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Le sens historique pour les Européens de l’appel téléphonique Biden-Poutine

La vie telle qu’on la connaît est suspendue par les puissants.

Ce 7 décembre 2021 a lieu un entretien téléphonique entre le président américain Joe Biden et le président russe Vladimir Poutine. Ce dernier va lui dire que l’entrée dans l’OTAN de l’Ukraine est une ligne rouge, que la Russie ne peut pas accepter des bases militaires de l’OTAN et des missiles à sa frontière. L’Ukraine doit être neutre et d’ailleurs fédérale afin d’assurer un équilibre minimal entre les pro-européens et les pro-russes. C’est un gage de paix, mais c’est aussi une entourloupe pour tenter de resatelliser l’Ukraine.

Joe Biden va lui répondre que l’Ukraine est un pays souverain, que si ce pays veut se tourner vers l’OTAN c’est son droit, comme l’ont fait les pays baltes, la Roumanie, la Pologne, la Slovaquie, la République tchèque, la Hongrie, la Bulgarie. Aucune garantie ne peut être donné pour l’avenir et, d’ailleurs, Joe Biden a dit il y a deux jours qu’il ne reconnaissait aucune « ligne rouge ».

En pratique c’est l’expansion de la superpuissance américaine qui ne voit aucune raison de reculer, puisqu’elle ne risque rien, qu’en cas d’affrontement il resterait bien au pire un bout d’Ukraine à satelliser, et au mieux la Russie se heurte à une série de problèmes.

Tel est le jeu cynique des puissants aux dépens de la paix en Europe et avant tout de la nation ukrainienne qui risque bien d’être dépecée. Le président biélorusse Loukashenko a d’ailleurs annoncé la couleur le 6 décembre 2021 en disant que :

« Les plans de l’OTAN dans la région sont inacceptables à la fois pour la Russie et le Belarus. Donc, il y aura beaucoup de changements ce mois-ci. Nous verrons un résultat de la Mer Noire à la Baltique. Il y aura également de grands résultats après le nouvel an. »

C’est qu’il est une chose qu’il faut bien comprendre : la crise change tout. La pandémie a précipité la crise du capitalisme, finie la croissance commencée à la chute du mur de Berlin, avec l’intégration de l’Est de l’Europe, avec la Chine devenant l’usine bon marché du monde. Cela a été une croissance formidable d’ailleurs, améliorant incroyablement le niveau de vie, mais provoquant des choses incroyables, tel le réchauffement climatique, une condition animale dantesque, des pollutions chimico-industriels monstrueuses, une aliénation immense, une exploitation au travail incroyablement renforcée aboutissant à des crises nerveuses sans pareil.

Les gens pètent un plomb dans un tel système qui, à bout de souffle, va à la guerre, car pour obtenir une expansion, il faut conquérir de nouveaux espaces, dans la mesure où la pression capitaliste sur les travailleurs ne suffit pas et qu’on a beau développer des choses absurdes comme les LGBT ou l’art contemporain, il n’y a pas assez de nouveaux marchés qui s’ouvrent.

L’appel téléphonique Joe Biden – Vladimir Poutine, avec les deux ne faisant même pas l’effort de se rencontrer, est donc d’une importance historique. Ses conséquences peuvent être immenses et s’annoncent immenses. Il faut se rappeler qu’il n’y a pas eu de conflit majeur impliquant deux pays dans leur ensemble, sur un vaste territoire, littéralement depuis la guerre du Golfe en 1991. Alors, là, en Europe même, qu’en résulterait-il ? Un effondrement des bourses, une panique des entrepreneurs, une angoisse des populations, un désarroi de nations entières comme l’Ukraine et ses voisins.

Et une fois qu’une telle entreprise a été réalisée, on peut encore plus aisément recommencer, on aurait alors encore plus de pression militaire, belliciste, à Taiwan avec la Chine, en Arménie avec l’Azerbaïdjan, sans parler des conflits Grèce-Turquie, Serbie-Kosovo, Maroc-Algérie… des troubles très graves en Bosnie, des instabilités dans nombre de pays africains… et la liste est très longue encore.

L’appel téléphonique Biden-Poutine est peut-être un tournant historique ; dans quelques années, on dira : c’est là que le drame a commencé, que la crise a basculé dans une troisième guerre mondiale au long cours, avec comme point culminant la bataille sino-américaine.

C’est de cela dont on parle. Et les masses sont totalement endormies, sans conscience du cauchemar qu’elles sont en train de vivre !

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Guerre

Le Royaume-Uni et les Etats-Unis préparent l’opinion publique à la guerre contre la Russie

Les préparatifs psychologiques sont incessants.

Il y a eu pour la période du 12 au 14 novembre 1 889 violations du « cessez-le-feu » au Donbass, contre seulement une vingtaine du 14 au 16. Mais le matériel de guerre ukrainien est toujours activement transporté aux frontières, la Suède a décidé d’envoyé des formateurs militaires, et le Royaume-Uni est allé encore plus loin. Non seulement il fera de même, mais sa presse ne cesse de raconter que la Russie va lancer une invasion.

Le chef d’état-major de l’armée britannique, Nick Carter, a également expliqué que le risque de guerre accidentelle avec la Russie était encore plus grand qu’au moment de la guerre froide avec l’URSS! C’est dire comment l’opinion publique britannique est travaillée au corps, alors que le secrétaire d’Etat à la défense britannique Ben Wallace est justement en visite en Ukraine.

Le Royaume-Uni a également officialisé un prêt à l’Ukraine pour qu’elle lui achète des navires de guerre et des missiles (une frégate, deux chasseurs de mines, huit navires avec des missiles). Et le ministre des affaires étrangères ukrainien Dmitry Kuleba a averti ses homologues français et allemand Jean-Yves Le Drian et Heiko Maas qu’il fallait tout de suite organiser le soutien militaire futur à l’Ukraine contre la Russie, car dans le feu de l’action il n’y aura plus le temps.

La Russie n’est pas en reste non plus : elle vient de mettre en place des facilités d’importation et d’exportations de produits en provenance du Donbass séparatiste. C’est une manière d’accentuer l’intégration économique (puisque c’est comme s’il n’y avait plus de frontières) et d’exercer toujours davantage de pression contre l’Ukraine. Et en détruisant un vieux satellite soviétique au moyen d’un missile, la Russie a fait une démonstration de force militariste à ce niveau.

De toutes façons le but de la Russie est de désagréger l’Etat ukrainien, que ce soit au moyen de pressions militaires et économiques, d’une intense propagande, ou bien la guerre. Il faut dire que pressée par la crise, la Russie est dans un expansionnisme débridé et qu’elle entrevoit une possibilité de conquête. L’Etat ukrainien est totalement corrompu, le niveau de vie le plus bas d’Europe, les lois ne sont pas appliquées à quiconque à des moyens financiers un tant soit peu important, l’extrême-Droite est hyperactive alors qu’une partie de la population ne respecte de toutes façons pas le régime en raison de ses attachements culturels à la Russie.

Inversement, le Royaume-Uni et les Etats-Unis veulent affronter la Chine et s’il y a moyen pour eux d’affaiblir son allié russe en utilisant l’Ukraine comme chair à canon… Il y a donc tous les ingrédients pour la guerre. Ce n’est pas par choix ou calcul, c’est une tendance générale, et cette tendance contient également du choix et du calcul. Et le peuples sont passifs, soit parce qu’ils n’ont pas compris qu’il y aurait la guerre… Soit parce qu’ils l’ont déjà intégré en leur for intérieur. Il y a ici une véritable cassure entre l’ouest et l’est de l’Europe.

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Le chef d’État-Major des armées des États-Unis Mark Milley et la bataille pour l’hégémonie

La guerre sino-américaine est à l’ordre du jour.

La guerre sino-américaine est rendue inévitable en raison de la crise. Contrairement aux esprits peu développés politiquement qui pensent que, éventuellement, la guerre peut être une solution « choisie » par le capitalisme, il existe une tendance inévitable et historique du capitalisme à l’expansion, à la crise, à la guerre pour dépasser la crise.

On le voit d’ailleurs très bien avec les Etats-Unis et la Chine qui, s’ils ont agi en tandem à un moment, finissent par se faire face. Objectivement, on pourrait penser qu’ils pourraient se partager le gâteau. Mais le capitalisme n’est pas rationnel, il est une force « intégratrice ». C’est ainsi une compétition inéluctable afin de viser l’hégémonie.

C’est le sens des propos de Mark Milley, chef d’état-major des armées US. Lors d’un Forum sur la sécurité organisé par l’institut Aspen le 4 novembre 2021, il a expliqué la chose suivante :

« Nous entrons dans un monde tripolaire avec les États-Unis, la Russie et la Chine, toutes de grandes puissances (…). Ils [les Chinois] nous défient régionalement et leur aspiration est de défier mondialement les Etats-Unis (…).

Aujourd’hui elle [la Chine] a des capacités dans l’espace et le cyber, la terre, la mer, l’air, sous-marine et ils nous défient clairement régionalement (…). Nous avons ici ainsi le cas d’un pays qui devient extraordinairement puissant, qui veut réviser l’ordre international à son avantage. Cela veut être un réel défi lors des prochaines années. Dans les prochaines 10, 20 années. Cela va être réellement significatif pour les Etats-Unis (…).

Nous vivons en ce moment l’une des plus grandes transformations dans les rapports de force mondiaux géostratégiques que le monde ait jamais vu… Si nous, les Etats-Unis, ne modifions fondamentalement rien dans les 10 à 20 ans, nous serons du mauvais côté du conflit. »

Ces propos sont tout à fait clairs et, pourtant, l’immense majorité des Américains ne le voient pas, pas plus que d’ailleurs les Français ou les Britanniques. C’est très paradoxal : les militaires présentent de manière non voilée la bataille à venir, pour autant les gens continuent de vivre le capitalisme au quotidien comme si de rien n’était.

Ce n’était pas le cas avant 1914 ni avant 1939, car il existait une Gauche historique puissante, qui a largement bataillé contre la guerre, l’expansionnisme, le militarisme, les velléités impérialistes. Aujourd’hui par contre il n’y a pas de Gauche historique alors que les gens sont encore plus prisonniers du capitalisme, qui les enserre toute leur vie, dans tous les domaines.

Cela implique également que le capitalisme aura, pour la guerre, davantage de mal à les remodeler dans un sens militariste. Mais il en a les moyens, car les gens en France, par exemple, sont pétris du chauvinisme de grande puissance et sont prêts à soutenir le militarisme si cela défend leur niveau de vie. Les Français n’ont pas voulu mourir pour Prague en 1938, dans une Tchécoslovaquie agressée par les nazis, ils ne veulent pas le faire pour Marioupol en 2021, dans une Ukraine agressée par la Russie.

Preuve de cela, la question de la guerre n’existe pour aucun candidat à la présidentielle de 2022, à part pour justement soutenir le militarisme, la logique de la compétition et du conflit. Cela reflète le positionnement des gens, dont les mentalités sont corrompues par le niveau économique français.

Cela ne veut pas dire pour autant qu’il faille proposer une ligne anti-guerre abstraite – cela n’aurait aucun sens. Cela veut dire qu’il faut saisir le processus de guerre qui se met en place et, sur ce terrain, arriver à arracher les esprits aux mentalités chauvines de grande puissance. C’est inévitablement très difficile, il suffit de voir en 1914 quelle catastrophe cela a été, avec toute la Gauche se précipitant dans l’Union Sacrée, y compris les anti-militaristes les plus acharnés.

Mais il y a un avantage à pouvoir observer, de l’extérieur relativement, la montée en puissance du conflit sino-américain : cette distance peut aider à comprendre plus aisément les choses, à se faire moins emporter par l’irrationalisme militariste.

Il y a ici tout un processus d’éducation à entreprendre. C’est le sens du suivi de la tendance à la guerre, du conflit Russie-Ukraine, du conflit dans la zone indo-pacifique. Agauche.org a ici une fonction essentielle, en pointe pour le suivi et la compréhension des processus jouant un rôle central dans l’Histoire actuelle du monde et, pour cette raison même, « oubliée » par ceux pour qui le capitalisme est éternel.

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Graves incidents militaristes en Méditerranée et dans le Pacifique

Les puissances se testent, s’éprouvent, avant le choc.

Ces derniers jours, une grande vague de tension s’est développée tant en mer Méditerranée que dans le Pacifique. La Grèce accuse la Turquie de coups de pression contre plusieurs de ses îles, les eaux territoriales, ainsi que Chypre. Le ministre grec des affaires étrangères Nikos Dendias n’a pas hésité à affirmer que:

« Notre souveraineté dans la Méditerranée orientale est menacée. La situation peut se transformer en guerre à tout moment. »

Ces propos ont tenus le 14 octobre, jour d’un accord signé par Nikos Dendias avec le responsable des affaires étrangères des Etats-Unis, Antony Blinken, pour un accord de coopération de défense prolongé de cinq ans, qui était auparavant signé chaque année depuis 1990.

