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Rapport entre les classes

Le «ticket resto» comme moyen de baisser les salaires

Initialement, les titres restaurant, sont une aide au repas du midi de la part d’entreprises qui ne fournissent pas un service de restauration, mais qui veulent proposer quelque chose aux employés. Il était donc prévu de les dépenser dans un restaurant, ou bien un snack ou une boulangerie, lors d’une pause repas.

Le principe est que l’entreprise paie la plus grosse partie du titre et l’employé n’en paie qu’une petite partie. Ainsi se fait l’aide, mais donc directement pour le repas de la pause lors des jours travaillés. Les « tickets resto » ne peuvent être octroyés que pour les jours effectivement travaillés et avec une pause repas (pas seulement une coupure) ; il n’y a donc pas de titres restaurant délivrés pour les jours de congé ou d’arrêt maladie.

Les restaurateurs ont beaucoup apprécié ce principe. En effet, les détenteurs de ces « tickets resto » y voyaient une sorte de bons gratuit pour le restaurant et se permettaient des repas qu’ils n’auraient pas pris avec leur propre salaire. D’ailleurs, il y avait parfois l’idée de devoir liquider ses « tickets resto » avant qu’ils ne périment, et donc encore plus l’idée d’un repas pas cher, qui n’aurait pas été pris autrement. Cela a largement profité aux petits restaurants surtout, c’est-à-dire des fast-food et autres kebab.

On peut dire déjà qu’à l’origine, ces titres restaurants ont été un cadeau empoisonné, car encourageant la malbouffe.

En raison de la crise et particulièrement de l’inflation, il y a eu toutefois un grand changement. En 2022, une loi a permis l’utilisation de ces titres restaurant pour l’ensemble des courses alimentaires. En fait, il y avait déjà l’habitude prise par certains de payer une partie de ses courses avec ces titres, mais cela pouvait s’avérer très aléatoire en raison du fait que seuls les produits prêts à manger étaient pris en compte.

Avec cette loi, cela devenait beaucoup plus facile et cohérent de se servir de ces titres lors de ses courses, car tout l’alimentaire est devenu directement éligible. Par exemple, le sel et le poivre, l’huile d’olive, le beurre de cacahuète, la farine, etc.

Parallèlement se sont développés les cartes à puce (type carte bancaire) en remplacement des tickets classiques, détachables dans un carnet type chéquier.

Ces derniers avaient en effet le grand inconvénient d’être plafonnés par en haut et par en bas. C’est-à-dire qu’avec un ticket d’une valeur de 9 euros, il fallait forcément avoir une note supérieure, au risque de perdre la différence. Et inversement, il fallait faire le complément directement pour une somme supérieure. Cela était peu pratique à la caisse, alors que cela restait acceptable au restaurant (avec cette idée d’un ticket de réduction).

Avec les cartes de titres restaurant, c’est beaucoup plus simple : le plafond maximal est de 25 euros par jour (sauf jours fériés) et on utilise directement le crédit utile.

Si on fait 14 euros et 22 centimes de courses, on paie directement avec sa carte « tickets resto », et ce sans contact qui plus est. Si l’on fait 74 euros de courses, on paie d’abord 25 euros avec la première carte (sans contact) puis 49 euros avec la carte bancaire habituelle (toujours sans contact). C’est simple et rapide.

Ainsi, les titres restaurant ont largement changé de nature. D’une aide, tel un service concernant les pauses repas au travail, ils sont devenus directement un élément de rémunération.

En 2023, plus de la moitié des sommes titres restaurant sont utilisées ainsi.

La dérogation pour l’éligibilité de l’ensemble des produits alimentaires aux titres restaurant devait prendre fin en janvier 2024, mais cela a été repoussé. Il a donc été officiellement et durablement entériné cette utilisation détournée des titres restaurant, qui va se généraliser.

Maintenant, venons-en à la question des salaires et de leur baisse. C’est très simple : avec une rémunération normale, il y a un salaire dit brut, qui est le vrai salaire, ainsi qu’un salaire net, qui correspond à la somme que l’on reçoit sur son compte en banque.

Avant, jusqu’au début des années 2000 peut-être, les ouvriers et les employés avaient une conscience sociale élevée en France. Ils connaissaient très bien le salaire brut et considéraient que la différence avec leur salaire « net » leur revenait, comme salaire socialisé, différé. Les cotisations et contributions salariales obligatoires étaient considérés comme un acquis et une chose à défendre.

Après les années 2000, le capitalisme s’est tellement développé, il est tellement devenu un rouleau compresseur faisant que tout est marchandise et consommation, que cette conscience du salaire brut a disparu. Seul compte donc le « net », que l’on peut dépenser soi-même en tant que consommateur. Le salaire « brut » est quant à lui considéré comme une chose étrange, à laquelle on ne s’intéresse pas, si ce n’est pour critiquer « l’État » qui « se sert ».

Si on faisait un référendum en 2023 pour demander aux salariés s’ils veulent la disparition du salaire brut en le transformant en net à payer, pratiquement tout le monde serait pour ! Ce serait bien sûr une grande catastrophe sociale, mais personne n’en aurait conscience et il serait très dure de convaincre du contraire.

Eh bien c’est exactement ce qu’il se passe avec les titres restaurant. Puisqu’ils servent maintenant à faire ses courses, il sont devenus directement un élément de rémunération. Et c’est une rémunération brute, sans cotisation sociale ni prélevèrent obligatoire.

Il ne faut pas regarder que du côté du salarié. Pour l’employeur également, cela change la donne : il y a des charges à payer à côté d’un salaire brut, pas pour des titres restaurant (ou très peu) !

On ne parle pas ici de sommes anecdotiques, mais de 150 euros à 250 euros par mois. C’est extrêmement conséquent dans la rémunération.

Les titres restaurants sont donc du salaire défiscalisé, échappant largement aux cotisations sociales. C’est un moyen pour le capitalisme de baisser directement les salaires (en n’augmentant pas suffisamment en raison de l’inflation) tout en le cachant à court terme avec une rémunération nette qui semble faire l’affaire.

Même s’ils ne servent plus à aller au kebab ou au tacos, c’est encore un cadeau empoisonné !

Ainsi, les titres restaurants sont un moyen de la grande restructuration économique dans le cadre de la crise du capitalisme. Il s’agit d’augmenter la pression sur les ouvriers et les employés, pour garantir les bénéfices capitalistes ; la baisse des salaires est une forme incontournable de cette pression.

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Vie quotidienne

L’affaire Nahel ou la France américaine

La France est devenue comme les États-Unis, un pays où la lutte des classes est niée. Il n’y aurait plus que des individus, disposant de droits plus ou moins importants, que la société accorderait (c’est le « droit positif », par opposition au droit naturel revendiqué par la Gauche historique). Interpréter quelque chose au sein de la société revient ainsi à nier l’Histoire, les classes, pour ne se tourner que vers l’individu.

Toutes les réactions concernant l’affaire Nahel ont reflété cette américanisation de la société française. L’arrière-plan social n’est plus pris en compte, pas plus que le contexte. Tout caractère social est « oublié » et c’est vrai tant pour la question du crime organisé que de la police. De la même manière que dans les livres d’Histoire, ce sont des individus qui feraient l’Histoire – Napoléon, Hitler, de Gaulle, Poutine… – dans la vie de tous les jours, tout ne serait affaire que d’individus.

Les Français, pour dire simple, raisonnent comme des Américains. Lessivés par le capitalisme, les gens en France ne voient les choses qu’individuellement – pourquoi en serait-il autrement ?

Emmanuel Macron, le premier président français au style américain assumé

Oubliant qu’il s’agissait d’un jeune de 17 ans en grosse cylindrée ayant fui la police pendant pratiquement une demi-heure, les tenants de la « bavure policière » sont scandalisés de l’atteinte à la vie d’une personne. Peu importe qu’il s’agisse d’un délinquant multirécidiviste, car les droits de l’individu sont sacrés ! La « gauche » américaine n’aurait pas dit les choses différemment. La « gauche » française est devenue l’équivalent du Parti démocrate américain.

Les tenants de « l’ordre public » ont de leur côté réagi exactement comme l’aurait fait le Parti républicain américain. Là aussi, on raisonne en termes d’individus et de droits. Sauf qu’on considère que les droits acquis sont ce qu’il y a de plus important : il faut les préserver. Il faudrait donc avant tout fermer la porte à tout changement institutionnel, car c’est risquer de remettre en cause les droits individuels. Partant de là, les institutions doivent être rigides, la police doit appliquer les règles frontalement, afin de bloquer la moindre remise en cause individuelle des règles.

Tout cela n’a rien à voir avec l’opposition Gauche/Droite. C’est en réalité une opposition entre le capitalisme « à l’ancienne » et le capitalisme « moderniste ». Ce sont les deux aspects de la même pièce capitaliste. Le capitalisme reste lui-même tout en se modernisant. Pour cela, on a les « conservateurs » qui privilégient ce que le capitalisme a déjà mis en place, et les « progressistes » qui font la promotion de l’élargissement du libéralisme.

Le rappeur Jul avec Nahel dans la vidéo de la chanson Ragnar

Il serait d’ailleurs plus facile de formuler directement les choses en disant que tous, conservateurs comme progressistes, sont des libéraux. Tous raisonnent en termes d’individus et de droits individuels. Le panorama politique français est entièrement devenu libéral.

Pas forcément économiquement, car on trouve encore des gens pour promouvoir une intervention étatique dans l’économie. D’ailleurs, l’État français joue un rôle très actif dans l’économie du pays. Mais sur le plan idéologique, des idées, le libéralisme prédomine totalement. C’est l’idéologie de l’Union européenne, dont l’idéologie LGBT est un aspect majeur.

C’est la négation de la lutte des classes et dans cette négation, il faut toujours trouver le moyen de nier les classes au profit d’une identité. Un tel est gay avant d’être ouvrier, et comme cela ne suffit pas on va faire sauter la définition même de gay afin d’encore plus diviser, et on va également ajouter la question de la couleur de peau, etc., à l’infini.

Le but du capitalisme est de faire en sorte qu’on se définisse par la consommation seulement, alors il faut d’autant plus d’identités, d’autant plus de prêt-à-porter pour des gens aliénés, notamment par les réseaux sociaux.

Notre but est inversement la recomposition du prolétariat à partir de la production, par l’affirmation du collectivisme, du caractère historiquement inévitable du Socialisme !

