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Pourquoi le PRCF n’ose-t-il pas aborder la question de la guerre en Ukraine?

Un positionnement absurde depuis le départ.

Le Pôle de Renaissance Communiste en France (PRCF) est la principale structure sortie du PCF dans le courant des années 1990, en exprimant une grande nostalgie pour le PCF des années 1980. On y trouve bien entendu un tropisme romantique pro-Russie, amenant d’ailleurs le PRCF à prendre position sans prendre position quant à la guerre en Ukraine. Reflet de tout cela, le PRCF vient d’envoyer quelqu’un en Russie, R. Barchi (un Brésilien), pour aller discuter avec le Parti Communiste de la Fédération de Russie. Et le message envoyé à l’occasion par le PRCF à ce parti russe qui est depuis le départ pour la guerre contre l’Ukraine… « oublie » de parler de la guerre en Ukraine. Le voici.

Paris, le 29 septembre 2022,

Au camarade Guennadi Andreïevitch Ziouganov, secrétaire national du Parti communiste de la Fédération de Russie,

Cher Guennadi Andreïevitch,

Depuis 2014, le Parti communiste de la Fédération de Russie n’a eu de cesse de défendre les peuples du Donbass victimes des hordes fascistes soutenues par l’Occident. Nous communistes français, membres du Pôle de Renaissance communiste en France sommes solidaires de vos actions, de votre analyse du conflit actuel et notamment des convois humanitaires que vous organisez régulièrement et avec une constance qui force le respect en direction du Donbass.

Quand certains partis en Occident se revendiquant du marxisme (comme le parti français trotskyste NPA) n’hésitent pas à dire qu’il faudrait envoyer davantage d’armes au régime de Kiev, nous pensons tout au contraire qu’il faut envoyer plus d’aide pour aider à reconstruire le Donbass et vous présentons ainsi notre modeste contribution qui a suscité un élan de solidarité au sein du peuple français qui n’accepte pas de vivre dans le bourrage de cranes de la propagande de guerre des médias impérialistes.

En cette année d’anniversaire de la naissance de l’Union des Républiques socialistes soviétiques, nous sommes heureux de renouer ainsi ces liens entre communistes français et russes, liens toujours fraternels et marqués par la profonde convergence de l’action des jacobins et des bolcheviques.

Vive les peuples du Donbass, vive les peuples soviétiques, vive les peuples libres qui secouent le joug impérialiste.

Pour le Pôle de Renaissance communiste en France,

Léon Landini, président du PRCF, ancien officier des F.T.P.-M.O.I., Grand Mutilé de Guerre, Médaille de la Résistance, Officier de la Légion d’honneur, Décoré par l’U.R.S.S. pour faits de Résistance.
Pierre Pranchère, président de la Commission International, ancien maquisard F.T.P.F., ancien député de Corrèze, Combattant Volontaire de la Résistance
Georges Gastaud, Fadi Kassem, co-secrétaires nationaux
Aymeric Monville, secrétaire de la commission International du P.R.C.F.,
Gilliatt Destaërck, responsable national des J.R.C.F., l’organisation de jeunesse du PRCF

On est là dans une sorte de romantisme hors sol, complètement à l’ouest, qui parle du Donbass afin de ne surtout pas parler du reste. Et ce n’est pas tant simplement parce que le PRCF s’aligne sur un « anti-impérialisme » russe… c’est surtout un moyen pour le PRCF de ne rien assumer et de ne pas appeler à combattre l’OTAN, à dénoncer la tendance à la guerre.

Le PRCF se dit pourtant bien contre l’OTAN, mais il n’en parle en fait jamais, c’est de la démagogie, la réalité concrète ne l’intéresse pas, il ne veut surtout pas se mouiller ! Comme d’ailleurs toute l’extrême-Gauche et l’ultra-Gauche, qui ne parlent tout simplement jamais de la guerre en Ukraine, ou bien vaguement avec un article de loin en loin !

Ce qui reflète le pessimisme du petit-bourgeois à l’écart du monde, cherchant simplement un capitalisme qui soit « social » et qui le laisse s’agiter dans son coin.

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La gauche du PCF totalement dans l’orbite chinoise, quitte à usurper Mao

Une incohérence révélant beaucoup de choses.

C’est à la fois anecdotique et très important, parce que deux choses sont concernées. La première concerne l’histoire des idées. Le maoïsme, c’est Mao Zedong et c’est une opposition complète à l’URSS des années 1960-1970. Pourquoi donc la gauche du PCF, fascinée par l’URSS de la même période, valorise-t-elle subitement Mao Zedong ? C’est totalement incohérent avec toute son histoire et ses valeurs (voir La vision du monde du PCF pour son centenaire: les sympathisants).

La seconde, c’est le rapport à la Chine, qui comme on le sait vise à devenir la puissance hégémonique en remplacement des États-Unis. Or, toute la gauche du PCF est devenue pro-chinoise ces dernières années, de manière ouverte. Mao Zedong est en fait intégré comme référence fictive pour gagner en prestige « révolutionnaire » et justifier de valoriser une Chine populaire autrefois honnie.

Comprenons ce qu’il en est, en commençant avec une interview de Georges Gastaud, co-secrétaire national du PRCF par Initiative Communiste, le média internet du PRCF.

Le PRCF, c’est la gauche du PCF et de la CGT, avec une valorisation complète de l’URSS jusqu’à 1991. Et comme on le sait, les maoïstes apparaissent en France dans les années 1960, considérant que le PCF a trahi, que la CGT s’est intégrée au capitalisme, que l’URSS est social-impérialiste et même la première menace de guerre pour le monde. Inversement, le PCF et l’URSS considéraient la Chine maoïste comme une dictature militaire, un pays monstrueux, etc. Rien de plus opposé, donc.

Pourtant, dans l’interview, en date du 2 juillet, Georges Gastaud dit la chose suivante :

« Le sombre tableau que je viens de brosser serait cependant erroné et désespérant si l’on omettait de voir que, comme le disait Mao, « là où il y a oppression, il y aura résistance » : bref, si l’on oubliait ce que Hegel appelait le « patient travail du négatif » et l’existence incontournable de la contradiction dialectique. » 

On croirait lire le PCF(MLM), certainement pas le PRCF. Le PRCF n’utilise jamais le matérialisme dialectique comme référence idéologique pour ses points de vue, encore moins avec Mao Zedong. Car le matérialisme dialectique est une idéologie « totale », de type « stalinienne », ce que rejette formellement le PRCF, qui se revendique d’un matérialisme à la « méthode » dialectique sur le mode « soviétique » version années 1970-1980.

Pourquoi la référence à Mao alors ? Déjà, parce que le PRCF cherche à racoler, en se donnant une image qui ne soit pas anti-maoïste, malgré que sur le plan des idées ou de la culture cela n’ait strictement rien à voir (et ce depuis plus de cinquante ans, tout de même). Il profite par ailleurs dans cette tentative d’une tentative d’un petit groupe n’existant plus, le « parti communiste maoïste », de mener un coup de force sur un forum internet du PRCF (sur Discord) après avoir feint un rapprochement. Le PRCF s’est dit qu’il y avait un coup à jouer, un style dont on pouvait profiter, etc.

C’est là une mauvaise tambouille politicienne de la part du PRCF. Mais c’est là qu’on tombe sur un aspect bien inquiétant. La Chine actuelle, que les maoïstes rejettent totalement au nom de la « Grande Révolution Culturelle Prolétarienne » démantelée en 1976 à la mort de Mao, est devenue une référence incontournable au sein de la gauche du PCF, et jusque dans le PCF. Même la revue du PCF Cause commune a fait un éloge de la Chine (n° 22 • mars/avril 2021, à lire ici avec les autres articles en suggestion sur le côté) : il y aurait tout à apprendre de l’expérience chinoise.

Mao a alors vite fait d’être intégré dans cette valorisation chinoise, même si dans la pratique il était totalement contre une telle évolution. C’est une sorte de vaste opération de récupération, de formation d’une nouvelle idéologie… en se mettant de manière assumée dans l’orbite des ambitions chinoises. C’est une sorte de « gauche » française qui veut progresser en affirmant que les progrès des ambitions chinoises seraient des avancées contre le capitalisme.

Autrement dit, Mao et la Chine n’existaient pas auparavant pour la gauche du PCF, il faut donc renverser absolument toutes les positions et subitement les intégrer dans un dispositif idéologique bricolé dont la seule fonction est de se placer comme satellite de la Chine visant l’hégémonie mondiale.

Même le Rassemblement communiste, qui vient comme le PRCF de la gauche du PCF des années 1990, qui est historiquement on ne peut plus anti-maoïste, se lance dans une telle opération. Le document qu’elle a produit est vraiment exemplaire d’une aberration intellectuelle. Mao Zedong y est assimilé à Liu Shaoqi et Deng Xiaoping, alors que n’importe qui s’intéressant à la question sait que la révolution culturelle chinoise reflète justement leur affrontement complet à tous les niveaux.

L’éloge du régime chinois est complet, totale, absolu. C’est l’idéologie de l’État chinois qu’on retrouve ici, littéralement :

« Parti Communiste Chinois: 100 ans de combat pour le développement et le socialisme !
à l’occasion du centenaire du PCC

Le premier juillet 1921 le PCC convoquait son premier Congrès fondateur à l’initiative des premiers communistes chinois inspirés par l’exemple de la Révolution d’Octobre 1917 qui a engendré l’URSS. Les Communistes chinois étaient 13 à la fondation, puis 58.000 au moment du massacre de la Commune de Shanghai en 1927 par la bourgeoisie antipatriotique du Kuomintang et 92 millions aujourd’hui pour poursuivre l’œuvre d’édification du « socialisme à la chinoise » conçu comme une étape vers le Communisme.

C’est vers le milieu du 19éme siècle que la Chine féodale a perdu sa souveraineté nationale pour être mise sous domination impérialiste suite aux deux guerres de l’opium.

