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Lyon: feu d’artifice illégal activiste pour «la Vierge Marie»

Le gigantesque feu d’artifice illégal qui a été tiré à Lyon mardi 8 décembre 2020 illustre parfaitement l’hégémonie réactionnaire dans cette ville. C’est une action coup de force réalisée au nom de « la Vierge Marie » qui est typique de la Droite ultra dans sa version activiste catholique, disposant ici de grands moyens et d’un réseau vaste et très soudé pour organiser cela au nez et à la barbe des autorités.

Pendant des jours, l’information a circulé sur des groupes fermés WhatsApp, en toute clandestinité.

« Chers amis, le Gouvernement ne volera le 8 décembre ni à la Vierge, ni aux Lyonnais ! Infos pratiques au dernier moment… restez à l’écoute ! Invitez vos amis lyonnais en partageant ce lien.»

Le 8 décembre aurait du avoir lieu l’habituelle « Fête des lumières », mais elle a logiquement été suspendue en raison du contexte sanitaire. Les activistes de la Droite ultra ont donc sauté sur l’occasion pour s’opposer à l’État et à la municipalité, en marquant leur hégémonie sur la ville, car cette fête est justement la leur.

L’État n’a rien vu venir, ou en tout cas n’a pas été en mesure de l’empêcher. Les activistes ont déployé partout dans le centre de la ville des dizaines et des dizaines de feux d’artifices, en pleine rue, sur des places, à différents endroits stratégiques. Ils ont tous été tiré au même moment à 21h, pour un résultat forcément spectaculaire.

Les « Bad gones », les supporters ultras du club de football de la ville, ont partagé la vidéo de l’action mine de rien, pour la revendiquer sans la revendiquer, alors que la vidéo est publiée par une page « Lyon Fans » à l’esthétique tout à fait similaire à la leur.

Le message des « Bad gones » est alors grandiloquent, jouant à fond la fibre du romantisme catholique transcendant la réalité :

«  Nous vous partageons la dernière vidéo qui a été publiée, on ne s’en lasse toujours pas…

Montez le son et asseyez vous confortablement devant un grand écran !

….

Depuis hier dans les rues de Lyon, la question est sur toutes les lèvres…

Qui a fait ça ???

Qui est responsable de ce feu d’artifice aux quatres coins de notre belle cité ???

Des supporters de L’OL ?

Des amoureux de la capitale des Gaules ?

Des artificiers amateurs ?

L’opération du saint-esprit ?

Peut-être un peu de tout ça…. Mais qui sait…

Ce qui est sur c’est que les Lyonnais et la Vierge Marie se souviendront longtemps de ce 8 décembre 2020.

La clameur qui est montée des rues à la fin du spectacle en témoigne !

Dans la pure tradition populaire de cette fête centenaire, sans touristes sans sponsors et sans artifices commerciaux, des gones (et peut être aussi des fenottes [= de femmes supportrices]) ont rendu hommage à la protectrice de la ville et ont paré cette dernière de ses plus beaux atours !!

Qui que ce soit, qu’ils en soient ici loués !!!

Vive Lyon, vive le 8 décembre et Merci Marie !!! »

La vidéo (visible ici) est montée de manière très professionnelle, avec des prises de vue de haute qualité, montrant que tout à été préparé minutieusement, avec de grands moyens. Le tout se terminant de manière épique par un ridicule « Merci Marie ».

On a là tout un romantisme typiquement identitaire, jouant sur la pseudo-tradition de la « fête des Lumière » existant depuis 1852. Chaque 8 décembre en effet, il est censé falloir « illuminer la ville » et monter sur la colline de Fourvière pour… rendre hommage à la « Vierge Marie » et à sa « protection » contre les épidémies.

« 1852 », c’est-à-dire le XIXe siècle, c’est-à-dire plus de 50 ans après la Révolution française et l’avènement de la bourgeoisie, en pleine révolution industrielle, après le siècle des Lumières. Il ne s’agit donc là évidemment pas d’une tradition populaire, mais bien d’une construction idéologique réactionnaire montée de toute pièce par l’Église catholique, pour préserver sa domination culturelle contre la modernité portée par la bourgeoisie et la classe ouvrière émergente.

L’Église catholique a d’ailleurs fait ériger une basilique quelques années plus tard au sommet de cette colline de Fourvière, alors qu’en 1854 était choisi justement le 8 décembre pour fêter « l’Immaculée Conception ».

Il s’agit là d’une conception particulièrement délirante, mais hautement symbolique, voulant que « Marie » aurait enfanté Jésus, mais sans avoir été « souillée » du péché originel, c’est à dire de l’acte sexuel. C’est une façon de rejeter la nature, la réalité concrète et immédiate, au profit d’un mysticisme transcendant.

C’est donc un symbole très important pour la Droite ultra, qui a besoin justement de ce genre de romantisme mobilisateur. Il a donc été mis le paquet sur cette date, en profitant du confinement pour trouver un prétexte afin de s’opposer à l’État et apparaître comme rebelle, anti-système, etc., dans la plus pure tradition de l’extrême-Droite française.

Cela a forcément coûté très cher et a nécessité une logistique complexe. On comprend immédiatement à l’esthétique de la vidéo et aux images qu’il y a à l’origine de ce coup d’éclat des ultras, qui ne peuvent s’empêcher de se montrer avec un vêtement de marque « North Face » et des fumigènes. Mais forcément, pour un tel ouvrage, ils n’ont pas agi seuls et disposent d’une assise particulièrement forte dans le centre de la ville.

La Droite a d’ailleurs immédiatement soutenu l’opération, alors que celle-ci relève d’un délit très grave en raison de sa dangerosité. Pierre-Damien Gerbeaux, conseiller municipal LR de Caluire-et-Cuire, commune jouxtant Lyon, a trouvé l’idée « lumineuse », en prétendant à une « ingéniosité populaire » et moquant « le maire écologiste qui, vexé, après avoir fait la chasse au Tour de France, fait la chasse aux pétards ».

Béatrice de Montille, conseillère municipale LR à Lyon a pour sa part totalement assumé :

« dans le contexte de crise sanitaire et de confinement, cette opération a fait du bien ».

Un tel événement rappelle un problème de fond avec les trois grandes villes françaises. Marseille est inexistante politiquement de par son arriération dans le triptyque football – mafia – misère. Paris est présente avec le triptyque bobo – soirées branchées – consommation stylée. Lyon est quant à elle présente avec le triptyque bourgeois traditionnel – identitaire – catholicisme.

Dans un tel panorama, avec la crise en cours, Lyon risque donc de donner le ton d’un nouvel activisme, conforme aux besoins de la « Droite populaire » en cours de formation. Celle-ci étant appuyée intellectuellement par Marion Maréchal et son école « Science po » de droite, implantée à Lyon justement. C’est une vraie menace, que la Gauche de cette ville est incapable de freiner malheureusement.

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Pierre de Villiers, c’est La Rocque!

L’affaire de Conflans-Sainte-Honorine a très largement mobilisé la Droite et le militaire Pierre de Villiers en a profité pour se lâcher et pratiquement annoncer sa candidature à la présidentielle de 2022.

La journaliste Ruth Elkrief a invité le 24 octobre 2020 Pierre de Villiers dans son émission et elle a été d’une obséquiosité totale pendant une heure entière. Quant au haut-gradé de l’armée se voyant bien le prochain Napoléon III, le prochain Pétain, le prochain De Gaulle de 1958, voire tout cela en même temps (avec un mélange social, catholique, nationaliste impérial), il a bien tenu une position ouatée de réconciliation de tout le monde avec tout le monde, dans l’esprit de son ouvrage venant de sortir, L’équilibre est un courage.

Il a cependant abattu ses cartes politiques, enfin, et ce sont bien sûr celles de la Droite ultra. Ainsi, Ruth Elkrief lui a demandé s’il prendrait position en cas de duel Emmanuel Macron – Marine Le Pen au second tour des présidentielles : Pierre de Villiers a refusé de répondre, expliquant même que Marine Le Pen avait fait les bons constats. Il lui reproche cependant de ne pas être crédible, alors que lui bien sûr l’est, de par ses fonctions à la tête de l’État, etc., etc., etc.

Ce qu’il reproche aux « patriotes », c’est de vouloir tout tout de suite et de ne pas viser à mobiliser de manière large ; Pierre de Villiers insiste de manière régulière lors de ses interventions sur l’intégration des jeunes d’origine immigrée dans un dispositif militarisé. Il appelle cela le rétablissement de l’autorité, par opposition à l’autoritarisme, car comme il l’a encore dit chez Ruth Elkrief, lui veut que les gens soient comme des soldats et suivent de manière volontaire, etc., etc. etc.

Pierre de Villiers est d’ailleurs monsieur « etc. etc. etc. » ; il a un discours répétitif, toujours le même à part désormais donc pour une ligne de Droite assumée, ce qui en fait un néo-gaulliste au sens strict. On répète la même chose en boucle, en revenant toujours à l’autorité. On voit déjà qu’il se positionne pour être le candidat de la Droite : on pourra dire en 2022 que sa campagne a commencé cette fin octobre 2020.

Impossible de ne pas voir bien sûr que Marion Maréchal est forcément très proche. Chez Ruth Elkrief, Pierre de Villiers a tenu exactement le même « occidentalisme », se revendiquant même de son frère :

« Je pense que sur le thème de l’islamisation de notre société et du danger islamiste, Philippe de Villiers avait eu cette intuition il y a déjà longtemps. »

Le tout est dit en douceur, exactement comme le faisaient les Napoléon III, Pétain, De Gaulle. C’est la dictature ouatée de militaires paternalistes, la douceur de l’étrangleur de la démocratie. Une douceur dont s’extasie parallèlement Paris Match, qui concurrence Ruth Elkrief dans la servitude volontaire. L’article décrit les intervention de l’ex-chef d’état-major des armées aux Mureaux, à 40 km de Paris et connu pour sa situation sociale dramatique.

« Niaki, Roger, Ousmane, Rodrigue, Siham opinent. Le général poursuit. Il faut y croire : dans la prairie de la vie, ils constituent la bonne herbe, et pour que celle-ci ne se laisse pas étouffer par la mauvaise, il n’y a pas à tortiller, il faut tondre ras. Ras et souvent. Le général demande du pain. Personne ne l’entend, il attrape une tranche.

Etonnant combien ce militaire parle doux. Donnait-il ainsi ses ordres quand, à la tête du bataillon d’infanterie mécanisée de la brigade Leclerc, il entra le premier au Kosovo ? Commandait-il gentiment ses 2 500 hommes dans les champs de bataille d’Afghanistan ? (…)

« Je respecte ces jeunes, dit-il, ils sentent mon autorité et mon humanité, je les aime. (…)

Le général de Villiers aime ses lecteurs, les gosses des cités, les gamins des écoles de commerce comme il aime le drapeau, la patrie et comme il aima ses soldats avec lesquels il jouait au foot et enchaînait les footings (…).

Il rejoint sur le terrain voisin Rodrigue, Niaki, Ousmane et les autres. Match de foot. « Je les aime », dit-il encore. Décidément, Pierre de Villiers n’est pas fait pour la politique. »

C’est l’argument principal : le général ne fait pas de politique, il n’est là que pour servir objectivement, pour remettre de l’autorité. Telle est la position du dictateur à la française : il faut le remercier de se sacrifier pour la patrie et d’ailleurs il faudrait faire de même. La bourgeoisie a déjà trouvé son héraut pour ses menées militaristes, impérialistes.

Et même si ce n’est pas Pierre de Villiers, ce sera son clone, car on est là très précisément dans les fondamentaux du fascisme français. Pierre de Villiers, c’est La Rocque, c’est la même Droite que celle des années 1930 : populaire militarisée et national-républicaine, occidentaliste et hiérarchique, avec le même expansionnisme « impérial ».

Préparons nous donc à ce que, comme La Rocque, il trouve face à lui le Front populaire !

> Lire également : Meurtre de Conflans-Sainte-Honorine: le général Pierre de Villiers ne rate pas l’occasion de se placer

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Marion Maréchal appelle à la mobilisation générale contre l’islam en mode «choc des civilisations»

La Droite est en pleine offensive et forcément, Marion Maréchal est là pour donner son avis et tracer des lignes. C’est dans Le Figaro qu’elle publie une longue tribune dans laquelle elle appelle à cogner fort contre l’islam, pour jouer enfin la carte du « choc des civilisations » dont rêve l’extrême-Droite depuis des années et des années.