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Politique

François Ruffin, ennemi n°1 de la Gauche historique

Il est indéniablement une tête de pont du fascisme.

La Gauche historique fait face à deux tendances qui la rongent depuis une dizaine d’années : d’un côté le post-modernisme, de l’autre le national-populisme.

Il apparait de plus en plus que le post-modernisme et son idéologie « décontructiviste » a toujours moins d’emprise sur la classe ouvrière. Son côté libéral-libertaire ne faisant plus illusions quant à ses buts : l’accompagnement du turbocapitalisme. L’alliance de la NUPES avec ses figures médiatiques telles que Sandrine Rousseau ou Danièle Obono, les récentes affaires « Adrien Quatennens », « Julien Bayou » finissent de faire craqueler l’influence du postmodernisme, qui n’est évidemment pas compris comme tel par les sympathisants populaire de la Gauche.

Mais forcément, cela laisse apparaître l’autre grande force qui a toujours saboté la Gauche de l’intérieur : le national-populisme. La figure montante de ce courant est François Ruffin. Et cela ne manque d’interpeller les éléments qui sont le plus intéressés par cette dynamique : les fascistes !

Dans le dernier numéro de la revue « Éléments pour la civilisation européenne« , revue fondée en 1973 autour de l’idée de mener une bataille culturelle axée sur la défense identitaire de type civilisationnel, on retrouve une interview de Marine Le Pen par le directeur de rédaction Pascal Eysseric mais aussi son reportage sur François Ruffin lors d’un débat à la fête de l’Humanité.

Dans une interview sur le dernier numéro de la revue par la chaine YouTube d’extrême-droite TV Libertés, on apprend de la bouche même de François Bousquet, alors rédacteur en chef, que Pascal Eysseric entretien une relation ancienne avec François Ruffin. Avant de se féliciter du fait que « la revue Éléments a accompagné beaucoup de gens qui sont passés de la gauche vers la droite, si tant est que le clivage soit encore opérant ».

Et les gens de cette revue sont d’une habileté redoutable dans leur capacité à pilonner la Gauche dans le pur style fasciste. Ainsi à la question de savoir si le « programme social du RN peut se faire l’économie de la lutte des classes », Marine Le Pen répond :

Le problème en France n’est pas qu’il y ait des riches, mais plutôt qu’il y ait des pauvres, de plus en plus de pauvres. Il ne faut pas lutter contre la richesse légitimement acquise, mais contre la pauvreté qui est incompatible avec la vision d’une société harmonieuse que, comme nationaux, nous défendons […] Nous pensons que le marxisme haineux comme le capitalisme prédateur réduisent toute la vie nationale à confrontation fratricide sur le champ de bataille économique. C’est un projet incompatible avec la conception fraternelle que nous défendons de la communauté nationale.

On comprend alors que le reportage dans ce même numéro sur François Ruffin ne relève en rien du hasard mais bien du fait qu’il est vu comme une tête de pont dans le cadre d’une offensive « métapolitique » visant à récupérer le reste des classes populaires qui n’ont pas encore été emportées par la démagogie national-sociale du RN. Derrière, il y a une opération de sabotage de la lutte des classes visant à barrer la route à toute reconstruction de la Gauche sur ses bases historiques.

Dans son reportage sur François Ruffin, Pascal Eysseric se félicite que « la grande nouveauté de la fête de l’huma […] c’est que la rédaction d’Éléments ait reçu une invitation du département de la Seine-Saint-Denis ». Puis il lance son opération idéologique par ces lignes habiles :

A Gauche, ce sont les deux seuls députés de la NUPES [Roussel/Ruffin] à parler ouvertement d’ « assistanat », de « système de revenu de substitution à vie pour certaines familles », de « cas soc' », à parler de frontières et de protectionnisme […]

Pour l’heure, Ruffin ne veut pas aller plus avant. Il s’accroche à des hochets indignes de lui sur « l’économie de guerre climatique », mais un mot, timidement , a fait son apparition « faire Nation ». Il est répété deux fois, curieuse coquille […]

Comme tous les assiégés, il se pose des questions : « sera-t-on abandonnés par les états-majors ? » Croit-il seulement à la dédicace qu’il nous a écrite en page de garde de son livre : « Pour Pascal, et pour qu’à la fin, c’est les gentils qui vont gagner »

Pour cause, François Ruffin a été réélu député aux élections législatives 2022 dans une circonscription où Marine Le Pen a atteint des sommets vertigineux lors du premier tour des présidentielles. Cette réélection est alors présentée comme une victoire de Gauche face à l’extrême droite, avec en apparence une bataille antifasciste contre la démagogie.

Sauf que non… car en fait François Ruffin et Marine Le Pen, vue comme la « Vierge Marine » dans sa circonscription, ce sont les deux faces d’une même pièce, celle de l’union nationale sur la base de la solidarité sociale.

On ne peut pas arriver avec 65,56 % des voix à Flixecourt aux législatives, seulement deux mois après après que Marine Le Pen ait obtenu 44,29 % voix au 1er tour des présidentielles, sans se demander ce qui cloche. Et en fait, il n’y a rien qui cloche car François Ruffin n’est pas sur des positions de lutte de classe, mais pratique le national-populisme.

Pour la Gauche historique, la bataille antifasciste s’est toujours effectuée dans le cadre d’un affrontement politique dans lequel des portions populaires étaient arrachés à la démagogie fasciste, et non pas dans une superposition sur fond de paix sociale.

C’est que François Ruffin développe un positionnement qui relève en apparence de la Gauche historique, mais est en réalité très proche des thèses du cercle Proudhon de 1911. Il vante ainsi la fierté du travail, mais ne parle jamais de classe ouvrière…encore moins de bourgeoisie. Parler de la « fierté des travailleurs » n’est qu’un discours para-syndical qui n’a que peu de dimensions politiques, et cela est malheureusement très français.

Comme lorsqu’il évoque de manière mielleuse le fait que ce qu’il appelle « la fierté du travail » ne se transmette pas dans les familles car le travail est caché et qu’il faudrait le photographier. Si François Ruffin était sur des positions de lutte de classes, il serait pourtant que oui lorsque l’on a pas le pouvoir sur les moyens de production, mettre en avant son travail n’est que vanité (ce qui ne signifie pas pour autant qu’on le rejette !).

La seule grande tradition du mouvement ouvrier, celle qui regorge de cartes postales et de photographies, c’est celle de la mise en avant des moments de grève, et surtout d’occupation, car c’est le moment où l’intelligence ouvrière se met au service de la politique d’émancipation.

François Ruffin formule alors des propositions sympathiques comme le « faire-ensemble » plutôt que le « vivre-ensemble » pour mieux désamorcer toute relance générale de la lutte des classes. Ce qui l’intéresse ce n’est pas la transformation de la société avec la classe ouvrière aux commandes, non ce qui le motive c’est comment garantir l’union nationale grâce au protectionnisme économique.

Pour cela, il faut que les prolétaires puissent accéder sans embûches au mode de vie bourgeois, et c’est pourquoi François Ruffin prend comme exemple de son « faire-ensemble » l’idée, toute sauf anecdotique et tout à fait fade, que pour qu’un couple tienne dans la durée il lui faudrait « un projet d’un enfant, d’une maison, de vacances, d’un film à voir ».

Le national-populisme de Ruffin qui apparaissait plus ou moins caché l’est, au fur et à mesure que la crise s’approfondit, de moins en moins. Et c’est savamment bien repéré et mis en avant par les idéologues d’extrême droite, comme ici Marc Eynaud de Boulevard Voltaire et donc Pascal Eysseric d’Eléments.

La vérité c’est que François Ruffin a besoin d’une bourgeoisie française riche, très riche, pour qu’elle soit en mesure d’aider les travailleurs les plus pauvres. En somme, François Ruffin, c’est l’héritage du catholicisme-social d’un Victor Hugo, plutôt que du marxisme d’un Paul Lafargue. Caricatural ? Il suffit de relire un passage de son livre « Je vous écris du front de la Somme » pour s’en convaincre :

À son arrivée à Matignon, en juin 1997, Lionel Jospin conditionne les allocations familiales : au-dessus de 25 000 francs par mois, les foyers ne toucheront plus rien. C’est une œuvre de justice, estime la gauche plurielle : les plus riches n’en ont pas besoin. Auteuil-Neuilly-Passy se révoltent, Versailles aussi, la Manif pour Tous avant l’heure. Mais, plus inattendu, les familles catholiques, bourgeoises, sont rejointes par… le député communiste de la Somme Maxime Gremetz ! La presse se moqua de lui, et moi avec. Jusqu’à un échange avec Serge Halimi, journaliste au Monde diplomatique : « Tu as tort de le railler. Aux États-Unis, ça s’est déroulé exactement comme ça : les plus aisés furent écartés de la sécurité sociale. Après tout, ils pouvaient se la payer. Mais du coup, au fil des années, comme ils ne touchaient rien, ils ont cotisé de moins en moins. Le système pour pauvres est alors devenu un pauvre système. »

Plus de riches = plus de contributions pour les pauvres ! Nous voilà renvoyé au début du XIXe siècle, à l’enfance du mouvement ouvrier et à son « socialisme conservateur » dont parlait le Manifeste du parti communiste… On ne s’étonnera donc guère que, comme tous les autres, François Ruffin ne dise rien sur la tendance à la guerre, encore moins sur l’OTAN et l’armée française car demain, il nous expliquera que l’armée est le grand creuset de la « communion nationale », du « faire-ensemble »…

François Ruffin n’a plus 36 000 voies possibles : ou bien il disparaît politiquement, ou bien il finit cadre du fascisme en suivant la marche nationale vers la guerre. Dans tous les cas, celles et ceux qui ont compris la tâche de reconstruire la Gauche historique doivent prendre pour acquis qu’il est indéniablement un obstacle à cette reconstruction.

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Politique

Le populisme d’Arnaud Montebourg à propos de la dette

Arnaud Montebourg fait partie des figures politiques dont il est de plus en plus souvent parlé pour l’élection présidentielle de 2022. Chantre du « made in France », sa marque de fabrique est une sorte de nationalisme « de gauche », c’est-à-dire qu’il fait du Marine Le Pen, mais en plus « soft » si l’on veut. Son nouveau credo, pour se donner un air « de gauche », est de prôner un peu partout l’effacement de la dette publique : c’est là du populisme, dans le but d’éviter à tout prix la lutte des classes.

