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« Primaire populaire » : la Gauche Hara-kiri par Christiane Taubira

Christiane Taubira fait un hold-up sur la Gauche.

La candidate à la présidentielle Christiane Taubira avait avec la « primaire populaire » une machine bien huilée pour faire un coup politique. Ce qui devait arriver arriva : dimanche 30 janvier 2022, elle a été désignée vainqueur au bénéfice d’une mention « bien + » à l’issue d’un pseudo-scrutin en ligne.

Logiquement, dans la foulée de sa « victoire » elle s’est empressée d’apparaître comme celle qui doit rassembler. Sûre de son fait, elle a immédiatement expliqué qu’elle comptait appeler individuellement tous les candidats considérés de « gauche » ou de « l’écologie » pour les forcer à se ranger derrière elle.

« Notre sort appelle aujourd’hui l’union et le rassemblement. Je leur dirai que je sais leur réticence, mais aussi leur intelligence. »

Voilà un véritable hold-up sur la Gauche et l’écologie, au moyen d’un immonde coup de force antidémocratique. La « primaire populaire » qui l’a désigné n’a rien d’une primaire, et surtout était taillée sur mesure pour elle, avec son contenu aussi vague que sa forme et son approche générale sont libérales.

L’opération a consisté en un contournement de la Gauche, des partis, des idées, au moyen d’un petit supermarché en ligne de la politique. Les « électeurs » étaient appelés non pas à désigner un programme politique, une orientation idéologique et culturelle, mais à donner des avis sur des candidats ou plutôt pseudo-candidats.

Le scandale réside bien évidemment dans le fait que les « candidats » en question n’avaient pas leur mot à dire. Et pour cause, la plupart ne reconnaissent pas cette « primaire populaire » et avaient demandé à être retiré du vote. Il n’y a donc pas eu de campagne, de débats, de convictions défendues et de points de vue échangés. Simplement, des milliers de petits-bourgeois ont été invités à donner leurs avis de consommateurs sur les « candidats » avec des notations allant de « très bien » à « insuffisant », en passant par « bien », « assez bien » et « passable ».

Voilà le résultat final annoncé (la médiane servant à déterminer la note de chacun et donc le classement) :

On n’est évidemment pas là dans la démocratie et encore moins dans l’unification de la Gauche, mais dans une sorte de TripAdvisor de la politique où les consommateurs mettent des étoiles suivant leurs goûts. C’est lamentable, mais tellement typique de ces gens, tant de Christiane Taubira que des organisateurs de cette « primaire populaire », qui sont tous de véritables petits soldats du turbocapitalisme.

En l’occurrence, on a comme co-fondateur Samuel Grzybowski qui est un entrepreneur du capitalisme « éthique » avec une entreprise (Convivencia) dont l’objet est d’aider les autres entreprises à donner une bonne image de leur business (sur les questions religieuses). Ce garçon n’est par ailleurs pas issu de la Gauche, mais de la riche bourgeoisie catholique parisienne, dont il fait toujours partie. L’autre co-fondatrice est Mathilde Imer, là encore une bourgeoise parisienne bien dans son monde, qui a comme principale fait d’arme d’avoir été à l’origine et à l’organisation de la « convention citoyenne sur le climat » utilisée par Emmanuel Macron. Difficile de faire moins crédible en termes de démocratie et d’écologie.

Preuve d’ailleurs du caractère bourgeois et anti-gauche de ces gens : les candidats à l’élection présidentielle qui se revendiquent du communisme et des travailleurs ne figuraient même pas dans la liste des candidats, alors qu’il était censé être question de l’union de toute la « gauche ». Pas de Fabien Roussel du PCF ou de Nathalie Arthaud de Lutte ouvrière, donc ; quelle drôle de conception de l’union de la Gauche !

Il faut préciser également que sur la forme, le pseudo-vote à cette « primaire populaire » n’a aucune valeur démocratique, et tomberait même sous le coup de la loi dans un pays vraiment sérieux quant à ce genre de pratique.

En effet, on parle là d’une opération qui a été relayé massivement dans les médias, qui est présentée comme un vote significatif politiquement en vue de l’élection présidentielle, alors qu’il n’y a en pratique aucun contrôle. Personne ne sait comment sont comptabilisées les notations en ligne. Les organisateurs de cette « primaire populaire » peuvent bien donner les résultats qu’ils veulent, personne ne pourra vraiment vérifier.

466 895 inscrits ont été annoncés, pour finalement un vote de la part de 392 738 « électeurs », soit 84,1% d’entre eux. On se demande bien pourquoi 15 % de gens se seraient inscrits pour en fait ne pas voter… Il n’y a en fait aucun contrôle de ces « électeurs » et il était tout à fait possible (et très facile) de s’inscrire à plusieurs reprises. Une emprunte de carte bancaire (l’inscription était gratuite) et un numéro de téléphone, même virtuel, suffisait à distribuer des notes aux « candidats ».

Voici une vidéo dénonçant cela.

C’est un véritable scandale. Cela en dit d’ailleurs très long sur l’état de déliquescence de la société française de voir qu’un tel simulacre de démocratie passe comme une lettre à la poste et est massivement relayée et même soutenue par les médias, sans aucune critique.

A titre de comparaison, pour voter à la Primaire citoyenne de 2017 organisée pour désigner le candidat du Parti socialiste et de ses alliés, il fallait être de nationalité française et inscrit sur les listes électorales, puis se présenter physiquement avec une pièce d’identité le jour du vote. Cela n’a pas empêché les suspicions de fraude, mais c’est en tous cas bien plus sérieux.

On remarquera que cette primaire de 2017 avait pour sa part réunie deux millions de votants (réputés véritables et uniques donc), alors que cela ne concernait que le PS et non pas « toute la gauche » ! Cela relativise de beaucoup le succès de la « primaire populaire » de 2022 avec ses (soit-disant) 400 000 votants.

On remarquera également la 5e place d’Anne Hidalgo, la candidate du PS en 2022, qui subit ici un véritable revers. D’abord, car elle correspond normalement tout à fait à ce milieu petit-bourgeois et libéral de la « primaire populaire » et des gens gravitant autour, mais surtout car le PS avait appelé à y participer malgré tout !

Par exemple, la fédération PS de Paris (liée à Anne Hidalgo) disait à ses militants dans un courrier interne : « Si tu es inscrit à la Primaire populaire, nous t’invitons à y participer». Mais surtout, le premier secrétaire du PS Olivier Faure s’était lui-même exprimé de manière favorable à la « primaire populaire » au bureau national du parti et appelait à y participer de manière opportuniste.

À moins que les résultats de la « primaire populaires » soient totalement trafiqués (ce qui est, on le rappelle, fort possible), le Parti socialiste s’est donc pris ici une véritable claque en étant incapable de mobiliser ses militants et soutiens en faveurs d’Anne Hidalgo (ce qui était d’autant plus facile qu’il était possible de voter à de nombreuses reprises, le genre de manœuvre devant laquelle les militants du PS n’auraient pas rechigné à l’époque où celui-ci était fort, dans la plus pure tradition des bourrages des urnes des élections universitaires).

Rien que pour avoir écarté de fait la candidate du PS Anne Hidalgo, la « primaire populaire » et Christiane Taubira ont donc réussi un hold-up historique sur la Gauche. Après le revers électoral de Benoit Hamon il y a cinq ans, c’est une nouvelle étape dans l’effondrement du Parti socialiste, pourtant central à Gauche depuis 50 ans.

Cela ouvre évidemment de nouvelles portes et une nouvelle perspective pour le reste de la Gauche. Une recomposition se produira inévitablement, avec le retour à la Gauche historique comme proposition incontournable et évidente. Mais il faudra pour cela partir de très loin, avec très peu de gens, en recommençant pratiquement tout à zéro, comme si on en revenait à 1905 et la fondation de la SFIO…

Et cela alors que jamais les défis historiques n’ont aussi nombreux et exigeants. Il faudra être à la hauteur!

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La reformation de la Droite s’accélère autour d’Eric Zemmour

Conformément à l’époque, la Droite se durcit.

Eric Zemmour sera-t-il au second tour de l’élection présidentielle au printemps prochain ? Probablement pas, mais ce n’est pas une certitude. Et surtout, ce n’est pas tant la question. Ce qu’il faut voir, c’est qu’Eric Zemmour n’est que le produit d’une situation en particulier, et que sa signification politique ne consiste en rien d’autre que la recomposition de la Droite, reflétant un changement d’époque. C’est de toute la période à venir dont il est question.

Plutôt que de recomposition, il faut d’ailleurs parler de reformation d’une Droite véritable avec une ligne dure, assumant la confrontation et les grands clivages socio-culturels. Eric Zemmour est en train de réussir ici ce que Marine Le Pen n’a pas été en mesure de faire, de par sa position à la fois trop isolée sur le plan culturel (étant considérée comme « extrémiste ») et trop sociale sur le plan économique (ce que, en raison de la crise, la bourgeoisie n’est pas en mesure d’assumer).

Eric Zemmour représente lui une droite capable de cogner fort, tant culturellement pour mobiliser derrière le drapeau national, que socialement pour porter la restructuration économique contre les ouvriers. C’est cela qu’illustre sa position à mi-chemin entre la droite classique et la droite « nationale », c’est-à-dire nationaliste.

Les derniers ralliements à Eric Zemmour en provenance du camp de Marine Le Pen sont donc des marqueurs très forts, qui assoient sa position de réformateur de la Droite. On parle ici de cadres et de personnalités majeures de l’entourage de Marine Le Pen, qui la plantent en plein vol à quelques semaines de l’échéance électorale.

Il y a eu Damien Rieu, figure de Génération Identitaire, une structure qui fut dans les années 2010 une sorte de centre de formation de la jeunesse pour le Rassemblement national. Il avait rejoint le RN et en fut un cadre important. Il a claqué la porte jeudi 20 janvier avec un communiqué expliquant que le RN est en recul, que la dynamique est maintenant du côté d’Eric Zemmour. Dans une interview du dimanche 23 janvier, il explique que son objectif est en quelque sorte d’obtenir le ralliement de Marine Le Pen (en tous cas de son électorat) à Eric Zemmour pour le second tour de l’élection présidentielle.

La veille, il y avait eu le ralliement de l’eurodéputé Jérôme Rivière, qui n’était pas moins que le patron de la délégation RN au Parlement européen. Celui-ci considère de la même manière que Marine Le Pen n’est plus en mesure de gagner les élections, alors que le positionnement Droite dure d’Eric Zemmour est par contre considéré comme satisfaisant à « l’urgence » de la situation. C’est un ralliement très important politiquement, et Eric Zemmour considère lui-même qu’il «symbolise [l’] union des droites» (ou plutôt, donc, la reformation de la Droite).

Mais la principale figure « lepeniste » ayant rejoint Eric Zemmour est bien sûr Gilbert Collard, avec une annonce faite en grande pompe pendant un meeting à Cannes. Sur le plan idéologique, Gilberd Collard ne représente pas grand-chose, lui qui n’a jamais été encarté au RN et qui est surtout une sorte d’opportuniste qui s’imagine être une « grande gueule », être dans le vrai, au dessus du lot, etc.

Sur le plan symbolique, c’est une perte énorme pour Marine Le Pen, car il représentait l’un de ses seuls « gages » venu de la société civile comme il est d’usage de le dire pour nommé des gens considérés comme non-strictement politique ou idéologique. Gilbert Collard, pour les personnes qui ont plus de 30 ans, est une figure médiatique incontournable, représentant une notoriété indéniable. C’est une sacré « prise de guerre » pour Eric Zemmour, qui en dit long sur la dynamique qu’il incarne.

A côté de cela, il y a eu également, venant de la droite classique, Guillaume Peltier, dont le ralliement dit contribuer à pousser Valérie Pécresse et les républicains vers le centre, pour aider justement Eric Zemmour à occuper le plus d’espace possible à Droite.

Tout cela est récent, en formation, mais il y a une dynamique énorme autour de cette droite dure. Il s’agit de l’actualité politique majeure, montrant la tendance à venir pour les prochaines années, bien au-delà des échéances électorales du printemps 2022. À la Gauche d’être à la hauteur pour y faire face, mais pour cela il faudra puiser dans les fondamentaux historiques en levant le drapeau rouge de la classe ouvrière et de l’internationalisme anti-guerre.

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L’opération Christiane Taubira, hold-up centriste sur la Gauche

« Haut les mains et votez pour moi ! »

Faut-il que la Gauche soit à ce point au fond du trou pour qu’une Christiane Taubira puisse ainsi débarquer, tirant elle-même du chapeau sa propre candidature, pour l’imposer à tous ? A moins de quatre mois de l’élection présidentielle ?

Quel spectacle lamentable offre en effet la « gauche » française, errante dans le néant des sondages et des opinions, sans les idées, sans le peuple, très loin de son histoire et de ses immenses conquêtes du XXe siècle. Alors il y a une nouvelle candidate, du moins l’envisage-t-elle, pour faire une simple vidéo de 3 minutes disant à tout le monde qu’il faut la rallier, pour la seule raison qu’elle est là… Le fond, le programme, les idées ? Pas besoin, les formules creuses et autres successions de lieux communs sont censées suffire à faire d’elle la bonne personne, là où tous les autres échouent.

