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L’État incapable de mettre en place les lois pour le déconfinement du 11 mai

Les couches dominantes de la société étant décadentes, plus rien ne va et malgré la préparation du déconfinement du 11 mai, les lois l’encadrant n’ont pas été mises en place à temps. C’est très révélateur de l’effondrement en cours.

Le déconfinement du 11 mai a comme principe fondateur l’impossibilité de se déplacer à plus de 100 km de son département. Sauf que, problème, il faut une loi pour cela et la validation du conseil constitutionnel. La loi ayant été votée le 9 mai, le conseil constitutionnel ne l’a validé que le 11 mai… rendant impossible toute vérification étatique au moyen des forces de l’ordre.

Il en va de même pour l’attestation obligatoire dans les transports en commun d’Île-de-France, qui relève de la même loi sur l’état d’urgence sanitaire. La vérification de ces attestation est d’ailleurs remise à… mercredi 13 mai.

On a ici un exemple de ratage total. D’ailleurs, le conseil constitutionnel a cassé deux autres mesures, montrant à quel point le libéralisme a tout vérolé. Il a dit : pas de quarantaine obligatoire pour les gens arrivant en France, sauf sous supervision d’un juge. Le conseil constitutionnel nie ainsi le principe d’état d’urgence, au nom des « droits de l’Homme » si chers à la petite-bourgeoisie anti-État.

Le conseil constitutionnel agit ici de manière purement idéologique, totalement libérale-démocrate :

« S’agissant du régime de l’état d’urgence sanitaire, le Conseil constitutionnel a jugé que la Constitution n’exclut pas la possibilité pour le législateur d’en prévoir un. Il lui appartient, dans ce cadre, d’assurer la conciliation entre l’objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé et le respect des droits et libertés reconnus à tous ceux qui résident sur le territoire de la République.

Parmi ces droits et libertés figurent la liberté d’aller et de venir, composante de la liberté personnelle, protégée par les articles 2 et 4 de la Déclaration de 1789, le droit au respect de la vie privée, qui découle de cet article 2, la liberté d’entreprendre qui découle de cet article 4, ainsi que le droit d’expression collective des idées et des opinions résultant de l’article 11 de cette déclaration. »

Vie privée, droit d’entreprendre, dire ce qu’on veut… la liberté est ici entièrement au service de l’initiative capitaliste. Le conseil constitutionnel est d’ailleurs très content que le gouvernement n’ait pas étendu l’interdiction de se réunir lors du confinement aux locaux à usage d’habitation. C’est la pure négation de la primauté du collectivisme.

D’ailleurs, le conseil constitutionnel se prononce… contre le traçage des malades. Selon lui, c’est une atteinte à la vie privée ! Ainsi, il a :

« relevé que les dispositions contestées autorisent le traitement et le partage, sans le consentement des intéressés, de données à caractère personnel relatives à la santé des personnes atteintes par la maladie du covid-19 et des personnes en contact avec elles, dans le cadre d’un système d’information ad hoc ainsi que dans le cadre d’une adaptation des systèmes d’information relatifs aux données de santé déjà existants. Ce faisant, ces dispositions portent atteinte au droit au respect de la vie privée. »

L’individualisme avant tout ! D’ailleurs, dans un même ordre d’idée, Lille a ouvert son plus grand parc, celui de la Citadelle. La région est en zone rouge ? Pas grave, les « droits » individuels avant tout !

Le conseil constitutionnel a également retoqué le principe enlevant la responsabilité pénale des élus en cas de catastrophe sanitaire. En apparence, on dira : c’est normal, les élus doivent rendre des comptes. Sauf que cela signifie simplement que les élus serviront de fusibles et que les grandes décisions gouvernementales, étatiques, à la base des actions des élus, disparaissent du champ de la critique. On ne dira pas : l’État a mal agi, de par ses orientations, ses valeurs, ses fondements. On dira : un tel a mal agi et doit être condamné.

Entre le conseil constitutionnel garant de la main-mise complète du capitalisme et un gouvernement incapable de ficeler des lois malgré une grande préparation du déconfinement, on voit bien que l’État ne tient plus. D’aucuns diront qu’au contraire c’est la démocratie, c’est l’équilibre des pouvoirs, etc. Mais une telle conception des choses ne fait que refléter le libéralisme. En réalité, tout est instable, précaire. Le personnel politique bourgeois est de plus en plus nul, l’administration étatique toujours plus bureaucratique. C’est l’effondrement étatique reflétant la profonde crise du capitalisme dans notre pays.

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Le 11 mai va ouvrir la crise de l’indolence française

Les Français sont indolents, c’est-à-dire des partisans du moindre effort. Dès qu’il y a un problème, ils quémandent à l’État, y compris lorsqu’ils sont des tenants du libéralisme économique. Même en religion ils ont besoin d’un clergé. Quant à la politique, ils n’y participent jamais, déléguant de loin à des partis politiques numériquement très faibles. Le 11 mai ouvre la crise de cette indolence.

Les Français ont inventé le protestantisme. Mais ils n’ont pas assumé et aujourd’hui, seule une minorité de gens savent que Calvin est Français, de Picardie, comme La Fontaine et Racine. Comment pourrait-il être français, alors qu’il représente un puritanisme qui serait forcément anglo-saxon ? Le Français n’est-il pas hâbleur et batailleur, un vrai Gaulois ?

Ce qui va s’ouvrir le 11 mai, c’est une remise en cause fondamentale de cette illusion relevant du confort bourgeois d’une France correspondant au village d’Astérix et Obélix. Les Français se sont en effet mentis à eux-mêmes pendant des décennies, refusant de se considérer aussi libéraux que les Américains, imaginant que leur fromage vient de petite ferme, que les vaches gambadent dans les prés et que la France est, par définition, le pays le plus agréable du monde.

Le 11 mai, le déconfinement va montrer toutes les faiblesses, les étroitesses d’esprit, les manques matériels, les incapacités à organiser, le dédain, le mépris, l’hypocrisie, l’égoïsme. Cela va être un vaste catalogue de la catastrophe française, l’équivalent culturel de la débâcle de 1940. Et même si les gens font encore semblant que tout irait finalement pas si mal, la Droite est derrière pour cogner et pour faire tomber le tout.

Car personne ne semble avoir encore compris, à part certains secteurs de la Droite et de l’extrême-Droite, que l’économie a fait un bond en arrière de plus de dix ans, que tout l’existence artificielle de couches petites-bourgeoises va être profondément remise en cause. Les remous vont être énormes, l’instabilité économique va se prolonger en instabilité politique, avec des appels toujours plus forts à l’émergence de l’homme providentiel, sans doute une haute figure militaire.

Il n’y a simplement plus de place pour l’indolence, et si les gens ne veulent pas assumer d’en sortir, alors la sortie autoritaire, militariste, fasciste à la crise les y obligera de toutes façons. La polarisation va être complète et il n’y a, au fond, que deux forces en compétition pour les choix de la société : le mouvement ouvrier d’un côté, les forces les plus agressives du capitalisme de l’autre.

Le problème, évidemment, c’est que le mouvement ouvrier est au point mort. Les valeurs universitaires postmodernes ont anéanti de nombreux fondements culturels et politiques, alors que la démarche folklorique syndicaliste révolutionnaire est présente en force. C’est un ignoble mélange d’une gauche américaine avec une gauche d’avant le début du XXe siècle, avant la formation du Parti socialiste SFIO.

C’est en décalage complet avec ce qui est exigé et c’est pour cela que tout va aller très vite. La Gauche va se recomposer, sur sa base historique, mais de manière très rapide. Cela va être la course. Comme en Espagne dans les années 1930, il va y avoir une Droite au sens le plus large unifiée et voulant une sortie autoritaire, une toute petite extrême-Droite puissamment agitatrice, une agitation anarchiste et syndicaliste sans intérêt, et enfin une Gauche s’approfondissant, se systématisant, se structurant puissamment.

Le 11 mai marque le début de la grande course au pouvoir entre la Gauche et la Droite. Le vieux monde est dépassé.

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Biélorussie, pays martyr: le sens du défilé pour le 9 mai 2020

La Biélorussie a été à deux doigts d’être anéantie par l’Allemagne nazie, qui voulait rapidement la vider pour la coloniser. Le pays a été pratiquement détruit, tout en ayant été à la pointe du mouvement des partisans. Le 9 mai 2020 apparaissait donc comme un horizon concrètement incontournable.

La plupart des Français ne savent pas où est la Biélorussie, à vrai dire ils ne savent pas forcément que ce pays existe. À la limite certains auront-ils remarqué que le personnage de film John Wick est un assassin biélorusse, la série de films jouant sur le cliché plus ou moins vrai du Russe mélancolique fonctionnant comme un rouleau compresseur quand on l’ennuie. Aujourd’hui, plutôt que de Biélorussie, on parle d’ailleurs plutôt du Bélarus, dans le passé on employait par contre l’expression de Russie blanche.

L’origine du nom de ce pays d’aujourd’hui 10 millions d’habitants, dont la capitale est Minsk, est assez obscur : on ne sait pas trop si cela la relie à la Russie – soulignons que les Biélorusses et les Ukrainiens sont à la fois Russes et pas du tout – ou bien si c’est pour désigner la partie russe qui n’a pas été sous domination tatare. Rappelons en effet qu’au-delà des fantasmes postmodernes sur les « blancs » dominateurs, une large partie des pays de l’Est et du Sud Est ont été dominé longtemps par les Mongols, les Tatars, les Turcs, à quoi on peut ajouter les Hongrois.

Aujourd’hui, la Biélorussie, ou le Bélarus, est une dictature où le régime fait ce qu’il veut, étant un satellite russe, avec à la tête du pays Alexandre Loukachenko, qui est au pouvoir depuis 1994. Autant dire qu’être un opposant dans un tel pays exige un vrai sens de l’héroïsme par rapport à ce qu’on risque physiquement. Le pays a défrayé la chronique ces dernières semaines par son refus ostensible et unique de ne pas prendre en compte le covid-19.

Cela tient, en fait, pas seulement à une lubie d’un président qui, de toutes façons, n’en fait qu’à sa tête. Mais pas seulement : il y a également une vision de l’adversité historique qui est très particulière. Cela se lit dans le fait que la Biélorussie ait maintenu le défilé à l’occasion du 75e anniversaire de la victoire sur le nazisme. En effet, l’invasion nazie, pour la Biélorussie, c’est 9 200 villages anéantis dont 600 en même temps que tous leurs habitants, 1,2 millions de logements détruits, Minsk et Vitebsk anéantis à 80 %, 380 000 personnes déportées pour le travail forcé.

La Biélorussie a perdu 25 % de sa population, dont 800 000 Juifs assassinés par les nazis. Les objets et les bâtiments du patrimoine historique et culturel de la Biélorussie ont été réduit à néant, à très peu d’exceptions près. Les groupes de partisans ont essaimé tout le pays et l’héroïsme a été une norme, comme la résistance de la forteresse de Brest. Très difficile, par conséquent, de contourner la célébration du 75e anniversaire de la victoire.