Structurellement, le capitalisme fonctionne depuis de nombreuses années par la dette. Les grands États modernes sont endettés et s’endettent en permanence, mais c’est également le cas des grandes entreprises mondiales. La crise sanitaire du Covid-19 a profondément accéléré ce processus tout au long de l’année 2020 et cela devient de plus en plus une source d’inquiétude.

En effet, qui dit dette, dit remboursement et à un moment donné la question se pose toujours de savoir « qui va payer ». Par divers artifices, les banques centrales arrivent à repousser le problème en déversant artificiellement de la monnaie dans l’économie. Ce n’est pas nouveau, mais là encore cela s’est approfondie durant cette année 2020.

N’importe qui ayant un esprit rationnel et connaissant la vie quotidienne dans le capitalisme sait très bien qu’il n’y a pas d’argent magique. Alors quand de l’argent est créé ou emprunté, il faut bien que cela corresponde à une certaine valeur, et donc que quelqu’un en paie le prix, si ce n’est tout de suite, au moins à un moment donné. Pour payer, il y a la monnaie bien sûr, qui est dépensée ou dévaluée, mais il y a aussi et surtout le travail (qui est de toutes manières toujours à l’origine des richesses).

La réponse de la Gauche à cela, en tout cas de la Gauche historique, est très simple : il faut mener la lutte des classes, pour que ce soit la bourgeoisie qui paie et rogne sur son mode de vie, mais certainement pas les classes populaires qui devraient être plus pauvres et travailler plus. Cela nécessite cependant d’assumer l’affrontement contre le capitalisme et ses représentants, ce dont une personne comme Arnaud Montebourg (qui se vante d’être un chef d’entreprise) ne veut surtout pas entendre parler.

On peut même dire qu’Arnaud Montebourg a une crainte profonde à l’idée que les masses puissent se révolter contre le capitalisme, comme il l’explique à la presse :

« Si quiconque est capable de me dire comment nous allons rembourser 500 milliards de dette en plus, soit sept fois le produit annuel de l’impôt sur le revenu… C’est impossible, et nous ne pourrons pas le faire sans des jacqueries et des révoltes »

Pour éviter cela, il veut acheter la paix sociale et a donc une « magnifique » idée… Annuler purement et simplement la dette ! Un coup de baguette magique de la Banque centrale européenne, abracadabra les problèmes disparaissent !

Il prône donc :

« une annulation concertée de toutes les dettes Covid de tous les pays de la zone euro, et un rachat massif par la Banque centrale européenne, qui ne spoliera personne. »

Cela n’a aucun sens, à moins de risquer un effondrement total de l’économie, par une perte de confiance généralisée engendrant une crise sans précédent. Il y a toutefois de prétendus économistes pour expliquer aux gens qu’ils n’ont rien compris et que tout est possible dans le capitalisme, tellement le capitalisme est merveilleux. C’est le cas par exemple de Gaël Giraud du CNRS, sur lequel s’appuie Arnaud Montebourg pour défendre ses thèses fantaisistes.

Ces gens-là sont des menteurs bien entendus, mais leurs prétentions sont bien formulées et peuvent avoir de l’audience, surtout dans un pays comme la France qui a décidé de s’asseoir sur la lutte des classes depuis des années et des années pour croire au capitalisme (tout en prétendant ne pas y croire, pouvoir le réformer, etc.)

Mais on n’arrête pas ainsi la roue de l’Histoire et les gens comme Arnaud Montebourg n’iront pas bien loin quand celle-ci reprendra ses droits. Il en sera alors fini des mensonges populistes et ce sera à nouveau, enfin, l’époque de la lutte des classes ! Si les classes populaires ne veulent pas payer le prix de la dette « Covid », elles doivent faire payer la bourgeoisie : c’est aussi simple que cela !

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Politique

Covid-19: les personnes vulnérables livrées au bon vouloir du patronat

Le nouveau décret sur la classification de vulnérabilité face au Covid-19 place les personnes concernées dans une situation de dépendance par rapport au patronat.

Le mercredi 11 novembre 2020, un nouveau décret a été publié au journal officiel élargissant la classification de vulnérabilité vis à vis du Covid-19, par rapport au précédent décret du 5 mai.

La classification de ces maladies ou pathologies permet aux personnes qui en sont atteintes de bénéficier du chômage partiel pour cause de vulnérabilité.

Les maladies ajoutées à ce décret l’ont été sur la base des données récoltées depuis le début de la pandémie dans différents hôpitaux de différents pays et vise à protéger les personnes les plus à risque de développer des formes graves de la maladie. On peut maintenant trouver parmi les personnes fragiles les personnes atteintes de cirrhose ou de sclérose en plaque, etc.

Cela est un bon point et il est encourageant de voir l’entraide internationale avec la mise en commun d’expériences et la tentative de classifier les vulnérabilités face au Covid-19.

Cependant, si d’apparence le gouvernement français semble vouloir protéger les personnes les plus à risque de développer des formes graves de la maladie, il exige maintenant de remplir un second critère pour que ces personnes puissent bénéficier du chômage partiel et donc d’être protégé.

Voici un extrait de l’article 1 du décret précisant les modalités pour être concerné :

« 2° Ne pouvoir ni recourir totalement au télétravail, ni bénéficier des mesures de protection renforcées suivantes :

a) L’isolement du poste de travail, notamment par la mise à disposition d’un bureau individuel ou, à défaut, son aménagement, pour limiter au maximum le risque d’exposition, en particulier par l’adaptation des horaires ou la mise en place de protections matérielles ;

b) Le respect, sur le lieu de travail et en tout lieu fréquenté par la personne à l’occasion de son activité professionnelle, de gestes barrières renforcés : hygiène des mains renforcée, port systématique d’un masque de type chirurgical lorsque la distanciation physique ne peut être respectée ou en milieu clos, avec changement de ce masque au moins toutes les quatre heures et avant ce délai s’il est mouillé ou humide ;

c) L’absence ou la limitation du partage du poste de travail ;

d) Le nettoyage et la désinfection du poste de travail et des surfaces touchées par la personne au moins en début et en fin de poste, en particulier lorsque ce poste est partagé ;

e) Une adaptation des horaires d’arrivée et de départ et des éventuels autres déplacements professionnels, compte tenu des moyens de transport utilisés par la personne, afin d’y éviter les heures d’affluence ;

f) La mise à disposition par l’employeur de masques de type chirurgical en nombre suffisant pour couvrir les trajets entre le domicile et le lieu de travail lorsque la personne recourt à des moyens de transport collectifs. »

Cela est complété par l’article 2, dont voici un extrait :

« […]Lorsque le salarié est en désaccord avec l’employeur sur l’appréciation portée par celui-ci sur la mise en œuvre des mesures de protection renforcées mentionnées au 2° de l’article 1er du présent décret, il saisit le médecin du travail qui se prononce en recourant, le cas échéant, à l’équipe pluridisciplinaire de santé au travail. Le salarié est placé en position d’activité partielle dans l’attente de l’avis du médecin du travail. »

On voit ici que le gouvernement laisse les salariés vulnérables en proie à la décision de leurs patrons et à des analyses subjectives.

Le risque est que les dirigeants d’entreprises se limitent à l’application minimum des mesures de protection obligatoires pour déclarer assurer la sécurité des salariés vulnérables.

Sachant aussi qu’à compter du 1 janvier 2021, les conditions financières du chômage partiel vont changer, les salariés ne toucheront plus que 60% de leur salaire brut contre 70% aujourd’hui et que celui-ci sera versé a 40% par les employeurs (contre 15% aujourd’hui).

Donc la mise en application du décret sur les personnes vulnérables, combiné à celui sur le financement du chômage partiel, risque de rendre insupportable la pression exercée par les patrons sur des salariés vulnérables.

Les plus démunis risquent d’être paralysés par la confrontation avec la médecine du travail ou avec les dirigeants d’entreprises et de venir malgré tout sur leurs lieux de travail s’exposant ainsi aux risques de contamination.

Plus la crise sanitaire avance, plus la crise économique se renforce. La bourgeoisie française n’assume plus rien et va faire payer tout cela aux salariés, vulnérables ou non.

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Les gilets jaunes le 12 septembre 2020 ou l’échec d’une proposition

Les gilets jaunes, c’est du passé. Cela a été un feu de paille plébéien, opposé au mouvement ouvrier sur toute la ligne. La tentative de se lancer pour la rentrée 2020 a échoué.

La rentrée 2020 est explosive, car la France endormie est travaillée au corps par des contradictions terribles. Il y a ceux qui font semblant que rien n’a changé, que tout est comme avant… et les autres qui se préparent.

Les gilets jaunes étaient ici entre les deux : ils préfiguraient la crise en exigeant déjà un retour en arrière dans les années 1960, pour être en mesure de vivre comme des beaufs vivant dans des pavillons dont, à l’époque, ils pouvaient encore se payer les crédits, et voyageant en voiture individuelle dont, à l’époque, ils pouvaient encore se payer l’essence. C’est la France version Sardou, un cauchemar.

Ce cauchemar n’a pas fait rêver grand monde, à part des syndicalistes et une ultra-gauche prête à tout mythe mobilisateur, alors que les personnes ancrées dans la Gauche historique étaient, quant à elles, totalement horrifiées, comprenant tout de suite la dimension plébéienne de la démarche.

Le mouvement s’est effondré de lui-même, après avoir été très vite totalement marginal et une simple expression de petits-bourgeois enragés, mais la « proposition » existait encore de manière virtuelle. Aussi s’est-elle remise sur la table ce samedi 12 septembre 2020, avec les discours traditionnels sur l’irruption potentielle de centaines de milliers de gens, des « vous allez voir ce que vous allez voir », etc.

Résultat, moins de 10 000 personnes se sont mobilisées, à Lyon, Marseille, Lyon, Lille, Nantes, Nice, Bordeaux, Strasbourg… dont 2500 à Paris où quasiment 300 personnes ont été arrêtées, les gilets jaunes ne formant plus que des restes encore plus hétéroclites qu’avant, ce qu’on appelle en politique des « décompos », des décomposés, et des décomposés de gilets jaunes, forcément, cela donne quelque chose qui ne ressemble à rien.

