« Le soleil du Venezuela naît dans l’Essequibo » : comme expliqué ici, le Venezuela se lance dans l’aventure militariste de reconquête de sa région perdu, l’Esequibo. La propagande de l’Etat tourne à fond, profitant d’une vraie question liée au colonialisme britannique et à l’impérialisme américain pour en faire une opération nationaliste d’expansion. C’est dans la joie, la bonne humeur et les rythmes dansants dont ceux du reggaeton que les Vénézuéliens sont hypnotisés dans la marche à la guerre. Le référendum du 3 décembre 2023, dont un test grandeur nature a même été réalisé le 19 novembre 2023, sert de ticket de validation pour justifier le conflit, qui « n’est pas encore armé », comme l’a rappelé le ministre vénézuélien de la défense Vladimir Padrino López.
Hugo Chávez, fondateur du régime « bolivarien » du Venezuela, lié à la Russie et surtout la superpuissance chinoise, n’avait pourtant pas fait de la question de l’Esequibo une question primordiale. Il avait bien souligné l’exigence historique sur cette région, mais tout allait bien tranquillement, car le Venezuela avait d’excellents rapports avec Cuba, et Cuba avec la Guyana. Comme toutefois cette dernière compte désormais profiter des gisements pétroliers découverts dans la zone de l’Esequibo… l’affaire devient autrement sérieuse.
La Guyana entend faire passer sa production à 1,2 million de barils par jour en 2027… Ce qui ferait fait de ce petit pays le troisième plus grand producteur d’Amérique latine derrière le Brésil (actuellement à 3 millions par jours) et le Mexique (1,7 million par jour). Le Venezuela produit en ce moment 750 000 barils par jour. Les principales productions journalières de barils sont les suivantes : Etats-Unis 12,9 et Russie 9,4, Arabie Saoudite 9 et Irak 4,3.
Le Venezuela, pays au capitalisme bureaucratique, est qui plus est en crise interne massive. L’émigration est massive, la violence criminelle endémique. L’opposition a dans ce contexte réussi à tenir une primaire avec 2,4 millions de votants alors que l’élection présidentielle doit se tenir en 2024. D’où la nécessité interne de s’aligner de manière forte sur la bataille pour le repartage du monde, avec n’importe quelle justification.
Le président du Venezuela Nicolás Maduro diffuse ainsi un discours « patriotique » plein d’urgence, comme par exemple le 25 novembre 2023 :
« Je suis très heureux de voir le Venezuela renaître et fleurir dans son union nationale.
Ils ont pris l’avantage de la division du 19e siècle, alors que nous n’avions pas d’Etat, que nous n’avions pas de force militaire.
Ils ont également pris l’avantage lors du 20e siècle.
Mais le 21e siècle est totalement différent, nous sommes unis, nous avons une seule conscience, une puissance militaire, un seul Etat et un seul peuple. »
C’est une démarche expansionniste de sortie du crise qui explique l’opportune redécouverte de la nécessité « patriotique » de récupérer sa région historique… Qui est à l’origine du besoin « pressant » du Venezuela en entier, Venezuela toda !
Naturellement, l’affrontement entre le Venezuela et la Guyana n’est qu’un aspect de la confrontation entre les superpuissances chinoise et américaine. C’est en raison de la logique d’affrontement des superpuissances que les pays du monde, satellisés par la tendance historique, se précipitent eux aussi dans la bataille pour le repartage du monde.
Si la guerre se déclenche – et elle se déclenchera – c’est encore une partie du monde à ajouter dans la liste sinistre des zones acquises au conflit, faisant partie du problème et pas de la solution. La tendance à la guerre mondiale fait tomber les dominos un par un…