Cela ne tombe pas du ciel. Christiane Taubira est ici la terrible illustration de la faillite de la Gauche, la vraie, celle de la classe ouvrière et du Socialisme. Car Christiane Taubira n’est pas de gauche, elle ne vient pas de la Gauche. Par contre, elle a depuis longtemps gravité autour, tantôt pour la faire perdre, comme en 2002 où elle a maintenu coûte que coûte une candidature, pour le Parti radical de gauche, ayant fini de plomber Lionel Jospin et ouvert la voie à Jean-Marie Le Pen et Jacques Chirac au second tour, tantôt pour la pourrir de l’intérieur, comme en 2012 quand elle est devenue l’insupportable ministre de la Justice de François Hollande.

« Insupportable », car ministre d’un État en faillite et d’une « Justice » à la dérive, incapable de protéger la population d’une ambiance toujours plus violente et corrompue, laissant pourrir la société sur elle-même, particulièrement dans les cités populaires où règnent les bandits devenus mafieux.

De ce point de vue, Christiane Taubira a été une bénédiction pour la Droite et l’extrême-Droite : qu’il est facile face à elle de prétendre être le parti des classes populaire et de la société, en critiquant le laxisme de cette (fausse) gauche béate et hors-sol, bobo et stupide.

Il ne faut pas être dupe de l’opération menée par Christiane Taubira, qui n’a rien de spontanée. En amont, il y a toute une mouvance de bourgeois parisiens à l’origine d’une pseudo-primaire « populaire », taillée sur mesure justement pour Christiane Taubira, dont elle est forcément la figure ayant été la plus plébiscitée. Cette « primaire » n’a rien à voir avec le fonctionnement historique de la Gauche, basée sur les idées et la démocratie militante. Cela a tout à voir par contre avec la machinerie anti-démocratique et surtout anti-socialiste des Primaires américaines, ce qui de surcroît est tout à fait conforme à la perspective des fondateurs bobos des primaires à la française.

Il s’agit en effet de bons petits soldats du turbo-capitalisme et de la consommation « inclusive ». Il y a parmi eux surtout Samuel Grzybowski, à la tête du cabinet de conseil Convivencia, une « équipe d’experts en inclusion et management de la diversité ». Le but est d’aider à la « conquête de nouveaux marchés » et la « Réduction des risques et conflits » dans les entreprises. En l’occurrence, il y a comme entreprises clientes d’immondes monopoles du capitalisme tels Total, Décathlon, Orange, Michelin. Il y a aussi le Ministère de la Justice…

Voilà le cœur de cette pseudo-gauche post-moderne.

Tout cela est puant, et s’il y avait une vraie Gauche en France, tous ces gens n’oseraient même pas ne serait-ce que prononcer le mot « gauche ». Ils seraient considérés comme ce qu’ils sont, c’est-à-dire d’horribles libéraux, plus proches de la Droite que du peuple, des cousins de Valéry Giscard d’Estaing et d’Emmanuel Macron, et des ennemis farouches de la classe ouvrière.

Et il faut ici dénoncer ici le rôle de la direction actuelle du Parti socialiste, qui déroule le tapis rose à Christiane Taubira. Un tapis peu reluisant certes, car la « peut-être » candidate n’a pas beaucoup de chances dans cette élection. Mais politiquement, historiquement, un tournant se produit, avec un Parti socialiste renonçant peut-être définitivement à sa propre existence.

C’était déjà le cas avec la candidature incroyable Anne Hidalgo, la maire d’une des plus riches et florissantes métropoles du capitalisme mondial. Mais face à son échec dans les sondages, la maire de Paris s’est tournée du jour au lendemain, sans prévenir personne, descendant même d’un train pour repartir dans l’autre sens pour l’annoncer, vers l’idée d’une primaire (qu’elle avait auparavant refusé et critiqué). Mais là c’est la faillite complète.

Tout est à reconstruire. Il faut la Gauche historique, sans céder en rien aux libéraux-sociaux gouvernementaux, à l’ultra-gauche spontanéiste, aux post-modernes au service du turbo-capitalisme. Il faut un retour aux sources, au drapeau rouge!

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Eric Zemmour: la « Reconquista » national-populiste

Le mythe de la « reconquête » contre le « grand remplacement ».

Le candidat à la présidentielle 2022 Eric Zemmour a tenu dimanche 5 décembre 2021 son premier grand meeting de campagne à Villepinte, en région parisienne. Devant une foule d’au moins 12 000 personnes qu’il a sans-cesse harangué à la manière d’un tribun, le nom de son nouveau parti a été dévoilé : Reconquête!

Le terme a été répété à de nombreuses reprises, comme un fil conducteur marquant une idée forte et incontournable. C’est évidemment une référence à la « Reconquista », terme castillan désignant la reconquête de l’Espagne par les chrétiens face aux différents peuples musulmans. Débuté en 722 et aboutissant en 1492 par la prise de Grenade, la « Reconquista » fait désormais figure de mythe mobilisateur identitaire.

Ce genre de lutte d’influence territoriale du Moyen Âge n’a évidemment rien à voir avec la modernité des nations au XXIe siècle, mais c’est justement cela qui est utile et efficace pour un Eric Zemmour. Ce dont il a besoin, ce dont il est l’expression, ce n’est pas la rationalité, ni l’Histoire avec un grand « H », bien au contraire.

Eric Zemmour est un dangereux populiste, car il galvanise les foules avec des raccourcis faciles, de fausses grandes idées clefs en mains empêchant toute réflexion et prise de conscience politique sérieuse et constructive. Ce qu’il vise, c’est maintenir la France petite-bourgeoise et pantouflarde dans son fantasme d’un âge d’or des années 1950-1960 avec d’une prétendue vie paisible et harmonieuse. La base de son audience, c’est typiquement les gilets-jaunes, la France des petits entrepreneurs qui veulent un État fort et puissant, mais ne surtout pas payer d’impôts ni ne respecter de normes sociales et collectives.

Ce qu’il y a en réalité, c’est que le capitalisme est en crise, et qu’il a besoin d’un Eric Zemmour pour abrutir les consciences et détourner les regards des vraies questions. Le nationalisme est ici la substance parfaite, le poison terriblement efficace pour ne pas assumer la réalité. Alors Eric Zemmour est là pour parler de « reconquête » (sous entendu, de la France), face à ce qu’il nomme le grand remplacement. S’il gagne dit-il, « ce ne sera pas une alternance de plus, mais le début de la reconquête du plus beau pays du monde ».

La cible de la reconquête est évidemment, et sans aucune ambiguïté, l’immigration musulmane, dont il a parlé à de nombreuses reprises durant son meeting. Il n’a presque parlé que de ça d’ailleurs, ciblant ici l’islam, là « l’immigration venue de l’autre côté de la méditerranée ».

Voici un petit extrait qui résume quasiment à lui seul ses 1h30 de meeting national-populiste à la Donald Trump :

« Depuis des mois, je sillonne la France, je rencontre les Français. Deux craintes les hante : celle du grand déclassement, avec l’appauvrissement des Français, le déclin de notre puissance et l’effondrement de notre école, et celle du grand remplacement, avec l’islamisation de la France, l’immigration de masse, l’insécurité permanente ».

Il ne s’agit pas là de racisme à proprement parler, et d’ailleurs Eric Zemmour se défend d’avoir une vision nationaliste fondée sur une pureté racialiste de type national-socialiste : « Comment pourrais-je penser cela, moi, petit juif berbère venu de l’autre côté de la méditerranée ? ».

Non, le cœur de sa démarche, le fondement de son existence, c’est simplement de galvaniser la foule et la diriger vers le nationalisme ; le ciblage de l’immigration musulmane n’est ici qu’un moyen, un outil servant à raccourcir les choses et empêcher la réflexion sociale. Cela sert le racisme bien sûr, le racisme lui est utile, évidemment, mais c’est bien pire que cela.

Il veut faire croire aux gens qu’on pourrait faire disparaître la crise du capitalisme, et qu’il suffirait pour cela de rejeter les musulmans trop musulmans, d’avoir une immigration zéro, de restreindre le droit d’asile à quelques vraies demandes depuis les consulats, d’en finir avec le regroupement familial, de supprimer l’aide médicale d’État et le droit du sol, de durcir les conditions de naturalisation, de renvoyer les clandestins, d’expulser les délinquants étrangers, de déchoir de leur nationalité les criminels bi-nationaux ou encore d’expulser les chômeurs étrangers au bout de six mois…

C’est un formalisme typiquement bourgeois, très RPR (le parti de la Droite conservatrice-populaire avec Jacques Chirac) des années 1980. D’ailleurs, à la fin de son discours, Eric Zemmour a largement insisté sur sa filiation avec cette Droite de la fin du XXe siècle.

Et en effet, c’est un homme de droite, mais d’une Droite en temps de crise, ayant besoin de gens furieusement aveuglés par le nationalisme et prêts à tout pour défendre le capitalisme français dans la grande bataille pour le repartage du monde engendré par la crise.

Eric Zemmour est en ce sens très dangereux, car il simplifie tout et ratisse large. Ses simplifications et ses tirades populistes sont très efficaces dans un pays aussi riche que feignant intellectuellement qu’est la France (à l’image de la plupart des autres grands pays capitalistes). Il assume donc sans ambage de marcher sur les plates bandes de la Droite et de l’extrême-Droite :

« je veux rendre le droit de vote aux électeurs du front national et je veux rendre la droite aux électeurs de LR »

L’opposition à Eric Zemmour est l’actualité politique principale et incontournable de la Gauche actuellement. Cette opposition ne pourra gagner que si elle est massive et populaire, que si elle est fondée sur l’intelligence et la foi en la société. Si donc elle se fonde sur la Gauche historique.

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Présidentielle 2022 : le gaulliste-pétainiste Eric Zemmour officialise sa candidature

C’est une tentative de synthèse fasciste.

Mardi 30 novembre, le polémiste d’extrême-droite Eric Zemmour a officialisé sa candidature à l’élection présidentielle 2022 dans une courte vidéo publiée sur YouTube. La mise en scène fait ouvertement référence à l’appel du 18 juin du général de Gaulle, avec pareillement un micro imposant, des notes papiers lues en direct, jusqu’à la disposition de l’homme par rapport au micro.

Cette référence à de Gaulle est incontournable pour toute démarche nationaliste française se voulant conséquente. C’est exactement ce qu’a compris et mis en place Marine Le Pen depuis 2012 justement, avec une ligne néo-gaulliste représentant directement les intérêts du grand capital français.

Toutefois, et c’est flagrant pour n’importe qui ayant les bases de la culture politique française, Eric Zemmour a tout autant un discours pétainiste qu’il se veut gaulliste, et inversement. Ou, comme l’a dit Olivier Faure le premier secrétaire du Parti socialiste avec un bon mot (et une faute) :

« Le micro de De Gaulle [sic] mais le discours de Pétain. »

Il y a en effet dans cette vidéo de 10 minutes du néo-candidat tout ce que la Gauche qualifie (et conspue) de pétainiste : le fantasme d’un pays « éternel » à défendre comme sa propre chair, le rejet romantique du monde moderne, une tendance évidente à la xénophobie et au repli culturel, les raccourcis haineux plutôt que la compréhension sociale des choses.

D’ailleurs, Eric Zemmour s’était fait remarquer ces derniers temps pour des propos on ne peut plus polémique réhabilitant la figure du Maréchal Pétain, pourtant honnie (formellement, mais pas forcément en pratique) par tout le spectre politique français. Il doit donc forcer les choses pour appuyer sur son côté « gaulliste » avec une mise en scène grotesque. Cela jusqu’à évoquer directement, dans sa liste-inventaire de figures françaises, le général de Gaulle et le chef de la Résistance (bourgeoise) Jean Moulin.

Il ne faudrait pas faire l’erreur de penser qu’il ne s’agit ici que d’opportunisme ou de communication de surface. Ce qu’il y a en jeu est ni plus ni moins que la tentative de la formulation d’un fascisme français du XXIe siècle.

Marine Le Pen est allée très loin en ce sens, en travaillant au corps la société française de manière minutieuse pendant des années. Mais elle a un gros problème, c’est qu’elle apparaît bien trop « gaulliste », c’est-à-dire pas assez « pétainiste », donc pas assez à droite, aux yeux de la bourgeoisie.

Eric Zemmour représente une proposition similaire, mais inversée. Il a lui aussi longuement travaillé au corps la société française ces dix dernières années, mais franchement par la droite, de manière très « pétainiste » et probablement pas assez « gaulliste » pour la grande bourgeoisie qui a des vues impériales et qui a besoin d’une adhésion populaire aux projets nationalistes. Alors Eric Zemmour tente sa chance avec la mise en scène du micro « gaulliste », pour dérouler le discours « pétainiste » expliquant qu’on ne reconnaîtrait plus le pays, que l’idéal serait la France des années 1950 avec des garçons en culotte courte jouant dans la rue comme dans un film en noir et blanc.