Cette expérience explique-t-elle le refus de faire face au covid-19 en tant que tel ? Il y aurait ici à creuser, à méditer. Surtout, il faut se rappeler que les peuples n’ont pas les mêmes expériences, le même parcours. On le voit très bien quand on voit comment les Français ont été individualistes dans une large mesure dans cette crise sanitaire, alors que les Grecs, un peuple connu pour sa vivacité et aussi malheureusement sa pauvreté, a été d’une discipline exemplaire, en raison d’un grand sens des responsabilités populaires.

Il ne s’agit nullement de hiérarchiser ni de faire un fétichisme des différences. Il s’agit de comprendre que tout s’explique par l’histoire, par les rapports entre les classes, par la culture du pays à travers tout cela. Si on ne voit pas cela, on ne peut pas corriger le tir et aller vers le mieux.

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La Gauche française et les 75 ans de la victoire sur l’Allemagne nazie

Si le 8 mai est un jour férié, de dimension nationale, la victoire sur le nazisme est considérée comme un aspect essentiel du dispositif idéologique et culturel de toute une partie de la Gauche. On peut pratiquement parler de fracture et il y a une profonde réactivation du courant communiste « historique ».

Il y a 75 ans, l’Allemagne nazie capitulait face aux Alliés. La version finale de cette capitulation arriva tard le soir, ce qui fit qu’en URSS c’était déjà le 9 mai, ce qui amène une double célébration internationale, le 8 mai pour les uns, le 9 mai pour les autres. Quant aux Allemands, tout comme étrangement les Autrichiens, ils ne célébraient rien du tout, considérant la défaite de l’Allemagne nazie comme leur propre défaite.

La Gauche allemande était terriblement choquée de ce constat et une large partie des socialistes d’Allemagne décida d’ailleurs de s’unifier avec les communistes, afin de faire face à la gigantesque tâche de réforme démocratique. Cela donna l’Allemagne de l’Est, alors qu’à l’Ouest les anciens nazis occupèrent l’ensemble de l’appareil d’État et les grandes entreprises. Le fondateur des services secrets ouest-allemands, Reinhard Gehlen, qui les dirigea jusqu’en 1968, fut d’ailleurs l’un des co-planificateurs de « l’opération Barbarossa » et ensuite le responsable des services secrets dans le cadre de l’invasion de l’URSS.

En France, la Gauche profitait à l’inverse évidemment d’une profonde unanimité. Cependant, la reconnaissance du 8 mai a toujours été une bataille. Si dès 1946, il y a une commémoration annuelle, le 8 mai n’est férié qu’à partir de 1953, à la suite d’une longue lutte.

De Gaulle supprime alors le 8 mai comme jour férié en 1959. Les commémorations restent. En 1975, Valéry Giscard d’Estaing supprime les commémorations. Toutes ces décisions reposent évidemment sur les besoins de la « réconciliation » dans le cadre de la construction européenne.

En 1981, c’est alors François Mitterrand qui rétablit à la fois les commémorations du 8 mai et cette date comme jour férié. C’était inévitable de par l’esprit et la culture de la Gauche. Mais son statut est précaire. Valéry Giscard d’Estaing avait fait du 11 novembre la journée des morts de la France et c’est de nouveau le cas depuis 2012. La suppression du 8 mai est une vraie hypothèse.

La raison de cette situation est que l’Union européenne a remplacé, pour une large partie de la Gauche, le mouvement ouvrier. Si le Parti socialiste mentionne les 75 ans de la victoire au détour d’un message twitter (et le même sur facebook), son dirigeant Olivier Faure n’en parle pas. EELV ne fait pareillement qu’ un message twitter, pour ne même pas parler des 75 ans, mais de la répression sanglante des émeutes tout aussi sanglantes en Algérie française le même jour. C’est d’ailleurs un des thèmes récurrents de la « seconde gauche », violemment anti-communiste.

Du côté de ceux assumant la tradition communiste, le 8 mai est par contre sacré et ces 75 ans forment un prétexte tout particulier de réaffirmation identitaire et culturelle, particulièrement marquée cette année. Le PCF reste sobre en saluant les 75 ans, mais dénonce tout de même la ministre des armées ne saluant que les pays alliés actuellement à la France pour leur soutien à la Libération (États-Unis, Canada, Grande-Bretagne, Australie, Nouvele-Zélande), y voyant un plan pour « oublier » l’armée rouge.

Qu’en 2020 le PCF soit obligé de souligner l’importance de l’armée rouge en dit long sur la puissance de toute une tradition. On ne doit donc pas s’étonner de voir des initiatives encore plus hardies dans le cadre de ceux en « compétition » pour qu’un nouveau PCF émerge.

Du côté du Parti Communiste Révolutionnaire de France (PCRF), il y a une Déclaration internationale de Partis communistes pour le 8 mai, qui a d’ailleurs été également signé par le Pôle de Renaissance Communiste en France (PRCF), qui a de son côté organisé un débat vidéo avec l’historienne Annie Lacroix-Riz. Il y a aussi un article saluant « les libérateurs au drapeau rouge » et dénonçant l’interprétation historique de la seconde guerre mondiale de l’Union Européenne (voir «L’Importance de la mémoire européenne pour l’avenir de l’Europe», un texte contre la Gauche).

Mais en fait le PCF a signé également cette déclaration, ce qui est très intéressant ou marquant ou surprenant, comme on le voudra, car il est parlé de l’URSS comme d’un « Etat socialiste », ainsi que du « peuple héroïque soviétique et à l’Armée rouge, dirigée par le Parti communiste, dont la contribution, écrite dans des pages héroïques telles que les batailles de Moscou, de Léningrad et de Stalingrad ».

Cette notion de batailles décisives est précisément battu en brèche par les maoïstes du PCF(mlm) qui ont de leur côté publié un dossier sur « la grande guerre patriotique », comme l’URSS appelle de son côté la seconde guerre mondiale, insistant sur « l’art opérationnel » élaboré alors.

Et dans la déclaration internationale, signé par une soixantaine de partis dans le monde, on lit le même genre de discours que chez le PCF(mlm), puisqu’il est affirmé que « les secteurs les plus réactionnaires et agressifs de l’impérialisme voient de plus en plus le fascisme et la guerre comme une « sortie » de l’aggravation de la crise du système capitaliste ».

C’est là un retour en forces des thèses communistes « historiques », avec tout une gamme de rapports à Staline : un peu (PRCF), beaucoup (PCRF), à la folie (PCFmlm), pas du tout (PCF). D’ailleurs, les autres courants ne parlent pas des 75 ans de la victoire sur le nazisme, soit par désintérêt (les maoïstes « post » Staline, les anarchistes), soit par rejet historique de la Résistance (Lutte Ouvrière ne dit rien, le NPA porte quant à lui un regard très critique).

A-t-on ici un renouveau historique du Communisme comme mouvement, ou un simple rappel formel des fondamentaux ? L’avenir le dira.

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«Déclaration internationale de Partis communistes pour le 8 mai»

Cette déclaration a été signée, pour faire simple, par ce qui reste du mouvement communiste se définissant positivement par rapport à l’URSS dans les années 1980. En France, elle a été signé par le PCF (qui ne le diffuse apparemment pas), par le PCRF (issu de l’URCF, une scission de gauche du PCF des années 1990) et par le PRCF (la gauche du PCF, très liée aux tendances les plus contestataires de la CGT).

« Déclaration internationale de Partis communistes pour le 8 mai

Au nom de la liberté, de la paix et de la vérité,

Contre le fascisme et la guerre !

La victoire sur le fascisme nazi pendant la Seconde Guerre mondiale est un événement majeur de l’Histoire, dont le souvenir doit être préservé et défendu face aux tentatives répétées de falsification historique visant à nous faire oublier le rôle décisif joué par l’Union soviétique des Républiques socialistes, par les communistes et par les antifascistes du monde entier.

Généré par le capitalisme, le fascisme nazi était la manifestation la plus violente et terroriste du capital monopoliste. Il était responsable du déclenchement de cette guerre d’agression et de pillage qui a fait près de 75 millions de morts, dont environ 27 millions de citoyens soviétiques, et des souffrances et horreurs incommensurables des camps de concentration nazis. Les peuples ne peuvent pas non plus oublier les pages sombres, comme les bombardements atomiques d’Hiroshima et de Nagasaki par les États-Unis, sans aucune justification militaire, qui représentaient une démonstration de puissance et de leurs ambitions hégémoniques mondiales.

La Seconde Guerre mondiale (1939-1945) est le résultat de contradictions inter-impérialistes de plus en plus aiguës et, en même temps, de l’intention de détruire le premier État socialiste, l’URSS, qui s’est notamment exprimée dans le soutien et la connivence entre le Royaume-Uni, la France et les États-Unis, avec le réarmement et l’ambition expansionniste de l’Allemagne nazie.

En commémorant le 75ème anniversaire de la Victoire historique du 8 mai 1945, les partis communistes et ouvriers soussignés, certains de relayer les sentiments et les aspirations des travailleurs et des peuples du monde entier :

- rendent hommage à tous ceux qui ont donné leur vie sur les champs de bataille contre les hordes nazies-fascistes et en particulier à l’héroïsme des mouvements de résistance et des combattants antifascistes, ainsi qu’au peuple héroïque soviétique et à l’Armée rouge, dirigée par le Parti communiste, dont la contribution, écrite dans des pages héroïques telles que les batailles de Moscou, de Léningrad et de Stalingrad, a été décisive pour la victoire sur la barbarie ;

- considèrent que la victoire sur l’Allemagne nazie et ses alliés dans le Pacte anti-Komintern a été réalisée grâce à la contribution décisive de l’URSS, à la nature de classe du pouvoir soviétique avec la participation des masses populaires, au rôle de premier plan du Parti communiste, à la supériorité affichée par le système socialiste. Cette victoire est un énorme héritage historique du mouvement révolutionnaire.

