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Politique

Eric Zemmour et l’antisémitisme de Jean-Luc Mélenchon

2021 devient toujours plus ignoble.

Jean-Luc Mélenchon a mené une sortie électorale antisémite tout à fait calculé, dans la perspective de la présidentielle de 2022. Il a dit deux choses très précises : tout d’abord il a dit qu’Eric Zemmour était juif, ce que tout le monde sait et ce dont tout le monde se moque parce qu’on est en France et que ce genre de choses ne compte pas. Il est le premier dans le cadre de la campagne présidentielle à affirmer cela, faisant tomber un tabou républicain.

Ensuite, il a dit qu’Eric Zemmour avait des positions politiques qui reflétaient le fait qu’il soit juif. Ce faisant, il lance une offensive antisémite, ou plus exactement anti-judaïque. Pratiquement personne ne sait en effet qu’Eric Zemmour a ou a eu du moins un positionnement personnel de juif profondément croyant et relativement orthodoxe dans sa pratique. Jean-Luc Mélenchon a dû le savoir et balance la chose.

Concrètement, il vise très clairement à une polarisation judéo-arabe pour un clivage religieux et/ou raciste, dont il profiterait électoralement. Il agit ainsi comme l’ultra-gauche française qui manie autant les drapeaux palestiniens qu’elle ne fait strictement rien, en pratique, pour les Palestiniens dont la situation est toujours plus dramatique.

Voici les propos de Jean-Luc Mélenchon, tenus sur BFMTV:

Le journaliste: Il est antisémite ou pas? C’est une vraie question que se pose la communauté juive notamment.

Jean-Luc Mélenchon: Ah bon (…). Après, qu’un juif soit antisémite est une nouvelle. Sur le moment cela m’a fait sourire, j’aime bien ce type de paradoxes. Je me suis dit comment c’est possible un truc pareil.

Mais, oui, parce qu’il me semble qu’il se trompe. Monsieur Zemmour ne doit pas être antisémite parce qu’il reproduit de nombreux scénarios culturels : “On ne change rien à la tradition, on ne bouge pas, la créolisation mon dieu quelle horreur”. 

Et tout ça, ce sont des traditions qui sont beaucoup liées au judaïsme. Ça a ses mérites, ça lui a permis de survivre dans l’histoire. Donc moi je ne crois pas qu’il soit antisémite.

Enfin je sais pas car à véritablement c’est pas mon problème. S’il est antisémite il sera condamné. Il est raciste, ça c’est sûr. Il a été condamné pour ça.

Jean-Luc Mélenchon ment. Il sait très bien que les propos d’Eric Zemmour sur Pétain ont provoqué un scandale chez les Juifs. Il ne peut pas ne pas le savoir.

Il sait sans doute aussi que la communauté juive religieuse a une démarche l’amenant à être hostile à tout ce qui pourrait la faire remarquer. C’est une tradition remontant au début du moyen-âge où il s’agissait de subsister comme minorité sans se faire remarquer et écraser par les autorités politique et religieuse.

Il sait par contre forcément que l’histoire regorge de juifs antisémites, de juifs ayant la haine de soi. C’est un phénomène très répandu historiquement. Eric Zemmour en est un exemple classique d’ailleurs. C’est typiquement le Juif ressemblant à un Arabe cherchant à fuir dans un imaginaire ce qu’il est lui-même.

Quant à l’interprétation du judaïsme que fait Jean-Luc Mélenchon, elle est digne de Dieudonné et de Soral. Car le judaïsme est une religion qui se prétend traditionnelle, mais ne l’est pas du tout. Ses traditions ont sans cesse été renouvelées par de multiples commentateurs et autorités religieuses, il existe une multitude de courants se tolérant mais d’approches fondamentalement différentes. Le judaïsme est ainsi un véritable kaléidoscope d’opinions et de conceptions différentes voire antagoniques, littéralement un chaos sans nom, même si les pratiques restent les mêmes pour tous, mais même là avec une tolérance maximale pour leur degré d’acceptation.

Autrement dit, le judaïsme c’est n’importe quoi niveau structure et considérations intellectuelles, tout comme l’Islam d’ailleurs : l’absence de centralisation induit des courants et des sous-courants sans fin, des conceptions et des points de vue différents innombrables, etc. Parler d’un judaïsme traditionnel ou d’un Islam traditionnel, c’est croire les mensonges des fondamentalistes apparues les deux derniers siècles et leurs fictions d’un « retour aux sources ».

Mais de toutes façons le but de Jean-Luc Mélenchon est de dire que l’antisémitisme, on s’en moque, que ce qui compte c’est le racisme, sous-entendu politiquement : opposons les Arabes aux Juifs en faisant en sorte de présenter les premiers comme les opprimés les seconds comme les valets ou les maîtres du pouvoir en place.

La preuve de tout cela est que Jean-Luc Mélenchon, devant le tollé, a publié sur son facebook un texte aussi intelligent et juste que ses propos sur BFMTV étaient ignobles. Une telle différence montre qu’il savait ce qu’il faisait.

Jean-Luc Mélenchon dit à l’oral qu’il ne sait pas si Eric Zemmour est antisémite et il écrit qu’en fait il serait le porte-parole de l’antisémitisme français. Il faudrait savoir ! Mais tel est le populisme de Jean-Luc Mélenchon que de chercher à construire une sorte de narration politique l’amenant à triompher à la présidentielle… à tout prix.

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Société

« Qui ? » et les allusions antisémites dans les manifestations anti passe-sanitaire

C’est l’esprit des années 1930.

Il y a une réflexion à avoir sur les nuances et différences entre ceux qui sont avant tout anti-pass sanitaire et les anti-vax. Car ces derniers ouvrent nécessairement un espace à l’antisémitisme. Exactement comme avec la « quenelle » de Dieudonné, et les Gilets Jaunes « canal historique », on observe dans les manifestations et les slogans des opposants au passe-sanitaire une sorte de mélange satirico-délirant cherchant à affirmer l’antisémitisme, mais sans le dire.

En l’espèce, c’est le « mais qui ? ». Cette pseudo-question s’appuie sur une citation d’un des militaires signataires de la tribune dite « des généraux » : le général Dominique Delawarde, qui avait affirmé en réponse à une question de Claude Posternak, lui-même juif, entrepreneur dans la communication et membre du bureau politique de LREM.

Le communicant a cherché à faire dire explicitement au général « qui, selon lui, tenait la meute médiatique ». La réponse fut « la communauté que vous connaissez bien ». Le sous-entendu visant clairement les Juifs bien sûr, au sens où l’entendent les antisémites.

Si on souligne que cette sortie antisémite d’un tel énergumène à eu lieu le 18 juin dernier, c’est-à-dire le jour anniversaire de l’appel du Général De Gaulle, on comprend que l’on a ici tout sauf un dérapage, mais la recherche de poser une référence, allant dans le sens du nationalisme derrière l’armée, prête à « faire le ménage ». La revue nationaliste « présent » n’a pas raté l’occasion, forcément.

Et que cela puisse trouver un écho parmi les manifestants « anti passe-sanitaire » en dit en soi long. En fait, cela en dit tout. On a bien sûr le cas emblématique de cette personne, Cassandre Fristot, une enseignante proche du Rassemblement National et du mouvement dissident de Philippot, qui a été arrêtée et qui sera même jugée en septembre pour une pancarte provocatrice, qui autour de la question « mais qui ? » a dressé une liste de personnage, juifs à part Emmanuel Macron, tenus pour être des « traîtres ».

Arrêter et juger une telle personne est bien sûr la moindre des choses, mais on peut s’attendre à ce que son procès ne donne pas grand chose. Ni non plus les éventuelles sanctions disciplinaires que le ministère de l’Éducation Nationale entend prendre contre elle selon ce qui a été annoncé.

Comment même une telle personne, avec un tel parcours, qui a même été évincée du Rassemblement National pour son antisémitisme ouvert, peut encore être enseignante ? Comment a-t-elle pu ainsi défilée sans rencontrer une ferme opposition, et vive tranquillement sa vie sans avoir la société l’ostracisant ?

Mais surtout, c’est la Gauche qui devrait exiger ici son éviction pure et simple de l’Éducation Nationale et que l’on devrait entendre sur cette progression de l’antisémitisme au sein de ces mobilisations des anti passe-sanitaires.

Car il est évident que parmi un tel mouvement plébéien porté par la petite-bourgeoisie hystérique et déboussoulée par la crise, l’antisémitisme ne va faire que progresser comme « socialisme des imbéciles », comme le disait le social-démocrate allemand August Bebel, c’est-à-dire comme idéologie anticapitaliste pensant critiquer le capitalisme de manière « radicale », mais en fait de manière imaginaire, virtuelle, illusoire.

En fait, qui ne voit pas la crise, qui ne comprend ni le capitalisme ni le fascisme, ne peut pas voir ni la montée de la tendance à la guerre à l’extérieur, ni celle de l’antisémitisme et du nationalisme mobilisateur à l’intérieur. Même une figure comme Éric Zemmour, qui tente de reformuler un nationalisme français néo-gaullien qui viserait les « nomades » et non les « Juifs » est pris dans cette vague.

C’est en fait un moment de lutte de classe. Et si l’antisémitisme a une dimension idéologique, c’est donc qu’il faut pouvoir lui opposer une idéologie. Et c’est là que la Gauche a besoin plus que jamais de retrouver ses concepts, de retrouver notamment le sens du terme « populaire » à opposer au « peuple » au sens des populistes qui le voient comme un « bloc » contre une oligarchie malfaisante.

Ou bien, pire encore, comme une « foule » qu’il faudrait diriger de manière plébéienne.

Il n’y a pas le choix. S’opposer à l’antisémitisme, c’est obligatoirement affirmer le Socialisme, et donc assumer la différenciation au sein du peuple entre les défenseurs aveugles de l’ancien, y compris de manière « peuple » ou « plébéienn » et les partisans de la transformation et du nouveau.

C’est une lutte de lignes, un combat pour affirmer une proposition historique. Là où des révoltés sans boussole cherche à appuyer tout mouvement en espérant « rassembler » et « orienter » les choses par le haut, il faut au contraire avancer et faire le tri, tracer les lignes rouges et pousser à la polarisation par la base.

Il ne faut pas un « spontanéisme » en mode plébéien et une fascination pour la « foule », mais une conscience socialiste porteuse d’organisation démocratique et de culture pour le peuple.

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Politique

Décès de l’historien Zeev Sternhell

Zeev Sternhell (1935-2020) a été un historien assez connu en France, à défaut d’être reconnu. La raison est que cet Israélien a considéré que le Fascisme en tant qu’idéologie puise dans la « droite révolutionnaire » française du XIXe siècle. Les historiens français considèrent au contraire que la France est historiquement imperméable au Fascisme.

Jeune Juif polonais fuyant les persécutions nazies, Zeev Sternhell passa plusieurs années en France avant de rejoindre Israël en 1951. Cela explique son tropisme français et ses œuvres ayant provoqué une vive polémique dans les milieux intellectuels français : Maurice Barrès et le nationalisme français ; La Droite révolutionnaire, 1885-1914 : les origines françaises du fascisme ; Ni droite ni gauche : l’idéologie fasciste en France.

La problématique est la même que chez Bernard-Henri Lévy avec L’Idéologie française. Tant Lévy que Sternhell, tous deux Juifs, disent que l’idéologie du régime de Vichy ne tombe pas du ciel mais qu’il existe bien une tradition fasciste spécifiquement française, d’orientation spiritualiste et vitaliste, consistant en une Droite à prétention conservatrice « révolutionnaire ».

Tous deux se sont fait écharpés par le milieu universitaire français : on ne touche pas si aisément à Barrès, Péguy, Bergson, ces monstres sacrés, ces idoles du fond français régionaliste, paysagiste, décentralisateur, tourné vers le spirituel, célébrant le culte des ancêtres, adepte du terroir.

On avait ici le fond d’une véritable critique des mentalités, une chose que la Gauche de notre pays n’a jamais fait, au contraire notamment de la Gauche allemande, italienne, autrichienne, russe… qui a souvent voire toujours porté son attention sur les mœurs, les comportements, les attitudes, etc.

