibre son discours en ce sens : il revendique de ne pas vouloir supprimer le marché, mais le « réguler », il appelle à un « État stratège ». Voilà de quoi rassurer.

Quant au cinéma qu’il fait actuellement au sujet de sa proposition de loi sur les femmes de ménage, que LREM a modifié et selon lui vidé de son contenu, c’est un calcul politique qui vise à lui donner un positionnement social en général, afin de gommer toute possibilité d’avoir l’image d’une liaison particulière avec la classe ouvrière. Son nouvel ouvrage est présenté d’ailleurs comme le fruit de discussions avec « des infirmières bien sûr, un ambulancier, des auxiliaires de vie, des caissières, un libraire, un cariste de chez Amazon, un ouvrier de chez Valeo, une patronne de bar-tabac, un routier à l’arrêt… »

Ce que fait François Ruffin se résume tout simplement en disant qu’il arrondit les angles. Il a réussi sa mise en orbite politique en deux temps, trois mouvements. Il s’oppose aux notables à Amiens : c’est le François Ruffin démocratique. Il profite des Picards et de Nuit Debout pour s’accorder une place dans l’orbite de La France Insoumise : c’est le François Ruffin opportuniste. Il commence ensuite à profiter de ses réseaux et des gilets jaunes pour jouer au député-reporter, c’est le François Ruffin démagogue.

Et François Ruffin ose tout. Il n’a jamais parlé d’écologie et n’a jamais osé dénoncer les chasseurs. Cela ne l’empêche pas de se présenter depuis quelques mois comme un fervent défenseur de l’écologie. Il n’a pas honte de cette escroquerie : à ses propres yeux, c’est un sauveur qui s’ajuste à ce qu’il faut.

Il sait également qu’il doit faire semblant d’être dans la lignée de la gauche s’il veut être élu. Alors il change son profil, comme on le fait sur Facebook. Voilà ce qu’il raconte sans aucune gêne dans Libération, dans ce qui consiste en une prise d’assaut :

« Vous utilisez le mot gauche mais il est en débat.

Pour moi, ça veut toujours dire quelque chose. Je suis dans le camp des partageux. C’est un fil qui part de 1789, qui traverse la Commune, qui comprend Jaurès, le Front populaire, le Conseil national de la résistance, qui embrasse les deux mai 1968, ouvrier et étudiant, et qui fait sien 1981. Qui s’arrête, en revanche, en 1983. Je peux même m’amuser à le dater : le 23 mars 1983, jour où Lionel Jospin, premier secrétaire du parti socialiste, parle d’une «parenthèse libérale». Une parenthèse que, au fond, près de quarante années plus tard, nous n’avons toujours pas refermée. Voilà mon héritage.

Et depuis l’adolescence, j’ai bien perçu la «folie» de la croissance, le délire des élevages industriels, la nécessité historique qu’est l’écologie. D’où la formule, qui me convient parfaitement : «Consommer moins et répartir mieux.» »

On est ici d’autant plus dans la mythologie pure et simple, car évidemment jamais François Ruffin adolescent au collège-lycée jésuite La Providence (comme Emmanuel Macron) n’a été un rebelle en quoi que ce soit. Il a bien gentiment fait sa maîtrise de Lettres Modernes et obtenu un diplôme du Centre de formation des journalistes, ce qui demande de rentrer dans un moule tout à fait bourgeois.

François Ruffin est une mascarade, c’est l’Emmanuel Macron de La France Insoumise. Barrer la route à ce personnage extérieur à tous les niveaux au mouvement ouvrier est incontournable.

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Crise du secteur automobile: Emmanuel Macron annonce 8 milliards d’euros pour le maintenir sous perfusion

En visite dans l’usine de sous-traitance automobile Valeo à Étaples près du Touquet dans le Pas-de-Calais, le président Emmanuel Macron a présenté un gigantesque plan d’aide pour la filière automobile. Ce sont 8 milliards d’euros qui ont été annoncés pour tenter d’empêcher l’effondrement de tout un secteur face à la crise économique. Le capitalisme vacille et l’État s’imagine pouvoir faire face en dépensant de l’argent qu’il n’a pas.

C’est la panique au plus haut sommet de l’État face aux chiffres catastrophiques du secteur de l’automobile. Les ventes se sont effondrées avec le confinement, de près de 90 % en avril par rapport à l’année dernière et le Président a expliqué dans son intervention que cela représentera pas moins de 500 000 véhicules invendus d’ici fin juin, par rapport à l’an passé. C’est gigantesque.

Les usines, représentants 400 000 emplois et plus du double en comptant toute la chaîne de service que la production automobile induit en aval, tournent au ralenti, alors que les ventes ne se relancent pas. Pour endiguer l’hémorragie, l’État français envisage la méthode habituelle : sortir le carnet de chèques et subventionner à tour de bras.

Ce sont en tout huit milliards d’aides apportées par l’État qui sont annoncées, réparties en centaines de millions par ci et centaines de millions par là. Ce n’est pas moins qu’un renouvellement complet du « parc automobile » qui est envisagé, avec le véhicule électrique comme fer de lance pour espérer relancer le marché grâce au label de l’écologie (ou en tous cas de la prétendue écologie).

Les annonces sonnent fort, avec par exemple l’annonce d’une prime de 7000 euros pour l’achat d’un véhicule électrique. En fait, cette prime existe déjà, et elle est de 6000 euros. Mais ce qui compte pour Emmanuel Macron, c’est l’effet d’annonce, afin d’espérer relancer tout un secteur en le maintenant sous perfusion par des primes, à la production et à l’achat.

Avec son lyrisme habituel, en s’imaginant peut-être avoir la capacité de créer un choc de consommation, le Président s’est emballé sur la question. Il a expliqué que :

« C’est en France que le véhicule propre qui équipera l’Europe et le monde dans les années à venir s’inventera et se produira. »

Cela est particulièrement risible alors que de nombreuses entreprises dans le monde n’ont pas attendu la France pour produire des voitures électriques ou des moteurs thermiques à faible émission. L’Allemagne s’apprête d’ailleurs à accueillir une «  gigafactory Tesla » près de Berlin, c’est-à-dire une immense usine produisant des voitures électriques sur un site plus grand que celui de PSA à Sochaux… Tesla possède déjà deux grandes usines aux États-Unis et une en Chine.

Avec beaucoup de retard, mais par contre avec plein de bons sentiments, la France s’imagine donc pouvoir éviter la crise aussi facilement ? Rien n’est moins sûr. Dans son intervention, Emmanuel Macron a beaucoup insisté sur la modernisation des chaînes de production, la robotisation, la numérisation, l’innovation écologique. Le problème est que cela existe déjà, que les usines sont déjà ultra-modernes et automatisées, alors que sur le plan écologique, l’industrie a déjà connu un bon gigantesque ces dernières années quant à la consommation des moteurs thermiques et à leurs émissions de polluants.

Il y a toujours possibilité de faire mieux évidemment, mais il ne faudrait pas s’imaginer ici que l’industrie à des possibilités d’innovation énormes pour se relancer. En réalité, le secteur était déjà à bout de souffle depuis de nombreuses années, faisant face à un ralentissement structurel de son activité, liée au mode de vie de la seconde moitié du 20e siècle.

Le problème du capitalisme, c’est qu’il est, par définition, incapable d’organiser l’économie et de produire ce qui est utile, de la meilleure manière possible. Il n’y a alors comme seule option pour les dirigeants acceptant le capitalisme que de tenter de « relancer » sans cesse la machine, dans une course folle à la production pour la production.

Même le syndicalisme, qui refuse la Gauche et donc le Socialisme, ne dit pas autre chose. Pour Philippe Martinez de la CGT, le problème de ce plan serait surtout qu’il n’y a pas de critique de la stratégie de Renault, sous-entendant que son syndicat aurait mieux géré cette entreprise capitaliste que les capitalistes eux-mêmes. Pour le reste, Philippe Martinez critique tout en expliquant que la CGT dit déjà le même chose depuis longtemps, à propos de « renouveler le parc automobile » et « fabriquer des véhicules plus propres en France ».

Pour la CFTC, le plan gouvernemental « c’est du plus, on va le prendre », alors que pour la CFDT les primes sont « une bonne nouvelle », mais de toutes façons elle « n’en attendait pas moins de l’État ». La CFE-CGC de la métallurgie quant à elle « approuve les grandes lignes du plan » du gouvernement.

Tout cela apparaît donc bien décalé, alors que la France s’apprête à s’enfoncer dans une crise économique majeure, et que la crise écologique se fait chaque jour plus grande, avec des enjeux immenses. Le monde va changer, rapidement, drastiquement, et tous ceux qui auront cru aux mensonges du capitalisme et ses capacités de relance éternelle vont se retrouver fort dépourvus. À la Gauche d’être en mesure de proposer une autre voie, sur la base de ses traditions ouvrières historiques, c’est-à-dire la lutte des classes pour faire plier la bourgeoisie et ériger à sa place un nouveau monde, socialiste.

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Le prétendu racisme de la police, nouvelle lubie de la petite-bourgeoisie hystérique

Après avoir inventé pendant des mois une police « fasciste » qui mutilerait volontairement les gilets jaunes, la petite-bourgeoisie hystérique s’ennuyait pendant le confinement. Elle s’est découvert une nouvelle lubie, répétée en boucle : la police serait raciste et pratiquerait une véritable terreur en banlieue. Camélia Jordana n’a fait que relayer et médiatiser ce fantasme ridicule, de la part de gens n’ayant souvent aucun rapport avec le quotidien des cités populaires.

Suite aux propos délirants de Camélia Jordana sur France 2, le secrétaire départemental parisien du syndicat majoritaire dans la police Unité SGP Police-FO a eu beau jeu de rappeler qu’elle n’a jamais mis les pieds en banlieue, ayant grandi dans un environnement huppé du Var et évoluant depuis dans le show business. Il a aussi précisé ce fait, qui n’aura pas échappé à toute personne vivant dans le monde réel et pas dans ses propres fantasmes : il y a en France dans la police énormément de personnes, venant des classes populaires, qui sont issues de l’immigration ou des Antilles (et qui se sentent particulièrement offusquées par les accusations faites).

Cela change tout. Cela a largement contribué à changer la police française ces dernières années, avec toute une génération de policiers ayant un état d’esprit démocratique, ou en tous cas la volonté de l’être. Comme dans le reste de la société française, le racisme quand il existe est ostracisé, dénoncé. Comme dans le reste de la société, les policiers ont bien d’autres choses à faire au quotidien que d’être raciste.

Une petite affaire a cependant agité tout un tas de gens il y a quelques semaines, y voyant une justification de leurs fantasmes. Dans une vidéo filmée depuis un balcon au milieu de la nuit, on entendait les propos graveleux et racistes de policiers repêchant un présumé voleur ayant sauté dans la Seine pour leur échapper. Il a été prétendu par le populiste Taha Bouhafs qui a médiatisé la vidéo qu’il s’agissait de policiers du commissariat de Villeneuve-la-Garenne. C’était en fait de policiers de la Direction territoriale de la Sécurité de Proximité des Hauts-de-Seine, ce qui n’est pas vraiment la même chose. Il s’agit ici d’équipes aux missions très particulières ne concernant pas vraiment le quotidien du peuple.

C’est un peu la police des bas-fonds de la société et il n’est pas étonnant vu la rudesse de leur activité qu’il y ait dans certaines de ces unités des mœurs particulièrement rétrogrades, avec ici selon Le Parisien un commissaire présent ce soir-là qui avait été condamné en 2008 dans une affaire de violence à de la prison avec sursis et une interdiction d’exercer d’un an.

Seulement, il n’y a pas vraiment de rapport entre le quotidien de la plupart des gens vivant en banlieue et ce genre d’histoire concernant une personne égyptienne présente illégalement sur le territoire, qui ne parle même pas français, surprise en pleine nuit aux abords d’une scène de vol sur un chantier. En plein confinement sanitaire de surcroît.