- mettent en valeur les avancées remarquables dans l’émancipation sociale et nationale des travailleurs et des peuples, avancées rendues possibles par la victoire et l’avancement des forces du progrès social et de la paix, étendant la sphère du socialisme dans les pays d’Europe, d’Asie et d’Amérique latine ; cette victoire a créé les conditions pour l’avancée du mouvement ouvrier dans les pays capitalistes, le développement rapide du mouvement de libération nationale et la liquidation des empires coloniaux qui en a résulté ;

- dénoncent et condamnent les campagnes visant à minimiser, déformer et même nier le rôle de l’URSS et des communistes dans la défaite du fascisme nazi et aussi à blâmer injustement et faussement l’Union soviétique pour avoir déclenché la Seconde Guerre mondiale, à supprimer les responsabilités du grand capital et des gouvernements à son service dans la promotion et la montée du fascisme et dans le déclenchement de la guerre, à blanchir et réhabiliter le fascisme, tout en détruisant les monuments et la mémoire de l’armée soviétique libératrice, en promouvant l’anticommunisme et en criminalisant les communistes et d’autres antifascistes ;

- dénoncent et condamnent les résolutions anticommunistes de l’UE et la falsification historique calomnieuse qui tente d’assimiler le socialisme au monstre fasciste ;

- soulignent que les secteurs les plus réactionnaires et agressifs de l’impérialisme voient de plus en plus le fascisme et la guerre comme une « sortie » de l’aggravation de la crise du système capitaliste, dont le caractère inhumain devient particulièrement évident lorsque, même face à la très grave épidémie de Covid-19, l’impérialisme, les États-Unis, l’OTAN, l’UE et ses puissances capitalistes alliées, poursuivent une politique criminelle de blocus et d’agression contre les pays et les peuples ;

- considèrent que la lutte pour la paix, le progrès social et le socialisme sont indissociables, et s’engagent à rechercher une action commune plus forte de la classe ouvrière, des travailleurs et des peuples du monde, des forces politiques engagées dansla lutte contre le fascisme et contre l’impérialisme, contre les agressions impérialistes et la guerre.

La situation à laquelle sont confrontés les travailleurs et les peuples du monde souligne l’importance de renforcer la lutte contre l’impérialisme, pour la souveraineté des peuples et l’indépendance des États, pour les droits des travailleurs et des peuples. Il faut dépasser de manière révolutionnaire le système capitaliste, un système qui engendre le fascisme, la guerre, les injustices, les dangers et les contradictions du présent. Comme il y a 75 ans, c’est aujourd’hui la lutte des communistes et de tous ceux qui sont confrontés à l’exploitation et à l’oppression capitalistes qui ouvrira la voie à l’avenir pour l’humanité.

Communist Party of Armenia
Communist Party of Australia
Party of Labour of Austria
Communist Party of Bangladesh
Communist Party of Belarus
Communist Party of Belgium
Communist Party of Brazil
Communist Party of Britain
New Communist Party of Britain
Communist Party of Canada
Communist Party of Chile
Colombian Communist Party
Socialist Worker’s Party of Croatia
Communist Party of Cuba
Communist Party of Bohemia and Moravia
The Progressive Party of the Working People – AKEL
Communist Party in Denmark
Egyptian Communist Party
Communist Party of Finland
French Communist Party
Pole of Communist Revival in France
Communist Revolutionary Party of France
Unified Communist Party of Georgia
German Communist Party
Communist Party of Greece
Hungarian Worker’s Party
Communist Party of India (Marxist)
Communist Party of India
Tudeh Party of Iran
Iraqi Communist Party
Communist Party of Ireland
Workers’ Party of Ireland
Communist Party of Israel
Italian Communist Party
Party of the Communist Refoundation – European Left (Italy)
Workers’ Party of Korea
Communist Party of Luxembourg
Communist Party of Malta
Popular Socialist Party – National Political Association (México)
Communist Party of Mexico
New Communist Party of the Netherlands
New Communist Party of Aotearoa (New Zealand)
Communist Party of Macedonia
Communist Party of Norway
Communist Party of Pakistan
Palestinian Communist Party
Paraguayan Communist Party
Peruan Communist Party
Philippine Communist Party (PKP – 1930)
Portuguese Communist Party
Communist Party of the Russian Federation
Union of Communist Parties – CPSU
Communist Party of the Soviet Union
New Communist Party of Yugoslavia
Communist of Serbia
South African Communist Party
Communist Party of Spain
Communist Party of the Peoples of Spain
Communists of Catalonia
Galizan People’s Union
Communist Party of the Workers of Spain
Galician Nationalist Bloc
Communist Party of Sri Lanka
Sudanese Communist Party
Communist Party of Swaziland
Communist Party (Switzerland)
Syrian Communist Party
Communist Party of Turkey
Communist Party of Ukraine
Communist Party USA
Communist Party of Venezuela »

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11 mai: le grand saut dans l’inconnu

Le gouvernement a officialisé ce jeudi 7 mai la levée du confinement pour le 11 mai, avec quelques détails changeants pour les départements classés « rouge » par rapport à ceux classés « vert ». La circulation du virus n’a cependant pas cessé et personne ne peut être certain que la situation va s’améliorer sur le plan sanitaire. La France se lance dans un grand saut, périlleux, dans l’inconnu.

Une seconde vague de l’épidémie sur le territoire français est-elle à craindre ? C’est une possibilité tout à fait crédible. Ce qui est certain en tous cas, c’est que la circulation du virus ne s’est pas arrêtée avec le confinement. 728 nouvelles admissions à l’hôpital pour Covid-19 ont été enregistrées hier (100 de moins que la veille) et 99 personnes ont été placées en réanimation (30 de plus que la veille).

C’est beaucoup, et cela est en tous cas plus que les estimations du modèle prévisionnel ayant servi à déterminer des critères pour le 11 mai. Le Conseil scientifique s’était fondé pour cela sur un modèle de l’Institut Pasteur. Celui-ci prévoyait d’ici au 11 mai un nombre d’admissions quotidiennes en réanimation compris entre 10 et 50.

Il en est de même pour le nombre total de personnes en réanimation qui, bien qu’en baisse (- 186 hier), reste élevé avec 2 961 personnes, contre les 1 400 à 1 900 personnes prévues par le modèle pour le 11 mai, soit dans 4 jours). Si la baisse quotidienne était constante d’ici à lundi, cela donnerait 2217 lits de réanimation occupés, soit 300 de plus que la fourchette haute du modèle.

Autre chose à prendre en compte : ces chiffres reflètent une situation antérieure, avec des contaminations ayant eu lieu environ trois semaines avant les admissions en réanimation. Or, depuis la situation d’il y a trois semaines, quasiment en plein milieu du confinement, la situation a relativement changé. Le gouvernement a, à plusieurs reprises, évoqué un certain relâchement de la population quant au respect des règles de distanciation sociale et de « mesures barrières ».

Cela est aisément constaté par tout un chacun, avec notamment une circulation routière accrue, des visites dans les familles ou chez les amis, discrètes mais effectives, ainsi que de nombreuses activités économiques ayant déjà reprises cette semaine, particulièrement dans le BTP.

La France se lance dans un déconfinement en ayant finalement un aperçu que très partiel de la situation réelle, pour ne pas dire quasiment nul. Rien que le critère évoqué à l’origine par le gouvernement pour la lever du confinement le 11 mai, c’est-à-dire un nombre maximum de 3000 contaminations quotidiennes, est invérifiable (ou alors seulement a posteriori et par extrapolation).

Tout la stratégie du gouvernement est pourtant fondée sur cela, avec surtout le calcul du nombre de tests de dépistage hebdomadaire nécessaires (700 000 tests par semaine). La stratégie de dépistage sera d’ailleurs très compliquée à concrétiser, avec en plus de cela une opposition gouvernementale complètement hystérique sur la question du fichage sanitaire, que cela soit pour les brigades de terrains (censées remontées des chaînes de contamination) via les fichiers de l’assurance maladie, ou bien l’application de traçage de la population via les smartphones.

Même en supposant que l’estimation d’un maximum de 3000 contaminations quotidienne à partir du 11 mai soit la bonne, rien ne permet de croire que ces milliers de contaminations quotidiennes n’engendreront pas une nouvelle vague épidémique. Les masques, dont tout le monde n’est pas encore équipé d’ailleurs, les mesures dans les magasins, les transports, les écoles, la limitation (espérée) des contacts familiaux, amicaux etc. ne sauraient être aussi efficaces que le confinement de la population avec des rencontres normalement limitées aux seules courses alimentaires.

L’inquiétude est particulièrement grande pour l’Île-de-France, très dense, ainsi que le Nord et l’Est du pays. 72% des personnes hospitalisées se concentre d’ailleurs dans les régions Île-de-France, Grand-Est, Auvergne-Rhône-Alpes et Hauts-de-France.

Il a été rappelé hier par le ministre que le nombre de cas en Île-de-France ne faiblit que lentement, qu’il reste élevé, plus élevé que ce qui était espéré. Mais cela ne change rien à la date du 11 mai, et il est encore fait appel à la seule responsabilité individuelle :

« En Île-de-France, compte tenu de la tendance, nous pouvons déconfiner. Mais le fait qu’il reste du virus en circulation, que cette région soit très dense et peuplée, nous impose une discipline renforcée».

C’est d’ailleurs pourquoi une équipe de recherche de l’Inserm à l’Institut Pierre Louis d’Épidémiologie et de Santé Publique explique qu’il faudra parvenir à identifier et isoler correctement au moins un malade sur deux en Île-de-France… sinon la contagion repartira et le système hospitalier ne tiendra pas le choc.

Il y a même des modélisateurs de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris qui ont publié un article expliquant qu’une seconde vague est inévitable.

Dans le même temps, il y a une pression énorme de la part de tout un tas de secteurs, dont le discours est particulièrement porté par la Droite, pour assouplir les règles, ouvrir rapidement les bars, les cafés, les restaurants, les bases de loisir, etc. La Gauche, contaminée par le libéralisme, n’a rien de bien mieux à raconter dans bien des cas.

Et en attendant, la situation dans les Ephad n’a pas changé et le ministre se dit lui-même incapable de savoir quand il pourra y avoir un déconfinement. Cela rappelle l’opacité des chiffres quant aux personnes âgées mortes chez elles.

Ce qui se réalise, c’est une reprise du capitalisme particulièrement cynique, comptant pertes, comptant profits, et ayant choisi.

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Jean-Luc Mélenchon: une solution à la crise en mode casino

Dans une interview à la Tribune de Genève, Jean-Luc Mélenchon montre qu’il connaît tous les fondamentaux de la Gauche. Mais il refuse de les assumer pour la réponse à la crise actuelle. Il préfère « inventer ».

Jean-Luc Mélenchon a rompu avec la Gauche depuis longtemps ; La France Insoumise assume d’être un mouvement populiste représentant le « bas » contre le « haut ». Cela amène à des jugements dénués de valeurs culturelles, comme cet éloge du premier ministre, qui pourtant devrait être honni :

« Édouard Philippe est de droite et n’a jamais prétendu autre chose. C’est un homme élégant, d’un côtoiement agréable, un libéral assumé et qui le dit clairement. »

En disant cela, Jean-Luc Mélenchon assume de ne pas vouloir supprimer la Droite, simplement la concurrencer. Mais c’est anecdotique en comparaison avec son interprétation de la crise. Dans une interview du 5 mai à la Tribune de de Genève, il présente de la manière suivante la solution à la crise :

« La dette sera colossale à la suite de cette crise, et vous proposez le gel des dettes d’État. Comment?

J’ai le goût de l’histoire, et je sais que dans le passé jamais une dette d’un niveau pareil n’a été payée. Celle-là, personne ne pourra la rembourser non plus. Alors il y a quatre voies traditionnelles de sortie. L’hyperinflation: personne n’en veut. La coupe dans les dépenses: on vient de voir les conséquences sur les systèmes de santé publique. La banqueroute: c’est également une mauvaise idée, compte tenu des dégâts que ça provoque. Et enfin la guerre: cette page-là, nous l’avons tournée en Europe.