En 1911, la Révolution bourgeoise renversa la monarchie féodale mais échoua à débarrasser la Chine des seigneurs de guerres féodaux et des occupations territoriales des impérialistes anglais, français, allemands, japonais et états-uniens.

L’alliance du PCC et du Kuomintang avait pour objectif de sortir le pays du semi-féodalisme et du semi-colonialisme. A la mort du leader de la Révolution et de la République bourgeoise, Sun Yat Sen, son Parti le Kuomintang mit fin à l’alliance avec le PCC pour stopper son influence grandissante.

Le PCC théorisa « l’encerclement des villes par les campagnes » et lança la longue marche sur 9.000 km en établissant des Soviets paysans et soldats dans les différentes provinces chinoises libérées pour y appliquer la liquidation des régimes semi-féodal et semi-colonial par la mise en pratique du slogan « la terre à ceux et celles qui la travaillent. »

Une fois l’occupation militaire japonaise vaincue suite à la seconde guerre mondiale antifasciste gagnée principalement par l’URSS, le PCC continua la lutte révolutionnaire contre le Kuomintang jusqu’à la Révolution d’Octobre 1949 qui élargissait ainsi le camp socialiste à l’Asie.

La Démocratie Nouvelle chinoise était ainsi partie prenante des Démocraties Populaires qui constituaient avec l’URSS le camp socialiste qui sera rejoint ensuite par la Corée du Nord, le Vietnam et Cuba.

L’aide internationaliste de l’URSS à la Chine prit fin après le Grand Bond en Avant dans un contexte de divergences idéologiques sur les questions de l’appréciation de Staline par le rejet de la « déstalinisation » considérée comme une trahison, de la « coexistence pacifique » considérée comme un abandon de la lutte des classes et de l’anti-impérialisme, de la « dictature du prolétariat » considérée comme un opportunisme anti-marxiste-léniniste, etc.

Bien que signataires comme le PCUS de l’URSS des deux déclarations de Moscou de 1957 et de 1960, le PCC par le biais de la lettre en 25 points rédigée par Mao Ze Dong développa une ligne générale du MCI critique du « révisionnisme khrouchtchévien » avec le soutien solidaire du Parti du Travail d’Albanie (PTA).

C’est aussi dans ce contexte que sous la houlette de Mao lui même fut lancée la « Grande Révolution Culturelle (GRCP) » dont l’objectif affiché était de faire régler par la « base » ouvrière, paysanne et intellectuelle les « contradictions antagoniques » manifestées par la bureaucratisation et l’embourgeoisement minant le parti et l’Etat. La « base » était appelée à « bombarder le quartier général » pour assainir le parti et l’Etat.

Toutefois, mis à part les cas Lui Shao Shi, Lin Biao et de la « bande des quatre », les « contradictions » internes au PCC furent le plus souvent traitées comme des « contradictions non antagoniques au sein du peuple. »

La théorie des « contradictions antagoniques et non antagoniques » est une permanence dans l’histoire du PCC et de la Révolution Nationale Démocratique Populaire. C’est ainsi que l’alliance avec le Kuomintang fut d’abord définie comme « contradiction non antagonique au sein du peuple » qui doit se régler par la méthode de « l’unité, critique, unité ». Après le massacre de la Commune de Shanghai la contradiction avec le Kuomintang devint « antagonique », puis après l’attaque et l’occupation nippone de 1937, cette contradiction principale contraint à une nouvelle alliance temporaire que le PCC géra avec vigilance avant de lancer l’assaut final qui vit la fuite de la bourgeoisie pro-impérialiste du Kuomintang sur l’Île de Taïwan.

Par contre le PCC a toujours considéré les fractions patriotiques de la bourgeoisie comme parties prenantes de la Démocratie Nouvelle. C’est ainsi que les classes sociales porteuses de cette forme d’Etat révolutionnaire transitoire sont la classe ouvrière, la paysannerie, les Intellectuels et la bourgeoisie nationale par opposition à la bourgeoisie compradore.

Le PCC est à l’avant-garde de ces classes sociales dans le processus de l’émancipation anti-féodale, de la libération nationale et même de l’édification du socialisme vers le communisme. Tous les dirigeants historiques du PCC, de l’Etat de Démocratie Nouvelle et de l’édification du socialisme chinois sont d’accord sur ces quatre classes sociales révolutionnaires, sur la coexistence de longue durée des secteurs économiques socialistes, capitalistes, des moyennes et des petites entreprises privées et familiales, etc. Ce consensus va de Mao Ze Dong, Zhou En Laï, Deng Xiao Ping et Xi Jinping pour ne citer que les plus illustres dirigeants du PCC et de l’Etat.

Liu Shao Shi a clairement synthétisé la base théorique consensuelle de ces choix stratégiques de tous les dirigeants du PCC : « En raison des particularités du développement social et historique de la Chine et de son retard scientifique, c’est une tâche unique et difficile d’appliquer systématiquement le marxisme à la Chine et de le transformer de sa forme européenne en une forme chinoise… Nombre de ces problèmes n’ont jamais été résolus ou soulevés par les marxistes du monde, car ici, en Chine, la principale section des masses n’est pas constituée d’ouvriers mais de paysans, et la lutte est dirigée contre l’oppression impérialiste étrangère et les survivances médiévales, et non contre le capitalisme intérieur » (Liu Shaoqi).

Pour tous les dirigeants successifs du PCC, l’application du Marxisme-Léninisme à la Chine doit se faire d’abord pour vaincre les survivances du féodalisme et le retard économique, scientifique et technique consécutif au joug impérialiste pour jeter ainsi les fondements du socialisme vers le communisme.

On peut vérifier cela dans ces propos de Deng Xiaoping : « Le marxisme attache la plus grande importance au développement des forces productives… [Aller vers le communisme] exige des forces productives hautement développées et une abondance écrasante de richesses matérielles. Par conséquent, la tâche fondamentale de l’étape socialiste est de développer les forces productives. La supériorité du système socialiste est démontrée, en dernière analyse, par un développement plus rapide et plus important de ces forces que dans le système capitaliste. À mesure qu’elles se développent, la vie matérielle et culturelle du peuple s’améliore constamment… Le socialisme signifie l’élimination de la pauvreté. Le paupérisme n’est pas le socialisme, et encore moins le communisme. »

Même logique chez Mao lui même qui, dès 1949, fait ce lien dialectique entre développement des forces productives et élévation du niveau de vie sociale des travailleurs et du peuple : « Si nous sommes ignorants en matière de production, si nous ne pouvons pas saisir rapidement le travail de production … afin d’améliorer les moyens de subsistance des travailleurs d’abord, puis ceux des autres personnes ordinaires, nous ne serons certainement pas en mesure de maintenir notre pouvoir politique : nous perdrons notre position et nous échouerons. » Le pragmatisme de cette démarche est synthétisé par Deng Xiaoping ainsi : « Peu importe la couleur du chat, l’essentielle est qu’il attrape les souris. »

On retrouve enfin le même raisonnement chez Xi Jinping, l’actuel Secrétaire Général du PCC, lorsqu’il invite l’ensemble du PCC à faire preuve de créativité et d’innovation dans l’application du Marxisme – Léninisme aux réalités évolutives nationales chinoises : « Le marxisme se développe toujours en même temps que les réalités sociales et la technologie de l’époque. Le marxisme ne peut pas stagner. Après le début de l’ouverture, le socialisme n’a fait que continuer à progresser. Soutenir le développement du socialisme aux caractéristiques chinoises, c’est un peu comme un grand livre. Pour établir les principes et les idées fondamentales, le camarade Deng Xiaoping y a gravé sa part. La troisième génération du Comité central du Parti, avec le camarade Jiang Zemin comme noyau et le camarade Hu Jintao comme secrétaire général, a ajouté ses propres chapitres brillants à ce livre. La responsabilité de cette génération de membres du Parti communiste est d’écrire le prochain chapitre de ce grand ouvrage.

Pendant une période assez longue encore, le socialisme à son stade primaire existera aux côtés d’un système capitaliste plus productif et plus développé. Au cours de cette longue période de coopération et de conflit, le socialisme doit tirer les leçons des bienfaits que le capitalisme a apportés à la civilisation. Nous devons faire face à la réalité que les gens utiliseront les forces des pays occidentaux développés pour dénoncer le développement socialiste de notre pays. Nous devons faire preuve ici d’une grande détermination stratégique, en rejetant résolument tous les faux arguments selon lesquels nous devrions abandonner le socialisme. Nous devons corriger consciemment les différentes idées qui ne correspondent pas à notre stade actuel. Plus important encore, nous devons concentrer nos efforts sur l’amélioration de nos propres affaires, sur l’élargissement continu de notre puissance nationale globale, sur l’amélioration de la vie de notre peuple, sur la construction d’un socialisme supérieur au capitalisme, et sur l’établissement des bases d’un avenir où nous gagnerons l’initiative et aurons la position dominante.

Cette analyse nous permet de mieux apprécier le fait que la voie idéologique que nous choisissons de suivre est le problème central qui déterminera la victoire ou la défaite du travail de notre Parti, le destin même du Parti. Comme le camarade Mao Zedong l’a dit un jour : «Un parti révolutionnaire est le guide des masses. Dans les révolutions, il n’y a jamais eu de parti révolutionnaire qui ait conduit son peuple sur la mauvaise route et dont la révolution n’ait pas échoué. »

Les faits montrent que la longue marche planifiée du socialisme de marché dirigé par le PCC a engendré une puissante Chine Populaire économique, scientifique, technique, écologique, culturelle et sociale. La longue NEP chinoise qui rappelle celle courte de l’URSS apparaît de plus en plus comme l’antithèse des diktats libéraux du capitalisme impérialiste broyeurs des conquis sociaux, démocratiques et fascisants.