La jeune prolétaire travaillant dans une grande chaîne américaine de café à Paris ou bien l’ouvrier d’une usine automobile, ne se sentent pas particulièrement concernés par cette affaire, n’ayant d’ailleurs jamais à faire à la police dans leur vie quotidienne. Par contre, pour les bobos parisiens, les populistes « de gauche » ou les petits-bourgeois hystériques, qui ne connaissent rien à la réalité du peuple, le lien était fait. Pour eux, un banlieusard est forcément un immigré lié à la délinquance et a tout le temps à faire à la police…

C’est précisément ces petits-bourgeois fantasmant la banlieue que visent les rappeurs lumpen célébrant les drogues, le sexe et la violence comme par exemple Moha la squale dans sa toute nouvelle vidéo.

On peut être choqué des propos de Camélia Jordana, mais il faut bien dire qu’elle n’a rien inventé toute seule. Elle ne s’est faite que le porte-voix de toute une agitation détestable, s’imaginant que la France en 2020 serait un régime terroriste massacrant volontairement une partie de sa population pour des raisons raciales.

C’est ainsi que Dominique Sopo, le président de la moribonde SOS racisme, association qui a été pourtant très populaire à l’origine, s’est fendu d’une tribune fin avril à propos des propos racistes tenus par les policiers. Il prétendait expliquer qu’il ne s’agissait pas de « dérapage », mais de « problème structurel », liant tout cela de manière grotesque à « la police de Papon ». L’actualité serait selon lui « d’ouvrir le chantier de la lutte contre le racisme au sein des forces de l’ordre. »

Dominique Sopo a bien sûr sauté sur l’occasion de la polémique lancée par Camélia Jordana et on notera que dans sa volonté de la défendre à tous prix, il en oublie les personnes antillaises, ou asiatiques, ou roumaines, qui ne seraient étrangement pas concernées par le prétendu racisme systémique de la police. La peur de la police serait ressentie par des personnes « en raison de leurs origines maghrébine et subsaharienne » croit-il expliquer sur une chaîne d’information en continue…

SOS racisme avait également lancé une pétition début mai sur le même registre, signée par tout un tas d’associations et organisations liées à la Gauche, depuis l’UNEF jusqu’à l’UEJF, en passant par EELV, Génération-s, le PS, le PCF, la France insoumise, ainsi que les syndicats CGT, FSU, UNSA, etc.

Dans le même genre, la fantasque association « Urgence la police assassine » a lancé il y a quelques semaines une application iphone afin de filmer la police, avec une vidéo dans laquelle interviennent surtout quelques artistes du show business au ton faussement grave. Il y a ainsi eu tout un tas d’interventions dans le genre, menant donc aux propos de Camelia Jordana.

> Lire également : Camélia Jordana et la police qui massacrerait en banlieue

On notera au passage, pour bien souligner le caractère délirant de ces gens, la vidéo d’Assa Traoré (du « Comité vérité et justice pour Adama » encensé par toute une partie de la Gauche), criant à la censure et appelant à la liberté d’expression. Sauf que Camelia Jordana a tenu ses propos dans une émission à grande audience du service public et que l’émission a elle-même relayé les propos sur Twitter ! C’est une drôle de conception de la « censure »…

Mais le fait est que les militants petits-bourgeois hystériques ne supportent pas un point de vue rationnel, ils ne supportent pas que les policiers et une grande partie de la population puissent être offusqués et dénoncer leur agitation et leurs prétentions fantasmagoriques. Tout ce qui compte pour eux est d’inventer toujours des nouvelles lubies, des nouvelles « causes », des nouvelles « oppressions », afin d’empêcher à tout prix l’émergence de la lutte des classes, de la bataille du prolétariat contre la bourgeoisie, dont ils ne sont qu’un appendice particulièrement méprisable.

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Camélia Jordana et la police qui massacrerait en banlieue

Les propos hallucinés de Camélia Jordana croyant que la France est l’Afrique du Sud de l’apartheid reflète bien toute une bourgeoisie d’origine immigrée utilisant une démagogie infâme pour se faire valoir.

Camélia Jordana est une chanteuse et une actrice. Elle a eu un parcours bourgeois toute sa vie, son père est chef d’une entreprise de transport en béton et sa mère une thérapeute en développement personnel.

De passage à « On n’est pas couché », une émission de France 2, elle a tenu des propos délirants, mais tout à fait en phase avec l’ultra-gauche. Dénonçant la police, elle dit :

« Je ne parle pas des manifestants, je parle des hommes et des femmes qui vont travailler tous les matins en banlieue qui se font massacrer pour nulle autre raison que leur couleur de peau. C’est un fait. »

Et Camélia Jordana d’expliquer qu’elle ne se sent pas en sécurité « face à un flic » parce qu’elle a les cheveux frisés ! Cela ne doit pas étonner, cela dit, cela fait plusieurs années qu’elle raconte cela dans la presse people. Selon elle, depuis les attentats du 13 novembre 2015, l’ambiance aurait changé, le racisme serait prégnant, en particulier dans la police, etc.

On a là une démagogie typique. La bourgeoisie d’origine immigrée cherche à gagner des positions en s’appuyant sur les prolétaires d’origine immigrée. Mais il faut pour cela gommer les différences de classe. Par conséquent, rien de tel qu’un racisme institutionnel imaginaire pour faire des immigrés une « caste » qui serait opprimée. Et comme levier, on utilise les lumpens confrontés à la police qu’on transforme en « martyrs ».

C’est un très beau tour de passe-passe, qui ravit l’ultra-gauche qui trouve là du grain à moudre pour ses fantasmes anti-étatiques. Jamais d’ailleurs le roman 1984 n’aura été aussi à la mode dans toutes les couches intellectuelles petites-bourgeoises, qui voient en l’intervention de l’État contre le covid-19 l’émergence du spectre du totalitarisme communiste.

C’est naturellement tout aussi parfait pour le Paris rive gauche, d’esprit catho de gauche, portant historiquement la droite du Parti socialiste, surfant les modes « post-modernes ». De France Inter à Glamour, on adore Camélia Jordana.

Car les gens comme elle en rajoutent et en rajoutent, jusqu’à un irrationalisme considéré comme la plus grande des rationalités. Camélia Jordana, qui bien entendu habite au cœur de Paris, croit en ce qu’elle dit, elle pense vraiment que la police « massacre » les non-blancs en banlieue. Une banlieue considérée par elle, bien entendu, comme uniquement composée de non-blancs. Et d’ailleurs, comme pour l’ultra-gauche, seuls ces non-blancs seraient le peuple au sens strict. Tous les autres seraient des privilégiés.

Camélia Jordana représente le grand succès des « Indigènes de la République » et de toutes ces idéologies de la bourgeoisie immigrée nées comme la vague islamiste, de la grande défaite du soulèvement des banlieues de 2005. 2005 aurait pu amener un grand renouveau de la Gauche, avec l’affirmation d’un conflit assumé avec le régime. Cela se transforma en rejet des institutions.

La différence entre un conflit avec un régime et un rejet des institutions doit être ici bien comprise et pour cela, il suffit de regarder le hip hop, le rap. Avant 2005, la dimension sociale suinte par tous les pores dans ce courant musical. Après 2005, c’est terminé.

Camélia Jordana procède de cette situation et représente une partie de la bourgeoise manipulant les esprits avec une démagogie racialiste, un discours anti-institutionnel néo-féodal, tout cela pour se donner une image « populaire ».

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L’appel d’ultra-gauche «Se fédérer»

L’appel « Se fédérer » est une énième tribune des milieux d’ultra-gauche, de la petite-bourgeoisie intellectuelle de gauche plus particulièrement, cherchant en ces temps de crise une troisième voie entre capitalisme et socialisme.

L’appel « Se fédérer » se présente comme une expression d’une tendance à se fédérer du côté des opposants au « système » : le principe fédératif serait par définition opposé au capitalisme, dans ses fondements mêmes. C’est une simple reprise des théories de Proudhon.

D’ailleurs, l’appel dit que le modèle serait la Commune de Paris de 1871, le regroupement fédéral au-delà de toute considération politique. C’est bien là une lecture anarchiste de la Commune ; on est ici dans une démarche de rejet complet de l’histoire du mouvement ouvrier, des traditions socialistes et communistes, etc.

Ce texte est sur ce plan une caricature complète et on ne sera pas étonné de voir parmi les signataires un collectif… « Gilets jaunes enseignement recherche ». Difficile de faire pire dans la caricature de l’enseignant cherchant à récupérer à son profit une révolte plébéienne. Cela en dit long sur les autres signataires.

« Se fédérer

Nous sommes nombreuses, nous sommes nombreux : nous sommes tant et tant à penser et éprouver que ce système a fait son temps. Mais nos voix sont dispersées, nos appels cloisonnés, nos pratiques émiettées. Au point que quelquefois nous doutons de nos forces, nous succombons à la détresse de l’impuissance. Certes, parfois cette diffraction a du bon, loin des centralisations et, évidemment, loin des alignements. Il n’empêche : nous avons besoin de nous fédérer. Sans doute plus que jamais au moment où une crise économique, sociale et politique commence de verser sa violence sans faux-semblant : gigantesque et brutale. Si « nous sommes en guerre », c’est bien en guerre sociale. D’ores et déjà les attaques s’abattent, implacables : le chantage à l’emploi, la mise en cause des libertés et des droits, les mensonges et la violence d’État, les intimidations, la répression policière, en particulier dans les quartiers populaires, la surveillance généralisée, la condescendance de classe, les discriminations racistes, les pires indignités faites aux pauvres, aux plus fragiles, aux exilé-es. Pour une partie croissante de la population, les conditions de logement, de santé, d’alimentation, parfois tout simplement de subsistance, sont catastrophiques. Il est plus que temps de retourner le stigmate contre tous les mauvais classements. Ce qui est « extrême », ce sont bien les inégalités vertigineuses, que la crise creuse encore davantage. Ce qui est « extrême », c’est cette violence. Dans ce système, nos vies vaudront toujours moins que leurs profits.

Nous n’avons plus peur des mots pour désigner la réalité de ce qui opprime nos sociétés. Pendant des décennies, « capitalisme » était devenu un mot tabou, renvoyé à une injonction sans alternative, aussi évident que l’air respiré – un air lui-même de plus en plus infecté. Nous mesurons désormais que le capitalocène est bien une ère, destructrice et mortifère, une ère d’atteintes mortelles faites à la Terre et au vivant. L’enjeu ne se loge pas seulement dans un néolibéralisme qu’il faudrait combattre tout en revenant à un capitalisme plus « acceptable », « vert », « social » ou « réformé ». Féroce, le capitalisme ne peut pas être maîtrisé, amendé ou bonifié. Tel un vampire ou un trou noir, il peut tout aspirer. Il n’a pas de morale ; il ne connaît que l’égoïsme et l’autorité ; il n’a pas d’autre principe que celui du profit. Cette logique dévoratrice est cynique et meurtrière, comme l’est tout productivisme effréné. Se fédérer, c’est répondre à cette logique par le collectif, en faire la démonstration par le nombre et assumer une opposition au capitalisme, sans imaginer un seul instant qu’on pourrait passer avec lui des compromis.

Mais nous ne sommes pas seulement, et pas d’abord, des « anti ». Si nous n’avons pas de projet clé en mains, nous sommes de plus en plus nombreuses et nombreux à théoriser, penser mais aussi pratiquer des alternatives crédibles et tangibles pour des vies humaines. Nous avons besoin de les mettre en commun. C’est là d’ailleurs ce qui unit ces expériences et ces espérances : les biens communs fondés non sur la possession mais sur l’usage, la justice sociale et l’égale dignité. Les communs sont des ressources et des biens, des actions collectives et des formes de vie. Ils permettent d’aspirer à une vie bonne, en changeant les critères de référence : non plus le marché mais le partage, non plus la concurrence mais la solidarité, non plus la compétition mais le commun. Ces propositions sont solides. Elles offrent de concevoir un monde différent, débarrassé de la course au profit, du temps rentable et des rapports marchands. Il est plus que jamais nécessaire et précieux de les partager, les discuter et les diffuser.