C’est une manière pour les Etats-Unis de temporiser l’accord stratégique récent France-Grèce, en se proposant comme grand frère régional notamment par l’intermédiaire de l’OTAN. D’ailleurs, l’accord implique une négociation pour l’implantation d’une base navale américaine pour une longue durée.

Les Etats-Unis ont parallèlement à cette intervention dans la zone Méditerranée mené un coup de semonce important dans la zone Pacifique. Le 15 octobre l’USS Chafee, un destroyer (en français une variante de frégate), a tenté en mer du Japon, à l’Ouest du Pacifique, de pénétrer dans les eaux maritimes russes alors que des exercices militaires russo-chinois devaient s’y tenir quelques heures plus tard.

La frégate russe Amiral Vladimir Tribouts est intervenue pour lui barrer la route et le navire américain n’a changé de direction que lorsque il n’y avait plus que soixante mètres de distance entre les deux.

L’attaché militaire américain a été convoqué par le ministre russe des affaires étrangères.

En réponse, ou pas, la Russie a annoncé le 18 octobre que le premier novembre il n’y aurait plus de bureau russe auprès de l’OTAN, ni de bureau de l’OTAN auprès de la Russie. Il y a quelques semaines, huit responsables russes à Bruxelles auprès de l’OTAN s’en était fait expulser pour espionnage.

La superpuissance américaine témoigne ici de son esprit d’initiative, alors que le secrétaire à la défense américain Lloyd Austin s’est rendu en Géorgie signer un accord stratégique. C’est bien la démonstration que, contrairement à ce que laisse penser l’apparente sortie chaotique en Afghanistan, la superpuissance américaine a toute une stratégie globale et qu’elle agit conformément à cette stratégie dans chaque partie du monde.

L’objectif est d’encercler le challenger chinois et il est évident que l’espoir américain est que la Chine s’empêtre en Afghanistan. Et dans cet encerclement, il y a deux pays qui doivent tomber : l’Iran et la Russie. Comme en ce moment l’économie iranienne s’effondre – les travailleurs viennent de perdre 32% de pouvoir d’achat – et que la Russie connaît une terrible vague prolongée de covid-19, la superpuissance américaine exerce toujours davantage de pression.

Il faut ajouter que l’économie chinoise ralentit elle-même, ayant connu de grandes pénuries d’énergie cet été et en connaissant encore. La superpuissance américaine est ainsi en ce moment le facteur principal de la tendance à la guerre. Elle pousse à ce que l’ensemble vacille et le premier pays qui tombe se fait dépecer avec son aval du moment que la réorganisation qui en ressort rentre dans le cadre de l’encerclement de la Chine.

Plus que jamais, l’affrontement sino-américain prend tout son sens dans le cours dramatique de l’Histoire.

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La chronique militariste-stratégique pro Etats-Unis du Monde

Le cynisme règne en maître.

Le Monde a publié une chronique (payante) à la fois particulièrement militariste et de portée stratégique. Son auteur en est Alain Frachon, éditorialiste de ce quotidien, auquel il appartient depuis 1985. Si la chronique se veut une simple proposition-réflexion, c’est en fait surtout le reflet de la ligne moderniste à la Emmanuel Macron ; ce qui est vraiment nouveau, c’est le fait de le dire ouvertement, de manière cynique.

C’est que l’idée est simple : les États-Unis vont faire la guerre à la Chine et ils vont gagner, il n’y aura jamais d’unité européenne autour du moteur franco-allemand, il faut donc une défense européenne de bas niveau allié aux États-Unis, pour que la France profite d’une part du gâteau chinois.

Voici le titre de la chronique.

« La crise des sous-marins n’est pas une affaire de qualité de navire, c’est un grand pas en avant dans l’affrontement entre la Chine et les États-Unis »

Voici l’annonce cynique de la guerre sino-américaine.

« C’est un grand pas en avant dans l’affrontement sino-américain, d’ailleurs justifié de manière pro-américaine. »

« Le pacte Aukus – Australia, United Kingdom, United States – confirme la priorité stratégique des Etats-Unis : la Chine. »

« La Chine militarise à tout-va les îlots – territoires disputés avec ses voisins – dont elle s’est emparée par la force dans le Pacifique occidental. Elle a multiplié opérations d’espionnage et d’influence politique à Canberra. »

Voici la présentation « géopolitique » de la chronique, dans une démarche totalement cynique.

« L’épisode Aukus devrait confirmer la ligne d’Emmanuel Macron : en ces temps de réorientation des priorités états-uniennes, l’UE doit plus que jamais acquérir un minimum d’autonomie stratégique. Elle doit notamment se doter des moyens de résister à la pression revancharde de la Russie de Vladimir Poutine et d’exister dans un monde de blocs. C’est ce qu’on appelle l’Europe de la défense. »

« Nos partenaires – par ailleurs indifférents aux affaires du Pacifique – rechignent. Ils craignent qu’une telle perspective n’amène les Etats-Unis à s’éloigner plus encore du Vieux Continent.

Quant aux Américains, ils semblent, politiquement, psychologiquement, génétiquement, incapables de soutenir une autonomie stratégique européenne, serait-elle limitée.

Cette orientation serait pourtant conforme à leur nouvel axe stratégique : priorité à l’Asie-Pacifique parce qu’ils estiment que c’est là, face à la Chine, que se joue le maintien de leur leadership mondial. »

Le fait que le quotidien Le Monde montre à quel point on a changé totalement de contexte avec la crise (partir de la pandémie pour arriver à l’économie, puis la politique, les rapports de force entre pays…). Il est parlé de la troisième guerre mondiale comme si de rien n’était.

Une guerre sino-américaine serait un désastre pour l’Humanité – et la seule chose dont il est parlé, c’est de comment la France peut tirer son épingle du jeu. Ce n’est ni plus ni moins que de l’impérialisme – c’est sur des millions de mort d’une guerre que danse cette sinistre chronique du Monde.

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Le rappel des ambassadeurs français d’Australie et des États-Unis

Emmanuel Macron est pris à son propre piège.

Le Figaro, dans un éditorial, a réagi à l’affaire des sous-marins et à la naissance de l’AUKUS en disant qu’il était hors de question de rappeler les ambassadeurs ou de sortir de l’OTAN. Et pourtant, dans la foulée, Emmanuel Macron a demandé au ministre des affaires étrangères Jean-Yves Le Drian de rappeler les ambassadeurs français à Washington et Canberra.

En langage diplomatique, c’est un avertissement qu’une ligne rouge a été franchie. Les ambassadeurs ne reviennent pas avant quelques temps – un jour, un mois, une année, etc. -, pour signaler une certaine dimension antagonique à la question.

Le message officiel du ministre des affaires étrangères est le suivant :

« A la demande du Président de la République, j’ai décidé du rappel immédiat à Paris pour consultations de nos deux ambassadeurs aux États-Unis et en Australie.

Cette décision exceptionnelle est justifiée par la gravité exceptionnelle des annonces effectuées le 15 septembre par l’Australie et les États-Unis.

L’abandon du projet de sous-marins de classe océanique qui liait l’Australie à la France depuis 2016, et l’annonce d’un nouveau partenariat avec les États-Unis visant à lancer des études sur une possible future coopération sur des sous-marins à propulsion nucléaire, constituent des comportements inacceptables entre alliés et partenaires, dont les conséquences touchent à la conception même que nous nous faisons de nos alliances, de nos partenariats et de l’importance de l’Indopacifique pour l’Europe. »

On voit que le ministre met sur le même plan l’abandon du partenariat et l’introduction de la technologie américaine en Australie. C’est que la France joue la carte de « l’intermédiaire », du pays de puissance moyenne favorable à un monde « multipolaire ». Or, l’introduction de la propulsion nucléaire a deux conséquences : à moyen terme, d’autres pays vont demander la même chose, comme la Corée du Sud et le Japon. Qui plus est, l’Australie va aller dans le sens de posséder des bombes atomiques.

C’est là multiplier les puissances de taille moyenne, assumer ouvertement la formation de blocs… autant dire que la France a tout à y perdre dans ses ambitions littéralement impérialistes. Elle dispose, rappelons-le, de la seconde Zone Économique Exclusive du monde en raison de tous ses territoires au Pacifique et elle ne compte pas les perdre. Mais toute militarisation, tout conflit implique de les perdre, au profit de la Chine ou des puissances locales (il faut se souvenir de l’attentat français contre le Rainbow Warrior, dans le cadre de telles contradictions).

La France a d’ailleurs immédiatement pris contact avec l’Inde au niveau diplomatique, des discussions ayant eu lieu entre le ministre français des affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian et le ministre indien des Affaires étrangères Subrahmanyam Jaishankar, une rencontre étant bientôt prévue à New York. Il y a même eu un communiqué officiel français à ce sujet :

« M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l’Europe et des affaires étrangères, s’est entretenu aujourd’hui par téléphone avec son homologue indien, M. Subrahmanyam Jaishankar.

Les deux ministres ont décidé d’approfondir leur partenariat stratégique, fondé sur une relation de confiance politique entre deux grandes nations souveraines de l’Indopacifique. Ils ont également échangé sur la situation en Afghanistan, qui se détériore.

Les deux ministres sont convenus de se revoir à New York la semaine prochaine, en marge de l’Assemblée générale des Nations unies, pour travailler sur un programme commun d’actions concrètes pour défendre ensemble un ordre international réellement multilatéral. »

Mais c’est là ni plus ni moins qu’une tentative de former un nouveau bloc. En fait, on ne peut pas échapper à la logique des blocs – à moins de s’opposer résolument à la guerre, telle que l’a toujours fait la Gauche historique.

Emmanuel Macron est pris à son propre piège ici, car il s’est posé comme libéral-moderniste faisant « avancer » le capitalisme – et il est dans une situation de crise mondiale où la bataille pour le repartage du monde s’ouvre toujours davantage. Pro-américain par définition, il a été obligé de faire face à un affront diplomatique – mais quelle solution peut-il proposer ?

On voit très bien comment les réactions en France ont été massives sur le plan politique, lors de cette affaire. Cela montre que les prochaines présidentielles vont tendanciellement se jouer sur la ligne stratégique choisie par la haute bourgeoisie française dans une situation mondiale où la guerre est à l’ordre du jour pour la prochaine décennie.

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Instauration de l’alliance Australie – Royaume-Uni – Etats-Unis

L’esprit impérialiste s’exprime ouvertement et l’ennemi, c’est la Chine.

Le 15 septembre 2021 au soir, une conférence vidéo a réuni le président américain Joe Biden, le premier ministre britannique Boris Johnson et le premier ministre australien Scott Morrison. Il a été annoncé une alliance stratégique allant dans les sens d’une unification militaire pour la région indo-pacifique.

Plus précisément, l’alliance Australie – Etats-Unis – Royaume-Uni, présentée sous l’acronyme AUKUS, implique en effet un partage d’information et de technologie, une intégration des connaissances scientifiques liées à la défense et la sécurité ainsi que des bases industrielles et des chaînes d’approvisionnements.

En ce sens, les Etats-Unis vont fournir à l’Australie de quoi mettre en place des sous-marins à propulsion nucléaire ; la seule fois où un tel partage d’un tel type de connaissances a eu lieu, c’était pour le Royaume-Uni en 1958.

Les trois pays sont déjà membres de la  » Five Eyes alliance », avec la Nouvelle-Zélande et le Canada, une collaboration générale au niveau des services secrets. Cette fois, on rentre dans le dur puisqu’il s’agit ni plus ni moins que d’élever le niveau matériel de l’Australie sur le plan militaire dans le cadre de la future confrontation avec la Chine.

D’ailleurs, en plus des sous-marins eux-mêmes, la technologie nucléaire acquise peut également permettre à l’Australie d’aller dans le sens de posséder la bombe nucléaire, même si évidemment elle prétend actuellement ne pas vouloir de prolifération.

On notera que cela implique également l’annulation de la commande effectuée il y a deux ans auprès de la France de douze sous-marins de ce type (pour 31 milliards d’euros). Cela ne peut que déplaire à la France. Et c’est très dangereux pour la Gauche en France, car cette situation va renforcer les excitations militaristes, les fantasmagories stratégiques, les velléités impérialistes d’aller à la guerre.

Car la superpuissance américaine ne veut pas perdre son hégémonie, la Chine veut devenir une superpuissance et obtenir l’hégémonie (le régime tente en ce moment de recadrer les esprits dans un sens nationaliste – étatique d’ailleurs). Le Royaume-Uni veut être aux premières loges de la victoire américaine espérée, d’où le BREXIT.

