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Jean-Christophe Cambadélis annonce le républicanisme de gauche

Jean-Christophe Cambadélis est un cadre socialiste historique. Il propose une idéologie clef en main, de centre-gauche et affirme que c’est lui ou bien les libéraux et les nationalistes.

Jean-Christophe Cambadélis est connu pour être l’un des cadres socialistes les plus éprouvés, les plus politiques, alliant rigueur et opportunisme, clairvoyance et coups à trois bandes. C’est l’exemple même du cadre passé par l’extrême-gauche étudiante trotskiste, habitué aux mouvements des masses et aux coups fourrés, pour rejoindre le Parti socialiste et obtenir ainsi une stature étatique.

Pour cette raison, il a expliqué au Journal du Dimanche qu’il ne se sentait pas hors-jeu pour 2022, et c’est vrai. C’est un homme mesuré dans tous les domaines, il n’a pas perdu sa crédibilité comme François Hollande même s’il dit finalement la même chose, c’est un homme de réseaux.

Jean-Christophe Cambadélis a d’ailleurs fondé en septembre le réseau « Nouvelle Société » et le jeudi 19 novembre il a tenu une conférence de presse pour annoncer un projet de ce réseau, intitulé « La République impartiale – Mémorandum pour un républicanisme de gauche ».

Ce qu’on y trouve est une savante cuisine. Il y est dit la chose suivante : c’est nous ou bien le populisme, ou bien les libéraux. Nous sommes les seuls crédibles, ce sera nous ou un avatar français de Donald Trump, nous ou un Emmanuel Macron au libéralisme débridé.

Comme il faut rassembler, il faut être de centre-gauche : c’est la thèse des 51 % de François Hollande, pour qui la Gauche ne peut pas être majoritaire. Comme il faut être crédible, il faut se la jouer républicain dur : c’est la thèse de Manuel Valls. Comme il faut tout de même donner des gages à la Gauche, il faut parler de défendre les acquis et revendiquer l’opposition au nationalisme et à la guerre.

Comme il faut légitimer tout ce bric-à-brac, il y a la République comme concept traditionnel chez les socialistes depuis Jean Jaurès et on lit dans le mémorandum :

« La gauche, occupée à la question sociale et à l’extension des libertés individuelles a, petit à petit, délaissé la défense et l’approfondissement de la République. Elle n’a voulu voir que ses insuffisances, ses trahisons, ses limites.

Elle a pensé révolution, évolution, libération. Ce qui fut nécessaire. Mais elle a relégué la République au magasin des accessoires. Et aujourd’hui, voici la République remise en cause, attaquée de toutes parts. »

Répétons-le encore une fois : François Hollande ne peut qu’être d’accord, Manuel Valls aussi. On a du mal à penser qu’ils n’ont pas été consultés ou qu’ils ne sont pas, d’une manière ou d’une autre, de la partie. Au minimum ils convergent avec Jean-Christophe Cambadélis.

La ligne de celui-ci est très clairement radicale de gauche et évidemment on ne trouvera rien sur la classe ouvrière et le peuple, à part une dénonciation des communistes ici et des maoïstes là-bas. Pas de socialisme, pas de capitalisme, pas de bourgeoisie, pas de propriété, etc. Les concepts employés ont de ce fait un côté à la fois flou et poétique assumé : « égalité réelle », « liberté ordonné », « fraternité laïque ».

Quel est donc le message passé ici à la Gauche ? C’est, en quelque sorte : c’est nous ou le fascisme. C’est à peu près clair. Le message, c’est : vous ne parvenez rien, vous ne pouvez pas parvenir à quelque chose. Nous sommes les seuls crédibles dans le cadre d’institutions que vous n’aimez pas, mais que vous ne pouvez pas remplacer. De plus, les mouvements populaires partent dans le populisme et le nationalisme : vous devez donc défendre ces institutions pour survivre vous-mêmes.

C’est très fin, c’est très politique, c’est très Jean-Christophe Cambadélis. Mais c’est trotskiste aussi, c’est-à-dire unilatéral et calculateur, fabriqué en laboratoire. La vie est bien plus complexe que ces plans sur la comète et il est parlant que le mémorandum ne parle pas des animaux, ce qui en 2020 est aberrant. Au-delà même de son absence de « croyance » en les chances de la Gauche historique, cette absence en dit long sur un certain côté hors-sol.