Les impérialistes qui ne cessent de propager qu’il n’y a pas d’alternative au capitalisme impérialiste se confrontent de plus en plus à l’alternative du « socialisme chinois » alors que leur système prédateur prend l’eau de toutes parts.

Alors que les pays rescapés camp socialiste que sont la Chine, Cuba véritable puissance médicale, la Corée du Nord puissance nucléaire défensive, Vietnam puissance économique et sociale en devenir, font la démonstration de l’efficacité économique, scientifique, écologique et sociale du choix socialiste. La pandémie du covid accélère la prise de conscience planétaire de la barbarie sociale inhumaine, anti-démocratique et anti-environnementale du capitalisme impérialiste.

Les révolutions populaires et socialistes du XXéme siècle nées de la matrice qu’est la Révolution socialiste d’Octobre 1917 sont en train de faire la démonstration que la solution alternative au capitalisme impérialiste est le socialisme scientifique appliqué comme guide de l’action des communistes organisés en Parti aux conditions et particularités nationales nationales.

Les Communistes doivent partout œuvrer à réévaluer leur appréciations du PCC et de la Chine populaire, de l’ensemble des pays rescapés du camp socialiste (Cuba, Corée, Vietnam, Laos) à la lumière des faits, des rapports des forces évolutifs, de la lutte des classes et des peuples contre le capitalisme impérialiste au plan national et international. »

Le bricolage est évident. Au lieu de réfléchir sur la société française et le capitalisme, la gauche du PCF a trouvé le moyen de remplacer l’URSS des années 1980 par la Chine des années 2020. C’est un décalque pur et simple. Et vu le caractère de la Chine actuelle, peut-on encore considérer la gauche du PCF comme relevant de la Gauche ? Ou faut-il simplement en voir les représentants français des ambitions chinoises, les satellites de l’État chinois dans sa lutte pour remplacer les États-Unis comme puissance hégémonique ?

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Le PRCF et le « méga-empire »

Mélangeant les thèses du PCF des années 1960, 1970 et 1980, le Pôle de Renaissance Communiste en France considère que le capitalisme est passé sous la coupe d’un méga-empire.

C’est une thèse à la fois osée et tout à fait classique que met en avant le Pôle de Renaissance Communiste en France à travers un article d’une de ses principales figures historiques, l’idéologue Georges Gastaud. C’est au sujet des mesures de relance faites aux États-Unis.

L’idée est la suivante : ces mesures serviront principalement les grandes entreprises.

« Pour relancer l’économie américaine, Joe Biden vient de faire voter au Congrès un plan de “soutien à l’économie” de 1200 milliards de dollars.

Une partie de cet argent public ira aux particuliers, et tant mieux pour les travailleurs américains en graves difficultés auxquels cette manne provisoire apportera une bouffée d’oxygène. Mais, vous l’avez deviné, la plus grande partie de cet argent ira aux grandes entreprises, c’est-à-dire au profit capitaliste puisque ce subventionnement public massif du capital privé sera distribué sans contrepartie (…).

Gare au retour de bâton sur les salaires, les emplois publics, les pensions, les indemnités chômage, le logement social, les remboursements sécu, etc.! (…)

Derrière le Père-Noël, le Père-Fouettard: il s’agit d’un nouvel avatar, à l’occasion de l’épidémie mondiale, de ce capitalisme monopoliste d’État travesti en “néolibéralisme” qui repose sur un mécanisme unique État bourgeois/monopoles capitalistes, en voie de redéploiement à l’échelle continentale (l’Empire européen centré sur Berlin) et transcontinentale (ce que le MEDEF appelle l’Union transatlantique) et qui consiste, avec des faux-semblants quasiment socialistes, à doper le profit capitaliste privé en l’abondant en permanence avec l’argent du contribuable.

C’est pourquoi les euro-réformistes keynésiens qui croient “contrebalancer” l’ultra-capitalisme “néolibéral” en réclamant plus d’État (bourgeois) et “plus d’Europe”, ont tout faux.

Il faut de plus en plus, à notre époque, combattre l’UE et sa transformation en méga-Empire continental RENFORÇANT la mainmise capitaliste sur les travailleurs et sur tout le peuple, et combattre TOUTES les variantes du capitalisme qui, selon des dosages différents mais en frappant toujours les mêmes, et que ce soit par l’austérité à tous crins ou par le subventionnement massif des mastodontes privés, appauvrit toujours À L’ARRIVÉE les travailleurs salariés et les couches moyennes pour toujours IN FINE, enrichir le grand capital dont les grands actionnaires américains et français ont énormément profité de la crise… »

Pour résumer : le capitalisme, sous toutes ses formes aujourd’hui, renforce inéluctablement les plus grandes entreprises, et cela au-delà même des frontières nationales. C’est le triomphe d’un capital financier qui, quoi qu’il arrive, fait des profits car il a pris le contrôle des États. C’est la thèse du Capitalisme Monopoliste d’État, élaboré en URSS par Eugen Varga dans les années 1950 et particulièrement développé en France par le PCF dans les années 1960-1970 à travers son économiste Paul Boccara.

Il n’est pas difficile de voir que cette thèse est fausse alors qu’on voit l’ensemble des États se concurrence de manière très profonde, même la France et l’Allemagne. Chaque État tend à jouer le chacun pour soi et à établir des alliances : il est tout à fait évident qu’on va à la guerre pour le repartage du monde.

Le PRCF nie cela : pour lui il y a un capitalisme transnational tentaculaire, un super-impérialisme. Il faut bien d’ailleurs noter que, de manière ouverte, la thèse du capitalisme monopoliste d’État considère comme périmé la thèse de Lénine sur l’impérialisme. Mais même si on n’est pas d’accord avec Lénine et qu’on considère qu’avec le capitalisme la guerre est possible et non pas inéluctable, ce qu’il faut voir c’est que pour le PRCF la guerre est impossible.

Les grands monopoles qui dominent le monde de manière transnationale ne vont en effet pas se faire la guerre… Ou bien s’ils la font c’est telle une conspiration afin de manipuler les gens, ce qui est d’ailleurs une sous-thèse du PRCF.

Tout ce discours du PRCF n’étonnera pas, car il représente l’aile gauche du PCF et de la CGT, avec sa focalisation sur les services publics formant sa base. Cependant, là où c’est grave, c’est que cela désarme totalement face à la compétition mondiale pour le repartage du monde. La conception d’un capitalisme « transational » justifiant un socialisme « patriotique » est non seulement fausse à la base, mais elle est un obstacle à la dénonciation du militarisme se généralisant dans chaque pays.

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La vision du monde du PCF pour son centenaire: les sympathisants

Le Parti Communiste Français, ce n’est pas que des cadres et des adhérents, c’est aussi une hypothèse : celle « du Parti ».

Il y a les cadres du PCF, avec leur hypothèse d’une démocratie avancée utilisant l’État pour contrer le capitalisme ; il y a la base du PCF, issue d’une socialisation de masses par la contre-société liée au PCF et ses organismes de masses. Mais il y a également les sympathisants, qui forment au sens strict ce qui fait vivre le PCF.

Il y a en effet en France des gens dont les yeux s’illuminent quand on parle « du Parti ». Cela ne veut pas dire que pour eux le PCF soit « le Parti », mais ils vivent pour autant dans cette culture. Ils diffusent une culture « Parti » qui joue un rôle essentiel dans l’existence du PCF.

C’est très paradoxal, car le PCF ne se veut pas du tout « Le Parti » et ce depuis longtemps. Et les gens qui ont cette culture « Parti » sont parfois à l’extérieur du PCF, voire totalement contre lui. Mais le PCF est irradié par cette culture voulant que l’absence « du Parti » est considéré comme impossible. Ayant encore un poids suffisant en termes de membres et d’élus, le PCF surnage en tant que l’hypothèse « Parti », même bancale. S’il disparaissait, un autre « Parti » réapparaîtrait, tellement ce besoin est porté par beaucoup de gens.

Une affiche du Parti Communiste Français de 1958

Il faut bien faire attention à ne pas confondre ceux qui veulent « le Parti » et ceux qui disent qu’ils veulent le construire. Ce n’est pas du tout pareil. La tradition « communiste révolutionnaire » dit qu’elle veut fonder « le Parti » mais elle considère que ce sera un aboutissement. On est là historiquement dans l’approche trotskiste (Lutte Ouvrière, des courants du Nouveau Parti Anticapitaliste, etc.) et assimilé (Voie Prolétarienne, UPML, UC Lyon, etc.).

Cette tradition repousse ce qui fait justement « Le Parti »: une idéologie bien déterminée, une lecture immédiate en termes de pouvoir, d’appareil d’État, bref une ambition politique extrêmement poussée. Elle parle du Parti comme produit de luttes futures, d’assemblages de gens en résistance, etc. Ce n’est pas du tout la tradition « du Parti » qui implique l’ambition de présenter une direction politique, dans le sens d’une révolution.

Le PCF n’a plus cette ambition, mais il n’a pas changé de nom et il profite de cette aura. Les sympathisants du PCF l’entrevoient de cette manière et le valorisent pour cette raison. Le PCF, c’est l’hypothèse historique du Parti, un espoir, une attente. Il y a d’ailleurs beaucoup de concurrence sur ce plan. Si on part d’un point de vue historique, il y a deux tendances oppositionnelles générales, se subdivisant elles-mêmes.

Le canal habituel : PRCF et PCRF

On parle ici de gens directement issus du PCF, où ils forment une tendance oppositionnelle organisée en 1991 avec la Coordination communiste. En 2000, la majorité décide de vivre sa vie de manière indépendante, ce qui donne l’Union des Révolutionnaires-Communistes de France devenant le Parti Communiste Révolutionnaire de France. La minorité décide de garder un pied dans le PCF, un pied dehors, pour ne pas se marginaliser, ce qui donne le Pôle de renaissance communiste en France.