De son côté, la Russie cherche à maintenir sa position à l’ombre chinoise, alors que l’Allemagne espère compter les points et profiter de son hégémonie en Europe. C’est une véritable course impérialiste comme avant 1914.

Que va faire la France? Au rythme où vont les choses, c’est cette question de savoir se placer dans la bataille pour le repartage du monde qui va devenir de plus en plus central, et il va être essentiel de comprendre ce qui va en être pour la présidentielle 2022.

On notera d’ailleurs qu’aucun des trois pays concernés par l’alliance AUKUS n’a daigné ne serait-ce que faire semblant d’avoir un débat dans le pays à ce sujet. L’information au sujet de l’alliance a filtré quelques heures avant son annonce, toutes les décisions ont été prises par en haut, dans l’esprit de la diplomatie secrète. C’est tout à fait révélateur d’une marche à la guerre et les institutions doivent s’effacer substantiellement devant elle.

Le fait qu’en France les classes dominantes ne soient pas unies sur les choix stratégiques est ainsi une chance, car cela peut permettre de percer cette muraille du secret, des décisions lointaines, comme cela peut être un terrible danger car cela peut renforcer l’attrait, pour faire avancer la marche à la guerre, d’utiliser le nationalisme avec une grande ampleur.

En tout cas, avec AUKUS, on a déjà un bloc de formé pour la guerre pour le repartage du monde. C’est le second bloc clairement défini avec celui Russie-Chine. Les choses vont vite, très vite.

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Réflexions

Les odieux attentats du 11 septembre, fantasmagorie puisant dans la culture des années 1980

Les islamistes ont réalisé un attentat avec des codes bien précis.

Nous sommes en 1980 et c’est la sortie du film New York 1997, de John Carpenter, un réalisateur se voulant assez alternatif. Au début du film, un groupe révolutionnaire détourne l’avion du président américain et choisit de le faire s’écraser sur Manhattan à New York, symbole de l’oppression impérialiste. Manhattan est en effet devenu une prison à ciel ouverte, où les prisonniers sont livrés à eux-mêmes.

C’est le premier parallèle avec les attentats du 11 septembre.

L’État américain envoie alors un soldat sauver le président et celui-ci utilise un planeur pour atterrir sur le toit… d’une des tours du World Trade Center. C’est le second parallèle avec les attentats du 11 septembre.

Pourquoi trouve-t-on une convergence? Parce qu’il y a une tendance, au cinéma, dans les années 1980, au spectaculaire, au marquant. Et le réalisateur John Carpenter s’est focalisé sur Manhattan, symbole de la réussite capitaliste américaine. Comme il était critique du régime, il a tout décrit en noir, avec un État militarisé, Manhattan comme prison, mais cela reste un détournement de symboles réels.

Ce type de détournement pseudo-anticapitaliste est typique des années 1980 et il va se systématiser dans les années 1990 sous la forme de l’altermondialisme. Al Qaïda va d’ailleurs initialement beaucoup jouer sur cette corde altermondialiste, se présentant comme le rempart face à l’injustice, etc.

On sait comment les altermondialistes ont cherché à « renverser » les logos et les codes, tels les « yes men », deux professeurs d’université américaine se faisant passer pour des représentants de l’Organisation Mondiale du Commerce ou des dirigeants d’entreprises, en faisant alors un éloge caricaturé au possible du capitalisme le plus barbare et oppresseur.

C’est en fait un esprit petit-bourgeois qui vient de l’art contemporain des années 1980, dans un grand esprit de récupération de tout et n’importe quoi, alors que c’est le début d’un capitalisme tellement généralisé que tout est éphémère, qu’il faut « marquer » les esprits coûte que coûte, que tout est consommation.

Ce qui fait que si on prend les attentats du 11 septembre 2001 et qu’on les confronte à une définition de l’art contemporain – même s’il n’y a pas de définition au sens strict – on retrouve les mêmes principes : éphémère, du jamais vu, spectaculaire, sans média du type peinture ou vidéo (sans objet matériel de « représentation »), occupation de tout un espace, « performance » en direct, œuvre comme fin en soi, absence de culture nécessaire pour comprendre, refus de tout héritage artistique, etc.

C’est parce que les gens ont baigné dans cette culture (ou plutôt cette idéologie capitaliste) qu’ils ont été profondément marqués plus qu’horrifiés, alors qu’il s’agit tout simplement d’une folie barbare contre des civils au nom de motifs religieux délirants. Le mot exact est cependant davantage « impressionnés » plus que marqués.

Al Qaïda a d’ailleurs conçu cela comme une sorte de publicité géante, ni plus ni moins. C’est très différent des attentats de l’État islamique comme au Bataclan à Paris, car Al Qaïda vient des années 1980 et a une démarche intellectualisée, avec une vision de l’opinion publique devant être gagnée à soi par des actions impressionnantes et représentatives, alors que l’État islamique date des années 2000 et a une démarche anti-intellectuelle, son but étant directement de monopoliser.

Dans les décennies futures, le rapport entre les attentats du 11 septembre 2001 et la publicité des années 1980 n’en apparaîtra que plus évidente, avec le recul sur une société de consommation généralisée prise au pied de la lettre par les islamistes d’Al Qaïda.

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Guerre

L’Afghanistan aux mains des talibans… mais aussi de la Chine

La chute du régime afghan relève de la bataille pour le repartage du monde.

La prise du pouvoir en Afghanistan par les Talibans, littéralement 20 ans après le 11 septembre et l’intervention américaine qui a suivi, est une terrible défaite américaine. Les Etats-Unis avaient en effet tout fait pour installer un régime qui soit à leur service ; en vingt ans, ils ont investi 2 261 milliards de dollars.

Et là, il a suffi d’enclencher le départ des troupes américaines en juillet pour que les Talibans lancent une offensive allant de victoire en victoire. Le 10 août 2021, les Etats-Unis craignaient que la capitale Kaboul tombe d’ici 30-90 jours… elle tombait sans combattre le 15 août, le président afghan Ashraf Ghani s’enfuyant. Les Talibans ont pu occuper tous les lieux de pouvoir, comme le palais présidentiel, sans coup férir.

Le drapeau blanc est celui de l’Emirat et est un motif islamique des tout débuts avec Mahomet, il y est d’ailleurs inscrit dessus la chahada : «  J’atteste qu’il n’y a pas de divinité en dehors de Dieu et j’atteste que Mahomet est le Messager de Dieu. »

Les Talibans de 2021 sont cependant très différents de ceux de 2001. Ils ne sont plus un mouvement sur le tas d’étudiants en théologie formé par des cadres de la résistance à l’invasion soviétique. Ils relèvent d’un « Émirat Islamique d’Afghanistan » se présentant comme une entité étatique établie, avec même des représentants officiels vivant au Qatar et discutant depuis des années avec les principales puissances.

En fait, officiellement, ils relevaient déjà cet « émirat » de 1996 à 2001 lorsqu’ils contrôlaient le pays. Mais l’apparence mouvementiste, élémentaire, plébeienne millénariste, a été désormais gommée, au profit d’un positionnement « sérieux ». Le motif récurrent, c’est celui de vieux barbus censés exprimer une sagesse clanique-patriarcale dans le respect des traditions religieuses.

On remarquera d’ailleurs ici que, contrairement à Al Qaïda et encore plus à l’Etat islamique, les talibans intègrent désormais dans leur idéologie un dimension nationale. Leurs communiqués sont à moitié religieux à moitié patriotiques, insistant sur la libération de la nation afghane.

« Lié à la nation », une vidéo de propagande des talibans, on notera que les femmes sont systématiquement exclus de toute représentation

Les talibans n’ont donc pas d’objectif millénariste ou transnational. Ils ont également ces dernières années combattu militairement l’Etat islamique cherchent à s’implanter en Afghanistan, alors qu’Al Qaïda a de toutes façons été brisé par les Etats-Unis. On est ici dans une force féodale somme toute classique, du genre à se vendre à une grande puissance pour former un appareil d’Etat bureaucratique.

Pour donner un exemple concret, les Talibans, c’est 60 000 hommes. Ce n’est militairement strictement rien pour le contrôle d’un pays, fut-il petit, et l’Afghanistan est un grand pays de 38 millions d’habitants. En fait, il en va comme des 100 000 hommes au grand maximum de l’Etat islamique à son pic. Ce sont des gangs armés dans une société totalement en décomposition où les gens n’ont aucune capacité à s’organiser.

D’où leur victoire, impossible dans un pays n’ayant pas sombré. En comparaison, l’Espagne avait dans les années 1930 un peu plus de 25 millions d’habitants et lors de la guerre d’Espagne, chaque camp avait 500 000 soldats extrêmement bien organisés, avec toute une intendance.

L’Afghanistan, comme l’Irak, est concrètement un pays totalement déstructuré, brisé, dans un processus qui part de 1979 et des velléités impériales de l’URSS se posant en challenger de la superpuissance américaine. Tout est histoire de clans et d’ethnies vivant littéralement sur le tas, de manière traditionnelle sur un mode féodal, les talibans représentant d’ailleurs les pachtounes, également largement présents au Pakistan (pays soutenant les talibans depuis le début de leur histoire).

Historiquement, les pachtounes ont comme cible les persanophones (le persan est la langue vernaculaire d’Afghanistan), c’est-à-dire les Tadjiks et les Ouzbeks, mais surtout les Hazaras, qui ont comme particularité d’avoir été bouddhistes et d’être musulmans chiites. La fameuse statue géante du Bouddha de Bamîyân se situait justement en plein territoire hazara. Historiquement, les hazaras ont dû supporter massacres et esclavage tout au long de leur histoire.

Bamyan, avec le Bouddha désormais absent

Cependant, il faut bien garder en tête que c’est un environnement féodal et que tel ou tel clan, quel que soit son ethnie, peut se retrouver dans tel ou tel camp. C’est d’autant plus vrai que la victoire des talibans n’aurait pas été possible sans les « parrains ».

Ainsi, la Chine s’était empressée d’annoncer il y a quelques jours déjà qu’elle reconnaîtrait la victoire éventuelle de cet « Émirat » des talibans, alors que les activités de l’ambassade russe à Kaboul pris par les talibans continuent comme si de rien n’était.

Car la chute du régime totalement corrompu et pro-américain en Afghanistan se place, naturellement, dans le cadre du conflit entre la superpuissance américaine et son challenger chinois. Pour dire les choses simplement, la Chine et la Russie ont réussi à chasser les États-Unis.

Mais c’est une grande défaite turque également. La Turquie entendait assurer la « sécurité » de l’aéroport de Kaboul après le départ américain et d’ailleurs envoyer des troupes. Les Talibans avaient envoyé des avertissements très fermes à ce sujet.

Et c’est, déjà, une défaite pour les femmes. Les talibans sont totalement féodaux-patriarcaux, ils méprisent ou haïssent femmes, les considérant comme à la fois impures, secondaires et en fin de compte sans réelle valeur.

C’est la barbarie et d’ailleurs les gens en France ont un affreux haut-le-cœur devant de tels événements. Il leur reste à comprendre que c’est un aspect d’une crise mondiale emportant tout sur son passage dans un capitalisme se ratatinant jusqu’à chercher la sortie par la guerre.

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Guerre

Montée des tensions entre la mer Noire et le Golfe Persique en passant par la Transcaucasie

La ligne de front des conflits est immense géographiquement parlant.

Cela barde de plus en plus dans tout un arc de confrontations allant de la mer Noire au Golfe persique, en passant par la Transcaucasie. Le président ukrainien Volodymyr Zelensky, après avoir changé de ministre de l’Intérieur (qui trustait cette position depuis de longues années), a remplacé le ministre de la défense, le chef d’Etat-major, le commandant des forces aériennes d’assaut et celui des forces opérant dans le Donbass.

Et un opposant biélorusse, Vitali Chychov, a été retrouvé pendu en Ukraine, laissant planer bien sûr l’intervention des services secrets biélorusses, alors qu’inversement une opération de propagande est menée avec une athlète biélorusse « fuyant » le Japon pour éviter d’avoir à retourner dans son pays, où des problèmes l’attendraient en raison de sa critique de l’équipe technique des Jeux Olympiques.

Autrement dit, cela n’arrête pas. Et, désormais, il semble que l’Iran soit arrivé de manière directe dans la ligne de mire occidentale. Israël, les États-Unis et le Royaume-Uni accusent en effet ce pays d’avoir mené une attaque faisant deux morts, au moyen de drones contre le pétrolier japonais Mercer Street, battant pavillon libérien, géré par une société britannique, appartenant à un milliardaire israélien.

Le ton israélien et britannique est particulièrement violent concernant l’exige d’une réplique occidentale collective. En réalité, cela fait des mois que l’Iran et Israël mènent des attaques contre des navires, au moyen de drones, de mines, de saboteurs, etc.