Tant Bernard-Henri Lévy que Zeev Sternhell reprenaient d’ailleurs, en fin de compte, la critique marxiste d’une France de gauche pétrifiée dans le syndicalisme et farouchement anti-intellectuelle, au point de converger avec l’extrême-Droite.

Ils l’ont cependant abandonné. Bernard-Henri Lévy, d’une famille richissime, a choisi d’abandonner toute prétention intellectuelle pour jouer au « nouveau philosophe » à travers des Essais et vivre une vie dans l’opulence. Zeev Sternhell a lui mené une carrière dans la Gauche israélienne, notamment avec Shalom Archav (La Paix Maintenant), cherchant à faire revivre un sionisme de gauche bien spécifique aux années 1930-1960.

C’est que Zeev Sternhell, comme Bernard-Henri Lévy, était un intellectuel pour qui l’histoire, c’était l’histoire des idées. Tous deux pensaient que si une idéologie était démolie dans un ouvrage, alors elle le serait concrètement sur le terrain matériel. Il s’agit concrètement d’hégéliens de gauche cherchant à faire avancer l’histoire au moyen d’une dynamique des idées.

Chez Zeev Sternhell, les idées ont leur propre vie : elles avancent toutes seules, elles reculent toutes seules, et elles envoûtent les gens – ou pas.

Ce qui est assez flagrant, par exemple, est qu’on lit toujours au sujet de Zeev Sternhell qu’il aurait le premier dit qu’il aurait existé un Fascisme français. Or, la Gauche historique l’a dit bien avant lui et il y a même eu… le Front populaire. Mais ni les partisans ni les détracteurs de Zeev Sternhell n’abordent cette question, ni même Zeev Sternhell. On est dans le monde des idées, dans un idéalisme universitaire tout à fait traditionnel, entièrement extérieur au mouvement ouvrier. Le Fascisme comme réalité concrète, Zeev Sternhell ne l’aborde pas.

Il aura d’ailleurs fallu attendre 2019 pour qu’il aborde les Croix de Feu, et encore sous sa direction seulement. C’est là trois années après un un dossier maoïste à ce sujet, qu’il a forcément vu, ce qui le place à la remorque dans l’analyse. Il rate pareillement totalement des figures comme Bernanos ou Drieu La Rochelle, ce qui est pour le coup ridicule quand on se propose de parler du Fascisme en France.

C’est que là est le problème de fond : une analyse de l’extérieur permet un regard critique plus incisif, ce qui aide beaucoup. L’ensemble des dirigeants de l’extrême-Gauche en 1968 était d’origine juive, à peu de choses près. Cependant, si ce n’est pas aligné sur un mouvement historique réel, on passe dans des idées qui deviennent des abstractions. Cela donne alors un Daniel Cohn-Bendit beauf et conformiste, à l’opposé du contestataire de mai 1968.

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Raquel Garrido et ses sous-entendus antisémites

Raquel Garrido est une cadre de la France Insoumise particulièrement agressive à l’égard de la Gauche, qu’elle veut ouvertement liquider au nom du populisme. Elle est revenue récemment, pour se justifier à sa manière, sur une provocation à propos du traitement favorisant selon elle les Juifs face aux musulmans. Ces propos ont été tenus la même semaine où se tenait la commémoration de la tuerie antisémite de l’Hyper Casher par un islamiste jihadiste, et devant un cadre du RN qui a pu tranquillement la qualifier d’antisémite.

Raquel Garrido incarne jusqu’à l’excès une figure beauf se pensant moderne, avec un style pseudo-populaire qui prétend ringardiser l’héritage de la Gauche et de ses luttes dans notre pays. En toute logique, elle participe régulièrement à l’émission « Touche pas à mon Poste » de l’animateur Cyril Hanouna, bastion de la démagogie populiste dans le paysage audiovisuel de la France. De son point de vue, cela permettrait d’y apporter « la voix » de ce qu’elle représente, c’est-à-dire qu’elle espère par ses interventions parvenir à faire gagner une surface à son mouvement, la France Insoumise, ou du moins à élargir celle-ci.

Ces interventions, dans un tel cadre, ont à chaque fois quelque chose d’outrancier et de ridicule. Outrancier car surjoué, dramatisé, vulgaire même pour tout dire. Et ridicule, car cela ne peut au mieux que constituer de la punch-line à twitter et parce que la plupart du temps, cela se termine dans les vociférations et les disputes dans lesquelles on ne peut plus même suivre où elle voulait en venir.

Mais au fond, elle n’a pas l’air de bien le savoir elle-même. Au moins une chose toutefois qu’il y a de lisible et de clair, car cela elle l’assume franchement, c’est sa haine et son mépris de la Gauche et de ses valeurs.

Le 9 janvier dernier elle a ainsi tenu au cours de l’émission un propos flirtant ouvertement avec un antisémitisme élémentaire. Pour situer, cela arrive lors d’une question sur le port du voile par les adultes accompagnantes lors des sorties scolaires. Une des autres chroniqueuses interpellait Yacine Bellatar, qui était invité, pour savoir s’il aurait eu la même indignation que celle qu’il manifestait en faveur du voile, s’il avait été question du port de la kippa.

La question posée étant : « s’il (Jean-Michel Blanquer, Ministre de l’Éducation nationale) avait dit pas de kippa, auriez-vous démissionné ? » et c’est alors que Raquel Garrido intervient pour affirmer : « s’il avait dit cela, il ne serait plus ministre ». Phrase qu’elle appuie et répète ensuite fermement.

Il faut bien comprendre que Raquel Garrido n’en est pas ici à son coup d’essai, que cela ne relève pas d’une forme de dérapage, ce qui serait déjà grave de toute façon. Depuis le mois de septembre, elle intervient régulièrement dans l’émission pour fustiger le CRIF, opposer le traitement que l’on réserverait aux musulmans par rapport à celui qu’on accorderait aux Juifs.

En un mot, elle affirme clairement qu’elle pense qu’une lutte de pouvoir devrait être menée face à l’influence communautaire des Juifs et de leurs organisations en France, car ces dernières auraient des positions de privilèges qui provoqueraient des injustices en particulier concernant les musulmans, et que cela devrait se faire précisément au nom de la laïcité.

Raquel Garrido voit donc des communautés, ou des lobbies même si elle refuse le terme, mais elle ne relie cela en rien au libéralisme. Elle ne voit pas de part sa position que l’atomisation même de la société est ce qui constitue le problème, et que les post-modernes considèrent précisément que la société devrait se résumer à des individus libres et déconnectés, sauf pour défendre telle ou telle dimension de leur existence. Pour les libéraux, il peut bien exister un « lobby juif » comme un « lobby islamiste » par exemple, dans le cadre d’une société pulvérisée et concurrentielle.

D’ailleurs, précisément, elle ne voit pas tellement de problème à cela. Ce qui la gène, c’est que des Juifs auraient des privilèges, de part la position et l’influence de leurs organisations. Prolongeant cela, elle refuse bien sûr de parler de l’antisémitisme, sinon pour dire qu’elle ne le serait pas. Elle pense ouvertement en revanche que le sujet serait de réduire l’influence des Juifs dans les médias et dans les sphères de l’État. Les islamistes et les nationaux-socialistes à la sauce Alain Soral ne disent pas autre chose.

On sort donc du cadre de la raison pour aller vers le soupçon délirant et complotiste visant les Juifs et leurs organisations, en réactivant ni plus ni moins que les fondamentaux de l’antisémitisme le plus convenu. C’est un trahison ni plus ni moins des principes et de l’histoire même de la Gauche.

Par conséquent, si la France Insoumise était une organisation de Gauche, Raquel Garrido aurait dû rendre des comptes et elle aurait été exclue. Mais la France Insoumise est une organisation populiste. Et sa lutte contre « l’oligarchie » et les « communautés », en contournant au maximum l’islamisme, ne peut que l’amener toujours plus à développer l’antisémitisme.

La semaine dernière, elle est donc revenue, accompagnée d’Alexis Corbière, son compagnon qui est aussi un cadre dirigeant de la FI, et qui a été élu député en 2017, pour revenir sur ses propos. Pas pour s’excuser ni même au moins clarifier sa pensée. Non. Pour mettre en accusation ses détracteurs de brandir à tout va « l’anathème » d’antisémitisme pour clore ainsi le débat. Il faut bien dire que l’on peut parler d’anathème pour l’antisémitisme. N’est-ce pas la moindre des choses ?

Ou bien faudrait-il faire comme si le nazisme, les persécutions ou le Génocide des Juifs européens n’avaient jamais existé ? Elle a même eu l’audace de dire, de hurler plutôt, que si Cyril Hanouna pensait qu’elle était antisémite, il devait la virer sur-le-champ, en reconnaissant que cela relève de l’inacceptable.

C’est bien ce qu’il aurait fallu faire. Et cela d’autant plus, comme s’il fallait encore en rajouter, que cette sortie, Raquel Garrido l’a faite en présence de Jean Messiha, un cadre dirigeant du RN qui était opposé ici non à Raquel Garrido, ce qui veut déjà tout dire, mais à Yacine Bellatar.

Jean Messiha représente la ligne anti-islamiste du RN et, étant d’origine égyptienne, il valide en outre le fait que le RN mette en avant non la question du racisme, mais celle du nationalisme. Yacine Bellatar, représentant ici le libéralisme post-moderne et ouvert aux islamistes, il n’y avait plus aucun espace pour une personne comme Raquel Garrido. Dans ce face à face, elle est littéralement écrasée par le nationalisme de Jean Messiha.

Dans le meilleur des cas, elle ne peut que soutenir le cosmopolitisme de Bellatar sur l’islamisme, alors même qu’elle se prétend anti-macronienne de manière radicale, dans le pire des cas, son populisme ne tient pas le coup face au nationalisme.

Elle aurait pu se taire au moins, mais elle a choisi une attaque, pour montrer en fait qu’elle était plus radicale que le nationalisme de Jean Messiha, sans être anti-islamiste, en saisissant une occasion d’opposer Juifs et musulmans, kippa et voile. Comment ne pas être affligé par un tel niveau ? On est là dans une attaque anti-populaire qui fait forcément bondir hors d’elle toute personne de gauche.

Jean Messiha n’a même pas eu besoin de réagir outre mesure, il l’a ouvertement taxé d’antisémitisme, élargissant l’attaque à l’ensemble de la FI. Et sur cela, ni Raquel Garrido, ni Alexis Corbière ne sont revenus. Mais que peuvent-ils opposer de toute façon à un RN qui les devance sur leur propre terrain ? Face au RN, le sol se dérobe sous leurs pieds.

Il faut bien voir ici l’urgence qu’il y a pour la Gauche à clairement rejeter les personnes comme Raquel Garrido et au-delà, toute démarche populiste. L’antisémitisme est une ligne rouge infranchissable pour la Gauche authentique.

Ce qu’on voit aussi, c’est qu’entre les assauts des post-modernes libéraux de tout bord et ceux des nationalistes, il n’y a pas d’espace pour un soi-disant « populisme de gauche », autrement qu’à être la « gauche » des nationalistes. Et on voit bien que la FI ne cesse de reculer ou d’être littéralement conquise par le RN dont elle contribue à paver la route.

Il faut être clair avec des personnes comme Raquel Garrido ou Alexis Corbière sur ce qu’est la Gauche et ses valeurs pour être en mesure de rompre avec le libéralisme et de faire face de manière conséquente au nationalisme. C’est une exigence historique de notre époque.

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75 ans après la libération d’Auschwitz: l’antisémitisme qui n’en finit pas

Le 75e anniversaire de la libération d’Auschwitz par l’Armée rouge a été salué un peu partout, avec une grande pudeur, un sens réel de la justesse. Avec une arrière-pensée présente partout : on y arrive pas, cet antisémitisme, on ne s’en débarrasse pas, il reste outrageusement présent. Comment faire ?

Tout a été essayé ou presque contre l’antisémitisme, y compris le portrait guignolesque à travers Eric Cartman dans la série South Park. Mais on ne s’en sort pas, l’antisémitisme réapparaît toujours, vague après vague.