C’est très caricatural bien sûr, c’est exactement le pendant des discours post-modernes (ou « woke ») voulant tout déconstruire de manière aussi agressive qu’unilatérale, au nom du turbocapitalisme. C’est donc du niveau du café du commerce, c’est-à-dire bas de plafond et rageux.

C’est, pour le dire autrement, tout l’opposé de l’esprit Charlie, typiquement français, voulant la synthèse culturelle, et rejetant le conflit.

Alors, est-ce la vidéo de trop pour Eric Zemmour, qui marquerait la fin d’un phénomène et d’une expérience ? On peut l’imaginer, par exemple quand on voit la violence avec laquelle le quotidien traditionnel de la Droite, Le Figaro, tacle le néo-candidat dans son éditorial du premier décembre :

« Pourquoi un journaliste, sans parti, sans mandat, sans aucune expérience politique, est-il venu percuter cet automne de campagne?

Certes, la société liquide, celle de la compulsion numérique qui permet les roulades de MacFly et Carlito à l’Élysée et envisage Cyril Hanouna comme animateur du débat d’entre-deux-tours, rend tout, même l’impensable, possible.

Il serait pourtant paresseux de s’arrêter à cette écume pour comprendre le phénomène. »

La bourgeoisie française a besoin de sérieux et d’une figure ayant les épaules solides pour mener ses desseins. C’est probablement pourquoi le présentateur du 20H de TF1 a osé, de manière incroyablement irrévérencieuse, demander à Eric Zemmour s’il ferait par exemple un doigt d’honneurs aux autorités britanniques en négociant avec eux sur l’épineuse question de l’île Jersey… (c’est une référence au fait qu’Eric Zemmour a fait un doigt d’honneur à une passante lui en faisant un).

Cependant, l’Histoire est ce qu’elle est et personne ne peut la prédire dans le détail. Eric Zemmour a un rôle historique, il est une contribution majeure à la tentative de formulation d’un fascisme français du XXIe siècle. Sa candidature à la présidentielle reste à considérer de manière sérieuse, pour s’y opposer fermement et profondément.

Cette contradiction « pétainiste »/« gaulliste », tant qu’elle n’est pas résolue dans une nouvelle synthèse politique, est certainement autant de temps de gagner pour la gauche et les forces démocratiques en France, repoussant la victoire du fascisme.

On peut très bien se dire que les voix allant à Eric Zemmour n’iront pas à Marine Le Pen, et inversement, et que cela pourra suffire à les disqualifier. On peut se réjouir du fait que Marine Le Pen voit rouge en ce moment justement pour cette raison, et qu’elle est très agressive à l’encontre du néo-candidat dont elle qualifie la déclaration vidéo de « passéiste et crépusculaire ».

Mais cela ne change rien au fait que le fascisme avance à grands pas en France en raison de la crise, qu’il synthétise justement ses positions de manière toujours plus précise, à mesure que la crise s’intensifie et qu’il se généralise à tous les aspects de la vie. Eric Zemmour n’est ni plus ni moins qu’un produit de cette crise, il représente une des tentatives de la bourgeoisie de sauver les meubles du capitalisme par le nationalisme.

Car ce qui se joue derrière, c’est la bataille pour le repartage du monde. En fait, qui ne voit pas la guerre arriver ne peut pas voir le fascisme et l’analyser adéquatement : c’est cela qu’il faut bien comprendre.

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Bolloré et Zemmour veulent-ils rejouer La Rocque et le PSF en rachetant Le Figaro ?

L’extrême-droite a besoin d’élargir sa base et de gagner en crédibilité.

L’information est sortie dans le milieu des journalistes comme quoi Vincent Bolloré veut racheter Le Figaro. Vrai ou non, c’est en tous cas plausible, car ce journal serait une pièce de choix dans le dispositif Bolloré d’appui au populisme nationaliste.

Vincent Bolloré dispose déjà de la radio Europe 1, du magazine Paris Match et du Journal du dimanche. Il a surtout la chaîne Cnews, devenue un laboratoire pour l’hystérie populiste et les déchaînements réactionnaires. Cnews a servi de catapulte politique pour Eric Zemour qui y a eu une tribune quotidienne dans laquelle il pouvait longuement s’étaler, se poser comme un rationnel au-dessus du lot et disant vraiment les choses, etc.

En fait, il y a eu convergence entre les intérêts de Vincent Bolloré, représentant une fraction bien précise de la bourgeoisie française, et la personnalité Eric Zemour qui s’est retrouvée propulsée historiquement comme figure présidentiable. D’ailleurs, il ne s’agit même pas d’imaginer une opération organisée de longue date (encore que cela est possible), mais surtout un déroulement naturel des choses entre gens allant dans le même sens à une époque qui leur est favorable !

Toujours est-il que cela serait on ne peut plus logique pour Vincent Bolloré, pour appuyer sa dynamique politique, d’avoir également le Figaro (où Eric Zemour a d’ailleurs beaucoup écrit jusqu’à très récemment). Ce serait là beaucoup plus crédible politiquement aux yeux de la bourgeoisie traditionnelle française, que les étalements type « comptoir de bistro » sur Cnews.

Le Figaro est en effet une institution en France, à droite certes, mais pas seulement. C’est avec Le Monde l’un des deux journaux nationaux majeurs, disposant tous deux, suivant les milieux, d’une image de rigueur et ayant une autorité politico-culturelle incontournable en termes d’information et de traitement de l’information.

La Figaro, qui appartient au Groupe Dassault, dispose de beaucoup de moyens pour apporter à la partie de la bourgeoisie française à laquelle il s’adresse une information considérée comme étant de qualité, fiable, utile, constructive. Vincent Bolloré pourrait très bien vouloir en faire quelque-chose de plus, en élargissant l’audience non plus seulement à la bourgeoisie cultivée et urbaine (voire surtout parisienne), mais à une large partie de la population française droitisée.

Ce ne serait pas une première historiquement. Dans les années 1930, le Figaro a justement été le journal de La Rocque et du PSF, servant directement l’extrême-droite en tant qu’outil politico-culturel. Rappelons qu’il s’agissait alors d’un gigantesque mouvement en France, à la fois de masse et militaire, incontournable pour qui s’intéresse vraiment à l’Histoire de France au 20e siècle.

Cela serait tout à fait conforme à la dynamique enclenchée par Eric Zemour d’un mouvement de droite « populaire », et surtout opposé à la bourgeoisie moderniste (représentée en l’occurrence par Le Monde, France inter, etc.).

De toutes façons, Le Figaro, malgré une ligne générale allant dans le sens de la rationalité libérale bourgeoise (avec par exemple de nombreux articles reconnus sur les questions médicales, des analyses précises et ultra-synthétiques sur l’actualité internationale, etc.), n’est pas en reste quant au populisme délirant dans la veine d’Eric Zemour.

On a par exemple l’édition du site internet dans la soirée du dimanche 21 novembre 2021 où un article grotesque « Ces contraintes qui dégoûtent les Français de la voiture » était mis en avant, accompagné d’un sondage proposant de répondre à la ridicule question « Limitation de la vitesse, prix du stationnement… Approuvez-vous les politiques anti-voitures ? » En fin de soirée, avec 65 000 votants, il y avait une écrasante majorité (80%) de « non ». L’article pour sa part était un modèle du genre d’individualisme de droite malhonnête :

« Aux prises avec une circulation urbaine de plus en plus compliquée pour eux, en raison du règne du vélo et de la trottinette décrété par les municipalités, [les automobilistes] sont chaque année rattrapés par de nouvelles contraintes […] »

Eric Zemour, le candidat des chauffards, ne dirait pas mieux. Et ce genre de considération justement, haineuse dans leur base, étriquée dans l’état d’esprit et surtout profondément opposée à la société et au collectivisme, c’est exactement ce dont à besoin un Vincent Bolloré, figure des milieux les plus agressifs de la bourgeoisie française.

L’actualité de l’extrême-Droite en France, ce n’est pas des groupuscules ultra jouant la provocation dans les manifestations parisiennes libérales-démocratiques, pour faire parler d’eux grâce aux « antifa » tombant dans le panneau…

L’actualité, c’est la mise en place d’un dispositif politique et culturel massif, visant les masses, visant à encercler mentalement les masses. C’est exactement la raison d’être d’un Eric Zemour, dans l’intérêt direct d’un Vincent Bolloré !

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Politique

Position du PCRF sur la présidentielle 2022

Elle se fonde sur une longue analyse.

Le Parti Communiste Révolutionnaire de France (PCRF) a rendu public, le 11 novembre 2021, sa position pour la présidentielle 2022. Voici le document de 14 pages l’explicitant.

rapport_cc_16oct2021

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Écologie

Présidentielle 2022: l’appel saisissant de la Fondation 30 Millions d’Amis

Le cri des animaux.

On pourra penser ce qu’on veut de la Fondation 30 Millions d’Amis, c’est en tous cas au moins un organisme qui agit de manière concrète, conséquente, et surtout durable, en faveur des animaux. Rien que le fait que la Fondation apporte un soutien matériel et logistique à de nombreux refuges animaliers en France est une chose de grande valeur.

Et c’est justement de part cet engagement concret et pratique en faveur des animaux que naît une conscience réelle de la condition animale. En l’occurrence, la Fondation 30 Millions d’Amis saisit l’occasion de l’élection présidentielle 2022 pour interpeler sur la question de la maltraitance animale, au moyen d’une vidéo saisissante.

Celle-ci est très bien faite : tout en subtilité, sans voyeurisme aucun, mais avec des cris d’animaux faisant appel à la sensibilité. Cela ne sera probablement qu’un pavé dans la mare à l’occasion de cette élection, malheureusement.

C’est en tous cas une contribution importante à l’émergence d’une culture appelant à un engagement total envers les animaux en France, en liant la question des abandons d’animaux domestiques (le sujet habituel de la Fondation) à celles des abattoirs, de la chasse, des tests sur les animaux, des cirques, de la corrida…

Voici la vidéo, qu’il faut assumer de regarder, et de diffuser !

Voici également la présentation de cette vidéo sur le site de la fondation : Présidentielle 2022 : « L’Appel » choc de la Fondation 30 Millions d’Amis contre la souffrance animale

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Politique

Quand Eric Zemmour pose la question de la nature de l’antifascisme

Eric Zemmour pose des défis politiques et culturels.

Lors de son passage à Nantes le 30 octobre, Eric Zemmour a directement abordé la question du fascisme et de l’antifacisme. Il l’a fait de manière bien calculée, car Nantes est un bastion anarchiste et évidemment 450 personnes ont pratiqué une ligne substitutiste, cherchant à perturber le meeting d’Eric Zemmour en entrant dans l’enceinte du Zénith pour essayer de le bloquer, ainsi qu’en collant la veille des affiches avec une cible sur le visage d’Eric Zemmour. C’est inefficace et même contre-productif, puisque cela ne fait que renforcer le « buzz » d’Eric Zemmour.

Il est tout à fait logique qu’Eric Zemmour aborde, dans un même meeting, la question du fascisme et celle de la chasse, prenant pour la première fois position sur cette dernière. A rebours des anarchistes qui ne comprennent rien à rien, Eric Zemmour a compris que ce qui était en jeu, c’était la question du mode de vie fondé sur une certaine vision du monde. Il a a saisi que la question animale était fondamentale pour le camp du changement, et comme il ne veut pas le changement, et que de toutes façons le véganisme est trop « difficile » pour des Français fainéants et libéraux, il sait qu’il a un boulevard.

Quant à l’antifascisme défini comme « une colonisation intellectuelle de l’humanité, voulue par le cerveau malade de Staline », c’est une référence très précise à l’Histoire. L’antifascisme comme démarche a en effet été défini par le Bulgare Georgi Dimitrov et systématisé par le mouvement communiste dans le cadre du septième congrès de l’Internationale Communiste en 1935.

Le siège central des communistes en Allemagne, en 1932, avec le symbole de l’Action antifasciste sur le bâtiment et le slogan « Dans les rangs de l’Action antifasciste contre la guerre, la faim et le fascisme! »

Cela est très peu connu en France, car les anarchistes ont pratiqué un lessivage sur le plan des idées afin de se présenter comme « antifas » alors qu’en réalité, ils ont toujours nié la nécessité du « front » antifasciste. Le « front » est historiquement l’alliance des socialistes et des communistes (principalement), les anarchistes et l’ultra-gauche dénonçant une trahison de la révolution. Cela dit ce n’est pas toujours exact : dans le front populaire espagnol, on trouvait la CNT au gouvernement, et seule une frange d’ultra-gauche s’y opposait.

En France c’est cette ligne d’ultra-gauche qui prévaut chez les « antifas », avec un soutien naturel de la part des libéraux, comme cet article du Monde du 26 octobre 2021, L’antifascisme, un renouveau par la jeunesse, qui fait leur éloge, notamment de la « Jeune Garde ». Le capitalisme libéral apprécie que l’antifascisme soit réduit à une défense des migrants et un rejet des bandes fascistes, à une critique de l’autoritarisme de l’État, etc. Des éditions anarchistes viennent même d’ailleurs de sortir un jeu de société « antifa » dans cet esprit.