Mais vu avec attention, la montée des tensions s’explique aisément. Comme en Ukraine, il s’agit de cibler un régime favorable à la Chine, là-bas la Russie de Poutine, ici l’Iran islamique chi’ite. À chaque fois, il s’agit de puissance moyenne en terme industriel et militaire, avec un régime fragile, voire bancal concernant l’Iran.

En Ukraine, la pression était retombée du fait de l’échec, relatif, du bloc britannico-américain à entraîner les pays capitalistes de l’Union européenne dans un conflit ouvert contre la Russie. En particulier, l’Allemagne s’était opposée à un tel conflit du fait de ses intérêts propres et de sa stratégie allant dans le même sens que « l’Eurasianisme » promeut par le régime de Moscou.

Concernant Iran, le bloc britannico-américain peut compter sur le ralliement de l’Arabie saoudite et des Émirats, ainsi que sur celui d’Israël, qui sont chauffés à blanc face à l’Iran, sur lequel sont projetés toutes les difficultés internes. Dans ces pays, une large propagande entretient depuis des années une hostilité ouverte contre l’Iran avec des accents militaristes et chauvins toujours plus poussés.

Pour autant, le ralliement des pays de l’Union européenne n’est pas là non plus garanti, avec la France notamment, qui entretient d’importantes forces navales et aériennes dans le secteur, aux Émirats et à Djibouti en particulier, ne se montre pas favorable à un conflit ouvert et reste pour le moment alignée sur l’Allemagne.

C’est cet arrière-plan général qui aide à comprendre la pression qui s’exerce sur les pays de la Transcaucasie, en particulier l’Arménie et l’Azerbaïdjan, et dans une moindre mesure la Géorgie.

Parce que, effectivement, toute cette partie du monde a été transformé en poudrière.

C’est vrai en particulier pour une Transcaucasie qui participe avec engouement à cette vaste confrontation, dont les intérêts la dépasse, mais qui appuie localement les régimes ou les tendances militaristes et nationalistes chauvines, constituant plus largement des factions ralliées à tel ou tel bloc impérialiste, et pensant ainsi en profiter pour « tirer les marrons du feu ».

L’Azerbaïdjan est ici le pivôt de ces enjeux tragiques. Son régime corrompu, tenu par le clan Aliev, l’entraîne à toutes les compromissions et toutes les aventures.

De fait, l’Azerbaïdjan est poussé à la fuite en avant nationaliste. Le pays a bien tenté ces derniers mois d’exister sur la scène internationale par les compétitions sportives en mode démagogique : grand prix de F1 à Bakou, tenue de matchs de la coupe d’Europe de football, participation aux championnats d’échecs, etc… mais aucune de ces tentatives n’a suscité d’entrain populaire.

Les réseaux sociaux azéris, plus libres que les médias en termes de contrôle de la parole, ont vu fleurir ces derniers mois les critiques acerbes contre la corruption du régime et son caractère cosmopolite décadent, au point même que la presse arménienne a pu largement contribuer à diffuser toutes les nouvelles permettant de discréditer le régime.

Bien sûr, cela se heurte au fait que le plus grand titre de gloire d’Ilham Aliev est l’écrasante victoire obtenue sur l’Arménie, en particulier la reconquête symbolique de Chouchi/Shusha.

Bloqué sur toutes les autres voies, le régime ne cesse ainsi de radicaliser sa position face à l’Arménie et multiplie les provocations et les tentatives d’intimidation contre son voisin. Malgré la position officielle, qui voudrait que la question du Karabagh serait réglée pour Bakou, la propagande chauvine et raciste anti-arménienne ne cesse ainsi de gagner en ampleur.

Et les accrochages meurtriers à la frontière Arménie-Azerbaïdjan ont été nombreux.

De l’autre côté, en Arménie, Nikol Pashinyan est parvenu à se maintenir au pouvoir malgré la défaite, sur la même ligne nationale-libérale. Il faut voir que l’ancien régime militariste pro-russe est très largement déconsidérée dans la population, notamment la jeunesse, mais aussi que Nikol Pashinyan a révisé ses positions en partie.

D’un côté, il s’est aligné officiellement sur Moscou, réclamant même que les frontières avec l’Azerbaïdjan soient désormais gardées par l’armée russe, comme le sont déjà les frontières avec la Turquie. C’est là quelque chose de très clair.

La position militaire de la Russie dans le secteur n’a pour cette raison jamais été aussi forte.

Mais de l’autre, il poursuit néanmoins sa politique pro-européenne : multipliant les accords avec l’Allemagne, notamment en terme de liaison aérienne, et avec la France, en terme de coopération militaire. L’immense ambassade des États-Unis à Yerevan se fait aussi plus active.

En résumé, on a donc un Azerbaïdjan puissant, grand acheteur d’armements et où s’ouvre d’immenses chantiers délirants en terme de BTP financés à coup de pétrodollars, avec tout un projet devant faire de Chouchi/Shusha une ville moderne à l’équipement complet en terme d’infrastructures.

La Turquie notamment cherche à s’y faire une place, voire à satelliser l’Azerbaïdjan, mais elle est dépassée en terme de capitaux par les moyens de l’Allemagne et de ses alliés, notamment la Suisse et l’Autriche, soucieux de renforcer leurs positions dans ce pays.

La Suisse est de fait un élément clef de toutes les finances d’Azerbaïdjan, qui vient d’ailleurs d’ouvrir un bureau commercial en Israël.

L’Arménie de son côté n’est qu’une bonne affaire que chacun soutient en vue de faire pression sur Bakou afin de pousser le régime à toujours plus de dépendance, de militairisme et de corruption, entraînant l’Arménie sur la même pente.

Mais avec la confrontation ouverte qui se dessine entre le bloc britannico-américain et les pays favorables à Pékin, Russie et Iran notamment, la situation risque bien de virer du tragique à l’apocalyptique.

L’Iran a annoncé la semaine passée sa volonté d’intervenir au Karabagh pour assurer la paix, afin d’éviter que l’Azerbaïdjan ne bascule trop nettement dans le camp occidental, ou du moins afin de verrouiller la situation, là aussi en instrumentalisant l’Arménie contre Bakou.

Il faut voir que pour Téhéran il y a là une question essentielle : tout le nord du pays autour de Tabriz consiste en une zone turcophone traditionnellement instable, voire hostile, qui est d’ailleurs l’Azerbaïdjan historique, le pays nommé aujourd’hui « Azerbaïdjan » n’en étant que le prolongement Transcaucasien.

Il faut également souligner que l’Afghanistan, en proie à un désastre depuis sa conquête par la superpuissance soviétique en 1979, est en train de tomber de nouveau aux mains des Talibans, avec pour le coup cette fois un appui chinois.

Toute offensive ouverte dans le Golfe persique contre l’Iran aura donc nécessairement des répercussions dramatiques en Transcaucasie d’un côté, vers l’Afghanistan de l’autre, et dans tous les cas notamment sur l’Arménie, dont l’existence ne tient de plus en plus qu’aux intérêts instables et aux manœuvres machiavéliques des puissances engagées dans ces conflits.

Il n’y a là pourtant aucun « plan » justement, c’est littéralement le sac de nœuds et l’issue, c’est la guerre et le déchirement de la région, tout cela pour satisfaire les intérêts des grandes puissances.

Et la clef, ce qui décide de la tendance générale, c’est l’affrontement entre la superpuissance américaine et son challenger chinois.

Les autres affrontements sont ce même affrontement, indirect et oblique, avec comme objectif de « bloquer » l’influence de la Chine et de ses soutiens plus ou moins alignés sur un front coupant le Proche-Orient sur cet axe mer Noire-Golfe Persique d’une part et d’autre part dans le Pacifique.

Le long de ces « fronts » la superpuissance américaine et ses alliés allument des foyers de tensions visant à multiplier les crises et à fragiliser toujours plus Pékin, alors que la Mer de Chine devient un point névralgique. L’Allemagne vient d’ailleurs d’y envoyer une frégate d’attaque et l’Inde envoie elle quatre navires de guerre de première ligne.

Le dispositif de guerre, avec des visées impériales, s’installe de manière plus forte, plus complexe, et comme avant 1914, les masses sont aveugles encore… d’où la nécessité, comme à l’époque, d’assumer les fondements de la Gauche historique et de présenter cette actualité, de la dénoncer, de la combattre!

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Guerre

L’OTAN annonce l’affrontement avec la Chine et la Russie

C’est littéralement une annonce guerrière.

La réunion du Conseil de l’Atlantique Nord tenue à Bruxelles le 14 juin 2021 a été, comme l’a annoncé son secrétaire Jens Stoltenberg, un « moment charnière ». Pour donner le ton, les dirigeants des 30 pays membres de l’OTAN ont assisté à une cérémonie d’ouverture ayant en son cœur des images figurant l’agenda OTAN 2030. C’est que les années d’ici 2030 ont comme mise en perspective l’affrontement avec la Chine et la Russie, avec l’écrasement de la Russie d’abord. C’est la ligne américaine, qui s’est imposée dans l’OTAN, même si l’Allemagne et son satellite autrichien sont des opposants sur ce point.

Il n’empêche que le communiqué du sommet de Bruxelles est tout à fait clair, reflétant une tendance générale, celle à se placer dans le giron de la superpuissance américaine dans sa guerre programmée avec son challenger chinois. Voici ce qu’on lit notamment, avec certains points mis en gras pour faciliter la lecture. On notera que l’extrait est long, tout en ne représentant qu’une petite partie du document de l’OTAN ; ce qui est ici cité est tellement essentiel qu’il faut vraiment s’y attarder.

On peut d’ailleurs se demander, à la lecture de cela, si en fait la Russie n’a pas échoué dans son opération militaire à la frontière ukrainienne. Les armes américaines continuent de se déverser sur l’Ukraine et la tension est désormais totalement favorable à l’OTAN qui multiplie les initiatives, annonçant ici clairement que l’Ukraine sera intégrée dans son dispositif. Le texte prône littéralement de faire basculer le régime russe, présenté ouvertement comme un « Etat-voyou », justifiant idéologiquement l’affrontement.

Les actions agressives de la Russie constituent une menace pour la sécurité euro-atlantique ; le terrorisme sous toutes ses formes et dans toutes ses manifestations demeure une menace persistante pour nous tous. Des acteurs étatiques et non étatiques mettent à mal l’ordre international fondé sur des règles et cherchent à fragiliser la démocratie dans le monde.

L’instabilité observée au-delà de nos frontières favorise aussi la migration irrégulière et la traite des êtres humains. L’influence croissante et les politiques internationales de la Chine peuvent présenter des défis, auxquels nous devons répondre ensemble, en tant qu’Alliance. Nous interagirons avec la Chine en vue de défendre les intérêts de l’Alliance en matière de sécurité (…).

À notre réunion de décembre 2019, à Londres, nous avons demandé au secrétaire général de mener un processus de réflexion prospective en vue de renforcer encore la dimension politique de l’OTAN, y compris les consultations. Nous prenons acte de l’importante contribution apportée par le groupe indépendant que le secrétaire général a constitué à l’appui de l’initiative OTAN 2030. En conséquence, nous approuvons aujourd’hui, dans le cadre d’OTAN 2030, un agenda transatlantique pour l’avenir (…).

Nous fixer pour but que l’OTAN devienne l’organisation internationale de référence s’agissant de comprendre les incidences du changement climatique sur la sécurité et de s’y adapter (…).

Depuis plus de vingt-cinq ans, l’OTAN s’emploie à bâtir un partenariat avec la Russie, notamment au travers du Conseil OTAN-Russie (COR). Alors que l’OTAN respecte ses engagements internationaux, la Russie continue de porter atteinte aux valeurs, aux principes, à la confiance et aux engagements qui font la substance des documents agréés sur lesquels repose la relation OTAN-Russie.

Nous réaffirmons les décisions que nous avons prises concernant la Russie au sommet du pays de Galles, en 2014, et lors de toutes nos réunions suivantes dans le cadre de l’OTAN. Nous avons suspendu toute coopération pratique, tant civile que militaire, avec la Russie, tout en restant ouverts au dialogue politique. Tant que la Russie ne montre pas qu’elle respecte le droit international et qu’elle honore ses obligations et responsabilités internationales, il ne peut y avoir de retour à la normale.

Nous continuerons de répondre à la détérioration de l’environnement de sécurité en renforçant notre posture de dissuasion et de défense, y compris par une présence avancée dans la partie orientale de l’Alliance. L’OTAN ne cherche pas la confrontation et ne représente aucune menace pour la Russie. Les décisions que nous avons prises sont pleinement compatibles avec nos engagements internationaux, et elles ne sauraient en conséquence être considérées par quiconque comme étant en contradiction avec l’Acte fondateur OTAN­-Russie.

Nous appelons la Russie à révoquer la désignation de la République tchèque et des États-Unis comme « pays inamicaux » et à s’abstenir de toute autre mesure contraire à la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques.