Cela fait donc une proposition en moins. Il va en y avoir beaucoup d’autres. Marion Maréchal attend l’effondrement de LR pour reformer un parti de Droite (très) dur, Michel Onfray va tenter de proposer « Front populaire » sur une déclinaison politique, la CGT a appelé à la mobilisation le jeudi 17 septembre, Jean-Luc Mélenchon veut relancer LFI, François Ruffin s’imagine un rôle national, EELV vise la présidence, etc.

C’est le début du renouveau de la politique, avec la formation de nouvelles tendances, de nouvelles sensibilités. Celui qui se rate dans cette période a tout perdu, il rate la matrice pour les années à venir, des années de crise qui plus est, donc très mouvementées. Il va de soi qu’une telle matrice ne se construit pas à la va-vite, qu’il ne suffit pas de quelques recettes, de quelques copiés-collés, de quelques actions « exemplaires » servant de modèle.

Il faut : une lecture des mentalités françaises, une pratique qui aille dans un sens ou un dans un autre et cela de manière assez lisible, des concepts bien délimités, des valeurs certaines, un programme, un dirigeant (ou plusieurs selon les conceptions) et surtout… une tradition. Car le temps ne respecte pas ce qui se fait sans lui.

De fait, un réel projet se construit sur au moins une génération, 25 ans, pour cerner assez d’aspects, pour avoir assez de profondeur humaine. Sans cela, impossible de tenir le choc. C’est pour cela, par exemple, que l’Action française, aussi insignifiante qu’elle puisse être, représente un danger : elle a un projet réel, clef en main. Et voilà pourquoi Marine Le Pen, inversement, qui représente quelque chose de très important, n’arrive à rien.

Les années à venir seront donc riches en proposition, en politique… et en rupture totale avec le passé ouaté, endormi, décérébré et insensible, qui a mené le monde à la catastrophe.

 

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Politique

L’Angoisse a pris les commandes de la France

C’est un paradoxe qui finalement dit tout sur notre pays : 715 000 personnes ont perdu leur emploi, mais elles n’ont aucune réaction politique.

De manière officielle, 715 000 emplois ont été « détruits » au premier semestre 2020 et soi-disant il n’y aura que 2000 chômeurs de plus au second semestre. La croyance en le capitalisme est digne de l’irrationnel religieux. Quoi qu’il en soit, il faut croire qu’il n’y a pas que les journalistes et les commentateurs économiques pour avoir la foi dans le capitalisme. Car où sont les 715 000 personnes ayant perdu leur emploi ?

Pourquoi n’ont-elles pas protesté, exigé des soutiens, alors que les entreprises se voient arrosés d’une pluie d’argent ? Pourquoi n’ont-elles pas exigé un soutien de l’ensemble du pays alors que leur situation personnelle s’est subitement dégradée ?

C’est là qu’on voit une profonde passivité par rapport aux événements. Quant aux syndicalistes, toutes leurs prétentions se révèlent vaines une fois de plus. Les syndicats sont inexistants dans la situation présente et si les syndicats sont nécessaires, on voit bien que la question est politique.

C’est d’ailleurs pour cela qu’elle n’est pas posée. Les chiffres du chômage sont donnés de manière très discrète : on n’a pas de grand titre avec « 715 000 personnes perdent leur emploi », « explosion du chômage », « crise sociale sans précédent », etc. On l’aura compris, il s’agit de maintenir le calme, à tout prix. D’où le fait de parler d’autre chose, notamment de la question « raciale », toujours très pratique pour diviser, c’est un classique des dominants à travers l’Histoire.

Il faudrait la Gauche. Mais la Gauche n’a aucun maillage. Historiquement, elle a toujours été porteuse d’une perspective électorale et ses rangs ont toujours été très clairsemés, elle n’a jamais été ni vraiment un mouvement de cadres, ni vraiment un mouvement de masse, faisant des élections son épine dorsale. Le résultat c’est une fuite en avant et on le voit en 2020 avec la déliquescence complète : tant le PS que le PCF sont les ombres d’eux-mêmes. La Gauche, c’est grosso modo cent mille personnes, mais organisés de manière relativement lâche, plus adhérentes que militantes, plus en mode participatif que structurées et ne parlons même pas d’idéologie ou de cadre.

La seule chose qui sauve est que l’extrême-Droite est nulle : ses cadres sont nuls, ses démarches artisanales, ses propositions idéologiques incompréhensibles, etc. etc. et tout cela malgré l’immense boulevard qui existe. Cela ne veut pas dire qu’il n’y aura pas une forte extrême-Droite en France : elle apparaîtra forcément, comme reflet de l’ambition expansionniste d’une France voulant « tenir son rang ». On est cependant heureusement encore loin du compte.

La problématique est de ce fait la suivante : les Français vont-ils finir par bouger ou pas ? Faut-il avoir quelque chose de clef en main ou bien accompagner un lent processus de conscientisation, de contestation, de révolte ?

Tout cela dépend d’une crise que, en l’état actuel des choses, personne ne veut voir. Ce qui règne, en France, actuellement, c’est l’Angoisse. C’est elle qui tient le pays. C’est cela qui explique les 715 000 emplois détruits que personne ne veut voir, même pas les gens ayant perdu ces emplois. Il y a la peur de passer dans l’inconnu, car tout le monde sait bien que les Français veulent tous le changement, mais qu’aucun n’est prêt à changer lui-même. Là est la clef du problème.

La crise va les forcer, pourtant. Cela va être brutal, cela va être une déchirure. Cela va être l’adversité. Espérons qu’effectivement les Français aient bien comme style de n’être jamais aussi bon que dans une situation caractérisée par l’adversité.

Sans cela, la brutalité qui contamine largement le pays – brutalité niée par l’ultra-gauche et la gauche réformiste qui ne saisissent pas toute la décadence d’un capitalisme en perdition – emportera avec elle toujours plus d’esprits prompts à dérailler face à une situation devenue intenable. C’est la fin d’une époque, de toute une époque, tout simplement.

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Écologie

Écologie: l’environnementalisme mou et anti-nature d’Olivier Faure

Olivier Faure prône le dépassement du Parti socialiste au profit d’un « bloc social écologiste ». Sa vision est celle d’un environnementaliste mou accompagnant une rhétorique post-industrielle et anti-nature typique de la bourgeoisie des grandes métropoles.

Pour Olivier Faure, les usines, les ouvriers, la lutte des classes, la bourgeoisie, tout cela appartiendrait au passé. Il fait partie de cette fausse gauche, bourgeoise et urbaine, qui n’a eu de cesse d’enterrer la Gauche historique ces dernières années, au profit de thèmes sociétaux et d’une vision post-industrielle.

La fausse gauche s’imagine avoir trouvé avec l’écologie un superbe argument pour appuyer cette vision du monde. On nous explique alors, comme chez EELV, que le problème de l’humanité est qu’elle produit « trop » et qu’elle se fourvoie dans la recherche de richesses matérielles.

Olivier Faure a répété cela en long en large et en travers lors de son discours à l’université d’été du PS à Blois, teintant le tout de quelques préoccupations environnementalistes.

Ce discours peut plaire à gauche, car il y a en apparence une critique de la bourgeoisie et du capitalisme. Sauf qu’en réalité, il ne s’agit pas d’une critique de l’accumulation privée des richesses, de l’accaparement individualiste et irrationnelle de richesse par une classe sociale en particulier, mais d’une critique des richesses matérielles en général. Les prolétaires sont ainsi mis sur le même plan que la bourgeoisie dans la responsabilité vis-à-vis de la planète, en raison de leur quête commune de richesses matérielles.

Olivier Faure critique ainsi la Gauche historique, pour qui c’est la réalité matérielle qui compte, avec l’idée que celle-ci doit être la meilleure possible, correspondant aux possibilités historiques de l’époque. Il l’a fait de manière très ouverte lors de son discours à Blois du 29 août 2020 en rejetant le marxisme.

C’était subtil, et on peut être certain qu’il prétendra ne pas vraiment critiquer le marxisme, simplement apporter autre chose, etc. En réalité, la base même de son raisonnement s’oppose au marxisme, et plus généralement à la Gauche historique. Rappelons ici que la SFIO de Léon Blum, dont le Parti socialiste est censée être l’héritière, revendiquait le marxisme, et pas seulement les communistes de la SFIC.

Voici ce que dit le premier secrétaire du PS lors de son discours :

« Notre vision du progrès elle-même doit évoluer. Qu’est ce qui fait notre richesse, qu’est ce qui améliore notre vie et nous permet d’aller au bout de nous même, de nous émanciper, de nous construire. Déjà les premiers socialistes, avant l’avènement du marxisme, avaient proposé des réponses à ces questions.

Ils avaient mis en avant la coopération et l’entre-aide, l’accès à la connaissance et à la culture, et la réponse aux besoins humains fondamentaux, du temps pour les siens, pour participer à la vie de son quartier, de sa ville, bref, d’être citoyen. »

Parler d’entre-aide, de culture et vie collective épanouie n’a rien d’extraordinaire pour n’importe quelle personne de gauche, sauf qu’ici c’est opposé au marxisme et au progrès tel que considéré classiquement par la Gauche, avec la lutte des classes comme moteur de celui-ci. L’idée d’Olivier Faure est que la Gauche historique est dépassée et que ce qui compte n’est pas de se battre contre la bourgeoisie pour les richesses.

Pour lui, la question est réglée et il faudrait maintenant passer à autre chose :

« Au 20e siècle, le mouvement ouvrier a imposé la question sociale, et c’est Jaurès qui a opéré la synthèse entre la République et la question sociale. Eh bien au 21e siècle, il nous appartient à nous tous de faire en sorte qu’il y a ait une nouvelle synthèse entre république sociale et écologie ».

Exit donc la lutte de classes, qui appartiendrait au passé, car il ne faudrait plus s’occuper des richesses. Il l’a dit très précisément :

« La liberté de l’homme, sa capacité à réaliser ses aspirations, ne peuvent plus reposer sur un mouvement d’accumulation ininterrompue des richesses matérielle, car ces richesses elles-mêmes ont une base matérielle, et que cette base, ce sont les ressources de la planète, et nous avons dépassé ses limites. »

On touche là à quelque chose de très intéressant, avec la prétention à avoir un discours écologiste au nom du rejet de la lutte des classes (et inversement). Olivier Faure prétend que la recherche de richesses matérielles n’est plus possible en raison des limites de la planète. Cela a l’air plein de bon sens dit comme cela, sauf qu’en réalité ce sont deux choses n’ayant rien à voir.