L’épisode de la quenelle avec Dieudonné a rappelé ici un point indiscutable. Plus on est éduqué, moins on est antisémite. L’antisémitisme est, en France, quelque chose de populaire. C’est une constante anecdotique mais ressurgissant par vague, de par son utilité : celui d’être un anticapitalisme romantique.

En ce sens, « l’antisémitisme est le socialisme des imbéciles », même si August Bebel, figure de la social-démocratie allemande à qui on attribue cette phrase à la fin du XIXe siècle, n’a jamais prononcé cette phrase. Car pour lui il n’y a pas de socialisme des imbéciles, il y a le socialisme et il y a le reste. L’antisémitisme est une révolte dévoyée et en ce sens il faut la remettre sur la bonne voie.

Beaucoup de Juifs l’ont vu historiquement et c’est pourquoi ils ont rejoint les rangs de la Gauche, comprenant que tant que le socialisme n’aura pas vaincu, l’antisémitisme servira de paratonnerre au capitalisme.

Il ne faut d’ailleurs ici pas avoir d’illusion sur les discours pro-palestiniens existant en France, qui sont d’une double hypocrisie. Première hypocrisie, car ces gens n’en ont rien à faire de la Palestine, dont la situation est toujours plus dramatique. Islamisme, corruption, influences étrangères massives, division entre factions… La Palestine est asphyxiée, mais cela n’est pas vu, pas su, car en France c’est simplement un lieu de projection. D’où par exemple la scène théâtrale d’Emmanuel Macron le 23 janvier 2020 devant l’église Sainte-Anne, territoire français de Jérusalem.

Seconde hypocrisie, car c’est un antisémitisme qui ne s’assume pas, à part en privé. La pression antisémite est énorme à Gauche, depuis l’opposition à la guerre du Golfe en 1990. À partir de cette date, il y a le commencement d’un exode des Juifs de Gauche. Un « anti-impérialisme » abstrait a pris le dessus sur les valeurs idéologiques de la Gauche et de l’extrême-Gauche existantes auparavant.

Là où il y a le populisme, la véhémence, la recherche d’un bouc-émissaire, le refus de l’organisation, la négations des valeurs du mouvement ouvrier… Il y a forcément l’antisémitisme, comme moyen de se donner une image « anticapitaliste ». C’est évidemment plus facile et plus rapide que de lire Le Capital de Karl Marx… L’irrationalisme est plus rapide, plus marquant, plus efficace à court terme que le rationalisme.

Voilà pourquoi on ne sort pas de l’antisémitisme. Seule la Gauche peut vaincre le capitalisme, qui a besoin du paratonnerre antisémite. Mais la Gauche historique est trop faible, et la gauche populiste vocifère, blâme, cherche un bouc-émissaire pour ne pas combattre le capitalisme : hier Nicolas Sarkozy, aujourd’hui Emmanuel Macron…

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Olivier Faure: «j’ai visité ces lieux d’où toute idée d’humanité s’était retirée»

Voici un récit d’une grande profondeur fait par le Premier secrétaire du Parti socialiste Olivier Faure il y a une dizaine d’années. Il l’a republié hier à l’occasion des 75 ans de la libération d’Auschwitz par l’Armée rouge.

Elie Buzyn et sa femme, par Olivier Faure.

« Il y a 75 ans, le camp de la mort d’Auschwitz était libéré. En cette journée commémorative je remets en ligne le billet écrit il y a une dizaine d’années lorsque j’ai visité ces lieux d’où toute idée d’humanité s’était retirée.

Je savais en me rendant à Auschwitz-Birkenau que ce voyage se graverait dans ma mémoire. Je savais que j’avais rendez-vous avec les abysses de l’Humanité d’où toute lumière s’était retirée, que je visiterai ces camps où l’Histoire a sombré, que je foulerai un cimetière sans tombes. Je croyais tout savoir. Et peut-être même que je savais tout. Mais je ne savais pas que savoir n’est pas tout.

Depuis ce 22 octobre, je suis hanté chaque jour par cette journée. Raison pour laquelle je n’ai pas écrit depuis sur ce blog, en dépit d’une actualité politique et parlementaire chargée. Je voulais d’abord raconter ce que j’ai vu. Jusqu’ici sans y parvenir.

Dans cette ville d’Auschwitz qui comprenait 60% de juifs avant-guerre, il n’en restait plus qu’une. Elle vient de disparaître. C’est la première pensée qui vient en pénétrant ce village sans attrait : la mémoire peut disparaitre. On imagine une population polonaise partagée entre la nécessité de garder témoignage de l’horreur nazie et le désir de faire oublier que les fumées noires et âcres qui s’échappaient des crématoires obscurcissaient le ciel sans arracher la compassion et encore moins la résistance des voisins. C’est la seconde pensée qui assaille, il est possible de vivre en regardant passer des trains de femmes, d’enfants, de vieillards, d’hommes condamnés à l’humiliation, la torture et la mort. Il y a quelques années, la polémique enfla autour de la volonté de construire un supermarché en face du camp. Il y a aujourd’hui une grande pizzeria de l’autre côté de la route…

Nous avons franchi ce portail de fer forgé. Relu cette inscription : « Arbeit macht frei » (le travail rend libre). Ironnie glaçante de nazis qui n’hésitaient pas à faire jouer l’orchestre pour accueillir les familles épuisées et inquiètes.

Il faisait un temps magnifique ce 22 octobre. Il ne faisait pas froid. Il n’y avait pas de boue, pas de prisonniers squelettiques en pyjamas rayés, pas de kapos, ni de soldats SS. Juste une caserne qui aligne des bâtiments de briques rouges. Le camp d’Auschwitz I fût en effet d’abord une caserne de l’artillerie polonaise. On est presque gêné par la banalité de l’endroit. Les mots de Hannah Arendt sur la banalité du mal trouvent là un écho particulier. Lieux ordinaires pour hommes ordinaires qui se transforment en bourreaux quotidiens.

Rien n’a été fait dans ce lieu pour impressionner outre mesure le visiteur. Ce n’est peut-être pas utile. Des échantillons d’horreur sont entreposés derrière des vitres : des valises abandonnées marquées du nom de leurs propriétaires, des chaussures d’enfants amassées, des montures de lunettes empilées… J’écris des « échantillons d’horreur » parce que ce sont des dizaines de milliers de prothèses, des dizaines de milliers de poupées de porcelaine, des dizaines de milliers de bagages, des montagnes de cheveux que l’on aurait pu amasser ici pour donner à saisir ce que crime de masse signifie. Il y a accrochée au mur cette carte d’Europe, sinistre, dont Auschwitz est le centre vers lequel pointent des rayons qui ont pour origine les villes de provenance des convois : Riga, Hambourg, Berlin, Bruxelles, Rome, Paris, Drancy, Pithiviers, Lyon…

Vers 16 heures, nous avons atteint Birkenau, le camp d’Auschwitz II. Le soleil se couche. Derrière les barbelés électrifiés, se profile un camp à perte de vue. Des baraques de part et d’autres d’une voie ferrée. Des miradors hauts perchés. Le gigantisme des lieux m’anéantit. Dans un dortoir, un rabbin a entamé une prière. Peut-être le kaddish, la prière des morts. Le soir tombe vite en Pologne. L’humidité monte. La fraîcheur aussi. Les bois sont tous prêts. J’entre dans les bâtiments des femmes. Dehors on entend des chiens aboyer. Une sirène de police hurle au loin. Dans la pénombre, je découvre ces couches superposées où s’entassaient celles qui n’avaient pas été condamnées au gaz dès leur arrivée. Elles devaient survivre à quelques dizaines de mètres des douches et des fours. Je reste une dizaine de minutes, seul dans ce bâtiment. Je suis englouti. Submergé. J’imagine ces filles auxquelles on offrit pour tout écrin à leur jeunesse, ces matelas de planches et ces murs de briques. J’imagine ces mères arrachées à leurs enfants. J’imagine ces coeurs serrés qui, la nuit venue, devaient scruter au travers des quelques ouvertures cet horizon fermé par d’autres baraques et saturé par d’autres douleurs.

Le soleil s’est pratiquement éteint lorsque j’atteins les ruines des chambres à gaz et des krématoriums, dynamités par les nazis avant l’arrivée des alliés. C’est ici que se perpétua l’organisation industrielle du crime. Tout fût pensé et planifié. Moll, le spécialiste de l’élimination des cadavres, alla jusqu’à imaginer un système de combustion à l’intérieur des fosses pour que la graisse humaine ainsi dégagée soit récupérée par des canalisations et vienne alimenter la flamme des fours en se passant de carburant… Des machines à broyer les os furent inventées pour réduire en poudre les restes humains qui n’avaient pas été réduit en cendres.

J’ai beaucoup hésité à écrire sur ce voyage. Devant tant de misère, je ne me sentais pas légitime à décrire l’indescriptible et l’insondable souffrance. Complexe du témoin qui se désole en se prenant pour un voyeur. Mais je sais aussi que ce sentiment doit s’effacer devant la nécessité de témoigner. Les nazis avaient décidé de retirer aux juif jusqu’au statut d’êtres humains. Ils ne voulaient pas seulement les exterminer, mais effacer jusqu’à leur passage et interdire le deuil et le souvenir.

J’ai fait de nombreuses photos. En les regardant, je les ai trouvées souvent trop esthétiques. Il y a une esthétique de l’horreur. Pour illustrer ce billet je me suis interrogé sur celle que je choisirais. J’ai préféré ce portrait parce qu’il évite tous les « clichés » avec miradors et barbelés. Cet homme s’appelle Elie Buzyn. C’est un des rescapés d’Auschwitz. Au premier plan, c’est sa femme qui parle. C’est la première fois qu’elle l’accompagnait sur les traces de son passé tragique. Au moment où je prends cette photo, elle raconte comment Elie sauva l’un de ses camarades d’une mort certaine en lui offrant sa ceinture (un pantalon qui tombe et c’est la mort), ne conservant pour lui-même qu’une ficelle… Elie a décidé de vivre le plus longtemps possible pour pouvoir emmener pour leurs 15 ans, tous ses petits enfants.

J’ai remonté dans la nuit noire le chemin de fer de Birkenau, éclairé par les projecteurs le long des chemins de ronde. Sur le ballast qui supporte les rails, j’ai prélevé trois petits cailloux. Un caillou pour chacun de mes enfants.

Trois cailloux comme ces cailloux que l’on dépose sur les tombes juives, symboles de la mémoire et de la permanence du souvenir. Dans l’antiquité, les pierres que chaque passant déposait, protégeaient aussi les corps des défunts des charognards.

Trois cailloux pour qu’ils se souviennent.

Trois cailloux pour que ce cri rapporté par Primo Levi, de cet homme qui fût pendu quelques heures avant la libération du camp, soit exaucé : « Kameraden, ich bin der letze ! « (Camarades, je suis le dernier !) »

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Jean-Luc Mélenchon et le jeu nationaliste «franc-maçon»

Jean-Luc Mélenchon ne relève pas des traditions du mouvement ouvrier, mais du courant trotskiste dit lambertiste particulièrement lié au syndicat anti-politique Force Ouvrière et à la franc-maçonnerie. C’est la source intellectuelle de ses nouvelles sorties ultra-provocatrices au sujet des « progrès » de Marine Le Pen et des gouvernements qui plieraient devant les « communautaristes » « sionistes ».