Le canal historique : PCOF et PCF(mlm)

On parle ici de gens qui sont totalement coupés du PCF et de ce qui s’associe à lui depuis les années 1960. Le PCF est considéré comme ayant perdu sa nature dans les années 1950, en s’alignant sur les positions soviétiques « révisionnistes ». Il s’agit ainsi de relever le drapeau en réaffirmant l’hypothèse communiste, quitte à être très minoritaire : il en va du flambeau, de la possibilité d’une affirmation communiste. D’où le terme de Parti du côté du Parti Communiste des Ouvriers de France et du Parti Communiste de France (marxiste-léniniste-maoïste).

Pour faire court, le PRCF a la nostalgie du PCF des années 1980, il est très marqué par un côté patriotique. Le PCRF regrette celui des années 1960, avec le romantisme cubain notamment. Le PCOF, lié à la tradition dite « pro-albanaise » (avec Enver Hodja), se tourne en quelque sorte vers celui des années 1940, avec des résistances populaires de masse à développer. Le PCF(mlm), lié à la tradition « pro-chinoise » (avec Mao Zedong) veut un Parti Communiste assumant la révolution culturelle, raisonnant en termes de vision du monde.

Le siège du PCF à Paris, en 1953

Le PCF, pour son centenaire, est ainsi difficile à appréhender. Il y a celui des cadres, celui de la base, celui des sympathisants de l’hypothèse « du Parti ». Lequel est dans le vrai ? On va rapidement le savoir, dans un tel contexte de crise, tellement les différences sont marquées.

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La guerre continue et tant l’Arménie que l’Azerbaïdjan basculent dans le fanatisme

L’Arménie et l’Azerbaïdjan continuent de s’affronter malgré des cessez-le-feu non suivis ; ils sont lancés dans un jusqu’auboutisme nationaliste forcené.

La situation militaire est toujours aussi tendue et sanglante au Nagorny-Karabagh, malgré des appels plus ou moins hypocrites de la Russie et des accords de cessez-le-feu non suivis d’effets. C’est que les protagonistes se sont auto-intoxiqués dans un nationalisme ultra catastrophique ; les appels à la mobilisation totale sont de rigueur, avec la haine nationaliste la plus farouche largement diffusée, avec toute la force que peuvent avoir des États.

Cela fait très peur du côté arménien. Car l’Arménie a tout à perdre et pourtant ceux aux commandes sont des fous furieux. Ainsi, à Etchmiadzin, à la périphérie d’Erevan (la capitale arménienne), on trouve le catholicossat de tous les Arméniens. Une église abrite la croix de l’armée arménienne, avec prétendument un morceau de la croix sur laquelle fut crucifié Jésus Christ… Et cette croix vient d’être amené au Nagorny-Karabakh !

C’est là une expression du délire nationaliste-religieux quant à une Arménie existant depuis la nuit du temps, avec un fanatisme anti-« turc » où par turc on entend turc, tatar, azéri, musulman, etc.

Tant en Arménie qu’en France on a de ce fait une intense activité de la Droite la plus réactionnaire et religieuse, dont Nouvelles d’Arménie Magazine se fait l’écho notamment, comme avec cette tribune ultra-réactionnaire de Mooshegh Abrahamian, se résumant aux propos suivants :

« L’avant-poste arménien de ce combat millénaire pour la civilisation chrétienne tiendra-t-il jusqu’à la prise de conscience des nations occidentales seules capables de stopper ce rouleau compresseur qui atteint désormais leurs rives ? »

Ces propos relèvent de la guerre de civilisation et sont tout à fait conformes à l’idéologie de Jean-Marie Le Pen des années 1980 ; on est d’ailleurs dans un contexte d’une Droite « populaire », beauf, brutale et anti-communiste à l’offensive. C’est tellement vrai que début octobre Libération a été obligé de retirer face à la pression un de ses articles, « Face à l’Azerbaïdjan, l’extrême droite française défend l’Arménie », qu’on peut retrouver sur un site de Gauche l’ayant republié en étant passé à côté d’une polémique hallucinante et malheureusement symptomatique.

Cette « sainte-alliance » des réactionnaires « occidentalistes » a évidemment son pendant du côté azerbaïdjanais. Les victoires militaires azerbaïdjanaises, avec la conquête de quelques villages, ont amené une propagande nationaliste sans limite, parlant de victoire totale à l’horizon, sans évidemment un seul mot pour la population arménienne. Ici, il n’est pas parlé d’épuration ethnique mais c’est très clairement sous-entendu. Il n’y a aucun appel envers la population arménienne du Nagorny-Karabagh et il est évident que l’État azerbaïdjanais fera tout pour qu’elle s’enfuit.

Le président du parlement turc, Mustafa Sentop, est également en visite officielle en Azerbaïdjan, ajoutant de l’huile sur le feu ; sa visite témoigne du rôle de la Turquie pour accentuer les violences, l’offensive, la démarche anti-démocratique.

À l’arrière-plan, on a aussi l’Azerbaïdjan qui a balisé le terrain avec de multiples contacts, voire des contrats directs comme celui de l’ambassade d’Azerbaïdjan en France signé en 2018 avec Albera conseil, une agence de communication dirigée par Patricia Chapelott.

La situation est vraiment celle d’une guerre dont on voit mal la sortie et il est d’ailleurs intéressant de voir à ce sujet le positionnement de la Gauche relevant de la tradition communiste.

Le PCF ne prend pas position sur le découpage géographique de l’Arménie et de l’Azerbaïdjan à l’époque de l’URSS, tout en prenant ouvertement partie pour que le Nagorny-Karabakh devienne une république indépendante arménienne. Le PRCF a une position relativement similaire, publiant même un communiqué de communistes arméniens appelant Poutine à intervenir pour mettre un terme à cette situation.

Le PCRF souligne quant à lui que la guerre est l’expression du démantèlement de l’URSS et des visées géopolitiques des uns et des autres ; du côté du PCF(mlm) on a une longue présentation du rapport arméno-azerbaïdjanais avec une valorisation de l’esprit du bolchevisme caucasien, tenant d’une unité transcaucasienne visant à assécher toute expression de nationalisme.

C’est que la question est finalement simple : la solution au conflit passe-t-elle par un retour en arrière à la ligne communiste des années 1920, avec une unité caucasienne opposée aux nationalismes, ou à la scission radicale des deux pays, avec un encadrement international ?

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La recomposition des positions maximalistes de la Gauche avec la crise

Dans le contexte actuel de crise, il y a des mouvements de fond qui ne trompent pas. Une partie de la Gauche cherche à se placer dans un axe de combativité avec un fond réel.

Que de nombreuses organisations de la Gauche française demandent la gratuité des masques est une chose. On peut considérer cela comme normal ou facile, en tout cas cela ne va pas très loin. Mais que le PCF diffuse une pétition où il est demandé pas moins qu’une hausse du SMIC de 20 %, là pour le coup c’est une élévation significative du niveau de combativité revendicative. D’autant plus que la pétition demande également la chose suivante :

« Interdire les licenciements des grands groupes bénéficiant de fonds publics et instaurer un droit de contre-propositions des salarié·es et des habitant·es pour sécuriser l’emploi au lieu de baisser le «coût du travail». »

Les connaisseurs auront reconnu ici très exactement la stratégie du PCF des années 1980 formulée alors par l’économiste Paul Boccara. C’est ici un coup de barre à gauche, très à gauche en tout cas, pour le PCF, ou du moins un certain « retour aux sources ». Exiger une revalorisation du SMIC à hauteur d’un cinquième, c’est s’aligner sur un maximalisme conflictuel.

Et c’est indubitablement dans l’air du temps, que ce soit en France ou en Europe. Le PCF a ainsi également mené une initiative commune européenne d’une dizaine de partis avec le groupe de la Gauche unitaire européenne (GUE/NGL) au Parlement européen, pour une autre pétition.

On y lit principalement que :

« Nous voulons garantir l’accès pour tous aux diagnostics, aux traitements et aux vaccins contre le Covid-19. Les multinationales pharmaceutiques ne doivent pas faire de profits sur cette pandémie, au détriment de notre santé (…).

La Commission européenne doit garantir que les vaccins et les traitements anti-pandémiques deviennent un bien public mondial, librement accessible à tous. »

Les signataires sont le Parti des travailleurs belges (Belgique), Podemos et Izquierda Unida (Espagne), Sinn Fein (Irlande), Socialistische Partij (Pays-Bas), AKEL (Chypre), Potere al Popolo et Rifondazione Comunista (Italie), Bildu (Pays Basque), le Parti communiste de Bohème et Moravie (République tchèque) et Die Linke au Parlement européen (Allemagne).

C’est ici une recomposition assez importante, puisqu’on a des partis post-bloc de l’Est (le PCF, die Linke, Rifondazione Comunista…) et d’autres relevant de mouvements qu’on peut définir comme basistes, souvent issus des des années 1970 (le PTB, le Sinn Fein, Bildu, Podemos…).

On ne peut pas voir cela autrement que comme un alignement : il s’agit de se placer de la manière la plus efficace possible par rapport à la prochaine constellation politique. Pour cela, il faut évidemment une base programmatique : ici la Gauche programmatique surclasse totalement une gauche « militante » à la fois déboussolée et désorientée. Déboussolée, car elle ne profite plus de ses terrains de jeux que sont les manifestations, rassemblements et autres réunions symboliques, désorientée, car n’ayant aucune base théorique, elle ne sait pas vers où se tourner.

La Gauche programmatique envoie ainsi du lourd ; on notera d’ailleurs que cette Gauche avait été le plus souvent très critique envers les gilets jaunes, voire les avaient littéralement rejetés comme relevant de la réaction.