C’est le capitalisme qui épuise la planète, car son but est de produire pour produire, afin d’enrichir une minorité, la bourgeoisie, qui d’ailleurs n’a jamais été aussi riche qu’à notre époque. Mais cela n’a aucun rapport avec la recherche de richesses matérielles, qui n’est pas incompatible avec les besoins de la planète. Bien au contraire.

Ce qui compte, c’est de reconnaître la nature et de comprendre que l’humanité en est une composante, en tant qu’espèce animale particulière au sein d’une planète formant une biosphère. La particularité de l’être humain, c’est d’être douée de la raison et du travail : cela donne beaucoup de possibilités, ainsi que beaucoup de devoirs. Mais en aucun cas cela fait des humains des êtres à part, comme le prétendent les religieux…. Ou les gens comme Olivier Faure.

Olivier Faure n’en a rien à faire de la planète, car il rejette la nature. Il a expliqué cela en détail pendant son discours de Blois, mais il l’avait également très bien formulé dans un entretien au Monde du 28 août 2020 en disant :

« Nous devons prendre des mesures radicales pour tenir compte de l’urgence climatique. Mais je le dis aussi : mon écologie est humaniste. Elle ne déifie pas la nature. Elle refuse de calquer l’ordre social sur l’ordre naturel. La loi de la nature, c’est celle du plus fort. Le logiciel écologiste ne peut être le seul filtre à travers lequel tout doit être regardé. Il n’y a pas d’écologie possible sans justice sociale. »

Il y a là une double signification. D’abord, c’est qu’Olivier Faure est un environnementalisme mou, comme ses amis d’EELV. Que la bourgeoisie soit rassurée : ils ne prôneront aucun bouleversement pour faire face aux défis que sont le changement climatique, l’assèchement des zones humides et les pollutions immenses engendrées par le capitalisme.

L’autre signification, philosophique, ou idéologique, c’est qu’Olivier Faure a exactement la même vision du monde que celle de la bourgeoisie ayant menée à l’écocide que nous vivons : seule l’humanité compte, car la nature est mauvaise.

C’est exactement le point de vue inverse de la Gauche historique, qui reconnaît la nature et donc les richesses matérielle. Et c’est précisément pour cette raison que seule la Gauche historique peut être à la hauteur en matière d’écologie, car la biosphère est une richesse matérielle.

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Politique

La question animale à l’exemple d’une critique des «abus»

C’est un exemple parlant du fait qu’en ce qui concerne la question animale, on ne peut pas faire semblant. La question a trop d’ampleur, de dignité, de profondeur pour l’aborder « en passant », comme si de rien n’était.

C’est une brève de Lutte Ouvrière, mais il ne s’agit pas de critiquer cette organisation, qui a eu au moins le mérite de chercher à prendre une position sur la question animale (Cause animale, véganisme et antispécisme), même si c’est finalement dans un registre anti-vegan traditionnel.

La voici :

« Élevage de canards dans le Sud-Ouest: Silence dans les rangs

L’association L214 a publié des images d’un élevage de canards dans les Pyrénées-Atlantiques, les animaux baignant dans leurs excréments et des cadavres en décomposition. C’est un ancien salarié qui a donné l’alerte et dénoncé les risques sanitaires pour les travailleurs et pour l’environnement, les excréments se déversant dans un cours d’eau.

Cet élevage avait pourtant reçu la visite de vétérinaires, qui n’y ont rien trouvé à redire ! Une responsable de l’association dénonce la collusion entre certains syndicats agricoles et les pouvoirs publics.

Les patrons de ces élevages-taudis voudraient pouvoir imposer le silence aux travailleurs. Ce sont eux, comme on peut le constater cette fois encore, qui sont les mieux placés pour dénoncer les abus. »

Il n’est pas difficile de comprendre le sens de cette brève. L’idée est simple : si vous cherchez à défendre les animaux, appuyez-vous sur les travailleurs, qui seuls ne dépendent pas des intérêts capitalistes : les patrons, eux, sont prêts à tout. Lutte Ouvrière cherche à happer des pro-animaux dans sa direction.

Sauf que Lutte Ouvrière n’a pas compris que pour les pro-animaux, il ne s’agit pas d’abus, mais de choses inacceptables. En ce qui concerne cet élevage de canards, c’est comme si Lutte Ouvrière disait : les ouvriers des centrales sont les meilleurs alliés des anti-nucléaires, les bouchers les meilleurs alliés des vegans, les militaires professionnels les meilleurs alliés des anti-militaristes, etc.

Et c’est là une question fondamentale : s’agit-il de reprendre la production capitaliste en l’améliorant, en la changeant, ou de modifier fondamentalement la production en s’appuyant sur le niveau déjà atteint en termes de technologie, d’industries, etc. ?

Autrement dit, s’agit-il de nationaliser, socialiser les boucheries, les centrales atomiques, la production de 4×4, les McDonald’s, les Kebab… ou bien de les supprimer ? Le socialisme est-il, finalement, le triomphe politique du syndicalisme général, qui s’approprie les entreprises, ou bien le socialisme est-il l’acte d’une classe et non des ouvriers pris séparément, décidant d’orientations nouvelles, d’une direction nouvelle pour la société ?

Lutte Ouvrière n’a jamais considéré qu’il fallait « révolutionner » la vie quotidienne, c’est donc normal que pour elle un élevage de canards ne peut connaître que des « abus » et non pas être une infamie. C’est pour cette raison que Lutte Ouvrière, dans les années 1970, n’a pas réussi sa fusion avec la Ligue Communiste Révolutionnaire, qui elle prônait la révolution dans la vie quotidienne, mais est passé finalement dans une démarche libérale-libertaire, dont le Nouveau Parti Anticapitaliste est le fruit.

Cette polarisation au sein du mouvement trotskiste au sujet de la question de la vie quotidienne se retrouvait également durant les années 1960 chez les marxistes-léninistes, avec un PCF conservateur et des maoïstes adeptes de la révolution culturelle.

La question animale ramène ce clivage, forcément. C’est d’ailleurs pour cela qu’Eric Dupont-Moretti, le ministre de la Justice pro-chasse, a pu être invité aux journées d’été d’EELV : jamais des gens alternatifs culturellement ne l’auraient fait. EELV a pu le faire, car elle n’est pas pour une révolution de la vie quotidienne.

C’est cela même la question de fond de ce qui se déroule en ce moment à l’arrière-plan, la fracture entre ceux qui veulent rester dans un certain cadre et ceux qui veulent rompre avec lui. La question animale apparaît ici comme l’aspect le plus flagrant, car le plus clivant, le plus net dans le traçage » des frontières.

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Politique

Oui, Willy Schraen, la «guerre civile»!

Dans son interview au Journal du Dimanche, le président des chasseurs Willy Schraen menace : on va vers la « guerre civile » s’il continue à y avoir les graines de la « grande révolution animaliste ». Ce qu’il exprime ici, c’est sa terreur devant la lutte de classes, qui ne peut que renverser le régime.

Willy Schraen est un bourgeois comme on en fait plus, un bourgeois capable de flairer la menace subversive, à l’ancienne, comme les gaullistes savaient le faire. C’est que les gaullistes étaient cultivés, très cultivés même, alors que la bourgeoisie d’aujourd’hui est simplement utilitariste ; sa culture s’est ratatinée, ses connaissances sont factices et il n’y a plus que l’idéologie de la consommation débridée, dont l’art contemporain avec toute sa vacuité est le plus grand symbole.

Willy Schraen, lui, a compris que hors du gaullisme point de salut : il faut une Droite populaire, solidement appuyée sur le conformisme de la France profonde, pour que le régime capitaliste puisse avoir en France de solides fondements. Alors, il est en grand stress, car il est en train de s’apercevoir que ce que Mai 1968 avait échoué à faire, notre époque le réalise. C’est tout le mode de vie français « à l’ancienne » qui se voit ébranlé, voire remis en cause.

De par son sens de l’Histoire, Willy Schraen a compris que tout est alors une question de vision du monde. Et pour lui il est encore temps, urgemment temps même, d’assécher l’émergence d’une vision du monde raisonnant en termes de planète et ne considérant pas les animaux comme des ressources. Si on ne le fait pas… le conflit est inévitable.

En ce sens, il a tout à fait raison, et la Gauche, s’appuyant sur ses fondamentaux historiques, doit simplement reprendre à l’inverse, ses propos au Journal du Dimanche du 16 août 2020 :

« Aujourd’hui, ses tentatives malsaines [à Nicolas Hulot] de rattrapage en essayant de faire passer le Covid pour un cri d’alerte de la biodiversité, c’est du racolage idéologique.

C’est semer les graines d’une tempête qui emportera tout. A ce rythme, on aura une guerre civile (…).

Elle [= l’écologie] va s’essouffler car à un moment on ne pourra pas toucher au pré carré vital des Français. Le bon sens et la raison vont revenir.

Cette grande révolution animaliste n’aura pas lieu.

Quand ils iront mieux, on pourra se poser autour d’une table. Je serai heureux d’y participer car j’ai une vraie vision écologique. »

Il est évident que le Covid-19 est le produit d’une crise de la biodiversité, que les chasseurs sont des figures du passé, que le rapport aux animaux doit être changé, que le « pré carré vital des Français » n’est que le masque d’un mode de vie individualiste consommateur toujours plus vide dans son contenu culturel et toujours plus empli d’exploitation, d’aliénation, de souffrances morales, psychologiques et physiques.

Alors, oui, Willy Schraen, la « guerre civile », ou plus exactement la révolution est inévitable. Car le monde ne restera pas tel qu’il est, car le changement complet des mentalités est nécessaire, car la planète est malade d’une humanité qui a totalement perdu toute orientation intellectuelle, culturelle, morale.

Et pour cette guerre civile, il y a deux camps qui s’appellent simplement : la Gauche et la Droite.

> Lire également : Le ministre de la justice Eric Dupond-Moretti en duo avec le chef des chasseurs Willy Schraen

 

 

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Politique

Pierre de Bousquet de Florian, le directeur de cabinet « DST » du ministre de l’intérieur

Le nouveau ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a nommé comme directeur de son cabinet un homme à poigne, venu des services secrets. C’est une mise en forme du ministère pour préparer ce qui va se jouer.