Le renforcement multidomaine, par la Russie, de son dispositif militaire, sa posture plus affirmée, ses capacités militaires innovantes, et ses activités provocatrices, notamment à proximité des frontières de l’OTAN, ainsi que ses exercices d’alerte de grande envergure organisés sans préavis, la poursuite du renforcement de son dispositif militaire en Crimée, le déploiement à Kaliningrad de missiles modernes à double capacité, l’intégration militaire avec le Bélarus, et les violations répétées de l’espace aérien de pays membres de l’OTAN constituent une menace grandissante pour la sécurité de la zone euro-atlantique et contribuent à l’instabilité le long des frontières de l’OTAN et au-delà.

Outre ses activités militaires, la Russie a par ailleurs intensifié ses activités hybrides visant des pays membres ou partenaires de l’OTAN, y compris par l’intermédiaire d’acteurs agissant pour son compte. Il s’agit notamment de tentatives d’ingérence dans les élections et les processus démocratiques de pays de l’Alliance, de pressions et de pratiques d’intimidation sur les plans politique et économique, de vastes campagnes de désinformation, d’actes de cybermalveillance, et de sa complaisance à l’égard des cybercriminels qui sévissent depuis son territoire, y compris ceux qui prennent pour cible des infrastructures critiques, et en perturbent le fonctionnement, dans des pays de l’OTAN.

Il s’agit également d’activités illégales et destructrices menées par les services de renseignement russes sur le territoire de pays de l’Alliance, dont certaines ont causé la mort de concitoyens et engendré d’importants dégâts matériels. Nous sommes pleinement solidaires de la République tchèque et des autres Alliés qui ont été ainsi touchés.

La Russie a continué de diversifier son arsenal nucléaire, y compris par le déploiement d’une panoplie de systèmes de missiles à courte portée et à portée intermédiaire censés exercer une action coercitive sur l’OTAN. Elle a recapitalisé environ 80 % de ses forces nucléaires stratégiques, et elle développe ses capacités nucléaires en cherchant à se doter d’armes innovantes et déstabilisatrices ainsi que de toute une gamme de systèmes à double capacité.

La Russie continue de tenir un discours nucléaire agressif et irresponsable, et elle a accru l’importance qu’elle accordait déjà aux exercices conventionnels déstabilisateurs mettant en jeu des systèmes à double capacité. La stratégie nucléaire de la Russie ainsi que son programme complet de modernisation, de diversification et d’expansion de ses systèmes d’armes nucléaires – y compris l’augmentation du nombre de ses armes nucléaires non stratégiques et leur perfectionnement – contribuent toujours davantage à une posture d’intimidation stratégique se faisant plus agressive. Nous continuerons de collaborer étroitement pour faire face à l’ensemble des menaces et des défis que présente la Russie.

Nous réitérons notre soutien à l’intégrité territoriale et à la souveraineté de l’Ukraine, de la Géorgie et de la République de Moldova à l’intérieur de leurs frontières internationalement reconnues. Nous appelons la Russie à retirer, conformément aux engagements qu’elle a pris au niveau international, les forces qu’elle a stationnées dans ces trois pays sans leur consentement. Nous condamnons fermement, et ne reconnaîtrons pas, l’annexion, illégale et illégitime, de la Crimée par la Russie, et nous dénonçons son occupation temporaire.

Les violations des droits de la personne dont sont victimes les Tatars de Crimée et les membres d’autres communautés locales doivent cesser. Le renforcement massif de son dispositif militaire et les activités déstabilisatrices auxquels la Russie s’est récemment livrée en Ukraine et alentour ont davantage encore exacerbé les tensions et porté atteinte à la sécurité.

Nous appelons la Russie à mettre fin au renforcement de son dispositif militaire, ainsi qu’à cesser d’imposer des restrictions à la navigation dans certaines parties de la mer Noire. Nous appelons également la Russie à cesser d’entraver l’accès à la mer d’Azov et aux ports ukrainiens. Nous saluons la retenue et l’approche diplomatique de l’Ukraine dans ce contexte. Nous nous efforçons de contribuer à la désescalade.

Nous intensifions par ailleurs notre soutien à l’Ukraine. Nous appelons à la pleine application des accords de Minsk par toutes les parties, et nous soutenons les efforts entrepris dans le cadre du format Normandie et du Groupe de contact trilatéral. En tant que signataire des accords de Minsk, la Russie porte une responsabilité importante à cet égard. Nous appelons la Russie à cesser d’attiser le conflit en apportant comme elle le fait un soutien financier et militaire aux formations armées qu’elle appuie dans l’est de l’Ukraine. Nous réitérons notre plein soutien à la mission spéciale d’observation de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) en Ukraine.

Nous soulignons qu’il importe que soient assurés la sécurité et l’accès total et sans entrave de cette mission sur l’ensemble du territoire de l’Ukraine, y compris la Crimée et la frontière russo-ukrainienne, comme le prévoit son mandat. Nous appelons en outre la Russie à revenir sur sa décision de reconnaître les régions géorgiennes d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud en tant qu’États indépendants, à appliquer l’accord de cessez-le-feu conclu en 2008 par l’entremise de l’UE, à mettre fin à la militarisation de ces régions, ainsi qu’aux tentatives de séparation forcée de celles-ci du reste de la Géorgie par la construction, qui se poursuit, d’obstacles s’apparentant à des frontières, et à mettre un terme aux violations des droits de la personne, aux détentions arbitraires et au harcèlement de citoyens géorgiens.

Nous réitérons notre ferme soutien en faveur des discussions internationales de Genève. Nous appelons également la Russie à prendre part de manière constructive au processus de règlement de la question de la Transnistrie. Nous sommes déterminés à soutenir les réformes démocratiques de la République de Moldova et à lui fournir une aide dans le cadre de notre initiative de renforcement des capacités de défense et des capacités de sécurité se rapportant à la défense.

Nous restons ouverts à un dialogue périodique, ciblé et substantiel avec une Russie qui soit disposée à mener des échanges au sein du COR sur la base de la réciprocité, en vue d’éviter les malentendus, les erreurs d’appréciation ou les escalades involontaires, et à accroître la transparence et la prévisibilité. Les réunions du COR nous ont aidés à communiquer clairement nos positions, et nous nous tenons prêts pour sa prochaine réunion. Nous continuerons d’axer notre dialogue avec la Russie sur les questions d’importance critique auxquelles nous sommes confrontés.

Le conflit en Ukraine et alentour est pour nous, dans les circonstances actuelles, le premier point à l’ordre du jour. L’OTAN reste déterminée à faire bon usage des lignes de communication militaires existant entre elle et la Russie afin de favoriser la prévisibilité et la transparence et de réduire les risques, et elle appelle la Russie à faire de même. Nous continuons d’aspirer à établir une relation constructive avec la Russie, lorsque ses actions le permettront (…).

Les dépenses de défense hors États-Unis ont augmenté en valeur réelle pendant sept années consécutives, ce qui vient appuyer notre responsabilité partagée de fournir des capacités à l’Alliance. Tous les Alliés ont accru leurs dépenses de défense en termes réels, et cette tendance est appelée à se poursuivre. D’ici à la fin de l’année, les Alliés européens et le Canada auront investi 260 milliards de dollars des États-Unis supplémentaires par rapport à 2014.

Par ailleurs, dix Alliés devraient consacrer cette année au moins 2 % de leur PIB à la défense. Environ deux tiers des Alliés prévoient d’atteindre ou de dépasser l’objectif des 2 % d’ici à 2024. En outre, 24 Alliés consacrent plus de 20 % de leurs dépenses de défense aux équipements majeurs, y compris la recherche et développement y afférente, et, selon leurs plans nationaux, 27 Alliés atteindront l’objectif des 20 % d’ici à 2024 (…).

Nous investissons dans nos capacités militaires afin de relever les défis nouveaux et persistants dans tous les milieux d’opérations. Nous continuons de mettre en place un éventail de capacités robustes et sophistiquées dans tous les milieux, y compris des forces et des capacités plus lourdes, davantage dans le haut du spectre, faisant appel aux technologies de pointe et mieux soutenues, au niveau de disponibilité opérationnelle requis. Nous continuerons d’améliorer et d’adapter la soutenabilité, la déployabilité et l’interopérabilité de nos capacités pour faire face à un environnement stratégique exigeant et pour mener des opérations du haut du spectre (…).

L’OTAN reste lucide quant aux défis que présente la Russie, y compris l’augmentation du nombre des armes nucléaires non stratégiques russes et leur perfectionnement (…).

Le maintien par la Russie d’une posture militaire agressive, son refus de respecter pleinement les obligations qui lui incombent en vertu du Traité sur le régime « Ciel ouvert », et le fait qu’elle applique encore de manière sélective le Document de Vienne et n’applique plus depuis longtemps le Traité sur les forces armées conventionnelles en Europe continuent de porter atteinte à la sécurité et à la stabilité de la zone euro-atlantique. Les Alliés appellent la Russie à revenir à la mise en œuvre intégrale et au respect, dans la lettre et l’esprit, de l’ensemble de ses obligations et engagements internationaux, ce qui est indispensable pour restaurer la confiance et la transparence militaire et pour accroître la prévisibilité dans la région euro-atlantique. Nous appelons en particulier la Russie à faire preuve d’ouverture et de transparence (…).

Les ambitions déclarées de la Chine et son assertivité présentent des défis systémiques pour l’ordre international fondé sur des règles et dans des domaines revêtant de l’importance pour la sécurité de l’Alliance. Nous sommes préoccupés par celles des politiques coercitives qui ne correspondent pas aux valeurs fondamentales inscrites dans le traité de Washington.

La Chine accroît rapidement son arsenal nucléaire, se dotant d’un plus grand nombre d’ogives et de vecteurs sophistiqués pour établir une triade nucléaire. Elle fait preuve d’opacité dans la mise en œuvre de la modernisation de son appareil militaire et dans celle de sa stratégie de fusion militaro-civile publiquement déclarée. Elle coopère par ailleurs avec la Russie dans le domaine militaire, notamment en participant à des exercices russes dans la zone euro-atlantique.

Nous restons préoccupés par le fait que la Chine manque souvent de transparence et a fréquemment recours à la désinformation. Nous appelons la Chine à respecter ses engagements internationaux et à agir de manière responsable au sein du système international, notamment dans les milieux spatial, cyber et maritime, en conformité avec son rôle de grande puissance (…).

Nous réitérons la décision prise en 2008 au sommet de Bucarest concernant l’Ukraine, à savoir que ce pays deviendra membre de l’Alliance, le plan d’action pour l’adhésion (MAP) faisant partie intégrante du processus ; nous réaffirmons tous les éléments de cette décision, ainsi que les décisions ultérieures, y compris celle qui prévoit que chaque partenaire sera jugé en fonction de ce qu’il aura accompli. Nous restons déterminés dans notre soutien au droit de l’Ukraine de décider librement de son avenir et de l’orientation de sa politique étrangère, sans ingérence extérieure (…).

Nous nous félicitons de la coopération qui s’exerce entre l’OTAN et l’Ukraine concernant la sécurité dans la région de la mer Noire (…).

Les Balkans occidentaux sont une région d’importance stratégique pour l’OTAN, comme l’attestent la coopération et les opérations que nous y menons de longue date (…). La coopération étroite et mutuellement bénéfique qu’entretient l’Alliance, en matière de sécurité, avec la Finlande et la Suède – partenaires bénéficiant du programme « nouvelles opportunités », qui partagent nos valeurs et qui contribuent aux opérations et missions dirigées par l’OTAN – s’est accrue dans un large éventail de domaines.

C’est la guerre qui s’annonce ici, ou plutôt qui est en train d’être mise en place. C’est la bataille pour le repartage du monde.

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Guerre

Crise ukrainienne: les États-Unis s’imposent

L’Ukraine est en passe de devenir un protectorat américain.

La situation est toujours aussi brûlante en Ukraine. Le matériel militaire continue de s’accumuler, les escarmouches et les petits bombardements ne s’arrêtent pas. Voici un rapport officiel de l’OSCE, chargé d’observer la situation. Le rapport du 6 mai montre que le nombre de « violations du cessez-le-feu » et celui des explosions ont été bien plus importants que les sept et les trente jours précédents.

Les troupes ukrainiennes sont particulièrement volontaires ces derniers jours, d’ailleurs, profitant d’aides internationales leur permettant de renforcer les possibilités d’une option de reconquête violente. Voici une image montrant l’impact d’une bombe ukrainienne ayant atterri dans un jardin d’enfants dans le quartier Petrovsky de Donetsk.

Voici des images de la ligne de front, il s’agit des séparatistes filmés par un drone ukrainien.

Et ces lignes connaissent quelques lieux de passage, plus ou moins fermés. Et également des lieux importants se retrouvant au mauvais endroit. Les cimetières de la population du Donbass qui se trouvent près de la ligne de front viennent par exemple d’être fermés pour des raisons de sécurité.