Le Parti Ouvrier Indépendant et le Parti Ouvrier Indépendant Démocratique ont ainsi choisi tant l’un que l’autre la question des licenciements comme le levier des combats à venir. Historiquement très liées au syndicalisme (avec la CGT-FO), elles tablent sur toute une série de bataille. Lutte Ouvrière élargit de son côté le terrain à la question des aides aux entreprises et s’attend à des luttes massives et déterminées. L’opposition aux licenciements ira de pair avec la question des financements gouvernementaux.

On a là des dynamiques axées sur l’économie, par des organisations très marquées par le programme de transition de Trotsky. D’autres entrevoient une sorte de rébellion plus ample.

Les maoïstes du PCF(mlm) considère qu’on est rentré dans l’époque de la seconde crise générale du capitalisme. Il faut ainsi s’appuyer sur une grille de lecture capable de voir comment la société entre en décadence à tous les niveaux, ce qui permet de lire les antagonismes se levant en réponse et de calibrer la proposition stratégique communiste.

Le PRCF, très influent sur une partie de la CGT (voire du PCF), voit lui en le plan de sauvetage européen un saut qualitatif de l’Union européenne ; il s’agit de s’y arracher par un FREXIT progressiste. L’enjeu, c’est l’unité par une Convergence nationale des résistances (CNR) fédérant communistes, Insoumis, progressistes et patriotes sincèrement antifascistes, syndicalistes de combat, travailleurs, Gilets jaunes, artistes révolutionnaires, etc.

Le PCRF a une approche à la fois similaire et différente du PRCF (ils ont la même origine, la gauche du PCF des années 1990), avec la proposition d’un Front d’Action sociale regroupant toutes les victimes du capitalisme, leurs associations de masse, syndicats, partis, contre la politique des monopoles et leurs gouvernements. Il faudrait alors en soutenir l’aile anticapitaliste.

Pour ces structures, et pour d’autres du même type, la situation actuelle est une revanche. Elles ont bu la tasse avec tout l’activisme débridé partant dans tous les sens ces derniers mois, voire ces dernières années, même si certaines ont cherché à profiter de La France Insoumise ou de la CGT. Elles profitent ici de n’avoir pas abandonné le fait de mettre en place un corpus théorique (ou de le conserver).

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Karl Marx, «penseur du racisme systémique»?

Faire de Marx, le grand activiste de la première Internationale, à la base du mouvement ouvrier, un auteur développant la thèse du « racisme systémique », il fallait oser. C’est ce qu’a fait Bruno Guigue, un ancien sous-préfet, c’est-à-dire lui-même une figure du « système ».

Bruno Guigue n’est pas n’importe qui. Né en 1962, il a fait l’École normale supérieure de la rue d’Ulm et de la fameuse ÉNA, l’École nationale d’administration. C’est donc quelqu’un qui fait partie de l’élite intellectuelle du pays. Il a ensuite été haut fonctionnaire du ministère de l’intérieur, directeur du contrat de ville de Saint-Denis, directeur général adjoint des services de la Région Réunion.

C’est donc quelqu’un qui sait ce qu’il dit et ce qu’il fait, il a d’ailleurs même affronté la ministre de l’Intérieur Michèle Alliot-Marie en publiant une tribune libre critiquant Israël, ce qui a amené son éjection de son poste de sous-préfet en 2008. Notons toutefois que l’article « Quand le lobby pro-israélien se déchaîne contre l’ONU » a été publié par le site musulman Oumma.com et qu’il n’hésite pas aux provocations plus que douteuses (par exemple l’article « analogie pour analogie, frappante est la ressemblance entre le Reich qui s’assied sur la SDN en 1933 et l’Etat hébreu qui bafoue le droit international depuis 1967 »).

Simple erreur ou abandon de la Gauche ? On a la réponse dans un article plus que surprenant. Depuis quelques années, Bruno Guigue s’est rapproché du Pôle de Renaissance Communiste en France (PRCF) et voilà qu’il publie sur le site du PRCF un article surréaliste intitulé : « Marx, penseur du racisme systémique ». Salvador Dali et André Breton sont battus.

Mentionnant les présentations assassines que Karl Marx fait du colonialisme, Bruno Guigue en déduit que, par conséquent, la « question raciale » était à la base même de la question capitaliste. Ce faisant, il fait comme Dieudonné et résume le capitalisme à une sorte de mise en esclavage parasitaire :

« Loin d’être indifférent à la question raciale, Marx en a perçu le caractère originaire, il a vu qu’elle était indissociable de la genèse du mode de production capitaliste. »

« La vérité, on le voit, c’est que Marx a compris que le racisme systémique inhérent à l’esclavagisme marchand était l’acte de naissance du capitalisme moderne ; que ce dernier épouserait bientôt la logique de ce que Samir Amin appellera le « développement inégal » ; qu’une fois les rapports de dépendance entre le Nord et le Sud institués, cette inégalité allait conférer sa véritable structure au système mondial ; qu’entre le centre et la périphérie s’instaurerait une division du travail assignant la seconde au rôle de fournisseur de main d’œuvre et de matières premières à bas prix ; que générant une exploitation en cascade, cette hiérarchisation du monde perpétuerait des rapports d’exploitation dont l’Occident capitaliste tirerait sa prospérité et dont les séquelles sont encore visibles. »

Il y aurait ainsi une sorte de « poison » dans la matrice du capitalisme. Bruno Guigue n’a donc pas lu le fameux Capital de Marx, sinon il saurait que chez lui le colonialisme n’est pas présent dans la « matrice » du capitalisme, qui par ailleurs n’existe pas, mais accompagne le développement des forces productives.

Karl Marx n’a jamais écrit, pour cette raison, d’analyses sur le racisme et encore moins sur le racisme « systémique ». Il n’y avait pour lui pas de « système », mais un mode de production. Friedrich Engels, dans son fameux « anti-Dühring », présente l’esclavage comme une étape nécessaire :

« Ce fut seulement l’esclavage qui rendit possible sur une assez grande échelle la division du travail entre agriculture et industrie et par suite, l’apogée du monde antique, l’hellénisme. Sans esclavage, pas d’État grec, pas d’art et de science grecs; sans esclavage, pas d’Empire romain.

Or, sans la base de l’hellénisme et de l’Empire romain, pas non plus d’Europe moderne. Nous ne devrions jamais oublier que toute notre évolution économique, politique et intellectuelle a pour condition préalable une situation dans laquelle l’esclavage était tout aussi nécessaire que généralement admis.

Dans ce sens, nous avons le droit de dire : sans esclavage antique, pas de socialisme moderne.

Il ne coûte pas grand chose de partir en guerre avec des formules générales contre l’esclavage et autres choses semblables, et de déverser sur une telle infamie un courroux moral supérieur. Malheureusement, on n’énonce par là rien d’autre que ce que tout le monde sait, à savoir que ces institutions antiques ne correspondent plus à nos conditions actuelles et aux sentiments que déterminent en nous ces conditions. »

Il ne coûte pas grand-chose pour Bruno Guigue de dénoncer l’esclavagisme aujourd’hui, alors qu’il n’existe plus et qu’il n’a surtout rien de capitaliste. Le capitalisme n’est pas raciste, il est même totalement anonyme. Ses blocs en compétition utilisent pour cette raison le racisme afin de mobiliser en leur faveur, mais il n’y a rien de systématique. Le capitalisme britannique méprise ou valorise l’Inde selon ses besoins : c’est le marché qui décide, pas un « racisme systémique » qui serait une « structure » comme dans le structuralisme.

Mais l’unique intérêt de son article, c’est de se demander ce que le PRCF est allé faire dans cette galère… Cette organisation se définit comme une initiative de reformation du PCF sur la base de ce qu’il a été dans les années 1980. On a pourtant ici quelque chose qui n’a rien à voir, qui est ouvertement postmoderne. C’est soit une erreur, une anecdote, soit directement une infiltration postmoderne, une bombe à retardement.

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La lettre incendiaire de Léon Landini (PRCF) à François Ruffin

Léon Landini, figure de la Résistance qui fut également gravement torturé par les nazis est le président du PRCF, un groupe à la fois en dehors du PCF et dans le PCF, qui entend maintenir la ligne du parti d’avant son tournant que l’on pourrait qualifier de post-communiste. Le PRCF a comme modèle le PCF des années 1980 et a une influence notable dans toute une partie de la CGT. Léon Landini s’est retrouvé dans une émission sur YouTube confronté à François Ruffin et explique qu’il s’est fait piégé, notamment en raison de la faiblesse due à son âge. Dans une lettre ouverte à François Ruffin, il remet quelques points sur les « i » tout à fait nécessaires.

« Léon Landini

Officier FTP-MOI – Président de l’Amicale des Anciens FTP-MOI  des  bataillons Carmagnole-Liberté de la Région Rhône-Alpes – Interné de la Résistance – Grand Mutilé de Guerre, suite aux tortures endurées par la Gestapo  pendant mon internement.

Officier de la Légion d’Honneur – Médaille de la Résistance.

Décoré au  titre de Résistant émérite par le Gouvernement Soviétique.

Président du Pôle de Renaissance Communiste en France (Ce que je considère comme un grand honneur).

Réponse de « Landi à Ruffian »

Il s’agit de la vidéo  que tu as présentée  sur  YouTube  le 29 avril 2020

Mon état de santé me joue des tours, c’est ce qui m’a amené à répondre avec quelque retard aux sarcasmes que tu m’as adressés au cours de l’émission, à laquelle Gilles Perret  m’avait invité et qui, avec beaucoup d’égards, m’a présenté en indiquant que j’avais assassiné des soldats allemands. On m’a toujours dit que celui qui assassine est un assassin. Merci Gilles.

Au cours de cette émission, tu m’as appelé « Landi » à plusieurs reprises. Je n’ai pas apprécié, car je sais pertinemment que tu connais parfaitement mon nom, en conséquence n’aimant pas que l’on ampute volontairement mon nom, à mon tour je modifie légèrement le tien, au lieu de Ruffin  je vais t’appeler Ruffian.