Marion Maréchal n’y va pas de main morte dans sa tribune publiée par Le Figaro le 22 octobre 2020. Pour elle, il faut viser l’islam en général et pas seulement l’islamisme, la laïcité n’est pas la réponse et les personnes musulmanes issues de l’immigration sont ouvertement désignées.

Quand elle dénonce l’islam, elle ne le fait évidemment pas au nom de la Raison et des Lumières, avec comme référence l’Humanisme averroïste et l’universalisme. Marion Maréchal relève elle-même du romantisme religieux, dans sa version catholique française, et elle considère en fait l’islam comme un concurrent de son propre modèle. C’est la ligne qu’on peut qualifier d’occidentaliste.

Cela est exprimé de manière très claire dans ce passage de sa tribune, qui est absolument fondamental pour comprendre la dynamique actuelle de la Droite française dont elle est devenue une figure très importante :

« Quelle image leur renvoyons-nous? Pour eux nous sommes des mécréants, des jouisseurs, des consuméristes, des athées qui méprisons le sacré ; nous sommes la société du vide, de l’individualisme et du relativisme. Pour eux nous avons tué Dieu, la patrie, la famille. Ils voient une société sans courage, juste bonne à faire des marches blanches, à allumer des bougies et à crier «vous n’aurez pas ma haine». Contrairement à eux, nous avons oublié qu’islam et Europe n’ont cessé de s’affronter depuis 13 siècles. »

Les mots sont choisis avec une très grande précision, de manière très subtile. La description qu’elle fait de l’image renvoyée par la société actuelle aux musulmans n’est aucunement une dénonciation. Marion Maréchal a tout à fait compris que l’islam en France relève d’un romantisme contre la société moderne, d’une fausse révolte puisant de manière romantique dans le passé… Et justement, ce romantisme est exactement du même type que le sien !

La vision de la société qu’elle décrit s’applique mot pour mot tout aussi bien pour la Droite de type catholique, identitaire, etc. Ce qu’elle pense donc, et c’est extrêmement clair dans ce passage, ce n’est pas que l’islam est erroné, que les islamistes ont tort au sens strict, mais qu’il s’agit d’une « civilisation » concurrente avec laquelle il s’agit de s’affronter.

Toute sa tribune relève de cette pensée, qui d’ailleurs n’a rien de nouvelle à l’extrême-Droite française, mais qui est maintenant formulée à grande échelle si l’on peut dire, en parfaite concordance avec l’actualité. Voici plusieurs extraits, afin de bien saisir la dimension offensive de son propos, qui ne souffre d’aucune ambiguïté :

« C’est une œuvre de subversion organisée de l’intérieur et souvent alimentée par l’extérieur. Cette influence extérieure trouve prise dans les allégeances multiples des individus ; en l’occurrence, pour une grande partie des musulmans, dans l’attache à leur pays d’origine, à l’Oumma (l’assemblée des croyants), au sunnisme, etc. »

« Leurs armes: le nombre, la jeunesse, des alliés objectifs islamo-gauchistes qui cultivent la repentance occidentale, l’injonction au vivre-ensemble, les droits de l’Homme dévoyés, un islam en expansion au niveau mondial.

Les nôtres? La laïcité et pas grand-chose de plus. »

« Nous invoquons comme une évidence un concept parfaitement assimilé en Europe mais inconnu de l’islam et des civilisations islamiques: la séparation du public et du privé, du spirituel et du temporel, du politique et du religieux, de Dieu et de César.

La rhétorique est inopérante en particulier auprès d’une grande partie de la jeunesse française musulmane dont je rappelle que 74 % font passer leurs convictions religieuses avant les «valeurs de la Républiques» et 26 % ne condamnent pas les djihadistes (sondage Ifop réalisé en 2020 sur les 15-24 ans). »

« En appeler uniquement à la laïcité pour traiter la question de l’islamisme, c’est une manière de réduire le débat à la question religieuse et d’ignorer le fait social qu’est l’Islam. C’est détourner le regard du sujet de la politique d’immigration, de la délinquance endémique qui est le terreau de la radicalité, du communautarisme islamique lié au nombre, de l’échec de l’assimilation ; bref de la dimension civilisationnelle du problème. »

« Le combat ne peut pas être gagné uniquement par du légalisme. C’est un combat global historique, spirituel, culturel, intellectuel, éducatif. C’est un combat moral qui passera d’abord par l’affirmation et la fierté de ce que nous sommes. C’est un combat de civilisation et quiconque refusera de voir cette dimension a déjà perdu. »

Ces propos sont très violents et relèvent quasiment d’un appel à la guerre civile en France contre l’islam. C’est une tentative de régénération nationale par une sorte de néo-croisade à l’intérieur même du pays.

Il ne faudrait surtout pas croire ici qu’il s’agit d’un simple racisme anti-arabe et qu’on aurait à faire en 2020 à une Droite et une extrême-Droite en mode ratonnade populiste contre les « bougnoules ». Marion Maréchal ne parle jamais d’origines dans le sens ethnique et son propos n’a aucune dimension raciale au sens strict ; ce qu’elle joue, c’est le « choc de civilisation », avec la France catholique et anti-moderne comme place forte de l’« Occident » contre l’« Orient ».

Face à cela, la Gauche doit brandir haut et fort le drapeau de l’universalisme, assumer la Raison contre la haine et les arriérations religieuses, mettre en avant l’Histoire contre les romantismes pillant le passé de manière fantasmée, et assumer le Socialisme comme la seule perspective possible pour l’humanité.

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Robert Ménard se fait détruire par Charlie Hebdo

Tel est pris qui croyait prendre ! Le populiste d’extrême-Droite Robert Ménard s’est senti pousser des ailes avec l’actualité et a cru qu’il pourrait s’accaparer l’esprit « Charlie » avec une campagne d’affichage municipale reprenant une couverture de Charlie Hebdo.

Cela était très présomptueux de sa part, car il s’est logiquement fait détruire par Charlie Hebdo, dans un communiqué aussi simple qu’efficace !

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Michel Onfray dans le Figaro pour une «troisième voie»

Dénonçant la gauche postmoderne tout en attaquant la Gauche historique, Michel Onfray se place pour devenir un théoricien relevant de l’extrême-Droite au sens strict.

Michel Onfray a publié dans Le Figaro une sorte de petit « manifeste » : « La Gauche acéphale ». C’est un pas de plus de sa part vers un engagement politique avec une ambition extrême. De fait, il formule une thèse assez simple, malgré tout un saupoudrage de références diverses et variées digne d’Eric Zemmour.

Ce que dit Michel Onfray, pas en ces termes mais c’est pareil, c’est qu’auparavant il y avait la Gauche historique et que désormais il y a la « gauche » postmoderne. Les deux ont failli, il faut donc une troisième voie.

Cette troisième voie a déjà un nom : le Fascisme, mais Michel Onfray n’assume pas encore, bien que le contenu de sa future revue « Front populaire » va être toujours plus clair, surtout avec la propagation de la crise.

Surtout que, inévitablement, la Gauche historique va revenir en force. Michel Onfray fait fonction ici d’obstacle à cela. C’est pour cela que Le Figaro présente ce petit écrit comme un « texte lumineux ».

Voici comment Michel Onfray dénonce la Gauche historique, celle de la lutte des classes :

« Il y eut une guerre franco-allemande perdue par la France dont on ne parle pas: c’est celle qui a opposé l’idéaliste Marx au pragmatique Proudhon.

Marx a bien sûr gagné ce combat. Il eut un allié de poids avec Lénine puis Staline, qui ont appliqué la théorie communiste sur une grande partie de l’Europe. Je sais que les dévots du concept estiment que le goulag n’était pas chez Marx, mais la légitimation de la violence s’y trouve. Or, le goulag n’est jamais que l’une des formes prises par cette violence. »

Puis vient mai 1968 et une victoire, selon Michel Onfray, de la gauche postmoderne. C’est tout à fait erroné, car en réalité ce qui suit mai 1968, c’est une frange de la Gauche historique passant dans la violence et ébranlant plusieurs pays : l’Italie, l’Allemagne de l’Ouest, la France, le Japon, les États-Unis.

Toutefois Michel Onfray est un intellectuel et son horizon se réduit aux intellectuels. Comme le structuralisme l’emporte dans les universités, alors il n’y a que cela qui existe. Il est dénoncé en les termes suivants :

« Le structuralisme annonce, avec force démonstrations obscures, qu’il existerait des structures invisibles, indicibles, ineffables qui gouverneraient tout ce qui est! Exit l’Histoire, vive le règne des Idées pures (…).

Elle [= la gauche française après 1991] a donc tourné son regard vers l’ouest et, fascinée par les campus américains, elle a demandé du contenu idéologique aux néostructuralistes qui avaient dépassé le marxisme dogmatique au profit du gauchisme culturel (…) [qui] critique, entre autres: la raison occidentale, la possibilité d’une vérité, le «phallogocentrisme» pour utiliser le concept de Derrida qui dénonce ainsi le pouvoir des discours du mâle blanc occidental, les processus démocratiques du débat et de la décision, la séparation des sexes, l’écriture de l’Histoire par les Occidentaux.

En même temps, elle adoube les marges comme des centres: les homosexuels, les transgenres, les femmes, les Noirs et les Maghrébins, les immigrés, les musulmans, mais aussi, ce sont les sujets de prédilection de Foucault, les prisonniers, les fous, les hermaphrodites, les criminels, sinon, ce sont là les héros de Deleuze, les drogués ou les schizophrènes. »

Michel Onfray en conclut que :

« La gauche marxiste monolithique, perdue après la mort de Marx et de son empire, a laissé place à une gauche moléculaire. La première visait l’universalisation de sa révolution ; la seconde, la généralisation du communautarisme. L’ancienne faisait peur au capital, la seconde le réjouit. »

Il y a ici une allusion très précise. Le terme « moléculaire » est une allusion au principe de « révolution moléculaire » de Félix Guattari, l’auteur avec Gilles Deleuze de « Mille plateaux ». Ces deux auteurs sont des figures majeures du courant « désirant », dont Julien Coupat et « l’insurrection qui vient » sont grosso modo des représentants.

Ce courant « désirant », si puissant il y a peu de temps encore, a d’ailleurs laissé sa place à l’activisme postmoderne, tout comme justement le structuralisme a cédé la placé au post-structuralisme base de l’idéologie postmoderne.

Il y a des nuances et différences entre les deux, mais Michel Onfray s’en moque (ou ne saisit pas que ce n’est pas la même chose), avec raison somme toute puisque les deux sont assimilables, et en conclut… non pas qu’il faille un retour à la Gauche historique, mais une réaffirmation de Proudhon. Par « acéphale », faut-il voir une allusion à Georges Bataille, philosophe mystico-désirant ? Peut-être pas mais le problème est facile à comprendre : les tenants de Proudhon sont éclectiques et assument.

C’est le propre du style fasciste. Michel Onfray aborde les choses de la même manière et on voit mal comment il ne pourra pas toujours plus se révéler un pion au service du Fascisme… Même s’il espère en devenir le roi.

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Décès de l’historien Zeev Sternhell

Zeev Sternhell (1935-2020) a été un historien assez connu en France, à défaut d’être reconnu. La raison est que cet Israélien a considéré que le Fascisme en tant qu’idéologie puise dans la « droite révolutionnaire » française du XIXe siècle. Les historiens français considèrent au contraire que la France est historiquement imperméable au Fascisme.

Jeune Juif polonais fuyant les persécutions nazies, Zeev Sternhell passa plusieurs années en France avant de rejoindre Israël en 1951. Cela explique son tropisme français et ses œuvres ayant provoqué une vive polémique dans les milieux intellectuels français : Maurice Barrès et le nationalisme français ; La Droite révolutionnaire, 1885-1914 : les origines françaises du fascisme ; Ni droite ni gauche : l’idéologie fasciste en France.

