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Événements significatifs

Un gouvernement Attal pour faire face à la crise de 2024

Le président français Emmanuel Macron a décidé de modifier la personne tenant le poste de Premier ministre. C’est désormais Gabriel Attal qui est chargé du rôle essentiel de gouverner. Et si en apparence, on a un gouvernement marqué à droite pour ceux qui raisonnent à l’ancienne, en réalité, dans le contexte politique français, on a un gouvernement bourgeois moderne, taillé pour faire face à la crise de manière offensive.

Regardons par exemple le symbole qui est celui du Facebook officiel de gouvernement.fr. Il représente parfaitement l’approche bourgeoise moderne dominante. Les bourgeois « réacs », c’est du passé, désormais tout se vend, tout s’achète et il faut être dans les combines internationales du capitalisme occidental. C’est comme ça que ça se passe et pas autrement.

Gabriel Attal a d’ailleurs appartenu au Parti socialiste de 2006 à 2016. On est ici dans la bourgeoisie urbaine, financière, libérale, cosmopolite, pour qui tout est un terrain de jeu capitaliste.

Et le nouveau ministre des Affaires étrangères s’appelle Stéphane Séjourné. Ce n’est pas un secret qu’il a été plusieurs années en couple avec Gabriel Attal. Ce fils d’expat. – son père a fait carrière à l’international – ne vient pas de la droite non plus : il a été au Mouvement des jeunes socialistes et à l’Unef.

On est dans la bourgeoisie moderne, libérale, LGBT, alignée sur l’Otan, celle pour qui libéral rythme avec social, afin de préserver le paradis occidental, base consumériste pour la bourgeoisie vivant entre elle. On parle de gens vivant dans la richesse, dans des appartements somptueux dans les quartiers chics de Paris (ou des très grandes villes), voyageant sans cesse, disposant de résidences secondaires et de comptes en banque bien garnis, etc.

Le premier voyage de Stéphane Séjourné est évidement en Ukraine, où il s’est précipité dès sa nomination pour une visite présentée comme un « message adressé aux Ukrainiens ». Il a expliqué que:

« C’est en Ukraine que se joue la défense des principes fondamentaux du droit international, des valeurs de l’Europe, mais aussi des intérêts de la sécurité des Français. »

Par conséquent, « en dépit de la multiplication des crises », il faut savoir que « l’Ukraine est et restera la priorité de la France ».

C’est là tout à fait en phase avec l’idéologie dominante du monde occidental, libéral et consommateur, et bien sûr décadent. L’occident n’est plus qu’un parasite mondial, il n’a plus de dynamique, il ne vit que de la vente des rêves arc-en-ciel et du rêve américain de faire carrière dans la finance.

C’est tellement vrai que le gouvernement contient deux aberrations. La ministre des Sports est également ministre de l’Éducation nationale. Vu le travail à mener, c’est impossible. Il est dit que le Premier ministre, qui a été quelques mois ministre de l’Éducation nationale, va s’en occuper. Cela ne tient pas debout pour autant. On est dans le doux-rêve d’une bourgeoisie déconnectée.

On a également la ministre du Travail qui a la double casquette de ministre de la Santé. C’est totalement aberrant de par l’immense ampleur du travail à mener. C’est là une centralisation incohérente, où le subjectivisme est total. On confine au délire, la bourgeoisie perd les pédales pour croire qu’une telle démarche puisse tenir.

Dans un même ordre d’idées décadentes, on a Rachida Dati, ministre de la Culture, alors qu’elle est totalement extérieure à la question de la culture. Elle est nommée pour son passé de membre de la Droite et car elle est d’origine immigrée et populaire. C’est fictif, artificiel, comme tout ce qu’entreprend la bourgeoisie.

Et il faut arrêter le populisme et le misérabilisme délirant des gens de Gauche se croyant en 1983. Non seulement c’est faux, mais en plus cela désarme face à l’ennemi.

On a, si on regarde les choses vraiment, affaire ici à la bourgeoisie moderne, qui n’est plus raciste, pour qui tout est échange international, pour qui la superpuissance américaine est la gardienne du temple capitaliste avec l’Otan, pour qui l’Union européenne est l’organe supra-étatique chargé à l’arrière-plan d’assurer la modernisation.

La France est dans les faits pratiquement un protectorat américain, avec les institutions européennes chargées de la surveiller, notamment avec Christine Lagarde, présidente de la Banque centrale européenne (depuis 2019), après avoir dirigé le FMI (de 2011 à 2019) et avoir été ministre de l’Économie (de 2007 à 2011).

Alors, si ce n’est pas un gouvernement « de droite », c’est quoi ? C’est un gouvernement de choc de la bourgeoisie moderne, libérale, cosmopolite, décadente, pour passer l’année 2024 qui va être celle de la crise.

C’est la tentative de passer en force, dans la logique Occident – Otan – LGBT.

C’est la tentative de ré-impulser le capitalisme occidental en prenant le dessus sur les concurrents nouveaux, surtout la superpuissance chinoise, mais également la Russie qui doit être démantelée.

C’est le rêve vain d’une classe décadente.

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Rapport entre les classes

Symbolique: la CGT perd EDF

Quel coup de tonnerre ce fut !Le lundi 13 novembre 2023, la CGT s’est fait ravir la première place des organisations syndicales représentatives chez EDF, son bastion parmi les bastions.

Avec 30,31 % des voix, elle est passée derrière la CFE-CGC qui en a recueilli 33,08 %. C’est indéniablement une page de l’Histoire de France qui se tourne, la fin de toute une époque.

En pratique, on peut dire que c’est la CGT qui a fait EDF depuis sa fondation en 1946 par Marcel Paul, et à laquelle était rattachée GDF.

On parle ici de quelque chose de très particulier, une expérience sociale extrêmement puissante. Cela a consisté en deux aspects.

D’abord, sur le lieu de travail, la CGT avait son mot à dire sur toutes les grandes décisions et sur toutes les affaires courantes, à commencer par les embauches. Rien ne pouvait être fait sans la CGT et comme la CGT était partout, c’est en fait elle qui faisait tout.

Chaque travailleur, chaque « électricien » ou « gazier » pouvant très facilement rejoindre la CGT, cela faisait que des ouvriers embauchés très jeunes et sans diplômes pouvaient très rapidement et facilement gravir les échelons (tout en restant ouvrier, d’ailleurs). L’intégration des ouvriers à l’entreprise a donc été immense, voire totale. Bien au-delà du corporatisme d’ailleurs, car il y avait de manière sous-jacente toute une vision de la société et du « service public ».

L’autre chose, c’est le comité d’entreprise, la CCAS. Dès l’origine en 1946, il a été négocié quelque chose de fondamental : la CCAS (Caisse centrale des activités sociales) ne devait pas être financée à hauteur d’1 % de la masse salariale, comme c’est le cas partout ailleurs, mais avec 1 % du chiffre d’affaires. Qui plus est, c’est exclusivement aux représentants du personnel, donc à la CGT, qu’en est revenue la gestion.

On comprend toute de suite la manne que cela a pu représenter durant toute la seconde moitié du 20e siècle. La Caisse centrale d’activités sociales a été extrêmement puissante, proposant un accompagnement social exceptionnel aux travailleurs, en plus de gigantesques services de loisirs et de vacances .

Être ouvrier chez EDF ou GDF, c’était l’assurance de trouver un logement, d’être aidé pour les enfants, en cas de coup dur ou de handicap, de partir à la mer chaque été et d’envoyer les enfants au ski chaque hiver, etc.

C’était des « arbres de Noël » (fêtes de Noël) avec de grands moyens culturels en termes de spectacles et de jolis cadeaux pour les enfants, à choisir dans un large catalogue. Pour ce qui est de la culture, il y avait (il y a encore, d’ailleurs), des œuvres culturelles toute l’année, que ce soit des sorties sportives ou touristiques, ou bien des spectacles. À la fin du 20e siècle, à son apogée, la CCAS était devenue l’un des plus gros programmateur culturel estival de France, avec au moins un spectacle gratuit et de qualité par semaine dans chaque centre de vacances.

Dès 1950, la CCAS accueillait 20 000 jeunes répartis dans 62 colonies de vacances. Dès les années 1970, elle mettait en place les premières expériences d’intégration d’enfants handicapés. Depuis, elle a acquis un savoir-faire important et avec des moyens pour accueillir les enfants et adultes handicapés en vacances.

Au tournant des années 2000, la CCAS était propriétaire de plus de 200 centres de vacances, tous de qualité, dont beaucoup situés dans des endroits parmi les plus prisés de France.

Seulement voilà, cela n’a jamais consisté en le Socialisme et la lutte des classes, mais uniquement en de la cogestion du capitalisme. La CGT à EDF, c’était pour la bourgeoisie française un compromis très intéressant : des miettes en or contre la paix sociale, ainsi qu’une productivité électrique énorme et fiable.

La CGT a en ce sens entièrement et consciemment participé à cette horreur qu’est le nucléaire.

Au 21e siècle, tout cela n’a évidemment plus de sens. Le capitalisme est maintenant à son apogée, la consommation est partout, la classe ouvrière est broyée psychologiquement et éparpillée socialement. La CGT est devenue un boulet au pied d’EDF, elle-même un monstre.

Alors il y a eu la dérégulation du marché, puis l’ouverture aux capitaux privés (puis la re-nationalisation en raison de la crise). Tout ce en quoi la CGT a cru pendant plus de 50 années, ou fait semblant d’y croire pour justifier sa corruption, a fini par s’effriter.

La CGT chez EDF a donc perdu sa raison d’être, malgré un ancrage gigantesque. Les employés, qui sont maintenant surtout des cadres supérieurs et des ingénieurs, ont acté le tournant, en reléguant la CGT derrière la CFE-CGC, le « syndicat » des cadres par nature.

Pour ce qui est des ouvriers restant chez EDF, ils sont surtout chez Enedis (filiale d’EDF) et ont un travail en général très qualifié et bien payé, avec du bon matériel, des bonnes conditions. Ce sont ceux par exemple qui escaladent les pylônes pour rétablir le courant après une tempête.

Ces ouvriers sont bien loin de la CGT et de son style gueulard, merguez-saucisse et sa pratique odieuse des coupures volontaires de courant en cas de protestation.

La CGT chez EDF est maintenant clairement une relique du passé, un passé d’autant plus proche qu’il est fui à tout prix. C’est vraiment un contre-exemple sur le plan moral et culturel, et un véritable exemple de comment le capitalisme a une incroyable force de corruption.

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Rapport entre les classes

Le «ticket resto» comme moyen de baisser les salaires

Initialement, les titres restaurant, sont une aide au repas du midi de la part d’entreprises qui ne fournissent pas un service de restauration, mais qui veulent proposer quelque chose aux employés. Il était donc prévu de les dépenser dans un restaurant, ou bien un snack ou une boulangerie, lors d’une pause repas.

Le principe est que l’entreprise paie la plus grosse partie du titre et l’employé n’en paie qu’une petite partie. Ainsi se fait l’aide, mais donc directement pour le repas de la pause lors des jours travaillés. Les « tickets resto » ne peuvent être octroyés que pour les jours effectivement travaillés et avec une pause repas (pas seulement une coupure) ; il n’y a donc pas de titres restaurant délivrés pour les jours de congé ou d’arrêt maladie.

Les restaurateurs ont beaucoup apprécié ce principe. En effet, les détenteurs de ces « tickets resto » y voyaient une sorte de bons gratuit pour le restaurant et se permettaient des repas qu’ils n’auraient pas pris avec leur propre salaire. D’ailleurs, il y avait parfois l’idée de devoir liquider ses « tickets resto » avant qu’ils ne périment, et donc encore plus l’idée d’un repas pas cher, qui n’aurait pas été pris autrement. Cela a largement profité aux petits restaurants surtout, c’est-à-dire des fast-food et autres kebab.

On peut dire déjà qu’à l’origine, ces titres restaurants ont été un cadeau empoisonné, car encourageant la malbouffe.

En raison de la crise et particulièrement de l’inflation, il y a eu toutefois un grand changement. En 2022, une loi a permis l’utilisation de ces titres restaurant pour l’ensemble des courses alimentaires. En fait, il y avait déjà l’habitude prise par certains de payer une partie de ses courses avec ces titres, mais cela pouvait s’avérer très aléatoire en raison du fait que seuls les produits prêts à manger étaient pris en compte.

Avec cette loi, cela devenait beaucoup plus facile et cohérent de se servir de ces titres lors de ses courses, car tout l’alimentaire est devenu directement éligible. Par exemple, le sel et le poivre, l’huile d’olive, le beurre de cacahuète, la farine, etc.

Parallèlement se sont développés les cartes à puce (type carte bancaire) en remplacement des tickets classiques, détachables dans un carnet type chéquier.

Ces derniers avaient en effet le grand inconvénient d’être plafonnés par en haut et par en bas. C’est-à-dire qu’avec un ticket d’une valeur de 9 euros, il fallait forcément avoir une note supérieure, au risque de perdre la différence. Et inversement, il fallait faire le complément directement pour une somme supérieure. Cela était peu pratique à la caisse, alors que cela restait acceptable au restaurant (avec cette idée d’un ticket de réduction).

Avec les cartes de titres restaurant, c’est beaucoup plus simple : le plafond maximal est de 25 euros par jour (sauf jours fériés) et on utilise directement le crédit utile.