J’ajouterai que de la façon dont  tu m’as traité au cours de cette émission, si je me laissais aller, c’est de bien d’autres noms que je te traiterais.

Dès le début de mon intervention, convaincu de bien faire, j’ai indiqué que : « Le programme du Conseil National de la Résistance n’a pas seulement été écrit qu’avec de l’encre, mais également avec le sang de toutes celles et tous ceux qui sont morts pour que nous puissions vivre libre dans un monde où il ferait bon vivre » et  j’ai ajouté, « que 52 de mes proches camarades sont morts sous la torture et malgré les effroyables supplices que Barbie et ses sbires leur ont fait endurer, pas un seul n’a avoué quoi que ce soit ».

À ce moment-là, tu m’as interrompu, cherchant à me mettre dans l’embarras et si possible à me ridiculiser en me posant la question suivante :

« Cela veut quand même pas dire que pour avoir de nouveaux jours heureux, il faut se faire torturer, emprisonné et mourir ».

Question idiote et offensante, posée avec la conviction et que tu allais, tenant compte de mon âge, me désarçonner et  que surpris par une pareille stupidité j’allais me mettre à bafouiller.

Tu vas te rendre compte que ce vieil homme que tu voulais ridiculiser, malgré son âge, il lui reste encore assez de verve pour répondre comme il se doit, à un petit prétentieux, qui se prend pour quelqu’un avant même d’être quelque chose.

Toutefois à cause du respect que tu devrais avoir à l’égard de celles et ceux  qui ont survécu à une telle épopée, tes offenses tu aurais dû te les garder pour toi.

Lorsque Gilles Perret m’a invité à participer à cette émission vidéo, il m’a indiqué qu’il s’agissait d’évoquer le programme du CNR et les Jours Heureux, en conséquence j’ai voulu, en préambule, et surtout en tant qu’ancien résistant, mettre en évidence ce qu’était le CNR et dire, combien ceux qui se sont battus les armes à la main y sont attachés.

Comme tu le dis « on s’est fait torturer, emprisonner et malheureusement trop souvent massacrer ».

Mais pour ton éducation, il me semble utile que tu saches que si nous avons pu supporter l’insupportable et nous sublimer à notre insu, c’est qu’en nous engageant au sein des FTP-MOI et en pratiquant la guérilla urbaine, nous savions tous que nous pouvions à tout moment passer de vie à trépas.

Nous nous battions de toutes nos forces contre l’occupant et contre les sbires qui s’étaient mis à leur service.  Notre courage émanait du fait que nous avions la conviction que s’il nous fallait mourir, nous n’allions pas mourir pour rien, et nous risquions notre vie avec la certitude qu’après la Libération, les survivants pourraient vivre heureux dans Une France Forte, Libre, Démocratique, Indépendante, et Souveraine. Ce qui ne peut être le cas en étant prisonnier d’une Union Européenne (dirigée par Berlin) alors que nous savons tous que l’UE  est antinomique du programme du CNR.

C’est à partir de tous ces combats et de tous ces sacrifices, que le programme du CNR a pu être écrit, et appliqué entre 1945 et 1947 par des ministres communistes et, seulement par des ministres communistes.

Ce sont pour toutes ces raisons que nous, anciens FTP-MOI et militants communistes, nous en revendiquons la paternité et, dès que de sombres individus cherchent à utiliser le CNR à d’autres fins que pour ce qu’il a été créé, nous montons au créneau et nous rappelons à l’ordre celles et ceux qui cherchent à l’utiliser pour se mettre en évidence, désireux apparaître pour ce qu’ils ne sont pas.

Sarkozy n’utilisait-il pas pour se mettre en valeur le nom de Guy Môquet et voici que Macron cherche à cacher toutes ses malhonnêtetés en promettant à notre peuple « Des Jours Heureux » au moment même où il est en train de détruire les derniers  conquis qu’il nous en reste.

En conclusion, je n’accepte pas au final d’avoir été utilisé comme le résistant de service qu’on écoute d’une oreille distraite pour tenter de lui faire cautionner un projet politique dont je n’avais pas été informé avant l’émission et que je ne partage pas : en utilisant le nom du CNR, tout en contournant tout ce qui fit la force du véritable, auquel nous devons les plus grandes avancées de notre histoire. Il ne peut pas y avoir de véritable nouveau CNR en contournant et en écartant les communistes et la classe ouvrière, pas de véritable nouveau CNR sans la nationalisation des banques et des entreprises stratégiques. Et surtout, pas de nouveau CNR sans rupture franche avec l’euro et l’UE.

Après cette brève mise au point, qui j’espère te servira.

Léon LANDINI.

PS : Ma fille vient de m’apprendre que tu lui as écrit, en lui disant : « Je connais un peu ton père, son parcours, ses convictions pour l’avoir interrogé durant  près de quatre heures chez lui ».  FAUX ! Tu n’es  jamais venu chez moi. J’ai l’impression que ta mémoire te joue des tours, peut être mon cher François, serait-il bon que tu consultes un psychiatre. »

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La Gauche française et les 75 ans de la victoire sur l’Allemagne nazie

Si le 8 mai est un jour férié, de dimension nationale, la victoire sur le nazisme est considérée comme un aspect essentiel du dispositif idéologique et culturel de toute une partie de la Gauche. On peut pratiquement parler de fracture et il y a une profonde réactivation du courant communiste « historique ».

Il y a 75 ans, l’Allemagne nazie capitulait face aux Alliés. La version finale de cette capitulation arriva tard le soir, ce qui fit qu’en URSS c’était déjà le 9 mai, ce qui amène une double célébration internationale, le 8 mai pour les uns, le 9 mai pour les autres. Quant aux Allemands, tout comme étrangement les Autrichiens, ils ne célébraient rien du tout, considérant la défaite de l’Allemagne nazie comme leur propre défaite.

La Gauche allemande était terriblement choquée de ce constat et une large partie des socialistes d’Allemagne décida d’ailleurs de s’unifier avec les communistes, afin de faire face à la gigantesque tâche de réforme démocratique. Cela donna l’Allemagne de l’Est, alors qu’à l’Ouest les anciens nazis occupèrent l’ensemble de l’appareil d’État et les grandes entreprises. Le fondateur des services secrets ouest-allemands, Reinhard Gehlen, qui les dirigea jusqu’en 1968, fut d’ailleurs l’un des co-planificateurs de « l’opération Barbarossa » et ensuite le responsable des services secrets dans le cadre de l’invasion de l’URSS.

En France, la Gauche profitait à l’inverse évidemment d’une profonde unanimité. Cependant, la reconnaissance du 8 mai a toujours été une bataille. Si dès 1946, il y a une commémoration annuelle, le 8 mai n’est férié qu’à partir de 1953, à la suite d’une longue lutte.

De Gaulle supprime alors le 8 mai comme jour férié en 1959. Les commémorations restent. En 1975, Valéry Giscard d’Estaing supprime les commémorations. Toutes ces décisions reposent évidemment sur les besoins de la « réconciliation » dans le cadre de la construction européenne.

En 1981, c’est alors François Mitterrand qui rétablit à la fois les commémorations du 8 mai et cette date comme jour férié. C’était inévitable de par l’esprit et la culture de la Gauche. Mais son statut est précaire. Valéry Giscard d’Estaing avait fait du 11 novembre la journée des morts de la France et c’est de nouveau le cas depuis 2012. La suppression du 8 mai est une vraie hypothèse.

La raison de cette situation est que l’Union européenne a remplacé, pour une large partie de la Gauche, le mouvement ouvrier. Si le Parti socialiste mentionne les 75 ans de la victoire au détour d’un message twitter (et le même sur facebook), son dirigeant Olivier Faure n’en parle pas. EELV ne fait pareillement qu’ un message twitter, pour ne même pas parler des 75 ans, mais de la répression sanglante des émeutes tout aussi sanglantes en Algérie française le même jour. C’est d’ailleurs un des thèmes récurrents de la « seconde gauche », violemment anti-communiste.

Du côté de ceux assumant la tradition communiste, le 8 mai est par contre sacré et ces 75 ans forment un prétexte tout particulier de réaffirmation identitaire et culturelle, particulièrement marquée cette année. Le PCF reste sobre en saluant les 75 ans, mais dénonce tout de même la ministre des armées ne saluant que les pays alliés actuellement à la France pour leur soutien à la Libération (États-Unis, Canada, Grande-Bretagne, Australie, Nouvele-Zélande), y voyant un plan pour « oublier » l’armée rouge.

Qu’en 2020 le PCF soit obligé de souligner l’importance de l’armée rouge en dit long sur la puissance de toute une tradition. On ne doit donc pas s’étonner de voir des initiatives encore plus hardies dans le cadre de ceux en « compétition » pour qu’un nouveau PCF émerge.

Du côté du Parti Communiste Révolutionnaire de France (PCRF), il y a une Déclaration internationale de Partis communistes pour le 8 mai, qui a d’ailleurs été également signé par le Pôle de Renaissance Communiste en France (PRCF), qui a de son côté organisé un débat vidéo avec l’historienne Annie Lacroix-Riz. Il y a aussi un article saluant « les libérateurs au drapeau rouge » et dénonçant l’interprétation historique de la seconde guerre mondiale de l’Union Européenne (voir «L’Importance de la mémoire européenne pour l’avenir de l’Europe», un texte contre la Gauche).

Mais en fait le PCF a signé également cette déclaration, ce qui est très intéressant ou marquant ou surprenant, comme on le voudra, car il est parlé de l’URSS comme d’un « Etat socialiste », ainsi que du « peuple héroïque soviétique et à l’Armée rouge, dirigée par le Parti communiste, dont la contribution, écrite dans des pages héroïques telles que les batailles de Moscou, de Léningrad et de Stalingrad ».