La problématique est la même que chez Bernard-Henri Lévy avec L’Idéologie française. Tant Lévy que Sternhell, tous deux Juifs, disent que l’idéologie du régime de Vichy ne tombe pas du ciel mais qu’il existe bien une tradition fasciste spécifiquement française, d’orientation spiritualiste et vitaliste, consistant en une Droite à prétention conservatrice « révolutionnaire ».

Tous deux se sont fait écharpés par le milieu universitaire français : on ne touche pas si aisément à Barrès, Péguy, Bergson, ces monstres sacrés, ces idoles du fond français régionaliste, paysagiste, décentralisateur, tourné vers le spirituel, célébrant le culte des ancêtres, adepte du terroir.

On avait ici le fond d’une véritable critique des mentalités, une chose que la Gauche de notre pays n’a jamais fait, au contraire notamment de la Gauche allemande, italienne, autrichienne, russe… qui a souvent voire toujours porté son attention sur les mœurs, les comportements, les attitudes, etc.

Tant Bernard-Henri Lévy que Zeev Sternhell reprenaient d’ailleurs, en fin de compte, la critique marxiste d’une France de gauche pétrifiée dans le syndicalisme et farouchement anti-intellectuelle, au point de converger avec l’extrême-Droite.

Ils l’ont cependant abandonné. Bernard-Henri Lévy, d’une famille richissime, a choisi d’abandonner toute prétention intellectuelle pour jouer au « nouveau philosophe » à travers des Essais et vivre une vie dans l’opulence. Zeev Sternhell a lui mené une carrière dans la Gauche israélienne, notamment avec Shalom Archav (La Paix Maintenant), cherchant à faire revivre un sionisme de gauche bien spécifique aux années 1930-1960.

C’est que Zeev Sternhell, comme Bernard-Henri Lévy, était un intellectuel pour qui l’histoire, c’était l’histoire des idées. Tous deux pensaient que si une idéologie était démolie dans un ouvrage, alors elle le serait concrètement sur le terrain matériel. Il s’agit concrètement d’hégéliens de gauche cherchant à faire avancer l’histoire au moyen d’une dynamique des idées.

Chez Zeev Sternhell, les idées ont leur propre vie : elles avancent toutes seules, elles reculent toutes seules, et elles envoûtent les gens – ou pas.

Ce qui est assez flagrant, par exemple, est qu’on lit toujours au sujet de Zeev Sternhell qu’il aurait le premier dit qu’il aurait existé un Fascisme français. Or, la Gauche historique l’a dit bien avant lui et il y a même eu… le Front populaire. Mais ni les partisans ni les détracteurs de Zeev Sternhell n’abordent cette question, ni même Zeev Sternhell. On est dans le monde des idées, dans un idéalisme universitaire tout à fait traditionnel, entièrement extérieur au mouvement ouvrier. Le Fascisme comme réalité concrète, Zeev Sternhell ne l’aborde pas.

Il aura d’ailleurs fallu attendre 2019 pour qu’il aborde les Croix de Feu, et encore sous sa direction seulement. C’est là trois années après un un dossier maoïste à ce sujet, qu’il a forcément vu, ce qui le place à la remorque dans l’analyse. Il rate pareillement totalement des figures comme Bernanos ou Drieu La Rochelle, ce qui est pour le coup ridicule quand on se propose de parler du Fascisme en France.

C’est que là est le problème de fond : une analyse de l’extérieur permet un regard critique plus incisif, ce qui aide beaucoup. L’ensemble des dirigeants de l’extrême-Gauche en 1968 était d’origine juive, à peu de choses près. Cependant, si ce n’est pas aligné sur un mouvement historique réel, on passe dans des idées qui deviennent des abstractions. Cela donne alors un Daniel Cohn-Bendit beauf et conformiste, à l’opposé du contestataire de mai 1968.

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Un triste exemple de comment quelqu’un comme Damien Rieu a un boulevard

Damien Rieu est un propagandiste très actif sur internet ; figure des identitaires, il est désormais assistant parlementaire du député européen Philippe Olivier, élu sur la liste du Rassemblement national. Le succès du rassemblement du Collectif La Vérité Pour Adama et son soutien quasi unanime à Gauche depuis le départ est pour lui une incroyable aubaine. En un tweet, il peut agir en démolisseur.

En niant les ouvriers et en niant la bataille collective au profit des acquis individuels, la « gauche » postmoderne est passé dans le camp du libéralisme et du populisme, avec un soutien massif au communautarisme. La société serait en effet une bourse où des idées s’affrontent médiatiquement pour acquérir une certaine hégémonie.

C’est la négation complète de la lutte des classes et il est aisé pour la démagogie d’extrême-Droite d’intervenir alors et de rappeler la réalité sociale. Il n’est ici même pas besoin de transformer les faits, comme c’est si souvent le cas. La « gauche » postmoderne est tellement sur une autre planète qu’il suffit de raconter. Quand en plus la famille d’Adama Traoré refuse de rencontrer la garde des sceaux hier, alors qu’elle a accepté par contre de rencontrer le président du Mali, on est là pratiquement dans un feuilleton dans lequel le scénariste a prévu de faire gagner l’extrême-Droite à la fin.

Notons bien que la réalité a un tout autre scénario, puisque le cœur de la réalité c’est la crise sanitaire et son impact économique (et inversement si on pense que la destruction de la nature par l’économie capitaliste est la cause du problème). Mais apparemment, cela n’intéresse pas grand monde, tout le monde étant très content de reprendre tout comme avant.

Que ce soit le cas pour le Collectif La Vérité Pour Adama, c’est cohérent, puisqu’on est dans une démarche directement parallèle ou convergente avec les « Indigènes de la République ». Que ce soit le cas pour l’extrême-Droite, c’est tout à fait logique avec sa quête de détourner l’attention du réel.

Mais comment la Gauche a-t-elle pu décrocher au point de ne pas voir que l’actualité, c’est la crise, que tout le reste n’est qu’opérations pour détourner l’attention de l’impact terrible qu’elle va avoir ?

Et comment des gens se voulant de Gauche ont-ils pu cesser tout regard critique au point de se mettre à la remorque d’une initiative comme le Collectif La Vérité Pour Adama, dont les définitions politiques, sociales, culturelles, idéologiques… n’ont rien à voir avec elle ?

Et comment ne pas voir que cette focalisation sur la police est typique de l’anarchisme, de l’esprit petit-bourgeois qui dénonce l’État mais en même temps ne le dénonce pas ?

Imaginons que les policiers soient aux ordres du capitalisme. Cela change-t-il qu’ils ne sont, au mieux ou au pire, qu’un aspect secondaire de la question fondamentale ? C’est là même une question réglée par le mouvement ouvrier il y a plus de cent ans ! Et on en revient à un tel niveau d’immédiatisme !

La vérité, c’est que toute ce bruit occupe un espace qui devrait avoir comme actualité la crise sanitaire, la crise économique, le rapport à la nature en général, le sort des animaux dans le monde en particulier. Et on a rien de cela, car tout est fait pour se tourner vers des courants identitaires, des mouvements protestataires de type « sociétal », des démarches ne touchant absolument jamais ni au capitalisme, ni aux couches dominantes.

Et les gagnants d’un tel cul-de-sac, ce sont les gens comme Damien Rieu avec leur proposition d’un « réalisme » d’extrême-Droite, qui est le masque de la militarisation et d’une pression anti-populaire maximale.

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Attaques de groupes violents d’extrême-Droite à Paris et Chambéry

Exactement sept ans après la mort de Clément Méric, l’extrême-Droite a mené des opérations de casse à Paris et Chambéry afin d’œuvrer dans le sens de la provocation. C’est son rôle que de chercher à produire une fausse actualité alors que la crise s’accentue.

La frange violente de l’extrême-Droite a mené plusieurs attaques le même jour. À Chambéry ce sont les locaux du PCF ainsi que l’espace autogéré L’insolente qui ont été victimes de dégradations. On est ici dans une expression « offensive », car la région dispose de très solides réseaux violents historiquement. C’est un coup de pression visant à maintenir tout un rapport de force.

 

 

À Paris on a été dans une expression « défensive », car en région parisienne l’extrême-Droite a beaucoup de mal et ne s’est pratiquement jamais relevé de la grande offensive du SCALP des années 1980, ainsi que des « chasseurs de skins » et des « redskins ». Le propriétaire du bar attaqué est d’ailleurs un « redskins » historique des années 1980, entre-temps devenu biker après avoir été une figure du syndicat syndicaliste-révolutionnaire CNT.

Le « Saint-Sauveur » est au cœur de Belleville, au cœur du dernier quartier parisien encore largement marqué par une culture de gauche en général et un esprit contestataire parisien « à l’ancienne ». Voici le communiqué du bar.

Le groupe d’extrême-Droite qui a attaqué est tout à fait représentatif de ce qui a émergé ces dernières années à la marge du Rassemblement National. Il s’agit d’une mouvance violente et provocatrice, puisant dans le style « casual » (c’est-à-dire post-hooligan) pour un mélange de nationalisme et de virilisme.

Si l’approche s’imagine être celle du Fascisme italien, on est bien plutôt dans le style espagnol des années 1930 : ultra-minoritaire, à l’ombre d’une extrême-Droite avec une large base et d’autant plus ultra-provocateur, limitation de la démarche au style et au nationalisme anti « système ». Le communiqué du groupe est tout à fait représentatif de la démarche.

Ces groupes accordent une attention précise à leur démarche provocatrice. Ainsi, il y a tout un jeu du chat et de la souris avec les « antifas » ; en l’occurrence, la photographie des « zouaves » après leur attaque a été prise derrière la porte d’Auteuil, dans un endroit isolé où ont coutume de se rejoindre les « ultras » du Paris Saint-Germain.

C’est tout un jeu malsain pour attirer l’attention, avec une copie des styles, des looks, des iconographies, du type d’action, etc. Il s’agit de semer la confusion, de focaliser les attentions, afin d’empêcher qu’on puisse s’orienter et que des méthodes qui n’ont rien à voir avec celles du mouvement ouvrier ou de l’antifascisme historique se diffusent. Un exemple connu est que la police d’écriture historique des fascistes italiens des années 1970 est désormais couramment employée par des « antifas », ce qui se veut une « récupération », mais est en réalité une acculturation.

Le nom du bar attaqué, le Saint Sauveur, provient également d’une chanson du groupe La Souris Déglinguée qui s’est placée historiquement exactement entre les deux fronts, avec une énorme ambiguïté (pas raciste mais d’esprit soldat perdu, nationalisme et anti-communisme mais dans un esprit rocker tourné vers le punk, affirmation de la révolte de la jeunesse, etc.), se résolvant naturellement parfois brutalement dans le public de leurs concerts.

Le but des fascistes est, on l’aura compris, de contribuer à la déformation du contenu de la Gauche, à exciter les attentions et à monopoliser les esprits. C’est tout à fait flagrant alors qu’une crise sans précédent touche la France et va avoir des conséquences immenses.

Le communiqué diffusé par le média d’extrême-Droite « Ouest Casual » souligne également cet aspect, avec un calcul particulièrement intelligent. Il est en effet appelé à être encore plus « radical », à s’opposer au « système ».

Il est joué sur la fierté, sur l’honneur patriarcal, sur la « radicalité »… afin de pousser à la faute, à l’isolement social, au refus de l’Unité de la Gauche. Le communiqué vise autant à donner à l’extrême-Droite une image de « véritable » ennemi du « système » qu’à pousser ceux qui sont ses ennemis à se précipiter dans son piège d’une « course » à la « radicalité ».

Le communiqué est ici un cas d’école et tout à fait représentatif de quelle est l’approche des groupes violents d’extrême-Droite qui, on l’aura compris, cherchent à former une nouvelle vague.

« La descente des Zouaves Paris en plein Ménilmontant a été un vrai moment de plaisir pour tout esprit éclairé qui ne peut pas encadrer la mouvance antifasciste, à juste titre. Au-delà du beau coup de pression qui leur a été mis dans la gueule, cette attaque a dévoilé au grand jour les contradictions et le ridicule idéologique dans lesquels baignent les antifas.
 