Nous savons encore que cela ne suffira pas : nous avons conscience que la puissance du capital ne laissera jamais s’organiser paisiblement une force collective qui lui est contraire. Nous connaissons la nécessité de l’affrontement. Il est d’autant plus impérieux de nous organiser, de tisser des liens et des solidarités tout aussi bien locales qu’internationales, et de faire de l’auto-organisation comme de l’autonomie de nos actions un principe actif, une patiente et tenace collecte de forces. Cela suppose de populariser toutes les formes de démocratie vraie : brigades de solidarité telles qu’elles se sont multipliées dans les quartiers populaires, assemblées, coopératives intégrales, comités d’action et de décision sur nos lieux de travail et de vie, zones à défendre, communes libres et communaux, communautés critiques, socialisation des moyens de production, des services et des biens… Aujourd’hui les personnels soignants appellent à un mouvement populaire. La perspective est aussi puissante qu’élémentaire : celles et ceux qui travaillent quotidiennement à soigner sont les mieux à même d’établir, avec les collectifs d’usagers et les malades, les besoins quant à la santé publique, sans les managers et experts autoproclamés. L’idée est généralisable. Nous avons légitimité et capacité à décider de nos vies – à décider de ce dont nous avons besoin : l’auto-organisation comme manière de prendre nos affaires en mains. Et la fédération comme contre-pouvoir.

Nous n’avons pas le fétichisme du passé. Mais nous nous souvenons de ce qu’étaient les Fédérés, celles et ceux qui ont voulu, vraiment, changer la vie, lui donner sens et force sous la Commune de Paris. Leurs mouvements, leurs cultures, leurs convictions étaient divers, républicains, marxistes, libertaires et parfois tout cela à la fois. Mais leur courage était le même – et leur « salut commun ». Comme elles et comme eux, nous avons des divergences. Mais comme elles et comme eux, face à l’urgence et à sa gravité, nous pouvons les dépasser, ne pas reconduire d’éternels clivages et faire commune. Une coopérative d’élaborations, d’initiatives et d’actions donnerait plus de puissance à nos pratiques mises en partage. Coordination informelle ou force structurée ? Ce sera à nous d’en décider. Face au discours dominant, aussi insidieux que tentaculaire, nous avons besoin de nous allier, sinon pour le faire taire, du moins pour le contrer. Besoin de nous fédérer pour mettre en pratique une alternative concrète et qui donne à espérer.

Dès que nous aurons rassemblé de premières forces, nous organiserons une rencontre dont nous déciderons évidemment ensemble les modalités.

Aggiornamento histoire-géo, ACU (Association des communistes unitaires), Association De(s)générations, CAPJPO-Europalestine, Cerises la coopérative, Changer de Cap, Collectif Droit à la Belle Ville, Collect’IF paille, Émancipation collective, Fédération des syndicats SUD-Rail, Gilets jaunes enseignement recherche, Gilets jaunes de Plaine Commune, Jardins Communs, Jarez Solidarités, La Suite du monde, Le Paria, On prend les champs, PEPS (Pour une écologie populaire et sociale), Questions de classe(s), Réseau pour l’Autogestion, les Alternatives, l’Altermondialisme, l’Ecologie, le Féminisme, Union syndicale Solidaires, Union syndicale SUD Industrie, Unité Communiste de Lyon

Nicole Abravanel, Étienne Adam, Christophe Aguiton, Omar Aktouf, Dominique Alcalde, Jean-Claude Amara, Franck Antoine, Sonia Anton, Emmanuel Arvois, Jacky Assoun, Claude Bailblé, Bernard Baissat, Benjamin Ball, Philippe Banka, Ludivine Bantigny, Philippe Barre, Christophe Baticle, Franc Bardou, Stefan Bekier, Gilbert Belgrano, Olivier Belmontant, Cecilia Benevides, Rémi Bénos, Judith Bernard, Alain Bertho, Jacques Bidet, Stéphane Bikialo, Philippe Blanchet, Evelyne Bleu, Françoise Bloch, Christophe Boëte, Pascal Boissel, Françoise Boman, Thierry Borderie, Mathieu Borie, Benoit Borrits, Bernard Bosc, Stephen Bouquin, Aïcha Bourad, Leila Bourad, Driss Boussaoud, Jacques Boutault, Sarah Boyé, François Brun, Pascal Buresi, Noëlle Burgi-Golub, Laurent Bussière Saint-André, Marie-Claire Cailletaud, Claude Calame, Cécile Canut, Pépita Car, Jean-Pierre Castex, Jean-Noël Castorio, Aurélien Catin, Marc Cefallo, Christian Celdran, Dominique Cellier, Jean-Marc Cerino, Frédéric Certain, Maureen Chappuit, Bernard Charlot, Luc Chelly, Nara Cladera, Charlotte Cléro, Yves Cohen, Gérald Collas, Marie-Agnès Combesque, Jean-Louis Comolli, Léon Crémieux, Marcel Cunin, Laurence D., Alain Damasio, Hugues Débotte, Laurence De Cock, Eric Decamps, Stéphanie Dechezelles, Hervé Defalvard, Christian Delacroix, Frédéric Delarue, Jean-René Delépine, Jean-Étienne Delerue, Christine Delphy, Bruno Della Suda, Christian de Montlibert, Robert Descimon, Catherine Deston-Bottin, Rom Desh, Sophie Desrosiers, Michel Defalvard, Serge D’Ignazio, Paul Dirkx, Joss Dray, Marnix Dressen-Vagne, Jean-François Dubost, Frédéric Dufaux, Jean-Michel Dufays, Anne Dufresne, Stéphane Elmadjian, Jean-Paul Engélibert, Didier Epsztajn, Annie Ernaux, Kévin Espinas, Jean-Claude Eyraud, Laurent Eyraud-Chaume, Guillaume Faburel, Patrick Farbiaz, Dimitris Fasfalis, Jean Fauché, Daniel Faugeron, Pascale Fautrier, Mathieu Ferradou, Alexandre Ferran, Mathieu Fernandez, Renaud Fiévet, Yann Fiévet, Sylviane Finucci, Marianne Fischman, Fabrice Flipo, Jeremie Foa, Bernard Friot, Karën Fort, Fanny Gallot, Alain Gallucci, Edith Galy, Florent Gaudez, Franck Gaudichaud, Bertrand Geay, Julie Gervais, Jean-Pierre Gesbert, Denis Gheerbrant, Guy Giani, Pascale Gillot, Pierre-Eliel Girard, Julien Gonthier, Renée Gramaize, Christophe Granger, Lena Grigoriadou, Elie Haddad, Jean-Marie Harribey, Benoît Hazard, Odile Hélier, Leila Hicheri, Thomas Hippler, Maryvonne Holzem, Thierry Huve, Mathias Isimat-Mirin, Magali Jacquemin, Nicole Jacques-Lefèvre, Bruno Jacquin, Sylvain Jay, Samy Johsua, Anne Jollet, Claudine Katz, Jacques Kebadian, Marjorie Keters, Pierre Khalfa, Mohamed Khenniche, Jean-Luc Kop, Isabelle Krzywkowski, Anne Kubler, Marc Lacreuse, L’1consoloable, Francis Landron, Patrick Lao, Mathilde Larrère, Sylvie Larue, Ginette Lavigne, Stéphane Lavignotte, Pascal Le Brun, Michelle Lecolle, Sylvie Le Cocq, Hervé Le Crosnier, Dominique Lefèvre, Corinne Le Fustec, Bernard Lemann, Christophe Lemasson, Romain Le Meur, Alain Lenud, Yann Leredde, Benoît Leroux, Michel Letté, Pascal Liberatore, Wenceslas Lizé, Olivier Long, Camille Louis, Michael Lowy, Fanny Madeline, Christian Mahieux, Chowra Makaremi, Pascal Maillard, Jean Malifaud, Jean-Claude Mamet, Françoise Maquin, Rémi Marie, Philippe Marlière, Killian Martin, Gilles Martinet, Gustave Massiah, Christian Maurel, Laurence Maurel, Julie Maurice, Éliane Meillier, Véronique Melchior, Irène Menahem, Rémi Merindol, Denis Merklen, Henri Mermé, Isabelle Mestre, Valérie Mettais, Stéphane Michot, Noufissa Mikou, Sylvain Milanesi, Jacques Millet, Sylvie Monchatre, Ana Doldan Montiel, Bénédicte Monville De Secco, José-Luis Moraguès, Corinne Morel-Darleux, Marc Moreigne, Mikael Motelica-Heino, Séverin Muller, Alain Munier, Philippe Nabonnand, Claire Nancy, Corinne Nativel, Joël Nayet, Toni Negri, Olivier Neveux, Jean Noviel, Pierre Odin, Bertrand Ogilvie, Denis Orcel, Cléo Pace, Luca Paltrinieri, Dominique Paturel, Frédéric Paschal, Dolores Pazos, Willy Pelletier, Irène Pereira, Évelyne Perrin, Anita Perez, Elsa Peyronne, Nicole Phelouzat, Olivier Piazza, Stéphane Pichelin, Alexandre Pierrepont, Francky Poiriez, Raphael Porteilla, Emmanuelle Posse, Antoine Poulain, Paul Poulain, Claude Pourcher, Stéfanie Prezioso, Pierre Prim, Claudio Pulgar-Pinaud, Isabelle Quaglia, Yves Quintal, Makan Rafatjou,Marie Rama-Menahem, Nelly Rintaud, Daniel Rome, Patrick Rossignol, Marc Roudet, Benoît Rougelot, Théo Roumier, Pierre Rousset, Gilles Sabatier, Isabelle Saint-Saëns, Maria Eleonora Sanna, Gaëlle Santin, Pierre Sauve, Hélène Schneider, Michel Seigneuret, Pinar Selek, Marie Sellier, Alexandre Siguier, Patrick Silberstein, Alessandro Stella, Benjamin, Tauziac, François Ternynck, Jacques Testart, Edwige Thaille, Fanny Thomas, Sylvie Thomas, Lucky Tiphaine, Vincent Touchaleaume, Véronique Tribouilloy, Julien Troccaz, François Tronche, Marc Tzwangue, Sixtine van Outryve, Patrick Vassallo, Sarah Vaucelle, Françoise Vergès, Francis Verne, Frédéric Verhaegen, Julien Vigouroux, PierrVila, Bastien Villeflayoux, Pascal Vitte, Elise Voguet, Nicolas Voisin, Christiane Vollaire, Sophie Wauquier, Louis Weber, Roger Winterhalter, Béa Whitaker, Sylvie Wolf, Catherine Wolff, Carole Yerochewski, Isabelle Yhuel, Pierre Zarka, Olivia Zemor, Jeanne Zoundjihekpon, Élisabeth Zucker »

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Déconfinement: la France est coupée en deux

Depuis la première phase du déconfinement le 11 mai, la France s’est littéralement coupée en deux. Non pas physiquement, mais culturellement. Deux attitudes se font face, ou plutôt se croisent et se toisent du regard. Il y a les gens responsables, prenant les précautions nécessaires en raison de la situation sanitaire et ceux qui n’en ont rien à faire.

Se rendre dans un supermarché cette semaine sans porter de masque, cela relève clairement de la provocation. Plus encore, c’est une affirmation, consistant à assumer le relativisme selon une conception des choses entièrement décadente.

Les masques sont dorénavant disponibles, beaucoup de collectivités territoriales en ont distribué, des couturières en font dans les familles, de nombreuses pharmacies et certains magasins en vendent. On a eu des semaines de débat sur l’incapacité du gouvernement à en fournir alors qu’il en aurait fallu massivement. Personne ne peut maintenant ignorer l’intérêt du masque, non pas pour soi directement, mais comme mesure barrière collective. Mais c’est justement parce qu’il s’agit d’une mesure collective, demandant une grande conscience sociale, que cela est difficile pour les esprits décadents pétris d’individualisme.

Penser non pas seulement à soi-même, à son petit confort personnel, mais à la collectivité et en particulier aux personnes fragiles, cela demande un haut niveau culturel. Ce niveau culturel, il apparaît de plus en plus clairement que la bourgeoisie ne l’a plus, ou presque plus, alors qu’il est très généralisé dans les classes populaires et en particulier chez les prolétaires.