Si on fait 14 euros et 22 centimes de courses, on paie directement avec sa carte « tickets resto », et ce sans contact qui plus est. Si l’on fait 74 euros de courses, on paie d’abord 25 euros avec la première carte (sans contact) puis 49 euros avec la carte bancaire habituelle (toujours sans contact). C’est simple et rapide.

Ainsi, les titres restaurant ont largement changé de nature. D’une aide, tel un service concernant les pauses repas au travail, ils sont devenus directement un élément de rémunération.

En 2023, plus de la moitié des sommes titres restaurant sont utilisées ainsi.

La dérogation pour l’éligibilité de l’ensemble des produits alimentaires aux titres restaurant devait prendre fin en janvier 2024, mais cela a été repoussé. Il a donc été officiellement et durablement entériné cette utilisation détournée des titres restaurant, qui va se généraliser.

Maintenant, venons-en à la question des salaires et de leur baisse. C’est très simple : avec une rémunération normale, il y a un salaire dit brut, qui est le vrai salaire, ainsi qu’un salaire net, qui correspond à la somme que l’on reçoit sur son compte en banque.

Avant, jusqu’au début des années 2000 peut-être, les ouvriers et les employés avaient une conscience sociale élevée en France. Ils connaissaient très bien le salaire brut et considéraient que la différence avec leur salaire « net » leur revenait, comme salaire socialisé, différé. Les cotisations et contributions salariales obligatoires étaient considérés comme un acquis et une chose à défendre.

Après les années 2000, le capitalisme s’est tellement développé, il est tellement devenu un rouleau compresseur faisant que tout est marchandise et consommation, que cette conscience du salaire brut a disparu. Seul compte donc le « net », que l’on peut dépenser soi-même en tant que consommateur. Le salaire « brut » est quant à lui considéré comme une chose étrange, à laquelle on ne s’intéresse pas, si ce n’est pour critiquer « l’État » qui « se sert ».

Si on faisait un référendum en 2023 pour demander aux salariés s’ils veulent la disparition du salaire brut en le transformant en net à payer, pratiquement tout le monde serait pour ! Ce serait bien sûr une grande catastrophe sociale, mais personne n’en aurait conscience et il serait très dure de convaincre du contraire.

Eh bien c’est exactement ce qu’il se passe avec les titres restaurant. Puisqu’ils servent maintenant à faire ses courses, il sont devenus directement un élément de rémunération. Et c’est une rémunération brute, sans cotisation sociale ni prélevèrent obligatoire.

Il ne faut pas regarder que du côté du salarié. Pour l’employeur également, cela change la donne : il y a des charges à payer à côté d’un salaire brut, pas pour des titres restaurant (ou très peu) !

On ne parle pas ici de sommes anecdotiques, mais de 150 euros à 250 euros par mois. C’est extrêmement conséquent dans la rémunération.

Les titres restaurants sont donc du salaire défiscalisé, échappant largement aux cotisations sociales. C’est un moyen pour le capitalisme de baisser directement les salaires (en n’augmentant pas suffisamment en raison de l’inflation) tout en le cachant à court terme avec une rémunération nette qui semble faire l’affaire.

Même s’ils ne servent plus à aller au kebab ou au tacos, c’est encore un cadeau empoisonné !

Ainsi, les titres restaurants sont un moyen de la grande restructuration économique dans le cadre de la crise du capitalisme. Il s’agit d’augmenter la pression sur les ouvriers et les employés, pour garantir les bénéfices capitalistes ; la baisse des salaires est une forme incontournable de cette pression.

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Rapport entre les classes

Érosion de cadres dirigeants, délitement de la société civile

C’est un fait frappant : il n’y a plus de cadres dirigeants. Il y a toujours des gens qui dirigent, mais la présence de dirigeants qui savent où ils sont et surtout où ils vont est au point mort.

Objectivement chacun est à sa place, se pense dans sa bonne position, et cela se suffit à lui-même.

Or, un cadre c’est précisément une personne qui ne se contente pas d’un simple fait – « être là » – mais quelqu’un qui impulse, oriente, décide. Et pour cela il lui faut une capacité d’analyse et d’anticipation, pour ne pas dire de planification.

Mais évidemment, cela postule qu’il faut savoir s’engager. Être un cadre dirigeant, c’est savoir s’engager au présent pour mieux planifier les choses de l’avenir du fait d’une capacité d’analyse des tendances. Cela vaut pour n’importe quelle activité, aussi bien sportive que culturelle, politique qu’économique.

Aujourd’hui il apparaît très nettement que l’engagement est réduit au néant. De fait, les dirigeants encadrent plus qu’ils ne dirigent. La société de consommation a tellement tout englouti que les choses roulent par elles-mêmes sans que les cadres prennent la peine d’orienter quoi que ce soit.

Il n’y a pas un étage de la société qui ne vit pas cet affaiblissement des cadres dirigeants, notamment intermédiaires. Les associations sont, de manière générale, en déliquescence, minées par le manque de bénévoles. Les établissements scolaires manquent cruellement de professeurs. La fonction publique n’attire plus grand monde, les entreprises ont des gestionnaires plus que des dirigeants. Même l’armée s’alarme de l’érosion de ses cadres qui partent aussi tôt qu’ils sont arrivés.

Au centre de cette érosion, il faut remarquer l’affaiblissement de l’engagement associatif tant il a été à la base des prétentions de la bourgeoisie en matière de direction de la société. L’associatif a toujours été le corollaire de deux autres dispositifs institutionnels : l’école et la mairie.

Grosso modo, l’idéal de la citoyenneté bourgeoise c’est un processus de socialisation culturelle qui passe par l’acquisition d’une raison et d’un « libre-arbitre » à l’école. Cette formation d’un tel individu doit ensuite se concrétiser par une participation sur la scène municipale, l’engagement associatif formant un canevas essentiel au dispositif.

Lorsque la bourgeoisie française atteint son apogée, quelque part entre 1848 et 1910, elle le doit principalement à un engagement pratique au sein des communes et/ou des associations (héritières des clubs). C’est cet engagement qui a toujours généré des cadres dirigeants, non pas simplement de tel ou tel secteur administratif ou économique, mais bien de la société toute entière.

L’érosion de l’engagement dans ces espaces hante la bourgeoisie, car à l’arrière-plan ce n’est pas seulement un affaiblissement de son appareil d’État qui se produit, mais la dégradation de sa légitimité historique à gouverner, et surtout à diriger. Car à l’inverse de la société féodale, la légitimité à diriger dans la société bourgeoisie est due à sa capacité à faire sortir de toutes les couches sociales des dirigeants placés sous son hégémonie.

Dans les années 1990-2000, la bourgeoisie a eu le vain espoir que les lois de décentralisation de 1982 à 1986 favorisent la relance de tout son dispositif idéologique et culturel. Le département, la région, pour ne pas dire « le pays » seraient les futurs espaces de formation des cadres dirigeants.

L’idéal de la « démocratie participative » si répandue dans la période 2005-2015 a été la dernière tentative de réactivation de la légitimité historique de la bourgeoisie. On touchait déjà la fin : le maire, le président de département et/ou de région se devait de générer des espaces pour produire de la « citoyenneté ». C’était peine perdue.

La pandémie de COVID-19 apparaît historiquement comme un coup de massue portée sur les dernières tentatives de la bourgeoisie de réactiver sa légitimité à diriger la société. Plus rien ne tient : les espaces pratiques pour générer des cadres dirigeants se sont étiolés et ne vont manquer de se dégrader encore et encore.

Pire encore : avec l’effritement de la société civile, illustrée par les taux d’abstention si élevés, notamment lors des élections municipales et législatives, et la chute du bénévolat associatif, la bourgeoisie perd un des principaux liens organiques avec la société. Un maire, un préfet a besoin d’une vitalité civile pour s’orienter : il faut pouvoir aller sereinement à telle ou telle soirée associative pour se légitimer et parfaire sa vision des choses. C’en est fini, ou se maintient de manière fictive.

C’est la continuité organisationnelle de la bourgeoisie qui est ainsi atteinte en son cœur. D’où d’ailleurs la nécessité de raisonner en termes de prolétariat/bourgeoisie, comme forces et pôles historiques, et non pas dans les termes syndicalistes d’ouvriers/patrons, salariés/capitalistes.

Notons justement que cet assèchement donne régulièrement lieu à des débats autour du thème de la déconnexion entre les « élites » et le « peuple ». Il faut ici pointer les erreurs du populisme car si les prétentions dirigeantes de la bourgeoisie s’effondrent, c’est bien parce qu’elle est minée par les contradictions de sa propre société, devenue simple société de consommation.

Une société ne flotte pas en l’air, elle produit des comportements, des mentalités répandus dans le peuple lui-même. Dans les faits, les gens se moquent d’être impliqués dans la société civile tout à la fois par distance avec la bourgeoisie et par aliénation dans la passivité consommatrice.

La passivité reste l’élément prépondérant, car sinon il y aurait un engagement antagoniste sur la base d’une citoyenneté nouvelle, socialiste. Or, la déliquescence de la capacité dirigeante de la bourgeoisie ne va pas mécaniquement de pair avec l’éclosion de dirigeants socialistes issus du prolétariat. C’est ce qui explique la faiblesse de la Gauche historique.

C’est la grande différence entre la révolution telle qu’elle se déroulera au XXIe siècle et telle qu’elle a pris forme au XXe siècle avec une classe ouvrière née sur le terrain de la revendication de l’idéal bourgeois pour mieux le dépasser avec l’expérience communarde, soviétique.

Et cela pose une problématique centrale pour les révolutionnaires de ce siècle : quelle sera la nature du processus révolutionnaire ? La révolution sera t-elle un « assaut du ciel » avec des gens conscients de leur engagement de part un héritage historique ou bien sera-t-elle une réorganisation antagoniste, brouillonne dans le jeu immédiat des contradictions ?

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Rapport entre les classes

La crise occupe tous les intervalles

Il existe une expression française qui dit qu’on doit boire le calice jusqu’à la lie. Le calice, c’est le petit vase où l’on boit le vin dans la messe chrétienne ; la lie c’est un dépôt qui se forme au fond d’un liquide fermenté. L’expression dit que quand on affronte quelque chose de compliqué, il faut en subir tous les aspects, y compris le pire et jusqu’au bout.

Cette expression prend tout son sens avec le capitalisme qui s’effondre. S’il s’effondre, c’est qu’il s’est développé. S’il s’est développé, c’est qu’il s’effondre à tous les niveaux qu’il a développé. C’est implacable. En traduit en langage commun, cela veut dire que tant que monsieur X pourra continuer d’acheter des vélos de course, madame Y de partir en République Dominicaine pour les vacances, monsieur Z de s’installer dans un cocon péri-urbain avec madame Z, tant que le jeune U pourra continuer de jouer aux jeux vidéos comme un damné, que la jeune W pourra regarder des courtes vidéos et des séries à l’infini…

Eh bien, tous ces gens seront paralysés, épuisés psychiquement et ne parviendront pas à basculer, même pas la Révolution, mais ne serait-ce que la lutte des classes. Pourquoi en effet engager sa vie en tant que telle et remettre en cause tous les aspects de la vie dans le capitalisme s’il y a une porte de sortie? Pourquoi passer pour un bizarre, en rupture, alors que tout le monde dispose d’une manière ou d’une autre d’une porte de sortie individuelle?

Vu de 2050, la pandémie de 2020 apparaîtra forcément comme une période où l’humanité a raté sa prise de conscience. Cette prise de conscience était impossible, évidemment : une humanité qui avait développé depuis 1990 les forces productives comme jamais n’allait pas abandonner du jour au lendemain son style de vie consumériste. D’une part, parce que les gens dans les pays riches ne le voulaient pas, d’autre part, parce que les gens du tiers-monde ne le pouvaient pas.

Jusque les années 1990, faire la révolution dans le tiers-monde (voire tout court), c’était surtout organiser des paysans illettrés pour qu’ils se soulèvent par les armes. Aujourd’hui, ces mêmes paysans n’en sont plus vraiment, s’ils le sont restés ils dépendent d’une agro-industrie capitaliste bureaucratisée et monopoliste… et ils ont des smartphones.

La pandémie ne pouvait donc pas pousser les gens du tiers-monde à la révolution, quant aux gens au chaud dans les pays les plus riches, ils étaient corrompus de toutes façons. Et maintenant que tout tombe, il faut attendre que vraiment tout tombe, avant qu’ils soient en mesure de se remettre en cause. Être en mesure seulement, car il faudra se débarrasser des illusions, du style de vie passé…

Autant dire que lorsque les choses vont se lancer vraiment, cela n’aura rien à voir avec aujourd’hui. La rupture va être complète. Heureusement d’ailleurs, sinon ce ne serait pas une révolution. Une révolution, c’est… une révolution, c’est le renversement des valeurs, la systématisation d’une autre vision du monde, dans tous les domaines. Sinon, c’est une réforme, d’importance plus ou moins significative.

Il faut donc, suivant cette équivalence dialectique, que le niveau soit à zéro pour que tout soit possible. Tant que le capitalisme façonne les esprits, la révolution est impossible. Lorsqu’il les a façonnés, il a triomphé… mais il s’est épuisé en même temps. Donc tout s’efface et la révolution est possible.

Il suffit de regarder les bourgeois. Ceux des années 1980 étaient cultivés et carrés dans leurs méthodes, ils avaient une véritable vision du monde, ils étaient pleins d’assurance et de maîtrise. Les bourgeois depuis 2020 sont passifs, décadents, vantards et opportunistes. C’est une classe en perdition.