On a ainsi pu voir le Vice-président du Sénat se pointer au Saint-Sauveur pour « témoigner de sa solidarité », Jean-Luc Mélenchon partager le statut du leader de L’AFA Marseille prenant parti pour ses copains parisiens, le député LFI Éric Coquerel dénoncer les « fassistes » (sic), et toute une traînée d’autres mange-merdes, députés, élus municipaux, conseillers d’Anne-Hidalgo se répandre en discours larmoyants.
Il y a franchement de quoi ricaner quand on assiste aux déballages de communication de l’Action Antifasciste Paris-Banlieue sur leur pseudo radicalité et leur soi-disant posture anti-système, qui ne trompe plus personne, hormis eux.
 
Cela rappelle curieusement les hommages gênants rendus à Clément Meric au lendemain de sa mort par toute une clique de politiciens, allant du NPA à l’UMP (on se souvient notamment de Nathalie Kosciusko-Morizet se pointant comme une fleur à la manifestation de l’AFA, ou des scènes du Premier Ministre et du Ministre de l’Intérieur, promettant de dissoudre autant de mouvements nationalistes que possible). Sans compter les litanies délirantes des medias dominants à la gloire de Méric, qui a claqué pour avoir pris la confiance face à plus fort que lui.
 
Un jeune bourgeois étudiant à Sciences-Po et ses potes bien blancs agressant un prolo nationaliste d’origine espagnole ? On croirait au début d’une blague, dont la suite est d’ailleurs franchement drôle.
 
On entend d’ici les antifas rétorquer qu’ils n’ont sucé personne pour avoir droit à toutes ces bienveillances politico-médiatiques. Peut-être. Mais on attend encore qu’ils envoient promener tous ces politiciens et ces journalistes complaisants si ce n’est complices, et qu’ils leur signifient que leur solidarité, ils n’en ont rien à carrer. À croire qu’ils trouvent la situation confortable.
 
Alors, malgré les communiqués pitoyables des antifas tentant de transformer une défaite en une semi-victoire, comme l’a si bien dit un de leur pote, « WALLAH LES ZOUAVES PARIS ILS ONT ENCULÉ LE SAINT-SAUVEUR ».
 
Heureusement, le Système est là pour leur mettre du baume sur le fondement, comme d’habitude. »

Il y a ici un piège complet et, malheureusement, on peut se douter qu’il y aura beaucoup de jeunes hommes tombant dedans, se précipitant dedans par méconnaissance, incompréhension (ou même refus) du mouvement ouvrier et des véritables enjeux qu’il y a en réalité.

Mais c’est qu’ici, il faut savoir distinguer l’antifascisme né du mouvement ouvrier (avec le Front populaire français ou l’Action antifasciste allemande des années 1930), des « antifas » des années 2010 qui sont une nouvelle variété d’anarchisme.

 

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Politique

Extrême-Droite: le Brexit célébré par les tenants sociaux-nationalistes du «Frexit»

Le Brexit est entré en vigueur et c’est le début de la formation d’un bloc de plus dans la bataille pour le repartage du monde, celui avec le Royaume-Uni comme centre de gravité et rassemblant les pays du Commonwealth. Les sociaux-nationalistes français ont fêté cela et espèrent que cela va aider leur argumentation démagogique en faveur du « Frexit ». Pour eux, la France doit faire de même et, voyant un espace, ils se rassemblent.

Vendredi 31 janvier 2020 on a eu droit à un rassemblement avec les principales figures du social-nationalisme français, pour « fêter » l’entrée en vigueur du Brexit. Organisé par l’Union Populaire Républicaine (UPR) de François Asselineau, on y trouve toutes les principales figures soutenant cette ligne, et donc pas Marine Le Pen qui l’a abandonnée à la suite de la défaite à la Présidentielle.

Il manque toutefois également le Pôle de Renaissance Communiste en France (PRCF), qui se réjouit également du Brexit, bien que de manière critique, et prône un « Frexit progressiste ». Le PRCF est relativement influent comme « gauche » du PCF et prône un retour à la ligne sociale-patriotique du PCF des années 1960-1980 (« Patriotisme et combat pour le socialisme sont indissociables ! »).

Voici le communiqué entier de l’UPR, qui doit faire froid dans le dos à tout antifasciste. On a ici en effet une convergence sociale-nationaliste qu’il serait absurde de balayer d’un revers de la main. C’est une vraie proposition stratégique qui se forme ici, représentant une menace démagogique majeure.

« François Asselineau a organisé ce vendredi 31 janvier 2020 une grande soirée pour célébrer l’évènement historique que constitue le Brexit, à l’espace « Atelier Basfroi » dans le 11ème arrondissement de Paris.

S’inscrivant dans l’esprit du Conseil national de a Résistance de 1943-44, cet événement politique exceptionnel a permis de rassembler, le temps d’une soirée, des personnalités françaises de bords politiques très différents mais partageant une même joie de voir nos voisins britanniques se libérer de la tyrannie de l’Union européenne.

Notre photo montre ainsi tous les responsables réunis se réjouir de la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne, au moment des 12 coups de minuit. De gauche à droite :

  • Florian Philippot, Président des Patriotes, ancien Vice-Président du Front National,

  • Martine Fumey, vice présidente du Club des entreprises Numéros 1 français de l’export,

  • Dominique Jamet, cofondateur de l’Union nationale citoyenne, ancien Vice-Président de Debout La France, ancien journaliste à Marianne, France-Soir et au Figaro,

  • Nicolas Dupont-Aignan, président de Debout La France, député, ancien candidat aux élections présidentielles de 2012 et 2017,

  • (derrière Nicolas Dupont-Aignan) : Pierre Lévy, rédacteur en chef du mensuel Ruptures, ancien journaliste à l’Humanité et ancien militant syndical à la CGT.

  • Jacques Cheminade, président de Solidarité & Progrès, ancien candidat aux élections présidentielles de 1995, 2012 et 2017,

  • François Asselineau, président-fondateur de l’UPR, ancien candidat à l’élection présidentielles de 2017, organisateur de la Grande Fête du Brexit,

  • Philippe Pascot, écrivain et ancien maire-adjoint d’Évry auprès de Manuel Valls,

  • Jean-Frédéric Poisson, Président du Parti Chrétien Démocrate, ancien maire de Rambouillet et ancien député des Yvelines,

  • John Laughland, universitaire anglais, de nationalité française et britannique, auteur de The tainted sources of Europe, traduit en français par « la liberté des nations »

  • Gilles Casanova, secrétaire général adjoint du Front démocrate et de l’Union des Démocrates et des Écologistes, ancien conseiller de Jean-Pierre Chevènement,

  • Djordje Kuzmanovic, président de République souveraine, ancien porte-parole et conseiller de Jean-Luc Mélenchon pour les questions internationales et de défense,

  • (derrière Djordje Kuzmanovic ) : David Bourgeois, représentant des Gilets jaunes.

Le Comte de Paris, Jean d’Orléans, prétendant au trône de France, avait envoyé son représentant personnel, Bruno Cazelles, à titre d’observateur (non présent sur la photo). »

Cette dernière remarque en dit long sur les ambitions réactionnaires de ce projet social-nationaliste, qui vise à faire s’effondrer la Gauche en se plaçant à droite de Marine Le Pen, qui sera présentée comme pas assez « souverainiste ». Il y a un vrai public pour ce mouvement : toute la génération passée par la lessiveuse Dieudonné-Soral. La menace est très claire.

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Politique

Municipales: Andréa Kotarac, tête de liste du Rassemblement national à Lyon

En avril 2019, Andréa Kotarac alors à la France insoumise de Jean-Luc Mélenchon était présent lors d’un forum international organisé par la Russie de Poutine, à Yalta. Le malaise fut profond à Gauche puisque Marion Maréchal et Thierry Mariani, passé au Rassemblement national pour les Européennes, étaient également de la partie. Le 15 mai 2019, Andréa Kotarac appelait officiellement à voter RN, avant de complètement basculer en devenant militant du parti d’extrême droite.

En octobre 2019, Andréa Kotarac est investi à Lyon pour le Rassemblement National dans le cadre des élections municipales. Il est ainsi propulsé comme tête de liste du parti pour la métropole, alors que le mandat pour la ville est assuré par Agnès Marion, une « historique » entrée au parti grâce à l’appui de Bruno Gollnisch, professeur de japonais à l’université Lyon 3 surnommé le « baron » de l’extrême-droite locale.

Le RN jubile de cette grosse prise et avance l’idée que ce sont « deux profils complémentaires », l’un incarné par Agnès Marion, catholique et mère de six enfants, l’autre incarné par Andréa Kotarac à la métropole afin de faire la jonction « avec les classes populaires ».

Ce qui est terrible, c’est qu’Andréa Kotarac était considéré il y a encore quelques années comme une figure montante du mouvement de Jean-Luc Mélenchon. Non pas simplement de la France insoumise, lancée comme mouvement d’appui à la candidature de Jean-Luc Mélenchon aux Présidentielles de 2017, mais également du Parti de gauche qu’il avait rejoint dès ses débuts. Il était même devenu coresponsable de la jeunesse du Front de gauche en 2012.

En effet, aux élections municipales de 2014, alors âgé de 24 ans, Andréa Kotarac était investi sur la liste « Lyon citoyen et solidaire » soutenu par le Parti de gauche dans la course au mandat du 8e arrondissement lyonnais, un secteur populaire de Lyon, avec son quartier des États-Unis.

C’est en ce sens qu’on comprend que ce basculement d’Andréa Kotarac est un coup dur pour la Gauche lyonnaise. En mai 2019, Jean-Charles Kohlhaas, élu du Rassemblement Citoyen Ecologiste et Solidaire (RCES) à la région Auvergne Rhône-Alpes au journal « 20 minutes » précisait à propos de lui :

« Il a été formé au sein du mouvement de lutte antifa. Cela faisait partie de son ADN. Il a pris des coups dans les manifestations (et s’est retrouvé e garde à vue). Il était vraiment à 10.000 lieues du front national »

En effet, sans être forcément « antifa », Andréa Kotarac, s’est retrouvé en garde en vue en avril 2012 après des échauffourées avec des militants d’extrême-droite devant l’université Lyon 3. Et c’est bien là le problème !

Car le transfuge du parti de gauche vers le RN est-il un retournement contre-nature ? Évidemment non, mais faut-il encore comprendre comment l’extrême-Droite fonctionne, comment elle avance au niveau idéologique et politique. Il faut pour cela comprendre que « lutter » ou défendre le « social » n’est pas en soi un marqueur à Gauche, car cela peut être absorbé par une proposition nationaliste, souverainiste.

Or, cette analyse liée à la Gauche historique, c’est toujours ce qu’ont refusé Jean-Luc Mélenchon et son entourage. Pourtant, avec une telle analyse, il était facile de constater que les signaux était déjà au rouge. Andréa Kotarac était depuis longtemps très proche du souverainiste populiste Djordje Kuzmanovic, lui aussi parti de La France insoumise pour fonder un micro-parti (« République souveraine »).

Le cas « Andréa Kotarac » exigerait une grande remise à plat, un retour critique de ses anciens camarades… Perdre un sympathisant est une chose, perdre un cadre au bénéfice des fachos en est une autre !

> Lire également : De la FI au RN, Andréa Kotarac : l’inévitable convergence des populismes

Andréa Kotarac, tête de liste du RN à la métropole de Lyon, c’est la mort de deux stratégies de lutte contre l’extrême droite, celle du nivellement par le bas représenté par le populisme insoumis et celle du « coup de poing » ultra des « antifas ».

Cela les cadres du RN l’ont bien compris. Comme le dit Thibaut Monnier, co-fondateur avec Marion Maréchal de l’ISSEP et chargé de cours en négociation, également présent sur la liste d’extrême-droite :

« Je suis très fier de vous proposer ma candidature sur cette circonscription qui réunit le 5ème et 9ème arrondissement de #Lyon et très heureux d’être aux côtés d’André Kotarac qui a réussi l’exploit historique de réunir tous les amoureux sincères de notre beau territoire et de la France ! ».

Une telle percée politique de l’extrême-Droite doit nécessairement provoquer un électrochoc à Gauche. La situation exige un retour aux traditions historiques de la Gauche, celles de la SFIO et de la SFIC, du refus du nationalisme, de l’unité populaire à la base, du Front populaire contre la montée du fascisme.