Si on ajoute à cela la crise et le retour politique de la classe ouvrière, alors le projet de Jean-Christophe Cambadélis apparaît comme tout à fait réaliste… et en même temps un rêve parisien coupé des réalités. La France va au conflit, c’est inévitable et aucun pompier « républicain » ne peut empêcher les contradictions de s’exprimer. L’heure de François Hollande est passé : l’heure est à l’Histoire.

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Société

Hommage à Samuel Paty… et attaque coordonnée fanatique à Vienne

La crise de civilisation s’impose partout. Alors qu’en France l’hommage à Samuel Paty s’est tenu sobrement mais avec dignité, une attaque coordonnée islamiste frappait Vienne. L’époque est prise de spasmes.

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C’est une bien belle lettre de Jean Jaurès que le gouvernement a fait lire par les enseignants à leurs élèves, à l’occasion de l’hommage à Samuel Paty, l’enseignant assassiné par un fanatique islamiste. Cela souligne la force de la question de l’éducation dans notre pays, une véritable tradition nationale avec, surtout, la figure de l’enseignant visant à élever le niveau des élèves sur le plan moral. L’engagement du professeur qui veut bien faire, sans briser les esprits mais en les faisant avancer, est quelque chose de connu et d’apprécié dans notre pays.

Non pas que tous les professeurs soient ainsi, très loin de là, ni que l’Ecole telle qu’elle existe soit agréable et épanouissante. Mais justement il y a quelques figures émergeant toujours, ici et là, faisant qu’on se souvient avec émotion de tel ou tel enseignant, qui s’est donné pour les élèves. La lettre de Jean Jaurès est donc bien choisie et on sait d’ailleurs à quel point Jean Jaurès fut un ardent républicain et un orateur extraordinaire. La finesse de ses propos, le choix méticuleux des termes et du ton, la vivacité dans la répartie… font qu’il était pratiquement un représentant de l’esprit français.

Jean Jaurès était, également et évidemment, un socialiste, de l’aile droite historiquement, ce qui ne change rien au fond car les socialistes sont en France en général des républicains de Gauche, éloignés des traditions pro-marxistes social-démocrates allemande, russe, autrichienne, bulgare, etc. On ne peut donc guère parler de récupération par le gouvernement et de toutes façons la question n’est pas du tout là. Ce qui compte, c’est de voir l’honneur du professeur, du passeur de savoir face au fanatisme.

On doit ici qualifier d’abject les diverses critiques anti-gouvernementales cherchant la petite faille pour un populisme vraiment déplacé. Profiter d’un tel événement pour accuser le ministre de l’Éducation de prôner une réforme du baccalauréat que Jean Jaurès aurait réfuté, comment dire… C’est absurde. Les terribles attentats dans la capitale autrichienne montrent d’ailleurs où est le problème.

Les attaques coordonnées dans le centre de Vienne en Autriche, en différents endroits, visant à tuer, à blesser, à terroriser, montrent que le mal est profond, qu’à côté de la machinerie capitaliste détruisant la planète on a des crises de folies réactionnaires meurtrières.

Le fanatisme islamiste est le produit d’une époque sans cœur ni esprit, où tout esprit constructif, démocratique, s’efface devant un marché capitaliste tout puissant accompagné de poches de romantismes ultra-réactionnaires idéalisant un passé romancé. Comment affirmer la Culture, la Connaissance, la Démocratie dans un tel cadre historique ? Là est le défi de notre époque et évidemment, seul le Socialisme peut porter cela.

Lire également : La lettre de Jean Jaurès aux instituteurs et institutrices

Le drapeau de la Démocratie, du peuple organisé au niveau de la société, de l’État, est la condition impérative pour sortir d’une crise de civilisation toujours plus folle. La peur et la réflexion se combinent dans des situations nouvelles, inquiétantes et d’envergure. Il faut contribuer à être à la hauteur des questions, il faut savoir souligner les bonnes réponses. Il faut être là. Qui se met de côté dans une telle époque n’a pas saisi ce qui se passe – mais comment ne peut-on pas le saisir ?

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Politique

Rassemblements du 18 octobre 2020 : marquants sans être un marqueur

Les rassemblements en hommage à l’enseignant assassiné par un islamiste pour avoir montré des caricatures de Mahomet ont bien eu lieu dans tout le pays, mais sans dimension de masse. La société française est trop crispée pour agir.