Naturellement, cela entraîne aussi le peuple vers le bas. Les syndicalistes sont l’expression de cette tendance au beauf. Depuis quand les ouvriers n’ont-ils pas assumé le socialisme? Tellement de décennies… Cela laisse des traces. Le changement de mentalités va être rude!

Agauche.org parle de culture et des animaux, cela ne plaît pas au PRCF qui se comporte tel le PCF en 1968 avec la dénonciation alors du « Juif allemand Cohn-Bendit » et des « pro-chinois »

La crise du capitalisme fait de toutes façons le travail que ne font pas les partisans du Socialisme. C’est bien plus douloureux, bien sûr, cela ajoute des détours. Cela allonge le parcours de l’humanité du capitalisme au Socialisme. C’est dommage. Mais cela ne change rien au caractère inévitable de la révolution qui s’annonce. Le capitalisme ne peut plus rien faire tenir debout et chaque intervalle sociale qui se maintient encore tant bien que mal est ébranlé.

Quel dommage que chaque intervalle doit être comblée. Il en est ainsi pourtant. Et c’est aussi le garant que la Révolution sera vraiment complète.

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Restructurations économiques

Loi de programmation militaire et restructuration

Le militarisme, c’est la restructuration capitaliste.

En mars 2012, les États membres de l’Union européenne adoptaient le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG). Il prévoyait la mise en place d’un pacte budgétaire européen visant à un contrôle strict des dépenses de l’État dans le but de maîtriser les déficits publics, et donc le niveau d’endettement des États.

Cela faisait suite à la crise de la dette souveraine, notamment avec la Grèce qui avait été placée en défaut de paiement, menaçant d’explosion la zone monétaire européenne.

Cela a eu pour conséquence en France la création d’un Haut conseil aux finances publiques qui a pour but d’évaluer la cohérence et la soutenabilité des dépenses publiques au regard de la croissance intérieure (PIB). Il s’agit de mettre en relation les dépenses de chaque loi dite sectorielle avec la loi de de programmation des finances publiques (LPFP) et la trajectoire de la croissance française pour les prochaines années.

Car lorsque les comptes sont déficitaires, cela a pour conséquence soit de baisser le niveau des dépenses et donc d’assumer l’austérité, soit de trouver de nouvelles recettes fiscales, soit de lever des emprunts de dette.

Le 5 avril 2023, Pierre Moscovici, président du Haut conseil aux finances publiques a donc été auditionné pour fournir l’avis de l’institution pour le budget prévu pour la loi de programmation militaire 2024-2030 (LPM). Cela fait suite à la dépose par le gouvernement du projet de LPM à l’Assemblée nationale le 4 avril, devant donc être débattu au parlement en juin.

Pour le HCFP, tout est pris d’incertitude car la LPFP, présentée en septembre 2022, est pour l’heure rejetée par les députés de l’Assemblée nationale et les prévisions de croissance sont incertaines. Pour autant, le président du HCFP a d’ores et déjà été très clair sur la situation.

Il a rappelé ainsi que le niveau d’engagement budgétaire de la LPM pour la période 2023-2030 était très important. On parle ici de 413 milliards d’euros, en fait de 400 milliards prévus directement par la LPM et de 13 milliards extrabudgétaires, faisant passer le niveau de dépense militaire de 47 milliards en 2024 à 69 milliards en 2030.

Cela aura pour conséquence une « contrainte très forte sur les autres dépenses du budgets de l’État« . Alors que le niveau de dépenses publiques a diminué de 0,3 % entre 2012 et 2019, l’orientation budgétaire de la LPM impliquerait une diminution de 1,4 % entre 2023 et 2027. Comme il l’a déjà été affirmé ici, la nouvelle mouture de la réforme des retraites 2023 est d’ailleurs issue de ces conditions financières.

A cela s’ajoute le fait que la France a « connu une érosion progressive des ses finances publiques » avec une explosion de sa dette, passée de 58 % de son PIB en 2000-2001 à plus de 111 % en 2022.

C’est l’une des plus importantes augmentations de la dette souveraine dans la zone euro, puisque sur la même période, l’Allemagne a augmenté le niveau de sa dette de 10 points, l’Italie de 40 points… Et pourtant la France vise à dépenser encore et encore pour la santé, l’éducation, l’écologie, etc., ce qui pousse Pierre Moscovici a résumer la chose de la manière suivante :

« Face à la montagne d’investissements, nous avons un mur de dettes très élevé. »

On notera la réaction d’Eric Coquerel, député LFI-NUPES de la 1ère circonscription de Seine-Saint-Denis et élu président de la Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire en juin 2022 :

« Je suis d’accord avec lui, le président de la commission défense a expliqué que l’effort en termes de réarmement, l’effort militaire, ne devait pas rentrer en concurrence avec les autres efforts, par exemple en matière de santé, d’éducation, en matière de préservation du climat »

Et d’ajouter que cela pose donc la question des recettes et de la fiscalité. On comprend alors toute la stratégie politique qui vise à légitimer la taxe sur les « superprofits », ce qui révèle parfaitement la nature sociale-impérialiste de La France Insoumise.

Car pour l’auteur de « Lâchez-nous la dette » publié en 2021, l’explosion de la dette est un faux problème puisque l’on peut « partager les richesses » et imposer plus fortement le capital.

Ce qui revient à dire que puisque la bourgeoisie française est grasse, très grasse, on peut lui en prendre un peu plus pour faire se continuer tout comme avant dans un niveau de vie occidental. La chose est donc entendue : oui, l’élévation faramineuse de la dépense militaire est acceptée, mais attention à ce que ne cela ne brise pas le « consensus social » sur le niveau vie dans la grande puissance française.

La taxation des riches est toutefois une perspective réformiste qui pouvait faire illusion avant 2020, mais qui n’est plus qu’une fable tant la France se ratatine et prétend à un niveau de vie qu’elle ne peut plus assumer dans les conditions de la nouvelle situation générale post-Covid-19. Il faut maintenant pressuriser les travailleurs, faire accepter une chute de haut niveau de vie des français pour relancer le capitalisme français.

Il est donc évidement que cette augmentation du budget militaire français relève de la restructuration du capitalisme dans le cadre de l’aiguisement de la compétition économique internationale suite aux dérèglements consécutifs à la pandémie de Covid-19.

A ce niveau, on voit combien la Gauche française s’est liquidée elle-même à l’instar de ce qui s’était passé en 1914. Sa revendication de plus de dépenses sociales en omettant de critiquer le militarisme et la tendance à la guerre ne peut que la faire évoluer vers une position social-impérialiste.

Il faut même dire que cette position est même déjà établie depuis le positionnement officiel de toute la Gauche française lors du premier anniversaire de la guerre en Ukraine. Mais cela va être toujours plus visible, toujours plus officiel à mesure que le vote de la LPM va être sur le devant de la scène.

Sans critique du social-impérialisme, la Gauche ne peut que servir de tremplin au nationalisme comme proposition réaliste de sauvegarde de la « France puissance » par la remise au travail à marche forcée du plus grand nombre.

Servons la Gauche historique, ses valeurs, sa vision du monde, pour la recomposition du prolétariat !

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Politique

Emmanuel Macron rappelle aux français le prix du quoiqu’il en coûte

La facture sera salée.

Certains ont voulu croire que l’argent était réellement magique et que les richesses peuvent se créer ex-nihilo sans aucune conséquences. Nous avons dis dès l’origine que cela allait coûter aux français, et qu’il fallait la socialisation.

Emmanuel Macron s’est exprimé hier lors d’une interview visant à justifier le passage en force de la réforme des retraites et continuer à maintenir l’argument de la nécessité. Il n’a rien dit, rien annoncé qui aille dans le sens d’une modification d’approche compte tenu de la contestation actuelle.

Il n’a fait que rappeler que sa fonction était d’assurer une certaine continuité du capitalisme français, en limitant la casse de la crise déclenchée par le COVID19 et du quoiqu’il en coûte.

Il évoque cela ainsi lorsque les journalistes lui font remarquer sont changement de position sur les retraites :

« Journaliste : Vous disiez vous-même en 2019 « on ne peut pas demander aux gens de travailler jusqu’à 64 ans si à 55 ans ils ont déjà du mal à trouver du boulot. »

Emmanuel Macron : On a beaucoup repris ce passage. Je vais être clair avec vous car justement j’ai le sens de la démocratie et du mandat. Quand je m’exprime et que je dis cela en 2019 – on a lancé les ordonnances travail que depuis 18 mois, ça fait 6 ans maintenant qu’elles sont en œuvre avec les résultats que vous connaissez – je m’exprime dans une société qui est à plus de 8 % de taux de chômage. Le mandat que j’ai en 2017 c’est de créer un système universel des retraites, en aucun cas de bouger l’âge de départ parce que le rapport de concertation des retraites et tous les experts disaient « y’a pas de problème ».

Après cette expression que tout le monde nous ressert, qu’est-ce qui s’est passé dans notre pays ? Les gens vivaient dans quel monde ?

On a eu le Covid. On a eu la guerre. On a eu l’inflation. La Nation a dépensé des dizaines de milliards d’euros pour protéger, elle a donc construit une dette qu’on a amorti dans le temps et nos comptes se sont dégradés.

Au moment de la campagnes de 2022, la situation est drastiquement différente. »

Il parle de la guerre au passé, mais il serait plus juste de dire « on a la guerre en Ukraine ». Et la guerre n’est pas un sujet pour les français qui acceptent passivement que le complexe militaro-industriel français marche à plein régime pour envoyer des armes à crédit au régime ukrainien.

Il a été dit ici que le capitalisme avait provoqué sa propre crise de part la destruction généralisée de la planète qui a engendré la pandémie de COVID19 et que le confinement a été un moment de collectivisme forcé au sein du capitalisme. Une anomalie majeure dans le flux-tendu exigé par l’accumulation moderne.

La guerre est une conséquence de la crise, les conflits inter-impérialistes restent ce qu’ils étaient au XXè siècle et tels qu’ils étaient décrit par les intellectuels du mouvement ouvrier de l’époque : une nécessité pour les capitalismes nationaux pour maintenir leur rang dans le monde. Non pas de manière consciente mais de manière tout à fait inéluctable.

Alors Macron patauge, parce que son idéal turbo-capitaliste personne n’y croit plus et là où les français sont en mauvaise posture, c’est qu’ils veulent quand même le capitalisme. Ils ne veulent pas que leur niveau de vie baisse, ils ne veulent pas de la crise et tant que cela reste ainsi, cela nécessite la guerre.

C’est très concrètement le sens de « socialisme ou barbarie ».

Or, ils ne veulent pas du socialisme, ils ne veulent pas d’un ordre nouveau, ils veulent le rétablissement d’un ordre ancien fantasmé. Sans une remise en question générale dirigée par le mouvement ouvrier, il n’y aura ni ordre, ni paix, ni justice.

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Société

Il ne s’agit pas d’être « pour » ou « contre » les coupures d’électricité

On se situe au niveau de la civilisation elle-même.

L’annonce de coupures d’électricité par le gouvernement, avec un plan détaillé à ce sujet envoyé à toutes les préfectures, devrait normalement interpeller les gens sur la situation de blocage que vit l’humanité. Mais, cela semble passer comme tout le reste, et c’est normal car il y a là un problème complexe qui exige un niveau de conscience adéquat.

Quand on y réfléchit raisonnablement, on se dit qu’on ne peut ni être « contre », ni être « pour » les coupures d’électricité. On voit d’ailleurs ici combien le populisme style gilet jaune renforce la logique pragmatique de la bourgeoisie qui gère les choses en fonction d’une société minée par une crise profonde.

Pour les populistes, il ne s’agit que d’une « mauvaise gestion » due à deux hommes, François Hollande puis Emmanuel Macron. Par miroir inversé, le gouvernement peut facilement s’appuyer sur la réalité de la guerre en Ukraine, mais aussi et surtout sur l’impact qu’a eu la pandémie sur la maintenance des centrales nucléaires pour dire que le problème vient de là. À « la mauvaise gestion » répond la « gestion du cours des choses ».

Au centre de ce débat, les gens normaux restent désemparés. Il a été compris qu’on avait affaire ici à un problème d’une grande complexité où s’entremêlent de nombreux aspects. A ce titre, il ne faut pas écouter la bourgeoisie qui nous parle d’une succession de crises pour mieux masquer le fait que c’est une seule et même chose qui s’appelle la crise générale du capitalisme en ce début de XXIe siècle, et qui va donc en fait marquer tout ce siècle.

De quoi relèvent les coupures d’électricité ? D’une mauvaise gestion ou d’une nécessité liée à une « conjoncture » ? Évidemment, cela n’est ni l’un ni l’autre : les coupures d’électricité, c’est l’expression émergée du crash du capitalisme, en tant que mode de production apte à reproduire la vie quotidienne des gens.

Derrière les multiples causes que sont la guerre en Ukraine et l’inflation du prix du gaz qui impact, en tant que dernier moyen de production mobilisable pour fournir de l’électricité, le prix général de l’électricité, la sécheresse estivale comme expression de l’écocide qui mine les réservoirs des barrages d’hydroélectricité, sources essentielles pour faire face aux pics de consommation hivernale, et le retard de maintenance de centrales électriques due à la pandémie, il n’y a pas une accumulation d’aspects, mais un seul et même problème qui s’exprime à travers divers phénomènes.

Cet aspect central, c’est le fait que le capitalisme se heurte à son propre blocage historique, blocage qui lui est propre car c’est bien sa dynamique d’accumulation qui a fait entrer l’humanité dans ce mur et continue à le faire en forçant le cours des choses.