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Guerre

Marine Le Pen candidate en 2022: lui barrer la route coûte que coûte

Le 16 janvier, Marine Le Pen a annoncé qu’elle sera candidate aux élections présidentielles de 2022. Il faut l’unité de la Gauche dès le premier tour et quoi qu’il arrive, il faudra empêcher l’accession d’une figure d’extrême-droite au poste de Président.

Marine Le Pen a confirmé à Nanterre, dans les locaux du Rassemblement national, qu’elle sera candidate à la Présidentielle de 2022, confirmant des propos tenus en octobre 2019. Le moment choisi est idéal évidemment à ses yeux puisqu’elle a dénoncé les syndicats réformistes et s’est placée contre la réforme des retraites. Comme aux municipales un bon score est déjà prévu, elle se présente comme la véritable figure de l’opposition.

Si, en plus, l’ouverture à la Droite fonctionne, alors il y a effectivement les moyens de réussir pour elle. Il suffira de proposer un pacte gouvernemental en intégrant diverses figures, telle Marion Maréchal, pour asseoir une base suffisamment large.

Il n’y a donc pas le choix. Il faut un candidat unique de la Gauche dès le premier tour de la présidentielle. Il faut s’opposer dans tous les cas au second tour à Marine Le Pen, si elle y parvient.

Il est courant d’entendre des gens dire avoir voté pour Emmanuel Macron pour contrer Marine Le Pen, mais qu’ils ne le referont pas. C’est là totalement erroné, car c’est oublier ce qu’est le Fascisme. Évidemment, il y a l’ultra-gauche pour qui la France est déjà un État policier, une dictature. Mais si on connaît l’Histoire, on sait que c’est n’importe quoi et que le Fascisme c’est totalement autre chose qu’un régime autoritaire bourgeois classique.

Qui plus est, les gens ne comprennent pas qu’avec une posture de dégoût, ils tombent dans la démagogie du Fascisme justement, qui vise à rejeter la politique comme quelque chose de dégoûtant, corrompu, etc. Pour dire les choses plus simplement, une lecture anarchiste des choses, anti-politique, contribue aux tendances anti-démocratiques représentées par le Fascisme.

Le constat est simple. Il faut sauver les principes démocratiques et cela n’est pas possible si la démagogie de l’extrême-Droite l’emporte. Il faut donc rassembler les efforts coûte que coûte et il est évident qu’une Gauche non unie au premier tour n’accédera pas au second tour. Il ne s’agit pas de penser que le régime présidentiel de la Ve République est démocratique – il ne l’est pas. Il s’agit d’empêcher l’extrême-Droite de réaliser un saut qualitatif.

Et si jamais la Gauche ne parvient pas au second tour, il faudra voter même pour Emmanuel Macron, là encore pour bloquer la route à l’extrême-Droite. Il y aura bien sûr les « ultras » pour dire que ce serait cautionner Emmanuel Macron et empêcher l’émergence d’une contestation à Gauche, mais en réalité le fond de cette posture, c’est la position de la terre brûlée. C’est l’idée qu’il faudrait que les gens connaissent le pire pour réagir. C’est du suicide.

Nous ne sommes pas à la veille de la révolution ou d’un basculement à Gauche. Qui le dit ment et ne peut mentir que sciemment, car il est frappant que le niveau de conscience populaire est faible, que le nombre d’activistes de gauche est misérable, que l’individualisme règne, que le nationalisme imprègne les valeurs.

Ce que nous risquons, c’est le basculement dans l’hégémonie d’une figure à la Donald Trump, Boris Johnson, Jair Bolsonaro, Vladimir Poutine, Xi Jinping, Recep Tayyip Erdoğan, Rodrigo Duterte.

Ce serait amener la France sur le terrain des va-t-en guerre ouverts, de l’aventurisme militaro-expansionniste ouvert.

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«Serons-nous débarrassés de Macron ou de la CGT?»

Il est un article sans intérêt de la revue de droite Causeur dont le titre dit par contre beaucoup de choses. Si la grève contre la réforme des retraites échoue, la CGT va profondément reculer et c’est un coup symbolique contre le « communisme ». Si Emmanuel Macron recule, il part perdant aux prochaines élections présidentielles et c’est un boulevard pour l’alliance Droite/extrême-Droite.

L’article de Causeur, en date du 31 décembre, reflète parfaitement les espoirs de la Droite et de l’extrême-Droite. Une partie importante de la bourgeoisie s’est rangée derrière Emmanuel Macron le progressiste, le moderniste. S’il échoue dans ses réformes, il perd sa crédibilité et cela laisse de la place pour une nouvelle proposition stratégique, celle d’une remise à plat sous la forme d’un tournant à la fois militariste et nationaliste.

Cela est d’autant plus vrai qu’une large partie de la Gauche ayant soutenu Emmanuel Macron au second tour de la présidentielle, au nom du rejet de l’extrême-Droite, dit ouvertement aujourd’hui qu’elle ne le refera pas, que Marine Le Pen n’aurait pas fait pire, etc. C’est une position absurde, mais malheureusement de plus en plus partagée.

On retrouve ici l’illusion selon laquelle il faudrait la terre brûlée et tout reprendre à zéro. Comme si l’extrême-Droite allait attendre que la Gauche se reconstitue ! Il faut ici avoir conscience que le barrage à toute avancée de l’extrême-Droite est primordiale. Croire qu’un basculement dans une alliance Droite/extrême-Droite ne changerait rien, voire aiderait à reconstituer la Gauche, cela s’appelle une pensée suicidaire !

Il faut être réaliste et bien voir que l’échec de la grève contre la réforme des retraites implique un profond élan populiste. Inversement, la victoire de la grève implique un passage à la lutte de classes que les syndicats ne veulent pas. Les syndicats ne posent aucune question selon un agenda politique de gauche ; ce qui les intéresse, c’est leur insertion dans les rapports sociaux, comme leviers pour les négociations. Il n’en ressort donc rien.

L’incohérence est particulièrement marquée du côté de la CGT. Le 1er janvier, le secrétaire général de la CGT Philippe Martinez était invité sur BFM TV et la radio RMC, et il a appelé à mener « des grèves partout, dans le public, dans le privé ». Cependant, cela ne se décrète pas et encore moins plusieurs semaines après le début du mouvement. Et jusqu’à présent, la CGT a toujours cherché à maintenir la chape de plomb syndicale, s’opposant de fait à l’affirmation du principe des assemblées générales au-delà des syndicats.

> Lire également : Assemblée générale et non intersyndicale ou gilets jaunes

La Gauche est donc coincée, car elle dépend d’une CGT qui refuse la politique, sans parler de Force Ouvrière qui est très violemment anti-politique et a toujours été opposé de la manière la plus farouche à l’hégémonie de la Gauche politique (ce qui n’est pas étonnant pour un syndicat ouvertement né avec l’appui de la CIA juste après la Seconde Guerre mondiale, afin de faire barrage à toute union de la Gauche en France).

Et la Gauche est aussi bloquée par l’immense faiblesse de ses forces, qui plus est éparpillée. Cela laisse peu de perspectives à part un intense travail de fond, qui accapare les énergies et qui est moqué par l’ultra-gauche s’imaginant la France au bord du grand soir, alors qu’on est bien plus proche de l’instauration d’un État autoritaire assumé, au nom de l’unité nationale.

Déjà Emmanuel Macron y est allé de sa petite phrase, lors de ses « vœux présidentiels » :

« 2020 doit ouvrir la décennie de l’unité retrouvée de la Nation.

Je vois trop de divisions au nom des origines, des religions, des intérêts. Je lutterai avec détermination contre les forces qui minent l’unité nationale et dans les prochaines semaines je prendrai de nouvelles décisions sur ce sujet. »

Emmanuel Macron a joué ici les mystérieux, mais l’on sait ce que cela signifie : la crispation militariste et nationaliste de l’État, parallèlement à celle du pays.

Seule la lutte de classes peut débloquer la situation. Et cela ne passe pas par la CGT, mais par son dépassement démocratique à la base, dans un élan populaire politique reconstituant la Gauche culturellement et politiquement.

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Grève à la fin décembre 2019: la fuite en avant de la CGT

Contrairement au discours entièrement triomphalistes des syndicats, la grève de décembre s’enlise en raison des comportements individualistes des grévistes eux-mêmes. Chassez le naturel d’une vie façonnée par le capitalisme, il revient au galop. La CGT a donc décidé de jouer le tout pour le tout avec le blocage des raffineries annoncé pour la semaine prochaine pour trois jours, avec possibilité de grève générale.

La CGT a publié une vidéo à l’occasion d’un petit message pour Noël, le 24. C’est une catastrophe mal ficelée avec un début beauf (le tintement provoqué par des « boules ») et en seconde partie l’insupportable rock festif tant affectionné en France du côté de la ringardise populiste « de gauche ».

Ce qui est révélateur, c’est le nombre de visionnages en une semaine, puisqu’on dépasse à peine les 2 000 vues. C’est une marginalisation typique de la Gauche actuelle dans notre pays malheureusement, mais pour un syndicat se voulant un mouvement de masse, c’est simplement terrible.

 

Cela reflète une situation culturelle catastrophique et, de manière typique du syndicalisme français, il y a une compensation par la fuite en avant. Au lieu de conquérir les mentalités, les esprits, il y a cette idée de forcer les choses.

C’est la raison des coupures d’électricité menées ponctuellement lors de la grève, comme lors des matchs de rugby Agen-Toulouse et Castres-Lyon le 21 décembre. C’est l’idée qu’une intervention volontariste peut apporter suffisamment de nuisance pour forcer le cours des choses.

C’est en ce sens qu’il faut comprendre la déclaration de Thierry Defresne, délégué central de la CGT chez Total, annonçant le blocage de toutes les raffineries de France du 7 au 10 janvier 2020. Jusqu’à présent, seule celle de Grandpuits (Seine-et-Marne) l’était depuis le départ, aux côtés de celle de La Mède et d’une troisième par moment.

Le délégué CGT, qui a fait l’annonce sur France info, a évidemment menacé du « grand soir » :

« Ce sera un blocage total. A l’issue de ces 96 heures de grève on se posera la question de savoir si l’on passe à l’étape de l’arrêt des installations. »

C’est évidemment là un bluff, car pour bloquer les carburants à l’échelle du pays, il faudrait une CGT aussi rude ou solide, selon ce qu’on voudra, que celle du début des années 1950. Qui peut croire que ce syndicat aux mains de bureaucrates au mode de vie relevant littéralement de l’aristocratie ouvrière vont chercher à soulever le pays ?

Mais la question fondamentale n’est en fait pas là. Car en annonçant une bataille du 7 au 9 janvier, alors que la prochaine manifestation a lieu le 9 justement, il y a l’idée d’apporter du sang frais à la grève actuelle – surtout voire seulement des cheminots et à la RATP – qui s’enlise de par le manque de solidité de la base, d’organisation.

Il y a la détermination d’une frange du mouvement, mais rien de galvanisé, rien de structuré, le volontarisme compensant tout pour l’instant, jusqu’au moment justement où cela ne suffira pas. La CGT espère compenser les manques… avec un autre volontarisme. C’est une fuite en avant.

Et à lire la folie furieuse de l’ultra-gauche parlant d’une grève victorieuse pour l’instant, se généralisant, etc. on comprend que concrètement il a toute une vielle Gauche syndicaliste d’un côté, l’ultra-gauche de l’autre, qui cherchent à sauver leur existence dans une France ayant profondément changé.

L’idée est de tenir coûte que coûte pour ne pas disparaître, jusqu’à ce qu’il y ait un mouvement populaire pour permettre de reprendre des forces. Sauf que les gens ne sont pas dupes et ne vont pas se lancer dans la bataille de leur vie pour la CGT et les cheminots.

On assiste donc à une séquence historiquement très importante, puisqu’il y a les élections municipales en mars. On risque donc d’avoir, comme en Italie au début des années 1920, un mouvement social économiste sans débouché politique ni perspective, une Droite aux aguets par peur de la lutte des classes et une extrême-Droite récupérant la déception.

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Mouvement de décembre 2019: les Français ne veulent pas le changement

On l’avait déjà vu avec les gilets jaunes, un mouvement anti-politique exigeant que tout revienne comme avant. On a la même chose avec le mouvement contre la réforme des retraites : les Français sont tournés vers le passé. Leur désir d’utopie est absolument nul. Et on le voit bien : culturellement, les syndicalistes sont profondément réactionnaires. Non seulement, tout cela est improductif, mais cela va produire un romantisme d’extrême-Droite, un « conservatisme révolutionnaire ».