Le nouveau premier ministre Jean Castex a annoncé qu’il formerait un « gouvernement de combat » et pour cela il faut des cadres. Pierre de Bousquet de Florian est de ceux-là et sa nomination comme numéro 2 du ministère de l’Intérieur montre que l’État se prépare à cogner. Son nom ne doit pas être prétexte à une moquerie simpliste de l’aristocratie : sa famille appartient au protestantisme, il relève du dernier carré relevant de la tradition d’humilité et de rigueur. C’est tout sauf un hurluberlu, un type d’extrême-Droite, etc.

Ce qui le rend encore plus dangereux. Pierre de Bousquet de Florian, c’est Jean Castex bis, c’est l’application nette, sans bavures, sans états d’âme. À sa nomination il était coordonnateur national du renseignement et de la lutte contre le terrorisme ; il a dirigé la Direction de la surveillance du territoire, il a été préfet de la Haute-Normandie, de la Seine-Maritime, du Languedoc-Roussillon, de l’Hérault, des Hauts-de-Seine, de Mayenne…

Il a été conseiller technique au cabinet du président de la République Jacques Chirac de 1995 à 1999… Il est Officier de la Légion d’honneur, Commandeur de l’ordre national du Mérite, Officier de l’ordre des Arts et des Lettres, Officier de l’ordre du Mérite maritime… Bref c’est l’argument même de pourquoi il faut une Gauche historique, à la hauteur de l’État lui-même, pour contrer des gens de ce niveau au service du consensus, du statu quo, du calme plat, etc.

Dans une époque qui devient extrêmement tourmentée, son rôle va être donc de superviser le jeune Gérald Darmanin (37 ans). Superviser quoi ? Superviser la cogne. Le gouvernement est une savante construction de personnages médiatiques et de cadres techniques du plus haut niveau. C’est un navire prêt à la parade et au combat dans les eaux troubles de la crise. Un coup de matraque par-ci, un sourire par là.

Et tout cela ne sera pas net. On ne nomme pas une figure des services secrets comme numéro deux du ministère de l’intérieur pour aider à gérer la circulation. Les coups fourrés vont se multiplier, même si bien entendu Pierre de Bousquet de Florian ne présentera jamais les choses aussi, il se contentera, dans l’esprit machiavélique propre à la France, de dire qu’il fait la chose par la bande, comme au billard. Étrange ironie de l’histoire que son rôle au 21e siècle, à lui protestant, sera d’être un homme de main d’un régime anti-démocratique qui sera équivalent à celui de Catherine de Médicis.

Pierre de Bousquet de Florian va être l’homme de main d’une chasse aux rebelles et en acceptant sa nomination, il encourage au militarisme, il donne du courage aux forces qui disent : il va y avoir une rébellion sociale, il faudra tout reprendre en main vigoureusement !

Dire qu’il y en a qui ont parlé de violences policières ces dernières années… Quelle honte leur revient ! Car c’est maintenant que la casse va commencer. Le petit cinéma des anarchistes nantais au centre-ville ou des gilets jaunes sur les Champs-Élysées, avait simplement été laissé faire, car c’était pour laisser passer les choses, pour laisser s’épuiser une contestation vaine, stérile, velléitaire.

Désormais, avec la crise, l’État ne peut plus rien laisser passer, de peur que cela contribue à l’inéluctable dilution de la société et de l’État, étouffés par un capitalisme en perdition. Le gouvernement est un gouvernement de guerre sociale : les masses doivent marcher au pas, sinon elles seront pressées de rentrer dans le rang, à tout prix.

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Face à la dérive «racialiste»: la lutte des classes

La France est en plein dans une crise économique majeure, qui va chambouler toute la société, et il y a un contre-feu racialiste afin d’empêcher qu’on comprenne les véritables enjeux. Ce qui se joue, c’est déjà un affrontement entre les classes.

La police serait « raciste », la France une « dictature », le pays connaîtrait un véritable apartheid, la police serait même la véritable responsable de tous les malheurs possibles… Qui diffuse de pareilles inepties ? Qui les met en avant ?

Tout simplement la petite-bourgeoisie en train de passer sous le rouleau compresseur de la crise et s’agitant par tous les moyens pour provoquer quelque chose. Provoquer quoi Elle ne le sait pas. Mais elle sait que pour survivre, elle a besoin de faire du bruit. C’est exactement le même phénomène que les « gilets jaunes » et c’est une expression réactionnaire.

C’est en effet une « réaction », avec une absence totale de projection vers l’avenir et de valeurs. Une réaction qui se fonde sur l’irrationnel et qui propage l’irrationnel, en veillant bien à ne surtout pas utiliser les gros mots que sont bourgeoisie et capitalisme.

La France a connu une crise sanitaire unique – mais le pays ne réfléchit pas à cela. Il considère que c’est déjà du passé et que c’est quelque chose de lointain, de chinois. La problématique du rapport à la nature, aux animaux ? Elle n’existe pas !

La France va dans le mur économiquement parlant. Son économie va se faire littéralement fracasser et le gouvernement, dépassé, arrose avec des aides par milliards, en espérant qu’il en ressortira quelque chose. Et pourtant rien de tout cela n’est pris au sérieux !

La dérive « racialiste » actuelle dans le pays est une expression de cette négation de la réalité. Elle vise à contribuer à empêcher que soit saisi cette simple vérité de la Gauche historique : l’histoire est l’histoire de la lutte des classes.

Les questions identitaires sont une arme qui vise à diviser pour régner, à séparer les gens et les monter les uns contre les autres. Au lieu de considérer qu’on vit sur la même planète et qu’on en train de la détruire, il faudrait se diviser et faire de ces divisions des catégories qui guideraient la société, les comportements, les mœurs.

Qui a intérêt à cela ? Qui a intérêt à faire d’une agitation réactionnaire un moyen de trouver un paratonnerre face aux luttes de classes ?

Le pire dans tout cela, ce sont les idiots utiles, qui s’imaginent dénoncer une oppression alors qu’ils ne sont que les outils du maintien de l’exploitation. Car l’histoire est l’histoire de la lutte des classes, c’est cela la clef de tout, et qui veut rajouter des choses n’est en réalité qu’un semeur d’obstacles visant à désorienter.

Seule la Gauche historique, selon qui tout se décide par rapport à la lutte des classes, peut nous sortir de cette situation, par la raison et la connaissance, par l’organisation et les choix relevant du Socialisme. Et pour qu’elle existe, il faut une classe ouvrière qui soit en action et non des ouvriers à la remorque du mode de vie capitaliste et des syndicats dont la définition même est d’accompagner l’exploitation et désormais le désastre.

On a changé d’époque et il faut être à la hauteur de celle-ci !

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Mais pourquoi l’usine Renault de Maubeuge arrête-t-elle sa grève!

Alors que l’usine de Choisiy-le-Roi est la cible des restructurations, celle de Maubeuge arrête son mouvement de grève, car ses revendications sont satisfaites. La logique syndicaliste a encore frappé de par sa nuisance anti-ouvrière.

Une grève doit être menée par un Comité de grève, pas par une intersyndicale. Le syndicat est toujours le syndicat de quelque chose et l’ouvrier, l’ouvrier de quelque chose. Ce n’est pas comme cela que peut être affirmé l’unité ouvrière.

L’arrêt de la grève de Maubeuge est qui plus montée à l’avance par Renault. Les patrons fonctionnent comme les jeunes qui demandent à sortir tard : ils proposent une heure, les parents une autre, finalement la poire est coupée en deux. Renault a fait pareil en faisant semblant de reculer et d’abandonner le transfert de 2900 employés produisant des Kangoo électriques à l’usine de Douai.

Soyons sérieux cinq minutes : on ne transfère pas 2900 personnes et une production comme cela. Soit on le fait, soit on ne le fait pas. On voit ici un calcul machiavélique : la colère ouvrière est déportée vers un aspect particulièrement remarquable et en l’espace d’un week-end et de deux jours, tout est terminé ?

Et voilà comment les ouvriers de Maubeuge abandonnent ceux de Choisy-le-Roi, alors que l’État garanti un prêt de 5 milliards d’euros à Renault. Parce que ceux de Choisy sont encore en grève et ils ont même manifesté dans la ville le mercredi après-midi, alors que le matin on apprenait l’arrêt de la grève de Maubeuge !

Pour ajouter au caractère dramatique ou absurde de la situation, Philippe Martinez était avec eux. Il est pourtant à la tête de la CGT, pourquoi n’a-t-il pas poussé à l’unité des ouvriers de Renault ?

Ce qui se passe est non seulement catastrophique en particulier pour Choisy-le-Roi, mais c’est même un poignard dans le dos de la classe ouvrière alors qu’on va vers une crise terrible. Si Maubeuge ne sait pas continuer une grève, dans un groupe historiquement aussi lié à l’État que Renault, avec un soutien populaire local aussi grand, alors qui va y arriver ?

On aurait pu, on aurait dû voir un véritablement mouvement de révolte ouvrière, pour serrer les coudes face aux couches sociales dominantes qui vont évidemment chercher à faire payer la crise aux ouvriers. Mais l’intersyndicale CGT, CFDT, CFTC, CFE-CGC, Sud a préféré jouer la ligne du corporatisme, du syndicalisme local défendant des individus et non pas une classe sociale. L’appel permanent à Emmanuel Macron, c’est vraiment le degré zéro de la lutte des classes.

On risque d’avoir cet exemple d’échec complet en tête à la rentrée de septembre, lorsque la casse sociale va se lancer véritablement. Les ouvriers vont être en première ligne du combat, qu’ils le veuillent ou non, et soit ils assument ce combat, soit ils vont se faire littéralement broyer.

Il est vrai que des décennies de culte du mode de vie petit-bourgeois ont neutralisé le tissu ouvrier, amenant la petite propriété, le fameux pavillon ouvrier, à devenir un objectif en soi, et même l’objectif en soi d’une vie parfaitement réglée.

Sauf que tout a changé et que les ouvriers ne le voient pas, ils ne veulent pas le voir. Le degré de conscience, au niveau de l’unité ouvrière, est d’une faiblesse inouïe. Et pourtant il va falloir aller à la bataille !

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La restructuration de Renault exige une bataille ouvrière

La crise a frappé et Renault a décidé de lancer une première salve de suppressions d’emplois. La brutalité anti-ouvrière commence. Mais en face, il n’y a aucune expérience, à part les contre-projets syndicaux. La rupture va être difficile, amère, très dure à tous les niveaux.