Donc votre proposition?

C’est la suivante. Toutes les dettes d’État que la Banque centrale européenne détient parce qu’elle les a déjà rachetées doivent être congelées. On les transforme en dettes perpétuelles sans intérêts. »

Ce que dit ici Jean-Luc Mélenchon est dramatique. Il a en effet tout à fait raison pur les quatre portes de sortie, mais il les interprète très mal.

* L’hyperinflation correspond à faire payer la crise par le peuple, en dévaluant son argent. Les couches supérieures de la société y échappent de par leurs grandes possessions de propriété et d’appareil productifs. Mais l’hyperinflation ne se décide pas, elle est provoquée par les faits. On peut la laisser courir, toutefois il n’y pas de bouton « hyperinflation ». Et ce n’est pas tant une sortie de crise qu’une expression de la crise.

* La coupe dans les dépenses vise à démanteler l’État qui coûte trop cher. Mais l’État est là surtout pour épauler les entreprises : croire que le pléthorique secteur public en France a une dimension socialiste, c’est croire aux élucubrations de la Droite ! Par conséquent pourquoi le capitalisme supprimerait-il ce qui l’épaule avec succès en France ?

* La banqueroute serait une « mauvaise idée ». Mais la banqueroute n’est pas une idée ! C’est une réalité objective, là aussi. Les faillites d’entreprises sont une conséquence d’un enrayement de la machinerie capitaliste. C’est un phénomène auquel on échappe pas dans une crise.

* Il y a enfin la guerre. Jean-Luc Mélenchon dit que cette page a été tournée en Europe. Il ferait bien d’aller voyager, quand ce sera possible, en Ukraine et dans les pays de l’ex-Yougoslavie. Il ferait bien également d’étudier les dépenses militaires françaises et grecques, tout comme de voir les cartes de la grande Hongrie largement diffusée indirectement par le gouvernement de Budapest. Et de toutes façons, la guerre, pareillement, ne se décide pas : elle se fait. C’est aussi un produit de la crise. Elle est inévitable à moins de renverser la direction de la société aux mains du capitalisme.

Alors, Jean-Luc Mélenchon trouve un joker : on gèle les dettes.

Est-il possible cependant de geler des dettes ? Ce dont rêve Jean-Luc Mélenchon, c’est de pouvoir aller au casino et de dire : vous allez me passer de l’argent jusqu’à ce que je gagne. Et on verra si je vous rembourse, on verra plus tard !

C’est évidemment absurde. Car le capitalisme veut plus, toujours plus. Là où il n’y a pas d’intérêt – et l’exploitation des ouvriers est un intérêt, sur leur travail – il n’y a pas de capitalisme. Encore est-il que dit comme cela c’est incorrect, car le capitalisme n’est pas un « commerce », mais une réalité productive. Il ne s’agit pas de « gratter » de l’argent en sous-payant les gens ou en escroquant à la vente. Il s’agit de classes sociales exploitées à grande échelle, dans un véritable système organisé.

Et Jean-Luc Mélenchon pense que ce système flotte dans le ciel, qu’il n’est pas réel et que, donc, on peut indéfiniment remettre une pièce dans la machine comme on met de l’essence dans une voiture. Pourquoi pense-t-il cela ? Parce que, comme François Hollande, il pense que la finance est quelque chose de virtuel. Il pense que la finance vit dans un monde parallèle, qu’elle ne représente pas quelque chose de réel, qu’elle est une sorte de fantôme parasitaire.

Il reprend ainsi les thèses du PCF des années 1970-1980 comme quoi cet argent en trop, flottant, doit être congelé pour être utilisé pour le système productif qui, lui, serait réel. Il y aurait un bon et un mauvais capitalisme, un capitalisme réel et un capitalisme virtuel. C’est pour cela que Jean-Luc Mélenchon raisonne en termes d’oligarchie, et pas de bourgeoisie. Pour lui les financiers sont une caste parasitaire. Ils doivent payer la crise et on va congeler une partie de leurs avoirs.

Seulement voilà, le capitalisme ce sont des classes, pas des castes. L’idéologie postmoderne raisonne en termes de castes : il y aurait la caste des Français de souche, des hétérosexuels, des personnes valides, des financiers, etc. Cela ne repose sur rien. Le capitalisme est un système unifié, avec des classes, il n’est pas un kaléidoscope avec des castes. Le capitalisme, ce n’est pas l’Inde britannique et post-britannique avec son bric-à-brac de castes et de découpages communautaires.

Le capitalisme, c’est deux classes, et des couches sociales penchant vers l’une ou l’autre. Les prostituées penchent vers la bourgeoisie, vivant en parasites sociaux, comme Rosa Luxembourg l’a bien souligné, les petits employés penchent vers les ouvriers, de par leur nature de travailleurs.

C’est pour cela que Jean-Luc Mélenchon a tort. Il pense qu’on peut réguler le capitalisme, l’organiser, l’encadrer. Ce n’est pas possible. Il est un tout et il est surtout un château de cartes en train de s’effondrer.

 

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Pas de « jour d’après » dans le béton

Il suffit de voir les réactions, les commentaires, les positions des uns et des autres pour s’apercevoir que l’idée se généralisant, c’est que tout va redevenir comme avant. C’est là le reflet pur et simple du capitalisme qui s’imagine inébranlable. Seule une Gauche « alternative », critique de la vie quotidienne, peut être à la hauteur des immenses enjeux. On ne peut pas imaginer « un jour d’après » sans assumer qu’il faut tout changer et supprimer tout ce béton qui engloutit l’humanité.

Même des gens très à gauche pensent que ce qui compte, c’est « le jour d’après ». Ce faisant, ils s’imaginent en rupture avec le capitalisme. Sauf que ce n’est pas vrai, au contraire. Considérer que le capitalisme va continuer comme avant, qu’il va reprendre là où il en a été, que tout cela n’a été qu’un intermède… tout cela c’est accepter ce que s’imagine le capitalisme lui-même !

Car le capitalisme s’imagine incontournable, seul au monde, existant pour l’éternité. Une grande partie de la Gauche l’a accepté elle-même puisqu’elle se présente désormais comme « anticapitaliste », ou encore « altermondialiste » pour utiliser un terme passé de mode. L’idée d’une société non capitaliste, c’est-à-dire socialiste… a littéralement disparu, ou presque.

Tout est pensé par rapport au capitalisme, à travers lui, contre lui si l’on veut, mais finalement jamais sans lui. Il y a un asséchement complet du sens de l’utopie. La preuve, c’est qu’il n’y a plus aucune considération esthétique. Or, qui pense à un monde de demain… pense à quoi il va ressembler, à comment on va y vivre, s’y épanouir.

Naturellement, quand on pense à tout cela, on imagine mal des abattoirs, des centrales nucléaires, du béton à n’en plus finir, des ronds points et encore des ronds-points. Voilà pourquoi les gilets jaunes ont bien été un mouvement réactionnaire : ils n’ont strictement rien proposé. Ils ne pouvaient pas. Leur identité n’a pas dépasse les ronds-points.

Pareillement, la majorité des jeunes se revendiquant très à gauche considère comme « populaire », authentique, alternatif, de manger des kebabs. Quant aux jeunes en général, le McDonald’s leur semble un lieu de paix sociale, un véritable havre paix communautaire, nullement un cauchemar civilisationnel.

Et comme, finalement, personne ne veut se remettre en cause dans sa vie quotidienne, il est bien pratique d’imaginer « un jour d’après »… qui soit seulement le jour d’après le jour d’hier, comme si aujourd’hui n’avait pas existé, comme si la crise sanitaire n’avait été que passagère, comme si elle n’allait rien changer, comme si elle ne pouvait rien changer.

On peut pratiquement deviner ce que les Grecs et les Romains avaient comme considération au moment de la fin de leur civilisation : strictement aucune. Ils pensaient que tout continuerait comme avant. Et les Français du début du 21e siècle sont pareils. Pour eux, le capitalisme n’a pas du tout atteint une limite, la bétonnisation du monde n’est pas en jeu dans tout ce qui se passe.

Il y a une incapacité fondamentale à avoir de l’envergure, à dépasser sa propre petite expérience. Le maximum atteint, c’est le rêve zadiste, qui ne diffère en rien du rêve de la petite propriété. L’idéologie de la petite propriété revient en force d’ailleurs, en se présentant comme un modèle idéal pour une période comme celle du confinement. Plutôt que de voir les drames d’une civilisation, on se focalise sur soi et on se veut bien tranquille dans un petit jardin !

Il faut tabler sur une nouvelle génération qui ne voudra pas périr en même temps qu’un modèle de civilisation qui a échoué, précisément parce qu’il a réussi !

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Le premier mai de la social-démocratie autrichienne

La distanciation totale n’a nullement empêché la social-démocratie autrichienne de prendre une initiative de grande envergure pour marquer le coup dans un contexte de crise. En assumant entièrement de se situer dans l’histoire du mouvement ouvrier et en n’utilisant aucune catégorie « postmoderne », le SPÖ tranche radicalement avec la démarche liquidatrice des socialistes français, mais même du PCF.

Le Parti Social-démocrate d’Autriche a réussi un tour de force pour le premier mai 2020. Prolongeant son initiative d’assumer un retour aux sources, il a développé une intense campagne pour le premier mai, malgré l’impossibilité de manifester. Le SPÖ a ainsi réalisé une campagne d’affichage « le premier mai, plus que jamais ! », des conférences de presse en ligne, une vidéo de plus d’une heure destiné aux « camarades », multiplié les appels, appelé les militants à envoyer des photos symboliques pour montrer l’engagement.

Légende : la tunique est celle de la Jeunesse Socialiste

Il y a même une playlist sur Soundcloud, avec des chansons d’avant 1945 au contenu donc entièrement rouge, la social-démocratie autrichienne de cette période assumant même d’être pro-URSS, qu’elle considérait comme socialiste, même si elle rejetait le bolchevisme comme modèle idéologique pour le reste du monde.

Pour ajouter dans la lecture incroyable de tout cela, chaque chanson a une présentation historique, expliquant le contexte dans le mouvement ouvrier alors.

Le SPÖ réactive tout un patrimoine qui n’attendait que cela, celui du poing levé le coude cassé, des drapeaux rouges avec les trois flèches dans le cercle… Dans la vidéo, pour leurs petits discours, les dirigeants commencent par raconter leur premier premier mai et il s’avère qu’il s’agit d’un événement datant de leur enfance, lorsque leur famille populaire les y a amenés !

La vidéo de plus d’une heure a comme particularité d’avoir été diffusé sur le site de la télévision autrichienne, car là est la particularité historique de la social-démocratie autrichienne, oscillant entre un soutien total à l’État existant et une identité totalement ancrée dans le mouvement ouvrier.