Du point de vue de la Gauche, tout le monde sait qu’il y a une grogne sociale extrêmement profonde en France. On sait que cela va exploser et il y avait une sacrée chance pour que le mouvement de décembre contre la réforme des retraites en soit le déclencheur.

On a tout de suite vu que ce ne serait pas le cas. Seuls les secteurs concernés par les retraites spéciales devant disparaître se sont mobilisés en tant que tels, appuyés par quelques îlots syndicaux ailleurs. Mais il n’y a pas eu l’étincelle et, surtout, encore moins la flamme.

Les anarchistes cherchent à forcer les choses comme d’habitude, avec de la casse et des « blocages », mais cela ne fait qu’un contraste très fort avec des cortèges syndicaux littéralement sans âme. D’ailleurs, pour la manifestation du 17 décembre la police a quadrillé le terrain et anéantit les possibilités de casse à Nantes et à Paris… montrant bien que, dans les autres cas, il y a une mansuétude complète.

C’est qu’un régime cherchant à développer encore plus le libéralisme comprend bien que des ennemis comme les syndicalistes à la française et les anarchistes à la française, cela ne pèse pas lourd. Car les syndicats sont intégrés aux institutions et accepteront toujours finalement de négocier, alors que les anarchistes ne peuvent, par définition, rien proposer qui ait une dimension politique.

Si on ajoute à cela le côté fondamentalement ringard des Français – à part de la jeunesse qui connaît elle une véritable révolution sur le plan de la modernité, en décalage total donc – alors il ne peut rien se passer. En fait, on se demande même si c’est le même peuple qui a pu faire mai 1968 quand on voit le tableau actuel.

Il ne faut pas oublier ici que ces vingt dernières années, nombre de gens qu’on va dire « alternatifs » se sont exilés dans d’autres pays, ou ont mené un exil intérieur dans un isolement social prononcé. Des forces vives significatives ont été perdues, lassées du refus catégorique de la France de laisser émerger des démarches alternatives, en rupture avec le triptyque travail – famille – patrie.

Emmanuel Macron a pu, pour cette raison, apparaître comme un moderne, alors qu’il est simplement de la Droite libérale comme le fut Simone Veil. On a d’ailleurs toute une mouvance à l’américaine diffusant l’ultra-libéralisme en faisant passer cela pour du « progressisme » de gauche (PMA, GPA, LMGBTIQ+, légalisation du cannabis, droit au suicide, prostituées comme « travailleuses du sexe », écriture inclusive, théorie du genre, etc.)

Cette situation est puissamment corrosive et cela se lit dans les énormes succès de l’extrême-Droite dans les zones populaires. Ce phénomène est international par ailleurs, comme on le voit avec Donald Trump. Il y a une liquidation de toutes les valeurs du mouvement ouvrier sous les coups de boutoirs d’une petite-bourgeoisie universitaire « progressiste » – même les communiqués officiels centraux de la CGT utilisent en partie l’écriture inclusive, ce qui fait bien rire tellement les ouvriers sont, à juste titre, rétifs à une telle démarche idéaliste.

Ce qu’il faut craindre, si l’ennui syndicaliste et la vanité anarchiste se perpétuent à travers une situation de crise comme actuellement, c’est l’émergence structurée d’un romantisme « anticapitaliste » porté par l’extrême-Droite, qui profite de nombreux laboratoires d’idées pour échafauder des concepts, des styles, des « perspectives », etc.

Il faut le dire : on est dans le même cas de figure que l’Italie du début des années 1920, avec des libéraux, des syndicalistes sans utopie, une extrême-Droite « romantique » prête à se lancer. On va tout droit à la catastrophe.

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Guerre

Valeurs Actuelles en appelle au militaire Pierre de Villiers pour la tête de l’État

La revue représentative de la haute bourgeoisie favorable à l’alliance de la Droite et de l’extrême-Droite a publié un article élogieux au sujet de Pierre de Villiers, ancien chef d’État-Major des armées devenu une idole militariste depuis son affrontement ouvert avec les autorités civiles en 2017. On est là dans une logique du coup d’État militaire absolument typique de la culture politique française.

Alors que le chef d’état-major de l’armée de terre Thierry Burkhard pourfend Charlie Hebdo pour son antimilitarisme, Valeurs Actuelles fait une sort d’allégeance à Pierre de Villiers. C’est un signe de notre époque, un signe résolument fort.

Celui-ci a été chef d’État-Major des armées de 2014 à 2017 ; il est connu pour avoir lancé lors du huis-clos de la commission de la Défense de l’Assemblée nationale, en 2017 :

« Je ne me laisserai pas baiser comme ça »

Recadré par Emmanuel Macron, il s’est alors fendu d’une tribune dans Le Figaro (« Soyons fiers de nos armées françaises »), puis d’un long message sur Facebook. Il finit par démissionner avec un message formant une sorte d’appel du pied nationaliste et militariste, alors qu’il est ouvertement soutenu par une lettre ouverte au Président de la République de 15 hauts gradés à la retraite.

Nous sommes alors en juillet 2017 et dès novembre, Pierre Le Jolis de Villiers de Saintignon (c’est son nom complet) publie un ouvrage, Servir. Il publie l’année d’après Qu’est-ce qu’un chef ? et est recruté par le Boston Consulting Group, un cabinet international de conseil en stratégie.

Le président de la partie française, avec 600 personnes, de ce groupe brassant des milliards de dollars, est Guillaume Charlin, l’un des tout premiers soutiens d’Emmanuel Macron.

Puis, à l’occasion des gilets jaunes, Pierre de Villiers y est allé fort, parlant d’une « crise de l’autorité dans notre pays mais aussi dans les démocraties occidentales », du besoin du chef de se tourner « vers le plus faible, le plus petit », etc.

Il n’est pas étonnant donc qu’il soit considéré comme un recours, dans la grande tradition putschiste française ; rappelons que la Ve République est elle-même née d’un putsch militaire !

Après donc des gilets jaunes, des groupes d’extrême-droite, on a désormais la très importante revue Valeurs Actuelles qui s’y met, à l’occasion de la grande offensive actuelle pour présenter l’armée comme « au-dessus » de la politique, comme le seul garant de la nation, etc.

Offensive qui est, bien sûr, strictement parallèle à l’immense pression sociale actuelle. C’est la lutte de classes qui connaît un saut dans son histoire.

Valeurs Actuelles a ainsi publié un article intitulé Élection présidentielle : Pierre de Villiers, candidat rêvé d’une France désespérée. Ce qu’on y lit est d’une clarté limpide :

« Il en est un autre qui n’échappe pas à ce phénomène et qui ne peut plus dire ou écrire sans que ses moindres faits et gestes soient interprétés comme la première pierre d’une hypothétique candidature présidentielle.

La semaine dernière, [le quotidien très à droite] L’Opinion assurait que Pierre de Villiers cultivait les doutes… Diantre… Un militaire bientôt en campagne de France, voilà de quoi alimenter bien des chroniques. La postface que le général cinq étoiles a ajouté à l’édition poche de son Qu’est-ce qu’un chef ?, « nourrira les commentaires en vue de 2022 », ajoute le quotidien avec des airs de gourmandise.

Qu’a donc pu écrire Pierre de Villiers pour qu’on lui prête à nouveau l’ambition de faire de la politique ? (…) « Nos élites sont parfois de bons tacticiens ; ils sont souvent de piètres stratèges. (…) Nos élites manquent de profondeur. (…) Il nous manque des chefs qui incarnent une voix et fixent la voie. »

Il n’en fallait pas davantage pour que ceux qui sont convaincus que le général jouera un jour à nouveau un rôle de premier plan, y voient une sorte d’autoportrait (…).

Reste un problème majeur : si le général a le profil de candidat idéal pour beaucoup, si nombre de Français, à commencer par les lecteurs de Valeurs actuelles, rêvent de le voir jouer un rôle actif (au point de l’imaginer premier ministre pour 16 % d’entre vous, ministre de l’intérieur pour 24 % ou ministre de la Défense pour 45 % dans un gouvernement que vous auriez façonné à votre idée), s’il est l’homme qui a dit non à Emmanuel Macron, Pierre de Villiers n’entend pas être l’homme du recours. »

La fin est un classique : les militaires disent toujours refuser de faire de la politique… avant d’en faire. L’option d’un coup d’État par un maréchal a traversé la France de 1918 à 1940… jusqu’à ce que le maréchal Pétain s’y colle.

En 2019, voici donc Valeurs Actuelles jouant à souffler sur les braises de cette option. C’est tout à fait cohérent. Le fascisme, en France, a nécessairement l’armée au centre de son dispositif, pour contrer le poids démocratique existant dans notre pays.

Le coup d’État du 18 Brumaire en 1799 par Napoléon Ier, celui du 2 décembre 1851 par Napoléon III, celui du maréchal Pétain en 1940, celui de De Gaulle en 1958… Tous ont en commun d’avoir prétendu répondre à l’appel de la nation pour un sauvetage par le haut.

S’il était vraiment un démocrate, Pierre de Villiers combattrait résolument cette tendance, défendrait le principe du pouvoir au peuple. Mais comme on le sait, il veut un chef… Comme d’ailleurs, malheureusement, une bonne partie du pays – et la haute bourgeoisie en premier lieu.

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Politique

Municipales: la pression de l’extrême-Droite en Isère

L’Isère est un département d’Auvergne-Rhône-Alpes situé entre Lyon et les Hautes-Alpes. Scindé entre un nord plutôt à Droite et le sud plutôt à Gauche, l’Isère a comme préfecture une métropole « dynamique », Grenoble.

Le problème est que si Grenoble est une ville à Gauche, aux traditions ouvrières relativement fortes, le Nord-Isère est la nouvelle place forte de classe ouvrière avec une extrême-Droite bien établie.

Succieu, Torchefelon, Flachères, Bourgoin-Jallieu, La Bâtie Division, cinq villes du Nord-Isère qui ont en commun d’avoir accueilli un concert néonazi depuis 2013.

En septembre 2014, une croix gammée et un tag antisémite sont découvert sur la façade d’un coiffeur de Bourgoin-Jallieu.

En août 2016, c’est la mosquée de la Tour-du-Pin qui est la cible d’un incendie, qui s’avéra être l’œuvre de militants d’extrême-Droite, dont un ancien élu du groupe « Échirolles Bleu Marine ».

Nul besoin d’aller plus loin pour comprendre que le Nord-Isère est soumis à une intense activité fasciste. Si elle repose sur des groupuscules très minoritaires, il n’en reste pas moins certain qu’il y a dans cette région tout un contexte social et culturel propice au fourmillement de l’extrême-Droite.

Or, aux dernières élections européennes, LREM est arrivé largement en tête en Isère et EELV rafle la majorité des suffrages à Grenoble, Meylan, Voiron. C’est qu’en fait l’Isère est, comme ailleurs, un département divisé entre la ville et la campagne.

L’agglomération grenobloise a une contre-culture développée et un état d’esprit festif et solidaire porté par les étudiants issus des campagnes savoyardes voisines. Grenoble, c’est en quelque sorte l’opposé de Lyon, cette ville arrogante alimentée par une bourgeoisie hautaine issue des Mont-d’Or. Cette opposition est visible dans le football avec d’une côté les supporters grenoblois du « Red Kaos 94 » et de l’autre, les supporters lyonnais des « Bad Gones » et « Lyon 1950 ».

À Grenoble, c’est donc logiquement Eric Piolle qui dirige la municipalité, dans une vaste coalition de gauche qui repose essentiellement sur cette culture propre à la ville. Cette coalition a d’ailleurs annoncé qu’elle se représentait pour les élections de mars 2020.

Mais d’un autre côté, on a les petites villes ouvrières, notamment celles du Nord-Isère, encerclées par la gigantesque métropole lyonnaise et Grenoble. Avec une tradition industrielle tournée vers l’automobile, l’agglomération de Pont-de-Chéruy est constituée de ménages ouvriers, avec une partie issue de l’immigration maghrébine des années 1960 ayant accédée au « rêve pavillonnaire ».