Il faut ici également avoir en tête qu’il y avait, avant la pandémie de COVID-19, des centaines de milliers de personnes passant les « frontières » entre la partie occupée par les séparatistes et l’Ukraine. Pratiquement la moitié des deux millions de personnes au Donbass sont des retraités, payés par l’Ukraine, cherchant de quoi vivre dans la partie non occupée…

Il s’agit de gens bien réels, vivant dans la misère, pris entre le marteau et l’enclume… 16 mineurs restent d’ailleurs au fond d’une mine en protestation de leurs salaires non payés dans la « République populaire de Louhansk »…

Ce qui n’empêche pas qu’au Donbass, les deux pseudos « républiques populaires » sont évidemment toujours aussi actives dans l’idéalisation de leur régime et dans leur propagande pro-russe, comme en témoigne cette banderole « Donbass russe » placée au cœur de la ville de Donetzk le 7 mai 2021.

Il y a aussi les incessants appels à ce que l’Est de l’Ukraine soit « libéré », il y a la prochaine tenue à Donetsk d’un Forum international mondial de la jeunesse Eurasia, etc.

Il y a évidemment aussi une grande mobilisation dans ces « républiques populaires » en raison des célébrations du 9 mai, jour de la victoire soviétique sur le nazisme. Conformément à l’idéologie de ces deux régimes, il y a un syncrétisme nationaliste russe / nostalgie impériale qui est mis en avant, tout ce qui est ukrainien devant disparaître. La langue ukrainienne a d’ailleurs été définitivement mis de côté chez les séparatistes en 2020.

Du côté ukrainien, malheureusement, la propagande nationaliste est tout aussi forcenée, puisqu’on a droit à une réécriture de l’histoire avec l’intégration dans les forces alliées des troupes armées nationalistes de Stepan Bandera, le fasciste ukrainien initialement allié aux nazis puis cherchant à se tourner vers les États-Unis.

Des États-Unis qui viennent d’ailleurs littéralement de transformer l’Ukraine en protectorat à l’occasion de la visite le 6 mai 2021 du secrétaire d’État américain Anthony Blinken.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky et le secrétaire d’Etat américain Anthony Blinken

Anthony Blinken a expliqué que :

« Les États-Unis sont déterminés face à l’agression russe et dans leur soutien aux réformes nécessaires pour assurer un avenir souverain, démocratique et prospère à l’Ukraine. »

Traduit en langage clair, cela signifie que l’Ukraine doit briser les oligarques et passer sous supervision américaine pour les réformes. En échange, les États-Unis fournissent toujours plus de matériel pour se protéger de la Russie, notamment les missiles anti-tanks javelins.

Le régime ukrainien s’empresse bien entendu d’accepter, alors qu’il y a en plus des visites ininterrompues de responsables politiques, tels les ministres des affaires étrangères du Benelux.

La ministre des affaires étrangères belge Sophie WIlmes, en Ukraine le 7 mai 2021

Et depuis le début de la crise, il y a un mois, de très nombreux pays se sont lancés dans une opération de soutien ouvert à l’Ukraine, avec même l’expulsion de diplomates russes. Voici une carte pour comprendre l’ampleur de la réaction en chaîne lancée par la mobilisation militaire russe à la frontière avec l’Ukraine.

En orange clair, il y a les pays prenant ouvertement partie pour l’Ukraine, de manière très volontaire. Il manque la Turquie sur cette carte, alors qu’elle a vendu des armes dont des drones. En orange foncé il y a la Finlande et la Suède qui ont une posture anti-russe formant la base de leur démarche idéologique. La Suède a par exemple rétabli le service militaire en 2017, de manière ouverte contre la Russie.

En gris foncé, en plus de la Russie, il y a les soutiens à celle-ci, qui s’opposent à des sanctions, refusent poliment mais fermement d’aider l’Ukraine, etc. Il s’agit de la Serbie, de la Hongrie, de l’Allemagne et de son satellite autrichien, et de la France.

(Source de la carte freepik)

On voit aisément que si début avril on avait un conflit « local », en un mois on a eu une mobilisation telle que cela a concerné toute une large partie de l’Europe.

Et, à cela, il faut également ajouter les accrochages entre le Tadjikistan et le Kirghizistan, du 28 avril au 1er mai 2021, qui ont fait 31 morts, plus de 230 blessés et produit 10 000 réfugiés.

C’est le prix à payer pour repousser une crise : celle-ci revient, d’autant plus violente. Car évidemment le pseudo-retrait de l’armée russe à la frontière ukrainienne n’a évidemment pas eu lieu, quelques milliers de soldats seulement partant à quelques heures de train, laissant tout leur matériel.

On ne peut pas reculer dans la bataille pour le repartage du monde. Seuls les peuples du monde peuvent empêcher cette tendance, en brisant le militarisme et son moteur capitaliste.

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Guerre

Russie-Ukraine: des escarmouches alors que continue l’accumulation de troupes

Les effectifs augmentent, les accrochages sont plus nombreux et s’intensifient.

La Femen Inna Shevchenko, qui travaille maintenant pour Charlie Hebdo, publie beaucoup de choses sur son Twitter, des choses plutôt intéressante sur la laïcité. Mais, alors qu’elle est ukrainienne, que le logo des Femen est aux couleurs ukrainiennes, elle ne dit pas un mot sur la situation actuelle. C’est un exemple assez affligeant d’inconséquence et de comportement petit-bourgeois : je fais carrière quelque part, de gauche mais pas trop, quant à mon pays et les gens qui y vivent…

Il est pourtant évident que les grandes puissances poussent à la guerre. L’Ukraine est poussée à la guerre par les États-Unis et la Russie l’est… par son propre expansionnisme. Il faut donc prendre partie contre la guerre, toujours… qui ne dit mot consent.

Il est d’ailleurs strictement impossible de ne pas voir que l’aggravation de la situation prend une tournure gravissime. Les deux armées les plus nombreuses d’Europe n’ont pas toujours cessé leur déploiement de troupes à leurs frontières ! La Russie et l’Ukraine se mobilisent littéralement…

Au 2 avril 2021, la Russie avait déjà ajouté 25 bataillons tactiques au 28 déjà présents aux frontières. Chaque bataillon consiste en un bataillon d’infanterie mécanisée, une compagnie de tanks et de l’artillerie. Et les accrochages se multiplient de manière exponentielle aux frontières des « républiques populaires » séparatistes, en fait pro-russes, de Donetzk et Louhansk, et le reste de l’Ukraine.

Violations du cessez-le-feu, au 3 avril, les sept jours précédents, les 30 jours précédents, moyenne pour 2020

Les informations télévisées russes déversent une propagande folle sur les velléités guerrières de l’Ukraine, chauffant à blanc l’opinion publique, avec notamment une fake news d’un enfant tué par un bombardement ukrainien (c’est la seule chose à ce sujet qu’Inna Shevchenko a retwitté d’ailleurs, gardant elle-même le silence).

Et en face on n’est pas en reste , l’armée ukrainienne annonçant qu’elle participerait à des opérations avec l’OTAN en mer Méditerranée et en Irak, qu’il y aurait bientôt des exercices en Ukraine même.

Exemple de folie furieuse, d’ailleurs, un avion de patrouille maritime et de lutte anti-sous-marine américain Boeing P-8A Poseidon a survolé le 3 avril 2021 la côte syrienne… utilisant son transpondeur de telle manière à ce que soit formé le nombre 46, allusion à Joe Biden, 46e président des États-Unis, qui est sur une ligne très agressive par rapport à la Russie.

Et alors que le 2 avril la France était certaine qu’il n’y aurait pas de conflit, le 3 avril il y a eu un communiqué commun des ministères des affaires étrangères de France et d’Allemagne. On y lit que :

« La France et l’Allemagne sont préoccupées par la multiplication des violations du cessez-le-feu, alors que la situation s’était stabilisée depuis juillet 2020 dans l’Est de l’Ukraine. Nous suivons avec une grande vigilance la situation, en particulier les mouvements de forces russes, et appelons les Parties à la retenue et à la désescalade immédiate des tensions. »

De par la nature des troupes envoyées par la Russie, on peut déjà lire le scénario suivant. Il va y avoir des accrochages dégénérant et la Russie va annoncer qu’elle est en nécessité d’envoyer des « gardiens de la paix » dans les zones séparatistes, afin d’obéir à sa constitution l’obligeant à protéger des citoyens russes.

Le but est de parvenir à un point de rupture pour annexer les deux « Républiques populaires ». La Russie peut avoir choisi de bouger de manière seule, ou bien elle répond à l’initiative américano-russe de lancer une opération de récupération. Peu importe, les deux sont coupables de la marche à la guerre.

Et ce n’est qu’un triste début dans une tendance à la guerre se généralisant à travers la crise du capitalisme sur toute la planète, à travers la compétition sino-américaine pour l’hégémonie mondiale.

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Guerre

L’armée américaine achète pour 22 milliards des casques Hololens Microsoft

La course aux armements passe par le renforcement de la technologie et la superpuissance américaine compte bien maintenir son hégémonie.

La professionnalisation des armées a visé à se passer d’éventuelles révoltes à la base et augmenter de manière généralisée les capacités opératoires entre les troupes. L’armée américaine est en pointe dans cette perspective. C’est le sens de l’achat qui vient d’être effectué, qui s’élève à 22 milliards de dollars. Pour comprendre l’importance de cette somme, il faut se dire que c’est grosso modo la moitié du budget militaire français annuel.

Il s’agit pour l’armée américaine de se procurer des casques HoloLens 2 produits par Microsoft, 120 000 de ces lunettes seront fournies sur dix ans. Avec ces lunettes virtuelles connectées en réseau, on peut envoyer des informations, afin de renforcer les capacités inter-opératoires. La technologie est appelée Integrated Visual Augmentation System – Système d’augmentation visuelle intégrée.

La vue du soldat, ici en mode nocturne, voit une image se superposer, ici avec un plan et la localisation des soldats

L’armée américaine avait déjà fourni 479 millions de dollars à Microsoft en 2018 pour mettre en place ce système. Cela montre comment le capitalisme américain est dans sa racine même appuyé sur le complexe militaro-industriel. Des entreprises très avancées technologiquement profitent et appuient le militarisme américain.

Il ne s’agit pas de fournir de telles lunettes à chaque soldat, mais de faire en sorte que certains leaders en disposent afin qu’on puisse en temps réel leur fournir des informations, des ordres, qu’ils aient un aperçu plus approfondi des opérations en cours. Il s’agit de renforcer l’efficacité en action mais également de relier les actions… qui sont prévues pour une action en territoire urbain.

Naturellement, la Chine qui veut devenir une superpuissance sera obligée de suivre, comme d’ailleurs toutes les puissances cherchant à obtenir des capacités d’intervention. Ces lunettes pourront également être employées dans le pays lui-même, contre les révoltes. Autant dire que c’est là une monstrueuse contribution au militarisme et à la tendance à la guerre.

Il n’existe pratiquement aucune opposition interne au sein de Microsoft : les rares critiques internes ont reproché, à l’annonce du contrat, que Microsoft signe un contrat pour des armes de guerre le jour de la « visibilité LGBT », qu’il faudrait mieux soutenir les LGBT. Ce que fait en réalité Microsoft aussi, tout comme l’armée américaine. En l’absence de repères réellement de gauche, la marche à la guerre des États-Unis se déroule ainsi sans accrocs.

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Guerre

Militarisme sino-américain: terrible menace en mer de Chine

Le challenger chinois pousse la superpuissance américaine à renforcer son agressivité, et inversement.

La superpuissance américaine a un énorme problème. La marine militaire coûte extrêmement cher, 160 milliards de dollars chaque année, en raison des exigences techniques. Et lorsque les choses se passent mal, il s’agit bien souvent de destructions totales du matériel, les navires partant par le fond : il faut donc voir les choses en grand et avoir des troupes massives. Pour les États-unis, c’est un vrai gouffre financier, surtout que la doctrine Monroe de 1823 implique que toutes les Amériques sont sous tutelle.

Face à la superpuissance soviétique se plaçant comme challenger dans les années 1970-1980, cela allait encore, car l’URSS était très en retard dans ce domaine, les questions européenne et chinoise étant au premier plan avec des troupes terrestres massivement aux frontières, à quoi s’ajoute la flotte aérienne et les missiles atomiques.

Mais avec la montée de la Chine comme challenger, les États-Unis sont obligés de se focaliser sur la marine militaire, de par la question de la mer de Chine. Cela coûte cher… sans garantie aucune, de par la fragilité des bâtiments militaires face au missiles. Mais accepter l’offensive chinoise serait risquer de perdre sa place de numéro 1 mondial.