Car le SPÖ ne vaut pas « mieux » que le Parti socialiste en France. Il a été au pouvoir même encore plus longtemps, il est encore plus corrompu dans sa direction, il a soutenu pendant des décennies une cogestion étatique avec la Droite cléricale-réactionnaire.

Seulement, lorsqu’est arrivé le grand tournant, au même moment que le Parti socialiste en France grosso modo… la base ne s’est pas évaporée. Dans le Nord de la France, le PS a littéralement disparu, comme d’ailleurs dans la plupart des endroits, mais dans le Nord c’est d’autant plus choquant de par la tradition ouvrière qui y existait.

Le SPÖ a réussi à se maintenir pour deux raisons : déjà il a toujours assumé l’ensemble du parcours ouvrier, depuis 130 ans, se posant comme le prolongement, devenu réformiste. Il y a donc tout un patrimoine ouvrier présent à la base, tout un romantisme, si l’on veut. Ensuite, la ville de Vienne, historiquement ouvrière et socialiste, forme un bastion mêlant mouvements de masse, corruption importante finançant le SPÖ et les syndicats. Dans un pays où il n’y a absolument jamais de grève, le syndicat unique du pays (qui a des tendances politiques, le SPÖ étant en tête bien sûr) est richissime.

C’est une situation étrange, bien entendu. Et selon l’axe qu’on considère comme principal, on peut voir le SPÖ comme un phénomène fictif, ou bien au contraire comme une réactivation malgré tout d’une base populaire.

Cependant, si on prend la crise actuelle, on voit que le SPÖ se place admirablement bien, car il se pose comme le grand rempart social, même réformiste, face à toutes les conséquences pouvant arriver. C’est là un immense rempart au fascisme. Cela se limite en grande partie au bastion viennois, mais il n’en reste pas moins que la situation est totalement différente en France, où il n’y a pas que le Parti socialiste qui a capitulé : il y a sa base qui a fait de même, qui n’a rien reconstitué, qui s’est juste évaporé.

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Photos du premier mai de la social-démocratie autrichienne

Ne pouvant pas manifester en raison de la distanciation sociale, la social-démocratie autrichienne a demandé qu’on lui envoie des photos pour faire un petit book. Les photos sont de plusieurs types : il y a ainsi par exemple celles prises pour l’occasion ou celles reflétant un moment passé du mouvement.

Ce qu’on y voit toujours dans les choix faits, c’est une approche naïve et parfois pittoresque, mais toujours populaire, avec toujours au cœur… le Parti.

 

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Panorama des déclarations du premier mai 2020

Les organisations puisant leur identité dans le mouvement ouvrier font traditionnellement une déclaration à l’occasion du premier mai. Celui-ci fut très particulier, entre autre en raison de l’absence de manifestations possibles, toutefois la combativité dans une situation de crise n’en ressort que plus fortement.

Les déclarations du premier mai 2020 sont d’autant plus intéressantes que l’accent est mis sur des aspects très différents, suivant les mises en perspective des uns et des autres. Toutes adoptent le principe du « plus que jamais », cependant les options sont différentes.

Le Parti socialiste, soucieux de montrer qu’il se rattache à une certaine tradition, a mis en ligne trois questions-réponses sur le premier mai à Danielle Tartakowsky, historienne spécialiste des mouvements sociaux. Il y a eu également, de manière totalement inaperçue en fait, un communiqué commun avec notamment La France Insoumise, Génération-s, le PCOF, Ensemble !… exigeant que les libertés ne soient pas remis en cause et que le projet de réforme des retraites soit abandonné. Il est souligné que :

« Le temps est venu d’un monde plus juste, plus solidaire, plus égalitaire, dans laquelle l’être humain vivra en harmonie avec la nature. »

Cette sorte de réformisme-utopisme n’est pas du tout partagé par le Parti Communiste International, de tradition « bordiguiste », qui considère lui au contraire dans sa déclaration du premier mai que « le confinement sanitaire, qui dans le monde entier bloque contemporainement la consommation de tous les biens non véritablement nécessaires à la vie, amplifie la surproduction préexistante de marchandises et provoque le quasi arrêt des cycles infernaux de l’accumulation du capital ».

En clair, le capitalisme est rentré dans le mur, ce que disent aussi les maoïstes du PCF(mlm), pour qui c’est surtout une situation nouvelle parce que la « contradiction entre villes et campagnes » exprime une situation devenue explosive avec une « crise générale du capitalisme » produisant une nécessaire bataille contre « le 24 heures sur 24 du capitalisme » pour se mettre au service de la Biosphère.

Autre organisation se revendiquant de Mao Zedong, L’OCML-VP appelle à refuser le repli « nationaliste et chauvin » qui reviendrait à se mettre au service de la bourgeoisie. C’est l’internationalisme qui est déterminant. Dans une même approche d’encouragement à ne pas suivre les dominants, le ROC-ML a fait un court texte où il est expliqué que « la situation révèle en fait toute la décrépitude, toute la turpitude et le caractère criminel du système capitaliste ».

Le Parti Communiste Révolutionnaire de France se focalise une dénonciation du gouvernement mais aussi, au-delà, du régime, et met en valeur « les peuples de Cuba et de la RPDC (Corée du Nord), engagés dans l’édification de la société nouvelle et dans la lutte contre le Covid-19 tout en affrontant les sanctions et blocus imposés par les États-Unis, avec la complicité de leurs alliés de l’UE et de l’OTAN ». Le Pôle de Renaissance Communiste en France, qui vient pareillement de la gauche du PCF des années 1990 mais qui a conservé un pied dedans, a quant à lui réalisé un meeting numérique sur YouTube.

L’Union Communiste Libertaire a fait de même, mais sur peertube. Le NPA appelle à la mobilisation pour après le 11 mai, espérant reprendre directement à juste avant la pandémie. Lutte Ouvrière s’est contenté d’un texte très court n’abordant aucunement l’actualité ni la pandémie, rappelant juste d’où vient le premier mai.

Comme on le voit, on a deux tendances : ceux pour qui la lutte commencée avant la crise sanitaire va reprendre, et ceux pour qui on est passé ou on va passer à autre chose. Il y a en fait une grande fracture à Gauche, mais qui ne se verra que dans quelques temps.

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Premier mai: vive la Gauche historique!

En s’abattant sur le monde, le covid-19 a été une maladie qui a bousculé à peu près toute la vie quotidienne telle qu’on la connaissait. On peut même dire que l’humanité est profondément ébranlée dans ses certitudes. Quant au capitalisme n’en parlons pas, la machine est grippée. À quel prix va-t-elle redémarrer ? Et peut-elle redémarrer ? On va vers des temps troublés et seule la Gauche historique peut être à la hauteur… à moins de capituler et de considérer la guerre pour le repartage du monde comme seule issue.

Quand un pays est en crise, il n’y a pas 36 solutions. Soit on change tout, soit on ne change rien. Plus la crise est forte, plus l’exigence d’aller dans un sens ou l’autre est forte. Or, si les Français ne veulent pas vraiment y croire, toutes les personnes réalistes savent que la crise va provoquer une grande déchirure dans la société française.

L’idéal on ne peut plus français de la demi-mesure dont Emmanuel Macron est le représentant n’a donc plus guère d’espace. Or, on sait déjà que l’extrême-Droite était en embuscade. Tout risque d’aller donc encore plus vite… Que l’Allemagne encaisse le choc et ne voit pas arriver à court terme un Trump, un Poutine, un Erdogan, un Bolsonaro, un Boris Johnson, un Duterte, cela se conçoit.

Mais la France, elle, peut très bien basculer et on a déjà vu avec les gilets jaunes, ou depuis quelques semaines avec le professeur Raoult, comment le populisme est terriblement virulent. Comme de plus les syndicalistes récusent la politique, que l’armée a toujours plus d’ambitions, que les grandes entreprises ont des objectifs énormes aussi, que la situation mondiale se tend… on peut imaginer le pire.

En fait, on est revenu aux années 1930. On avait un pied dedans, là on y est entièrement. Le jour d’après des populistes, cela sera bien plutôt un jour d’avant. On prend un militaire de très haut rang, il se présente comme au-dessus des partis, ni de droite ni de gauche, tout comme le fait la revue que lance en juin Michel Onfray, « Front populaire ».

Il prétend ne faire que rétablir la sérénité et l’ordre, pour que les choses avancent. Tout est présenté comme nécessaire, allant de soi. Les Français en ont l’habitude, avec Napoléon Ier, Napoléon III, Pétain en 1940, De Gaulle en 1958. Les coups d’État sont toujours passés comme une lettre à la poste.

Seule la Gauche historique peut former un contre-courant, parce que seule la Gauche historique ne fait pas confiance au régime en place. La gauche gouvernementale a accepté la Ve République, qu’elle considérait pourtant auparavant comme un régime d’autoritaire né d’un coup d’État : elle a trahi. Et on paie cher le prix de cette trahison.

Naturellement, le souci est que la gauche non gouvernementale est souvent velléitaire, symbolique, d’autant plus radicale qu’elle sait très bien qu’elle n’aura jamais à prendre aucune responsabilité. Philippe Poutou et Olivier Besancenot ont une image sympathique, surtout le premier. Mais personne ne les voit en ministre.

Il faut ainsi une Gauche historique qui soit à la hauteur du défi. C’est la seule solution. Croire qu’une alternative à la tendance au régime autoritaire, militariste… au fascisme, à la guerre, soit possible en évitant le mot « bourgeoisie », c’est se tromper et tromper les gens.

C’est pourquoi le premier mai, journée du mouvement ouvrier, il faut dire : vive la Gauche historique, qui elle seule représente l’avenir dans une perspective positive !

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11 mai: la stratégie dangereuse de la responsabilité individuelle à la française

Une nouvelle fois, le premier ministre a endossé la casquette du bad cop, de l’empêcheur de déconfiner en rond dans son intervention du 28 avril, alors que les Français immatures s’imaginaient pouvoir tout reprendre comme avant à partir du 11 mai. Seulement, le bad cop en question n’a aucun moyen, ni politique, ni matériel, ni structurel, et il s’en remet à la « responsabilité » individuelle pour espérer éviter une seconde vague de contamination. C’est un choix par défaut qui s’avère très dangereux, risquant par là de faire payer de nombreuses personnes âgées et fragiles du prix de leur vie.

Édouard Philippe a eu le mérite hier de couper court à un certain nombre de fantasmes : celui de la reprise des matchs de football, du retour immédiat à la plage, des mariages, des week-ends dans la famille lointaine, etc.

Le 11 mai ne sera qu’une étape et les restrictions seront encore importantes, la date du 11 mai n’étant d’ailleurs plus une promesse (comme l’avait faite le cynique Emmanuel Macron), mais un objectif soumis à des critères précis. Il doit y avoir un plan massif de dépistage et de recensement de l’entourage des personnes contaminées, avec du personnel non-directement médical mobilisé pour assister cette organisation de grande ampleur.