Pour les bourgeois, les petits-bourgeois, les ouvriers corrompus, les lumpens, porter un masque en faisant ses courses, cela est de trop. Pour les prolétaires et les gens issus des milieux populaires, c’est considéré comme la moindre des choses depuis le 11 mai, en attendant d’être certain que la situation soit meilleure sur le plan sanitaire.

De la même manière, dans les familles populaires, pour les prolétaires, on ne va pas avec ses enfants traîner dans les magasins, il faut faire preuve de retenue dans la vie quotidienne, on limite encore drastiquement ses fréquentations, on se salue et se parle de loin, on porte un masque quand on est dans un milieu dense comme un centre-ville ou une galerie marchande, etc.

Inversement, les esprits faibles et lâches ont sauté sur l’occasion dès le 11 mai pour foncer dans les magasins ou à la plage, faire la fête entre amis à nombreux, se regrouper par poignées entières sur les pelouses des grandes villes, quitte à même se faire la bise pour les personnes les plus stupides.

On a ainsi en France un panorama spectaculaire où deux mondes cohabitent littéralement et se considèrent l’un l’autre de manière dédaigneuse. Bien malin d’ailleurs celui qui dira avec certitude lequel de ces deux mondes est le plus important numériquement.

Illustration dramatique de cette opposition : la valse des responsables de partis politiques à Matignon mercredi, pour une consultation concernant les municipales. Tous se présentent sans masque, alors même qu’ils sortent d’une voiture avec chauffeur, un espace particulièrement confiné où le masque est de rigueur. Tous ? Non, sauf Jordan Bardella, du Rassemblement national. Ce dernier a grandi dans une cité HLM de Seine-Saint-Denis, il vient d’un milieu populaire et on sait bien malheureusement à quel point le RN est presque le seul parti ayant une certaine assise populaire. Lors de cette réunion, le point de vue porté par Jordan Bardella était d’ailleurs simple : d’accord pour les élections municipales en juin, mais avec une protection FFP2 pour les assesseurs et un masque pour les électeurs.

De leur côté, Olivier Faure du PS, Julien Bayou d’EELV ou encore Alexis Corbière de la France insoumise, se sont présenté sans masque, de manière tout à fait décadente, complètement décalés par rapport au quotidien des classes populaires. Cela en dit long sur leur conception du monde, sur leurs valeurs, et en fin de compte, sur ce qu’ils représentent culturellement.

Ils ne valent ici pas mieux que le libéral Emmanuel Macron et son gouvernement débordé par la crise, incapable ne serait-ce que d’obliger le port du masque dans les grandes surfaces ou de véritablement faire respecter les interdictions de rassemblement.

Souhaitons vraiment que la circulation du virus se soit tarie depuis le 11 mai, notamment grâce à ceux respectant les règles sanitaires, et que tous les comportements irresponsables ne soient pas la cause d’une circulation massive du virus et d’une nouvelle vague de covid-19.

Il faudra en tous cas regarder avec une grande attention pour la période à venir l’existence de ces deux mondes, leur relation, leur évolution. La Gauche, la vraie Gauche, celle du mouvement ouvrier, qui porte la civilisation, ne pourra bien sûr exister que dans le camp des gens responsables, à la conscience collective aiguisée. Et il faudra alors mener la bataille contre l’individualisme et les comportements décadents portés par la bourgeoisie et le capitalisme s’effondrant.

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Le renouvellement du souverainisme, expression de l’instabilité petite-bourgeoise

La crise sociale et économique accentue le déclassement d’une partie de la petite-bourgeoisie et de la partie stable de la classe ouvrière, l’aristocratie ouvrière. Dans ce contexte, on voit fleurir une idéologie bien spécifique à ces couches sociales comme quoi « le pays » serait sous tutelle d’une oligarchie mondialisée, appelant à une « unité des patriotes ».

En plein déconfinement, l’agitation des classes moyennes est forte, avec deux initiatives. D’un côté, on le « conseil national de la nouvelle résistance » lancée par Claude Alphandéry, et de l’autre la revue « front populaire » par Michel Onfray,.

Né en novembre 1922, Claude Alphandéry a un parcours typique de la bourgeoisie modernisatrice. Etudiant au prestigieux lycée du Parc à Lyon, il entre dans la résistance en automne 1941 puis dans la clandestinité autour des Mouvements unis de la Résistance dans la région de la Drôme-Ardèche, proche de la droite liée au Général de Gaulle.

A la sortie de la Guerre, étudiant à l’ENA, institution d’Etat créée sous le Front populaire, il entre logiquement au PCF, grand parti de la gauche gouvernementale. En tant que partisan de la modernisation sociale et culturelle, il se lie ensuite à la seconde gauche, et notamment au courant porté par Michel Rocard. Depuis les années 1980, il est lié à la Caisse des dépôts et consignations et revendique l’économie sociale et solidaire et un nouveau « new deal » dans une approche tout à fait conforme à celle de Benoit Hamon, grand héritier du courant rocardien.

Le CNNR doit ainsi sortir un manifeste le 27 mai, date symbolique choisie en référence à la fondation du CNR à la même date en 1943. On retrouve dans le « secrétariat », des figures du populisme de gauche, comme Gilles Perret ou Denis Robert (directeur de Média, proche des Insoumis).

D’un autre côté, on a donc la revue « Front populaire » lancée par Michel Onfray et qui annonce déjà réunir des figures comme Philippe De Villiers, Jean-Pierre Chevènement, Georges Kuzmanovic, Jacques Sapir. Florian Philippot s’est empressé de soutenir l’initiative, en appelant même un rassemblement après le 18 juin à Colombey-les-Deux-Églises…

On nage ici en plein délire de confusion. D’un côté on a une mise avant du « Front populaire » comme prétexte à l’union entre la gauche et la droite alors même que le Front populaire est né en 1934 de l’unité des bases antifascistes. De l’autre, on a une valorisation absurde du Conseil National de la Résistance, né en 1943 dans un compromis gaulliste-communiste alors que le pays était sous occupation ou sous tutelle du IIIe Reich.

En apparence différentes, ces deux initiatives relèvent en fait des mêmes couches sociales en déperdition qui tentent de lancer des initiatives en leur faveur, en appelant à des références historiques vidées de tout contenu, ne servant que comme prétexte au mythe mobilisateur. D’ailleurs, il est peu étonnant que tous soutiennent les gilets jaunes, comme caution à la mobilisation sociale…

La figure d’un Jean-Pierre Chevènement, participant à « Front populaire » en dit long sur cette similitude, lui qui appelait à voter Mélenchon en 2017 et qui était qualifié de « mentor » par Florian Philippot.

Ces variantes de souverainisme, plutôt à gauche ou plutôt à droite, sont toutes marquées par un fantasme d’une union des contraires, entre la droite et la gauche, et cherchant à contourner le Rassemblement national.

Ces initiatives cherchent ainsi à saper l’essor de la Gauche en vidant tout le contenu du patrimoine des luttes populaires. Seule la gauche assumant son héritage historique est capable de relancer une bataille démocratique court-circuitant ces courants confus.

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Confinement et immigration: les économies torpillées du Mexique, du Salvador, du Honduras

Au lieu de prôner une humanité unifiée, les libéraux prônent le droit à immigrer comme on le souhaite. C’est là le reflet des intérêts du capital et cette émigration contribue à la dépendance économique de pays entiers.

Aux États-Unis, la question de l’immigration semble évidente : les Républicains seront contre et les Démocrates pour, et les Démocrates seraient de Gauche. En réalité, les Démocrates sont de droite libérale, les Républicains de Droite conservatrice. Et il est facile de voir qu’une large partie de la Gauche française s’est transformée en « Démocrates » à l’américaine.

L’immigration est en effet un puissant outil pour le capitalisme, qui exerce ainsi une pression maximale sur les salaires, tout en empêchant le développement des pays d’émigration. Les forces vives des pays peu développées sont pompées : c’est le brain drain, avec les gens les plus éduqués qui sont littéralement importés dans les pays riches.

Mais il y a aussi les gens voulant ardemment travailler afin de subvenir aux besoins de leurs familles, à quoi s’ajoutent ceux croyant au rêve américain (ou britannique, allemand, français, etc.). Ces gens se retrouvent pris au piège. Ils sont aliénés ou bien, lorsqu’ils ont conscience qu’ils sont devenus dépendants d’un capitalisme despotique, ils sont broyés. Certains font carrière, bien entendu, et ils contribuent puissamment alors à l’idéologie capitaliste, tout en devenant des bourgeois arrivistes avec un esprit de nouveau riche.

Il ne s’agit nullement donc de simples parcours individuels, les conséquences sont catastrophiques à une grand échelle, comme le montre justement les désordres actuels dans l’économie aux États-Unis en raison de la crise sanitaire. En effet, le confinement partiel bloque une partie de l’économie et il s’avère que des pays voient une partie importante de leur propre économie dépendre des envois d’argent depuis les États-Unis.

L’année dernière, 17 % de l’économie salvadorienne consistait en des envois d’argent par des émigrés partis aux États-Unis. Le chiffre monte à 20 % pour le Honduras ; il est d’autour de 10 % pour le Guatemala. Pour le Mexique, le chiffre est de 3 %, mais ici il ne faut pas sous-estimer l’importance de ces quelques pour cents, car son montant est de 34 milliards de dollars.

Le président mexicain Andrés Manuel López Obrador a lui-même fait un appel aux émigrés pour leur demander de ne pas cesser l’envoi d’argent à leurs familles au pays. C’est dire à quel point le Mexique est ébranlé, ce qui révèle sa dépendance.

D’ailleurs, il en est de même pour le Sénégal où il est estimé que 9,1 % du PIB provient des transfert d’argent par les émigrés, ou encore dans l’ouest du Mali où il est estimé que 20 % des dépenses des familles proviendrait de ces transferts d’argent. La crise sanitaire pose exactement les mêmes problèmes pour ces pays, avec des baisses de transferts drastiques constatées par les opérateurs.

Qui plus est, comme on le sait le point de vue libéral voit les choses sous l’angle des individus, mais en réalité l’émigration consiste simplement en le départ de communautés. L’émigration a ainsi été massive depuis la région mexicaine du Michoacan ; pour elle, les envois depuis les États-Unis forment 11,6 % de l’économie, soit 3,4 milliards de dollars. Ici, une région entière se voit torpillée.

Un autre aspect est évidemment que le capitalisme permet l’immigration mais ne permet pas l’accès aux soins de manière aisée. Seule la France, parmi les grands pays capitalistes, a ici une politique d’ouverture systématique, afin de renforcer son secteur de la santé et d’éviter des problèmes de santé contaminant toute la population depuis des zones immigrées particulièrement dense, telle la Seine-Saint-Denis. Dans les autres pays la situation est catastrophique. Les immigrés ont peur pour leur santé, à juste titre, n’ayant pas de couverture sociale en ce domaine ; d’autres, lumpenprolétarisés, se voient devenir malades, devenant des vecteurs du covid-19 de par leur situation misérable.

L’immigration correspond en fait parfaitement au chaos capitaliste : chacun fait ce qu’il veut comme il veut, sans aucune considération pour la collectivité. Comment l’Inde aura-t-elle des médecins si tous ses médecins de qualité émigrent pour faire carrière ? Comment le Mexique pourra-t-il se développer si les États-Unis pompent sa force de travail et le place dans une situation de dépendance ?

On ne peut pas comprendre le terrible ancrage du Front national, aujourd’hui du Rassemblement national, dans les zones ouvrières, sans voir qu’il ne s’agit pas de confondre les immigrés et l’immigration, d’assimiler la misère individuelle des immigrés à l’immigration comme outil du capital. Le mouvement ouvrier a toujours souligné d’ailleurs la différence entre ces deux aspects. Et il n’a jamais considéré que l’internationalisme des ouvriers consistait, comme les anarchistes, à demander à ce que les frontières tombent… dans le cadre du capitalisme.