C’est finalement la même chose qu’au début de la pandémie, où le confinement était critiqué par certains comme une « gestion du moyen-âge » alors même qu’il ne s’agissait pas de savoir si l’on était pour ou contre, car telle était dorénavant la situation, exigeant d’y faire face, mais de comprendre comment et pourquoi une telle situation minait l’humanité toute entière.

Et comme pour les coupures d’électricité, on trouvait là concentré en lui le réchauffement climatique, la destruction de la nature, l’enfermement et l’anéantissement des animaux, l’asphyxie de la grande ville, etc.

C’est bien là qu’on voit qu’il y a une continuité historique entre les effets de la pandémie et la cause des coupures d’électricité, renvoyant aux oubliettes la logique d’explication de « cause à effets ».

Le rapport bancal de l’Humanité a amené à la situation d’une pandémie historique, bloquant l’ensemble de la production mondiale qui, pour redémarrer dans un cadre capitaliste, donc marchand, a connu des distorsions majeures.

Distorsions qui sont le terrain à l’accentuation d’antagonismes entre puissances, donc à la tendance à la guerre de repartage… mais aussi à des pénuries en tout genre, y compris de main d’œuvre qui minent le travail de maintenance alors même que l’écocide s’exprime toujours plus, comme les canicules et sécheresses majeures de l’été 2022.

Les potentielles coupures d’électricité de l’hiver 2022-2023 ne sont donc pas un « nouveau » phénomène après la pandémie, puis après la guerre en Ukraine et à côté du réchauffement climatique, mais l’expression nouvelle d’un même phénomène, celui de la crise générale du capitalisme.

De fait, les coupures d’électricité ne posent pas la question formelle « pour ou contre », mais bien une problématique d’ordre civilisationnel de type : « comment faire pour ne plus arriver dans une telle situation ? ».

De plus, il est fort à parier que l’anarchie du capitalisme associée à la décadence toujours plus prononcée des couches dirigeantes, cette autre expression de la crise générale, vont donner, si elles ont lieu, une tournure ubuesque à ces coupures d’électricité…

La Gauche historique se doit d’être à la hauteur de sa responsabilité en posant le problème au niveau de la civilisation humaine elle-même et non pas se ranger derrière la critique populiste, ou bien derrière un pragmatisme « de gauche » proposant une « autre gestion » plus « équitable », plus « rationnelle » etc.

On ne peut ni être pour, ni être contre les coupures d’électricité, mais on se doit d’élever le niveau de conscience pour embarquer l’Humanité dans la nécessité d’une nouvelle civilisation qui s’épargnera à l’avenir les régressions qu’elle éprouve depuis maintenant trois ans et qu’elle ne va manquer d’endurer si elle ne s’émancipe par du cours des choses.

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Restructurations économiques

La situation énergétique de la France est catastrophique

C’est la grande panique avant l’hiver.

Lors de la conférence de presse du gouvernement pour évoquer la « situation énergétique » du pays en vu de l’hiver, il a été dit la chose suivante par la Premier ministre Élisabeth Borne :

« si chacun prend ses responsabilités, il n’y aura pas de coupures »

Si on interprète correctement, il faut comprendre : c’est tout à fait possible qu’il y ait des coupures de courant et de gaz, alors le gouvernement cherche le moyen de faire porter la responsabilités à d’autres.

D’ors et déjà il est prévu une campagne de communication à destination de la population. On y apprendra des choses du genre il faut éteindre la lumière en quittant une pièce ou lancer une machine à laver en dehors des heures pleines sur le réseau. C’est que les gens sont censés y mettre du leur, parce que la bourgeoisie française n’est plus sûre de sa capacité à fournir le standard de confort et de consommation vanté (et surtout, indispensable au capitalisme).

La crise frappe de plein fouet le pays, et cela va commencer à se voir cet hiver. Il y a clairement une panique au sommet de l’État français, terrifié de voir la population gronder face aux prix, ainsi que l’économie paralysée par des black-out en série.

La situation est en effet catastrophique. En ce qui concerne le gaz déjà, en raison de la guerre économique menée à la Russie par l’OTAN et ses pays membres. Les réserves de gaz pour l’hiver sont faites (à 94%), mais tous cela est précaire s’il n’y a pas de continuité dans l’approvisionnement.

Le directeur général de GRTgaz, le gestionnaire du réseau français, a été on ne peut plus clair dans sa conférence de presse précédent celle du gouvernement le matin même :

« Dans un hiver moyen, la France est capable de faire face à la demande de gaz tout en soutenant le système électrique et en contribuant activement à la solidarité européenne. Mais si l’hiver est froid ou très froid, on pourrait se retrouver en situation de tension plutôt en fin d’hiver, et donc il faut vraiment un effort de sobriété indispensable dès maintenant pour préserver les stockages tout au long de l’hiver ».

Difficile de faire plus explicite : si la population française ne joue pas le jeu, c’est la catastrophe annoncée. Le problème, c’est que le directeur général de GRTgaz a également parlé du mécanisme de solidarité européenne qui fait qu’à partir de la mi-octobre, du gaz doit être livré à l’Allemagne par la France : 100 GWh/jour, « soit la puissance de quatre tranches nucléaires ».

C’est gigantesque, et forcément cela ne passera pas. Les nationalistes et populistes ont déjà sauté sur l’occasion pour critiquer l’Allemagne de manière chauvine. Cela d’autant plus qu’il est déjà prévu des délestages pour les industriels gros consommateurs, c’est-à-dire les secteurs du verre, des engrais, des métaux, de la pétrochimie et de l’agroalimentaire, à moins que ceux-ci ne réduisent la voilure d’eux-mêmes.

On voit là clairement que la crise renforce elle-même la crise, ici en contraignant directement les capacités productives françaises. En parlant de capacités productives françaises, c’est d’ailleurs la catastrophe en ce qui concerne le nucléaire, censé être le fleuron industriel français.

Près de la moitié des réacteurs nucléaires français, soit 26, sont à l’arrêt pour des raison de maintenance. EDF, sous la pression immense du gouvernement, a fournis un calendrier très précis : 5 réacteurs doivent repartir en septembre, 5 en octobre, puis 7 en novembre, 3 en décembre, 3 en janvier et enfin 2 en février.

Sauf que concrètement, rien ne garantit le suivi d’un tel calendrier tout simplement car il n’y a pas la main d’œuvre. La France a des millions de gens dans des bureaux, mais manque d’ouvriers. EDF manque cruellement de tuyauteurs, de soudeurs, de robinetiers, de chaudronniers, pour assurer les travaux nécessaires.

Au passage, on notera que c’est la même chose pour la branche commerciale d’EDF : l’opérateur public a subi pendant des années une fuite de clients suite à l’ouverture du marché à la concurrence. Sauf qu’avec la crise, les prix explosent littéralement chez les opérateurs privés et EDF voit affluer des masses de clients voulant revenir à l’opérateur historique pour bénéficier du tarif réglementé… mais n’a pas le personnel et les moyens techniques pour absorber cela.

En tous cas, la tension sur le réseau électrique français cet hiver va être extrême. Sans compter l’explosion de tarifs pour les collectivités, qui doivent se fournir au prix du marché. La région Ile-de-France a communiqué là-dessus : « la hausse absolument colossale des prix de l’énergie va déferler sur les transports du quotidien ».

Il est prévu une augmentation de 950 millions d’euros des coûts pour l’exploitation du réseau, soit presque un milliard, pour un budget actuellement de 11 milliards.

C’est évidemment pareil pour toutes les villes, surtout celles avec tramways ou métro. Pour la SNCF, le problème se pose également. Et puis il y a le transport de marchandises, essentiellement thermique par camion en France, qui fait face à une explosion des coûts d’exploitation, qui vont forcément être répercutés et renforcer la crise.

Le gouvernement français est face à un mur qui menace de s’effriter. Il continue à vouloir boucher les fuites une par une, en déployant ici un bouclier tarifaire limitant la hausse des prix de l’énergie à 15% en 2023, là des chèques énergie exceptionnels pour 12 millions de foyers considérés comme modestes, etc.

Cela coûterait 45 milliards d’euros à l’État en tout, car il y a aussi des mesures prévues pour les entreprises, surtout les PME. Tout cela alors que l’État français est déjà au bord de la faillite, et que la croissance capitaliste du pays va être totalement chamboulée par les pénuries énergétiques et l’inflation cet hiver.

Les français cigale, ayant chanté tout l’été, un été qui dure depuis des décennie d’abondance capitaliste, vont se trouver fort dépourvus quand la crise sera clairement venue… Ils iront forcément crier famine chez la fourmi voisine, c’est-à-dire l’État, mais il les enverra danser, comme il l’annonce déjà.

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Société

La crise ne fait que commencer…

C’est un processus d’effondrement général.

Après l’insouciance de l’été, voilà la rentrée qui s’impose à tous dans toute sa brutalité. Les français avaient l’impression de sortir d’une crise en continuant leurs « projets » ? C’était nier le réel, un réel où pas un secteur de la société ne vit un processus d’effondrement…

Après les pénuries de main d’œuvre en cascade qui touchent bon nombre de domaines d’activité humaine essentielle, à l’instar de l’éducation nationale, des chauffeurs de bus, les services de santé et de soin à la personne, etc., voilà que la flambée des cours de l’énergie annonce un grand chamboulement.

Si l’on regarde d’un point de vue individuel on peut se dire que le pire sera d’éventuelles coupures d’électricité, une plus grande difficulté à boucler les fins de mois, ce qui est déjà alarmant en soi. En réalité, cela va toucher, et touche déjà le cœur de la vie quotidienne.

Avec pour commencer l’impossibilité annoncée d’ouvrir pour certaines stations de ski. Pour un pays comme la France, dont une partie de la croissance est tirée par le tourisme, c’est très marquant, même si on ne va pas en vacances au ski. On l’a vu lors de la « saison blanche » 2020/2021.

Il en va de même pour les piscines municipales dont une trentaine a d’ores et déjà annoncé l’obligation de fermer à cause des prix de l’électricité, parfois dans des conditions rocambolesques où les collectivités territoriales mandataires étaient prévenues quelques jours, voir quelques heures avant la fermeture !

Pour les familles, cela va poser des problèmes pour les cours de sports scolaires et en club, rajoutant à la désorganisation générale sur fond de galères liées aux pénuries de professeurs.

Et ce n’est que la partie immergée de l’iceberg car ces structures fonctionnent sur contrats établis à l’avance. Combien de stades ou gymnases municipaux vont devoir supprimer des créneaux pour ne pas utiliser l’éclairage ? Quelles autres activités du quotidien vont être touchées, au pire par une fermeture, au mieux par des « régulations » ? Les cantines scolaires vont-elles faire le même choix que cette commune de Seine-Maritime qui a choisi de rationner entre le dessert, le fromage ou l’entrée plutôt que d’augmenter le prix du repas ?

Cela va être vécu comme un véritable cauchemar, avec à nouveau des pertes d’activités, du chômage partiel qui ne pourra de toute manière pas durer éternellement, avec des faillites d’entreprises qui ne pourront pas être soutenues éternellement aussi.

Ce sont déjà de nombreuses grandes entreprises sidérurgiques qui ont annoncé une baisse de leur activité, ce qui va avoir un impact général puisque fournisseurs de matières premières. Le secteur de l’automobile qui sort à peine de la pénurie de semi-conducteurs, et qui reste miné par la sous-consommation, s’inquiète de cette inflation monstre de l’énergie, le tout formant une spirale qui s’auto-alimente jusque vers la récession.

D’autant plus qu’il est clair que la crise de l’énergie va s’installer dans le temps, la guerre en Ukraine n’étant qu’un amplificateur d’un problème d’ordre historique, pour ne pas dire civilisationnel car étant lié à la question centrale du réchauffement climatique et de la construction de nouvelles sources d’énergies moins émettrices de CO2.

Cela même sans parler du fait que justement tout est incertain, de l’issue de la guerre en Ukraine en passant par les multiples zones de poudrière qui peuvent s’embraser à tout moment. Et on aurait tort ici d’oublier les désordres au niveau de l’économie capitaliste elle-même.

Alors que les aides et autres boucliers tarifaires sont prolongés, le risque de faillites en cascades d’entreprises incapables de faire face à la fois aux remboursements de leurs PGE contractés pendant les années de pandémie et à leurs factures d’électricité menacent d’un effondrement général de l’économie capitaliste elle-même.

Et c’est tant mieux ! Enfin, cela serait tant mieux si on avait des secteurs de la population faisant preuve d’une conscience sociale et politique à la hauteur de l’époque. À l’inverse, on a le populisme et l’indifférence qui règnent. Il est frappant de voir à quel point il y a un gouffre entre l’inquiétude de la bourgeoisie qui peine à assurer son rôle de gestion et les gens qui ne se soucient de si peu et sont loin de pouvoir prendre la relève.

Ce qui devrait être pourtant compris, c’est que le capitalisme se heurte à une telle désorganisation qu’il entraîne la société toute entière dans une sorte de chaos généralisé, sans capacité d’organisation rationnelle de longue durée.

Il est un système en fin de course, condamné car reposant sur la pagaille de l’économie de marché… et c’est dans l’ordre des choses que la Gauche historique se batte précisément pour un ordre nouveau.

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Société

Le pass sanitaire est-il une mesure machiavélique ?

L’ultra-gauche a largement diffusé sa conception d’un État qui « pense ».