Finie la rigolade. Car ce qu’ont fait les syndicats jusqu’à présent en France, c’est accompagner les choix des entreprises en prétendant les améliorer. Maintenant, c’est le dégraissage, la pressurisation, l’écrasement. Il va falloir choisir son camp : ou assumer la Gauche (historique), ou continuer à suivre les décisions des entreprises en toute servitude.

Ce que fait Renault est exemplaire. En alliance avec Nissan, le groupe a décidé de supprimer 15 000 emplois sur trois ans, afin de récupérer deux milliards d’euros sur trois ans. C’est une vision à court terme typique des capitalistes, puisque la vraie richesse vient du travail des ouvriers. Si on les supprime, c’est autant de profits en moins, cependant les capitalistes ne voient pas cela, évidemment, puisqu’ils ne pensent pas les exploiter !

En France, 4 600 postes sont concernés. Cela semble peu, mais cela représente tout de même 10 % des emplois de Renault en France. L’usine de Choisy-le-Roi (Val-de-Marne) va être fermée, Renault reculant devant les fermetures des sites de Flins (Yvelines), Maubeuge (Nord), Dieppe (Seine-Maritime) et la Fonderie de Bretagne à Caudan (Morbihan).

À Maubeuge, plusieurs milliers de personnes se sont rassemblées d’ailleurs samedi 30 mai, à l’appel de l’l’intersyndicale (CGT, CFDT, CFTC, CFE-CGC, SUD), ce qui est évidemment très bien sachant que cette usine, comme les autres restantes, va faire l’opération d’une « revue stratégique ».

Il faut lutter, car quand la directrice générale par intérim de Renault, Clotilde Delbos, présente ce projet comme « vital », cela veut dire que ce qui va être arraché, c’est de la chair ouvrière, cette chair à canon de la crise.

Naturellement, il est expliqué que l’entreprise compte sur les retraites et les départs volontaires, qu’il n’y aurait pas de licenciements secs, etc. En réalité, c’est un dégraissage en règle. Voyons les faits : Renault va passer en trois ans d’une production de 4 millions de véhicules par an à 3,3 millions. Nissan va quant à elle baisser sa production de deux millions de véhicules !

C’est une chute terrible. Que vont-ils faire par exemple de l’usine de Douai, qui peut produire 400 000 véhicules, mais n’en produit que 80 000 ? Finis, disparus, envolés les rêves de Carlos Ghosn de faire de Renault-Nissan le premier groupe mondial !

Les syndicats dénoncent évidemment le « gâchis » et l’absence de « stratégie » de l’entreprise, jouant ici un rôle puissamment néfaste, comme à leurs habitudes, car c’est de crise qu’il s’agit. Qu’auraient-ils voulu, de toutes façons ? Une entreprise capitaliste florissante ? On voit comment les syndicalistes sont prisonniers de leur statut.

Maintenant, la chose est entendue. Soit les ouvriers se révoltent, soit ils se font broyer. Croire qu’en une telle période on peut peser sur les orientations comme dans les années 1970-1980, il faut être syndicaliste pour l’imaginer en toute naïveté, en toute traîtrise.

Syndicaliste, ou bien archevêque. Ou bien élu local. Bien la peine pour les syndicats de dénoncer la politique, de la rejeter, pour se retrouver sur la même longueur d’ondes que ceux qui n’ont aucune vue d’ensemble et encore moins une vue d’ensemble ouvrière.

D’ailleurs, le nouvel exécutif du groupe, Luca de Meo, arrive en juillet seulement, mais on ne l’attend pas pour prendre les décisions. Car il y a urgence. Les syndicalistes croient au capitalisme, donc ils ne le voient pas. Les capitalistes, eux, ont senti le vent du boulet et savent que la crise a reculé avec les aides de l’État pour mieux revenir après.

Il faut donc vite trouver de quoi tenir… Se débarrasser des ouvriers. Finies les recherches avec des coûts faramineux. On est désormais dans le capitalisme qui se survit à lui-même, et il fait ce qu’il peut… et ce qu’il veut, à moins d’une opposition politique. Il va falloir commencer à abandonner ses illusions et à lutter !

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L’affrontement politique entre Philippe Martinez et Laurent Brun

En apparence, on a deux figures syndicalistes qui n’ont rien à voir avec la politique, qu’ils récusent au nom de la charte d’Amiens. Et pourtant, le mouvement contre la réforme des retraites a passé un cap et vient de rentrer dans une seconde phase. Ces deux dirigeants syndicaux en synthétisent la nature politique.

Ils sont issus de la même culture, celle du PCF. Il ne faut donc pas chercher d’éléments culturels relevant de la gauche alternative, cherchant à modifier la vie quotidienne, dénonçant le capitalisme dans sa dimension culturelle. On est dans une logique syndicale dure, dont le parti politique, en l’occurrence le PCF, ne peut être que le prolongement.

Il y a toutefois une profonde différence entre le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez, et le secrétaire Général de la Fédération CGT des Cheminots, Laurent Brun. Cette différence est la grande actualité politique des derniers jours, comme conséquence de la persistance de la grève. Cette différence provoque même des soubresauts relançant la grève.

L’Histoire avance, mais passe donc par un drôle de chemin ! Ce qui se passe est toutefois assez simple. On a d’un côté une partie de la CGT qui dit que, désormais, tout a changé, qu’il ne peut au mieux y avoir qu’un PCF social et accompagnateur de la modernité. C’est la ligne de la nouvelle génération ayant pris le pouvoir et dont Ian Brossat est le meilleur représentant (la victoire de la ligne portée par André Chassaigne au dernier congrès n’ayant pas changé grand chose à l’affaire).

Philippe Martinez reste davantage ancré dans l’histoire ouvrière, mais il est d’accord avec cette tendance. Il veut une CGT de combat, mais dans une perspective constructive.

Laurent Brun a un profil tout à fait différent. C’est un nostalgique du style du PCF des années 1980, en mode dénonciation de la soumission du travail au capital, Cuba comme référence romantique, des références à Marx pour revendiquer une identité ouvrière historique.

Concrètement, qu’est-ce que cela veut dire par rapport à la grève contre la réforme des retraites ? Cela signifie que :

→ pour Philippe Martinez, c’est une lutte sociale, devant également aider à renforcer la CGT, d’où la mise en avant de sa signature de la fameuse pétition du Journal du Dimanche portée par la gauche institutionnelle.

→ pour Laurent Brun, c’est une lutte de classe par procuration où les cheminots sont le héraut de l’ensemble des couches populaires.

Comme on le voit, c’est bien différent et depuis quelques jours, l’antagonisme entre les deux tendances s’est cristallisée de manière historique. Philippe Martinez l’avait bien senti depuis le départ, d’où sa volonté de temporiser et sa fameuse absence d’annonce à part la mobilisation du 9 janvier, il y a deux semaines.

Inversement, la Fédération CGT des Mines et de l’Énergie (dont l’héritage direct est la puissante CGT de l’ancien bastion EDF-GDF) explique par exemple le 6 janvier que pour elle la lutte doit rester interprofessionnelle et qu’elle « refuse » – le terme est même inscrit en rouge dans cette phrase elle-même en gras – « toute rencontre avec les ministères et/ou employeurs ».

Philippe Martinez aimerait clairement en terminer avec tout ça, en mode « il faut trouver une solution le plus rapidement possible », alors que les tenants de la ligne de Laurent Brun se disent que c’est précisément maintenant que tout commence.

Cela peut inspirer plein de questions, de réflexions. Qu’est-ce qui va commencer ? Est-ce de la lutte de classes ou bien la lutte des classes utilisant indirectement les partisans du courant de Laurent Brun ? Tout ce discours de combat serait-il en réalité simplement du verbiage radical masquant les intérêts corporatistes des cheminots, voire de la CGT nostalgique d’une certaine prédominance dans le monde du travail dans le passé ?

Laurent Brun est-il le vecteur d’un esprit de lutte réelle ou bien un simple acteur « syndicaliste révolutionnaire » à la française ? Le monde du travail verra-t-il vraiment un moyen d’épauler sa propre lutte dans tout cela ?

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Grève: qu’est-ce qu’une assemblée générale ? Qu’est-ce qu’un «soviet» ?

La pratique de l’assemblée générale n’a jamais réellement pris en France : soit parce qu’elle est étouffée par les syndicats, soit parce qu’on la confond avec une sorte de meeting activiste. Dans les universités, la caricature est extrême, avec les présents qui se réduisent à une simple petite minorité se voulant agissante. Une assemblée générale est en réalité une structure qui englobe l’ensemble des travailleurs, existe de manière organisée et prolongée.

La pire erreur, c’est de considérer qu’une assemblée générale ne concerne que les grévistes ou les partisans de la grève. C’est là une erreur complète nuisant fondamentalement à l’unité des travailleurs. L’assemblée générale est un lieu démocratique rassemblant tous les travailleurs. Bien sûr tous ne veulent pas forcément y venir, par dédain, esprit de défaite ou opposition à la grève. Or dans tous les cas il faut chercher à les convaincre de venir, d’exposer leurs points de vue.

Une assemblée générale dans une entreprise, à l’occasion d’une grève, est en effet un lieu démocratique pour les travailleurs et par conséquent en soi un lieu de rupture avec l’idéologie dominante. C’est un saut dans l’organisation et c’est précisément la base nécessaire à quoi qu’il se passe.

Une grève qui n’est portée que par une minorité agissant est une grève qui échoue ; lorsqu’elle n’est portée que par les syndicats, elle s’enlise dans des tractations qui peuvent apporter quelque chose, mais produisent dans tous les cas à la base la passivité, l’absence d’organisation, une non-dénonciation du niveau de conscience.

L’assemblée générale impulse par contre la conscience, l’organisation, l’action, parce que dans tous les cas elle implique les travailleurs. En ce sens, même une assemblée générale décidant de ne pas faire grève est une réussite par rapport à l’absence d’assemblée générale. Elle aura au moins été un lieu de décision, donc une expérience favorable.

Et plus l’assemblée générale est capable de se structurer, plus elle reflète la prise de conscience des travailleurs, et inversement.

Quels sont les besoins d’une assemblée générale en termes d’organisation ?

D’un bureau s’occupant de noter les présents et les absents, de prévoir l’intendance telles les boissons non alcoolisés, le papier et les crayons ou l’ordinateur portable pour noter les points, pour compter les votes, etc.