Au sens strict, tout le monde a bien compris que les rassemblement du 18 octobre 2020 correspondaient à un « Je suis Charlie » répété. Au fond, on avait la même problématique : d’un côté l’expression de la dénonciation d’une religion, de l’autre un terrorisme assassin de type religieux.

« Je suis Charlie » avait alors été une réponse de type démocratique-républicaine : oui aux caricaturistes, non aux obscurantistes, oui à l’union du pays et à la culture, c’est-à-dire non au racisme, à l’esprit de division communautaire. Impossible d’être contre cela, même si évidemment cela a ses limites. Ce qui n’a pas empêché l’ultra-gauche d’être vent debout contre « Je suis Charlie », accusé de tous les maux dont surtout le racisme, « l’islamophobie », etc.

Or, on a trois problèmes depuis « Je suis Charlie » en 2015, nuisant à la force des rassemblements de 2020. Tout d’abord, « Je suis Charlie » a été abandonné par toute la scène politique, y compris la Gauche. On a eu les plus grands rassemblements de masse dans l’histoire de France et pourtant rien n’en est sorti. C’est fort dommageable, car il y avait de très nombreux éléments allant dans le bon sens, dont surtout le refus de la division. Le gâchis est terrible.

Ensuite, il y a bien entendu la crise sanitaire, qui a démobilisé beaucoup de monde. Si on ajoute à l’arrière-plan l’ambiance de crise à tous les niveaux, dont économique, les Français sont paralysés.

Enfin, il y a le lessivage relativiste du capitalisme qui n’a pas cessé d’œuvrer depuis 2015. La société a encore plus été déstructurée, l’élection du libéral Emmanuel Macron comme président l’illustre bien. Il y a encore moins de Gauche, encore moins de culture, encore moins de conscience.

Il y a donc eu des milliers de personnes se rassemblant en hommage à Samuel Paty, partout dans le pays, mais sans former un mouvement de masse au sens strict. 250 personnes à Agen, 300 à Royan, 750 à Rochefort, un millier à Bayonne, 1 500 à Montpellier, 2 000 à Bordeaux, plusieurs milliers à Pau, 5 000 à Toulouse, 6 000 à Lyon, à Paris quelques milliers sur la place de la République… On l’aura compris, il y a eu des rassemblements vraiment partout dans le pays, tout comme pour « Je suis Charlie », mais sans que le pays ne se mobilise.

D’ailleurs, tous ces rassemblements se caractérisent par :

– une organisation par en haut, par les syndicats d’enseignants surtout ;

– une présence significative de religieux, ainsi que de figures politiques traditionnelles, avec un appui gouvernemental très clair ;

– un discours très vague pro-enseignant pro-république avec la chanson la Marseillaise comme seul horizon.

C’est, on le voit bien, le contraire de « Je suis Charlie », qui est né par en bas, sur la base de toute une culture mêlant exigence d’universalisme à la française et l’influence des années 1970 avec notamment les dessinateurs Cabu et Wolinski. Si on voit les choses ainsi, « Je suis Charlie » a été la dernière séquence des années Mitterrand, tout à fait dans l’esprit de la grande manifestation parisienne de mai 1990 à la suite de la profanation du cimetière juif de Carpentras.

Quant aux rassemblements du 19 octobre 2020, ils expriment un profond niveau de dépolitisation, avec en toile de fond un républicanisme totalement flou et parfaitement en convergence avec la Droite. C’est là un constat très mauvais qu’on peut faire. Les Français décident envers et contre tout de rester spectateurs. Même un événement de grande importance ne les amène pas à sortir du cadre. On voit mal comment l’extrême-Droite ne peut pas grignoter toujours plus du terrain dans une telle situation.

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Politique

Jean-Luc Mélenchon et le jeu nationaliste «franc-maçon»

Jean-Luc Mélenchon ne relève pas des traditions du mouvement ouvrier, mais du courant trotskiste dit lambertiste particulièrement lié au syndicat anti-politique Force Ouvrière et à la franc-maçonnerie. C’est la source intellectuelle de ses nouvelles sorties ultra-provocatrices au sujet des « progrès » de Marine Le Pen et des gouvernements qui plieraient devant les « communautaristes » « sionistes ».