Or, voici les scores du RN dans cette agglomération aux dernières élections européennes : 40,8 % à Chavagneux, 37, 54 % à Chavanoz, 34, 83 % à Saint-Romain-de-Jalionas, 33,6 % à Pont-de-Chéruy, 32,93 % à Tignieu-Jameyrieu, 25,3 % à Crémieu.

C’est dire comment l’extrême-Droite est implantée dans les mentalités de ce territoire. À quelques encablures de Lyon, c’est la Gauche qui devrait normalement être dominante dans cet espace stratégique.

Mais il faut dire que l’extrême-Droite ne sort pas de nulle part ici. Que cela soit dans sa variante catholique contre-révolutionnaire avec la forte implantation de la Fraternité Saint-Pie X ou sa variante poujadiste avec La Confédération intersyndicale de défense et d’union nationale des travailleurs indépendants (CIDUNATI) fondée par le petit boutiquier de La Bâtie-Montgascon, Gérard Nicoud, l’extrême-Droite a une longue et riche histoire.

C’est d’ailleurs le CIDUNATI qui organisa une grande manifestation contre l’assurance sociale en 1969, réunissant plus de 10 000 personnes à Grenoble (soutenue à l’époque par la Gauche, et notamment les maoïstes).

Or, pour les élections municipales 2020, le Rassemblement national avance sereinement ses pions sur un territoire qui semble tout ouvert à sa cause. À Bourgoin-Jallieu, c’est justement Nathalie Germain qui se présente. Née en 1966 à la Tour-du-Pin de parents militants au CIDUNATI, cette coiffeuse indépendante est également membre du conseil national du parti de Marine Le Pen.

Face à cette prétention, la Gauche est réunie autour de l’initiative de Berjallien Unis et Soldiaire (B.U.S) qui réunit le PS, le PCF, Forces Laïques et Génération-s. Gageons que cette unité à Gauche parvienne à isoler la démagogie nationaliste qui trouve ici un terrain propice à son succès.

À Chavagneux, Gérard Dézempte, élu maire en 2014 avec l’investiture de l’UMP, a basculé dans le camp de l’extrême-Droite après une lettre commune de soutien à Marine Le Pen en mai 2017, signée par les secrétaires départementaux de Debout la France (Edmond Damais) et du Rassemblement national (Thibaut Monnier).

Candidat à sa réélection, Gérard Dézempte est depuis adhérent à un micro-parti national-conservateur « Ensemble pour la France ». La mairie fut d’ailleurs recouverte de gilets jaunes à son initiative en novembre 2018, dans un état d’esprit poujadiste que n’aurait pas dédaigné Gérard Nicoud.

Trois listes RN sont également prévues dans l’arrondissement de la Tour-du-Pin. À Avenières Veyrins-Thuellin, petite ville de 7 712 habitants où le RN a obtenu 36,24 % des suffrages aux dernières élections européennes et où le mouvement des gilets jaunes a été lancé par l’Union Nationales des Indépendants Retraités du Commerce (UNIRC).

Il y a aussi Aoste, ce village de 2 873 habitants qui a voté à 37 % pour Jordan Bardella en mai 2019, que Anthony Turchetti veut tenter de gagner. Enfin, mentionnons Faverges-de-la-Tour (1 388 habitants) avec Marc Magnoux où le RN a atteint 30 % des votes.

Or, l’avancée de l’extrême-Droite ne semble pas se limiter qu’aux villes du Nord-Isère. À Echirolles, cela fait quelques années qu’elle pratique une intense pression sur cet ancien bastion ouvrier acquis au PCF. Après plusieurs divisions internes à l’extrême-Droite, Alexis Jolly va représenter le RN avec la volonté de « mettre un terme à 70 ans de communisme à Echirolles ».

De manière démagogique, il rappelle que « l’être humain a besoin d’espace de contact avec la nature pour s’épanouir » et demande un moratoire de deux ans sur toute nouvelle construction. C’est dans ce contexte de campagne électorale qu’il a réalisé une opération nettoyage du parc de la Buclée menacé de destruction.

Responsable départemental et conseiller régional, il avance plus que confiant :

« par rapport à 2014 on part vraiment pour la gagne. La gauche est totalement divisée vous avez dans la majorité des gens qui ont déjà annoncé qu’ils allaient se présenter contre le maire ».

En effet, le premier adjoint Thierry Monel (Génération-s) a annoncé sa candidature alors que Renzo Sulli, maire PCF sortant, est candidat à sa réélection.

On sait comment Lyon est un bastion de multiples groupuscules néofascistes. On comprend alors comment  la campagne nord-iséroise est un réservoir de renouvellement de ces groupuscules. Les élections municipales de mars 2020 risquent bien de fertiliser encore un peu plus ce sol pour l’extrême-Droite, y compris dans ses variantes radicales.

Plus généralement, le Nord-Isère est l’illustration de la catastrophe à Gauche, réfugiée depuis trop longtemps dans les grandes métropoles et leur vague culture « progressiste ». Elle va en payer le prix.

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Guerre

L’objectif de Marion Maréchal : une «révolution conservatrice» sur les décombres du «progressisme»

Marion Maréchal est une figure politique dans la lignée des Trump, Bolsonaro, Duterte, Poutine, Boris Johnson, Erdogan, etc. Elle sait que son heure viendra, car le repli du capitalisme sur sa base nationale est inéluctable pour la France également. La question est de savoir comment poser les éléments pour surgir de l’inévitable crise du « progressisme » d’Emmanuel Macron et de la Gauche post-moderne. C’est ce qu’elle a cherché à expliquer à la première convention de la Droite.

Si l’on regarde bien, Marion Maréchal a formulé trois axes fondamentaux pour la « révolution conservatrice » lors de la convention de la Droite. Il s’agit d’une véritable rupture avec le schéma traditionnellement conservateur-républicain, dont Jacques Chirac était par exemple un représentant.

Normalement, en effet, la Droite n’appelle pas à purger l’appareil d’État. Les seuls appelant à le faire est le PCF, qui appelle depuis les années 1960 à modifier le régime de l’intérieur. L’extrême-Droite authentique (donc pas vraiment Jean-Marie Le Pen) et les révolutionnaires de Gauche appellent directement à un changement de régime.

Or, Marion Maréchal appelle à la purge de l’appareil d’État :

« N’attendons pas que l’État nous sauve, actuellement il est phagocyté par une idéologie et des intérêts contraires à l’intérêt national. »

C’est l’équivalent de la ligne du PCF, mais inversé. Le PCF appelait à un Programme commun pour arracher l’appareil d’État aux monopoles, par l’unité populaire pour s’approprier par l’autogestion l’économie elle-même. Marion Maréchal appelle à une restructuration par en haut, par une Droite sur une ligne idéologique bien déterminée.

Le modèle n’est pas du tout le fascisme italien, ni le national-socialisme allemand, mais clairement la révolution conservatrice telle que théorisée en Allemagne, éventuellement l’austro-fascisme (mais il est trop directement sous dépendance cléricale), surtout le franquisme, historiquement une alliance des ultras-conservateurs avec une petite extrême-Droite mouvementiste et terroriste.

Le but de Marion Maréchal est ainsi de construire une Droite directement appuyée par tout un milieu, un véritable bastion implanté dans l’économie elle-même. Il ne s’agit pas de construire un mouvement populaire de l’extérieur des milieux capitalistes, puis de se vendre le plus tôt possible (et non pas, comme certains interprètent le fascisme italien ou le nationalisme-socialisme allemand, seulement à la fin).

Il s’agit de former un camp militant, offensif à tous les niveaux :

« Nous devons bâtir sur le roc, pas sur des coups médiatiques ! Par les idées, par les loyautés, les réseaux, des élus locaux, des soutiens financiers, culturels, intellectuels, par la confiance des entreprises. »

C’est extrêmement ambitieux, car seule une petite partie du capitalisme est favorable à une telle ligne dure. Seulement, les grandes entreprises sont ambitieuses à l’internationale et donc ouvertes à un tel projet. Et il suffit d’une crise approfondie se produisant pour que tout vacille et que le capitalisme se meuve vers une ligne dure.

> Lire également : «Convention de la Droite» le 28 septembre : l’affirmation d’un néogaullisme conquérant avec Marion Maréchal comme figure de proue

On l’aura compris : la clef, à l’arrière-plan, c’est l’armée. C’est elle qui traditionnellement impose les changements de régime. La Ve République est elle-même née d’un coup d’État militaire.

À la convention de la Droite, Marion Maréchal a souligné cette dimension essentielle de l’armée, combinée aux ambitions de la France :

« Il nous faut une armée de qualité, c’est la garantie de nos capacités diplomatiques. Nous sommes présents sur les cinq continents. »

Encore une fois, dans les conditions actuelles, tout cela semble bien vain. Le Monde et Libération sont contre, Le Figaro n’est pas pour, et le « progressisme » a le vent en poupe avec son libéralisme culturel se généralisant dans tous les domaines.

Mais ce qui est attendu, c’est le retour de bâton, qui ne peut être que virulent de la part d’une société qui va être écœurée d’elle-même. La victoire du « progressisme » sera son inéluctable défaite. Le miroir social sera tellement déformé que plus rien ne tiendra. En attendant ce moment, Marion Maréchal compte gagner en crédibilité et établir ses réseaux, pour agir très vite le cas échéant.

La Gauche sera-t-elle en mesure de faire face à un tel défi ?

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Politique

Nouvelle agression du local PCF de la Croix-Rousse à Lyon

Le local du PCF du quartier de la Croix-Rousse à Lyon a de nouveau été dégradé hier, alors qu’il venait d’être réparé suite à une précédente agression. Cela porte assurément la marque de l’extrême-Droite qui est de plus en plus menaçante à notre époque.

Aline Guitard, dirigeante lyonnaise du PCF, a expliqué que les 22 vitres du local venaient d’être réparées, après « des mois de tergiversations de l’assurance ». Cela faisait suite à une précédente dégradation, s’inscrivant dans une longue liste d’agressions ces dernières années.

L’attaque a eu lieu pendant la nuit du 27 au 28 août 2019 de la part de trois individus cagoulés et armés de barres de fer. L’extrême-Droite, très implantée à Lyon, est évidemment en cause. On reconnaît là son style et on sait que son but est d’écraser la Gauche, pour empêcher toute expression politique démocratique et populaire.

Aline Guitard a ainsi justement expliqué :

« Mais nous ne désarmons pas pour autant : nous ne baisserons pas plus les bras que les yeux et nous continuons la lutte ! NO PASARAN ! »

La Gauche lyonnaise a logiquement soutenu le PCF face à cette agression, comme avec le premier secrétaire du PS du Rhône Yann Crombecque qui a affirmé qu’il est « est impératif que ces actes de violences soient condamnés, et que les auteurs de ces agissements détestables soient identifiés, arrêtés et jugés ».

De son côté, Karim Aou de Génération-s a exprimé sa stupéfaction et sa colère en affirmant notamment :

« Face à la brutalité exercée et à la volonté d’intimider un mouvement démocratique, il convient de garantir la sécurité des biens et des personnes, ainsi que la liberté d’opinion. Pour cela, j’invite le maire de Lyon et le Préfet de police à prendre les mesures nécessaires et sans attendre.

Les Lyonnaises et les Lyonnais dont la ville est la capitale historique de la Résistance, ne se laisseront jamais intimider par la peste brune. Tous ensemble, résistons à l’extrême-droite ! »

Rappelant que les dégradations concernent toutes ses sections en France avec « près d’une vingtaine de dégradations volontaires » en un an, le PCF a également expliqué que « ça suffit » et qu’il ne se laissera pas intimider par la violence.

On sait en effet à quel point la violence de l’extrême-Droite s’inscrit dans les interstices de la société, de manière subite et agressive, sans qu’on puisse forcément opposer autre chose que la force. Sans parler de la couverture toujours plus grande de tels agissements par l’État lui-même…

C’est là tout de même quelque chose que la Gauche sait par tradition. Lutte Ouvrière a publié à ce titre un document intéressant cet été dans son organe théorique : « Face à la crise et à l’extrême droite : la question de l’armement du prolétariat. »

Lutte Ouvrière récuse en revanche l’idée du Front populaire, ce qu’on peut évidemment critiquer si l’on considère que seule l’unité la plus large est à même de vaincre le fascisme. Dans tous les cas, les attaques d’extrême-Droite ne sont jamais anecdotiques et sont toujours à considérer avec un regard d’ensemble foncièrement politique.