Le souci, ce n’est pas simplement que ce soit faux, c’est que c’est suicidaire. Comme en témoignent les propos triomphalistes sur porte-parole de la Jeune Garde (à la suite du passage chez Hanouna ou de l’article du Monde).

On n’arrive à rien du tout, oui. CNews utilise les « antifas » pour montrer aux bourgeois qu’Eric Zemmour est efficace pour polariser. S’imaginer qu’un bourgeois puisse craindre quelque chose dans un contexte comme le nôtre, c’est littéralement délirer. L’offensive bourgeoise est gigantesque. C’est un rouleau compresseur qui déboule, parce que la situation est celle d’une crise.

Alors, oui les antifas forment une mouvance importance de plusieurs centaines de personnes, mais leur impact sur la société est à l’image de celui de la Gauche, pratiquement inexistant. La dernière manifestation « antifa » à Lyon a rassemblé 2 000 personnes le 23 octobre 2021 et c’est présenté comme une victoire. Lyon, c’est avec son environnement direct pratiquement deux millions de personnes. Dans les sondages, Eric Zemmour est à 17%, Marine Le Pen à 16%. Les meetings d’Eric Zemmour sont pleins et tout un pan de la bourgeoisie le soutient, avec à l’arrière-plan la haute bourgeoisie désireuse d’une sorte de Brexit à la française. La majorité des ouvriers est peu ou prou sous l’hégémonie de Marine Le Pen.

Voilà pourquoi les seules réponses antifascistes réelles peuvent et doivent être politiques. L’ultra-gauche a failli, comme le montrent d’ailleurs son soutien aux gilets jaunes et aux anti-pass sanitaire. C’est la Gauche historique qu’il faut réactiver.

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Politique

Eric Zemmour et l’antisémitisme de Jean-Luc Mélenchon

2021 devient toujours plus ignoble.

Jean-Luc Mélenchon a mené une sortie électorale antisémite tout à fait calculé, dans la perspective de la présidentielle de 2022. Il a dit deux choses très précises : tout d’abord il a dit qu’Eric Zemmour était juif, ce que tout le monde sait et ce dont tout le monde se moque parce qu’on est en France et que ce genre de choses ne compte pas. Il est le premier dans le cadre de la campagne présidentielle à affirmer cela, faisant tomber un tabou républicain.

Ensuite, il a dit qu’Eric Zemmour avait des positions politiques qui reflétaient le fait qu’il soit juif. Ce faisant, il lance une offensive antisémite, ou plus exactement anti-judaïque. Pratiquement personne ne sait en effet qu’Eric Zemmour a ou a eu du moins un positionnement personnel de juif profondément croyant et relativement orthodoxe dans sa pratique. Jean-Luc Mélenchon a dû le savoir et balance la chose.

Concrètement, il vise très clairement à une polarisation judéo-arabe pour un clivage religieux et/ou raciste, dont il profiterait électoralement. Il agit ainsi comme l’ultra-gauche française qui manie autant les drapeaux palestiniens qu’elle ne fait strictement rien, en pratique, pour les Palestiniens dont la situation est toujours plus dramatique.

Voici les propos de Jean-Luc Mélenchon, tenus sur BFMTV:

Le journaliste: Il est antisémite ou pas? C’est une vraie question que se pose la communauté juive notamment.

Jean-Luc Mélenchon: Ah bon (…). Après, qu’un juif soit antisémite est une nouvelle. Sur le moment cela m’a fait sourire, j’aime bien ce type de paradoxes. Je me suis dit comment c’est possible un truc pareil.

Mais, oui, parce qu’il me semble qu’il se trompe. Monsieur Zemmour ne doit pas être antisémite parce qu’il reproduit de nombreux scénarios culturels : “On ne change rien à la tradition, on ne bouge pas, la créolisation mon dieu quelle horreur”. 

Et tout ça, ce sont des traditions qui sont beaucoup liées au judaïsme. Ça a ses mérites, ça lui a permis de survivre dans l’histoire. Donc moi je ne crois pas qu’il soit antisémite.

Enfin je sais pas car à véritablement c’est pas mon problème. S’il est antisémite il sera condamné. Il est raciste, ça c’est sûr. Il a été condamné pour ça.

Jean-Luc Mélenchon ment. Il sait très bien que les propos d’Eric Zemmour sur Pétain ont provoqué un scandale chez les Juifs. Il ne peut pas ne pas le savoir.

Il sait sans doute aussi que la communauté juive religieuse a une démarche l’amenant à être hostile à tout ce qui pourrait la faire remarquer. C’est une tradition remontant au début du moyen-âge où il s’agissait de subsister comme minorité sans se faire remarquer et écraser par les autorités politique et religieuse.

Il sait par contre forcément que l’histoire regorge de juifs antisémites, de juifs ayant la haine de soi. C’est un phénomène très répandu historiquement. Eric Zemmour en est un exemple classique d’ailleurs. C’est typiquement le Juif ressemblant à un Arabe cherchant à fuir dans un imaginaire ce qu’il est lui-même.

Quant à l’interprétation du judaïsme que fait Jean-Luc Mélenchon, elle est digne de Dieudonné et de Soral. Car le judaïsme est une religion qui se prétend traditionnelle, mais ne l’est pas du tout. Ses traditions ont sans cesse été renouvelées par de multiples commentateurs et autorités religieuses, il existe une multitude de courants se tolérant mais d’approches fondamentalement différentes. Le judaïsme est ainsi un véritable kaléidoscope d’opinions et de conceptions différentes voire antagoniques, littéralement un chaos sans nom, même si les pratiques restent les mêmes pour tous, mais même là avec une tolérance maximale pour leur degré d’acceptation.

Autrement dit, le judaïsme c’est n’importe quoi niveau structure et considérations intellectuelles, tout comme l’Islam d’ailleurs : l’absence de centralisation induit des courants et des sous-courants sans fin, des conceptions et des points de vue différents innombrables, etc. Parler d’un judaïsme traditionnel ou d’un Islam traditionnel, c’est croire les mensonges des fondamentalistes apparues les deux derniers siècles et leurs fictions d’un « retour aux sources ».

Mais de toutes façons le but de Jean-Luc Mélenchon est de dire que l’antisémitisme, on s’en moque, que ce qui compte c’est le racisme, sous-entendu politiquement : opposons les Arabes aux Juifs en faisant en sorte de présenter les premiers comme les opprimés les seconds comme les valets ou les maîtres du pouvoir en place.

La preuve de tout cela est que Jean-Luc Mélenchon, devant le tollé, a publié sur son facebook un texte aussi intelligent et juste que ses propos sur BFMTV étaient ignobles. Une telle différence montre qu’il savait ce qu’il faisait.

Jean-Luc Mélenchon dit à l’oral qu’il ne sait pas si Eric Zemmour est antisémite et il écrit qu’en fait il serait le porte-parole de l’antisémitisme français. Il faudrait savoir ! Mais tel est le populisme de Jean-Luc Mélenchon que de chercher à construire une sorte de narration politique l’amenant à triompher à la présidentielle… à tout prix.

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Politique

« 10 choses à retenir du discours d’Anne Hidalgo à Lille »

10 choses surtout totalement hors sol.

Le Parti socialiste n’a pas froid aux yeux après le sidérant fiasco du lancement de la campagne d’Anne Hidalgo à Lille : il assume en bloc en résumant comme suit les mesures proposées, faisant ainsi comme s’il n’y avait ni crise, ni menace de l’extrême-Droite, ni des tensions ininterrompues allant dans le sens de conflits et d’une guerre mondiale à travers l’affrontement sino-américain pour le repartage du monde.

1 – Une rémunération digne pour chacun

« Notre politique du travail sera d’abord celle d’une rémunération digne pour chacune et chacun. Digne pour les « premiers de corvée », en augmentant les salaires. Et digne pour les « premiers de cordée », qui doivent partager équitablement la valeur ajoutée dans les entreprises ! »

2 – Droit de vote à 16 ans

« Pour faire davantage participer les citoyens, le prochain gouvernement d’Allemagne propose d’abaisser l’âge du vote à 16 ans : nous le ferons !

Qu’est-ce qui justifie encore d’exclure de la vie démocratique ceux qui seront le plus concernés par les décisions d’aujourd’hui ? »

3 – Une assurance chômage universelle

« Pour la protection sociale, nous mettrons en place une assurance chômage universelle, nous reviendrons sur la suppression des 5 700 lits d’hôpitaux et nous ferons de la santé mentale, qui est à l’abandon aujourd’hui en France, une grande cause de mon quinquennat. »

4 – Un service public de la petite enfance

« Pour la famille, le cœur de nos vies, nous créerons un service public de la petite enfance. Dans l’attente, nous garantirons aux familles monoparentales un accès renforcé à la garde d’enfants. »

5 – Un droit à mourir dans la dignité

« Par ailleurs, nous ne pouvons pas tolérer que les femmes, les hommes frappés par l’irréversible perte de leur autonomie soient reclus et abandonnés. Nous ferons tout pour les accompagner le mieux possible, en développant massivement les soins palliatifs et en soutenant les aidants pour laisser aux familles la possibilité d’accompagner leurs proches sans risque de perdre leur travail. 

Et nous ouvrirons à celles et ceux qui le veulent le droit de mourir dans la dignité. Je souhaite qu’une loi encadre ce droit nouveau dès l’année prochaine. »

6 – Un droit réel à la sécurité

« Comment assurer aux Français un droit réel à la sécurité quand la police est éloignée des lieux de vie ? C’est une véritable police de la sécurité du quotidien qu’il faut bâtir ! Une police républicaine respectée et présente partout sur le territoire, dans les petites communes et bien sûr dans nos quartiers. »

7 – 60 % d’une classe d’âge diplômé du supérieur et suppression de ParcourSup

« Le premier objectif sera de porter à 60 % d’une classe d’âge, le nombre de diplômés du supérieur (car il faut préparer la France de demain). 

Je souhaite que les étudiants et les apprentis, plus nombreux soient mieux guidés dans leur choix de formation. Nous abrogerons Parcoursup ! 

Nous donnerons aux universités les moyens de fonctionner, d’investir et d’innover ! 

Nous créerons un dispositif national de suivi et d’accompagnement pour les plus de 100 000 jeunes qui sortent du système scolaire sans diplôme ni formation, avec les conséquences dramatiques que l’on connaît sur la suite de leur vie. 

Parce que l’école, c’est l’âme de la République, nous bâtirons une République de l’école. »

8 – Atteindre la neutralité carbone en 2050 et instaurer un ISF climatique

« Le deuxième objectif cest d’atteindre la neutralité carbone en 2050. Je serai pour cela la candidate de l’écologie des solutions. 

Et je veux le dire ici en toute sincérité : ce combat pour l’environnement ne doit pas nous diviser, car ce sont les plus pauvres, les plus fragiles qui souffrent en premier du dérèglement climatique.

Nous créerons une écologie des droits, droits du vivant, droits de la nature, en intégrant la protection des biens communs dans la Constitution, en définissant un crime d’écocide et en instituant un Défenseur de l’environnement, chargé de veiller à son respect en France. »

« Nous conduirons une écologie du partage. Un ISF climatique pèsera sur les ménages aisés dont le patrimoine émet le plus de carbone. »

9 – Egalité totale des salaires en cinq ans

« Ce quinquennat, je m’y engage, sera celui du droit des femmes comme une nation moderne doit le garantir !

Je veux être la première présidente de l’histoire de France parce qu’il est temps d’accomplir une grande avancée, celle de l’égalité des femmes et des hommes au travail. 

Je sais, (pour les avoir vues, pour les avoir subies), ce que les différences de traitement et les discriminations peuvent faire !

Ça suffit les attaques au respect des femmes et de leur corps ! La primauté du droit à la contraception et à l’interruption volontaire de grossesse sera assuré sur l’ensemble du territoire.

Ça suffit les 20 % de discriminations salariales ! Je m’engage à ce qu’une loi de programmation sociale soit votée dès l’été 2022, pour atteindre l’égalité totale des salaires en cinq ans

Ce sera notre première mesure, notre première loi. »

10 – Le droit à la contraception et à l’IVG assurés sur tout le territoire national

« Ça suffit les attaques au respect des femmes et de leur corps ! La primauté du droit à la contraception et à l’interruption volontaire de grossesse, sera assurée sur l’ensemble du territoire. »

Le Bonus  

Parce qu’en vérité, on a pas réussi à en faire que 10…

Garantir qu’aucun ménage ne consacre plus d’un tiers de ses revenus pour se loger et encadrement des loyers

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Politique

Sidérant fiasco du lancement de la campagne d’Anne Hidalgo à Lille

Le Parti socialiste est totalement auto-intoxiqué.