Les propos de Jean-Luc Mélenchon, début décembre, avaient laissé perplexes beaucoup de monde. Il avait expliqué qu’il y aurait eu un changement « social » chez Marine Le Pen. Constatant qu’elle appelait à manifester contre le plan gouvernemental de réforme des retraites, il a expliqué devant les médias :

« Écoutez, c’est un grand progrès. D’habitude, elle passe son temps à chercher pouille aux arabes et aux musulmans, et aujourd’hui, elle a compris que quelle que soit sa religion ou sa couleur de peau, on a tous des intérêts communs et qu’on est semblable et qu’à partir de 60 ans et plus, tout le monde est fatigué, donc ça vaut la peine que les gens s’arrêtent. »

On ne comprend pas trop si Jean-Luc Mélenchon se moque de Marine Le Pen ou s’il considère qu’elle a réellement évolué. Cette ambiguïté est d’autant plus forte qu’il a ensuite expliqué :

« Elle est en train de faire un progrès en quelque sorte en direction de l’humanisme, je ne vais quand même pas me plaindre de ça et quant à ses adhérents sur le terrain, ils sont les bienvenus. Aujourd’hui, ils viennent dans la tenue des cheminots, de gaziers, d’électriciens, etc. Comme on dit à Marseille : profession vaut noblesse. »

En réalité, il se moque bien d’elle, mais il tente de jouer sur son terrain « national », « communautaire ». Il oppose à la lecture nationaliste de Marine Le Pen une lecture tout autant nationaliste, mais qu’il imagine sociale car nationale, et inversement. C’est l’idéologie « républicaine » qui est propre à la France et dont l’une des principales figures fut Jean Jaurès.

La nation française serait « en soi » sociale, il suffirait qu’elle soit « elle-même ». D’où ses propos populistes le même jour faisant allusion, sans le dire, à la charte d’Amiens de 1905 :

« Dans les statuts de tous les syndicats, la CGT, SUD et le reste, il est dit qu’ils réunissent tous les travailleurs, compte non tenu de leurs opinions politiques, religieuses ou philosophiques. Par conséquent, quand vous êtes dans un mouvement social, depuis toujours il y a toujours eu tout le monde (…). Je ne suis pas étonné qu’un salarié du rang, quel que soit son vote politique, car c’est bien de ça dont on parle, défendre ses intérêts avec les autres et moi je trouve ça très bien. »

Le dirigeant de La France insoumise sait d’ailleurs être prudent et il assez malin pour ne pas mentionner Force Ouvrière, ce syndicat est né comme opposant farouche à la politique, en étant soutenu par la franc-maçonnerie (Jean-Luc Mélenchon est membre du « Grand Orient ») et les trotskistes du courant lambertiste (dont a fait partie Jean-Luc Mélenchon).

Il veut éviter que son style ne soit trop cerné intellectuellement, car sinon il perdrait son côté « au-dessus » de la mêlée qu’il emprunte aux « leaders » nationalistes latino-américains.

Il en va de même pour ses propos suivant la défaite des travaillistes au Royaume-Uni. Il a tenu sur son blog des propos anti- « communautaristes » relevant résolument de l’idéologie franc-maçonne.

« Corbyn a passé son temps à se faire insulter et tirer dans le dos par une poignée de députés blairistes. Au lieu de riposter, il a composé. Il a du subir sans secours la grossière accusation d’antisémitisme à travers le grand rabbin d’Angleterre et les divers réseaux d’influence du Likoud (parti d’extrême droite de Netanyahou en Israël). Au lieu de riposter, il a passé son temps à s’excuser et à donner des gages. Dans les deux cas il a affiché une faiblesse qui a inquiété les secteurs populaires (…).

Tel est le prix pour les « synthèses » sous toutes les latitudes. Ceux qui voudraient nous y ramener en France perdent leur temps. En tous cas je n’y céderai jamais pour ma part. Retraite à point, Europe allemande et néolibérale, capitalisme vert, génuflexion devant les ukases arrogante des communautaristes du CRIF : c’est non. Et non c’est non. »

Une ukase est un ordre sans appel donné en Russie par le Tzar et les dernières lignes citées sont les dernières de son article. En agissant ainsi, Jean-Luc Mélenchon savait très bien qu’il jouait la provocation et que cela ressemblerait, comme pour le pseudo appel du pied à Marine Le Pen, à un appel du pied aux franges petites-bourgeoises ayant basculé dans le camp antisémite de Dieudonné et d’Alain Soral.

Il agit ici de manière machiavélique, de manière parfaitement calculée. Il sait également très bien que les travaillistes britanniques, en s’ouvrant aux courants post-modernes « décoloniaux » et autres, ont fait face à une vague d’antisémitisme, comme « anticapitalisme romantique ». Mais il choisit de passer outre.