Depuis l’allocution du 12 juillet 2021 d’Emmanuel Macron, un grand débat existe chez les gens de gauche : le pass sanitaire est-il une mesure anti-populaire, et même directement hostile à l’encontre des travailleurs ? La question s’est posée avec d’autant plus d’acuité qu’une partie importante des masses laborieuses, dans ce qu’elles ont de plus large, a eu un véritable haut-le-cœur à l’annonce des mesures étatiques.

La lassitude dans la crise sanitaire et la fatigue du salariat ont amené bon nombre de travailleurs à exprimer un refus de suivre une exigence décidée de manière unilatérale. Il y a un sentiment diffus de ne plus vouloir suivre les règles imposées. Tout cela est très confus, évidemment, vue la nullité complète du niveau de conscience sociale, politique, idéologique, culturel. Il y a cependant quelque chose, et c’est suffisant pour avoir été remarqué.

Comme on le sait, il y a en effet en France une grande tradition syndicaliste révolutionnaire ; à vrai dire, on considère même qu’être à gauche de la gauche serait d’exprimer la colère populaire revendicative. D’où une vague de refus du pass sanitaire exprimée politiquement de manière ouverte.

Il faut cependant prendre garde à ne pas rater la question de fond. En effet, les travailleurs refusant le pass sanitaire ont pris cela pour eux, au sens de : « on va encore nous ennuyer, nous agresser ». Ils ont une vision machiavélique d’Emmanuel Macron, comme de Nicolas Sarkozy hier. Il y aurait un calcul, ce serait un coup fourré, un coup de Jarnac, etc.

Or, que voit-on ? Que les dénonciations du pass sanitaire se placent à ce niveau. Elles ont toutes comme arrière-plan intellectuel d’imaginer le capitalisme organisé, avec des gens savant pertinemment ce qu’ils font. Il est pourtant évident que l’État est débordé et que le pass sanitaire est le minimum objectif à réaliser pour essayer que la société sorte la tête de l’eau.

C’est là qu’on voit comment prédomine la conception d’ultra-gauche d’un État « calculateur », d’un État à la « 1984 », d’un capitalisme conscient et cynique, calculateur et machiavélique. C’est une vraie paranoïa, qui s’exprime très largement. Lutte Ouvrière, par exemple, est formelle dans son article Passe sanitaire et vaccination forcée : c’est non ! : c’est une mesure calculée, un coup machiavélique.

« Qu’arrivera-t-il aux salariés qui n’auront pas de passe sanitaire à jour ou à ceux qui ne voudront pas se plier à l’obligation vaccinale ? Seront-ils mis à l’amende, suspendus, licenciés ? La non-vaccination est devenue un nouveau motif de licenciement, eh bien voilà une attaque anti-ouvrière de plus à combattre ! 

La vaccination est un moyen puissant pour combattre l’épidémie, mais Macron s’en sert comme une arme politique pour dissimuler sa propre responsabilité. Il s’en sert pour cacher combien la gestion capitaliste des hôpitaux est criminelle. Il s’en sert pour faire oublier le manque de moyens humains et matériels du système de santé.

Macron est en campagne et il utilise la crise sanitaire pour resserrer les rangs derrière lui, en dressant les vaccinés contre les non-vaccinés. Il aimerait que nous passions le temps à nous dénigrer, nous déchirer et nous contrôler les uns les autres, plutôt que juger de son action et lui demander des comptes. »

L’idée de fond, c’est que le pass sanitaire serait une mesure afin de diviser pour régner, avec aux commandes un super-calculateur prévoyant les coups à l’avance. Le PCRF parle de « Macron l’autocrate jupitérien » réalisant une « avalanche continue des mesures liberticides et réactionnaires ». Le PRCF parle du « tyranneau Macron« , qui empile les mesures liberticides :

« Préparées par un intense pilonnage médiatique, les annonces de Macron sont inadmissibles sur toute la ligne. Plus arrogant que jamais alors même que le parti macroniste LREM a obtenu moins de 4% des inscrits aux régionales et aux départementales, le “libéral” Macron institue à la fois l’obligation vaccinale pour les soignants et le passe sanitaire individuel obligatoire pour une interminable série d’activités : ce qui revient de fait quasiment à assigner à résidence, voire à interdire de vie sociale, politique et culturelle toute une partie de la population!

Cette approche ultra-autoritaire et diviseuse, typique des mesures liberticides empilées sans fin par les présidents et par les gouvernements maastrichtiens successifs, fait l’impasse sur l’euro-casse austéritaire de l’hôpital, qui continue de plus belle, et sur le désintérêt total du pouvoir pour les politiques de soin et de prévention. »

Le média Lundi.am, porte-parole d’une ultra-gauche spontanéiste et intellectuelle, parle pareillement de contrôle et de répression :

« Emmanuel Macron l’a annoncé lundi dernier, la stratégie de lutte contre la 4e vague épidémique s’articulera autour de valeurs phares : la menace et le chantage, le contrôle et la répression. Il y a beaucoup à dire et à penser de ce que va produire le Pass sanitaire et les mille frontières invisibles qu’il va faire exister autour de nous, de la division entre bon citoyen et marginal co-responsable de l’épidémie. »

Révolution Permanente, courant du Nouveau Parti Anticapitaliste en phase de fonder un nouveau parti, formule cela de la manière suivante dans Pass sanitaire : un autoritarisme made in Macron pour masquer l’échec de sa stratégie vaccinale :

« Lundi 12 juillet, Emmanuel Macron a annoncé l’extension du pass sanitaire à l’ensemble des bars, restaurants, centres commerciaux et trains. A travers cette mesure, Macron cherche à faire peser le poids des restrictions sur les non-vaccinés, créant ainsi des citoyens de seconde zone. Si la généralisation de la vaccination est une nécessité, cette mesure est intrinsèquement autoritaire et liberticide. Pire, loin de créer de la confiance envers la vaccination, elle va accentuer la défiance. »

Tout cela est bien erroné et rate le vrai fond du problème: que le capitalisme a fait le tour de lui-même, que l’État est débordé, que tout se fait au jour le jour… Croire que les couches dominantes, totalement décadentes, peuvent gérer quelque chose, c’est « croire » en un capitalisme qui peut se comprendre lui-même, ce qui est absurde. Le pass sanitaire n’est pas une mesure machiavélique : c’est simplement une réponse objective d’une société essayant de traverser la crise sanitaire. Et loin de parler de mesures liberticides, il faudrait au contraire se plaindre que ces mesures ne le sont pas assez!

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Politique

L’importante allocution du 12 juillet 2021 d’Emmanuel Macron

C’est le moment où le régime est fort.

Comme prévu, l’Autriche a servi de laboratoire et la France va instaurer le principe du pass sanitaire systématique. Pour accéder à un lieu public, il faudra être vacciné, guéri de moins de six mois ou disposer d’un test PCR négatif récent, ce dernier devenant payant. Emmanuel Macron a d’ailleurs été très clair : il faudra vivre avec le virus tout le reste de l’année 2021 et les premiers mois de 2022. Le pass sanitaire s’inscrit donc dans la durée et rien que cela est une terrible défaite pour le capitalisme, qui doit réorganiser la société.

Ce qui va se faire dans la douleur, car on voit mal des Français individualistes accepter les contrôles pour le pass sanitaire dans les trains longue distance ou pour simplement prendre un café.

La crise n’est toutefois pas que sanitaire et ce qui fait l’importance de l’allocution du 12 juillet 2021, c’est le ton offensif d’Emmanuel Macron, qui annonce les luttes de classes à venir. Ce qui attend les travailleurs, c’est la restructuration. La réforme des retraites sera reprise dès que possible et surtout, le président l’a martelé, la valeur « travail » doit être mise au centre de tout. La moitié des entreprises françaises a des problèmes à trouver des travailleurs, cela doit cesser et le moyen capitaliste pour cela c’est de baisser les aides sociales ainsi que les allocations pour le chômage.

Emmanuel Macron en a profité pour insister sur le fait que la France serait le premier pays pour le numérique, qu’il y a beaucoup d’investissements internationaux, bref pour présenter le pays comme un bastion du capitalisme, ce qu’il est par ailleurs.

C’est en ce sens qu’il faut comprendre l’obligation de vaccination pour tous les soignants. Les vacances sont finies : désormais c’est l’ordre capitaliste qui doit primer et plus personne ne doit gripper la machine. La France a été une sorte de « joyeux bordel » comme le dit l’expression bien connue, désormais c’est terminé. Il y a une compétition internationale à assumer et les caractères particuliers des Français doivent s’effacer.

Il faut que le capitalisme français reprenne son cours, coûte que coûte et Emmanuel Macron a même été très optimiste, considérant qu’on reprendrait un cours progressif vers le « plein emploi » – une sacrée fiction – grosso modo d’ici une année. Il est payé pour cela : pour nier la crise, la faire payer aux travailleurs, avancer à marche forcée. En ce sens, le Emmanuel Macron de la dernière année du quinquennat va être très différent du précédent. Il va être directif, parce qu’il sait que le capitalisme attend cela de lui.

Les travailleurs vont prendre très cher. Ils vont payer le prix d’avoir accepté sans broncher qu’il y ait une pluie de milliards qui tombent sur les entreprises pour les soutenir. Ils n’ont pas voulu remettre en cause le capitalisme, considérant qu’ils tiraient leur épingle du jeu, par la consommation, un certain niveau de vie… ils vont s’apercevoir brutalement que le capitalisme leur doit tout… et qu’ils vont devoir payer la crise, en attendant la guerre.

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Société

Suspension d’AstraZeneca: un coup terrible contre la croyance en un retour au monde d’avant

La suspension d’un vaccin censé être généralisé fragilise toute l’organisation gouvernementale de sortie de crise.

Il se passe exactement ce qu’il ne fallait pas. Il a été choisi le marche ou crève et voilà déjà qu’un des supports espérés de cette politique déraille, renforçant la tension hospitalière et modifiant l’ensemble de la savante équation gouvernementale.

Lundi 15 mars, l’Allemagne et l’Italie ont suspendu l’utilisation du vaccin réalisé par le groupe suédo-britannique AstraZeneca, en raison de possibles effets secondaires. La France a fini par suivre. Le Danemark avait déjà procédé à une suspension, suivi de deux pays qui lui sont historiquement liés, l’Islande et la Norvège. La Bulgarie a fait de même le 12 mars, puis l’Irlande et les Pays-Bas le 14 mars.

Mais ce n’est pas le seul problème avec AstraZeneca, puisque seulement le quart des doses promises à la France le premier trimestre a été livré. Le premier ministre Jean Castex a ainsi parlé « des misères que nous font les labos ». En réalité, le vaccin fabriqué aux États-Unis est massivement retenu par ce pays, alors… qu’il n’y est même pas encore validé.

Mais telle est la logique de concurrence qui prime. Les États-Unis procédaient déjà à des achats de masques sur les tarmacs en Chine, alpaguant les avions avant leur décollage vers l’Union européenne… ce sont tout simplement les même conflits d’intérêts qui se reproduisent et d’ailleurs le Royaume-Uni a également une grande influence dans les choix d’ AstraZeneca.

On vit dans le capitalisme, le capitalisme est partout. C’est aussi simple que ça.

Le problème n’est de toutes façons pas là. Le vrai problème, depuis le début, c’est la situation en réanimation. C’est en région parisienne qu’on trouve un quart des patients hospitalisés en réanimation ou soins intensifs. Et il n’y a pas les moyens d’y faire face en tant que tel : lundi 15 mars, en Île-de-France, le taux d’occupation en réanimation était officiellement de 101,7%.

Et, en même temps, c’est la région parisienne que le gouvernement ne veut pas confiner, par démagogie, peur de la révolte, incapacité à mettre au pas les bourgeois et les lumpens.

Avec le couvre-feu de 18 heures d’ailleurs, certaines zones de Paris deviennent la nuit tombée l’équivalent de Taxi Driver, avec un mélange de voyous, de camés, de dealers, etc. Quant aux bourgeois, ils sont en voiture ou en Uber, allant où ils veulent quand ils veulent en soirée, sans contrôle aucun.

Et, de toutes façons, l’Île-de-France est en grande partie une totale catastrophe niveau densité de population, voire de conditions de vie. C’est un véritable échec civilisationnel : trop de gens, trop de n’importe quoi, aucune capacité de mobilisation collective et des services collectifs débordés.

C’est d’ailleurs en Seine-Saint-Denis que le virus circule le plus activement dans le pays. Ce département laissé à l’abandon, peuplé et surpeuplé de gens d’horizons divers avec un manque complet de cohérence et de cohésion, sans aucune conscience sociale et politique pratiquement, avec une pauvreté réelle et des mafias solidement implantées, ne pouvait que partir à la dérive dans une telle situation.

Donc, il faut tout reprendre à la base. Mais les gens en Île-de-France ne le veulent pas, les Français non plus, le gouvernement certainement pas, alors on force, on force, on force, jusqu’à ce que cela craque, et de toutes façons personne ne pense que cela finira vraiment par craquer.

On est passé dans la croyance au niveau d’un pays entier, d’une croyance passive et sans ferveur d’ailleurs, sans dignité aucune. Et cette croyance s’accompagne de déceptions, de protestations contre le Dieu silencieux ou impuissant qu’est l’État.

Craignons le pire, en attendant le meilleur, de la réaction des gens alors que la crise sanitaire ne disparaît pas !