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Société

« Vénissieux fut le Diên Biên Phu de la ceinture rouge »

Reprenant la thèse d’Alain Soral du « grand remplacement » de la banlieue rouge sous l’effet de l’immigration, Eric Zemmour considère que le PCF est mort sous l’effet de l’effondrement de sa contre-culture. Une thèse à la fois totalement farfelue, avec une vérité fondamentale sur le rôle de la culture, que son anticommunisme lui fait remarquer.

Eric Zemmour publiait en 2014 Le suicide français. Étant une figure de la Droite, la question communiste est pour lui fondamentale. Voici ce qu’il pense observer sur la fin de la banlieue rouge encerclant Paris :

« Dans les banlieues françaises de ces années 1970, le pouvoir appartient encore au Parti. Crèches, écoles, dispensaires, stades, gymnases, bibliothèques, colonies de vacances, maisons de retraite, conservatoires de musique, naissances, mariages et funérailles : le parti communiste prend en main l’existence de chacun de 7 à 77 ans.

C’est une contre-société prolétarienne, collective et solidaire, qui n’a pas eu trop de mal à se lover dans une France forgée depuis mille ans par le catholicisme ; le marxisme a remplacé les Évangiles (…).

En 1945, à la Libération, le général De Gaulle avait d’abord pour objectif d’éviter la guerre civile ; les FTP communistes étaient armés et menaçaient de poursuivre le combat. De Gaulle négocia avec Staline leur reddition.

En échange de la paix civile, il livra aux communistes français des citadelles – comme Henri IV avait offert avec l’édit de Nantes des places fortes aux protestants. Parmi celles-ci, outre EDF et Renault, il y eut le ministère de l’Équipement. Ce fut une alliance rénovée du sabre et du goupillon entre les gaullistes qui voulaient restaurer l’État et le PCF qui rêvait d’être la nouvelle Église (…).

La jeunesse issue du regroupement familial refusa elle aussi [c’est-à-dire comme celle de mai 1968] de ployer le genou devant le Parti. Certains de ces adolescents, peu de temps après leur arrivée, goûtèrent vite aux premiers trafics, premiers vols, premières violences ; ils commençaient à vitupérer, insulter, frapper, faire des rodéos de mobylettes en pleine nuit, voler des voitures, de préférence des limousines allemandes, briser des vitrines, jeter des bouteilles par terre, pour rien, pour s’amuser, pour terroriser ; casser, voler, violer, pour mieux marquer leur territoire ; et menacer de représailles tout ce qui ose se révolter.

Ils débarquaient en bandes de garçons bruyants devant les boîtes de nuit ; harcelaient les filles dès qu’ils étaient entrés ; s’offusquaient d’être « discriminés » quand ils étaient refoulés. On n’avait pas encore inventé le mot « incivilités » pour euphémiser cette violence intolérable, et diaboliser par réaction la moindre résistance.

Certains s’armaient et tiraient ; ils étaient bientôt arrêtés, condamnés, et cloués au double pilori judiciaire et médiatique du « facho raciste ». Dupont Lajoie. Les autres, les plus nombreux, préféraient partir dès qu’ils le pouvaient. Ce fut un exode qui ne dit pas son nom (…).

Le ghetto idéologique et social que le Parti avait édifié devint peu à peu un ghetto ethnico-religieux qui leur échappait. Les communistes furent les premiers et les derniers à résister. Ils lancèrent une campagne contre la drogue qui éloignait les jeunes du militantisme politique. En vain. Le trafic de stupéfiants permit à ces bandes de jeunes de s’enrichir et de devenir les patrons de leur quartier, aidant les uns, terrorisant les autres.

Au contraire de ce que l’on crut et dit, les émeutes des Minguettes à Vénissieux ne furent pas un commencement, mais une fin. La fin du combat mené par les communistes pour tenir leur territoire. Vénissieux fut le Diên Biên Phu de la ceinture rouge. »

Il y a plusieurs idées, très intéressantes, qu’elles soient vraies ou fausses. La première, c’est que le PCF avait formé une contre-société autour de Paris. Cela est vrai et pas qu’à Paris. Être un militant de Gauche, jusque la fin des années 1980, c’est agir forcément à l’ombre du PCF, même pour les socialistes, car sur le terrain, il était omniprésent et puissant, disposant de relais solides avec des choses concrètes à proposer.

La seconde idée, c’est que l’immigration a fait de la banlieue rouge une zone de non-droit, avec des jeunes immigrés criminels. C’est là une lecture odieuse de par son racisme, en plus de sa fausseté. Eric Zemmour nie ici que jusque le milieu des années 1980, les immigrés sont puissamment ostracisés dans la société. Ils sont ghettoisés. Il caricature ici de manière sinistre la révolte des ghettos.

S’il fait cela, c’est pour prétendre que la criminalité forcenée des cités – qu’on ne saurait assimiler à la « banlieue » en général, sauf à l’extrême-Droite et l’ultra-Gauche – n’auraient pas une origine sociale, mais ethnique. Il y a une opération idéologique en ce sens très puissante à Droite et à l’extrême-Droite.

La troisième idée est la combinaison du constat juste (la contre-société) et de la thèse fausse (l’origine ethnique du crime qui est un phénomène purement social). C’est que le PCF, selon Eric Zemmour, aurait combattu la drogue, mais aurait échoué et donc aurait disparu. Comme Eric Zemmour est un anticommuniste, il fait ici une analyse juste, mais puissamment déformée.

Le PCF n’a pas mené de réelle campagne contre la drogue, à part de manière épisodique. Eric Zemmour généralise ici, parce qu’il sait très bien que les militants du PCF s’opposaient concrètement à l’alcool et aux drogues, proposant une lecture ouvrière de la réalité, c’est-à-dire posée, rationnelle, stricte, pleine de principes.

Et s’il a raison, c’est justement parce qu’il affirme que le PCF n’a pas été à sa propre hauteur et qu’il a échoué culturellement à combattre les comportements et attitudes criminelles – qu’Eric Zemmour attribue à l’immigration, qui sont en réalité un produit social.

L’immigration est un phénomène systématique du capitalisme, qui a besoin d’une armée de réserve pour les emplois, pour peser sur les salaires, profiter de salariés venant de la paysannerie et coupée des traditions ouvrières, etc. Mais les immigrés peuvent parfaitement rejoindre la lutte également, apportant un nouveau souffle. Le PCF a échoué à faire cela, car il n’a pas assumé le grand combat culturel contre le crime.

Et, si l’on voit une chose au 21e siècle, c’est que ce travail reste à mener. Sans cela, les démagogues ethno-différentialistes auront de leviers pour tromper les gens.

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Guerre

Les militaires et le vote pour l’extrême-Droite : une vraie cohérence

Les casernes soutiennent massivement l’extrême-Droite. Cela n’étonnera pas les gens de Gauche, qui savent que contrairement à la police, la logique militariste prime totalement chez les soldats, les gendarmes, les sapeurs-pompiers. Leurs traditions sont puissantes encore et c’est inévitable : c’est là le cœur de l’État, son noyau dur. Il relève donc de la réaction anti-ouvrière et anti-Gauche la plus virulente.

Escadron de cavalerie de la garde républicaine. Quartier des Célestins - 14 juillet 2012 (wikicommons)

La Fondation Jean Jaurès est à l’origine de l’enquête « Pour qui votent les casernes ? », dont elle fournit les résultats en ligne. Pour trouver des réponses, les bureaux de vote de quelques communes ont été choisis de manière précise : ceux étudiés relèvent des zones où le personnel militaire et leurs familles ont une hégémonie significative.

L’étude vaut le coup d’œil pour tous les gens qui ont une caserne dans leur environnement proche. C’est un effet un facteur d’influence très important, un véritable foyer de nationalisme et de militarisme. Le vote pour l’extrême-Droite est hautement révélateur et un argument utile pour démasquer la « neutralité » fictive des militaires.

Dans l’étude, il est constaté que le vote pour le Rassemblement National fait dans les zones à prédominance militaire grosso modo entre 8 et 17 % de plus que la normale. Et vues les zones, cela donne donc parfois du plus de 40 %. Et l’étude remarque surtout que le phénomène s’accentue. Il y a une sorte de passage, bagages en main, d’une large partie de l’armée dans le camp de l’extrême-Droite.

De fait, l’armée a en effet toujours eu un tropisme naturel pour la « remise en ordre », dans un sens évidemment non socialiste. L’étude le rappelle de manière d’ailleurs bien plus que maladroitement. On a ainsi des remarques pseudos-sociologiques, qui doivent faire retourner Jean Jaurès dans sa tombe, comme par exemple ici au sujet des gendarmes :

« En premier lieu, on n’entre pas dans la gendarmerie totalement par hasard. On peut penser que les membres de ce corps adhèrent plus que d’autres aux valeurs d’ordre, de patriotisme, d’autorité et de discipline traditionnellement portées par la droite.

En second lieu, le fait d’appartenir à un escadron plonge le militaire dans une ambiance très particulière. Il vit avec sa famille au contact de ses collègues au sein de la caserne, ceci renforçant la cohésion de groupe. L’esprit de corps, le poids du groupe et de ses valeurs sont donc omniprésents durant le travail comme au repos ce qui a sans doute des effets sur la façon dont les gendarmes mobiles et leurs proches se forgent leurs opinions. Leur vision du monde et leurs conceptions de la société sont enfin sans aucun doute influencées par la nature et la réalité quotidienne de leurs missions. Assurer le maintien de l’ordre lors des manifestations de rue, patrouiller dans des cités sensibles, intervenir en cas de coups durs ou d’émeutes et participer à la répression de la délinquance constituent un quotidien très éloigné de celui d’un électeur « moyen ». »

Le militaire ne serait donc pas un réactionnaire et il ne faudrait pas le dénoncer comme l’a fait Jean Jaurès. Il faudrait le comprendre, le pauvre, son travail est bien difficile et la population est si non compréhensive par rapport à cette rude tâche ! L’étude mentionne même les attentats islamistes pour « justifier » un tournant en faveur de l’extrême-Droite… C’est vraiment la honte. Que des gens tenant de tels propos puissent se revendiquer de Gauche, et même s’imaginer de Gauche, c’est incroyable.

Surtout que l’étude voit bien que la tendance à l’appui à l’extrême-Droite est toujours plus marquée et va avec le fait que le vote à Droite disparaît pratiquement en faveur de celui de l’extrême-Droite, avec un phénomène de vases communicants. Ce phénomène est constaté en métropole, comme en Corse ou au bureau de vote d’Abu Dhabi. Il est vrai pour les militaires des différentes armées (air, terre, mer), comme pour les gendarmes.

Cela signifie qu’on a déjà dans l’armée cette confluence Droite / extrême-Droite que des forces sociales puissantes appellent de ses vœux en France, pour réaliser des ambitions nationalistes et militaristes de conquête et de domination.

Celui pour qui une telle étude est un coup rude, c’est Emmanuel Macron, qui lui prétend que sa vision moderniste est la plus à même pour faire triompher la France. On voit bien – et c’est logique – que l’armée ne le suit pas. Car l’armée française est par définition pour une centralisation bureaucratique, autour d’un pouvoir personnel fort, ce qu’on appelle un « chef ».

La France a une longue tradition de coups d’État militaire et la cinquième république est elle-même née ainsi. La rencontre entre la Droite et l’extrême-Droite visera clairement une telle acquisition du pouvoir également, pour avoir les coudées franches pour réaliser ses « grandes ambitions ».

Cela rappelle à quel point l’armée française est un ennemi de la Gauche dans sa nature même, dans sa substance même. Une vraie force de Gauche dans le pays ne pourrait que vouloir, inévitablement, la démanteler, la remplacer par une armée du peuple. C’était déjà l’exigence de Jean Jaurès, mais il était trop idéaliste pour se poser la question de savoir comment le réaliser dans les faits.

Cela redeviendra une question à Gauche dans les prochaines années, de par l’Histoire tourmentée qui nous attend.