Car, étranger au mouvement ouvrier, en perte de vitesse, Jean-Luc Mélenchon est obligé d’accentuer la mise en avant de son « idéal » républicain – franc-maçon, cette fiction apolitique, anti-politique, d’une « république sociale » fondée sur la « fraternité ».

Ce qui revient, dans les faits, à prôner un État fort, apolitique, sur une ligne « sociale » et nationale. Bref, à servir de marchepied à l’extrême-Droite, tout en prétendant le contraire.

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Politique

«La République en première ligne» du Printemps républicain le 30 novembre à Paris

Le mouvement Le Printemps républicain organise samedi 30 novembre un événement intitulé « La République en première ligne » avec comme objectif  « la reconstruction d’une force politique républicaine et progressiste », en confrontation avec cette « large partie de la gauche [qui] a choisi le déshonneur » en manifestant contre l’«islamophobie».

 

Le Printemps républicain est un rassemblement qui été considéré comme représentant surtout l’aile droite du Parti socialiste, avec une ligne républicaine « ultra » de centre-Gauche dans la lignée des positionnements de Manuel Valls. Le lancement de ce mouvement en 2016 avait cependant rassemblé plusieurs sensibilités signant son manifeste, depuis l’actuel dirigeant du PS Olivier Faure jusqu’à Emmanuel Maurel, qui a quitté le PS avec une critique par la gauche pour fonder Gauche républicaine et socialiste.

Le mouvement avait été fondé après le grand choc des attentats de 2015 et dans la foulée de l’esprit « Charlie ». C’est donc logiquement qu’il a été au cœur de la critique de gauche de la manifestation contre « l’islamophobie », avec notamment Amine El-Khatmi comme figure représentant le mouvement ces dernières semaines dans les médias.

Voici donc l’appel à l’événement « La République en première ligne », dont le programme précis n’est pas encore dévoilé.

« Chère amie,

Cher ami,

La manifestation contre l’islamophobie du 10 novembre dernier a marqué un tournant. En se rendant à ce rassemblement, en signant un appel à manifester avec des islamistes, en cautionnant par sa présence un parallèle insupportable entre le sort des musulmans en France aujourd’hui et celui des juifs sous l’occupation et la Shoah, en prenant part à un défilé durant lequel la foule a scandé Allahu Akbar à quelques centaines de mètres du Bataclan et des anciens locaux de Charlie Hebdo, une large partie de la gauche a choisi le déshonneur.

Un choix historique s’offre désormais à nous. Ce choix, nous le formulons depuis la naissance de notre mouvement. Il est notre raison d’être. C’est pourquoi nous sommes décidés à contribuer, avec les formations républicaines et progressistes qui le voudront, à entamer dès maintenant la reconstruction d’une force politique républicaine et progressiste.

C’est dans ce contexte que le Printemps Républicain a le plaisir de vous convier à l’événement La République en première ligne qui aura lieu le samedi 30 novembre à partir de 14h à La Bellevilloise à Paris.

Lors de ce rassemblement, nous aurons l’occasion de mettre à l’honneur les premières lignes de la République : les fonctionnaires qui protègent, soignent et éduquent ainsi que des élus et des citoyens courageux et engagés, défenseurs de la liberté d’expression, thème qui sera particulièrement mis à l’honneur. Ils nous parleront de leurs combats, ceux relatés dans Combats pour la France, le livre d’Amine El Khatmi. De grands témoins et des personnalités publiques de premier plan seront également présents.

L’inscription à cet événement est obligatoire (en se rendant sur le site www.printempsrepublicain.fr). L’événement est gratuit mais vous avez la possibilité de faire un don pour aider le Printemps Républicain, qui ne vit que des cotisations de ses adhérents, d’assumer le coût de cette journée.

Le programme complet sera dévoilé dans les prochains jours. »

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Culture

Notre-Dame de Paris de Victor Hugo, le livre le plus abominable qui ait jamais été écrit

Le roman Notre-Dame de Paris. 1482 connaît un nouveau succès. C’est fort dommage, car l’approche de Victor Hugo relève du syncrétisme républicain – catholique propre à la France.