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La lettre ouverte du Hellfest, qui nie la profondeur de la crise sanitaire

Le Hellfest de Clisson en Loire-Atlantique est l’un des plus gros événements culturels français, alors quand ses organisateurs publient une lettre ouverte à la ministre de la Culture, cela a forcément beaucoup d’écho. Ce qui y est dit est à l’image du monde du spectacle et de la fête en France, qui nie la profondeur de la crise sanitaire et refuse les enjeux de notre époque.

La lettre du Hellfest à la ministre de la Culture était rendue publique mardi 19 janvier, alors que partout en France des manifestations du monde du spectacle et de la fête étaient à nouveau organisées, à l’appel des syndicats et associations du secteur.

Tout cela a beaucoup de légitimité, car il y a en effet une situation difficile, inédite, et des parcours individuels qui se retrouvent stoppés net sur le plan professionnel ou artistique, en raison de la crise sanitaire.

Le problème par contre, c’est qu’il est fait comme si… Comme si la crise sanitaire n’était pas vraiment là, ou pas si grave, comme si tout était de la faute du gouvernement, qui ne prendrait pas les bonnes décisions, qui interdirait trop, ne donnerait pas assez d’argent, etc.

Bien sûr, il est juste et nécessaire de réclamer le maintien des droits sociaux des intermittents du spectacle, des garanties pour l’emploi et la continuité des activités, etc. Pour autant, il n’est pas possible de faire comme si le monde n’avait pas changé, comme si tout allait revenir comme avant… Et surtout comme si l’humanité savait déjà où elle va.

C’est en tous cas ce que fait le Hellfest, qui se pose comme victime en réclamant de manière tout à fait populiste à ce que le gouvernement lui donne une indication précise à propos de cet été et des possibilités culturelles. La démarche est d’autant plus populiste que les organisateurs du Hellfest se la joue « indépendants », alors qu’ils relèvent largement d’une grande machinerie commerciale, le dos étant sciemment tourné à la culture alternative d’origine, au profit d’un marketing et d’un merchandising très pointu.

Les organisateurs du Hellfest savaient très bien que cela serait très compliqué pour le mois de juin, mais ils ont fait le choix de foncer tête baisser et d’organiser coûte que coûte l’édition 2021. C’est un choix, mais c’est un choix qui n’est pas assumé, alors il est demandé à l’État d’assumer à leur place l’échec à venir. Il est ainsi posé la question à la ministre :

« avec une pression hospitalière moindre, combinée à une période estivale où l’on sait que ce virus est moins virulent, est-il concevable d’envisager la tenue de nos mégas événements ? Ou bien, devons-nous considérer dès maintenant que tant qu’une immunité collective ne sera pas atteinte, il sera impossible de remettre en place des événements accueillant des dizaines de milliers de spectateurs ? ».

Pourtant, les organisateurs du Hellfest savent très bien que le gouvernement est entièrement débordé par la crise sanitaire et qu’il n’a absolument aucune visibilité ne serait-ce que sur les semaines à venir. Roselyne Bachelot la ministre de la Culture, avec toute la bonne volonté du monde, peut bien faire toutes les annonces qu’elle souhaite à propos des festivals cet été, la réalité est qu’elle n’en sait rien. Et personne n’en sait rien, car la situation est très grave, et menace chaque jour de s’emballer encore plus.

Le Hellfest, en réclamant des garanties qui sont impossibles à obtenir, est donc complètement à côté de la plaque. Ou alors c’est la figure tragique de l’entrepreneur à la française, qui demande des sous à un État qu’il rejette normalement. Et cela alors que l’humanité est à un tournant, car la crise écologique a déclenché une crise sanitaire majeure…

Voici la lettre du Hellfest à la ministre de la culture :

« Madame la Ministre de la Culture,

Nous commencerons par cette célèbre citation : « Il faut espérer le meilleur et se préparer au pire : c’est la règle. »Nous avons été très attentifs à vos dernières interventions médiatiques de ces derniers jours, et nous vous citons : « On ira dans les festivals cet été », « on a du temps », « croisons les doigts ».

Madame la Ministre, excusez notre ton quelque peu familier mais de notre côté on ne croise pas les doigts, on serre les fesses ! NON nous n’avons pas le temps et il est urgent que vous en preniez conscience.Un événement comme le nôtre nécessite une année de préparation assumée par de nombreux intervenants. Vous conviendrez aisément qu’il n’est pas possible d’accueillir plus de 60 000 personnes par jour pendant 3 jours, dans une petite ville de 7 000 habitants en ne commençant les préparatifs qu’un ou deux mois avant la date de celui-ci.

Il ne s’agit pas d’amateurisme.Nous avons vivoté durant les 10 derniers mois, sous perfusion, grâce aux mesures de chômage partiel mises en place par votre gouvernement. Seulement voilà, les mois ont passé depuis l’annulation de notre événement au printemps dernier, et l’échéance de l’édition reportée approche à grands pas. Du 18 au 20 juin prochain doit se tenir, sur la commune de Clisson en Loire-Atlantique, le plus important (et coûteux !) festival de musiques actuelles de France.

Cela va vous surprendre mais il ne s’agit pas d’un événement où viennent se produire les plus grandes stars de variété française, mais bien d’un festival faisant honneur aux musiques dites « extrêmes » (Hard rock, Punk Rock, Rock’n’roll, Metal etc…). Surprenant n’est-ce pas ? Ces mêmes musiques qu’on ne voit ni n’entend à la télévision et auxquelles la très officielle cérémonie des Victoires de la Musique ne semble toujours pas prêter attention (mais c’est un autre débat, nous vous l’accordons).

Afin d’être prêts pour accueillir ce grand raout musical et nos fidèles festivaliers amateurs de gros son et de houblon, nous avons choisi de prendre le risque de nous remettre au travail à 100% depuis le 4 janvier dernier, nous privant ainsi de toutes les aides existantes que votre gouvernement a mis en place. Nous n’avons malheureusement pas d’autre choix si nous souhaitons pouvoir offrir à notre public le festival qu’il mérite.Ces mêmes festivaliers qui pour 99,75% d’entre eux ont décidé de conserver leur ticket de l’édition 2020 par solidarité envers le Hellfest, et qui nous ont accordé leur confiance pour un retour en 2021.

Seulement voilà, remettre en route une telle machine coûte cher, très cher. Il va donc falloir que nous acceptions l’idée que chaque mois qui passe à partir de maintenant nous coûte plus de 250 000€ en salaires, charges fixes et autres remboursements d’emprunts. Et ce sans savoir si le festival aura lieu. Quelle structure accepterait de dépenser de telles sommes sans avoir une garantie de résultat ? Sans avoir l’assurance que tout cet argent n’est pas jeté par les fenêtres ?

A contrario de nombreuses autres associations culturelles (et parfois même de grands groupes cotés en bourse…*suivez notre regard*…), nous n’avons pas le privilège de percevoir de larges subventions publiques pour l’organisation de notre événement (0,1% de notre budget). Nul doute, si la saison estivale est de nouveau sinistrée, que bon nombre de ces structures aidées par l’argent public réussiront à s’en sortir, et c’est une bonne chose. Ce n’est malheureusement pas notre cas, tout ce qui sera perdu sera perdu.

Il nous sera sans doute plus facile d’espérer gagner au loto pour couvrir nos pertes que d’attendre une aide providentielle de l’État qui n’arrivera probablement jamais… Étrange paradoxe : le Hellfest, grâce à la générosité et à la solidarité de son public, est le seul événement à avoir réussi à collecter 200 000€ de dons à destination du CHU de Nantes lors du premier confinement. Et pourtant, il sera celui qui percevra le moins d’aides de l’Etat ! Nous aurons ainsi plus contribué aux manques de moyens de nos hôpitaux, que nous n’avons reçu d’aides. Cocasse, n’est-ce pas ?

Ne vous méprenez pas Madame la Ministre, nous ne jalousons aucunement ces structures aidées par les fonds publics. Nous sommes même extrêmement fiers d’avoir réussi à monter un événement élu 3 fois de suite « meilleur grand festival de France » tout en restant indépendants et avec pour seule force le soutien indéfectible des milliers de fans, de bénévoles, d’intermittents, de prestataires et de partenaires privés. Cela nous permet, comme vous pouvez le constater dans ce courrier, de garder notre liberté de ton et de parole.Donc encore une fois Madame la Ministre, NON nous n’avons PAS le temps. Notre association à but non lucratif qui gère le plus important budget de tous les festivals de musiques actuelles en France (25 millions d’euros) est en danger.

Le flou qui règne l’amène inexorablement vers une catastrophe économique que les centaines de milliers de fans du Hellfest, ainsi que des centaines de prestataires auront du mal à “digérer” si vous n’intervenez pas rapidement.Tout comme vous, nous aspirons à retrouver une vie culturelle foisonnante. La France est une terre de festivals et vous avez pu vous rendre compte l’an passé combien nos événements sont ESSENTIELS au bien-être d’un nombre important de Français.

Oui, les spectacles vivants sous toutes leurs formes sont essentiels, ils ne sont pas de simples produits !

À la lecture du plan de vaccination que votre gouvernement souhaite mettre en place, il apparaît qu’un grand nombre de personnes dites « à risque » sera vacciné à l’aube de l’été 2021, répondant ainsi en grande partie à la problématique de la saturation des services hospitaliers français. L’effectivité de ce plan de vaccination est de votre responsabilité, les acteurs de la culture n’ont pas à souffrir des péripéties et des aléas logistiques.Madame la Ministre, notre question est donc la suivante : « avec une pression hospitalière moindre, combinée à une période estivale où l’on sait que ce virus est moins virulent, est-il concevable d’envisager la tenue de nos mégas événements ? Ou bien, devons-nous considérer dès maintenant que tant qu’une immunité collective ne sera pas atteinte, il sera impossible de remettre en place des événements accueillant des dizaines de milliers de spectateurs ? ».

La réponse que nous attendons de vous n’est pas de savoir si les festivaliers pourront assister l’été prochain à de « vrais-faux » festivals à jauge réduite, en tout assis, en zone verte et en respectant un couvre-feu quel qu’il soit. Nous voulons savoir si 60 000 personnes par jour pourront venir headbanger debout, en plein air et sans distanciation sociale, en écoutant du bon vieux rock’n’roll !

Il nous semble qu’un certain nombre d’arguments se doivent d’être examinés urgemment avec l’ensemble des organisateurs de festivals de grande ampleur comme le nôtre, afin que des décisions soient prises, quelles qu’elles soient. Elles permettront de mettre un terme à cette insupportable situation d’attente, qui ne peut plus durer, au risque de mettre en péril la pérennité des associations indépendantes comme la nôtre ainsi que celle de nombreux intermittents, artistes et prestataires.Ces arguments, quels sont-ils ?

Nos festivals doivent se dérouler en plein air et en plein été. La communauté scientifique s’accorde à dire que ces 2 éléments sont des atouts certains pour limiter la propagation du virus. Notre pays dispose d’un réseau important de lieux capables de tester rapidement et facilement les personnes (pharmacies, médecins traitants, laboratoires etc…). N’est-il pas possible de proposer aux festivaliers de se présenter munis d’un test négatif de moins de 48/72H comme cela est pratiqué pour certains voyages aériens ?

Avec un climat favorable, une organisation en plein air, une pression hospitalière moins forte et un test préventif supplémentaire, le curseur « bénéfices-risques » n’aurait-il pas une chance de s’inverser ?Sur le plan économique, nos festivals sont d’inestimables moteurs d’activités pour les territoires qui les accueillent. L’hôtellerie, la restauration, les bars, et autres commerces qui rayonnent autour de nous sont autant de secteurs qui souffrent énormément de cette crise et qui attendent beaucoup de la tenue de nos événements. Pour ne parler que du territoire du vignoble nantais, les retombées sont estimées à plus de 25 millions d’euros.

Le courage est de mettre tout en œuvre pour permettre la reprise de la vie, mais sûrement pas de laisser une situation se dégrader au point d’aboutir à son interdiction.Nous n’avons pas la prétention d’être des spécialistes du domaine médical et nous nous garderons bien d’affirmer qu’une solution à la tenue des grands événements est possible dès cet été. Nous sommes des organisateurs responsables et nous comprenons parfaitement les enjeux qui sont les vôtres. Seulement, il nous semble que protéger ne se résume pas qu’à interdire.

Par cette lettre, Madame la Ministre, ce n’est pas seulement notre association qui vous supplie d’agir, c’est tout un territoire, des milliers de bénévoles, des centaines d’intermittents, de musiciens, un nombre incalculable de prestataires de services et d’entreprises partenaires.Veuillez, Madame la Ministre, recevoir nos plus sincères salutations Toute l’équipe de Hellfest Productions »


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Culture

La situation du monde du spectacle et de la fête face à la crise sanitaire

La crise sanitaire bouleverse profondément la société et cela concerne particulièrement le monde du spectacle et de la fête, qui se retrouve littéralement broyé par la situation. Il y a une colère face à cela, qui est en partie juste, mais qui n’est malheureusement pas à la hauteur. L’ampleur de la crise est nié, minimisé, alors qu’il y a en fait un moment historique tout à fait nouveau ; rien ne sera plus jamais comme avant.

À part quelques exceptions durant l’été, qui relevaient en général du bricolage, plus rien n’est possible depuis presque un an maintenant, et forcément cela fait très mal. Les clubs, salles de concerts, théâtres, cinémas, festivals, sont à l’arrêt complet, sans aucune perspective de réouverture avant au moins le printemps 2021. Et encore, si cela se fait, ce sera de manière altérée.