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La lettre incendiaire de Léon Landini (PRCF) à François Ruffin

Léon Landini, figure de la Résistance qui fut également gravement torturé par les nazis est le président du PRCF, un groupe à la fois en dehors du PCF et dans le PCF, qui entend maintenir la ligne du parti d’avant son tournant que l’on pourrait qualifier de post-communiste. Le PRCF a comme modèle le PCF des années 1980 et a une influence notable dans toute une partie de la CGT. Léon Landini s’est retrouvé dans une émission sur YouTube confronté à François Ruffin et explique qu’il s’est fait piégé, notamment en raison de la faiblesse due à son âge. Dans une lettre ouverte à François Ruffin, il remet quelques points sur les « i » tout à fait nécessaires.

« Léon Landini

Officier FTP-MOI – Président de l’Amicale des Anciens FTP-MOI  des  bataillons Carmagnole-Liberté de la Région Rhône-Alpes – Interné de la Résistance – Grand Mutilé de Guerre, suite aux tortures endurées par la Gestapo  pendant mon internement.

Officier de la Légion d’Honneur – Médaille de la Résistance.

Décoré au  titre de Résistant émérite par le Gouvernement Soviétique.

Président du Pôle de Renaissance Communiste en France (Ce que je considère comme un grand honneur).

Réponse de « Landi à Ruffian »

Il s’agit de la vidéo  que tu as présentée  sur  YouTube  le 29 avril 2020

Mon état de santé me joue des tours, c’est ce qui m’a amené à répondre avec quelque retard aux sarcasmes que tu m’as adressés au cours de l’émission, à laquelle Gilles Perret  m’avait invité et qui, avec beaucoup d’égards, m’a présenté en indiquant que j’avais assassiné des soldats allemands. On m’a toujours dit que celui qui assassine est un assassin. Merci Gilles.

Au cours de cette émission, tu m’as appelé « Landi » à plusieurs reprises. Je n’ai pas apprécié, car je sais pertinemment que tu connais parfaitement mon nom, en conséquence n’aimant pas que l’on ampute volontairement mon nom, à mon tour je modifie légèrement le tien, au lieu de Ruffin  je vais t’appeler Ruffian.

J’ajouterai que de la façon dont  tu m’as traité au cours de cette émission, si je me laissais aller, c’est de bien d’autres noms que je te traiterais.

Dès le début de mon intervention, convaincu de bien faire, j’ai indiqué que : « Le programme du Conseil National de la Résistance n’a pas seulement été écrit qu’avec de l’encre, mais également avec le sang de toutes celles et tous ceux qui sont morts pour que nous puissions vivre libre dans un monde où il ferait bon vivre » et  j’ai ajouté, « que 52 de mes proches camarades sont morts sous la torture et malgré les effroyables supplices que Barbie et ses sbires leur ont fait endurer, pas un seul n’a avoué quoi que ce soit ».

À ce moment-là, tu m’as interrompu, cherchant à me mettre dans l’embarras et si possible à me ridiculiser en me posant la question suivante :

« Cela veut quand même pas dire que pour avoir de nouveaux jours heureux, il faut se faire torturer, emprisonné et mourir ».

Question idiote et offensante, posée avec la conviction et que tu allais, tenant compte de mon âge, me désarçonner et  que surpris par une pareille stupidité j’allais me mettre à bafouiller.

Tu vas te rendre compte que ce vieil homme que tu voulais ridiculiser, malgré son âge, il lui reste encore assez de verve pour répondre comme il se doit, à un petit prétentieux, qui se prend pour quelqu’un avant même d’être quelque chose.

Toutefois à cause du respect que tu devrais avoir à l’égard de celles et ceux  qui ont survécu à une telle épopée, tes offenses tu aurais dû te les garder pour toi.

Lorsque Gilles Perret m’a invité à participer à cette émission vidéo, il m’a indiqué qu’il s’agissait d’évoquer le programme du CNR et les Jours Heureux, en conséquence j’ai voulu, en préambule, et surtout en tant qu’ancien résistant, mettre en évidence ce qu’était le CNR et dire, combien ceux qui se sont battus les armes à la main y sont attachés.

Comme tu le dis « on s’est fait torturer, emprisonner et malheureusement trop souvent massacrer ».

Mais pour ton éducation, il me semble utile que tu saches que si nous avons pu supporter l’insupportable et nous sublimer à notre insu, c’est qu’en nous engageant au sein des FTP-MOI et en pratiquant la guérilla urbaine, nous savions tous que nous pouvions à tout moment passer de vie à trépas.

Nous nous battions de toutes nos forces contre l’occupant et contre les sbires qui s’étaient mis à leur service.  Notre courage émanait du fait que nous avions la conviction que s’il nous fallait mourir, nous n’allions pas mourir pour rien, et nous risquions notre vie avec la certitude qu’après la Libération, les survivants pourraient vivre heureux dans Une France Forte, Libre, Démocratique, Indépendante, et Souveraine. Ce qui ne peut être le cas en étant prisonnier d’une Union Européenne (dirigée par Berlin) alors que nous savons tous que l’UE  est antinomique du programme du CNR.

C’est à partir de tous ces combats et de tous ces sacrifices, que le programme du CNR a pu être écrit, et appliqué entre 1945 et 1947 par des ministres communistes et, seulement par des ministres communistes.

Ce sont pour toutes ces raisons que nous, anciens FTP-MOI et militants communistes, nous en revendiquons la paternité et, dès que de sombres individus cherchent à utiliser le CNR à d’autres fins que pour ce qu’il a été créé, nous montons au créneau et nous rappelons à l’ordre celles et ceux qui cherchent à l’utiliser pour se mettre en évidence, désireux apparaître pour ce qu’ils ne sont pas.

Sarkozy n’utilisait-il pas pour se mettre en valeur le nom de Guy Môquet et voici que Macron cherche à cacher toutes ses malhonnêtetés en promettant à notre peuple « Des Jours Heureux » au moment même où il est en train de détruire les derniers  conquis qu’il nous en reste.

En conclusion, je n’accepte pas au final d’avoir été utilisé comme le résistant de service qu’on écoute d’une oreille distraite pour tenter de lui faire cautionner un projet politique dont je n’avais pas été informé avant l’émission et que je ne partage pas : en utilisant le nom du CNR, tout en contournant tout ce qui fit la force du véritable, auquel nous devons les plus grandes avancées de notre histoire. Il ne peut pas y avoir de véritable nouveau CNR en contournant et en écartant les communistes et la classe ouvrière, pas de véritable nouveau CNR sans la nationalisation des banques et des entreprises stratégiques. Et surtout, pas de nouveau CNR sans rupture franche avec l’euro et l’UE.

Après cette brève mise au point, qui j’espère te servira.

Léon LANDINI.

PS : Ma fille vient de m’apprendre que tu lui as écrit, en lui disant : « Je connais un peu ton père, son parcours, ses convictions pour l’avoir interrogé durant  près de quatre heures chez lui ».  FAUX ! Tu n’es  jamais venu chez moi. J’ai l’impression que ta mémoire te joue des tours, peut être mon cher François, serait-il bon que tu consultes un psychiatre. »

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Le plan franco-allemand de relance ou la reconnaissance de l’hégémonie allemande

Emmanuel Macron et Angela Merkel présentaient ce lundi 18 mai 2020 une « initiative franco-allemande pour la relance européenne face à la crise du coronavirus ». Le plan, qui n’a rien d’officiel ni de très précis pour l’instant, consisterait en 500 milliards d’euros empruntés au nom de l’Union européenne et destinés à relancer différents secteurs économiques touchés par la crise. S’il est de grande ampleur, ce plan consisterait pour les pays les plus fragiles surtout en leur mise sur orbite de l’Union européenne en tant qu’organisme structuré, et donc principalement de l’Allemagne.

« Le président de la France fournit une trame narrative et une valorisation romancée, la chancelière allemande les détails. »

Cette phrase issue d’un article de la revue allemande Der Spiegel à propos de l’initiative franco-allemande présentée hier en dit long sur l’état d’esprit qui peut exister en Allemagne. Si Emmanuel Macron peut s’imaginer détenir avec cette initiative une victoire majeure de l’idéologie européenne et en faire des caisses comme il en a l’habitude, les choses ne sont pas considérées de la même manière du côté de la puissance allemande.

Au sens strict, cette initiative, devant être validée par les autres pays avant d’être effective, consiste même justement en la fin de toute perspective européenne fédéraliste, au sens où Emmanuel Macron l’entend, au sens où l’« idéal » supranational européen le concevait. Cela pour une raison très simple : l’Allemagne ne voulait pas entendre parler des « coronabonds » ou « eurobonds » réclamés par la France, l’Italie et l’Espagne réunies ; elle a obtenu gains de cause.

Rappelons que ces « coronabonds » ou « eurobonds » devaient consister en une possibilité d’emprunt au nom de l’Union européenne pour chaque pays, afin de mutualiser la dette. Cela revenait à lier fortement les pays par leur dette, commune, comme elle l’est pour un État, mais en gardant chacun son autonomie.

L’initiative, ou plutôt la proposition faite hier par Emmanuel Macron et Angela Merkel consiste en tout autre chose. L’Union européenne lèverait de la dette en son nom, puis déciderait de comment distribuer cet argent dans des secteurs précis, avec des critères précis. L’argent bien sûr ne sera pas « donné » généreusement, puisque chaque pays contribuera au remboursement de cette dette à hauteur de la proportion à laquelle il participe au budget sur les prochaines années.

Autrement dit, c’est l’Union européenne qui décidera et donc surtout l’Allemagne, principale puissance et principale contributrice au budget. Pour que les choses soient bien claires, la chancelière allemande a tenu à préciser qu’il s’agit là d’un « effort colossal ». Les négociations pour la répartition de ces 500 milliards seront donc importantes et l’Allemagne sera en position de force en sa qualité de première contributrice au budget.

L’Allemagne, mais aussi son satellite autrichien ainsi que les Pays-Bas, la Suède et le Danemark, n’imaginaient pas devoir supporter une dette commune sans contre-partie, risquant de voir leurs économies fragilisées par la crise des pays du sud, surtout l’Italie et l’Espagne, mais aussi de plus en plus clairement la France. Ils auront donc la possibilité avec ce système, s’il est mis en place, d’organiser eux-mêmes la relance des pays fragilisés par la crise, ou en tous cas de contribuer fortement aux choix des secteurs, des formes de contribution, etc. Il en va de même pour les pays de l’Est européen, encore plus satellisés par le couple germano-autrichien.

Le plan annoncé par Angela Merkel et Emmanuel Macron consiste donc en une vassalisation pour les pays ayant recours à cette aide. C’est le même mécanisme que celui du Fonds monétaire international, bien connu dans les années 1990/2000 pour avoir « aidé » des pays pauvres en l’échange de leur soumission aux plus grandes puissances du capitalisme.

L’Allemagne, l’Autriche, les Pays-Bas, la Suède, le Danemark, n’ont pas intérêt à un effondrement total de l’Italie ou de l’Espagne et dans une moindre mesure de la France. Ils ont par contre intérêt à ce que ces pays se transforment en producteurs industriels les intéressant, directement dans leur giron économique, ainsi qu’en des destinations touristiques sur lesquels ils ont relativement la main. Ce qui, d’ailleurs est déjà en partie le cas, surtout pour l’Italie pour l’instant.

Il était question dans la présentation de l’initiative hier de « souveraineté industrielle », notamment par rapport à la Chine. On comprend donc que les pays en difficulté se verraient, avec ce plan, désignés candidats pour accueillir des productions manufacturières à faible valeur ajoutée, rapatriées depuis la Chine.

La France de son côté, a déjà annoncée par la voix de son ministre de l’Économie Bruno Le Maire qu’elle sera directement concernée pour recourir à ce plan de plan de relance, notamment pour « rénover l’hôpital ». Il ne faudrait pas imaginer ici que la France sera en mesure de faire ce qu’elle veut avec cet argent et « rénover » à sa guise le système hospitalier. En position de faiblesse, incapable d’assumer elle-même son système de santé, la France devra se soumettre encore plus aux impératifs du capitalisme, alors que les pays les plus puissants pousseront encore plus dans le sens de la rigueur budgétaire et pour des mesures allant dans le sens de leur propre capitalisme.