Les masques seront obligatoires dans les transports en commun, qui auront l’obligation de fermer un siège sur deux et de prévoir une distance entre les passagers, l’offre de transport national sera maintenue à un niveau faible, les parcs resteront fermés dans les régions les plus durement touchées, les rassemblements de plus de 10 personnes, privés ou publics, seront prohibés, il ne sera pas autorisé de se déplacer à plus de 100 kilomètres sde son domicile.

Ce sont des mesures importantes, cohérentes avec la situation sanitaire, mais largement insuffisantes. Le premier ministre, comme il l’a très bien exprimé, a tout à fait conscience du risque de circulation massive du virus après le 11 mai, mais il n’a pas les moyens d’assumer toutes les mesures nécessaires, ni d’encadrer véritablement celles qu’il prend. Il s’en remet donc aux choix individuels, à la « responsabilité individuelle » sur laquelle il a beaucoup insisté.

C’est un aveu de grande faiblesse de la part de l’État, contraint de céder face à la pression grandissante de pans entiers de la société prêts à sacrifier les personnes les plus fragiles. Les personnes de plus de 65 ans d’ailleurs, devront se débrouiller pour « choisir » comment continuer à se protéger du mieux possible, alors qu’on l’aura compris le reste de la population pourra quasiment sans contrainte prendre le risque de faire circuler le virus de manière importante en ne respectant pas ce qui ne relèvera finalement que de recommandations.

Pour se dédouaner de la faiblesse de son plan, le premier ministre a beaucoup parlé des acteurs « locaux » ou de « terrain », à qui il veut « laisser le maximum de souplesse ». Cela signifie par exemple que les commerçants auront le choix d’interdire ou non l’accès de leur magasin sans masque, tout comme les parents celui d’envoyer leur enfant à l’école ou au collège, celui des départements ou des mairies d’ouvrir les établissements, etc.

De la même manière, les préfets se voient confier des responsabilités immenses pour gérer à leur sauce dans leur propre département. Cela les rendra très vulnérables aux multiples pressions locales poussant à déconfiner au maximum, surtout dans les régions les moins touchées. Ainsi, le maintien de la fermeture des grands centre commerciaux à envergure régionale annoncée par Édouard Philippe pour limiter la circulation des individus est une très bonne chose, mais elle sera à la discrétion des préfectures. Tout comme finalement un certain nombre de restrictions, qui pourraient être levées localement, progressivement, etc.

Le risque est donc immense dans ces conditions de voir une seconde vague de contamination, et c’est ce qui pend au nez d’une France culturellement libérale, voire libérale-libertaire. Les gens n’ont pas de patience, pas de moralité, pas de conscience des besoins collectifs, et si cela est dit de manière ici trop unilatérale, cela reste tendanciellement vrai.

Les Français restent dans la mesure, dans un éternel entre-deux, qui convient très bien au capitalisme pour tout se permettre et tout faire passer, mais lorsque le défi collectif est obligatoire, alors forcément on va dans le mur…

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Décès de Henri Weber, figure socialiste issue des JCR et de la Ligue Communiste

Figure du courant trotskiste frankiste-pabliste, Henri Weber a ensuite rejoint le Parti socialiste dont il a été un des principaux stratèges à partir des années 1990. Il vient de décéder des suites du covid-19.

Surréaliste. Alors que Henri Weber est décédé en raison du covid-19, Gala titre un article « Carla Bruni a le cœur brisé : son touchant hommage à Henri Weber ». C’était en effet un de ses amis très proches. Comment Henri Weber a-t-il pu se transformer au point de devenir une figure de la « Gauche » la plus bourgeoise, la plus hypocrite ?

Car Henri Weber, c’est un des cadres rompant avec l’Union des Étudiants Communistes pour fonder les Jeunesses Communistes Révolutionnaires, juste avant 1968, dont lui-même est une figure. Les JCR, une structure frontiste trotskiste, donna la Ligue Communiste, au service d’ordre éprouvé dont Henri Weber sera le fondateur et le responsable.

> Lire également : Henri Weber et mai 1968

Seulement voilà, Henri Weber s’est fait happer par la faculté expérimentale de Vincennes, un bonbon sucré empoisonné donné par l’État. Il devint professeur de philosophie politique, aux côtés de Daniel Bensaïd. Ce dernier, l’un des dirigeants historiques des JCR puis de la Ligue Communiste (et la Ligue Communiste Révolutionnaire), descendra pourtant en flamme Henri Weber dans un long texte en 1998, que le NPA, successeur de la Ligue Communiste Révolutionnaire, s’est empressé de republier.

Car Henri Weber a assumé de tourner la page du « gauchisme ». Lorsqu’il a été à la tête du service d’ordre, la Ligue Communiste s’orientait vers la clandestinité et l’affrontement militaire. Le film « Mourir à trente ans » raconte cet épisode de manière romantique, en gommant que les JCR ne sont pas nées spontanément mais comme « front » trotskiste. Or, ce front n’hésitait pas à saluer Che Guevara et Ho Chi Minh, au grand dam des trotskistes historiques.

C’était l’expression d’un romantisme gauchiste que les JCR surent capter, mais la tendance alla donc au guévarisme, au principe du foyer révolutionnaire (aujourd’hui encore, on retrouve le principe foquiste chez des postmodernes se revendiquant paradoxalement de Mao Zedong, ce qui est absurde). L’interdiction de 1973, pour de violents affrontements avec l’extrême-Droite, fit abandonner cette direction et la Ligue Communiste devenue Ligue Communiste Révolutionnaire s’orienta vers une sorte de néo-syndicalisme avec une grande ouverture aux « mouvements sociaux » et un soutien total aux mœurs libérales-libertaires.

L’objectif si ambitieux disparu, il fallait soit assumer de vouloir la guerre révolutionnaire et tout relancer, soit continuer en passant à autre chose en considérant que l’époque avait changé. Henri Weber rompit alors avec la LCR, abandonnant la politique au début des années 1980 avant de rejoindre le Parti socialiste en 1986, tout comme d’ailleurs un trotskiste d’une autre faction, Jean-Christophe Cambadélis.

Henri Weber sera alors un cadre socialiste, comme conseiller technique au cabinet de Laurent Fabius à la présidence de l’Assemblée nationale, chargé de mission de ministres chargés des relations avec le Parlement, sénateur, député européen. Il deviendra d’ailleurs à partir de la fin des années 1990 l’un des principaux stratèges du Parti socialiste.

Il a été une figure du passage du Parti socialiste sur une ligne post-socialiste, post-moderne ; François Hollande l’a d’ailleurs salué avec chaleur :

« Henri Weber était une grande et belle figure de la gauche. Il ajoutait à son érudition une clarté d’analyse, un goût de l’action et une fraîcheur militante avec un humour joyeux qui enchantait jusqu’à ses contradicteurs.

Venu du mouvement de mai 68, il avait rejoint le Parti socialiste car il savait que la Gauche avait besoin d’une force centrale pour aspirer à gouverner. Il y a encore quelques semaines il appelait à un dépassement pour renouveler la social-démocratie que la crise sanitaire qui l’a emporté remet au cœur du débat public.

C’est un homme généreux et un intellectuel lumineux qui disparaît aujourd’hui. Et aussi un ami cher.

J’adresse à Fabienne et à ses enfants mes sentiments affectueux. »

La photo mise par François Hollande présente d’ailleurs Henri Weber à l’arrière-plan alors que lui-même fait face à Lionel Jospin. C’est tout un symbole, Henri Weber résumant mai 1968 à une révolte « démocratique et libérale » et tournant totalement le dos à son passé révolutionnaire. Paradoxalement, son choix a été plus marquant que celui de la LCR, qui s’est effondrée en devenant le NPA, faisant du sous-Henri Weber, car au moins Henri Weber a assumé de passer à autre chose.

Reste que tout cela ne fait pas bien rêver et qu’on chercherait vainement un contenu. On a ici affaire à un social-romantisme n’allant somme toute pas bien loin, qu’il soit ouvertement réformiste ou bien à prétention transformatrice.

> Lire également : Polémique Edwy Plenel-Henri Weber sur les gilets jaunes
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Pourquoi les entreprises autrichiennes ont-elles des masques et pas l’État français?

C’est un paradoxe marquant. Depuis le 6 avril, les commerces autrichiens de la grande distribution distribuent des masques aux clients, de manière gratuite. Comment font-ils alors que l’État français souffre terriblement pour s’en procurer ?

Que ce soit au magasin bio ou au supermarché, on obtient en Autriche un masque à l’entrée. Pour ajouter au cliché autrichien de la méticulosité germanique maniaque et parfois pittoresque, il y a des désinfectants pour les mains, les barres des chariots ou des paniers en plastique qui sont désinfectés. Les clients ont parfois des masques et… n’en demandent pas un autre pour en stocker, tout en respectant la distanciation sociale.

La situation ne serait pas dramatique, on rirait presque devant un portrait si tranchant avec le mentalités françaises et les moyens français. Mais comment diable des entreprises d’un petit pays d’Europe centrale ont-elles réussies à importer des dizaines de millions de masques là où l’État français souffre le martyr en espérant être prêt le 11 mai 2020 ?

Plusieurs économistes libéraux en font un cas d’école. Ils profitent de cet exemple pour expliquer que le capitalisme est plein d’initiatives, alors que l’État est par définition bureaucratique. Par conséquent, une foule de petites entreprises réussissent de par leurs activité là où une structure centralisée échoue forcément. Lorsqu’il y a la loi mise en place, il aura donc fallu simplement quelques jours aux entreprises pour être prêtes.

C’est là un véritable conte de fée capitaliste, digne du rêve américain. Car on parle là d’un capitalisme particulièrement monopolisé. Les commerces de la grande distribution relèvent de véritables mastodontes. Spar est un monstre néerlandais de plus de 13 000 magasins dans 48 pays, dont plus de 1500 en Autriche. Rewe est un géant allemand encore plus grand, avec des supermarchés et du tourisme, pour un chiffre d’affaires de plus de 50 milliards d’euros !

Il s’avère simplement que de tels monopoles parviennent à agir davantage que l’État français. Cela correspond à une situation où quelques monopoles mondiaux s’avèrent toujours plus puissants et cela même que des États. On s’imagine même que ces États passent sous leur coupe en partie ou totalement. L’État chinois est aux mains de tels monopoles, mais aux États-Unis on sait que c’est pareil.

En Autriche, il y a pareillement un tel monopolisme. Si les rapports sociaux sont totalement pacifiés, au point qu’il n’y a jamais aucune grève, il y a une infime minorité ultra-riche, vivant dans une bulle, dont le propriétaire de Red Bull est un exemple assez représentatif. Il y a énormément des droits sociaux, un vrai capitalisme par en bas, une administration étatique efficace, mais à un autre niveau tout est corrompu, tant par les mafias que les monopoles. C’est cependant invisible, très propre, parfaitement rôdé. C’est cette situation qui explique le succès des populistes.