Il y a forcément pour les artistes et les intermittents du spectacle, les serveurs et les programmateurs de salle ou de festival, un goût amer face à la ruée dans les magasins, ou bien l’ouverture des lieux de cultes, tandis qu’eux sont mis de côté.

Cette question des lieux de cultes est d’ailleurs particulièrement prégnante, puisqu’il est considéré dans le monde de la culture que celle-ci relève autant d’un besoin essentiel que la religion.

C’est là tout à fait vrai, et en même temps tout à fait faux, car typique d’une erreur dans la façon de considérer la crise sanitaire actuelle et ne de pas saisir son enjeu.

C’est vrai, car on ne vit pas sans culture, sans art. Mais il est erroné de croire que la culture et l’art ont cessé d’exister avec les mesures sanitaires, alors que pour les religions par contre, et particulièrement pour le catholicisme, il n’y a pas de foi possible sans communion, et donc sans messe à l’Église.

Ce sont là deux choses tout à fait différentes. On peut se passer de faire la fête et d’aller au théâtre tout en menant une vie culturelle à la maison, même avec un confinement strict, alors que les croyants ne peuvent plus vraiment vivre sans aller à l’Église. C’est le principe de l’Eucharistie, où l’hostie qu’on mange… est vraiment le corps du Christ, pour le catholicisme romain.

Il ne s’agit pas ici de défendre le catholicisme romain et sa croyance erronée en le ciel avec un Christ qu’on mange le dimanche, mais de se servir de cet exemple pour bien de comprendre ce qui se joue vraiment pour la culture. L’État en France est une grande machinerie administrative et son essence n’est pas démocratique. Néanmoins, l’État n’existe pas de manière abstraite au dessus des classes sociales et cela fait que son fonctionnement répond aux contradictions de la lutte de classes.

Cela donne la situation suivante :

1) l’État défends principalement les intérêts de la bourgeoisie (donc du capitalisme), car c’est la classe dominante (et le système économique dominant) ;

mais,

2) il doit prendre en compte la pression populaire (donc prendre des mesures sanitaires), pour éviter la colère des classes populaires (qui ne supportent pas l’attentisme face au covid-19).

Dans tous cela, le monde du spectacle et de la fête se retrouve mis de côté, avec son sort réglé administrativement, avec une réouverture sans cesse renvoyée aux calendes grecques.

Pour la bourgeoisie (donc le capitalisme), c’est acceptable et il est considéré que cela peut être supporté économiquement ; Jean Castex explique alors qu’il suffit d’accorder une rallonge de 35 millions d’euros au ministère de la Culture, en plus des mesures pour maintenir sous respiration artificielle les travailleurs et entreprises du secteur.

Pour les classes populaires, c’est également tout à fait acceptable. Ce qui compte principalement est d’endiguer l’épidémie sur le territoire et cela vaut bien, pour éviter au maximum le brassage de la population, la fermeture des clubs, salles de concerts, théâtres, cinémas, festivals, etc.

Cela n’a rien d’absurde d’ailleurs, car forcément l’ouverture des lieux de culture amène la population à se concentrer, se mélanger, et faire circuler le virus, quelque soient les mesures sanitaires qui sont prises.

On peut tout à fait regretter que les classes populaires acceptent cela tout en ne se révoltant pas contre le fait que les magasins de vêtement ou d’électro-ménager soient ouverts, alors qu’ils sont tout autant des lieux de brassage qu’on pourrait éviter.

Pour autant, on ne peut pas se contenter de dire « le spectacle et la fête doivent reprendre coûte que coûte », « l’État a tort sur toute la ligne », « la crise sanitaire est un prétexte pour s’en prendre à la culture », etc.

Certains pratiquent la fuite en avant ouverte, comme les nihilistes anti-sociaux qui ont organisé une free party en Ile-et-Vilaine le 31 décembre. C’est ce que dit également le manifeste petit-bourgeois « CULTURE 4 LIBERTY », qui appelle à des rassemblements le 16 janvier 2021, en marge des manifestation contre le projet de loi « sécurité globale ».

Certains le font à moitié, en ayant une tentative de réflexion sociale, comme la CGT spectacle qui organisait ces derniers jours des Assemblées générales en ligne, pour dire « Madame Bachelot, Nous voulons travailler », et qui envisage une journée de manifestions le 19 janvier (faisant suite à celle du 15 décembre dernier).

Toutefois, dans les deux cas, c’est largement à côté de la plaque, et en tous cas indigne de ce que doit être l’art et ce que peuvent être les artistes. Trop souvent, le monde la culture vit dans une bulle, en dehors de la société et de la marche du monde, dans un milieu auto-centré et auto-référencé.

Or, la culture authentique n’existe pas sans les classes populaires, sans être portée par les classes populaires. Et en l’occurrence, l’actualité populaire, c’est la crise sanitaire, qui est le reflet d’une immense crise écologique, et qui annonce au passage une crise économique de grande ampleur.

L’actualité, qu’on le veuille ou non, n’est pas d’aller au musée ou de faire la fête en boîte, mais d’assumer que l’humanité est à un tournant et que le covid-19 est un symbole de ce tournant. C’est l’aspect principal et il faut avoir le sens des priorités.

La situation est grave et douloureuse pour les artistes et les acteurs du spectacle et de la fête. Mais ce serait une erreur de croire que tout va devenir comme avant en se contenant de demander à l’État d’accélérer les choses par une meilleure « gestion » et surtout d’allonger la monnaie.

Les artistes, et le monde de la culture en général, n’avanceront qu’en assumant l’ampleur de la tâche à laquelle est confrontée l’humanité. L’humanité doit faire face à une pandémie dramatique, qui n’est en même temps qu’un aspect minuscule d’une crise écologique absolument gigantesque !

Alors, soit il y a l’art et le monde de la culture pour donner de la dimension à tout cela, pour aider l’humanité à se tourner vers la nature et saisir les problèmes à bras le corps, dans une perspective positive et constructive. Soit chacun reste campé sur ses positions et se rattache au « monde d’avant », et alors les années à venir seront celles d’une immense chaos… au milieu d’une guerre mondiale pour le repartage du monde.

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Crise sanitaire à la mi-novembre 2020: exercice d’autosatisfaction du gouvernement

Jeudi 12 novembre, le premier ministre a fait un premier point depuis l’instauration du semi-confinement. Aucun durcissement n’est pratiquement à l’ordre du jour, et le gouvernement a expliqué peu ou prou qu’il a la situation en main… Ce qui n’est évidemment pas le cas. La France n’est toujours pas à la hauteur pour faire face à la crise sanitaire.

De manière très solennelle, le premier ministre Jean Castex s’est adressé au pays en expliquant :

« Adopter des mesures difficiles constitue un crève-coeur, mais il est de ma responsabilité de le faire, et de vous protéger contre le virus et ses ravages »

C’est habile de sa part, car il se place ainsi comme celui qui en fait éventuellement « trop », afin d’éviter les critiques en inaction, ainsi que d’éventuelles poursuites judiciaires à termes. Pourtant, il est évident que les mesures en question sont loin d’être suffisantes face à l’explosion de l’épidémie de covid-19.

Ce qui se passe est très simple. La France, comme beaucoup d’autres pays équivalents, a abordé avec une très grande légèreté le déconfinement de mai, puis a tout bonnement laissé s’installer la deuxième vague épidémique, pour procéder maintenant à des calculs de boutiquiers afin de gérer la casse, en cherchant un taux de pertes humaines qui serait « acceptable »…

Les chiffres qui ont été rappelés sont pourtant très durs, malgré la généralisation du port du masque et des mesures barrières depuis la rentrée : une hospitalisation toutes les 30 secondes et une admission en réanimation toutes les trois minutes. Cela donne pour la journée de 12 novembre, selon les chiffres officiels, 418 décès liés au covid-19 et 386 nouvelles admission en réanimation.

Mais tout est sous contrôle a-t-il été prétendu, car le ministre de la santé a dégagé des nouvelles places en réanimation, tout en expliquant qu’il allait renvoyer à la maison des personnes sous respiration artificielle. Le gouvernement prétend pouvoir gérer et même que « le pic de la deuxième vague pourrait être atteint en début de semaine prochaine ».

De la sorte, il est fait miroiter une première série d’allégement des mesures pour le premier décembre, avec la possibilité de « passer Noël en famille ». C’est invraisemblable, et il faudra vraiment relire ces lignes d’ici les prochaines semaines, car bien sûr le virus ne va pas disparaître pas enchantement à l’amorce de l’hiver, au contraire.

Si la situation épidémique s’améliore dans les prochains jours, ce qui est possible mais loin d’être évident, ce qu’il faudra, c’est ne surtout pas relâcher la pression, bien au contraire. Au risque sinon de voir l’épidémie repartir de plus belle.

Il faudrait d’ores et déjà aller beaucoup plus loin, si l’on voulait véritablement endiguer l’épidémie, avec au moins un confinement équivalent à celui du mois de mars dernier. Mais la pression du capitalisme est trop forte et le gouvernement n’a qu’une hâte, c’est de pouvoir relâcher la pression qu’il est obligé de mettre sur le capitalisme justement.

Il est bien aidé en cela d’ailleurs par la Droite, ainsi que les populistes tel Jean-Luc Mélenchon qui peu après l’intervention du gouvernement a expliqué dans une émission que le confinement était une mesure « du Moyen Âge » et qu’il fallait lui trouver des alternatives, tout en rouvrant les petits commerces et les activités culturelles. On nage ici en plein délire, mais c’est tout à fait conforme aux mentalités dans le pays, avec des Français qui pour la plupart ne semblent toujours pas avoir compris l’ampleur de la situation et dont la préoccupation est l’achat de leurs cadeaux de Noël ainsi que l’organisation du réveillon du premier de l’An.

C’est pour cela que les établissements scolaires sont encore ouverts et le resteront, contre tout bon sens sanitaire, particulièrement en ce qui concerne les lycées. «  La présence à 100% des élèves reste souhaitable » au lycée a affirmé le ministre de l’Éducation, avec au moins 50 % du temps en présentiel pour les autres cas. Il ne faudrait surtout pas empêcher les parents de se rendre au travail, et d’ailleurs eux-mêmes n’imaginent pas ne pas aller travailler.

Si le gouvernement prétend qu’il va pouvoir mettre encore un peu plus de pression pour obliger au télétravail, force est de constater qu’un nombre ahurissant d’activités économiques absolument pas essentielles ont encore lieu. Par exemple, des démarcheurs pour la fibre optique installés dans un quartier peuvent se rendre chez les gens pour leur suggérer le raccordement, ou encore les livreurs de repas (souvent sans papiers et sans couverture sociale) exercent leur ballet à scooter en continue dans les grandes villes, etc. Il en est de même pour les sorties, avec des fraudes aux attestations massives et énormément de gens se rendant les uns chez les autres, etc.

Le secrétaire national du PCF Fabien Roussel a tout à fait raison de constater après l’intervention du premier ministre :

« Rien de neuf dans le confinement « léger » du gouvernement. Les hôpitaux flambent, les reports de soins continuent, avec des conséquences mortifères, les salariés aux travail resteront aussi nombreux, les « petits » continueront de souffrir… mais on continue. »

Néanmoins, ce qu’il faut préciser, c’est que la pression populaire est extrêmement faible en faveurs des mesures sanitaires. En fait, le capitalisme est tellement puissant et tellement présent dans les mentalités en France que le pays continue de regarder ailleurs. Si la peur avait pu l’emporter lors de la première vague en mars, on a l’impression en novembre que le pays s’est accoutumé au virus ; le ministre Jean Castex peut alors se présenter comme quelqu’un de très dur dans sa gestion de la crise sanitaire, alors qu’il est en fait en dessous de tout.

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Guerre

Comment la crise emporte l’empire américain

Le peuple américain produit une vaste culture, mais il est emprisonné et aliéné par un capitalisme d’une terrible brutalité, avec en son cœur un complexe militaro-industriel et carcéral. Avec la crise s’étant ouverte en 2020, il va à un destin similaire à celui de l’URSS.

Dans les années 1970-1980, l’URSS était la principale force militaire mondiale, d’une incroyable agressivité, avec un complexe militaro-industriel engloutissant les richesses et réformant tout le pays pour le placer sur la ligne de la mobilisation générale pour l’expansion. De l’invasion de la Tchécoslovaquie en 1968 à celle de l’Afghanistan en 1979, en passant par le soutien à l’invasion vietnamienne du Cambodge, l’URSS a mis tout en œuvre pour s’imposer mondialement.

On sait ce qu’il en advint. Et c’est pareil pour les États-Unis. La crise a montré que ce pays, dont le peuple est entreprenant, d’une grande richesse dans ses activités… est en déclin parce que sa base est totalement pourrie. Le personnel politique est totalement corrompu depuis un siècle, un long siècle où les États-Unis ont pu asseoir une hégémonie mondiale, sans contestation intérieure à part dans les années 1960-1970, et encore seulement dans certains secteurs, et en tout cas certainement pas de la part des ouvriers.

Gouverneurs vendus aux grandes entreprises, mafias largement présentes dans la société, ultra-violence avec les gangs et un immense système carcéral, complexe militaro-industriel omniprésent… le rêve américain est un cauchemar.

Les Etats-Unis, bastion du capitalisme modernisateur

Depuis l’écrasement du mouvement ouvrier par l’ultra-violence au début du 20e siècle, les États-Unis ont été le bastion du capitalisme se modernisant en permanence, systématisant l’expansion à de nouveaux domaines. Le travail à la chaîne des usines d’automobiles ne fait d’ailleurs que prolonger les immenses productions de viande qui forment l’un des premiers, si ce n’est le premier maillon d’une longue chaîne infernale.