Le samedi 23 octobre s’est tenue à Lille la convention socialiste lançant de manière officielle la campagne d’Anne Hidalgo, même si celle-ci avait déclaré plus d’un mois auparavant qu’elle se lançait dans la présidentielle 2022. Deux faits marquants se sont déroulés entre-temps. Le premier, c’est la faiblesse totale d’Anne Hidalgo dans les sondages, puisqu’elle est crédité de 4 à 7% des voix. Le second, c’est l’affirmation par le dirigeant actuel du Parti socialiste, Olivier Faure, lors du Conseil national du Parti socialiste, qu’Eric Zemmour était un fasciste et proposant une ligne tendant à un certain antifascisme.

Il y avait deux possibilités : soit le premier aspect, électoraliste tranquille, l’emportait et les socialistes s’auto-intoxiquaient, considérant qu’ils allaient inexorablement progresser de toutes façons, ce que l’opposant interne Stéphane Le Foll a parfaitement résumé en disant que « le Parti socialiste fonce dans le mur en klaxonnant ». Soit le second aspect l’emportait et c’était l’affirmation, tel un electro-choc, d’une ligne combative contre le libéralisme et l’extrême-Droite, forçant à une unité de la Gauche dans les faits.

Le résultat est édifiant : cela a été le suicide. 1700 personnes (et certainement pas 2200 « militants » comme le prétend le Parti socialiste) ont constaté qu’Anne Hidalgo a été mièvre comme peut l’être la maire d’une ville bourgeoise et cosmopolite comme Paris. Enfin, constaté est un grand mot car le public a consisté en des bourgeois propres sur eux, modernistes, dont on se demande ce qu’ils peuvent bien reprocher à Emmanuel Macron à part ne pas avoir légalisé encore la consommation de cannabis.

Anne Hidalgo a sciemment tourné le dos à la Gauche historique, elle ne voit ni la guerre venir – alors que c’est une évidence indiscutable -, ni une quelconque crise (que ce soit sanitaire ou économique ou morale ou culturelle), ni une menace fasciste. Sa ligne c’est celle du réformisme béat radical – socialiste – franc-maçon, bien symbolisé par les uniques refrains présents, ceux de la Marseillaise et de l’Hymne à la joie.

La guest star était d’ailleurs Bernard Cazeneuve, ancien ministre de l’Intérieur et premier ministre, qui a tenu un discours de centre-gauche tout à fait lisse. Anne Hidalgo n’a guère fait mieux avec comme leitmotiv:

« Fidèle à notre histoire, je serai la candidate de la reconquête républicaine. Notre impératif n’a pas changé depuis Jean Jaurès : c’est porter la République « jusqu’au bout » pour réinventer notre beau modèle français. »

Et tout cela est censé, on ne sait trop comment, produire une « génération Hidalgo » (c’est un slogan officiel) au moyen de revendications comme l’ISF climatique, le droit de vote à seize ans, l’assurance chômage universelle, etc.

C’est un suicide politique. La situation historique se tend chaque jour avec une vigueur cruelle, angoissante, et le Parti socialiste s’imagine que rien n’a changé, qu’on est encore dans les années 1990-2000. Tout cela parce que les cadres socialistes sont hors-sol, corrompus, vivant au quotidien comme des bourgeois, car ils sont bourgeois.

Ce qui se profile ici, c’est un véritable déchirure politique en France, alors que plus aucun parti politique ne représente rien de connecté à la réalité. Quelque chose va se passer, la balance va commencer à pencher… lourdement.

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Écologie

Fabien « Astérix » Roussel, chasseur de sangliers

Changer le monde, ou fantasmer le passé ?

Pendant près d’un demi-siècle, après la Seconde Guerre mondiale, le PCF a eu une portée immense en France, tant numériquement que politiquement. Sa base populaire et son assise dans le pays étaient gigantesques : pourtant il n’a jamais été en mesure ne serait-ce que de bousculer le régime. Le plus grand échec du PCF a d’ailleurs été son opposition à la vague de grèves et contestations en mai-juin 1968. La raison est simple, elle est culturelle.

En fait, le PCF ne visait pas à changer le monde, mais simplement à le prendre tel qu’il est pour le rendre plus « juste » avec la CGT dirigeant les entreprises et quelques artistes et intellectuels parisiens dirigeant les affaires publiques. Il ne s’agit pas ici de « radicalité » plus ou moins grande, d’être plus ou moins « gauchiste », mais d’un véritable sujet de fond.

Fabien Roussel, son actuel dirigeant, est un très bon exemple de ce problème, il en est même caricatural. Cela avait déjà été évoqué ici récemment avec sa sortie ironique beauf sur la « libération » des poulets. C’est encore plus flagrant avec deux exemples tout récents, qui vont ensemble.

Sur France info le 18 octobre, le candidat « communiste » à la présidentielle 2022 a expliqué :

« J’en ai un peu marre de ces intellectuels condescendants qui n’arrêtent pas de nous donner des leçons sur nos pratiques, sur nos manières de faire, qui nous disent ce qu’il faut manger et comment il faut conduire ».

Sans même parler du contenu, il y a déjà que la forme est incroyablement rétrograde. Dire cela est ultra-régressif, à peine digne d’un Eric Zemmour : il faudrait donc laisser les gens vivre leur petite vie tranquille, comme avant, sans rien questionner, sans rien bousculer. Drôle de vision du monde pour un prétendu partisan de Karl Marx…

Mais le problème se pose surtout sur le fond, évidemment. Fabien Roussel répondait ici à la question des chasses dites « traditionnelles », en fait surtout particulièrement barbares. Il s’agit de pratiques de piégeage d’oiseaux qui ont été jugées illégales par le Conseil d’État (et par l’Union européenne) tellement c’est atroce, mais que le gouvernement continue quand même d’autoriser.

Ce genre de pratiques ne concerne que quelques énergumènes arriérés, qui se prétendent représentant de la ruralité mais qui ne sont en réalité qu’une minorité de furieux ennemis de la nature et des animaux. Il est évident que la société doit écraser de telles pratiques pour aller de l’avant. C’est le sens de l’Histoire, réfutant la barbarie, allant vers plus de civilisation : au 21e siècle cela signifie évidement de prendre en compte les animaux.

Mais cela, Fabien Roussel en est incapable, car il ne veut pas du 21e siècle, simplement d’un 20e siècle fantasmé. C’est exactement comme Eric Zemmour.

Le pire, c’est que Fabien Roussel sait très bien qu’au fond sa position sur les chasses « traditionnelles » est intenable. Alors il convoque un matérialisme historique passé à la moulinette beauf pour assumer qu’il ne veuille rien changer :

« Il y a un sens de l’histoire qui fait que petit à petit, ces pratiques vont disparaître naturellement, et donc il faut laisser faire la vie »

Cela est évidemment faux. Le vieux monde ne s’effondrera jamais de lui-même si la société ne se soulève pas contre lui ! C’est cela que les communistes nomment révolution… Apparemment, il n’est pas au courant. Et surtout, en l’occurrence, il s’agit effectivement de laisser faire la vie quand on est de Gauche, et donc ne pas laisser faire en France des massacres organisés d’oiseaux comme simples « loisirs ».

Fabien Roussel n’est pas du bon côté dans cette histoire, car il est un partisan de la chasse et des chasseurs. Selon lui, les chasseurs seraient mêmes « essentiels à la préservation de notre environnement » ! Il connaît en effet par cœur toute la propagande du lobby de la chasse et récite leurs arguments, avec le fameux sujet des sangliers :

« Je sais que chez moi, il y a une surpopulation de sangliers et donc tous les ans, c’est la préfecture qui fait appel aux chasseurs pour réguler cette surpopulation de sangliers ».

N’importe qui connaissant les campagnes françaises sait que c’est là un gros mensonge. Déjà car les chasseurs nourrissent les sangliers et en lâchent eux-même dans la nature pour préserver leur loisir. Mais surtout, il ne faut pas se moquer du monde : un pays comme la France aurait déjà liquidé depuis longtemps les sangliers s’ils représentaient un « problème », comme cela a été fait avec le loup. Le capitalisme sait très bien massacrer la nature quand il a besoin.

Le « problème » des sangliers est surtout celui de l’étalement urbain. A un moment donné, à force de construire partout, forcément qu’il y a des sangliers pour « oser » s’aventurer dans des emprises humaines. Alors il y a ensuite les chasseurs pour dire « voilà regardez, nous sommes utiles, notre loisir sert à vous protéger des sangliers ».

La chasse aux sangliers, voilà en tous cas l’horizon de Fabien Roussel… ce grand fan d’Astérix et Obélix, comme le montre cette publication du 21 octobre avec une photo prise dans les locaux du siège du PCF à Paris avec le nouvel épisode de la BD.

Même les gens de droite sont pourtant lassé par Astérix et Obélix, à en croire le Figaro qui trouve ce 39e épisode très ennuyant. Mais Fabien Roussel, lui, adore, et prétend qu’il s’agit là de la culture populaire ! Quelle ringardise, quel populisme, et surtout : quelle arriération culturelle !

Fabien Roussel a tout faux quand il s’affirme « gaulois réfractaire », car c’est tout l’inverse de ce que la Gauche doit viser. Ce qu’il faut, ce n’est pas un village isolé et replié sur lui-même, à la Eric Zemmour. Ce qu’il faut viser, c’est une nouvelle Rome avec sa perspective universelle et sa volonté de civilisation.

Le futur, ce n’est pas la vieille Gaule, c’est une nouvelle Rome sociale, avec la classe ouvrière au pouvoir, avec les femmes aux cœur des décisions, avec la culture au centre de la vie des gens, avec la nature chevillée au corps et l’avenir de la planète Terre comme horizon principal, avec le véganisme d’ailleurs comme exemple de solution pour changer les gens de l’intérieur et changer enfin le sort des animaux.

Le futur se construit dans le débat démocratique populaire et la Gauche historique comme moteur des idées et de la culture, pas avec Astérix, Obélix et autres nostalgies d’un passé idéalisé, que ce soit avec les « ZAD » ou avec Eric Zemmour. Le seul romantisme doit être celui de l’avenir!

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Politique

Jean-Luc Mélenchon sur la classe moyenne supérieure qui hésite

C’est un aperçu « sociologique » révélateur.

Jean-Luc Mélenchon a accordé une interview au Nouvel Obs à la fin octobre 2021, ce qui est un exercice risqué pour lui. Le Nouvel Obs, c’est en effet la « seconde gauche », c’est-à-dire l’alliance des radicaux de gauche, des banquiers de gauche, des intellectuels de gauche du quartier latin, de la gauche caviar du Parti socialiste.

Jean-Luc Mélenchon a été au Parti socialiste pendant quarante ans, il est issu de cette « seconde gauche », opposée à la Gauche historique au nom d’un capitalisme moderniste et social, voire carrément post-capitaliste (comme l’espéraient le PSU et la CFDT des années 1970). Mais il l’a quitté en prônant le populisme qui se veut transformateur et « utopiste ». Cela a provoqué un grand conflit mais en raison des élections présidentielle de 2022, Jean-Luc Mélenchon arrondit les angles.

Et, dans cette interview, il est un passage très intéressant sur la classe moyenne supérieure qui « hésite » justement. C’est même remarquable. En effet, la classe moyenne supérieure est ni plus ni moins qu’aux portes de la bourgeoisie socialement parlant et même il faut d’ailleurs plutôt ici parler de « bourgeoisie intellectuelle ».

C’est tout à flagrant d’ailleurs vu comment Jean-Luc Mélenchon en parle et en en parlant comme il le fait au Nouvel Obs, dont cette bourgeoisie intellectuelle est le public (les publicités pour les logements chics et les montres de luxe en font foi), il dit: attention ex-amis de la seconde gauche, nous avons le même public et nous risquons tous deux de tout perdre.

On notera, intellectuellement, la chose suivante. Tout d’abord, une classe ne peut pas flotter, si on prend le marxisme, et d’ailleurs il n’y a pas de « classe moyenne ». Ce serait anti-dialectique pour le marxisme d’avoir une troisième classe en plus des deux camps opposés. La « classe moyenne » est donc une couche sociale petite-bourgeoise qui oscille justement car elle n’est pas une classe. On remarquera au passage que les paysans ne sont pas une classe pour le marxisme non plus, qu’ils oscillent ainsi également.

Jean-Luc Mélenchon fait également référence à un ouvrage très célèbre à l’ultra-gauche dans les années 1960-1970, « Psychologie de masse du fascisme », dont l’auteur est un disciple dissident de Sigmund Freud, Wilhelm Reich. Il définit par contre de manière erronée ce que dit l’ouvrage, qui n’aborde pas tant la question du « déclassement » que du « refoulement » qui amènerait les gens à se comporter de manière volontaire comme des êtres soumis, serviles et pervers. C’est ce qu’on appelle du « freudo-marxisme ».

Mais l’idée de Jean-Luc Mélenchon est donc la suivante. Il existe une couche sociale intellectuelle favorisée en France, allant du cinéma aux hauts fonctionnaires en passant par les médias. Celle-ci a largement intégré le camp de la propriété de par son succès historique et par là même elle risque en ce moment, dans ce contexte, de basculer dans le camp des propriétaires historiquement nullement lié à la seconde gauche.