Les propos de Jean-Luc Mélenchon, début décembre, avaient laissé perplexes beaucoup de monde. Il avait expliqué qu’il y aurait eu un changement « social » chez Marine Le Pen. Constatant qu’elle appelait à manifester contre le plan gouvernemental de réforme des retraites, il a expliqué devant les médias :

« Écoutez, c’est un grand progrès. D’habitude, elle passe son temps à chercher pouille aux arabes et aux musulmans, et aujourd’hui, elle a compris que quelle que soit sa religion ou sa couleur de peau, on a tous des intérêts communs et qu’on est semblable et qu’à partir de 60 ans et plus, tout le monde est fatigué, donc ça vaut la peine que les gens s’arrêtent. »

On ne comprend pas trop si Jean-Luc Mélenchon se moque de Marine Le Pen ou s’il considère qu’elle a réellement évolué. Cette ambiguïté est d’autant plus forte qu’il a ensuite expliqué :

« Elle est en train de faire un progrès en quelque sorte en direction de l’humanisme, je ne vais quand même pas me plaindre de ça et quant à ses adhérents sur le terrain, ils sont les bienvenus. Aujourd’hui, ils viennent dans la tenue des cheminots, de gaziers, d’électriciens, etc. Comme on dit à Marseille : profession vaut noblesse. »

En réalité, il se moque bien d’elle, mais il tente de jouer sur son terrain « national », « communautaire ». Il oppose à la lecture nationaliste de Marine Le Pen une lecture tout autant nationaliste, mais qu’il imagine sociale car nationale, et inversement. C’est l’idéologie « républicaine » qui est propre à la France et dont l’une des principales figures fut Jean Jaurès.

La nation française serait « en soi » sociale, il suffirait qu’elle soit « elle-même ». D’où ses propos populistes le même jour faisant allusion, sans le dire, à la charte d’Amiens de 1905 :

« Dans les statuts de tous les syndicats, la CGT, SUD et le reste, il est dit qu’ils réunissent tous les travailleurs, compte non tenu de leurs opinions politiques, religieuses ou philosophiques. Par conséquent, quand vous êtes dans un mouvement social, depuis toujours il y a toujours eu tout le monde (…). Je ne suis pas étonné qu’un salarié du rang, quel que soit son vote politique, car c’est bien de ça dont on parle, défendre ses intérêts avec les autres et moi je trouve ça très bien. »

Le dirigeant de La France insoumise sait d’ailleurs être prudent et il assez malin pour ne pas mentionner Force Ouvrière, ce syndicat est né comme opposant farouche à la politique, en étant soutenu par la franc-maçonnerie (Jean-Luc Mélenchon est membre du « Grand Orient ») et les trotskistes du courant lambertiste (dont a fait partie Jean-Luc Mélenchon).

Il veut éviter que son style ne soit trop cerné intellectuellement, car sinon il perdrait son côté « au-dessus » de la mêlée qu’il emprunte aux « leaders » nationalistes latino-américains.

Il en va de même pour ses propos suivant la défaite des travaillistes au Royaume-Uni. Il a tenu sur son blog des propos anti- « communautaristes » relevant résolument de l’idéologie franc-maçonne.

« Corbyn a passé son temps à se faire insulter et tirer dans le dos par une poignée de députés blairistes. Au lieu de riposter, il a composé. Il a du subir sans secours la grossière accusation d’antisémitisme à travers le grand rabbin d’Angleterre et les divers réseaux d’influence du Likoud (parti d’extrême droite de Netanyahou en Israël). Au lieu de riposter, il a passé son temps à s’excuser et à donner des gages. Dans les deux cas il a affiché une faiblesse qui a inquiété les secteurs populaires (…).

Tel est le prix pour les « synthèses » sous toutes les latitudes. Ceux qui voudraient nous y ramener en France perdent leur temps. En tous cas je n’y céderai jamais pour ma part. Retraite à point, Europe allemande et néolibérale, capitalisme vert, génuflexion devant les ukases arrogante des communautaristes du CRIF : c’est non. Et non c’est non. »

Une ukase est un ordre sans appel donné en Russie par le Tzar et les dernières lignes citées sont les dernières de son article. En agissant ainsi, Jean-Luc Mélenchon savait très bien qu’il jouait la provocation et que cela ressemblerait, comme pour le pseudo appel du pied à Marine Le Pen, à un appel du pied aux franges petites-bourgeoises ayant basculé dans le camp antisémite de Dieudonné et d’Alain Soral.

Il agit ici de manière machiavélique, de manière parfaitement calculée. Il sait également très bien que les travaillistes britanniques, en s’ouvrant aux courants post-modernes « décoloniaux » et autres, ont fait face à une vague d’antisémitisme, comme « anticapitalisme romantique ». Mais il choisit de passer outre.

Car, étranger au mouvement ouvrier, en perte de vitesse, Jean-Luc Mélenchon est obligé d’accentuer la mise en avant de son « idéal » républicain – franc-maçon, cette fiction apolitique, anti-politique, d’une « république sociale » fondée sur la « fraternité ».

Ce qui revient, dans les faits, à prôner un État fort, apolitique, sur une ligne « sociale » et nationale. Bref, à servir de marchepied à l’extrême-Droite, tout en prétendant le contraire.

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Politique

Benjamin Stora et ses ridicules accusations contre Valeurs Actuelles

Benjamin Stora dénonce un article à charge de la revue réactionnaire Valeurs Actuelles comme étant antisémite. C’est pathétique et il est dramatique que son communiqué ait été beaucoup relayé à Gauche.

Valeurs Actuelles est une revue incontournable quand on est de Gauche et qu’on veut faire de la politique, car c’est l’expression peut-être la plus avancée de l’ennemi. C’est une revue de haut niveau, exprimant la Droite voulant l’alliance avec l’extrême-Droite, dans un esprit néo-gaulliste toujours prompt à espérer en l’armée un recours efficace, etc.

Qualifier Valeurs Actuelles d’antisémite n’a donc aucun sens. D’ailleurs, vue son poids social et politique, si elle était antisémite, elle l’assumerait. On a ici des intellectuels, des grands bourgeois, des gens aux plus hauts postes de la société française et il ne leur viendrait pas à l’idée de ne pas assumer.

Benjamin Stora a donc tout faux. Quels sont ses arguments d’ailleurs ? Il dit la chose suivante :

« Cet article est antisémite, voici pourquoi.

C’est le portrait d’un homme avide d’ambition et d’honneurs qui est ici dressé, hantant les couloirs du pouvoir, à la recherche de récompenses. C’est une description s’inscrivant dans la tradition classique antisémite des « juifs de cour » que l’on pouvait lire dans la presse d’extrême-droite au moment de l’Affaire Dreyfus, par exemple à propos de Bernard Lazare.

C’est une attaque fondée sur une description de mon physique. Ma prise de poids, notion qui revient à trois reprises dans l’article, s’explique non par les épreuves traversées dans ma vie (la perte de mon fille victime d’un cancer, mes crises cardiaques, ou les violentes agressions venant du monde intégriste dans les années 1990), mais par ma progression dans les couloirs du pouvoir. Cette obsession sur mon poids suggère l’expression d’un enrichissement, qui peut également se lire dans la presse antisémite, appliquée par exemple à Adolphe Crémieux ou Léon Blum.

C’est une charge contre les intellectuels qui travaillent dans un cadre universitaire, donc qui fabriquent un « Système », et des histoires officielles. Là encore, la haine des intellectuels d’origine juive est une vieille recette, déjà appliquée à des hommes comme Jacques Attali (cité dans l’article). »

Ce type est historien ? On ne le croirait pas à le lire. La thèse antisémite des « Juifs de cour » n’a jamais existé en France, elle n’est propre qu’à là où il y a une cour… Il faut donc se tourner vers la Grande-Bretagne avec Benjamin Disraeli (le grand modèle du « juif de cour » d’ailleurs seulement d’origine juive) ou l’Autriche-Hongrie (avec l’importance de certaines banquiers juifs).

La thèse de la prise de poids associée à un enrichissement est tellement forcée qu’elle est pathétique. Valeurs Actuelles présente une thèse très simple dans son article, une thèse qu’elle affirme régulièrement : les anciens révolutionnaires font carrière et sont la caricature de leur jeunesse. C’est ce qui est fait là, tout simplement.

Le troisième argument est « la haine des intellectuels d’origine juive ». Benjamin Stora est ici ridicule. Il suffit de consulter les couvertures de la revue : on y voit régulièrement Eric Zemmour et bien souvent Alain Finkielkraut. La tendance de Valeurs Actuelles est d’ailleurs bien plus de pousser à faire basculer les Juifs à Droite toute en jouant sur la peur des Arabes.

> Lire également : La polémique Valeurs Actuelles / Benjamin Stora

Benjamin Stora nuit donc puissamment à la lutte contre l’antisémitisme avec ses élucubrations. Quant aux 285 membres de l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS) qui ont « découvert avec consternation l’attaque nauséabonde de Valeurs Actuelles » contre Benjamin Stora, ils ne sont tout simplement pas sérieux. Espérons au moins qu’à l’époque ils se soient mobilisés contre Dieudonné. Mais on peut en douter.

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Le suicide politique d’Esther Benbassa

En mettant sur les réseaux sociaux une image de manifestants avec une étoile jaune version « musulmane », la sénatrice EELV Esther Benbassa a provoqué une levée de boucliers contre elle. En effet, il y a là une dimension relativiste de ce qu’a été la politique nazie d’extermination.

Esther Benbassa a cherché à s’expliquer, notamment à la télévision, mais en niant entièrement le problème, au nom d’une lecture anti-historique de la réalité : il faudrait assimiler tous les racismes sous toutes ses formes et donc tout serait permis.

Si l’on considère qu’il n’y a que des individus, alors il n’y a pas de phénomène historique, il n’y a que des situations. C’est le point de vue de la « Gauche » post-moderne et donc d’Esther Benbassa. Elle a donc benoîtement expliqué la chose suivante :

« Cette étoile jaune, c’est une forme d’identification au sort des juifs. En tant que juive, je ne suis pas absolument pas choquée. Je pense que ce que les juifs ont subi devrait continuer à servir d’exemple pour qu’on puisse tous nous battre contre le racisme, l’antisémitisme, l’islamophobie. »

Intellectuellement, cela se tient. C’est même le point de vue qui prédomine de plus en plus. Chacun est différent et ce qui compte, c’est le ressenti. On ne peut pas juger en général, ce qui compte c’est la lecture individuelle des choses.

C’est là, très concrètement, un point de vue correspondant à la décadence du capitalisme marqué par l’ultra-individualisme : tout se vaut, ce qui compte c’est le choix, comme on s’identifie, etc. C’est donc un point de vue aplanissant toute la réalité historique et comme celle-ci est en l’occurrence ni plus ni moins que la destruction des Juifs d’Europe, forcément cela provoque de profonds troubles.

Les réactions sont très nombreuses, voyant dans le déni d’Esther Benbassa une stupidité sans nom, au mieux. On se dit : elle fait semblant, même si elle reconnaît que les deux situations n’ont rien à voir, il faut qu’elle reconnaisse qu’il y a ici une manipulation politique, une tentative de trafiquer l’histoire.

Surtout qu’elle a multiplié hier les errements, expliquant tantôt que c’était une étoile à cinq branches et pas une étoile de David (alors qu’en fait le croissant et l’étoile musulmans visaient justement à remplacer symboliquement celle-ci), tantôt que finalement le rapprochement se voyait, mais que c’était juste « maladroit », que « il n’y a pas de mal à cela en soi », voire que c’était une bonne chose, etc.

Elle avait d’ailleurs déjà une grosse casserole, avec sa position au moment de l’affaire Leonarda :

« Moi qui pensais que la France n’avait pas perdu la mémoire de sa sombre histoire, j’étais loin d’imaginer qu’en 2013, en tant que parlementaire, élue du peuple, je serais témoin d’une rafle. Car oui, il faut bien le dire, c’est une rafle. »

EELV est intervenue à sa rescousse dans un long communiqué, expliquant qu’Esther Benbassa ne pouvait pas être antisémite puisqu’elle était juive, ce qui n’a aucun sens.

« Cette polémique indigne ne peut pas conduire commentatrices et commentateurs cherchant surtout à décrédibiliser et salir cette manifestation à traiter Esther Benbassa d’antisémite et de négationniste, elle qui a été titulaire de la prestigieuse chaire d’histoire du judaïsme moderne jusqu’en 2018, qui a enseigné à l’Ecole Pratique des Hautes Etudes à la Sorbonne et qui a écrit de nombreux ouvrages sur l’histoire des juifs. »

Son mari, Jean-Christophe Attias, a pris aussi sa défense dans un long message d’une niaiserie totale de la part d’une personne qui est tout de même directeur d’études à l’École pratique des hautes études, titulaire de la chaire « Pensée juive médiévale (VIe – XVIIe siècles) ».