Pour donner le ton, les services du chancelier autrichien Sebastian Kurz ont déjà expliqué hier que selon eux, le plan de relance de 500 milliards devrait « se faire sous forme de prêts et non de subventions ». Autrement dit, cela reviendrait pour les pays « aidés » à payer deux fois… une fois avec leur contribution au budget pour rembourser leur part du prêt commun, une autre fois en remboursant directement l’« aide » accordée ! C’est, on l’aura compris, une façon de montrer ses muscles pour les négociations à venir et cela signifie que les pays fragilisés comme l’Italie et l’Espagne, mais aussi la France dans une moindre mesure, n’auront pas d’autre choix que d’accepter beaucoup de chose pour accéder à cet argent dont ils vont avoir un besoin vital.

Cela annonce pour la période à venir une recomposition très nette des rapports de force au sein de l’Union européenne avec un moteur franco-allemand de plus en plus faible et une hégémonie allemande de plus en plus affirmée. Cela renforcera en contrepartie d’autant plus les velléités nationalistes et guerrières, anti-allemandes, en France, en Espagne et en Italie, de la part de bourgeoisies refusant la vassalisation. Il suffit de se rappeler comment Marion Maréchal avait récemment proposé une Union latine, correspondant tout à fait à cette perspective.

Comment la Gauche va-t-elle faire face à un libéralisme pro-allemand et un nationalisme anti-allemand, sans elle-même tomber dans le chauvinisme ni le libéralisme? Voilà le cœur de sa problématique.

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En France, même le ministre de l’intérieur ne respecte pas les règles sanitaires

Les mesures sanitaires sont simples et connues de tous. Pour éviter la propagation du Covid-19, il faut éviter à tout prix la proximité entre les individus et porter un masque pour éviter les projections de gouttelettes, notamment quand on parle. Ces règles ne semblent pas intéresser le ministre de l’intérieur Christophe Castaner qui s’en est affranchie en toute quiétude lors d’un déplacement hier. Cela en dit long sur les mentalités françaises et leur terrible arriération.

Le ministre de l’intérieur était en déplacement en Normandie ce samedi 16 mai. Il venait notamment pour « vérifier » le bon respect des règles en ce qui concerne l’accès aux plages. Il a d’ailleurs expliqué :

« Je ne tolérerai aucun manquement concernant l’application des gestes barrière et des règles de distanciation ».

On voit pourtant, lors d’une séquence filmée par BFMTV, Christophe Castaner manquer à toutes ces obligations sur le remblais de Veules-les-Roses :

Le premier ministre semble très heureux de discuter face à face avec des passants, sans masque, avant de s’approcher d’eux pour prendre une photo, allant même jusqu’à s’accroupir pour se mettre à la hauteur d’un petit garçon, à qui il parle à quelques centimètres du visage.

On voit ensuite le ministre repartir pour sa « vérification » du respect des règles, accompagné de tout un groupe de personnes, dont le maire de la ville, sans masques et se tenant toutes à proximité immédiate les unes des autres.

L’attroupement, badauds et journalistes compris, fait d’ailleurs bien plus que dix personnes, alors que c’est normalement la limite maximale autorisée sur la voie publique en France en ce moment. Le ministre de l’intérieur, censé être à la tête de l’organisation du respect de ces règles, n’est donc même pas capable de le respecter lui-même.

C’est non seulement indécent, mais surtout le signe d’une grande décadence des élites politiques françaises, à l’image d’une grande partie de la population prenant très à la légère les règles sanitaires nécessaires pour faire face au Covid-19.

Avec de tels comportements, avec une mentalité aussi stupide qu’inconsciente, le pays se dirige droit dans le mur et on a du mal à imaginer comment une seconde vague de contamination pourrait être évitée.

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L’initiative commune lancée par de nombreuses figures de la Gauche

C’est « à titre personnel » que de nombreuses figures de la Gauche ont lancé une « initiative commune », dont voici le manifeste. Cela regroupe l’ensemble du spectre centristes de gauche, EELV, PS, PCF, avec une volonté sous-jacente de dépassement de ces structures.

Cette initiative commune vise clairement à passer au-dessus des partis et organisations, voire au-delà de la notion de parti, dans la perspective d’une unification nouvelle de la Gauche.

Parmi les signataires, notons le premier secrétaire du Parti socialiste Olivier Faure, l’économiste Thomas Piketty, l’ex secrétaire général de la CGT Bernard Thibault, la figure du PCF Ian Brossat, la porte-parole du PCF Cécile Cukierman, la directrice d’OXFAM France et ancienne figure d’EELV Cécile Duflot, le fondateur de Place publique Raphaël Glucksmann, la principale figure d’EELV Yannick Jadot, le maire EELV de Grenoble Éric Piolle, la centriste écologiste ex-LREM Corinne Lepage, Virginie Rozière co-présidente des Radicaux de gauche.

« Au cœur de la crise, construisons l’avenir

La France affronte un séisme d’une ampleur inouïe. Favorisée par la destruction de la nature, la pandémie a généré une crise économique de grande ampleur, une commotion sociale brutale, notamment pour les plus précaires, et une mise entre parenthèse du fonctionnement démocratique. Elle a révélé l’improvisation des pouvoirs publics face à cette crise majeure. L’engagement extraordinaire des soignantes et des soignants, le courage de celles et ceux qui n’ont cessé de travailler sans relâche au service de tous et le civisme de millions de personnes confinées dans des conditions difficiles appellent une reconnaissance unanime. Dès maintenant, il s’agit d’éviter le pire et de préparer l’avenir. La réparation des dégâts annoncés, la défense des libertés, l’obligation de préparer une société résiliente nécessitent de fortes dynamiques collectives. La crise confirme l’urgence radicale des grandes transitions. De cette impérieuse nécessité, faisons naitre une espérance. Nous ne sommes pas condamnés à subir !

Au coeur de cette crise, il nous faut tourner la page du productivisme. Il faut affronter les périls immédiats, s’accorder pour engager la transition écologique et dans un même mouvement les transformations sociales et économiques trop longtemps différées. L’impasse où nous ont conduits les politiques dominantes depuis quarante ans et le capitalisme financier exige une offensive résolue. Avec cette initiative commune, dans le respect de nos différences, nous nous engageons à la hauteur des principes que nos prédécesseurs ont affirmés dans la « reconstruction » qui suivit la seconde guerre mondiale. Aujourd’hui, en temps de paix, nous devons faire preuve d’une égale ambition, avec la volonté que les Français s’emparent de ces débats.

L’état d’urgence sociale doit se déployer dès maintenant dans l’ensemble du pays, à commencer par les quartiers populaires et les territoires ruraux, partout où la crise remet à vif la grande pauvreté et les inégalités. Les familles déjà vulnérables, comme celles qui viennent brutalement de plonger dans le chômage et la pauvreté, se comptent par millions. La solidarité nationale doit intervenir pour aider les locataires, contribuer à payer les factures d’eau et d’électricité, par l’aide alimentaire et la fourniture gratuite de masques, par des soutiens exceptionnels individualisés pour que vivent décemment celles et ceux, y compris les jeunes, qui ont vu leur travail et leurs revenus disparaitre. Cette crise doit enfin imposer un basculement des politiques publiques : « sortir » des dizaines de milliers de personnes de la rue, c’est affaire de dignité d’abord, mais aussi d’ordre public sanitaire et social.

Pour aller plus loin, la France, comme d’autres en Europe, doit imaginer et mettre en chantier dès cette année un nouveau modèle de protection sociale. Pour ces temps de grande transition, il y a urgence à assurer un revenu digne rendant possibles à toutes et tous la formation, l’accès à un nouvel emploi ou un projet professionnel. Compte tenu de la hausse explosive du nombre des sans-emplois, ce serait une faute historique de maintenir la « réforme » de l’assurance chômage de 2020. Il faut permettre dès maintenant à tous les territoires volontaires de mettre en oeuvre la belle initiative Territoires zéro chômeur de longue durée, inspirée des expériences du mouvement associatif. Quant aux travailleurs étrangers en situation irrégulière, soutiers plus anonymes encore de nos économies, leur accès au droit au séjour doit être facilité.

Pour pouvoir mobiliser les énergies de toutes et tous, il faudra inventer et consolider des protections collectives plus adaptées à notre temps, combler les failles majeures que la crise a soulignées, agir pour l’accès à la santé et des retraites décentes. Certains, à l’inverse, manifestent déjà la volonté de réduire les droits sociaux à la faveur de l’émotion générale, notamment sur la question du temps de travail. Nous ne laisserons pas faire, et nous demandons qu’il soit renoncé définitivement au projet de réforme des retraites qui mine la cohésion nationale dont nous avons tant besoin. Face à la précarité ou aux inégalités femmes-hommes, tous les travailleurs et travailleuses, indépendants, artisans et commerçants, professionnels des plates-formes, salariés en CDD, intermittents ou intérimaires, doivent être dotés de droits sociaux individuels complets et d’une capacité réelle de négociation collective.

Le statu quo n’est plus possible. Nous défendons une société de la reconnaissance, qui sache valoriser celles et ceux sans lesquelles elle ne tiendrait pas, dans la crise comme après. Travailleurs de l’aube et du soir, fonctionnaires de jour comme de nuit, soignants et enseignants dévoués, elles (très souvent) et ils sont en droit d’attendre bien sûr des primes immédiates et légitimes, mais aussi une amélioration significative et sans délai de leurs conditions d’emploi et de salaire, à commencer par le Smic. Lorsque ces personnes ont des enfants, la prise en charge par les employeurs des frais de garde, l’organisation de nouveaux centres de vacances dès 2020 avec les mouvements d’éducation populaire seraient aussi de justes rétributions. Le confinement a mis également en exergue la nécessité de reconnaitre le féminicide en droit français et de ne plus reporter un plan national d’ampleur contre les violences faites aux femmes et aux enfants, en doublant le budget alloué aux associations venant en aide aux victimes et aux lieux de prise en charge

Les Français vivent intensément les effets de l’affaiblissement de notre système de santé. Sous tension bien avant le tsunami du Covid19, l’hôpital public a été asphyxié par des années d’austérité budgétaire et la marchandisation de la santé. Une loi de programmation doit assurer au plus vite un financement pérenne des investissements des hôpitaux et des Ehpad, rompre avec la spirale des fermetures de lits et permettre la revalorisation des métiers de soignantes et soignants. Cette refondation permettra de retrouver une capacité de prévision et d’anticipation, et les moyens d’affronter collectivement les chocs de grande ampleur. Elle devra également garantir à tout moment la disponibilité des principaux médicaments sur le territoire national. Elle assurera enfin la réhabilitation des soins de premiers recours, efficients et réactifs face à de nouvelles crises et la fin des déserts médicaux, indignes de notre pays.

L’avenir de notre économie et sa conversion écologique se jouent en ce moment. Le soutien public à la survie du système productif est vital. Il doit être associé à une conditionnalité environnementale et sociale exigeante. Des fleurons de notre économie sont au bord de la faillite, avec le cortège habituel de restructurations brutales et de chômage massif. Face à ces risques, la réaction de l’État en faveur de l’emploi doit être couplée à la mise en oeuvre accélérée de la transition écologique, à commencer par le respect des Accords de Paris sur le climat. C’est seulement ainsi que le sauvetage des emplois sera durable. Une politique industrielle crédible implique des choix stratégiques nationaux ; elle se construit dans chaque région avec toutes les parties concernées, entreprise par entreprise, branche par branche. La mobilisation doit intégrer pleinement les enjeux d’indépendance et de relocalisation, de recherche et d’innovation, mis en lumière de façon éclatante dans la crise actuelle.