C’est le risque de tout perdre, avec une division de cette couche sociale entre ultra-modernistes cosmopolites à la EELV et conservateurs repliés de l’autre. Il y a d’ailleurs un article du Figaro au sujet de cette fracture, Les médias de gauche face à une fracture idéologique générationnelle.

On y lit entre autres que :

« Dans des rédactions comme L’Obs , Libération et Le Monde , engagées dans la protection des droits des minorités, une partie des journalistes pointent un fossé idéologique autour de sujets comme la laïcité, le genre ou l’école (…).

une partie des journalistes s’inquiètent du conflit latent entre le courant multiculturaliste et la notion d’universalisme républicain. Ce dernier incarnant une conception de la citoyenneté centrée sur l’individu en tant que membre de la collectivité nationale, indépendamment de toute communauté d’appartenance. «Au quotidien, on ne rit plus des mêmes choses, on ne s’indigne plus des mêmes choses», lance un journaliste de L’Obs (…).

Plusieurs plumes historiques du magazine redoutent aujourd’hui l’érosion de leur lectorat historique. Alors que dans le même temps, l’Obs peine à conquérir de nouveaux abonnés numériques (21.000 selon l’ACPM), dans la bataille qui oppose les grands sites d’information. »

Jean-Luc Mélenchon veut se présenter par conséquent comme celui qui peut maintenir la seconde gauche, en utilisant les couches populaires de manière « populiste » tout en intégrant une aile « post-moderne », permettant ainsi à la bourgeoisie intellectuelle de gauche, avec également ses banquiers, de maintenir ses positions alors que la Droite mène une gigantesque offensive, notamment avec Eric Zemmour.

Son projet, c’est celui des radicaux de gauche de la IIIe République et il va de soi que c’est totalement vain dans un capitalisme non pas seulement à bout de souffle, mais en crise, avec la guerre à l’horizon et des perturbations internes dans chaque pays toujours plus violente. Jean-Luc Mélenchon, de par sa position historique, ne peut tout simplement pas voir que le château de cartes capitaliste est en train de dégringoler.

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Restructurations économiques

«France 2030» : le projet de restructuration capitaliste d’Emmanuel Macron

C’est un projet présidentiel.

Le président Emmanuel Macron a présenté mardi 12 octobre un grand plan d’investissement intitulé « France 2030 ». C’est sa version de la restructuration capitaliste, et cela constituera la base de son programme électoral pour 2022.

La restructuration capitaliste est une actualité incontournable, tous les candidats à présidentielle 2022 vont devoir s’y coller : la question sera de savoir quelle sera leur proposition, leur vision.

En l’occurrence, Emmanuel Macron compte entraîner tous le pays dans une sorte de grande machinerie techno-innovante, qui serait censée sauver le capitalisme français de la concurrence mondiale. Il est ici très clairement fait appel aux fameux état d’esprit ingénieux à la française (en tous cas tel que les français se l’imaginent), pour concurrencer les grandes puissances (même l’Allemagne) en se voulant plus « malins » que les autres.

So French !

C’est la grosse artillerie qui est sortie :

Investir 1 milliard d’euros dans le nucléaire

Devenir le leader de l’hydrogène vert en 2030

Accélérer la décarbonation de l’industrie

Produire 2 millions de véhicules électriques et hybrides

Produire à l’horizon 2030 le premier avion bas carbone

Accélérer la robotisation et la numérisation de l’agriculture

Avoir 20 bio-médicaments contre le cancer et créer les dispositifs médicaux de demain

Remettre la France « en tête de la protection des contenus culturels et créatifs »

Réinvestir la conquête spatiale

Explorer les fonds marins

«Près de 6 milliards d’euros» d’investissements dans les composants électroniques »

Ce qui saute au yeux bien sûr est que la moindre goutte de prétention écologique est jetée à la poubelle ; c’est soit la planète, soit la restructuration du capitalisme et c’est bien entendu le capitalisme qui est choisi.

La France, avec Emmanuel Macron, doit donc s’attendre à toujours plus de déchets nucléaires. Il est aussi envisager d’aller encore plus loin pour racler de sol des grands fonds marins afin de trouver des « métaux rares » et n’importe quelles autres choses à piller pour servir le capitalisme français.

Et cela est assumé de manière très claire :

« Qui peut accepter que nous laissions dans l’inconnue la plus complète une part si importante du globe »

C’est l’expansion capitaliste à tout prix !

C’est la même chose pour l’espace, la France d’Emmanuel Macron compte bien participer de plus bel à la pollution de l’espace (véritable fléau très documenté) avec tout un développement de mini-lanceurs réutilisables ou de micro-satellites, pour «prendre part à l’aventure spatiale».

On notera d’ailleurs un cynisme particulièrement machiavélique à propos de la question écologique. La France appuie régulièrement sur la question des émission de gaz à effet de serre : elle entend se servir de cette aspect pour avoir un avantage concurrentiel par rapport aux puissances concurrente. Notamment en raison du nucléaire, et c’est ici directement le concurrent allemand qui est visé.

C’est là, au fond, toute l’essence du plan « France 2030 » : face à l’industrie « lourde » et aux gros moyens classique du capitalisme allemand, Emmanuel Macron entends jouer la carte de l’ultra-technique.

Au passage, on comprend très bien que le corollaire est que les ouvriers sont censés se plier aux exigences des « ingénieurs », pour relancer l’économie, en fait la restructuration du capitalisme. Les autres qui ne rentrent pas dans les plans… seront passés par pertes et profits.

Et tout cela va coûter beaucoup d’argent, énormément d’argent : 30 milliards d’euros sont déjà annoncés. Dans un capitalisme déjà à crédit, c’est un gros risque. Une partie des classes dominantes préférera ne pas le prendre et aller directement au conflit, avec la guerre plutôt que la restructuration.

Même si historiquement, on aura les deux si la table n’est pas renversée.

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Restructurations économiques

Les restructurations vont se multiplier

La vraie Gauche doit s’y opposer frontalement.

Le 7 octobre, relate Révolution permanente, le Ministre de l’Economie, des Finances et de la Relance Bruno Le Maire a choyé les entrepreneurs dans leur rôle dans la crise sanitaire et il a exprimé un grand optimisme :

« Nous avons mis en place tous les instruments nécessaires pour protéger les entrepreneurs français. La France va sortir plus forte de cette crise économique. »

Pourtant, comme le relate l’édition d’Octobre 2021 de la revue pdf Crise, la France n’a pas encore récupéré son niveau économique d’avant-crise. C’est espéré pour la toute fin d’année, et on voit mal comment le capitalisme français va sortir plus fort alors qu’il a reculé pendant une longue période, que le développement s’est enrayé en conséquence, tout en se retrouvant qui plus est avec des dettes littéralement colossales.

La raison de cet optimisme est cependant tout simple : les travailleurs ont continué de dormir, leur niveau de conscience est toujours lamentable. On en est au point où Yves Veyrier, le dirigeant de la CGT-Force Ouvrière, est obligé de se réjouir que le 5 octobre 2021, pour la mobilisation des fonctionnaires, il y a eu :

« plus de deux cents manifestations et, à chaque fois, les adhérents et drapeaux FO étaient là, même quand il a fallu affronter la pluie ».

Affronter la pluie est une gageure, alors affronter les capitalistes, n’en parlons même pas… Surtout qu’on parle en plus de fonctionnaires, ayant un emploi très largement assuré. Le confort petit-bourgeois, même s’il n’est parfois pas si confortable, envoûte les gens.

Reste qu’il y a une seconde étape qui s’ouvre désormais en conséquence : les restructurations. Puisque les travailleurs sont endormis, il y a d’autant plus d’espace pour leur faire payer les pots cassés. Les restructurations vont se multiplier, accélérant les situations de monopoles.

Elles ont lieu partout, avec plus ou moins de réactions des travailleurs. Il y a en ce moment une grève à Albertville (qui en appelle à la direction !) contre une restructuration à la Poste, il y a un plan de restructuration de trois ans chez Renault pour 2022-2024, il y a toute une série sans précédent d’acquisitions dans l’habillement et les chaussures (comme le rachat de Go Sport, de GAP et de 511 magasins Camaïeu par la Financière Immobilière Bordelaise)…

Et cela va être le grand thème de la prochaine présidentielle. Chaque candidat va représenter une forme de restructuration différente. Et il ne faut pas ici sous-estimer le candidat du PCF, Fabien Roussel, car même s’il y a des tensions PCF-CGT, leur ligne est exactement la même, comme en témoigne cette position de la CGT en octobre 2021 expliquant qu’il faut « développer l’industrie » :

« Le progrès social et l’intérêt général doivent guider l’État dans la planification d’un développement industriel qui vise à satisfaire les besoins de la population. Des investissements massifs, publics comme privés, doivent être affectés au développement des capacités productives.

Marie-Claire Cailletaud, co-responsable des questions industrielles au sein de la Confédération, rappelait que « les salariés sont les mieux placés pour dire ce qu’ils peuvent produire et comment ils peuvent le produire ». »

Ce discours est celui du PCF depuis les années 1970, avec le remplacement de la « dictature du prolétariat » par « l’autogestion » permise par la soumission du « capitalisme monopoliste d’État » grâce à des élections et des mobilisations populaires victorieuses. La CGT est l’expression de cette ligne, à moins que cela soit l’inverse et que le PCF soit le bras politique de la CGT, mais cela ne change rien au fond ici.

Ce qui compte, c’est de voir quelle est la position de la Gauche qui est nécessaire. Faut-il proposer une meilleure restructuration, une autre restructuration, pas de restructuration ou bien s’opposer frontalement aux restructurations, car le capitalisme a fait son temps?

Là est la question de fond, celle qui change tout. Parce que soit on aide le capitalisme, soit on ne l’aide pas, soit on cherche à le bousculer, soit on cherche à le faire tomber. Et dans une situation de crise cela se polarise vite en une alternative avec/contre le capitalisme.

Il faut donc suivre les restructurations qui se développent, les interpréter correctement et voir les positions des uns et des autres, qui révéleront dans quel camp ils seront, celui des capitalistes ou celui des travailleurs.

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Politique

Olivier Faure au Conseil national du Parti socialiste: Éric Zemmour est un fasciste

L’explication est limpide.

La définition du fascisme donné par Olivier Faure est, grosso modo, celle d’Albert Camus bien plus que celle de la Gauche historique, mais elle converge tout de même avec elle. C’est une prise de position résolue et absolument nette, faisant la preuve que même réformiste et composé d’élus, le Parti socialiste porte en lui des choses positives, à l’opposé des populistes post-gauche de La France Insoumise et autres ultras.

Olivier Faure contribue ici positivement à poser le curseur, il indique une tendance politique par un apport en termes de position. Il souligne bien que l’actualité, ce sont les crises.

C’est de la politique et cela montre le sens politique du Parti socialiste (le discours parle même de lutter contre ceux « qui placent l’Etat au service du capital », s’appuie de manière fondamentale aux Francs-Tireurs Partisans Main d’Oeuvre Immigrée pourtant communiste, fait référence au roman Aden Arabie de Paul Nizan alors communiste où est dit le fameux « J’avais vingt ans. Je ne laisserai personne dire que c’est le plus bel âge de la vie »…).

Le Parti socialiste voit bien qu’il y a une barre à Gauche qui est nécessaire, qui est possible, qui a besoin d’être posé rationnellement pour se mettre en place. C’est bien qu’il porte quelque chose!

Voici la vidéo, puis le texte du discours, fait en clôture du Conseil national du Parti socialiste, avec en gras la partie particulièrement marquante.

« Chers camarades,

Nous venons aujourd’hui de clore notre congrès. Je vous remercie toutes et tous de votre implication pour mener à bien ce long processus qui s’achève avec la désignation de l’équipe de direction.

Sa vocation, son ambition, sont d’accompagner les prochains mois, les campagnes présidentielle et législatives et, au- delà, de continuer la renaissance de notre formation politique.

Dans quelques jours, nous désignerons celle ou celui qui nous représentera lors de la prochaine élection présidentielle.

Comme Pierre vient de le rappeler, nous avons, conformément au vote unanime du congrès, veillé à ce que chacun puisse communiquer la semaine prochaine en direction de l’ensemble des militants, par écrit sous la forme d’une profession de foi détaillée, et sous la forme d’un long échange vidéo.

Et à partir du 15 octobre au matin, dès que les résultats seront connus, nous entrons en campagne !

Dans la nuit, nous ferons partir à l’impression un premier tract de campagne et les premières affiches avec l’identité de celle ou celui que nous aurons élu·e.

Les camarades du Secrétariat national se mettront immédiatement en mouvement. En lien avec l’équipe de campagne du candidat, nous mettrons en place une équipe opérationnelle qui fera le lien avec l’ensemble des fédérations.

Dès réception des premiers outils de campagne, physiques et numériques, nous organiserons une première semaine de mobilisation. Sur les marchés, dans les gares, sous les préaux, nous montrerons que nous entrons dans le débat avec la ferme volonté de défendre des positions claires dans un moment de confusion.

Le 23 octobre, nous organiserons la convention d’investiture à Lille où nous serons accueillis par Martine Aubry et la fédération du Nord.