D’un secrétaire de l’assemblée pour gérer les discussions en accordant la parole.

D’un secrétaire pour noter les points abordés et les résumer.

Ceci n’est qu’un minimum, puisque selon le nombre de travailleurs, l’ampleur de la grève, ses objectifs, d’autres besoins surgissent, auxquels il doit être répondu de manière démocratique et collective. Quelqu’un qui agit pour les autres ici ne les sert pas : il les dessert, en les maintenant dans la passivité. La moindre expérience pratique dans une grève a des conséquences fondamentales pour quiconque y participe : à chacun de faire son expérience.

Et, donc, l’assemblée générale continue. C’est elle qui mène les négociations, pas les syndicats. C’est elle qui choisit qui va négocier, avec un mandat bien déterminé. C’est l’assemblée qui décide d’accepter ou pas ce que les responsables de l’entreprise proposent.

Toutes les actions sont décidées par l’assemblée, rien n’est décidé dans l’assemblée.

L’assemblée ne doit jamais être le rassemblement d’une simple petite minorité – comme les étudiants le font jusqu’à la caricature – ni le lieu où une petite minorité agit avec une majorité qui suit passivement.

L’assemblée est ainsi générale car elle est démocratique et engage tout le monde. Si jamais l’assemblée cesse la grève, seule une minorité aura bien entendu assez de conscience pour en tracer le bilan, pour en conserver la mémoire, pour travailler dessus. Il s’agira là des éléments les plus conscients, qui le plus souvent seront politisés à Gauche. Inversement d’ailleurs, ces éléments n’existent pas dans la classe ouvrière s’il n’y a pas d’expérience de masse à la base… d’où leur nombre si restreint voire inexistant actuellement.

D’aucuns diront que l’assemblée générale, se prolongeant, doit se prolonger jusqu’au bout, jusqu’à former le fameux « soviet », le conseil décidant que le pouvoir revenait à tous les conseils partout. Cette hypothèse n’est pour l’instant simplement qu’une hypothèse, car il n’existe pour l’instant même pas de démocratie chez les travailleurs, qui sont isolés, passifs, sceptiques, quand ils ne sont pas corrompus par le capitalisme.

C’est pour cela que tout dépend de l’existence des assemblées générales, de leur organisation, de leur prolongement concret jusqu’à assumer la direction des luttes. Sans ces assemblées générales, il y a un « mouvement social » – pas une lutte des classes.

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Le suicide n’est pas une forme politique

La tentative de suicide d’un jeune est une chose horrible, c’est un drame qui est une expression de désespoir. Cela ne saurait être autre chose. Y voir un caractère politique, comme avec la tentative de suicide d’un syndicaliste étudiant à Lyon, c’est accorder une valeur à l’autodestruction, ce qui est totalement étranger historiquement au mouvement ouvrier.

Le syndicalisme étudiant, en cherchant à mobiliser autour de ce drame, témoigne qu’il est définitivement passé dans le camp de la « Gauche » postmoderne et qu’il n’a aucune considération pour les classes sociales.

La Gauche a des responsabilités et il faut être absolument clair : le suicide et la grève de la faim sont des formes totalement étrangères au mouvement ouvrier. C’est une autodestruction, qui a toujours été réfuté comme étrangère au mouvement de l’Histoire. Il faut donc absolument tout faire pour éviter que des gens, par désespoir, par impression de se heurter à un mur, contourne le patient travail politique de gauche au profit d’une action autodestructrice « spectaculaire ».

En ces temps troublés, de faiblesse sur le plan des idées, ce genre d’actions est d’autant plus « fascinante », sans parler des réseaux sociaux qui en amplifie « l’écho ». Il y a donc lieu pour la Gauche de réfuter catégoriquement ce genre d’approches, d’empêcher que cela devienne une forme « acceptable ».

Il y a donc beaucoup de légèreté de la part de syndicalistes étudiants de la « Gauche » postmoderne à profiter d’un acte de désespoir pour récupérer la chose politiquement et tenter de faire du bruit au sujet de la précarité étudiante. Plusieurs jours après la tentative de suicide, ils cherchent à profiter de la juste émotion pour mobiliser. C’est là un jeu extrêmement dangereux, qui peut avoir des conséquences atroces. Intégrer un acte irrationnel comme le suicide dans un dispositif à prétention politique, c’est banaliser l’acte.

En agissant ainsi, on donne de la valeur à un tel acte, on reconnaît qu’il aurait été déclencheur, révélateur. On le reconnaît comme jouant un rôle socialement, ou sur le plan des idées. C’est une véritable catastrophe, un déni total de la raison.

Surtout que dans le peuple la règle est très claire : quand on a une famille, on ne se suicide pas. Dans le peuple on assume ses responsabilités, quitte à souffrir, toute sa vie. C’est ce que font 35% d’Argentins vivant dans le dénuement, pour qui la moindre chose est un luxe, dont 10 % qui ont basculé dans cette misère d’un coup ces dernières semaines. Et c’est ce que font des millions et des millions de personnes en France également, dans des conditions moins difficiles matériellement mais avec autant de souffrance morale.

Car la vie quotidienne dans cette société est, objectivement, un cauchemar. Et la réponse n’est jamais le suicide, toujours la lutte. La classe ouvrière ne se suicide pas. Qui dans le monde accordera un sens au suicide d’une personne jeune, qui a des parents qui peuvent l’héberger, qui a une petite amie, qui a la sécurité sociale grâce aux avantages sociaux, qui a disposé d’une bourse les années précédentes ? Qui plus est dans l’un des pays les plus riches du monde… Non ce n’est pas possible d’accorder une valeur à un tel acte. Il ne faut pas valoriser des actes aussi destructeurs ; rien ne peut en sortir de bon.

Et il ne s’agit pas de « précarité » étudiante ou de passer au 32 heures pour supprimer le chômage. C’est de toute la société qu’il s’agit, dans son rapport au travail, à la nature, à la vie elle-même. Cela va bien plus loin que de voir en la source des problèmes François Hollande. Ce dernier devait être présent à Lille et des étudiants de la « Gauche » post-moderne en ont profité pour déchirer les exemplaires de son dernier livre. Déchirer un livre ! Comment peut-on, en France, déchirer un livre ? Mais qui sont ces gens !

Il est vraiment terrible de voir comment en ce moment la France refuse la lutte des classes, comment on demande à l’État d’améliorer les choses et comment on trouve dans quelques gouvernants des bouc-émissaires. Les gilets jaunes sont un terrible exemple et les suicides « argumentés » récents  – comme celui d’une directrice de maternelle à Pantin – en sont un autre exemple, dramatique.

Il faut impérativement une sortie par en haut, ce que seuls les ouvriers peuvent apporter en rentrant dans la bataille. Sans eux, rien ne peut bloquer cette spirale du négatif.

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La France va craquer

C’est un simple constat fait par tous les observateurs un peu attentifs à ce qui remue la société française dans ses fondements : la France va craquer. La raison n’est pas politique, ni économique, ni social, car elle est tout cela à la fois, sa substance étant la lutte des classes.

Les gens ont beau accepter le capitalisme, ils sont déterminés socialement et les antagonismes doivent s’exprimer. Les mois prochains, les semaines mêmes, vont montrer comment l’histoire joue à certains moments les locomotives. Le souci étant bien sûr qu’avant la gare Socialisme on est bien parti malheureusement pour faire un grand détour et s’arrêter par la gare Fascisme.

La Gauche s’est totalement plantée sur les gilets jaunes. Dès le départ, il y a eu un haut le cœur et la dimension rétrograde, voire fasciste du mouvement a été ressentie. Malheureusement, l’ultra-gauche toujours à l’affût d’un opportunisme s’est précipité à leur soutien et cela a fait vaciller disons la moitié de la Gauche. D’autres encore ont suivi en se disant qu’il serait possible d’en profiter.

C’est stupide, totalement stupide. Les gilets jaunes ne sont qu’un symptôme. Il fallait les dénoncer immédiatement, afin qu’au prochain tour, lorsque les choses vont craquer, les choses soient claires et qu’il y ait une vraie ligne à la fois sociale, consciente, ancrée politiquement et culturellement à Gauche.

Le résultat est facile à voir. Les gilets jaunes n’ont jamais rassemblé grand monde. Leur nombre s’est même toujours plus réduit. Leur démarche s’est ritualisée et il n’en est strictement rien ressorti : ni idées, ni figures politiques, ni élévation du niveau de conscience. Cela a juste été une révolte de couches petites-bourgeoises prétendant se mettre au-dessus de la lutte des classes, évitant soigneusement de parler de la bourgeoisie et de l’exploitation.

La preuve en est, s’il en faut une, c’est que la classe ouvrière a totalement évité les gilets jaunes. Elle ne les a pas rejoint, elle a regardé cela de loin, elle ne leur a pas fait confiance.

Croire maintenant que la classe ouvrière va faire confiance à une Gauche qui a soutenu les gilets jaunes, c’est donc être plein d’illusions. Déjà qu’en raison de la « Gauche » postmoderne les ouvriers ont été expulsés du champ politique, alors si en plus il y a cela…

Une étape en prépare une autre et donc là tout a été raté. Il faut dire ici aussi que la faute en revient à ceux qui croient en le capitalisme et qui auraient bien aimé que les gilets jaunes soient le maximum de révolte possible. Quelle blague ! Et dire qu’il y en a pour croire que les gilets jaunes ont été violents et que la répression a été immense ! Mais quelle aberration !

La violence des gilets jaunes n’est strictement rien comparée à ce qui va se passer. Quant à la répression policière, elle n’a strictement rien été comparée à ce qui va arriver. Les gens qui ont connu les années 1970 le savent bien d’ailleurs : les gilets jaunes et les affrontements qui ont eu lieu, les interventions policières, tout cela n’a rien été du tout. Jouer au chat et à la souris c’est de l’amusement en comparaison à un conflit relevant de la lutte des classes.

La France va craquer et donc mettre un terme à toute une série de fictions. Certains auront peur et abandonneront. D’autres adopteront un discours de Gauche dure qu’ils rejetaient encore hier, afin d’être dans le sens du vent. Mais la Gauche historique se reconstituera, elle ancrera les idées du Socialisme dans les masses et elle fera en sorte qu’enfin, on transforme le monde dans tous ses aspects, car il est laid, il asphyxie la vie et en plus il court à sa perte.