Il faut donc que la superpuissance américaine donne une réponse au militarisme chinois qui a déjà amené l’établissement en 2014-2016 de sept îles artificielles dans le sud de la mer de Chine, dans une zone immense que la Chine entend contrôler de manière hégémonique, au grand dam du Vietnam, des Philippines et des autres pays de la région.

Les ambitions chinoises lèsent allègrement les pays voisins

La Chine s’arme ainsi massivement dans cette perspective ; rien que de 2015 à 2021, sa marine militaire est passée de 255 bâtiments à 360. C’est déjà plus que la superpuissance américaine.

Mais cette dernière a bien plus de qualité, avec d’ailleurs 330 000 marins contre 250 000 pour la Chine. Les bâtiments ont en effet plus de tonnages, avec plus de destroyers par exemples, plus de croiseurs lance-missiles. Et elle a également 50 sous-marins à propulsion nucléaire, contre 7 pour la Chine.

Et si la Chine vise rapidement à disposer de 400 bâtiments, la programmation américaine compte rattraper et dépasser ce chiffre, en maintenant l’hégémonie qualitative. D’ici 2045, les États-Unis disposeront de plus de 400 bâtiments également, avec en plus de cela autour de 200 bâtiments sans équipage. C’est dire la militarisation, puisqu’on va avoir des sortes d’énormes drones marins.

Mais arrivera-t-on jusque là ? Tous les observateurs militaires assument déjà de parler de guerre possible d’ici 5-6 ans. Et du point de vue de la Gauche, cette guerre pour le repartage du monde apparaît même comme inévitable. Les Américains ne vont pas attendre que la Chine soit à son niveau, surtout celle-ci doit importer son pétrole par l’océan et une coupure des communications maritimes serait terrible pour elle…

Du côté chinois, l’objectif est clairement la récupération de Taïwan pour obtenir l’hégémonie en mer de Chine et satelliser les pays autour. L’affrontement régional semble ainsi inévitable, la Chine voulant prendre le dessus pour déstabiliser l’hégémonie de la superpuissance américaine, cette dernière voulant inversement étouffer son challenger avant qu’il soit à son niveau.

L’engrenage est monstrueux et correspond aux exigences capitalistes de la superpuissance dominante et de son challenger, comme hier lors de l’affrontement américano-soviétique.

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Guerre

La président américain traite le président russe de « tueur »

Le nouveau président américain Joe Biden affirme chaque jour davantage la tendance à la guerre contre la Russie.

Le secrétaire à la Défense des États-Unis s’appelle Lloyd Austin et du point de vue de la gauche libérale, c’est une bonne chose que ce soit un Afro-américain. En réalité, c’est un masque pseudo-progressiste pour cacher le fait que c’est un militaire. Imaginez qu’en France un haut gradé soit ministre de la Défense, ce serait un acte inqualifiable. Eh bien aux États-Unis c’est pourtant le cas, sans aucune opposition.

Lloyd Austin a participé à l’invasion de l’Irak et de l’Afghanistan, il a été commandant des forces d’occupation américaines en Irak, il travaille pour la société de conseil WestExec Advisors qui agit dans le secteur de l’armement, il est membre du conseil d’administration de Nucor, le plus grand producteur américain d’acier (et numéro 1 dans ce secteur pour l’armée américaine), ainsi que de celui de l’entreprise d’aérospatiale et de défense Raytheon Technologies et celui de l’entreprise de santé  Tenet Healthcare.

L’équivalent du ministre de la Défense aux États-Unis est donc un militaire haut gradé payé par trois multinationales et actif dans une société de conseil de l’armement… On reconnaît ici la monstruosité qu’est le complexe militaro-industriel américain. Et cela s’inscrit dans la vague militariste que représente Joe Biden.

Photo officielle du secrétriat à la Défense pour le serment sur la Bible de Lloyd Austin lors de nomination (Source Wikipédia)

Donald Trump était le représentant d’une ligne isolationniste visant à prendre des forces pour affronter la Chine et seulement la Chine. Il n’a pas déclenché de guerre, contrairement à tous ses prédécesseurs. Il comptait reculer pour mieux sauter. Joe Biden, lui, a comme ligne d’affronter la Russie d’abord, pour ensuite étouffer la Chine.

Et le 17 mars, dans une interview à ABC News, Joe Biden est allé droit au but, tenant des propos explosifs à l’encontre de la Russie. Lorsqu’on lui a demandé s’il pensait que Vladimir Poutine était un « tueur », Joe Biden a simplement répondu « oui ». Il assume ainsi ouvertement de criminaliser la Russie, justifiant la prochaine intervention guerrière.

Il a d’ailleurs accusé la Russie d’interférence lors des dernières élections présidentielles américaines et il a souligné que Vladimir Poutine aurait à en payer le prix.

Ces propos ne sont pas simplement l’instauration d’un climat de guerre, on est déjà dans l’élan militaire lui-même, avec la mise en place des paramètres du conflit. Les États-Unis, le Royaume-Uni et la France sont très clairement dans la même perspective de pousser la Russie à la faute, de la déstabiliser, de changer le régime. Trois zones sont déjà présentés comme les lieux de confrontation armée : les États baltes, la Mer Noire et l’espace.

Il va de soi que plus la crise économique va s’amplifier, plus les tensions monteront formidablement, d’autant que la Russie n’est pas en reste sur le plan de l’agressivité. Ce sont néanmoins les États-Unis qui sont le plus pressés pour le conflit, parce que derrière ils comptent s’occuper de la Chine, et le Royaume-Uni est sur la même longueur d’onde, comme le montre le long document stratégique « Global Britain in a competitive age« .

Les velléités impérialistes ne se cachent en fait même plus… le temps presse pour eux, la crise du capitalisme donne le rythme, elle impose la fuite en avant dans la guerre comme espoir de solution.

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Politique

50 ans après les Black Panthers, les trumpistes prennent le Capitole

En occupant le Capitole, les partisans de Donald Trump révèle la cassure entre l’État américain, corrompu et en faillite, et un peuple qui croit encore pourtant au complexe militaro-industriel.

Le Capitole des États-Unis est le siège du Congrès américain, à Washington ; il se situe à environ deux kilomètres de la Maison-Blanche, alors que deux kilomètres plus loin on trouve le Pentagone.

C’est un lieu essentiel de la gestion interne de la superpuissance américaine. Il est composé de 39 bâtiments, il a son propre métro (avec trois lignes et six stations) ainsi que sa propre police et pour cause : en raison de l’important nombre de secrétaires par élus, on a 30 000 personnes au cœur des magouilles et des arrangements au service du capitalisme américain, avec même cent salles secrètes répertoriées sur aucun plan.

Le Capitole des États-Unis

En l’occupant le 6 janvier 2021 pour empêcher la reconnaissance officielle de Joe Biden comme prochain président, les partisans de Donald Trump ont joué sur une contradiction du Congrès. C’est à la fois un organisme de l’État central et en même temps un représentant de la nature fédérale du régime américain.

En pratique, c’est un lieu de corruption et de décisions reposant sur une représentation des intérêts capitalistes américains, dans le cadre d’un régime très violemment opposé à la Gauche depuis le début du 20e siècle. Impossible pour les partisans de Donald Trump de le reconnaître, aussi ont-ils mené leur occupation en force, qui a duré plusieurs heures, au nom de l’appropriation de ce qui serait à eux. Les plébéiens prennent au sérieux les prétentions du régime capitaliste.

C’est l’incohérence de la révolte américaine : elle est populaire, mais de Droite, elle voit en l’affirmation plébéienne un moyen de secouer le joug d’un État corrompu, affairiste, en faillite, avec des démocrates et des républicains magouilleurs depuis cent ans, etc. Il est significatif que la femme tuée par la police du Capitole ait servi 14 ans dans l’armée américaine, tout autant que les gens présents mêlaient prolétaires déclassés et nazis folkloriques, dans un amalgame pittoresque. Ce sont l’équivalent de nos gilets jaunes, même si en France les révoltés se veulent beaucoup plus anti-politiques, conformément à la tradition anarchiste et syndicaliste révolutionnaire française.

Il est très étonnant en tout cas qu’aucun commentateur n’ait parlé du fait qu’en 1967, les Black Panthers avaient mené une opération contre le Capitole. Cela fit grand bruit et les cadres de la Droite plébéienne autour de Donald Trump ne peuvent pas ne pas connaître cet épisode. Symboliquement, leur occupation est le pendant de celle de 1967.

Tout part d’une loi californienne de 1967 visant à interdire de se promener avec des armes chargées, une action visant à empêcher les Black Panthers de mener des patrouilles à Oakland. Une trentaine de Black Panthers allèrent alors de manière armée au Capitole, la moitié d’entre eux parvenant à la salle de l’assemblée, où ils furent désarmés et arrêtés. Légalement, ils en avaient toutefois le droit et ils furent donc libérés, leurs armes rendues.

Les Black Panthers au capitole

La police procéda toutefois à un contrôle des armes à leur sortie, alors que Bobby Seale lut une déclaration disant notamment que :

« Le parti Black Panther pour l’auto-défense appelle le peuple américain en général et le peuple noir en particulier à prendre note avec attention de la législature raciste de Californie qui envisage une législation visant à rendre les gens noirs désarmés et sans pouvoir précisément alors que les agences racistes de police à travers le pays intensifient la terreur, la brutalité, le meurtre et la répression des gens noirs. »

On remarquera au passage que ce discours, tout à fait juste à l’époque aux États-Unis, est pratiquement repris aujourd’hui par l’ultra-gauche française, ce qui n’a aucun sens. En tout cas, donc, la loi passa tout de même en Californie et par la suite, tout se termina mal pour les Black Panthers. Ceux-ci témoignaient par cette occupation de leur volonté de rester dans le cadre de la légalité, or cela les amènera à se faire arrêter ou exécuter par le FBI dans le cadre du fameux COINTELPRO.

C’est qu’on ne contourne pas le peuple impunément. Et, dans les faits, avec cette histoire de Capitole, on est dans un substitutisme à l’américaine, dont l’équivalent est l’obsession des gilets jaunes pour la marche sur l’Élysée. On est dans le symbole, la course au symbole. C’est le reflet d’une vaste agitation petite-bourgeoise – comme dans les années 1920-1930. Des années de fascisation et de fascisme.

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Politique

Occupation du Capitole : Emmanuel Macron et le Parti socialiste en panique

C’est carrément devant un drapeau américain qu’Emmanuel Macron a dénoncé l’occupation du Capitole, le Parti socialiste lui emboîtant le pas dans l’éloge de la superpuissance américaine.

La superpuissance américaine serait une « démocratie »… Que c’est ridicule ! Tout le monde sait à quel point c’est un régime corrompu, où les élections présidentielles sont prétextes aux dépenses de centaines de millions de dollars – la dernière élection présidentielle opposant Joe Biden à Donald Trump, c’est 14 milliards de dollars déversés ! Tout s’achète aux États-Unis, pays gangrené par le capitalisme à tous les niveaux.

Et c’est devant un drapeau américain qu’Emmanuel Macron a raconté ce qu’aucun Français ne peut croire : la démocratie américaine serait un modèle.

Voici son discours :

« WHAT HAPPENED TODAY IN WASHINGTON DC IS NOT AMERICA, DEFINITELY.

7 JANVIER 2021 – SEUL LE PRONONCÉ FAIT FOI

Ce 6 janvier, alors que se tenait une session du Congrès américain devant confirmer la victoire du Président Biden aux élections de novembre 2020, quelques individus violents se sont introduits dans le temple séculaire de la démocratie américaine : le Capitole.

Une femme a été tuée.

Quand, dans une des plus vieilles démocraties du monde, des partisans d’un Président sortant remettent en cause, par les armes, les résultats légitimes d’une élection, c’est une idée universelle – celle d’un homme, une voix – qui est battue en brèche.

Depuis le XVIIIème siècle, les Etats Unis d’Amérique et la France sont liés par un pacte de liberté et de démocratie.

La France, avec La Fayette, a soutenu le peuple américain dans sa quête de liberté et d’indépendance.

La France, avec Alexis de Tocqueville, a reconnu les Etats Unis d’Amérique comme un emblème de la démocratie.

Les Etats Unis d’Amérique, durant le 20ème siècle, lors des deux guerres mondiales, se sont tenus aux côtés de la France à chaque fois que son indépendance, sa liberté, furent menacées. 

Alors aujourd’hui, la France se tient aux côtés du peuple américain avec force, ferveur et détermination, et aux côtés de tous les peuples qui entendent choisir leurs dirigeants, décider de leurs destins et de leurs vies, par ce choix libre et démocratique des élections. Et nous ne cèderons rien à la violence de quelques-uns qui veulent remettre en cause cela.

C’est notre choix, depuis plusieurs siècles, de mettre la dignité humaine, la paix, le respect de l’autre, la reconnaissance de la liberté au-dessus de tout, qui est aujourd’hui menacé dans nos démocraties. 