La période exige beaucoup de nous. Sans doute plus encore qu’au cours du demi-siècle passé.

Nous enchaînons les crises. Les Français en font l’expérience douloureuse sur le plan social, économique, démocratique, écologique, sanitaire.

Dans cette France qui se cherche un destin, la question identitaire est venue remplir un vide de sens et s’est imposée dans les médias.

Le polémiste Éric Zemmour est sur toutes les antennes. Et c’est par lui que je voudrais entamer mon propos. Non pas pour contribuer, à mon tour, à en faire le centre de toutes les attentions, mais pour dénoncer avec force la place qui lui est faite. Dans la compétition que se livrent les médias, la course à l’audience a remplacé le devoir d’informer, le buzz s’est substitué aux idées. Les jeux du cirque ont leur règle : sans outrance, pas d’existence.

Alors désormais, on fait salon avec monsieur Zemmour, on discute volontiers de ses saillies racistes comme s’il s’agissait d’opinions défendables puisqu’elles sont enveloppées dans la soie de l’érudition.

Alors je le dis, puisque personne ne le dit. Éric Zemmour est un fasciste.

Je sais qu’en prononçant ces mots, certains me répondront qu’il ne faut pas exagérer. Après tout, Zemmour n’a quand même pas proposé d’ouvrir des camps de concentration.

Ces réflexions font écho à ces phrases d’Umberto Eco prononcées à l’occasion du cinquantième anniversaire de la libération de l’Europe : « le fascisme est toujours autour de nous, parfois en civil. Ce serait tellement plus confortable si quelqu’un s’avançait sur la scène du monde pour dire : je veux rouvrir Auschwitz.

Hélas la vie n’est pas aussi simple. Le fascisme est susceptible de revenir sous les apparences les plus innocentes. Notre devoir est de le démasquer, de montrer du doigt chacune de ses nouvelles formes, chaque jour dans chaque partie du monde ».

S’il n’y eut qu’un seul nazisme, il est possible de jouer au fascisme de mille façons. Et c’est à ce travail de reconnaissance que nous invitait ce grand humaniste il y a déjà trente ans. Il fixait ainsi les caractéristiques du fascisme primitif :

– Le culte de la tradition : la vérité a été annoncée une fois pour toutes. On ne peut que continuer à interpréter son obscur message,

– Le refus du modernisme, c’est-à-dire le rejet de l’esprit de 1789, du siècle des Lumières, conçu comme le début de la dépravation,

– La suspicion envers le monde intellectuel,

– Le désaccord présenté comme une trahison,

– L’exacerbation de la peur de la différence,

– L’instrumentalisation des frustrations individuelles et l’appel aux classes moyennes épouvantées par la pression de groupes sociaux inférieurs,

– La nationalité comme privilège de gens à qui on signifie qu’ils sont assiégés,

– La dénonciation d’un complot qui vient de l’intérieur,

– La vie présentée comme une guerre permanente,

– Le culte de l’héroïsme étroitement lié à celui de la mort,

– Puisque la guerre permanente et l’héroïsme sont des jeux difficiles à jouer, le transfert de la volonté depuissance sur les questions sexuelles. Avec à la clé le mépris des femmes et la condamnation des mœurs non conformistes,

– Un leader, interprète du peuple et de la volonté commune, en lieu et place d’un parlement présenté comme corrompu.

Voilà la définition du fascisme.

Que nous manque-t-il pour comprendre ce qui s’installe sous nos yeux, au grand jour ?

Ses nouveaux admirateurs me rétorqueront que ces caractéristiques s’appliquent aussi bien à l’islamisme radical. Oui, l’islamisme radical est un fascisme. Mais on ne combat pas une forme de fascisme par une autre forme de fascisme !

On l’affronte avec les valeurs de ceux qui sont morts pour la France. Morts pour que l’on puisse continuer à vivre ensemble quelles que soient nos convictions religieuses ou civiques, nos origines, ou nos prénoms.

Il n’y a pas plus français que ces prénoms : Missak, Spartaco, Szlama, Celestino… Ils le sont par le sang versé. Ils étaient la France quand le maréchal Pétain collaborait dans la honte, livrait des juifs, hommes, femmes et enfants, français ou étrangers.

Alors je sais que d’autres vont lever les yeux au ciel et, bardés de leur impuissance, me diront : à quoi bon employer les grands mots, ressortir l’affiche rouge et les visages hirsutes du groupe Manouchian ? De toute façon, la dénonciation, ça ne marche plus.

Mais je ne suis pas venu vous parler de dénoncer, mais de combattre !
Et le combat, ça commence par mettre des mots sur des idées, sur des faits, « pour ne pas ajouter aux malheurs du monde » pour reprendre Camus.

Le combat, ça commence par le refus de la banalisation. Le refus de céder à ce que l’on croit être l’esprit du temps. Le refus de débattre poliment des propos d’un raciste récidiviste. Le refus de suivre une pente que l’on croit facile.

Oui, je sonne l’alerte.

Je sonne l’alerte parce que je ne veux pas que les plus jeunes puissent mettre un signe d’équivalence entre ce que nous disons et ce que disent les fascistes. Je ne veux pas que le travail de mémoire, l’éducation des générations après- guerre, tout ce travail pour que le pire ne soit plus notre avenir, soit réduit à néant.

Je sonne l’alerte parce que je vois la droite – canal historique – emboiter le pas de l’extrême droite.

Parce qu’elle est incapable de se distinguer d’Emmanuel Macron qui applique son programme économique et social, elle se lance dans une surenchère folle. Au lieu de bâtir des digues, elle n’ose déjà plus dire comme monsieur Jacob, qu’Éric Zemmour est raciste.

Madame Pécresse veut réviser la Constitution, monsieur Bertrand a pour priorité d’abaisser la majorité pénale, et même le placide monsieur Barnier en vient à contester les institutions européennes et à réclamer un « électrochoc de sécurité ».

Avant, on avait les « chocs », choc de simplification, choc de compétitivité, choc de confiance, etc. Visiblement, c’était trop peu.

Pas plus tard qu’hier, c’est le vice-président des mal nommés Républicains qui évoquait une « épuration ethnique » en cours dans les banlieues !

Voilà, je m’agace et m’indigne de voir cette droite qui se dit républicaine s’oublier par peur d’être siphonnée. Oui, la République est en danger quand ses défenses immunitaires faiblissent par lâcheté ou par calcul.

C’est à ce moment de la discussion que d’autres encore me diront, « tu as raison. L’heure est grave et le péril est grand. Il faut donc se protéger derrière un rempart. Et le seul rempart connu, c’est Emmanuel Macron ».

Mais non !

mmanuel Macron n’est pas un rempart, il est le pont-levis qui s’abaisse, année après année.

Oh ! je ne dis pas qu’il a décidé de faire entrer le loup dans la bergerie. Mais il a décidé depuis l’origine d’utiliser la peur du loup pour mieux maîtriser le troupeau. Au lieu de discuter des propositions alternatives que nous présentions, il a sans cesse cherché à valoriser l’affrontement avec les forces les plus extrêmes pour jouer le rôle du rempart.

Quel rempart contre l’obscurantisme, le nationalisme et le populisme est-il, lui qui a valorisé Bigard, Raoult, Villiers, Zemmour… ?

Tous ont eu droit aux attentions complices du chef de l’État. Mais ce n’est pas avec Bigard que l’on comprend le peuple, avec Raoult que l’on vainc la pandémie, avec Villiers que l’on évoque le destin de la France, et à Éric Zemmour que l’on demande une note sur l’immigration !

Il n’a cessé de donner des gages à la droite de la droite, en restreignant le droit d’asile, en refusant l’Aquarius, en produisant une loi sensée nous protéger du séparatisme, en passant de « la colonisation est un crime contre l’humanité » à un discours sur la « rente victimaire » des ex-colonisés.

La campagne ne fait que commencer et je suis déjà excédé.

Je n’en peux plus de ces débats rances. L’époque mérite tellement mieux que ça. Elle est formidablement enthousiasmante ! En tous cas, elle pourrait, elle devrait l’être.

Nous faisons face à des défis majeurs qui nous imposent de penser le monde qui vient.

Partout en France naissent des initiatives citoyennes, associatives. La solidarité se réinvente dans des tiers lieux. L’économie sociale et solidaire n’est plus regardée avec condescendance. Les nouvelles technologies réinventent nos manières de travailler. Le monde de l’entreprise lui-même s’interroge sur son modèle économique et, même si c’est trop lent, s’interroge sur son empreinte carbone.

L’agro-écologie, c’est-à-dire la conception de nos systèmes de production en s’appuyant sur les fonctionnalités de l’écosystème, gagne du terrain. Le monde de la culture ne s’est jamais autant démocratisé. Le rapport à la nature et au vivant fait évoluer notre conception de l’universel. Les tabous sur les violences sautent. Les victimes sortent du silence. Les femmes revendiquent leur place.

Et le débat politique devrait tourner autour d’un supposé « grand remplacement » des chrétiens par des musulmans fanatiques ? Sur la responsabilité de Vichy, débat déjà tranché par les historiens.

J’ai écouté hier la voix grave de Robert Badinter, s’interrogeant au soir de sa vie. Après avoir évoqué l’arrestation de sa grand-mère en novembre 1942 par la Milice française, il prononce ces mots « Ça me paraissait un orage emporté par les vents de l’Histoire, je n’en suis plus si sûr, aux jeunes générations d’y veiller ».

Nous ne laisserons pas Robert Badinter partir en ayant le sentiment que tout recommence. C’est à nous de veiller, de transmettre, et pour cela d’engager la France sur un projet qui fédère. La société française bouge. Elle veut du mouvement. Elle aspire à la justice.
Elle demande des comptes aux puissants.

Elle demande des comptes, y compris cette semaine à l’Église catholique. Quelques cas de viols sur mineurs, c’est une honte. Des centaines de milliers de cas, couverts par une hiérarchie soucieuse de sa réputation, cela relève du crime organisé. Aucune autorité n’est incontestable. Le silence n’est plus une option.

Oui, la société bouge.

Elle réclame l’égalité, à commencer par l’égalité entre les femmes et les hommes.

À cette génération #MeToo, je dis que nous voulons en finir avec l’omerta qui a trop longtemps couvert les violences faites aux femmes. Nous ferons tomber les tabous qui pèsent sur la prise en charge de leur santé, sur leur parentalité, sur leur sexualité. Parce que oui, le privé est politique.

Nous voulons augmenter le pouvoir d’achat des Français parce qu’il est temps de leur rendre la part qui leur revient. Mais je le dis aussi, nous commencerons par les Françaises, et dans le prochain quinquennat, l’objectif doit être l’égalité salariale entre les femmes et les hommes.

Ce sont ces femmes dont on a loué les vertus de premières de corvée qui en seront les premières bénéficiaires : caissières, femmes de ménage, aides soignantes, infirmières, aides à domicile. Sans oublier ces sages-femmes qui, hier encore, n’ont eu d’autre choix que de manifester pour être payées dignement pour l’exercice de l’un des plus beaux métiers du monde…

Ouvrons les yeux ! Une société qui dévalorise les métiers de l’attention aux autres et qui, « en même temps », tolère l’évasion fiscale, diminue l’imposition des plus riches quand tous les autres s’appauvrissent, est une société en sursis.

Cette semaine, la presse d’investigation a révélé le nouveau scandale des Pandora Papers. Après les « offshore Leaks, Luxleaks, Panama Papers, Paradise Papers »…

Et qu’apprend-t-on le lendemain ? Bruno Le Maire et les ministres des finances de l’Union européenne trouvent le moyen de réduire la liste noire des paradis fiscaux !

C’est la nausée. C’est ce que j’ai dit dans l’hémicycle et que je redis devant vous.

Chaque année, la France et l’Union européenne voient ainsi s’évader 20 % de leurs recettes au titre de l’impôt sur les sociétés. Ce que ne paient pas ces individus ou ces entreprises, ce sont tous les autres qui le paient ! Il est là le vrai ras- le-bol fiscal des Français !

La frontière entre fraude et optimisation fiscale agressive est bien mince. Toutes ces opérations ne sont pas illégales, mais elles sont immorales parce qu’elles laissent à tous les autres le soin de payer la contribution aux biens communs : hôpitaux, écoles, police, services publics…

Quand à la fraude s’ajoutent les cadeaux fiscaux sur l’ISF, la flat tax ou l’exit tax, pour ne citer que les plus célèbres, il y a de quoi bouillir.

Sur ce quinquennat, 220 milliards de cadeaux aux plus riches et d’aides aux plus grandes entreprises sans contreparties.

Les solutions existent. Nous les avons défendues. Elles ont été jusqu’ici systématiquement repoussées par le gouvernement. Nous les défendrons à nouveau dans cette élection présidentielle parce qu’il n’est pas de cohésion sociale sans justice fiscale.

Nous voulons la transition écologique. Cette transition n’est plus seulement un objectif, elle est devenue un impératif. Elle va supposer de changer nos façons de consommer, de nous déplacer, de nous loger.