Le roman de Victor Hugo Notre-Dame de Paris. 1482 a connu un intense regain d’intérêt à la suite de l’incendie partiel de cette cathédrale. Le roman prend ainsi la première place sur le monopole Amazon.fr, et même les onze premières places dans différentes éditions, si l’on omet que la huitième place est prise par un ouvrage collectif sur l’édifice lui-même. Rappelons au passage que l’œuvre est dans le domaine public et qu’on trouve aisément une version epub pour les liseuses ; il est vrai toutefois que le roman est assez long et qu’on peut apprécier de le lire en version papier.

Cela étant, c’est une lecture qui ne plaira qu’aux esprits qui, à l’instar de Game of thrones, se complaisent dans la fantaisie coupée de tout lien avec la réalité, de toute culture historique. Victor Hugo est un mythe littéraire, façonné par l’alliance des catholiques et des républicains, qui l’ont sacralisé comme un immense auteur, Victor Hugo, initialement monarchiste, relève du romantisme français, c’est-à-dire de l’idéalisme réactionnaire.

Voici au sujet de son roman ayant la cathédrale Notre-Dame de Paris comme centre d’orientation le point de vue de Johann Wolfgang von Goethe, le chef de file du romantisme allemand.

« J’ai lu, ces jours derniers, Notre-Dame de Paris, et j’ai dû m’armer d’une bonne dose de patience pour supporter les tourments que m’infligea cette lecture.

C’est le livre le plus abominable qui ait jamais été écrit.

Encore le supplice qu’on endure n’est-il nullement contrebalancé par la joie qu’on pourrait ressentir à la vue de quelque trait véridique de la nature humaine, de quelque caractère humain.

Son livre est au contraire sans naturel et sans vérité. Ses soi-disant personnages ne sont pas des hommes en chair et en os, mais de pauvres marionnettes en bois que l’auteur remue à son gré, en leur faisant faire toutes sortes de contorsions et de grimaces en vue d’obtenir l’effet qu’il se propose.

Quelle drôle d’époque, où non seulement un livre pareil est possible mais où on le trouve supportable et même divertissant ! »

Ces lignes retracent les propos de Goethe en 1831, juste après la publication du roman. Elles témoignent de l’énorme décalage, du fossé absolu même entre le romantisme français et le romantisme allemand. Le premier est ultra-réactionnaire, soutenant le roi et les monarchistes, regrettant un moyen-âge idéalisé. Le second est progressiste et représente la défense des sentiments contre le formalisme du conformisme aristocratique.

Les personnages des romans de Victor Hugo sont justement fictifs, ce sont des abstractions. Victor Hugo les utilise sans aucun effort de réalisme, pour parvenir à ses fins : chercher l’effet du grotesque, faire ressortir du sublime, c’est-à-dire impressionner le lecteur avec des moyens irrationnels.

On est là dans une logique opposée au naturel, une logique religieuse, qui est également celle de René Descartes. Chez Victor Hugo, on a des figures qui n’ont aucun rapport avec la nature humaine, avec la réalité sensible. Les personnages d’Esmeralda et de Quasimodo sont des fantasmagories, des caricatures d’êtres vivants dont les traits grossiers ne font que répondre au besoin de Victor Hugo d’occuper les esprits avec du pittoresque.

Au moins, il y a la volonté de faire passer des bons sentiments. Cependant, c’est lié justement à l’idéologie sociale-catholique, qui est pareillement le noyau idéologique des Misérables, et de l’initiative de Victor Hugo en faveur de la cathédrale au milieu du XIXe siècle. Afin, justement, d’en faire le symbole d’une sorte de syncrétisme français d’un catholicisme social, voire républicain.

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Société

Le Conseil Constitutionnel aborde la notion de fraternité

Depuis le 26 juin, le Conseil Constitutionnel étudie la notion juridique de fraternité. La fraternité est présente dans la loi fondamentale de la république comme composante de la devise : liberté, égalité, fraternité. La question est de savoir quelle est la portée juridique de la fraternité.

Concrètement, il s’agit de déterminer si oui ou non, la « fraternité » doit être prise en compte comme valeur incontournable irriguant toute loi. Évidemment, il y a en arrière-plan la profonde crise de cette notion de par l’individualisme du capitalisme triomphant, le relativisme, l’esprit de concurrence.

L’enjeu est de taille pour deux citoyens ayant aidé au séjour irrégulier de personnes entrées illégalement sur le territoire français. Les avocats de ces personnes condamnées en première instance et en appel jouent ici leur va-tout. Si la fraternité est reconnue comme un principe incontournable, alors la loi sur l’aide au séjour irrégulier ne saurait être opposable aux personnes agissant simplement par solidarité, sans intention frauduleuse.