C’est pourquoi ce soir, je veux dire notre confiance dans la force de la démocratie américaine.

Je veux dire notre amitié à l’égard du peuple et de la démocratie américaine.

Je veux dire notre lutte commune pour que nos démocraties sortent plus fortes de ce moment que nous vivons tous aujourd’hui.

I just wanted to express our friendship and our faith in the United States.

What happened today in Washington DC is not America, definitely.

We believe in the strength of our democracies. We believe in the strength of American democracy. »

Ce qui est grave, c’est que le Parti socialiste soit sur la même longueur d’onde. Au pouvoir, le Parti socialiste disait déjà tout cela. Mais là il s’aligne de lui-même, même hors des « responsabilités », sur un éloge délirant de la superpuissance américaine en perdition. Il montre qu’il ne comprend rien, qu’il est totalement hors-jeu…. Et qu’il a déjà en ligne de mire de proposer pour les prochaines présidentielles Anne Hidalgo, Christine Taubira ou François Hollande. Sa ligne, c’est celle des démocrates américains, avec la modernisation du capitalisme, les valeurs post-modernes, etc.

Voici son communiqué :

« États-Unis : le Parti socialiste salue la victoire de la démocratie contre la violence

Olivier Faure, Premier secrétaire du Parti socialiste

Jean-Marc Germain, secrétaire national aux Relations internationales

Après la consternation du monde démocratique devant les scènes d’insurrection qui ont interrompu hier au Congrès américain la certification des résultats du 3 novembre 2020, y compris de la double victoire des sénateurs en Géorgie ce 5 janvier 2021, le 46e président des États-Unis est officiellement désigné.
 
En ce jour où la démocratie américaine aura pu mener à son terme son processus électoral malgré le chaos et les violences instigués par le président sortant, le Parti socialiste réitère ses félicitations au président Joe Biden et à sa vice-présidente Kamala Harris. Ils incarnent à la fois la perspective d’un retour à l’apaisement ainsi qu’un nouveau souffle pour l’avenir de la société américaine. Il exprime aussi ses félicitations aux nouveaux élus de Géorgie, Raphaël Warnock et Jon Ossoff. Leur victoire offre à la Maison Blanche et au Parti démocrate les moyens politiques, économiques et législatifs de combattre efficacement les dégâts considérables de la pandémie causés par une gestion irresponsable, mais aussi de mettre en œuvre le programme ambitieux de progrès social et de cohésion sociétale des États-Unis.
 
Le Parti socialiste se réjouit également que l’ère nouvelle qui s’ouvre soit celle du retour de cette nation aux côtés de ses partenaires dans la résolution des grands défis du siècle, à commencer par le sauvetage de la planète face à la menace climatique. Il observe cependant qu’en dépit de la leçon de respect des institutions donnée ce jour à ceux qui souhaitent les abattre, la démocratie s’impose désormais parmi les grandes causes à défendre. Les actes insurrectionnels d’hier et l’investiture prochaine du président Joe Biden constituent ainsi un double message de responsabilité : le devoir de rétablir la confiance en la démocratie face aux mensonges qui la dégradent et l’espoir que les États-Unis reprennent leur place pour s’opposer aux forces qui veulent l’annihiler.

– Jeudi 7 janvier 2021« 

Dans tout cela on sent surtout la panique des bourgeois. Ceux-ci se doutent bien que derrière l’agitation petite-bourgeoise stérile, il y aura le rouleau compresseur prolétarien. Les années 2020 vont aller de crise en crise.

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Guerre

Les États-Unis parlent ouvertement de leur prochain conflit avec la Chine

Deux des plus hauts responsables américains, chef d’État-major et celui du Renseignement, ont affirmé le caractère central de l’affrontement avec la Chine.

Même si Donald Trump n’a pas été réélu, ce qu’il a mis en place quant à la question chinoise reste en place, parce que c’est une tendance de fond. La superpuissance américaine veut maintenir son hégémonie, la Chine veut prendre sa place à moyen terme. Les États-Unis n’attendront pas la situation d’équilibre, la Chine n’attendra pas d’être bousculée par les États-Unis. La rivalité pousse à la guerre et entraîne avec elle le reste du monde, de toutes façons également travaillée par une sortie de crise par le militarisme.

Le directeur du Renseignement national américain John Ratcliffe vient de publier une tribune dans le Wall Street Journal où il explique que :

 « La République populaire de Chine représente la plus grande menace pour l’Amérique aujourd’hui, et la plus grande menace pour la démocratie et la liberté dans le monde depuis la Seconde Guerre mondiale » 

« Pékin entend dominer les États-Unis et le reste de la planète sur les plans économique, militaire et technologique. Beaucoup des initiatives publiques majeures et les entreprises les plus en avant de la Chine n’offrent qu’une couche de camouflage au activités du Parti Communiste Chinois. »

« Pour faire face à ces menaces [d’espionnage chinois et de tentatives d’influence], j’ai dispatché des ressources à l’intérieur du budget annuel de 85 milliards de dollars du Renseignement afin d’augmenter l’orientation sur la Chine. Ce déplacement doit continuer pour assurer que le Renseignement américain a les ressources dont il a besoin pour fournir aux décideurs un aperçu non manipulé des intentions et des activités de la Chine. »

Et dans un timing convergent, le chef d’état-major de l’armée américaine Mark Milley vient de profiter d’un forum sur la Défense à l’institut naval américain pour raconter que :

 « Le défi existentiel va être la Chine. »

« Je pense que la Chine est le défi principal à la sécurité nationale américaine pour les prochaines 50-100 années. Je pense qu’un historien en 2119 se retournera vers ce siècle et écrira un livre et que le thème central de ce qu’il racontera sera le rapport entre les États-Unis et la Chine. »

 « La Chine améliore son armée très, très rapidement – dans l’espace, dans l’air, dans le cyber, sur la mer et sur la terre. »

« Ils nous dépassent dans la recherche et le développement et la mise en place. »

« Nous, les États-Unis, devons faire en sorte de ne pas perdre les avantages dont nous disposons comparé aux autres pays, en particulier en ce qui concerne la Chine. »

Il a alors expliqué qu’il fallait faire deux choses : augmenter de manière significative le budget de la marine, ce qui est déjà prévu, ainsi que généraliser la modernisation militaire en structurant des petites unités technologiquement avancées :

« On peut localiser, suivre, identifier et si on peut voir, maintenant que l’on a des armements de précision de longue portée, on peut frapper. C’est fondamental et ça a un énorme effet sur l’avenir du combat »

« Des troupes plus petites, réparties largement dans le monde et très difficile à détecter seront la clé de l’avenir militaire »

« Si vous mettez l’intelligence artificielle et si vous réalisez le travail en équipe homme-machine, si vous ajoutez cela à la robotique, placez des munitions précises et la capacités à percevoir et voir, lancez quelques armes hypersoniques et alors vous avez un glissement fondamental. »

Ce général américain est en fait un spécialiste des modalités de la guerre ; il a obtenu son premier diplôme pour une thèse de quasiment deux cent pages sur la théorie et la pratique des guérillas des organisations révolutionnaires. Il a mis en place des tests de condition physique, insiste sur la disponibilité concrète des troupes, a créé des brigades d’assistance aux forces de sécurité, joue un rôle clef dans la structuration de l’United States Army Futures Command qui s’occupe d’une vaste modernisation de l’armée américaine à tous les niveaux dans le cadre du complexe militaro-industriel américain.

L’intégration des différents niveaux d’opération est l’obsession américaine pour la prochaine guerre

La Chambre des représentants vient également de rendre plus difficile les cotations d’entreprises étrangères aux États-Unis ; officiellement c’est pour forcer les entreprises chinoises à être transparentes, mais en réalité c’est pour accélérer le découplage sino-américain. Donald Trump a également fait passer une loi pour qu’à partir de début janvier les Américains ne puissent plus investir dans des entreprises considérées comme soutenant la modernisation de l’armée chinoise. Et la Chine vient de passer premier partenaire de l’Union européenne, dépassant les États-Unis. L’Union européenne était déjà le premier partenaire commercial de la Chine depuis 2004.

Le contexte est très clairement celui d’une marche à la guerre. Même la radio France Culture peut réaliser, comme début novembre 2020, une émission pour présenter les choses ainsi. On va à la catastrophe et les peuples du monde doivent s’unir pour affirmer la paix ! S’opposer à la guerre est un défi terrible qui se pose devant nous comme responsabilité immense !

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Joe Biden ou comment Wilmington entend prendre la tête du monde

Depuis sa résidence, basée dans la petite ville des principaux sièges sociaux des ogres du capitalisme américain, le président élu Joe Biden a indiqué que son pays était prêt à conduire le monde. C’est naturellement vers la guerre contre la Chine que les États-Unis se dirigent.

Les États-Unis sont une superpuissance qui disposent de l’hégémonie à l’échelle mondiale depuis 1989 et comme ils sont au premier plan dans le capitalisme mondial, ils sont terriblement frappés par la crise ouverte à la fin de l’année 2019. Cela n’a fait qu’accélérer la considération qu’il fallait démanteler la Chine avant que celle-ci ne parvienne à un équilibre stratégique.

Donald Trump a représenté l’avènement de cette ligne et il serait erroné de penser que Joe Biden, le président élu, changera d’orientation. Celle-ci découle de la situation. Que voit-on d’ailleurs le 24 novembre 2020, alors que Joe Biden a nommé ses prochains secrétaire d’État, secrétaire de la sécurité intérieure du pays, conseiller de la sécurité nationale et envoyé spécial présidentiel pour le climat ? Qu’a-t-il dit ?

America is back

Joe Biden a dit : les États-Unis sont de retour (« America is back »). Ces propos ont été formulés en présentant son équipe dans la petite ville de Wilmington où il réside. Voici la phrase entière :

« C’est une équipe qui reflète que les États-Unis sont de retour, prêts à mener le monde [=to lead the world], pas à s’en retirer, à s’asseoir encore une fois à la table, prêt à se confronter à ses adversaires et pas à rejeter ses alliés, prêts à se lever pour défendre ses valeurs. »

C’est là ouvertement agressif. Les commentateurs américains ont tous compris d’ailleurs que cela signifiait que Joe Biden allait constituer un front pour pratiquer le rentre-dedans. Il n’est de toutes façons qu’une marionnette pour le complexe militaro-industriel américain et un pur produit du capitalisme américain : il est élu sénateur en 1972 ! Et pas n’importe où, au Delaware…

Le Delaware et Wilmington comme capitale des sièges sociaux des grandes entreprises américaines

Regardons ce qu’est Wilmington, où Joe Biden habite depuis la fin des années 1960 et où il a tenu sa conférence de presse, puisqu’il ne sera président que le 20 janvier. C’est une petite ville, de 70 000 habitants, mais la plus grande du Delaware, État américain qui sert de paradis fiscal. Elle héberge ainsi de nombreux sièges sociaux… beaucoup de sièges sociaux !

On a ainsi ceux de deux géants de la chimie : DuPont et Hercules Inc ; on a Alphabet qui est en fait le conglomérat Google, The Home Depot qui est un géant également dans la distribution d’équipement de maison. On a Kimberly-Clark, le groupe financier Wells Fargo, le conglomérat United Technologies, le laboratoire pharmaceutique Gilead Sciences, etc.

Si l’on prend les 500 plus grandes entreprises américaines, 60 % d’entre elles ont leur siège social à Wilmington !

Joe Biden, c’est l’homme de Wilmington, directement façonné par Wilmington, alors que Donald Trump était un animateur télé qui a réussi à animer les foules en faveur de la frange la plus agressive. Le déséquilibre est désormais terminé, mais pas aux dépens de la frange la plus agressive, c’est au contraire l’ensemble du capitalisme américain qui dit désormais : d’accord, on va au conflit, mais en gérant tous ensemble et comme on l’a toujours fait, et en essayant si possible de limiter la casse.

La tendance à la guerre va s’accélérer

Ce que va faire Joe Biden, c’est constituer un front et commencer à faire en sorte que les États-Unis interviennent avec d’autres, pour rétablir l’équilibre en sa faveur. L’idée est de compenser les faiblesses en pratiquant des alliances, là où Donald Trump représentait la ligne du cavalier seul. Non seulement cela ne suffira pas, mais en plus cela va ajouter de l’huile sur le feu de la bataille pour le repartage du monde.

Cela va bien entendu changer beaucoup de choses en France également. La ligne de Marine Le Pen ou de Jean-Luc Mélenchon, consistant en un appel au cavalier seul, perd alors beaucoup de valeur, puisque désormais la France peut tout naturellement s’aligner sur l’initiative américaine, maintenant ouverte aux alliances. Sans le savoir, la France vient de connaître un tournant : c’est un alignement direct sur la superpuissance américaine qui se profile.