Il est évident que dans les faits, Esther Benbassa ne veut pas poser les choses rationnellement, car elle ne le peut pas, son style étant le populisme et le clientélisme, afin de faire tourner la machine du relativisme et de l’individualisme. Esther Benbassa n’a qu’une seule cohérence : celle d’avoir entièrement adopté la philosophie du capitalisme complet, qui réduit tout à des individus isolés cherchant à promouvoir leurs « intérêts » par tous les moyens qu’eux-mêmes trouvent adaptés.

Cependant, comme le capitalisme n’a pas encore lessivé tous les esprits, elle a commis un véritable suicide politique.

 

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Politique

L’UEJF et SOS Racisme font annuler un spectacle de Dieudonné à Paris

Voici les communiqués de l’Union des étudiants juifs de France et de SOS Racisme, qui ont obtenu l’annulation d’un des deux spectacles de l’antisémite Dieudonné à Paris cette semaine. L’intervention était malheureusement largement confidentielle, probablement parce qu’elle s’est organisée au dernier moment ; c’est en tout cas une victoire marquante. Partout en France, il faut empêcher Dieudonné de répandre sa propagande antisémite.

UEJF :

« Le 19 septembre 2019, des étudiants de l’UEJF et de SOS racisme, rejoints par des passants ont scandé des slogans dénonçant le racisme et l’antisémitisme de Dieudonné pendant la première représentation de la soirée. Un important dispositif policier a été mobilisé et la préfecture de police a finalement demandé à Dieudonné d’annuler la seconde représentation de son spectacle prévue en fin de soirée Porte Maillot.

Dieudonné propage depuis des années l’antisémitisme et le complotisme, organise son insolvabilité et se joue des forces de l’ordre pour continuer à se produire.

Alors que l’antisémitisme a augmenté de 74% en France en 2018, l’UEJF demande aux maires et préfets de France de tout mettre en œuvre pour l’empêcher de se produire. Les autorités doivent agir et faire appliquer les décisions de justice.

Pour Sacha Ghozlan président de L’UEJF « Cette annulation est une étape supplémentaire dans le combat contre Dieudonné. Dans son dernier spectacle, il prétendait que les chambres à gaz n’ont jamais existé, tout en incitant à la haine. Malgré ses subterfuges pour échapper à la justice, nous continuerons à mener ce combat pour défendre des valeurs bafouées par un multirécidiviste haineux.

Après cette annulation, nous demandons aux pouvoirs publics de prendre les mesures nécessaires pour empêcher toutes les représentations de Dieudonné ».

SOS Racisme :

« Ce jeudi 19 septembre, des militants de SOS Racisme et de l’UEJF (Union des Etudiants Juifs de France) ont manifesté devant le bus dans lequel Dieudonné donnait son spectacle. Dans le 17ème arrondissement parisien, ils étaient munis de banderoles et scandaient des slogans afin de créer un trouble à l’ordre public et d’interrompre la représentation de l’«humoriste ».

Ce fut chose faite puisqu’un important dispositif policier a été mobilisé et que la préfecture de police a finalement demandé à Dieudonné d’annuler la seconde représentation du spectacle prévue en fin de soirée Porte Maillot. Une victoire pour les deux associations qui rappellent que Dieudonné a été maintes fois condamné pour incitation à la haine raciale.

En effet, depuis plusieurs semaines, Dieudonné, multirécidiviste antisémite, se produit au cœur de Paris dans un bus aménagé pour son spectacle « Gilets Jaunes ». Il propage depuis des années l’antisémitisme et le complotisme, organise son insolvabilité et se joue des forces de l’ordre pour continuer à se produire… Ce contre quoi les associations se battent au quotidien et ce qu’elles dénonçaient lors de cette action. Nous demandons désormais à ce que les maires et préfets de France mettent tout en œuvre pour l’empêcher de se produire. Les autorités doivent agir et faire appliquer les décisions de justice !

SOS Racisme rappelle enfin que les mobilisations militantes comme celle-ci permettent des avancées dans la cause antiraciste. C’est pourquoi nous devons être toujours plus nombreux ! »

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Politique

Les tags antisémites menaçant Madame Ibn Ziaten

Le domicile de Madame Ibn Ziaten, mère d’une des victimes de l’attentat de Toulouse de 2012 – visant une école juive et des militaires postés devant, qui était un soldat de l’armée française, a été vandalisé à l’extérieur avec des inscriptions tels que « Juif bientôt mort », « on va t’avoir », « vive Merah » (le nom du terroriste islamiste), « salle juif ».

Latifa Ibn Ziaten, n’est pas juive, mais il paraît impossible pour des fascistes islamistes qu’une personne pratiquant l’Islam puisse défendre la vie des Juifs et Juives. Il serait donc nécessaire -d’après ces islamistes- que celle-ci soit reliée à des Juifs, ou qu’elle soit elle-même Juive cachée. On est en plein dans un discours anticapitaliste romantique, où le juif contrôle tout. Il est guère étonnant d’apprendre également qu’il y a une partie des revenants de Syrie, qui ayant constaté l’échec de Daesh, se tourne vers le nazisme, partageant la même base économique.

Madame Ibn Ziaten a aussi été attaquée car elle est à l’origine de l’association Imad qui lutte pour la paix et contre la radicalisation.

Elle a tweeté ceci le matin du 10 juin:


Cet acte illustre bien la triste période vers laquelle on se dirige et sans un nouveau Front populaire, les masses juives sont véritablement en danger de mort imminent…

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Culture

Nuit et Brouillard de Alain Resnais (1956)

Nuit et Brouillard est un film documentaire d’Alain Resnais sorti en 1956. Il s’agit d’un film de commande du Comité d’histoire de la Seconde Guerre mondiale, dont l’objectif est de documenter, d’effectuer des recherches, de rassembler des témoignages ayant trait à la Seconde Guerre mondiale.

Nuit et brouillard

Le documentaire est réalisé pour marquer les dix ans de la libération des camps de concentration et d’extermination.

D’une durée de 32 minutes, il vise à marquer les esprits par une succession d’images d’archives, que ce soit photos ou vidéos, de la déportation, de la vie et de la mort dans les camps. Sont également intercalées quelques séquences filmées en couleur des camps à l’époque de la réalisation du film, contrastant par le vert éclatant de l’herbe qui a repoussé là où s’est tenu un des actes les plus barbares de l’histoire de l’Humanité.

Par dessus ces images, la voix off de Michel Bouquet déclame un texte de l’écrivain Jean Cayrol.

Le titre fait directement référence au nom des directives du Troisième Reich visant à faire disparaître, dans le plus grand secret, par la déportation en Allemagne, toutes personnes représentant une menace. C’est devenu, par extension, le nom donné par les nazis aux déportés dans les camps, les NN pour Nacht und Nebel.

Nuit et brouillard

Le film présente un certains nombre de limites, pour certains inhérente à l’époque à laquelle il a été réalisé.

Beaucoup ont pu lui reprocher un manque de rigueur, dans les chiffres, ou dans la présentation des images d’archives, on ne sait jamais s’il s’agit d’un camp d’extermination ou de concentration.

Cependant c’est passé à côté de l’objectif, de l’approche du film qui n’est pas de documenter les images qui sont présentées, mais d’en faire une œuvre révélant, par l’image, l’horreur et la barbarie nazi. Et c’est en cela qu’il est d’une grande valeur.

Loin de la représentation d’un système nazi totalement fou et psychotique, le régime du Troisième Reich apparaît au contraire comme un ensemble rationnel, dont les camps sont le prolongement industriel de son idéologie et où les officiers, les surveillants, les kapos, se sont organisés, avec leur famille, une vie presque normal, au beau milieu de la barbarie.

En plus de l’horreur des images des victimes, c’est ce contraste avec la froideur des nazis, tout à leur tâche, qui marque, qui choque.

Comme cette courte séquence au procès de Nuremberg où tous déclarent calmement qu’ils ne sont pas responsables.

Nuit et brouillard

Un autre point important, qui peut apparaître comme un parti pris, mais qui relève aussi de son époque est que le mot « juif » n’est prononcé qu’une seule fois sur l’ensemble du documentaire. Chaque déporté est fondu dans un grand ensemble, victime de la même barbarie. Ce n’est qu’un peu plus tard, dans les années 1970 que l’accent sera mis sur les spécificité de la Shoah et de l’idéologie dont elle découle, avec en son centre l’antisémitisme.

Si cette approche se comprend au vu de l’angle pris par Alain Resnais, il n’en demeure pas moins une réelle limite dans la compréhension de l’horreur nazi.

Il représente ainsi une œuvre importante, d’une valeur certaine, mais qui évidemment est loin de se suffire pour représenter l’ampleur de la barbarie de ces années.

Notons quelques autres films documentaires de grande qualité et dont l’approche totalement différentes se complète bien :

  • Shoah, de Claude Lanzmann (1985), rassemblant une très grande quantité de témoignages sur près de dix heures.

  • De Nuremberg à Nuremberg, de Frédéric Rossif (1988) portant davantage sur le contexte politique du régime nazi.

  • Le Chagrin et la Pitié, de Marcel Ophuls (1971) présentant la vie dans la ville de Clermont-Ferrand de 1940 à 1944, et plus généralement en Auvergne.

Il est évidemment primordiale de poursuivre l’effort de recherche, de documentation, d’éducation ayant trait à la Seconde Guerre mondiale et à la barbarie nazi. L’Histoire de l’Humanité ne s’écrit jamais en ligne droite, et les démons d’hier peuvent toujours ressurgir dans le présent ou le futur tant que leur source n’aura pas été tari.

C’est le sens de la fameuse citation :  « Le ventre est encore fécond d’où a surgi la bête immonde », approximative traduction d’une réplique de la pièce de théâtre La Résistible Ascension d’Arturo Ui, de Bertold Brecht  : « Der Schoß ist fruchtbar noch, aus dem das kroch. »

Et c’est aussi en ce sens que ce termine Nuit et Brouillard, avec ce fort monologue :

« Neuf millions de morts hantent ce paysage.

Qui de nous veille de cet étrange observatoire, pour nous avertir de la venue des nouveaux bourreaux ? Ont-ils vraiment un autre visage que le nôtre ? Quelque part parmi nous il reste des kapos chanceux, des chefs récupérés, des dénonciateurs inconnus…

Il y a tous ceux qui n’y croyaient pas, ou seulement de temps en temps.

Il y a nous qui regardons sincèrement ces ruines comme si le vieux monstre concentrationnaire était mort sous les décombres, qui feignons de reprendre espoir devant cette image qui s’éloigne, comme si on guérissait de la peste concentrationnaire, nous qui feignons de croire que tout cela est d’un seul temps et d’un seul pays, et qui ne pensons pas à regarder autour de nous, et qui n’entendons pas qu’on crie sans fin. »

Voici pour finir quelques extraits du film et le témoignage d’un survivant des camps, Alain Stanké  :

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Communiqué des associations antiracistes « Le mandat d’arrêt contre Alain Soral doit être exécuté d’urgence »

Communiqué des associations la Licra, SOS racisme, J’accuse !, l’Union des étudiants juifs de France et le Mrap à propos du fasciste Alain Soral, dont la peine de prison n’est pour le moment pas exécutée.

« Les associations antiracistes demandent de toute urgence au Procureur de la République de mettre à exécution le mandat d’arrêt décerné contre Alain SORAL pour contestation de crime contre l’humanité le 15 avril 2019.

Depuis 10 jours, l’antisémite Alain SORAL est sous le coup d’un mandat d’arrêt par décision de la 13eme chambre correctionnelle du TGI de Paris à la suite de sa condamnation pour contestation de crimes contre l’Humanité.

À ce jour, la justice n’a toujours pas exécuté la décision. Pire encore, nous avons appris que le Parquet de Paris avait décidé de faire appel de ce mandat d’arrêt au motif qu’il ne respecterait pas les dispositions du code de procédure pénale sur le mandat d’arrêt.

Cette décision d’appel est un scandale inédit et renvoie à nos concitoyens l’idée que la condamnation de l’antisémitisme et du racisme en France n’est jamais appliquée dans les faits.