Des associations poussent dans ce sens. Il s’agit notamment des associations protestantes liées historiquement à la question des réfugiés, comme la CIMADE. On voit aussi une partie des catholiques mettre en avant leur conception de l' »hospitalité ». Les associations de défense des Droits de l’Homme plaident quant à elles pour une meilleure protection des bénévoles de l’aide aux clandestins.

Rappelons ici qu’il ne faut pas confondre charité chrétienne et partage au sens socialiste du terme… Cela n’a même rien à voir et la Gauche ne devrait pas avoir pour but d’accompagner les migrations imposées par le capitalisme à des gens abandonnant leur pays, leur famille, leur vie.

Faire de la retape pour la France « moderne », des droits de l’Homme, accueillante, fraternelle, c’est servir une idéologie qui n’est pas celle de la Gauche, mais du régime en place!

Raisonner abstraitement en termes de fraternité contribue à renforcer les illusions quant à une fraternité institutionnelle qui existerait. Le Conseil constitutionnel est bien une institution parfaitement non-démocratique composée sur la base de désignations arbitraires au plus haut niveau de l’État. Et pour autant, c’est cet organe de l’État qui, paradoxalement, est chargé de veiller sur le respect des droits fondamentaux des citoyens.

On est ici dans une rapport idéologique, mensonger, qui tient historiquement à ce que la notion de fraternité fasse partie de la devise de la république française.

En effet, la liberté est la plus haute valeur de la bourgeoisie. C’est en faisant accéder la notion de liberté individuelle au plus haut niveau des conceptions philosophiques que la bourgeoisie a pu mobiliser pour conquérir le pouvoir politique en France. C’est la liberté qui est venue briser les privilèges féodaux. La liberté est strictement encadrée par le pouvoir politique, puisqu’elle est limitée par les lois.

L’égalité est une concession faite à la classe travailleuse naissante et à la paysannerie immense du 18e siècle. La féodalité représentait ce système obsolète des inégalités érigées en institutions et justifiées par la naissance. L’égalité à la naissance est un fondement de la république (« les hommes naissent égaux en droit »). Il s’agit d’une égalité des droits, bien sur, non d’une égalité réelle. Sous couvert de cette égalité formelle, la bourgeoisie peut exister avec la propriété, se maintenir et donner des gages de bonne foi.

Voilà comment Marx explique dans son texte Les luttes de classes en France (1848-1850), l’entrée de la fraternité dans la devise républicaine à la faveur de la révolution de 1848 :

« Ainsi, dans l’esprit des prolétaires qui confondaient en général l’aristocratie financière avec la bourgeoisie, dans l’imagination de braves républicains qui niaient l’existence même des classes ou l’admettaient tout au plus comme une conséquence de la monarchie constitutionnelle, dans les phrases hypocrites des fractions bourgeoises jusque-là exclues du pouvoir, la domination de la bourgeoisie se trouvait abolie avec l’instauration de la République.

Tous les royalistes se transformèrent alors en républicains et tous les millionnaires de Paris en ouvriers. Le mot qui répondait à cette suppression imaginaire des rapports de classe, c’était la fraternité, la fraternisation et la fraternité universelles.

Cette abstraction débonnaire des antagonismes de classes, cet équilibre sentimental des intérêts de classe contradictoires, cette exaltation enthousiaste au-dessus de la lutte de classes, la fraternité, telle fut vraiment la devise de la révolution de Février.

C’était un simple malentendu qui séparait les classes, et, le 24 février, Lamartine baptisa le Gouvernement provisoire : « Un gouvernement qui suspend ce malentendu terrible qui existe entre les différentes classes. » Le prolétariat de Paris se laissa aller à cette généreuse ivresse de fraternité. »

Graver la fraternité sur les frontons des Mairies, c’est laisser penser que dans la république française, tous les français vivent en frères et soeurs, en dépit de l’exploitation d’une classe par l’autre. Mais si on donne une réalité juridique à la fraternité, alors il faudra que la bourgeoisie partage fraternellement, pour de vrai.

On le comprend, ce n’est pas une décision du Conseil Constitutionnel qui pourra imposer la fraternité. La fraternité suppose la disparition des classes sociales, et pour cela il faut le socialisme ; laisser le Conseil Constitutionnel fournir un avis à ce sujet, c’est contribuer au maintien des illusions.