Cette notion de batailles décisives est précisément battu en brèche par les maoïstes du PCF(mlm) qui ont de leur côté publié un dossier sur « la grande guerre patriotique », comme l’URSS appelle de son côté la seconde guerre mondiale, insistant sur « l’art opérationnel » élaboré alors.

Et dans la déclaration internationale, signé par une soixantaine de partis dans le monde, on lit le même genre de discours que chez le PCF(mlm), puisqu’il est affirmé que « les secteurs les plus réactionnaires et agressifs de l’impérialisme voient de plus en plus le fascisme et la guerre comme une « sortie » de l’aggravation de la crise du système capitaliste ».

C’est là un retour en forces des thèses communistes « historiques », avec tout une gamme de rapports à Staline : un peu (PRCF), beaucoup (PCRF), à la folie (PCFmlm), pas du tout (PCF). D’ailleurs, les autres courants ne parlent pas des 75 ans de la victoire sur le nazisme, soit par désintérêt (les maoïstes « post » Staline, les anarchistes), soit par rejet historique de la Résistance (Lutte Ouvrière ne dit rien, le NPA porte quant à lui un regard très critique).

A-t-on ici un renouveau historique du Communisme comme mouvement, ou un simple rappel formel des fondamentaux ? L’avenir le dira.

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«Déclaration internationale de Partis communistes pour le 8 mai»

Cette déclaration a été signée, pour faire simple, par ce qui reste du mouvement communiste se définissant positivement par rapport à l’URSS dans les années 1980. En France, elle a été signé par le PCF (qui ne le diffuse apparemment pas), par le PCRF (issu de l’URCF, une scission de gauche du PCF des années 1990) et par le PRCF (la gauche du PCF, très liée aux tendances les plus contestataires de la CGT).

« Déclaration internationale de Partis communistes pour le 8 mai

Au nom de la liberté, de la paix et de la vérité,

Contre le fascisme et la guerre !

La victoire sur le fascisme nazi pendant la Seconde Guerre mondiale est un événement majeur de l’Histoire, dont le souvenir doit être préservé et défendu face aux tentatives répétées de falsification historique visant à nous faire oublier le rôle décisif joué par l’Union soviétique des Républiques socialistes, par les communistes et par les antifascistes du monde entier.

Généré par le capitalisme, le fascisme nazi était la manifestation la plus violente et terroriste du capital monopoliste. Il était responsable du déclenchement de cette guerre d’agression et de pillage qui a fait près de 75 millions de morts, dont environ 27 millions de citoyens soviétiques, et des souffrances et horreurs incommensurables des camps de concentration nazis. Les peuples ne peuvent pas non plus oublier les pages sombres, comme les bombardements atomiques d’Hiroshima et de Nagasaki par les États-Unis, sans aucune justification militaire, qui représentaient une démonstration de puissance et de leurs ambitions hégémoniques mondiales.

La Seconde Guerre mondiale (1939-1945) est le résultat de contradictions inter-impérialistes de plus en plus aiguës et, en même temps, de l’intention de détruire le premier État socialiste, l’URSS, qui s’est notamment exprimée dans le soutien et la connivence entre le Royaume-Uni, la France et les États-Unis, avec le réarmement et l’ambition expansionniste de l’Allemagne nazie.

En commémorant le 75ème anniversaire de la Victoire historique du 8 mai 1945, les partis communistes et ouvriers soussignés, certains de relayer les sentiments et les aspirations des travailleurs et des peuples du monde entier :

- rendent hommage à tous ceux qui ont donné leur vie sur les champs de bataille contre les hordes nazies-fascistes et en particulier à l’héroïsme des mouvements de résistance et des combattants antifascistes, ainsi qu’au peuple héroïque soviétique et à l’Armée rouge, dirigée par le Parti communiste, dont la contribution, écrite dans des pages héroïques telles que les batailles de Moscou, de Léningrad et de Stalingrad, a été décisive pour la victoire sur la barbarie ;

- considèrent que la victoire sur l’Allemagne nazie et ses alliés dans le Pacte anti-Komintern a été réalisée grâce à la contribution décisive de l’URSS, à la nature de classe du pouvoir soviétique avec la participation des masses populaires, au rôle de premier plan du Parti communiste, à la supériorité affichée par le système socialiste. Cette victoire est un énorme héritage historique du mouvement révolutionnaire.

- mettent en valeur les avancées remarquables dans l’émancipation sociale et nationale des travailleurs et des peuples, avancées rendues possibles par la victoire et l’avancement des forces du progrès social et de la paix, étendant la sphère du socialisme dans les pays d’Europe, d’Asie et d’Amérique latine ; cette victoire a créé les conditions pour l’avancée du mouvement ouvrier dans les pays capitalistes, le développement rapide du mouvement de libération nationale et la liquidation des empires coloniaux qui en a résulté ;

- dénoncent et condamnent les campagnes visant à minimiser, déformer et même nier le rôle de l’URSS et des communistes dans la défaite du fascisme nazi et aussi à blâmer injustement et faussement l’Union soviétique pour avoir déclenché la Seconde Guerre mondiale, à supprimer les responsabilités du grand capital et des gouvernements à son service dans la promotion et la montée du fascisme et dans le déclenchement de la guerre, à blanchir et réhabiliter le fascisme, tout en détruisant les monuments et la mémoire de l’armée soviétique libératrice, en promouvant l’anticommunisme et en criminalisant les communistes et d’autres antifascistes ;

- dénoncent et condamnent les résolutions anticommunistes de l’UE et la falsification historique calomnieuse qui tente d’assimiler le socialisme au monstre fasciste ;

- soulignent que les secteurs les plus réactionnaires et agressifs de l’impérialisme voient de plus en plus le fascisme et la guerre comme une « sortie » de l’aggravation de la crise du système capitaliste, dont le caractère inhumain devient particulièrement évident lorsque, même face à la très grave épidémie de Covid-19, l’impérialisme, les États-Unis, l’OTAN, l’UE et ses puissances capitalistes alliées, poursuivent une politique criminelle de blocus et d’agression contre les pays et les peuples ;

- considèrent que la lutte pour la paix, le progrès social et le socialisme sont indissociables, et s’engagent à rechercher une action commune plus forte de la classe ouvrière, des travailleurs et des peuples du monde, des forces politiques engagées dansla lutte contre le fascisme et contre l’impérialisme, contre les agressions impérialistes et la guerre.

La situation à laquelle sont confrontés les travailleurs et les peuples du monde souligne l’importance de renforcer la lutte contre l’impérialisme, pour la souveraineté des peuples et l’indépendance des États, pour les droits des travailleurs et des peuples. Il faut dépasser de manière révolutionnaire le système capitaliste, un système qui engendre le fascisme, la guerre, les injustices, les dangers et les contradictions du présent. Comme il y a 75 ans, c’est aujourd’hui la lutte des communistes et de tous ceux qui sont confrontés à l’exploitation et à l’oppression capitalistes qui ouvrira la voie à l’avenir pour l’humanité.

Communist Party of Armenia
Communist Party of Australia
Party of Labour of Austria
Communist Party of Bangladesh
Communist Party of Belarus
Communist Party of Belgium
Communist Party of Brazil
Communist Party of Britain
New Communist Party of Britain
Communist Party of Canada
Communist Party of Chile
Colombian Communist Party
Socialist Worker’s Party of Croatia
Communist Party of Cuba
Communist Party of Bohemia and Moravia
The Progressive Party of the Working People – AKEL
Communist Party in Denmark
Egyptian Communist Party
Communist Party of Finland
French Communist Party
Pole of Communist Revival in France
Communist Revolutionary Party of France
Unified Communist Party of Georgia
German Communist Party
Communist Party of Greece
Hungarian Worker’s Party
Communist Party of India (Marxist)
Communist Party of India
Tudeh Party of Iran
Iraqi Communist Party
Communist Party of Ireland
Workers’ Party of Ireland
Communist Party of Israel
Italian Communist Party
Party of the Communist Refoundation – European Left (Italy)
Workers’ Party of Korea
Communist Party of Luxembourg
Communist Party of Malta
Popular Socialist Party – National Political Association (México)
Communist Party of Mexico
New Communist Party of the Netherlands
New Communist Party of Aotearoa (New Zealand)
Communist Party of Macedonia
Communist Party of Norway
Communist Party of Pakistan
Palestinian Communist Party
Paraguayan Communist Party
Peruan Communist Party
Philippine Communist Party (PKP – 1930)
Portuguese Communist Party
Communist Party of the Russian Federation
Union of Communist Parties – CPSU
Communist Party of the Soviet Union
New Communist Party of Yugoslavia
Communist of Serbia
South African Communist Party
Communist Party of Spain
Communist Party of the Peoples of Spain
Communists of Catalonia
Galizan People’s Union
Communist Party of the Workers of Spain
Galician Nationalist Bloc
Communist Party of Sri Lanka
Sudanese Communist Party
Communist Party of Swaziland
Communist Party (Switzerland)
Syrian Communist Party
Communist Party of Turkey
Communist Party of Ukraine
Communist Party USA
Communist Party of Venezuela »

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Politique

Décès de Lucien Sève, philosophe figure du PCF

Lucien Sève, né en 1926, est décédé le 23 mars 2020 en raison du covid-19. Il fut la grandes figure philosophique du PCF depuis le milieu des années 1970.

Pour comprendre qui était Lucien Sève et quel fut son importance, il faut basculer dans les arcanes du PCF, de la philosophie communiste, des polémiques autour du matérialisme dialectique, etc. On est là dans un espace extrêmement étroit intellectuellement, mais important politiquement.

Dans les années 1960, le grand philosophe du PCF était Roger Gauraudy ; son approche philosophique consistait en un humanisme philosophique, dans l’esprit de « l’eurocommunisme » des années 1970 qui suivra, c’est-à-dire d’une émancipation intellectuelle et culturelle par rapport à l’URSS.