Mais la transition écologique suppose aussi la justice sociale ! Sans la justice sociale, la transition n’aura pas lieu. Elle sera contestée sur les ronds-points et dans les rues.

Le prix de l’énergie augmente de façon vertigineuse. Cet hiver, il y a des familles qui vont devoir arbitrer entre se chauffer et manger. D’autres devront emprunter, non plus pour investir, mais simplement faire face à ces dépenses de la vie courante.

Le gouvernement a inventé le blocage des prix après la hausse, le parapluie après la pluie. Il concède un chèque de 100 euros quand l’augmentation représente, pour un couple avec deux enfants, 800 euros par an. Et ce chèque n’est accordé qu’aux foyers cumulant un revenu de moins de 1 800 euros par mois…

Trop peu et trop tard ! Par comparaison, le gouvernement espagnol de Pedro Sanchez a baissé de 50 % la TVA sur le gaz et l’électricité !

Les plus précaires dont le gouvernement se soucie si peu, ce sont encore ceux qui vont payer sa réforme de l’assurance chômage. Et parmi eux, d’abord les plus jeunes qui se verront priver de l’accès à l’indemnisation. Qu’il ne vienne pas ensuite nous dire que « 20 ans reste le plus bel âge de la vie ».

L’entrée dans l’âge adulte ne peut pas ressembler à un parcours du combattant, un bizutage cruel qui oblige à passer par les files des soupes populaires. C’est pourquoi nous portons l’idée d’un « minimum jeunesse ».

Ce débat sur l’assurance chômage n’est que la préfiguration d’un autre : qui va payer la facture du « quoi qu’il en coûte » ? Aujourd’hui, ce sont les chômeurs qui paient l’acompte. Demain, les retraités. Et ensuite tous les autres, les classes moyennes, les classes populaires qui règlent pour tous ceux que le gouvernement épargne.Ils sont là les débats de la présidentielle.

La justice, c’est la seule boussole possible. C’est la nôtre. Je pourrais multiplier les exemples hors de l’actualité immédiate, mais ce n’est pas le jour.

Vous l’avez compris, chers camarades, j’ai simplement hâte d’entrer en campagne. Hâte de rendre les coups. Hâte de démonter avec vous tous les discours déclinistes, défaitistes, fatalistes. Hâte de combattre les discours populistes, complotistes, nationalistes. Hâte de faire face aux néolibéraux, globalisés, qui placent l’État au service du capital, détruisent nos biens communs, refusent le partage équitable de la valeur ajoutée et ne respectent ni les hommes ni la nature.

Oui, j’ai hâte de parler aux côtés de notre candidate, ou candidat, de cette République sociale, écologique, féministe, démocratique à laquelle j’aspire. Hâte de dire avec vous toutes et tous, ce que les socialistes portent.

Tenez-vous prêts.
Le 14, tout commence.
Vive les socialistes, vive la gauche, vive la République et vive la France !

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Les pérégrinations beaufs du candidat PCF Fabien Roussel

La candidature de Fabien Roussel à la présidentielle 2022 sera très probablement anecdotique, tellement ce genre de personnage ringard et hors-sol n’intéresse pas grand monde. Il y a cependant que Fabien Roussel se présente avec l’étiquette « PCF » et que ce parti représente historiquement quelque chose d’immense en France, surtout pour le patrimoine de la Gauche et des classes populaires.

Alors, il est vraiment pénible de constater la décrépitude du PCF avec quelqu’un d’aussi lamentable que Fabien Roussel. Lors d’une conférence de presse, il a fait une pique anti-écolo d’une beauferie assumée qui en dit long sur sa perspective politique et sur ce qu’il représente politiquement.

Sa beauferie est d’autant plus assumée qu’il a ensuite appuyer dessus en relayant cela sur Twitter, cette poubelle du débat public (et par ailleurs d’un « militantisme » fictif ultra-gauchiste).

Voici la capture de son message :

On notera d’ailleurs que son message est mensonger, puisqu’il ne compte pas « libérer » les animaux d’élevage, mais simplement leur donner accès au « plein-air ». Peut-être s’imagine-t-il que la misère vécue par les animaux parqués dans les élevages est moins pénible avec quelques rayons de soleil ? En tous cas, pour ceux qui avaient des doutes, le slogan du PCF « l’humain d’abord » est maintenant très clair : il signifie « la nature et les animaux éventuellement après ». Le capitalisme appréciera.

En bon opportuniste, Fabien Roussel s’est ensuite imaginé pouvoir gagner un peu d’audience en répondant à Hugo Clément, figure médiatique du moment sur le thème des animaux. Cependant, soit il le fait exprès (et c’est grave), soit il ne comprend vraiment rien à rien (et c’est encore plus grave), car il met les pieds dans le plat et s’enfonce encore plus dans la beauferie :

On notera au passage, populisme beauf oblige, que Fabien Roussel a salué la mémoire du businessman mégalomane Bernard Tapie :

C’est vraiment lamentable, tant on sait à quel point Bernard Tapie représente le football moderne anti-populaire, le foot business faisant du spectacle anti-sportif, la tricherie, etc.

C’est lamentable et que dire de ce que ressent la base du PCF qui s’attendait à un Fabien Roussel assumant des fondamentaux et un certain retour aux sources. Là on a un beauf qui montre juste que le 21e siècle est trop compliqué pour lui…

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Gauche : huit candidats à la présidentielle et une absence de militants

Il y a des candidats, il y a des gens qui agissent, mais pas de militants.

Au 14 septembre 2022, voici la liste des candidats à la présidentielle 2022 de gauche ou issue de la Gauche :

* Fabien Roussel en tant que candidat du PCF ;

* Anne Hidalgo (la candidature doit encore être validée par le Parti socialiste, mais c’est une formalité) ;

* Arnaud Montebourg (ex-socialiste, en tant que candidat indépendant) ;

* Philippe Poutou en tant que candidat du Nouveau parti anticapitaliste ;

* Nathalie Arthaud en tant que candidate de Lutte ouvrière ;

* Anasse Kazib pour Révolution permanente (mais l’obtention des 500 signatures pour se présenter n’est pas garantie).

On peut ou il faut ajouter à cela, même si le rapport à la Gauche est en fait conflictuel :

* Jean-Luc Mélenchon en tant que candidat pour La France insoumise ;

* Yannick Jadot ou un autre candidat pour Europe Écologie-Les Verts.

Ce nombre important de candidats rend naturellement les perspectives électorales très mauvaises. C’est trop de candidats pour une base de gauche assez faible, et cette dispersion empêche une clarté nécessaire pour élargir cette base. Mais le vrai problème n’est pas là.

En effet, ce qui est la véritable question de fond, c’est l’absence de militants. On doit le dire tel quel : il n’y a en France pratiquement plus de militants. Il y a des gens agissant, de diverses manières, mais la démarche est libérale, l’état d’esprit farouchement indépendantiste. Quand les gens soutiennent tel ou tel mouvement, ils le font à la carte, le plus souvent d’ailleurs on leur propose des choses à la carte.

Il n’y a plus de militants, au sens de gens encartés et encadrés, agissant selon des dispositifs stratégiques et tactiques préétablis par une direction. La disparition des militants s’est déroulée après 1989 et concerne toutes les années 1990, l’irruption des réseaux sociaux empirant la situation en accentuant l’esprit de consommation. Concrètement, c’est d’ailleurs Twitter qui fait office de faiseur d’opinions pour les gens qui agissent ou s’imaginent agir.

Les deux phénomènes qui ont largement poussé en ce sens dans les années 1990 ont été l’activisme syndicaliste proposé par la CNT (qui a depuis connu une scission en deux branches particulièrement affaiblie) et l’orientation associative de la Ligue communiste révolutionnaire (devenue depuis le NPA). C’est une expression de l’idéologie du « mouvement social », avec le triptyque manifestation – activité associative – syndicalisme.

Jean-Luc Mélenchon, avec La France insoumise, a pris acte de cela et propose désormais un « populisme » qui dépasse la notion de « gauche ». C’est cohérent, mais c’est bien entendu une trahison. Le Parti socialiste propose de son côté un regroupement d’élus socialistes se fondant dans une Fédération sociale-écologiste, qui prendra sans doute naissance en 2021. C’est là encore une trahison.

L’extrême-gauche a cédé et a rejoint l’ultra-gauche : c’est là encore une trahison, qui a eu comme conséquence le soutien aux gilets jaunes et aux manifestations anti-pass sanitaire (et d’ailleurs anti-vax). C’est une capitulation.

On est donc à la croisée des chemins. Soit il y a une reprise d’une Gauche militante, c’est-à-dire consciente, programmatique, idéologique d’ailleurs, car qui dit militants dit cadres pour orienter, organiser, décider. Soit on a encore un cycle de populisme et de spontanéisme, d’anarchisme et de nihilisme, avec des actions monopolisées par la vanité, le spectaculaire, l’éphémère, le refus de toute cimentation en termes d’organisation.

Si l’on regarde bien, tout cela on le doit historiquement à l’absence de social-démocratie en France : on a eu des socialistes qui, au début du siècle, étaient autant indisciplinés que les anarchistes sur le plan de l’organisation. La solution est alors simple : soit les gens acceptent de se plier, soit ils ne le font pas. Et on ne peut pas les forcer, c’est une question de maturité historique.

Soit ils prennent conscience de la réalité et se fondent dans une unité politique, sur la base de la Gauche historique. Soit ils consomment… et alors la Gauche ne sera qu’une vague composante d’une société de consommation en crise allant à la guerre dans le cadre de la guerre pour le repartage du monde.

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Anne Hidalgo : de la révolution de palais à Paris à candidate à la présidentielle 2022

Elle n’a rien à voir avec la Gauche historique… Mais elle est haïe par la Droite.

Anne Hidalgo a une particularité: elle est haïe par la Droite. Il ne s’agit pas d’un simple mépris, d’une dévalorisation et d’une hostilité. Il y a une sorte de haine sourde à son encontre, dans un mélange de patriarcat et littéralement de fanatisme. C’est sans doute le produit de la Droite parisienne, traditionaliste dans son mode de vie et littéralement en guerre contre celle qui représente la bourgeoisie moderne, cosmopolite, branchée.

Car Paris a radicalement changé ces trente dernières années, les bobos prenant largement le dessus en ce qui concerne le style de vie, même l’Ouest parisien ayant en large partie capitulé. Cela enrage d’autant plus les conservateurs classiques nostalgiques d’une Droite classique, corrompue, à l’imagerie populaire comme avec Jacques Chirac. Il faut rappeler ici que ce dernier a été le premier maire de Paris, la capitale étant sous contrôle étatique auparavant à la suite de la Commune de Paris de 1871.

En ce sens, Anne Hidalgo est le symbole d’une révolution de palais, avec un Paris s’embourgeoisant toujours plus (les cadres supérieurs forment le tiers des ménages et ensuite on trouve les retraités). Et elle a beau être d’origine immigrée (elle est née en Espagne), de parents relevant du peuple, elle vit en tant que maire de la capitale dans le faste bourgeois d’une ville incontournable pour la haute bourgeoisie mondiale. Qu’elle soit proche des Qataris suffit à comprendre sa mentalité tout à fait opportuniste.

Elle a, de fait, accompagné, avec son prédécesseur Bertrand Delanoë, la transformation de la capitale française en un mélange de lumpen et de bourgeois aisés, avec une importante disneylandisation de nombreux quartiers.

Cela la rend paradoxalement tout à fait crédible pour se présenter comme une version plus sociale et consensuelle d’Emmanuel Macron, surtout qu’elle peut espérer le soutien d’une partie de la Gauche. Il n’y a de toutes façons pas de programme, une site (idées en commun) étant censé fédérer des contributions. Et, surtout, il y a le soutien ouvert de la direction du Parti socialiste.

Si on ajoute à cela une crédibilité internationale en raison de son poste de maire de Paris, elle a de très nombreuses cartes en main. Même si elle n’est qu’à 7-9% dans les sondages, lorsque sa campagne se mettra en branle, lorsque l’appareil électoral du Parti socialiste va se mettre à tourner, elle va obtenir rapidement une bonne position.

Elle est assez intelligente pour comprendre qu’elle ne doit pas donner une image de parisienne pour autant et a annoncé sa candidature à Rouen. Etant en même temps encore en activité en tant que maire, cela lui empêche également de parler trop vite au sujet de n’importe quoi.

On notera pour l’anecdote qu’au moment des élections municipales de 2020, Anne Hidalgo n’avait pas cessé de souligner qu’elle resterait maire de Paris, qu’elle ne tenterait pas la présidentielle 2022, etc. (par exemple au Figaro en juin 2020: « Je ne cesserai de le répéter : Paris me comble. Je ne serai pas candidate à la présidentielle »).

Anne Hidalgo est donc, pour résumer, la candidate du Paris du Quartier latin, de la Gauche caviar, des élus socialistes. Cela peut tout à fait l’amener à gagner la présidentielle 2022. Pour cela, elle devra donner davantage de gages à la Gauche, et en même temps pas du tout. Beaucoup de choses se jouent ici.