Ce d’autant que seuls les délits politiques sont exclus des dispositions relatives au mandat d’arrêt. La contestation de crime contre l’humanité n’est et ne pourra jamais être considérée comme un délit politique. Nous demandons que soit mis fin à ce double scandale qui voit une décision de justice demeurée inappliquée et même contestée par l’autorité de poursuite qui se retrouve à défendre les intérêts de SORAL plutôt que la société.

Cet appel n’étant pas suspensif, nous demandons l’exécution immédiate de la décision de justice rendue contre Alain SORAL et le désistement de l’appel interjeté par le Parquet, pour des raisons politiques.

Alain SORAL tiendra le 4 mai au vu et au su de tout le monde une conférence publique à Mulhouse. Nous demandons au Procureur de la République de Mulhouse de faire procéder à l’arrestation d’Alain SORAL conformément au jugement et à la Loi. »

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L’attaque fasciste du local de l’Union des étudiants juifs de France à Paris-Dauphine

Samedi 30 mars, le local de l’Union des étudiants juifs de France (UEJF) de l’Université Paris-Dauphine, a été vandalisé. C’est un acte antisémite de plus en France, qui s’ajoute à une liste déjà très longue.

Aller uriner un samedi, c’est à dire un jour de Shabbat, dans le local d’une organisation juive, c’est tout un symbole. Plusieurs personnes se sont en effet introduites dans ce local et ont uriné sur le matériel de l’association en filmant leur méfait.

Cela rappelle l’attaque antisémite du local de l’UEJF à la fac de Tolbiac, qui avait été tagué avec des inscriptions telles que « ANTISIONISTE », « Bonjour les fascistes », « A mort Israël », « Vive la Palestine », etc.

Il faut rappeler ici la grande responsabilité des organisation de gauche dans les universités, qui se sont pour la plupart totalement fourvoyées dans l’antisionisme, prenant en otage la résistance Palestinienne pour faire d’Israël un épouvantail.

L’UEJF est ainsi devenu une cible, présentée parfois comme fasciste, alors que cette organisation a toujours été de gauche, proche du Parti socialiste et de la sociale-démocratie israélienne. C’est que pour les antisémites, toute personne juive qui ne se renie pas serait forcément un fervent soutien de « Ligue de  Défense Juive » et du gouvernement réactionnaire de Benyamin Netanyahou. Ils confondent, sciemment, la culture juive des juifs de France, avec Israël. Pour eux : juifs = sionistes = Israël = fascisme, alors juifs = fascisme.

> Lire également : L’inévitable prochaine montée de l’antisémitisme

Cet antisémitisme est insupportable, et devrait être combattu avec acharnement par la Gauche, pour ne pas laisser les masses juives sous l’emprise néfastes des réactionnaires, qui prétendent êtres les seuls à les défendre.

Voici le communiqué de l’association :

« L’UEJF dénonce la vandalisation de son local à l’Université Paris Dauphine

Le 30 mars 2019, des individus se sont introduits dans le local de l’Union des Étudiants Juifs de Dauphine à l’Université Paris Dauphine (Paris 16ème). Ces individus qui ont uriné sur le matériel du local associatif, ont filmé leur délit puis l’ont partagé sur les réseaux sociaux.

C’est le local des étudiants juifs de Dauphine qui a été visé exclusivement et spécifiquement comme en atteste la vidéo diffusée sur le réseau social Snapchat par les auteurs de cet acte inadmissible.

L’UEJF qui a déposé plainte et s’est entretenue avec les responsables de l’Université Paris Dauphine et salue leur réactivité et leur intention de signaler ces faits au Procureur de la République de Paris.

L’UEJF rappelle qu’en mars 2018, le local de l’UEJF avait été saccagé à Tolbiac avec des inscriptions antisémites, et que depuis le début de l’année universitaire des inscriptions antisémites se sont multipliées et banalisées à HEC, La Sorbonne, Assas, Grenoble ou Toulouse.

L’UEJF appelle à la plus grande sévérité à l’encontre des individus responsables du saccage du local des étudiants juifs de Dauphine et rappelle que la dégradation d’un bien en raison de l’appartenance réelle ou supposée du propriétaire du bien et de son utilisateur à une ethnie ou une religion est passible de trois ans de prison et de 45 000 € d’amende au sens du Code Pénal.

Pour Sacha Ghozlan, Président de l’UEJF : Cet acte de vandalisme s’inscrit dans un contexte de recrudescence des actes antisémites à l’Université. Alors que 89% des étudiants juifs de France ont déjà été confrontés à l’antisémitisme dans leur vie étudiante, selon notre Baromètre de l’antisémitisme à l’Université IFOP pour UEJF, l’antisémitisme se banalise dans l’Enseignement Supérieur. Il suffit d’une minorité active et virulente pour que ces actes s’inscrivent dans le quotidien des étudiants. Nous demandons des sanctions extrêmement fermes à l’encontre des auteurs et une mobilisation totale de la communauté universitaire pour que ce type d’agissement cesse. »

Attaque à Tolbiac en 2018

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Politique

Eric Zemmour et le « nationalisme des imbéciles »

Le dernier livre d’Eric Zemmour, Destin français, prolonge la proposition nationaliste qui est la sienne, tentant de contourner la question de l’antisémitisme propre au nationalisme de notre pays. Il s’agit pour lui de reformuler ce nationalisme, sa base, son histoire, pour la dériver de sa tendance à l’antisémitisme vers la lutte contre un « mondialisme nomade » auquel précisément il ne parvient pas à donner une forme alternative.

Eric Zemmour a beau contourner le problème, il en revient au même point : la centralité de la question antisémite pour le nationalisme français. Sa vaine tentative n’est donc qu’un appui à un élan qui le dépasse et qui l’emportera inévitablement en tant que Juif. Il n’aura somme toute formulé qu’un « nationalisme des imbéciles » ne voulant pas voir l’antisémitisme comme tel, tout symétriquement comme la « gauche » antimatérialiste formule inlassablement un « anticapitalisme » antisémite, comme « socialisme des imbéciles ».

Eric Zemmour est un intellectuel français issu de la minorité nationale juive algérienne, qui se présente comme relevant de la Droite conservatrice la plus réactionnaire. Il a saisi partiellement ce qu’est le nationalisme et partiellement ce qu’est l’antisémitisme. Il est même parvenu à saisir comment la Gauche se tort dans ses contradictions lorsqu’elle rejette le matérialisme qui la constitue, et sombre d’une part dans les démarches post-modernes et d’autre part dans l’antisémitisme.

Mais Eric Zemmour ne fait pas confiance à la Gauche pour dépasser cette contradiction. Il cherche une solution, un remède politique et intellectuel, depuis la Droite et pire même depuis le nationalisme. C’est à ce titre qu’il a produit dans son dernier livre un exposé sous la forme d’une autobiographie et d’une galerie de portraits l’ayant « construit »  (par opposition à ceux qu’il présente comme les « déconstructeurs » de la gauche post-moderne) comme français, au sens politique et même clairement nationaliste.

La base que pose Eric Zemmour pour sa proposition nationaliste est sans surprise celle de la France des années 1960, complètement idéalisée sous la forme d’une société moderne mais qui serait encore marquée significativement du sceau de la « tradition », de « l’identité » française juste avant le basculement dans la post-modernité du capitalisme des années 1970, suite à la « rupture » de Mai 1968. Il entend ici donner une densité, une « incarnation » à cette base en la présentant sous une forme autobiographique, « vécue », comme un témoignage, dans une démarche toute romantique, mais suintant l’esprit de la réaction la plus brutale.

Cet aspect globalement réactionnaire, voire ultra-réactionnaire de son livre, poussant au nationalisme le plus décomplexé, n’a bien sûr pas échappé aux journalistes de la petite-bourgeoisie intellectuelle. Mais comme ceux-ci ne saisissent pas correctement ce qu’est l’antisémitisme, ils ont pensé qu’il suffirait de mettre à jour ce que Eric Zemmour affirme du Maréchal Pétain, pour le présenter comme un dangereux nationaliste poussant à l’antisémitisme et à la haine raciale.

Or, précisément, Eric Zemmour rejette ces critiques comme superficielles. Ce n’est pas son sujet, il ne voit ni l’une ni l’autre de ces questions comme centrale à son analyse. Avant d’en arriver au Maréchal Pétain, Eric Zemmour pose en effet le cadre de l’État français, qui est le principal personnage de son livre, le sujet même de sa réflexion. Pour Eric Zemmour, l’État est ce qui donne corps à la nation française, ce qui « matérialise » en quelque sorte son « génie » identitaire dont il propose justement de suivre le « destin ». Le choix même de ce terme traduisant toute la perspective qu’il met en avant.

Là où la Gauche dit que ce sont les masses qui font l’Histoire, pour Eric Zemmour, ce sont des élites, en mesure de contrôler l’État qui la font, le peuple se bornant à n’appuyer que ses élites « naturelles » ou à se faire dévoyer par des saboteurs plus ou moins conscients. Là où Eric Zemmour voit de la permanence « naturelle » dans l’affirmation identitaire de la Nation par l’État, la Gauche voit des ruptures historiques en fonction des cadres successifs de l’économie politique par lesquels notre pays est passé.

Là où Eric Zemmour voit le mouvement historique comme un affrontement à mort entre « nomades » et « sédentaires » dans un pays de « guerre civile », aboutissant à la victoire du « réel », à la « revanche de l’Histoire », c’est-à-dire soit au triomphe de la réaction soit à celui de « l’invasion », la Gauche voit la lutte des classes et le mouvement général et contradictoire de la matière vers toujours plus de science, toujours plus de symbiose.

L’Histoire de France selon Eric Zemour se voit donc ratatinée par ce prisme étroit de la « destinée » de la Nation, par la trajectoire unilatérale de l’État qui l’incarnerait. La répression des Protestants, l’élaboration de l’administration centralisée, la formulation de l’absolutisme monarchique, le tout aboutissant à l’épopée napoléonienne, constituent ainsi autant de jalons de la « longue durée », de la supposée permanence d’un « esprit » français, politique mais néanmoins quasiment providentiel, remontant à « Rome ».

L’influence maurrasienne sur la pensée d’Eric Zemmour est donc manifeste. A ceci près qu’il se montre d’un monarchisme moins anti-républicain, dans le sens où la « substance » de la France comme il la définit, a selon lui été incorporée par la République qui, sous son meilleur jour, la prolonge.

C’est ainsi qu’il peut mettre en avant certaines figures qu’il tente d’annexer au nationalisme de manière définitive : Robespierre, Napoléon bien sûr, et plus particulièrement, Pétain et De Gaulle. Ce qu’il avance à ce sujet est correct sur le fond : Pétain et De Gaulle, ce sont tous les deux des figures de ce qu’est la France, au plan historique, en tant que Nation.

Là où il commet deux erreurs gigantesques et impardonnables c’est d’abord en nuançant de manière outrancière le caractère non exterminateur du régime de Vichy à l’égard des Juifs, en tout cas des Français juifs. Le régime de Vichy ne fut certes pas un régime unifié. Plus précisément, seules ses fractions catholiques traditionalistes et planistes dans une moindre mesure, n’adhéraient pas à la perspective ouvertement génocidaire. Mais c’était pour prôner un antisémitisme assimilateur ou éducateur, sur la même base de l’anticapitalisme romantique réactionnaire que les mouvements plus authentiquement fasciste.

Eric Zemmour tente de contourner cela, en rejetant totalement les milieux les plus collaborationnistes et génocidaires comme hors de Vichy, et donc de sa perspective « française », et surtout en éludant la question de l’antisémitisme en tant que tel au sein des nationalistes, à partir du moment où elle se pose comme seulement pour ainsi dire « éducatrice », « assimilationniste » sur la base d’une contre-révolution nationale-conservatrice.

Celle-ci serait acceptable en ce qu’elle manifesterait finalement une dimension « post-juive » de la France, qui s’appuyant sur la tradition catholique depuis la monarchie capétienne, se vit comme un « nouvel Israël ». Cela n’est ni plus ni moins que la tradition même du christianisme romain depuis ses origines, qui fonde d’ailleurs son anti-judaïsme, mais Eric Zemmour semble découvrir dans cela une sorte de clef qui relierait sa propre judaïté à la ligne réactionnaire qu’incarne aujourd’hui cette tradition.