D’ici la fin de cette année, il appartient à la puissance publique d’identifier avec tous les acteurs les secteurs stratégiques à relocaliser au niveau français ou européen, les chaines de valeurs à contrôler et les productions à assurer au plus proche des lieux de consommation. Les événements récents confirment une fois de plus les fragilités de l’Europe quand elle se limite à n’être qu’un marché livré aux excès du libre-échange, renonçant à protéger son économie. La signature des traités qui amplifient cet abandon doit être stoppée, et ceux qui existent déjà révisés. Rien ne sera possible sans un pilotage ambitieux du système de crédit, avec un pôle public de financement et la BPI jouant enfin réellement son rôle. La mise en oeuvre de nationalisations là où il le faut doit permettre non de mutualiser les pertes, mais d’atteindre des objectifs d’intérêt général. Dans ce but, il faudra aussi miser davantage sur l’économie sociale et solidaire pour mieux ancrer l’économie dans les territoires et impulser le nouveau modèle de développement.

Cette épidémie et sa propagation rapide sont liées à la destruction accélérée des habitats sauvages combinée à une mondialisation insuffisamment régulée. Elles renforcent l’urgence d’une remise en cause de notre mode de production et de consommation : la transformation écologique de la France est le nouveau défi de notre République au XXIème siècle. Cette prise de conscience des communs naturels à protéger et de l’impasse des modes de consommation actuels est essentielle, tout comme les combats de la gauche. Les propositions des participants de la Convention citoyenne pour le climat et sa méthode ont permis que progressent dans la société des projets d’une grande richesse. Les politiques publiques doivent être au rendez-vous de cette urgence planétaire.

Nous proposons que soit discutée et mise en oeuvre rapidement une Prime pour le climat, afin d’éliminer en priorité les passoires thermiques et sortir les plus pauvres de la précarité énergétique. Elle accompagnera aussi les travaux de rénovation énergétique rendus obligatoires pour l’ensemble du bâti afin d’atteindre deux millions de logements par an, en privilégiant les rénovations complètes. Des dizaines de milliers d’emplois non délocalisables pourraient être ainsi créés.

La France a besoin également de bâtir un plan ambitieux de transition vers une mobilité durable, pour soutenir l’électrification des motorisations, les modes de transports collectifs et partagés, la relance des réseaux ferroviaires, mais aussi l’extension du droit au télétravail dans des conditions protectrices pour les salariés.

Conçue pour éviter un recours accru aux énergies fossiles, dont les prix baissent du fait de la crise, la Contribution Climat Énergie doit s’accompagner de mesures de redistribution de grande ampleur pour en compenser les effets sur les plus vulnérables. Une relance publique du soutien à la transition écologique locale est plus que jamais indispensable afin d’impliquer beaucoup plus les territoires et les citoyen.ne.s dans le déploiement des projets collectifs d’énergies renouvelables. Ces investissements supplémentaires dans la transition écologique devront être sortis des critères budgétaires européens.

La refonte des aides de la PAC en soutien des petites et moyennes exploitations doit être accélérée, pour permettre une agriculture respectueuse de l’environnement, la croissance des productions bio, et pour développer le paiement des services environnementaux (stockage du carbone, arrêt des intrants chimiques…). Il faudra enfin donner toute sa place dans nos textes fondamentaux au droit de la nature et mettre en oeuvre de façon strict sur l’ensemble du territoire la politique du « zéro artificialisation nette » et la protection de la biodiversité.

Ces investissements massifs, pour l’immédiat ou le futur, exigent un financement soutenable et équitable. L’engagement de l’Europe en est l’une des clés. C’est une nécessité qui conditionne la survie de l’Union, quand les forces de démembrement prospèrent grâce au manque de solidarité européenne dans chaque moment de crise. On attend de l’Europe qu’elle conduise durablement une politique monétaire à la hauteur du risque actuel, mais aussi qu’elle mette en oeuvre des formes inédites de financement en commun pour empêcher une hausse de l’endettement des États, en particulier les plus affectés par la crise sanitaire. Il faudra aussi dès les prochains mois engager le chantier de la restructuration des dettes héritées des crises successives.

Tous les pays en ont en effet un urgent besoin pour permettre un nouveau départ et la transformation de leurs économies tellement interdépendantes. Ces financements européens ne sauraient être assortis des mesures d’austérité qui ont creusé entre les peuples des blessures encore inguérissables. Les conditionnalités aujourd’hui se nomment écologie, cohésion sociale et respect de la démocratie. Une transformation profonde des structures de l’Union européenne est indispensable pour rendre possibles ces politiques ambitieuses de solidarité. Cela implique la remise en cause du pacte budgétaire.

Mais l’Europe ne pourra pas régler seule l’addition de la crise. Les États devront eux aussi apporter une réponse fiscale et budgétaire dans un esprit de justice. Pour corriger les inégalités creusées au cours des dernières décennies et aggravées par la crise, et pour prévenir l’effondrement de nos sociétés. La France doit rétablir un Impôt de solidarité sur la fortune, mettant à contribution les patrimoines les plus élevés, et renforcer la progressivité de sa fiscalité sur les revenus, notamment ceux du capital, largement érodée depuis 2017. Compte tenu de l’ampleur des dépenses engagées pour faire face à la crise, elle devra appeler une contribution anti-crise des citoyens les plus aisés. La taxation des secteurs qui ont bénéficié de la crise et de ceux qui ont décidé, au coeur de la tempête, de continuer à distribuer des dividendes ou à s’enrichir à l’abri des paradis fiscaux doit être proposée sans délai au Parlement. La maitrise à l’avenir des écarts de salaires au sein des entreprises participe de ces préalables de justice : au-delà d’un écart d’un à douze, il ne serait plus possible de déduire les rémunérations et les cotisations de l’impôt sur les sociétés. Ces choix sont inséparables d’une action ambitieuse pour que les bénéfices des sociétés multinationales cessent d’échapper largement à la fiscalité française, notamment en les obligeant à une totale transparence sur leurs activités et les taxes payées dans les pays où elles sont présentes. Cette reconquête ne sera complète que lorsque les géants du numérique contribueront par un impôt juste aux efforts d’investissement qui attendent la France et l’Europe.

Ces mesures n’auront de sens et d’efficacité que si dans l’après-crise, une transition démocratique offre à tous la capacité d’agir pour un monde commun. La verticalité du pouvoir fracture la société. Elle alimente l’impuissance et la défiance. C’est l’échec de la Vème République. Seule une refondation de nos institutions permettra de le dépasser. Il est impératif de ne pas confier à un « sauveur suprême » ou au pouvoir technocratique « la sortie de crise », mais au contraire d’augmenter la participation des citoyen·ne·s aux décisions qui les concernent et cela à tous les niveaux.

Réussir les transitions exige un développement des emplois publics partout où leur manque cruel se vérifie aujourd’hui. Il faudra aussi rénover l’action publique en inventant les outils, l’organisation, les métiers du secteur public de demain. Rien ne progressera sans des délibérations collectives, valorisant bien davantage les citoyens et leurs compétences, l’éducation, l’innovation sociale et la création culturelle, les territoires, villes et villages.

Cet impératif s’adresse aussi aux entreprises : pour réussir la sortie de crise, il faut y faire entrer la démocratie en associant réellement les salariés à leur stratégie. Cela doit s’incarner dans une codétermination à la française avec la présence de 50% de représentants des salariés dans les conseils de surveillance ou les conseils d’administration des grandes entreprises et le renforcement des pouvoirs des représentants des salariés à tous les niveaux.

Lourde de souffrances inédites, cette période ne doit pas confisquer les espoirs de changement, bien au contraire. Faisons place à l’action collective et à ces premières convergences. Pour être à ce rendez-vous de notre Histoire, nous proposons qu’un grand événement, une « convention du monde commun », réunisse dans les prochains mois toutes les énergies disponibles, les citoyennes et citoyens épris de profonds changements, les formations politiques, les forces associatives, les initiatives que portent syndicats et ONG. C’est une première étape cruciale et attendue pour une alternative démocratique, écologique et sociale. Nous voulons lui donner la force de notre engagement.


Premiers signataires* : Syamak Agha Babaei, Christophe Aguiton, Amandine Albizzati, Claude Alphandery, Nathalie Appéré, Gérard Aschieri, Guillaume Balas, Jeanne Barseghian, Marie-Laure Basilien-Gainche, Laurent Baumel, Romain Beaucher, Anne-Laure Bedu, Jacqueline Belhomme, Esther Benbassa, Patrice Bessac, Olivier Bianchi, Habiba Bigdade, Loïc Blondiaux, Alice Bosler, Maurice Braud, Rony Brauman, Axelle Brodiez, Ian Brossat, Philippe Brun, Julia Cagé, Sophie Caillat, Andrea Caro, Fanélie Carrey-Conte, Lucas Chancel, Pierre Charbonnier, Christian Chavagneux, Alain Coulombel, Annick Coupé, Jezabel Couppey-Soubeyran, Françoise Coutant, Thomas Coutrot, Cécile Cukierman, Ronan Dantec, Joël Decaillon, Carole Delga, Stéphane Delpeyrat, Laurianne Deniaud, Emmanuel Denis, Gregory Doucet, Marie-Guite Dufay, Cécile Duflot, Antoine Dullin, Jérôme Durain, Guillaume Duval, Timothée Duverger, Nicolas Duvoux, Anne Eydoux, Olivier Faure, Rémy Féraud, Aurélie Filippetti, Diana Filippova, Alain Foix, Didier Fradin, Philippe Frémeaux, Guillaume Garot, Karl Ghazi, Jean-Luc Gleyze, Raphael Glucksmann, Daniel Goldberg, Guillaume Gontard, Gaëtan Gorce, Aziliz Gouez, Bernadette Groison, Florent Gueguen, Denis Guenneau, Hélène Hardy, Jean-Marie Harribey, Anne Hessel, Catherine Hoeffler, Pierre Hurmic, Marie-Hélène Izarn, Pierre Jacquemain, Yannick Jadot, Hugues Jallon, Vincent Joineau, Régis Juanico, Nina Karam-Leder, Pierre Khalfa, Yazid Kherfi, Hella Kribi-Romdhane, Thierry Kuhn, Joël Labbé, Guillaume Lacroix, Delphine Lalu, Aurore Lalucq, François Lamy, Sandra Laugier, Pierre Laurent, Guillaume Le Blanc, Joël Le Coq, William Leday, Claire Lejeune, Corinne Lepage, Elliot Lepers, Nadine Levratto, Medhi Litim, René Louail, Benjamin Lucas, François Mandil, Bénédicte Manier, Edouard Martin, Gus Massiah, Nora Mebarek, Dominique Meda, Philippe Meirieu, Claire Monod, Beligh Nabli, Naïri Nahapetian, Jean-François Naton, Alexandre Ouizille, Christian Paul, Renaud Payre, Willy Pelletier, Camille Peugny, Maxime Picard, Thomas Piketty, Eric Piolle, Dominique Plihon, Dominique Potier, Alexis Poulin, Angèle Préville, Audrey Pulvar, Valérie Rabault, Jean-Paul Raillard, Gilles Raveaud, Sandra Regol, Nadine Richez-Battesti, Martin Rieussec-Fournier, Jacques Rigaudiat, Marie-Monique Robin, Johanna Rolland, Barbara Romagnan, Laurence Rossignol, Muriel Rouyer, Virginie Rozière, Michèle Rubirola, Jérôme Saddier, Bernard Saincy, Eva Sas, Mounir Satouri, Frédéric Sawicki, Laurence Scialom, Sabrina Sebaihi, Aissata Seck, Véronique Sehier, Gabrielle Siry, Emmanuel Soulias, Jo Spiegel, Olivier Szulzynger, Sophie Taillé-Polian, Bernard Thibault, Benoît Thieulin, François Thiollet, Isabelle This Saint-Jean, Stéphane Troussel, Henri Trubert, Hulliya Turan, Boris Vallaud, Najat Vallaud-Belkacem, Shahin Vallée, Antoine Vauchez, Denis Vicherat, Anne Vignot, Patrick Viveret.