La France a pourtant également des monopoles. Cependant, la situation est totalement différente. En Autriche, les rapports sociaux sont pacifiés de manière totale, ce qui se concrétise sous la forme d’un deal : il n’y a jamais de grèves et en échange on accorde aux travailleurs un certain niveau de vie. C’est la même tendance en Allemagne, même si en un tout petit peu moins réussi. En France les monopoles ne sont pas dans un tel esprit de compromis. La démarche est d’arracher autant que possible, les syndicats font pareil et tout le monde s’accorde sur un compromis plus ou moins bancal.

L’Autriche de la cogestion est ainsi un enfer pour qui veut changer les rapports sociaux et la France inversement un paradis… En apparence. En réalité, une Gauche très forte existe en Autriche, avec une tradition ouvrière puissante et un prolongement sous la forme des agitations autonomes à l’extrême-gauche plus ou moins soutenu en sous-main. En France, on a l’apparence de la contestation mais tout sert en réalité une cogestion indirecte, due à la faiblesse des syndicats et à la pacification sociale ouverte.

Là où par contre la situation est différente, c’est qu’en cas de crise, forcément la cogestion ouverte encadre jusqu’au bout, tandis que dans la cogestion indirecte il n’y a pas de partenaires, pas de terrain de neutralisation des conflits sociaux. Évidemment, un petit pays comme l’Autriche, satellite de l’Allemagne, peut se permettre une telle démarche. La France, avec ses incroyables ambitions, est perpétuellement obligé de forcer, de vivre au-dessus de ses moyens.

C’est là l’arrière-plan de toute cette question des masques. Et cela montre que la situation devient toujours plus compliquée, qu’il faut une grille d’analyses bien développée pour comprendre ce qui se passe. Et ce n’est qu’un début !

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Jean-Christophe Cambadélis propose une Gauche de l’intégrité humaine

Jean-Christophe Cambadélis, figure historique de la Gauche – il a été à la tête de l’Unef-ID et premier secrétaire du Parti socialiste – a publié une longue lettre sur la Gauche de demain. Mais il croit que le monde de demain sera le même.

Jean-Christophe Cambadélis est l’un des observateurs les plus précis et techniques de ce qui se passe en France, aussi faut-il accorder son attention à sa lettre à un ami de gauche. Il y reprend ses thèses de 2017 pour un « nouveau progressisme » et prône une gauche « girondine », c’est-à-dire, pour traduire cela de manière contemporaine, non centralisatrice et rétive aux démarches autoritaires.

Cela est d’autant plus étrange que lui-même avoue qu’une nouvelle époque s’ouvre :

« Le siècle commence aujourd’hui, comme le précédent avait débuté avec l’assassinat le 28 juin 1914 de l’archiduc François Ferdinand de Habsbourg ouvrant un siècle de guerres, de révolutions ou de décolonisations. Les siècles s’ouvrent toujours sur des drames. Car l’histoire humaine est dramatique. »

Seulement, pour Jean-Christophe Cambadélis, qui est qu’on le veuille ou non corrompu par le capitalisme, rien ne peut vraiment changer. Ainsi, si le gouvernement actuel échoue, alors forcément ce sera au tour de la Gauche si elle se présente comme assez crédible :

« La gauche peut pour une fois penser le monde et ne pas seulement le panser. L’Homme, l’intérêt commun, devient l’espace d’un instant supérieur à l’économie et la société marchande. Et, pour la France confinée, l’échelle des valeurs a changé. »

Jean-Christophe Cambadélis est pourtant tout sauf un naïf alors comment peut-il penser quelque chose d’aussi basique ? C’est que son raisonnement est, comme à son habitude, subtil, très subtil, trop subtil. On a ici le même machiavélisme que chez Jean-Luc Mélenchon, avec une tradition trotskiste de calculs de rebonds par la bande à n’en plus finir.

Ce que veut dire simplement Jean-Christophe Cambadélis, c’est qu’il faut réussir justement ce que Jean-Luc Mélenchon n’est pas réussi à faire : établir une proposition suffisamment construite pour dépasser les concurrents.

En se la jouant « mesuré » et gestionnaire, avec un humanisme bon teint, cela suffira à dépasser toutes les autres tendances politiques :

« National-populiste, libéral-autoritaire, libéral-libertaire, gaullisto-souverainiste, écolo-libéral ou écolo-rupturiste, gaucho-populiste, les offres ne manquent pas.

La gauche doit, elle, proposer son nouvel axe : elle doit se présenter avec son nouveau drapeau. La social-démocratie attendait les dividendes de l’État providence. La nouvelle gauche doit mettre l’intégrité au cœur de la production du marché et des échanges. »

Cela ne tient bien entendu pas debout. Car soit il a tort et à ce moment-là le chaos qui va s’installer va amener à une polarisation où il sera enfin parlé de capitalisme, terme que Jean-Christophe Cambadélis s’évertue à ne jamais employer (à part pour dire une seule fois « le système capitaliste libéral s’arrête ; le confinement est mondial »).

Soit il a raison mais alors avec ce concept de « gauche de l’intégrité humaine » autant assumer de défendre la position de Benoît Hamon, qui dit la même chose depuis plus longtemps, ou bien François Hollande pour une version plus édulcorée.

Et puis quel sens y a-t-il pour Jean-Christophe Cambadélis à parler de « l’Euro-Méditerranée » qui serait « nécessaire à une Euro-Afrique », franchement ! C’est là de la « géopolitique » qui ne fait même pas semblant d’assumer les velléités impériales françaises.

On a connu Jean-Christophe Cambadélis plus inspiré. Mais sa source d’inspiration s’est tarie, car le terrain a totalement changé et ce n’est plus le sien. Sa mise en perspective est trop calme, trop posée, trop mesuré, pour ne pas être en total décalage avec l’Histoire. Dire comme il le fait qu’une ère nouvelle s’ouvre et se contenter de dire qu’il va suffire de réguler le marché sur la base de l’intégrité humaine, c’est flou, idéaliste, abstrait, hors-sol.

Et ce n’est pas de Gauche. Le mouvement ouvrier nomme les choses comme elles sont. Qui fait tout pour ne pas parler du capitalisme et de la bourgeoisie avait tort ; avec la crise actuelle, il a encore plus tort. Tout s’effondre, la nature subit des assauts toujours plus majeurs, les capitalistes vont faire payer la crise aux travailleurs, et il faudrait penser qu’une Gauche néo-gouvernementale pourrait rétablir le monde d’avant, qui par ailleurs était odieux ?

C’est invraisemblable.

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Résilience commune: une plateforme participative lancée par des organisations jeunesses liées à la Gauche

Des dirigeants de Jeunes Génération·s, de Jeunes Écologistes, de Jeunes Socialistes et de l’Union des étudiants communistes ont publié une tribune lançant une plateforme participative pour trouver des « solutions » aux « crises contemporaines ». Si l’introduction de la tribune rédigée par Politis (qui publie initialement le texte) parle de « Gauche », il n’en est en fait pas question dans le texte, ni sur le site de la plateforme.

Le texte lui-même semblera pour beaucoup de monde très naïf, ne faisant finalement que reprendre l’habituel discours « antilibéral » (en économie) des années 2000. On retrouvera néanmoins sur la plateforme ( resiliencecommune.fr ) beaucoup de textes, avec cette idée de converger vers quelque chose politiquement, pour changer les choses. Le fait de ne pas s’assumer de « Gauche » semble toutefois être un facteur limitant de la démarche, bloquant les choses à un niveau très restreint sur le plan idéologique, et plus généralement en terme politico-culturel. Rien que la notion de résilience d’ailleurs, renvoie plus au zadisme ou à la « décroissance », qu’à la gauche historique, au mouvement ouvrier.

Voici le texte présentant la plateforme :

« Pour une résilience commune

La pandémie du coronavirus nous montre l’échec dramatique des politiques libérales. C’est l’un des symptômes d’un système à bout de souffle, traversé par de nombreuses crises : sanitaires, démocratiques, économiques, sociales, culturelles et environnementales. Une majorité de Françaises et Français aspirent à un autre monde. Un monde où nous retrouverons notre souveraineté collective, où nous dépasserons la société de marché en rompant avec le productivisme. Un monde où nous protégerons les biens communs indispensables à toutes et tous. Nous, jeunes militant·es politiques et associatifs de la génération climat, lançons la plateforme Résilience commune pour accompagner cet espoir.

Nous refusons qu’après la crise du Covid-19 tout recommence comme avant. Nous ne prétendons pas détenir la vérité, mais c’est bien parce que l’avenir nous appartient qu’il nous est inconcevable de laisser celles et ceux qui depuis des années dégradent nos conditions d’existence décider du monde dans lequel nous vivrons demain.

Le coronavirus oblige nos sociétés à questionner en profondeur notre modèle économique et social. Les conséquences des politiques néolibérales sont désormais flagrantes : socialement et écologiquement destructrices, ces politiques sapent les sécurités et solidarités collectives qui nous permettent de rebondir lors des chocs. Pour échapper à un scénario de crises à répétition, il devient impératif de construire un modèle de société radicalement différent.

De multiples propositions et initiatives surgissent de l’arc écologiste et humaniste : nous constatons que des lignes de force unissent ces prises de position. Nous pensons que ces réflexions développant une transformation radicale de notre société constituent les prémices d’une action commune.

Pour rendre visible cette vision partagée, nous voulons recenser ces propositions sur notre plateforme Résilience commune, qui se destine à être un lieu d’expression, d’échange et de synthèse sur la construction du « monde d’après » par les forces écologistes et humanistes. En plus de centraliser les idées et propositions déjà rendues publiques, notre plateforme est accessible à chaque personne souhaitant y publier des textes proposant des réponses à nos crises contemporaines. À partir de cette cartographie des idées et initiatives, nous, jeunes engagé·es, proposerons un plan d’action pour l’avenir.

Aujourd’hui nos divisions sont l’assurance-vie des néolibéraux et des grands capitalistes qui cherchent à faire perdurer leur monde et leurs privilèges. Cette pandémie mondiale est un point de bascule capable de catalyser de grands changements politiques, mais cela nécessitera une immense mobilisation citoyenne, associative et politique.

Nous devons porter la transformation de notre société et contribuer à la création d’une force politique en capacité de la mettre en œuvre. L’écriture de ce projet ne peut se faire que de manière collective et participative. Nous appelons donc chacune et chacun à proposer leurs contributions sur notre site. Face aux crises nous répondons par les idées, face au délitement nous bâtissons l’union. »

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L’irruption d’une profonde crise dans les cités populaires

Le confinement provoque une crise économique, une crise culturelle, une crise politique de ce qu’on peut appeler, même de manière imprécise, les cités populaires. L’esprit rebelle de 2005 a totalement disparu et c’est un mélange de nihilisme et de consumérisme qui prédomine et s’embrase, isolant encore plus ces secteurs populaires du reste du peuple.

L’échec des émeutes de 2005 pèse lourdement sur les cités populaires. Ces émeutes avaient été considérées (pas par la gauche gouvernementale ni même l’extrême-gauche dans sa quasi totalité) comme un pas en avant dans un certain esprit de rupture par des gens espérant qu’enfin en France la lutte des classes reprenne, avec le retour de la question sociale.