La seconde erreur, consiste à penser la Gauche comme anti-française.

Fondamentalement, la Gauche ne peut être « française » selon Zemmour qu’en cédant au nationalisme, à « l’esprit » national qu’il tente de décrire. Par conséquent, certaines figures de gauche peuvent être incorporées. Mais pas toutes. A la base de la rupture, dans le prolongement de la Révolution française, heureusement cadrée par Napoléon en fin de compte, il y a Victor Hugo. Eric Zemmour en fait une sorte d’ancêtre des post-modernes selon une logique très forcée. Mais le grand renversement, la « victoire » de la Gauche sur le « destin » national c’est bien sûr l’élan post-moderne poursuivant Mai 1968.

C’est là toute l’insuffisance par laquelle il tente vainement de saisir ce que représenta une figure comme celle du Général De Gaulle, qu’il oppose de manière erronée à ce post-modernisme.  Cette erreur de perspective s’explique essentiellement en raison du fait qu’Eric Zemmour ne voit la figure de De Gaulle qu’à travers la question actuelle du néo-gaullisme pour la Droite. Pour lui, cette proposition néo-gaulliste permettrait le développement d’un nationalisme à la fois traditionnel dans sa forme, moderne sur le contenu, permettant aussi de constituer sinon un rempart, du moins une alternative au fascisme, ce qui est partiellement vrai, et surtout à l’antisémitisme, et ce qui est relativement faux.

Ce que tente en réalité de formuler Eric Zemmour, c’est un nationalisme ultra-conservateur, dans la droite ligne de Charles Maurras, prolongé par une démarche populiste et réactionnaire, mais qui ne serait pas antisémite. Un « nationalisme des imbéciles » en somme qui ne peut tout simplement pas exister comme tel, réplique symétrique et vaine, par la réaction et par la Droite, au « socialisme des imbéciles » de la Gauche égarée.

C’est là toute sa tentative : « noyer » l’antisémitisme dans sa critique des déconstructeurs, en particulier de la Gauche, et dans le rejet du « nomadisme » de la mondialisation, qu’illustre de manière sensible les circulations de capitaux, de marchandises et des migrants.

En quelque sorte, l’antisémitisme nationaliste serait une expression faussée, dévoyée, de cette lutte contre le « nomadisme » de la haute bourgeoisie capitaliste, réduite à une oligarchie « financière » et à quelques grandes firmes, à ses soutiens ou idiots utiles libéraux, de la Gauche post-moderne et des grands médias.

Face à ces « nomades », c’est l’intangibilité de l’État, souverain et autoritaire, qu’il convient de restaurer, quitte à aller à la « guerre civile » et la répression contre les libéraux et la Gauche.

Eric Zemmour prétend donc faire de l’Histoire mais il ne saisit ni ce qu’est le nationalisme, ni ce qu’est l’antisémitisme, ni même ce qu’est finalement l’Histoire de France. Il bricole simplement une sorte de théorie « néo-maurrasienne » qui tente de reformuler l’antisémitisme des nationalistes en rejet du « nomadisme mondialiste » et de pousser à la réaction par le néo-gaullisme propre à la Droite conservatrice de notre époque. Ceci alors même que l’antisémitisme l’a déjà devancé sur ces deux terrains.

> Lire également : « Egalité & Réconciliation » et le capitalisme des « nomades »

En outre, Eric Zemmour tente de proposer un style, un populisme « cultivé » en mesure de flatter l’esprit « populaire » propre à la petite bourgeoisie réactionnaire qui constitue son public. Celle-ci se flatte de ses images relevant de la France d’Audiard, de Johnny, de celle de Nicolas Dupond-Aignan, de Laurent Wauquiez, de Marine Le Pen, de Marion Maréchal, mais aussi de Michéa ou de Soral.

C’est-à-dire de toute la clique réactionnaire et populiste à laquelle la Gauche doit faire face, avec sa culture, ses valeurs et la seule analyse claire et nette sur ce qu’est l’antisémitisme, ce qu’est le fascisme, ce qu’est le nationalisme français, et l’Histoire de France.

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Politique

L’avocat Emmanuel Pierrat et l’arsenal législatif contre l’antisémitisme

L’avocat et écrivain Emmanuel Pierrat a publié une tribune dans Le Parisien, qui a son importance. Il aborde en effet la question de l’antisémitisme et il dit une chose indiscutable : il existe déjà un arsenal répressif juridique contre l’antisémitisme. C’est la motivation politique pour appliquer la loi qui manque.

Emmanuel Pierrat, avocat et écrivain

« Des portraits de Simone Veil recouverts de croix gammées, le mot Juden tagué sur un magasin Bagelstein, deux arbres plantés à la mémoire d’Ilan Halimi sciés, Alain Finkielkraut insulté, des tombes profanées… Le bilan le plus récent est effrayant. Mais il existe surtout une cyberhaine, signée par de courageux anonymes, qui inonde les réseaux sociaux et en particulier Twitter, ce réseau social sur lequel la terrifiante Ligue du LOL a œuvré durant des années.

La France républicaine de 2019 est défiée par les discours et les propos qu’elle croyait réservés aux combattants en déroute de l’État islamique ou du lointain Ku Klux Klan. Emmanuel Macron a déclaré au dîner du Crif que la France mettra en œuvre la définition de l’antisémitisme adoptée par l’Alliance internationale pour la mémoire de la Shoah. Or, ce faux masque est déjà sanctionné s’il est synonyme -et c’est souvent le cas- d’antisémitisme et non de critique citoyenne de la politique de Benyamin Netanyahou.

L’arsenal législatif est plus que suffisant pour éviter toute dérive. La justice dispose en effet d’instruments nombreux pour condamner les ex-humoristes ou les simples internautes. La loi du 29 juillet 1881 sanctionne tant la diffamation que l’injure et la provocation et envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou non appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée. Sans oublier la pénalisation du révisionnisme, de l’apologie des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité… Et la loi du 30 décembre 2004 qui est venue réprimer les propos homophobes ou sexistes.

La liberté d’expression -un principe fondamental que nous tenons de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789- ne permet pas de justifier ce qui est un délit et non une opinion. Le 19 février, la Cour de cassation a encore souligné, à propos du sinistre Alain Soral, qu’en matière d’injures à raison de l’origine raciale ou religieuse supposée […], il n’existe pas d’excuse de bonne foi ; et les juges d’ajouter que les propos constitutifs d’injures visant la personne concernée en raison de son origine ou de son orientation sexuelle, dont la répression est une restriction nécessaire à la liberté d’expression dans une société démocratique, ne relèvent pas de la libre critique, participant d’un débat d’intérêt général.

Les arguments du droit américain, partisan d’une liberté d’expression absolue, et de la supposée complexité juridique liée à la globalisation des réseaux sociaux ne sont ni tenables ni plaidables. De fait, en 2013, eBay a fini par retirer de ses catalogues des dizaines d’effets et de souvenirs liés à l’Holocauste (y compris un vêtement porté par un détenu du camp d’extermination d’Auschwitz). Leboncoin en a fait de même, début 2018, alors que s’y vendaient brassards nazis et étoiles jaunes.

Le chef de l’État se déclare pourtant opposé à la levée de l’anonymat sur Internet. Saluons la députée Laetitia Avia qui estime nécessaire de modifier le droit existant, reposant essentiellement sur la loi de confiance sur l’économie numérique qui date de 2004, soit avant l’arrivée de Facebook en France et veut rendre juridiquement responsables les Gafa. Les réseaux sociaux coopèrent spontanément en matière de pédophilie et de terrorisme. Las, pour le reste, Twitter et consorts ne daignent pas répondre aux autorités qui osent à peine toquer, en vain, à leur porte.

Il nous manque une volonté politique permettant au parquet de poursuivre et à la police judiciaire d’agir. Commençons donc par utiliser les armes dont nous disposons déjà et que nous n’osons pas brandir en matière d’évasion fiscale comme de discours de haine. Et nous aurons moins à rougir de nos brebis galeuses. »

 

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Politique

De justes rassemblements contre l’antisémitisme le 19 février 2019

Plus de soixante-dix rassemblements ont eu lieu hier contre l’antisémitisme. Même si ce ne fut pas une mobilisation populaire, par en bas, et encore moins portée par la jeunesse, ce fut un marqueur de plus dans une longue bataille. Cette dernière n’est par ailleurs pas tant politique que culturelle.

Les rassemblements d’hier soir contre l’antisémitisme se sont déroulés dans de nombreuses villes, avec des foules de plusieurs centaines ou quelques milliers de gens à Paris, Marseille, Strasbourg, Annecy, Nantes, Pau, Nice, Lille, Lyon, La Rochelle, Dijon, Cherbourg ou encore la Roche-sur-Yon.

Du côté du Rassemblement National, qui a été ostracisé pour les rassemblements, Marine Le Pen est allée avec Jordan Bardella à Bagneux (Hauts-de-Seine) devant une plaque en hommage à Ilan Halimi. Jean-Luc Mélenchon, qui n’est pas du tout antisémite mais a eu un positionnement très oscillant en raison de son populisme outrancier, a participé au rassemblement à Marseille.

S’il faut porter son regard sur les chiffres, cela n’a pas été un succès, cela reste dans la dimension très restreinte des rassemblements de 2012, à la suite des meurtres commis par Mohammed Merah. Cependant, cette fois, il y a une profonde insistance sur le refus général de l’antisémitisme de la part des institutions et du personnel politique. C’est un écho direct du mouvement « Je suis Charlie », qui le premier a mis la question de l’antisémitisme et de son refus sur la table.

Car l’antisémitisme est redevenu un fléau en France ; largement battu en brèche dans les années 1980-1990, il a réémergé de manière virulente par l’intermédiaire de la théologie islamique, du djihadisme et des différents discours nationaux-sociaux, dont Alain Soral est le principal représentant, aux côtés d’un « antisionisme » factice ne s’intéressant aux Palestiniens que comme vecteur d’un fantasme antisémite bien européen.

C’est donc une bonne nouvelle que d’avoir eu une série de rassemblements contre l’antisémitisme dans tout le pays, c’est un marqueur d’envergure nationale et les antisémites ont bien compris cela, d’où leur initiative criminelle et provocatrice de la profanation du cimetière juif de Quatzenheim, dans le Bas-Rhin.

Emmanuel Macron en a bien compris la portée symbolique et s’est rendu sur place ; il est par la suite allé au mémorial de la Shoah. Il est en phase avec le profond rejet de l’antisémitisme de la part des couches éduquées, qui se demandent bien comment cela peut encore exister et qui ne voient pas du tout comme éradiquer un tel irrationalisme. Même la bourgeoisie catholique-réactionnaire a balancé l’antisémitisme par-dessus bord, à l’instar de Georges Bernanos qui a eu ce mot à la fois odieux et révélateur disant qu’Hitler aurait déshonoré l’antisémitisme.

En ce sens, les rassemblements sont également une preuve d’échec de la part de la société française, qui pensait s’être débarrassé d’une infamie et qui la voit réapparaître, avec des traits virulents. Elle s’aperçoit que ses prétentions à disposer d’une éducation avancée à l’échelle du peuple tout entier est un échec complet en ce domaine. La fuite des enfants juifs du système scolaire public en témoigne, dans une proportion massive. On assiste concrètement à une ghettoïsation des Juifs de France et cela est d’autant plus terrible que les Juifs de France s’imaginent « choisir » ce repli communautaire, alors qu’il est littéralement forcé.

Cela correspond à ce grand changement historique : l’antisémitisme, hier d’origine catholique et aristocratique, est désormais populaire et « anticapitaliste romantique », au sens d’une révolte contre les élites. Cela signifie que le national-socialisme, un courant qui n’a jamais réussi à avoir un ancrage de masse en France, émerge finalement… en 2019.