Consommation élargie, aliénation élargie, soumission à cette aliénation au nom de l’acceptation d’un mode de vie beauf… Les ouvriers se sont fait entraînés dans un processus les brisant physiquement et moralement. Les États-Unis ont été le modèle de l’asservissement des larges masses par la consommation, de leur propre participation à leur exploitation.

Pense-t-on alors réellement que l’alternative Joe Biden ou Donald Trump change quelque chose avec un tel arrière-plan ? Comme si Barack Obama avait lui-même changé quoi que ce soit au fait que les États-Unis sont une puissance avec des bases militaires dans le monde entier, avec un capitalisme présent partout, le tout avec une démesure impériale !

Obama ou Trump, il y a Guantanamo. C’est cela la réalité, le reste est de la poudre aux yeux. En France on a également régulièrement dénoncé tel ou tel président américain en les traitant d’idiots, comme pour l’invasion de l’Irak. C’est là ne rien comprendre au fait que les États-Unis défendent leurs intérêts et que la question n’est pas l’intelligence ou la stupidité. Ce ne sont pas les présidents qui décident, mais des stratégies élaborées, notamment au Pentagone, que les présidents accompagnent.

La crise emporte les Etats-Unis

Tout cela apparaît d’autant plus clairement que la crise est en train d’emporter le capitalisme en général et l’empire américain en particulier. La crise a provoqué la fracturation du pays, donnant naissance à un antagonisme jamais vu depuis cent ans. Pour la première fois depuis cent ans, il y a deux visions du monde s’affrontant de manière frontale, reconnue, au lieu d’une pacification complète sur la base de la consommation généralisée et de la Bible, de l’expansionnisme et de l’aliénation.

Les États-Unis ne peuvent plus se sortir de cette situation. Leur seule orientation est de toutes façons l’affrontement avec la Chine, une superpuissance en devenir ayant l’ambition de prendre la place de numéro 1 pour les années 2030-2035. Profitant d’un capitalisme d’État exerçant une pression fasciste sur les gens, les ambitions chinoises sont agressives et militarisées, ouvertement conflictuelles malgré un discours pseudo-tiers-mondiste.

Les États-Unis sont donc obligés d’être toujours plus crispés, toujours plus agressifs, pour maintenir leur place hégémoniste dans le monde. Cela va accentuer leur effondrement : c’est la fin de l’empire américain.

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Opération islamiste meurtrière à Vienne: la crise d’une époque

L’attentat de l’État islamique dans la capitale autrichienne reflète une fuite en avant commune à toute une civilisation, qui cherche à se survivre à elle-même, à se régénérer en forçant. C’est l’agonie d’un mode de vie, d’une civilisation, soulignant la nécessité de dépasser au plus vite ce nihilisme menant à l’abîme.

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L’opération islamiste à Vienne, visant à réaliser un massacre dans les rues du centre où se trouvent les bars (dans le même esprit qu’à Paris en 2015), a blessé 23 personnes, dont plusieurs grièvement, et fait quatre morts. L’État islamique, parallèlement aux campagnes anti-françaises de type « anti-mondialistes » portées par la mouvance d’Al Qaïda, se rappelle à l’opinion publique avec sa vision apocalyptique du monde.

Avec la crise sanitaire, on a toujours plus l’impression de se retrouver dans un film, mais pas le bon. Il y a une pression dans l’atmosphère qui indique qu’on connaît vraiment une période historique, de grand changement. On n’a comme perspective pourtant pour l’instant que les tourments.

Un assassin islamiste encore une fois produit par la société

Naturellement, le pays se retrouve traumatisé et fait face à un fait très simple : l’assassin, tué par la police, est né à Vienne ; d’origine de Macédoine (du Nord), il avait voulu rejoindre l’État islamique et avait été condamné à 22 mois de prison, étant libéré au bout de quelques mois en raison de son jeune âge alors.

On a ce schéma, bien connu en France, d’une production de romantiques réactionnaires idéalisant un paradis perdu pour combiner nihilisme assassin et obscurantisme. Si la France tient d’ailleurs le premier rang dans les départs pour « l’État islamique », l’Autriche tient la quatrième place, avec une scène islamiste très active.

Elle repose sur l’immigration, mais une immigration récente, pas vraiment celle qui est turque et d’ailleurs deux jeunes Turcs sont intervenus pour amener un policier blessé à une ambulance, ainsi que mettre une autre personne à l’abri. L’un deux a été blessé et sur Instagram ils se sont empressés d’envoyer un message de solidarité et de fraternité.

« Un petit tir, mais pas d’inquiétude je vais bien, j’espère que la police [=le policier] s’en sortira bien, nous aimons notre pays l’Autriche, la terreur n’a pas de religion n’a pas de nation, peu importe si juif, chrétien, musulman nous nous serrons les coudes, pray for vienna »

L’esprit démocratique face à la réaction

La question est toujours de savoir si l’esprit démocratique peut faire face au populisme, au racisme, à la démagogie nationaliste… qui profitent de ce genre d’action. Il faut un peu de temps pour voir ce qu’il en est, mais l’Autriche est comme l’Allemagne : ces vingt dernières années, la société a radicalement changé, la jeunesse a connu des mélanges et l’ouverture vers le monde. C’est très important, car l’esprit démocratique a besoin qu’aucune digue ne saute.

Il semble qui plus est que l’assassin ait agi seul : on est a priori dans la situation d’un pèlerin du néant, qui par le nihilisme a voulu donner un prétendu sens à sa vie. Cela a ceci de rassurant qu’il n’est pas l’expression directe d’un réseau. En même temps, les islamistes représentent un monde révolu, comment pourraient-ils produire des gens fiables, organisés, rationnels ? S’ils en produisaient, ce ne sont pas des actions de ce type qui auraient lieu. On est vraiment dans le nihilisme, avec un fou furieux courant les rues d’une ville pour tuer, comme dans le jeu GTA.

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Il faut ainsi savoir prendre de la hauteur et voir comment le capitalisme, qui n’a plus de perspectives, produit de la consommation nihiliste et du nihilisme consommateur, tout en détruisant la planète et nous précipitant dans la guerre. Si on veut un autre avenir… il faut savoir poter le nouveau !

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Hommage à Samuel Paty… et attaque coordonnée fanatique à Vienne

La crise de civilisation s’impose partout. Alors qu’en France l’hommage à Samuel Paty s’est tenu sobrement mais avec dignité, une attaque coordonnée islamiste frappait Vienne. L’époque est prise de spasmes.

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C’est une bien belle lettre de Jean Jaurès que le gouvernement a fait lire par les enseignants à leurs élèves, à l’occasion de l’hommage à Samuel Paty, l’enseignant assassiné par un fanatique islamiste. Cela souligne la force de la question de l’éducation dans notre pays, une véritable tradition nationale avec, surtout, la figure de l’enseignant visant à élever le niveau des élèves sur le plan moral. L’engagement du professeur qui veut bien faire, sans briser les esprits mais en les faisant avancer, est quelque chose de connu et d’apprécié dans notre pays.

Non pas que tous les professeurs soient ainsi, très loin de là, ni que l’Ecole telle qu’elle existe soit agréable et épanouissante. Mais justement il y a quelques figures émergeant toujours, ici et là, faisant qu’on se souvient avec émotion de tel ou tel enseignant, qui s’est donné pour les élèves. La lettre de Jean Jaurès est donc bien choisie et on sait d’ailleurs à quel point Jean Jaurès fut un ardent républicain et un orateur extraordinaire. La finesse de ses propos, le choix méticuleux des termes et du ton, la vivacité dans la répartie… font qu’il était pratiquement un représentant de l’esprit français.

Jean Jaurès était, également et évidemment, un socialiste, de l’aile droite historiquement, ce qui ne change rien au fond car les socialistes sont en France en général des républicains de Gauche, éloignés des traditions pro-marxistes social-démocrates allemande, russe, autrichienne, bulgare, etc. On ne peut donc guère parler de récupération par le gouvernement et de toutes façons la question n’est pas du tout là. Ce qui compte, c’est de voir l’honneur du professeur, du passeur de savoir face au fanatisme.

On doit ici qualifier d’abject les diverses critiques anti-gouvernementales cherchant la petite faille pour un populisme vraiment déplacé. Profiter d’un tel événement pour accuser le ministre de l’Éducation de prôner une réforme du baccalauréat que Jean Jaurès aurait réfuté, comment dire… C’est absurde. Les terribles attentats dans la capitale autrichienne montrent d’ailleurs où est le problème.

Les attaques coordonnées dans le centre de Vienne en Autriche, en différents endroits, visant à tuer, à blesser, à terroriser, montrent que le mal est profond, qu’à côté de la machinerie capitaliste détruisant la planète on a des crises de folies réactionnaires meurtrières.

Le fanatisme islamiste est le produit d’une époque sans cœur ni esprit, où tout esprit constructif, démocratique, s’efface devant un marché capitaliste tout puissant accompagné de poches de romantismes ultra-réactionnaires idéalisant un passé romancé. Comment affirmer la Culture, la Connaissance, la Démocratie dans un tel cadre historique ? Là est le défi de notre époque et évidemment, seul le Socialisme peut porter cela.

Lire également : La lettre de Jean Jaurès aux instituteurs et institutrices

Le drapeau de la Démocratie, du peuple organisé au niveau de la société, de l’État, est la condition impérative pour sortir d’une crise de civilisation toujours plus folle. La peur et la réflexion se combinent dans des situations nouvelles, inquiétantes et d’envergure. Il faut contribuer à être à la hauteur des questions, il faut savoir souligner les bonnes réponses. Il faut être là. Qui se met de côté dans une telle époque n’a pas saisi ce qui se passe – mais comment ne peut-on pas le saisir ?

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Politique

agauche.org, prêt contre la Droite

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Le passage en catastrophe du premier ministre Jean Castex sur TF1 le premier novembre en dit long sur la vaste agitation des petits commerçants et, à l’arrière-plan, la vague de droitisation en cours. L’attentat de Nice a représenté un vrai tournant, dans le sens où la Droite a réussi à s’unir dans une offensive généralisée, alors qu’auparavant la dispersion prédominait.

C’est là un effet du travail en profondeur de gens aussi divers que Marion Maréchal, le dessinateur Marsault, les gilets jaunes, le youtubeur « le raptor dissident », Xavier Bertrand, etc. C’est l’idée d’une Droite « populaire », à la fois rétrograde et de masse, privilégiant les comportements beaufs afin de toucher le plus de gens possibles.

Un tel projet a été bien aidé par la gauche « postmoderne », qui tombe toujours plus dans la caricature monomaniaque obsessionnelle (avec les migrants et les LGBTQ) et représente du pain béni pour une telle Droite. Mais ce projet a été aidé aussi par les « populistes » comme ceux de La France Insoumise qui rejettent le parcours du mouvement ouvrier, ainsi que la lutte des classes.

La crise sanitaire, économique… mais aussi politique, institutionnelle, culturelle, et finalement tout ce qu’on voudra, donne à cet arrière-plan une dimension terrible. On fonce vers le fascisme et la guerre : quand on est de gauche, dans la tradition historique de la Gauche, on ne peut pas ne pas le voir. Il faut donc s’y opposer, avec les meilleurs outils.

agauche.org est un tel outil, parce que c’est un média qui allie la régularité à une démarche multithématique. C’est une démarche essentielle pour aborder la vie quotidienne, avec tous ses aspects, et s’appuyer sur les fondamentaux et non pas les projets électoraux et l’approche syndicale. On ne dira jamais assez à quel point les élections et les syndicats sont les Charybde et Scylla de la Gauche française.

Ce ne serait pas suffisant toutefois s’il n’y avait pas la démarche de réfuter le libéralisme économique et le libéralisme culturel, les deux relevant de la même vision du monde. On ne peut pas se dire de gauche, par exemple, et admirer des gens réfutant la culture et prétendant que s’agiter sur un clavier pour écrire de la pseudo-littéraire ou sur un tableau pour de la pseudo-peinture aurait du sens pour les gens. Pareillement, on ne peut pas se dire de gauche et considérer qu’on peut avoir un 4×4, si on le veut, qu’on peut pratiquer le sado-masochisme, si on le veut, qu’on peut tromper son conjoint, si on le veut, etc.

La Gauche, c’est par le peuple et pour le peuple, et plus précisément la classe ouvrière. C’est là, tout de même, la base de la Gauche. Naturellement, pour la gauche version post-moderne, tout cela c’est du passé, il s’agirait désormais de conquérir plus de « droits individuels ». C’est là totalement converger avec le capitalisme en cherchant des figures de renforcement de l’individualisme et de l’opportunisme. Et la Droite « populaire » en profite, elle se nourrit de cela.

En fait, c’est comme dans les années 1930, il y a trois camps : la Gauche qui veut la Démocratie et donc le Socialisme, les libéraux qui cherchent à maintenir les choses telles qu’elles sont, la Droite qui veut « remettre de l’ordre » : rappelons que les fascistes italiens et les nazis allemands se revendiquaient de la Droite, en mode « populaire », « national » ; ils assumaient d’être des traditionalistes, des beaufs.

agauche.org est ainsi un levier pour faire se réaffirmer la Gauche historique, qui elle seule peut vaincre la Droite « populaire », sans rien céder aux libéraux. C’est un outil essentiel, dont il faut profiter, et auquel il faut contribuer !

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