Ne nous voilons pas la face, malgré le caractère totalement isolé du phénomène dans le pays, la Gauche se cachait derrière un ministère de l’Intérieur qui, lui, ne décida même pas de l’état d’urgence, comprenant que ce n’était que passager et sans contenu. Qu’allait-il toutefois en ressortir ?

Rien, malheureusement. Les religions se sont largement développées sur le terreau de la défaite culturelle. Le trafic des drogues qui s’est renforcé massivement en parallèle a entièrement gangrené des secteurs populaires entiers.

Les récents accrochages et harcèlement de ces derniers jours, qui concernent environ 50 villes, reflètent cette tendance au triomphe du cannibalisme social. Cette nuit du mardi au mercredi a encore été marquée, en région parisienne, à Lyon, Mâcon ou Tourcoing d’incidents au sens très large.

 


Le pays regarde cela avec naturellement un regard terriblement critique : en plein confinement, il y a de telles actions ! Et tout le monde sait que dans ces cités populaires marginalisées, les comportements anti-sociaux se sont généralisés, dans un style patriarcal mêlé d’esprit lumpen. Que les valeurs identitaires se sont installées, alors que la dimension sociale-révolutionnaire indirectement sous-jacente aux travailleurs immigrés a disparu.

L’immense queue pour le drive de McDonald’s venant de rouvrir témoigne de cette plongée dans le consumérisme et le nihilisme. Car en même temps, ces cités populaires sont des appuis très clairs à toute une philosophie capitaliste, une volonté de s’en sortir par le business, voire même le cannibalisme social.

 


L’ultra-gauche développe bien entendu une rhétorique anti-policière primaire, sans voir naturellement que bon nombre de policiers sont désormais issus du peuple et l’assument. Finie l’époque où la police était une caste entièrement séparée du peuple. C’est encore vrai en partie, mais dans les grandes lignes c’est terminé et cela ne distingue qu’encore plus les policiers des gendarmes.

Il ne faut évidemment pas pour autant s’attendre à ce qu’avec l’État actuel, les policiers ne soient pas aliénés par leurs fonctions, alors que leurs dirigeants sont extérieurs au peuple, quand ils ne sont pas même corrompus par les mafias. Reste que faire de la police l’alpha et l’oméga des questions de notre époque n’a aucun sens.

On peut d’ailleurs dire que si la révolte de 2005 a été une affirmation réformiste, un appel à l’aide avec des traits sociaux-révolutionnaires, on est actuellement dans une déliquescence totale, une expression d’une aliénation complète, totalement masculine et ouvertement liée au cannibalisme social.

C’est une crise énorme pour les cités populaires, mais une crise salutaire car de l’échec de l’expression nihiliste, après l’échec de la proposition stratégique islamiste, doit venir la recomposition populaire, inévitable.

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En plein confinement, la France expulsera-t-elle un opposant vers la Turquie?

La France a toujours pratiqué une politique très particulière envers les opposants au régime turc. Arrestations coup de poing, condamnations, le tout sans que la presse n’en parle jamais. D’où l’option, malgré le confinement, d’expulser un opposant vers la Turquie.

La Turquie connaît depuis les années 1960 des coups d’État, des interventions périodiques de l’armée et de la police à tous les niveaux de la société, jusqu’à des vagues de torture et de disparitions. Être de gauche implique donc une motivation très forte, tout un certain romantisme.

L’État français applique une ligne toujours très claire sur ce plan : une répression complète, systématiquement passée sous silence. Un aspect important historiquement est également la pression américaine et allemande, en raison des importants intérêts de ces pays en Turquie.

Sefik Sarikaya s’est donc confronté à une machinerie administrative et policière implacable. Parmi les nombreuses péripéties, on a une arrestation en 2008, une remise en liberté conditionnelle au bout de plus d’un an puis en procès en 2012 avec une condamnation à une peine de 8 ans au moyen du fameux « association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste ». Prenant la fuite et rattrapé en 2016, le voilà libéré ce 21 avril mais le juge l’a prévenu : il sera expulsé vers la Turquie.

Il va de soi que les opposants en France au régime turc, dont le Comité des libertés, sont vent debout, et avec raison. La France a une politique non seulement malsaine, mais même criminelle. Il faut bien comprendre qu’il s’agit là d’un monde parallèle. Sachant que l’opinion publique ne sera jamais au courant, que la Gauche ne parlera jamais des opposants au régime turc, les juges font ce qu’ils veulent, parfois avec des provocations incroyables.

C’est le règne de l’arbitraire, de l’association de malfaiteurs en veux-tu en voilà. C’est pratiquement une juridiction parallèle et cela depuis les années 1980 !

La question qui se pose n’est évidemment pas de savoir si les opposants sont, ou pas, coupables de ce dont on les accuse. On ne peut pas voir les choses ainsi, en effet. Ce qui compte, c’est la Turquie. Est-ce un pays démocratique ? Certainement pas. Partant de là, on ne peut pas juger les opposants au régime turc selon des critères franco-français… Et encore moins selon les critères de la défense des intérêts économiques capitalistes.

Il faudrait d’ailleurs une commission montée par la Gauche pour réétudier toute cette histoire de répression depuis le début des années 1980. Mais cela n’arrivera pas, bien sûr, car la Gauche gouvernementale a totalement accepté cette répression quand elle était au poste de commande. Elle a elle-même accepté le silence total à ce sujet.

C’est que, bien entendu, cela l’arrangeait également de ne pas poser des questions de fond sur la nature d’une régime politique, les principes de l’engagement, l’unité de la Gauche, la définition de la démocratie, le rapport aux luttes populaires, etc.

Et cette gauche gouvernementale, fuyant la vérité, s’est d’autant plus enlisée dans l’esprit gouvernemental, jusqu’à perdre entièrement tout contenu, même symbolique.

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1er mai: l’appel de la CGT et de l’ultra-gauche à manifester virtuellement

Cela fait plusieurs années que la CGT et l’ultra-gauche pratiquent l’agitation velléitaire et l’échec du mouvement contre la réforme des retraites les a terriblement affaiblis. Avec la crise sanitaire, il y a la peur de disparaître – et effectivement la politique va reprendre ses droits. D’où la tentative d’appeler à… manifester le premier mai sur les réseaux sociaux, certains groupes sociaux appelant même à manifester physiquement, d’autres à manifester dès le lendemain de la fin du confinement. Comme si tout allait recommencer comme avant…

Voici l’appel de la CGT, de la FSU et de Solidaire, ainsi que de l’Unef et d’organisations lycéennes :

 

« Plus que jamais le 1er Mai,

Alors que le monde entier fait face à la pandémie, ce premier mai sera plus que jamais la journée internationale de luttes des travailleuses et travailleurs.

Depuis le début de la crise sanitaire, des millions de personnes sont confinées. De nombreux pays vivent grâce aux oublié-es, aux invisibles de nos sociétés, qui continuent à travailler, le plus souvent au risque de leur propre vie.

Évidemment ce sont d’abord l’ensemble des personnels de santé qui n’ont pas comptées leurs heures, leur dévouement. Ensuite il y a tous les salarié-es, souvent des femmes, du commerce, de l’agro-alimentaire, du paramédical du social, du nettoiement…, ainsi que tous-tes ces agent-es de la fonction publique qui ont continué d’assurer leurs missions de service publics, et plus largement ceux et celles qui travaillent au service de la population.

Les paroles de reconnaissance des gouvernements n’ont pas été suivies d’actes forts. Les mots sont évidemment insuffisants pour exprimer notre colère, et notre détermination à faire changer les choses. Nous porterons ce 1er mai 2020, bien que confiné-es, les revendications qui sont plus que jamais d’actualité :

Car sacrifier la santé des travailleurs-ses n’est pas admissible :

Si la « reprise » de la vie sociale, dont le travail fait partie, est une espérance, une nécessité pour beaucoup d’entre nous, (et pour d’autres plus pour remettre leur profit à l’ordre du jour), cela ne peut se faire sans la garantie la plus absolue de la sécurité de chacun, chacune, ainsi que celle de ses enfants. La santé, la sécurité, le droit de retrait, de grève, le droit syndical doivent être respectés !!

Car sacrifier les droits des travailleuses-eurs sur l’autel de l’économie n’est pas tolérable et ne pourra continuer quelle que soit la situation :

Des semaines à 60 heures de travail, la perte des congés, des jours de repos, le travail dominical étendu, les abus sur le télétravail ne sont pas légitimes et ne peuvent durer ! Ce n’est pas une prime donnée au bon vouloir du patron, ou de l’employeur public, une aide ponctuelle aux plus modestes qui suffiront aux travailleurs-euses : ce sont de vraies revalorisations salariales du SMIC et des salaires en particulier dans les conventions collectives où ils sont les plus bas, tout comme dans la fonction publique !

Sacrifier les plus précaires d’entre nous n’est pas admissible dans une société d’égalité et de solidarité :

Vacataires, intérimaires, intermittent-es, services civiques, la précarisation des travailleur-euses s’est multipliée ces dernières années, et la situation des chômeur-euses et étudiant-es a été dégradée, tout comme celle des sans-papiers aujourd’hui ignoré-es sur le plan sanitaire comme social.

Elles et ils payent le prix fort de la situation, et les inégalités sociales explosent. Le manque d’investissement au niveau de la santé, la réforme de l’assurance chômage, le projet de réforme de la retraite pas points, mettent à mal la protection sociale, laquelle est un socle protecteur.

De plus, le développement des services publics est nécessaire et indispensable pour assurer l’égalité et répondre aux besoins de la population. De nombreuses aides sont prévues pour les entreprises, alors que pour ceux et celles qui sont dans les situations difficiles, elles restent mineures. Il faut permettre la suspension des loyers et des dépenses de toute l’énergie, une aide pour l’accès à internet et aux transports, car nous savons que si la crise sanitaire peut régresser, la situation économique et sociale va continuer à faire des dégâts.

Cette situation inédite, qui peut malheureusement perdurer et/ou continuer, a remis en lumière l’essentiel : Un hôpital et un système de santé publique avec de vrais moyens humains, matériels, financiers, un système de protection sociale large tout au long de la vie, des services publics qui ne sont pas sacrifiés par des politiques de restructurations, suppressions au bénéfice des appétits de ceux qui prospèrent dans ce système capitaliste !

Le 1er mai doit permettre à chacun et chacune de s’emparer de ces revendications, et par tous les moyens de les rendre visibles.

Même confiné-es, manifestons toutes et tous le 1er mai, avec des pancartes, banderoles ou en envahissant les réseaux sociaux(…) et donnons à cette journée une véritable force collective !

Le 1 er mai, soyons visibles, solidaires, déterminées. Nous ne paierons pas la crise générée par des choix politiques d’un système capitaliste mortifere.

Transformons le monde de demain en un monde vivable, de justice sociale, écologiste et féministe ! »