La question de savoir si les gilets jaunes sont antisémites n’a ainsi pas de sens : c’est simplement qu’ils ont la même matrice « nationale-sociale ». Ils sont à la fois concurrents et convergents ; ils correspondent à la même « révolte contre le monde moderne » portée par une petite-bourgeoisie s’agitant en raison de la pression capitaliste toujours plus grande.

Il n’est clairement pas possible aujourd’hui de comprendre l’antisémitisme en France sans cette dimension national-socialiste, et c’est vraiment très inquiétant pour l’avenir !

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Liste des rassemblements en France contre l’antisémitisme du mardi 19 février 2018

Voici une liste de rassemblements contre l’antisémitisme partout en France ce mardi 19 février 2018. 

Merci de nous signaler tout rassemblement qui ne serait pas dans cette liste.

Lire également : L’appel des partis politiques à l’union contre l’antisémitisme (« Ça suffit ! »)

Sauf mention contraire, les rassemblements sont à 19h.

Agen, place Armand-Fallières

Amiens, place de la Mairie

Angers, 17h place du ralliement

Annecy, devant le monument aux combattants d’Annecy

Aurillac, 18h30 place des Droits de l’Homme

Bayonne, au pied du Château vieux

Besançon, sur l’esplanade des Droits de l’Homme

Béthune, sur la Grande Place

Bordeaux, place de la République

Brest, place de la Liberté

Caen, place Saint-Sauveur

Chartres, 18h devant le monument Jean Moulin – Esplanade de la Résistance

Clermont-Ferrand, place de Jaude

Dijon, place François Rude

Dunkerque,  18h stèle des Droits de l’Homme à la CUD

Foix, halle au grain

Grenoble, 18h30 place de Verdun

Lille, place de la République

La Rochelle, 18h à l’entrée du Vieux Port

Laval, 18h30 devant la mairie

Le Havre, 18h30 dans les jardins de l’Hôtel de Ville

Lorient, devant l’hôtel de ville

Lyon, place Bellecour

Marseille, sous l’Ombrière du Vieux Port

Mont-de-Marsan, devant le mémorial des enfants juifs déportés, au parc Jean-Rameau

Montluçon, place Piquand

Montpellier, 18h30 autour de la fontaine de la place des Martyrs de la Résistance

Moulin, place de l’Allier

Nantes, devant le Monument aux 50 Otages

Nice, 18h30 place Garibaldi

Nîmes, Maison Carrée

Niort, place de la Brèche

Orléans, place de la République

Paris, place de la République

Pau, devant la Préfecture

Poitiers, place Leclerc

Rennes, place de la République

Rouen, place de l’Hôtel de ville

Saint-Brieuc, place du Général de Gaulle

Saint-Malo, 17H30 esplanade de la Grande-Passerelle

Sarreguemines, devant le palais de justice

Strasbourg, place de la République

Tarnos, 18h30 devant la Mairie

Toulouse, devant le mémorial de la Shoah

Tours, place Anatole France

Valence, devant la Préfecture

Vannes, sur l’esplanade du port

Vichy, place Charles De Gaulle

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Politique

L’affaire Alain Finkielkraut

L’affaire Alain Finkielkraut a tourné à la polémique nationale, car personne n’est dupe : malgré tous les discours plus ou moins en faveur des gilets jaunes, il est évident que les invectives agressives contre Alain Finkielkraut relèvent d’une démarche fondamentalement d’extrême-droite. Tout le monde a très peur que la France tourne violemment très mal.

L’agressivité contre Alain Finkielkraut en marge d’un cortège des gilets jaunes n’est pas une anecdote. Qui n’a pas perdu entièrement le sens de ce qu’est la civilisation a très bien compris que c’était l’expression du Fascisme, de l’agressivité antisémite à prétention anticapitaliste. Ou, pour dire les choses plus clairement, que c’était un truc de nazi.

Benoît Hamon a parfaitement résumé le point de vue des gens de Gauche au sujet de toute cette affaire :

C’est là la voix de la raison, de la Gauche qui ne sombre pas dans le populisme et qui sait bien reconnaître la nature des choses, au-delà des apparences. Franchement, de toutes manières, en quoi Alain Finkielkraut est-il d’ailleurs une référence pour quelqu’un dont l’agenda intellectuel n’est pas décidé par les plateaux de télévisions ou Le Figaro ? Depuis quand un intellectuel, convergeant ouvertement avec la Droite, représente-t-il quelque chose de si central, de si important ?

Benoît Hamon a donc entièrement raison de dire qu’il combat les idées réactionnaires et radicales d’Alain Finkielkraut, et pas ce dernier sur le plan personnel, car ce n’est pas du tout cela qui compte. La personnalisation est ici un terrible piège populiste, ou médiatique. Et il a raison de dire clairement que tout cela relève de l’antisémitisme. Il est inévitable donc d’opposer à ce court passage sur Twitter, plein de vérités, celui de Jean-Luc Mélenchon, qu’on pourrait remplacer par un simple « bla bla bla bla ».

L’opinion de Jean-Luc Mélenchon est évidemment également celle de l’ultra-gauche, qui organise mardi un contre-remplacement à la manifestation lancée par la Gauche contre l’antisémitisme. Au nom de la lutte contre l’instrumentalisation de l’antisémitisme – qui existe mais est totalement secondaire – l’ultra-gauche vise la même chose que Jean-Luc Mélenchon : la relativisation de l’antisémitisme, sa mise sur le même plan que le racisme « en général ».

Sauf qu’il n’y a pas de racisme en général. Et que l’antisémitisme est un racisme extrêmement particulier de par sa tradition, son ampleur, son rôle moteur comme « anticapitalisme romantique ». Il n’est pas étonnant que l’ultra-gauche et les populistes, qui rejettent la Gauche et ses traditions, qui relèvent donc directement de l’anticapitalisme romantique, ne puissent donc pas dénoncer l’antisémitisme, ni même le voir.

C’est là inévitable de par une vision du monde simpliste, de type anarchiste, populiste, sans fondement historique, culturel, économique, et surtout en-dehors de toutes les traditions de la Gauche.

Au-delà de l’insulte « sale juif » lancé par un manifestant, les propos exprimés par d’autres témoignent de cette logique incohérente, de cet illogisme puissamment cohérent dans l’absence de raison, de connaissance culturelle, historique… Les propos suivants sont tellement idiots qu’ils portent en eux tout le danger de l’aberration se prétendant une proposition politique pour le pays.

« Barre-toi, sale sioniste de merde. Sale merde. Nique ta mère. Palestine. Homophobe de merde. T’es un raciste, casse-toi! Dégage fasciste. La France, elle est à nous. Sale enculé. Espèce de raciste. Espèce de haineux. T’es un haineux et tu vas mourir. Tu vas aller en enfer. Dieu, il va te punir. Le peuple va te punir. Nous sommes le peuple. Grosse merde. Tu te reconnaîtras. Espèce de sioniste. Grosse merde. Il est venu exprès pour nous provoquer. Taisez-vous! »

« Facho! Palestine! Rentre chez toi… Rentre chez toi en Israël. Rentre chez toi en Israël. Antisémite. La France est à nous. Rentre à Tel-Aviv. T’es un haineux. Tu vas mourir. Nous sommes le peuple français. Rentre chez toi. Ici c’est la rue! »

La prétention à affirmer la « justice » de la part de l’anticapitalisme romantique est traditionnelle dans le Fascisme et on en a ici tous les traits. On a tous les ingrédients de l’éclectisme combiné aux faiblesses intellectuelles, avec systématiquement la négation de la lutte des classes, de l’existence même de ces classes, avec toujours un « peuple » opposé à une sorte de minorité aux contours indéfinis, extensibles à l’infini, selon les paranoïas, les préjugés, la stupidité.

Il était un article sur agauche.org publié bien avant l’affaire, annonçant que l’antisémitisme allait puissamment se relancer. Les faits lui donnent raison.

Lire également : L’inévitable prochaine montée de l’antisémitisme

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L’appel des partis politiques à l’union contre l’antisémitisme (« Ça suffit ! »)

Ce mardi 19 février 2019 aura lieu à Paris une initiative commune des partis politiques français pour marquer le coup contre l’antisémitisme. Si la Droite est également concernée (mais pas le Rassemblement National et Debout La France), c’est la Gauche qui est à l’origine de la démarche. En voici l’appel, lancé par le Parti Socialiste, qui ne peut cependant pas être publié sans que soit noté une série de points au sujet de cette question brûlante.

En effet, il y a déjà lieu de constater que la reprise d’une vague d’antisémitisme fait suite à un puissant recul provoqué par le mouvement « Je suis Charlie ». Or, la Gauche a totalement balancé par-dessus bord ce qui a été pourtant la plus grande mobilisation de masse depuis 1945 ! On peut tout à fait être critique de « Je suis Charlie », mais en reconnaître la dimension surtout positive est essentiel. La Gauche a ici failli en passant ce mouvement par pertes et profit, comme s’il n’avait jamais existé.

Le second point, tout aussi important, est que les juifs et juives de notre pays ne supportent plus la Gauche, se sentant profondément trahi alors qu’ils ont toujours été proche d’elle dans leur grande majorité. L’utilisation ultra-démagogique de la question palestinienne par une partie de la Gauche (surtout le PCF, le NPA, l’ultra-gauche), avec une rhétorique antisioniste directement parallèle à un antisémitisme larvé, a provoqué une cassure très profonde. Il faudra des années de travail pour changer cela et les actes symboliques ne suffiront plus.

Le troisième point, et non des moindres, est enfin qu’il ne suffit pas de se dire opposé à l’antisémitisme pour ne pas être soi-même antisémite. Disons les choses telles qu’elles sont : le niveau d’autocritique de la Gauche au sujet de l’antisémitisme est totalement nul. Il n’y aucune étude historique, culturelle de l’antisémitisme, il n’y a aucune réflexion de fond sur la dimension anticapitaliste romantique de l’antisémitisme, il n’y a aucune recherche sur les erreurs et fautes ayant pu être commises.

Lorsque François Hollande, avant d’être élu président de la république, a lancé son « mon ennemi c’est la finance », cela peut plaire à une Gauche voulant taxer les riches, mais c’est intellectuellement un raccourci terrible, correspondant à l’opposition antisémite d’un capitalisme « productif » à un capitalisme « parasitaire ». Cela ne veut pas dire bien entendu que François Hollande soit antisémite, la question ne se pose même pas. C’est toutefois un bon exemple de profonde erreur d’approche, d’une utilisation des mauvais codes, d’un incompréhension des profonds enjeux culturels à l’arrière-plan à l’échelle de la société.

 

« Ça suffit ! » : l’appel à l’union contre l’antisémitisme

14 février 2019

Les actes antisémites se sont dramatiquement multipliés au cours de l’année 2018. Ça suffit !

L’antisémitisme n’est pas une opinion, mais un délit. Il est redevenu une incitation au meurtre. Ilan Halimi, les enfants de l’école Ozar Hatorah, les victimes de l’Hyper Cacher, Sarah Halimi, Mireille Knoll, tous ont été assassinés, parfois torturés, parce que Juifs. Ça suffit !

Nous sommes tous concernés. L’antisémitisme n’est pas l’affaire des Juifs. Il est l’affaire de la Nation toute entière.

Nous portons dans le débat public des orientations différentes, mais nous avons en commun la République. Et jamais nous n’accepterons la banalisation de la haine. C’est pourquoi nous appelons l’ensemble des Français à se réunir dans toutes les villes de France pour dire ensemble : NON, l’antisémitisme, ce n’est pas la France ! »

Un grand rassemblement est organisé à Paris,
place de la République
Mardi 19 février 2019 à 19 heures

Parti Communiste Français • Gauche Républicaine et Socialiste • La République en Marche • Europe Écologie Les Verts • La France insoumise • Les Républicains • Parti Radical de Gauche • Mouvement des Citoyens • Mouvement Démocrate • Union des Démocrates et des Écologistes • Les Centristes • Parti socialiste • Union des Démocrates et Indépendants • CAP 21 • Mouvement Radical • Agir • Les Radicaux de Gauche • Génération.s • Alliance Centriste • République & Socialisme • Mouvement des Progressistes • Place publique • GayLib • MJLF • ULIF • LICRA • SOS Racisme