* à titre personnel »

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Une économie française déboussolée à l’heure du déconfinement

La France est un pays qui, économiquement, se ratatine depuis plusieurs années. En train d’être encore plus déclassée avec la crise sanitaire, son capitalisme voudra avancer à marche forcée. L’instabilité est à l’ordre du jour.

Pour accompagner le choc du confinement, l’État a mis en place un chômage partiel. 12,4 millions de salariés d’un million d’entreprises ont reçu environ 84% du net, payé par l’État (et 100 % lorsque le salaire est au SMIC). Ce dernier a été très généreux avec les couches sociales supérieures puisqu’il a accepté de suivre cette compensation jusqu’à 4,5 SMIC.

Or, tout cela a un coût : 26 milliards d’euros. Il va falloir les trouver. À cela s’ajoute un plan pour aider l’économie (capitaliste) : 52 milliards. Il va falloir les trouver aussi. D’autant plus qu’il y a déjà 599 milliards à payer en 2023, en raison des dettes de l’État.

Tout cela est bien compliqué et il n’y a que trois moyens : la guerre, les impôts, les emprunts. La guerre n’est pas à l’ordre du jour encore, les impôts ce n’est pas faisable car la pression des capitalistes est énorme surtout que les exigences sont déjà hautes. Reste l’emprunt : l’État va devoir emprunter au moins 300 milliards d’euros. Cela représente 15 % du PIB français.

Notons d’ailleurs ici une chose au niveau du PIB, en prenant celui par habitant. Il est au niveau du Japon, clairement derrière l’Allemagne (ainsi que son satellite autrichien) et les États-Unis, ainsi que le Royaume-Uni, la Belgique, le Canada, la Finlande, les Pays-Bas, la Suède, l’Australie.

La France a décroché. Et on sait qu’un endettement implique une dépendance, à moins de disposer d’une base productive forte. Et la France se ratatine. En 2018, les exportations agroalimentaires avaient une valeur de 44 milliards d’euros en France, 72 milliards en Allemagne, 94 milliards aux Pays-Bas. Rien que ces chiffres, dans un secteur où la France est historiquement puissante, en dit très long. Le plan économique de relance en Allemagne est d’ailleurs trois fois plus grand qu’en France, culminant à 160 milliards.

Peut-on penser que le secteur du luxe, avec 76 milliards d’euros à l’exportation peut relancer à lui seul le capitalisme français ? Naturellement pas. Il est d’ailleurs plombé par l’absence des touristes, notamment étrangers, ceux-ci formant 40 % des touristes en général.

Il n’y a donc que deux options. Soit la France accepte une situation italo-espagnole, tendant à celle de la Grèce. C’est celle d’une satellisation relative dans le capitalisme, d’une mise en orbite de l’Allemagne. La France ne serait pas une colonie bien entendu, cependant ses couches dominantes devraient se mettre sous la coupe de l’Allemagne.

Soit la France tente de se réaffirmer en s’appuyant sur son vaste appareil militaire, soit en forçant l’Allemagne à être encore plus agressive dans un tandem, soit en y allant seule. Cette tendance va évidemment recevoir dans les mois prochains un appui gigantesque de la part de très nombreux secteurs. Cela est d’autant plus vrai que Jean-Luc Mélenchon, Marine Le Pen… instillent cette vision du monde depuis longtemps déjà.

Dans tous les cas, c’est une instabilité complète qui est à l’ordre du jour et seule la Gauche historique peut y faire face. Elle seule peut refuser avec force le militarisme, elle seule peut mettre en échec le plan menant à la satellisation.

On se doute qu’entre les tenants d’une Union Européenne sous domination allemande et ceux du nationalisme, la situation de la Gauche historique sera très difficile. Elle est coincée entre le marteau et l’enclume. Tout est d’ailleurs très mal partie, puisque la Gauche historique est d’une faiblesse inouïe. Mais il n’y a simplement pas le choix !

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L’État sera-t-il en mesure de faire respecter la limite de 100 km pour les déplacements?

Le déconfinement du 11 mai avait commencé par un lamentable couac et la loi restreignant les déplacements à un périmètre de 100 km autour de son domicile n’était pas prête. Maintenant que l’interdiction est en vigueur, la question se pose de savoir comment la faire respecter… Et ce n’est pas une mince affaire.

C’est aux forces de l’ordre que revient essentiellement, voire entièrement, le rôle d’encadrer et faire respecter l’obligation de rester dans un périmètre de 100 km autour de son habitation. Le problème, c’est qu’elles n’ont pas les moyens matériels, techniques ou procédurales, pour vérifier cela.

S’il est facile de savoir qu’un Parisien à Bayonne est en infraction, dans d’autres cas c’est plus compliqué. Comment les policiers sont-ils censés savoir que Montceau-les-Mines est à moins de 100 km de Moulins, mais que Sète est a plus de 100 km de Carcassonne ?

Encore plus compliqué : un habitant de Valence se rendant à Saint-Étienne par l’itinéraire le plus rapide parcourra 123 km, mais les deux villes sont situées à moins de 90 km l’une de l’autre à vol d’oiseau. Une application internet très simple est bien-sûr mise à disposition par le gouvernement : bilancoronavirus.fr/carte-sortie-100km Il suffit de rentrer son code postal et le périmètre est tracé. Sauf que les policiers ne sont généralement pas équipés de moyens professionnels pour y avoir accès. Doivent-ils alors utiliser leur smartphone personnel ? C’est impensable, évidemment.

En vérité, le gouvernement a pris une mesure générale, pour dissuader globalement et prétendre avoir agi, mais n’envisage nullement une interdiction effective de circuler dans le pays. Et pour cause, aucune consigne précise n’a été donnée aux forces de l’ordre avec une liste de motifs impérieux justifiant les déplacements hors périmètre. Le ministère de l’intérieur se contente de les appeler au discernement et au bon sens… Ce qui veut tout, et surtout rien dire, laissant libre cours à l’interprétation de chacun, et donc à des situations compliquées.

Les fraudeurs pourront de toute façon tricher facilement, puisqu’il n’y a pas de liste de justificatifs de domicile précis. Un simple carnet de chèques suffit, alors qu’il peut être très ancien et pas à jour. De la même manière, de riches Parisiens ayant une résidence secondaire à 200 km, par exemple en Normandie, pourront facilement jouer avec deux justificatifs de domicile, en le changeant à mi-chemin.

Mais comment s’étonner de cette « légèreté », quand on voit que le ministre de l’intérieur lui-même en est rendu à simplement « conseiller » aux grands-parents de ne pas venir voir leur petit enfant au-delà de 100 km… C’est-à-dire qu’au plus haut sommet de l’État, la personne directement en charge du dossier, n’est même pas en mesure de définir strictement ce qui rentre ou non dans le cadre d’un motif légitime. Ses propos à ce sujet sont affligeants de libéralisme, signe d’une grande décadence de la classe politique :

« Moi, là, je parle comme papa. Je pense que, peut-être, il vaut mieux attendre un mois ou deux plutôt que de proposer à ses grands-parents qui sont en province, de venir nous voir à Paris pour voir le petit dernier qui est né et de s’exposer dans un département qui est encore en rouge à un risque »

Et les policiers vont donc devoir jongler avec tout cela, gérer l’urgence, alors qu’ils auront en face d’eux bien souvent des Français au comportement immature, voire puéril, les défiant comme ils défiaient les surveillants pour se balader dans les couloirs au collège. Les policiers ou les gendarmes brutaux pour leur part s’en donneront à cœur joie, ce qui ne fera que renforcer la grande instabilité sociale, morale, culturel, dans laquelle s’enfonce la France…

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Malgré la crise sanitaire, le gouvernement ouvre les frontières pour la main-d’œuvre immigrée dans l’agriculture

Les frontières sont normalement fermées en raison de la crise sanitaire, mais les impératifs de santé ne font pas le poids face aux besoins du marché. Le gouvernement a donc décidé des dérogations afin de faire venir des immigrés dans l’agriculture. Les capitalistes du secteur ont en effet besoin d’une main-d’œuvre bon marché et surtout peu regardante sur les conditions de travail, provenant essentiellement de Roumanie et de Bulgarie.

Alors que les récoltes de fraises et d’asperges ont déjà commencé, c’est bientôt la saison pour les cerises, les pêches, les nectarines, les poires ou encore les abricots. Les besoins passeraient en quelques jours de 45 000 personnes à 80 000 personnes.

Les agriculteurs du secteur, qui ne sont nullement des paysans mais de véritables chefs d’entreprises capitalistes, prétendent manquer de main-d’œuvre. Cela paraît étonnant tant on connaît la réalité du chômage en France, particulièrement en ce moment. N’a-t-on pas entendu parler d’ailleurs ces derniers jours de ces milliers d’étudiants ayant perdu leur job avec le confinement ?

Le problème en réalité n’est pas celui de la main-d’œuvre, mais de la nature de la main-d’œuvre. Le secteur a besoin d’une main-d’œuvre immigrée afin d’exercer une pression sur le travail, en maintenant des conditions difficiles, des rendements importants et une rémunération faible.

De part leur situation, les immigrés, en l’occurrence venant principalement d’Europe de l’Est et en partie du Maghreb, acceptent des conditions inacceptables pour les travailleurs français en général. Ils l’acceptent d’autant plus facilement que les salaires sont élevés en comparaison de ceux de leurs pays. Il y a bien sûr des Français faisant « les saisons », notamment des étudiants, mais non seulement c’est de moins en moins vrai, mais en plus ceux-ci sont en général jeunes, vivant une situation considérée comme seulement temporaire. La concurrence immigrée exerce sur eux une pression sociale : soit les conditions sont acceptées, soit il faut prendre la porte.

Cette pression est d’autant plus forte qu’il y a chez les travailleurs immigrés du secteur une mentalité surtout opportuniste, imprégnée de féodalisme, s’imaginant faire un bon « deal » avec l’employeur, avec un bon salaire contre un dur labeur, lui-même valorisé en tant que tel.

Dans ces conditions, les capitalistes de l’agriculture ne veulent absolument pas entendre parler des travailleurs français, ou alors seulement dans la mesure où ces derniers se plient aux standards acceptés des travailleurs immigrés.

Il faut à ce propos rappeler l’épisode récent où une campagne a été menée pour inciter des chômeurs partiels à venir travailler dans les champs, intitulée « Des bras pour ton assiette ». Cela a été un véritable fiasco, tant les travailleurs français arrivant ont été stupéfaits des conditions de travail, préférant tout simplement ne pas revenir le lendemain. Les employeurs, anticipant souvent ces réactions, ont dans la plupart des cas refusé d’eux-mêmes les embauches, préférant s’asseoir sur une partie de la production (15 % à 20 % des récoltes d’asperges et de fraises).

Les chiffres sont ainsi édifiants : sur 300 000 candidatures, seules 15 000 ont abouti d’après le ministère de l’Agriculture, et pas forcément durablement.

Le secrétaire général de l’Interprofession des fruits et légumes frais (Interfel), Daniel Sauvaitre, a très bien résumé cette situation dans la presse :

« Pour la main-d’œuvre locale c’est : un jour il fait trop chaud, un jour il fait trop froid, et il faut s’arrêter le vendredi midi. Les cueilleurs habituels, notamment venus de l’étranger, sont davantage rompus au travail de la terre. »

Les travailleurs français osent demander des bonnes conditions de travail ? C’est inacceptable pour les capitalistes du secteur, alors il faut impérativement ouvrir les frontières pour importer de la main-d’œuvre, peu importe la crise sanitaire. Telle est l’immonde logique du capitalisme, utilisant l’immigration pour maintenir les profits et freiner la lutte des classes, faisant fi des nécessités sanitaires.

Ce qui est vrai dans l’agriculture l’est d’ailleurs aussi pour de nombreux secteurs : la restauration dans les grandes villes, le BTP, le ménage, la sécurité privée, une partie de la sous-traitance industrielle, etc. La différence étant que dans ces cas-là, la main-d’œuvre immigrée est déjà sur place, souvent en situation irrégulière, contrairement à la main-d’œuvre agricole qui n’est que saisonnière et pour qui le capitalisme ouvre les frontières avec empressement.