Une opposition intellectuelle de la part des « pro-chinois » dans l’Union des Étudiants Communistes se développa alors, notamment sous l’influence du philosophe Louis Althusser. Ce dernier ne les rejoindra cependant pas dans leur rupture en 1966, dont le coup d’éclat consista en le document « Faut-il réviser le marxisme-léninisme ? Le marxisme n’est pas un humanisme ». Ces étudiants allaient ensuite fonder l’Union des Jeunesses Communistes (marxistes-léninistes), dont le principal prolongement sera la Gauche Prolétarienne.

Roger Garaudy finit quant à lui par rompre avec le PCF et poursuivra son orientation « humaniste » en devenant musulman, puis basculera dans la négation des chambres à gaz. Le PCF s’était quant à lui enlisé dans l’alliance avec le Parti socialiste et c’est là qu’intervint Lucien Sève, à partir de 1976, c’est-à-dire du 22e congrès marquant le triomphe de l’idéologie de Georges Marchais (le socialisme oui, la dictature du prolétariat non).

Son objectif fut, intellectuellement, le même que Maurice Thorez. Il s’agissait de justifier l’existence du PCF, de la référence marxiste voire léniniste, tout en se séparant entièrement de l’URSS de Staline. Lucien Sève s’acquitta ainsi de cette tâche en tant que philosophe officiel du PCF. L’Humanité s’est fendu d’un article nécrologique décrivant adéquatement ce rôle :

« Travaillant ardemment à sortir le parti communiste du stalinisme, il fut néanmoins très attentif à son ancrage théorique et à la fidélité aux concepts issus du marxisme.

Il tint alors, contre vents et marées, une position originale et solidement argumentée entre l’humanisme de Roger Garaudy et le structuralisme de Louis Althusser.

Sa position fut théorisée dans un ouvrage au fort retentissement publié en 1969 Marxisme et théorie de la personnalité qui se fixait pour objectif d’exposer une conception marxienne de l’individu, à rebours d’une conception désincarnée du socialisme alors en vogue. »

Lucien Sève était ainsi un penseur que l’on peut appeler ouvert ou éclectique, selon ses horizons ; il n’hésita pas à considérer que Heidegger était un nazi, mais en même temps un grand philosophe préfigurant la véritable écologie. Il se tourna également vers les penseurs opposés à Staline en URSS, tel le psychologue Lev Vygotski. Au sens strict, il définit son approche comme marxienne et non « marxiste » ; il fallait pour lui se fonder sur une approche non dogmatique pour changer la vie en profondeur, avec Marx, Gramsci ou encore Jaurès.

Il ne s’agit pas de former un dogme : « le refus d’objectiver un  » marxisme  » est bien le préalable obligé de toute authenticité marxienne ». Le paradoxe, c’est que tout cela se situait en même temps pour lui tout à fait dans la tradition marxiste-léniniste dont il se revendiquait, qu’il prétendait prolonger et dépasser.

Cette position traumatise bien entendu les tenants de cette tradition, qui ne consistent concrètement qu’en deux organisations, le niveau exigé étant particulièrement élevé. Il y a ainsi la gauche du PCF, avec le Pôle de renaissance communiste en France dont le dirigeant Georges Gastaud est lui-même quelqu’un ayant un parcours philosophique. Pour le PRCF, Lucien Sève est à la fois un ange et un diable :

« Dans le temps « court » de la lutte politique et idéologique pour la renaissance communiste, L. Sève est peu à peu devenu un adversaire. Dans la temporalité moyenne de la théorie politique, et même s’il a produit dernièrement des travaux de grand intérêt sur l’éthique ou sur le concept du communisme, l’orientation générale défendue par Sève relève principalement à nos yeux du révisionnisme théorique (…).

[Cependant] il y va des fondamentaux d’une conception communiste conséquente de la transformation de la nature et de la société. Et sur cette temporalité « longue », Sève est un allié de premier plan du marxisme orthogramme de par sa culture philosophique et scientifique de premier ordre, de par son inventivité conceptuelle et de par sa puissance polémique, critique et démonstrative difficilement surpassable. »

Le PRCF considère que les « fronts sont étanches » et que Lucien Sève peut être excellent philosophe, mais un mauvais politique. Cette conception est évidemment considérée comme aberrante pour les maoïstes du PCF(mlm) pour qui tous les fronts sont entremêlés et pour qui il faut accepter soit tout, soit rien. Il n’y a pas de marxisme sans matérialisme dialectique, donc pas sans réalisme socialiste, sans conquête spatiale, etc.

On a ici trois approches concernant l’URSS de Staline : soit s’en couper, en considérant que ce fut du national-étatisme (comme le dit Lucien Sève), mais profiter de l’élan passé pour constituer une perspective marxienne, ce qui est la ligne du PCF.

Soit ne pas s’en couper mais rectifier le tir et réfuter le côté systématique, ce qui est la ligne du PRCF. Soit l’assumer en bloc de manière invariante en constituant en noyau dur le côté systématique, ce qui est la ligne du PCF(mlm).

On a là des choses bien compliquées et dont les problématiques ne touchent que bien peu de monde. Mais le communisme étant, aussi, une passion française, on a ici des démarches très complexes, très élaborées, qui ont par conséquent un impact intellectuel et culturel massif sur la Gauche et sur les perspectives de celles-ci. Qu’il s’agisse ici de laboratoires d’idées ou bien de matrices révolutionnaires potentielles, difficile de faire l’économie de ces poids lourds dans une critique sérieuse du capitalisme.

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Politique

Coronavirus et capitalisme: les meilleures analyses

La crise due au coronavirus a appelé deux sortes de réaction. La Gauche activiste n’a pas pris la chose au sérieux, s’imaginant que cela allait rapidement passer et prenant de rares positions consistant à dire : « on attend que ça se passe ». La Gauche programmatique, c’est-à-dire la gauche sérieuse, a quant à elle produit des analyses élaborées critiquant l’ordre du monde lui-même.

La Gauche activiste ne peut pas supporter le confinement, qui pour elle aussi un confinement politique. Il n’est plus possible d’appeler aux manifestations, de mettre des photos sur Facebook, etc. Son mot d’ordre est donc que la lutte contre la réforme des retraites continue, que tout cela n’est que temporaire. Il y a, clairement, une sorte de déni par rapport à la période historique que l’on vit, car cela dérange l’unique aspect activiste.

Il y a ici une pesanteur qui est très choquante. Pour donner un exemple assez aberrant, le Parti Communiste Révolutionnaire de France n’aborde pas la question du coronavirus à part sous la forme de deux communiqués extérieurs, préférant publier les documents de son congrès qui s’est tenu… en novembre 2019.

L’OCML-VP parle carrément de la crise actuelle comme… d’une « anecdote » pour le capitalisme – un terme furieux qui insulte l’avenir de manière insensée – et appelle à se rebeller sur un mode ultra dans Coronavirus : vote, bosse et ferme-la ! :

« Jamais le patronat et le gouvernement n’auront notre soutien !

Nous ne sommes que de la chair à patron dans la guerre économique, et l’épisode Coronavirus n’est qu’une anecdote pour le capitalisme, comme d’habitude ce sera tant pis pour nous, les exploités. Jamais nous ne nous rendrons complice de notre propre exploitation ! Et Mélenchon qui ose dire que l’heure est à la cohésion et à l’entraide !

Le Coronavirus n’est évidemment pas un virus de classe, il touche également puissants et misérables. Par contre, toutes les mesures proposées ont un caractère de classe bien marqué, pas question de rentrer dans le jeu de Macron et des autres ! »

L’unique document valant sans doute le coup de ce côté ici est Le confinement ne s’applique pas aux exigences ouvrières et populaires !, du Parti Communiste des Ouvriers de France, qui a le mérite de chercher à justifier un tel positionnement.

Du côté de la Gauche programmatique, on a par contre un véritable effort de réflexion, s’appuyant sur un engagement militant. Les points de vue sont par contre très différents, correspondant aux mentalités relevant d’idéologie. S’agit-il de critiquer le gouvernement ? Le capitalisme ? Le capitalisme à l’échelle mondiale ?

Il y a, déjà, ceux prenant l’écologie au sérieux. L’Union Prolétarienne Marxiste-Léniniste a publié, dans son bulletin, une analyse approfondie de la situation actuelle, soulignant la dimension sanitaire et le refus de voir la bourgeoisie « profiter de la situation ». On trouve cependant, à la toute fin, une petite note critique de « l’agro-business, l’élevage en masse d’animaux », « le réchauffement climatique », « l’entassement de populations dans des mégapoles ».

Le mot d’ordre final de ce petit aparté, dont la thématique n’est bizarrement pas du tout abordée dans le reste du document, est « Pour une agriculture et une économie qui respecte l’homme et ses bases naturelles de vie ! ».

Cette approche « naturelle » est par contre au cœur du document plus long et plus dense intitulé « La maladie à coronavirus 2019 (COVID-19) : un produit du mode de production capitaliste », du PCF(mlm).

La thèse y est relativement simple : l’humanité est sortie de la nature et, par ses activités capitalistes, provoquent des choses allant contre le cours des choses, tel ce coronavirus mutant franchissant une barrière des espèces normalement infranchissable.

De manière plus poussée, il est insisté sur le fait qu’il s’agisse là d’un saut qualitatif montrant que toute l’époque est à la rupture, au décrochage, à la transformation complète, car le capitalisme, « mode de production planétaire », a fait son temps. Les métropoles qui poussent comme des champignons sont invivables et asphyxient la vie sur Terre.

La contradiction entre le capitalisme et sa « base matérielle » est complète, donc il s’effondre et l’humanité, mondialement unifiée, doit retourner dans le giron de Dame nature, en conservant les « acquis » de son développement inégal.

Du côté des autres réactions élaborées, point de préoccupation écologiste ou envers les animaux. L’approche est la suivante : un événement se produit, comment faut-il accepter ou pas les mesures d’un gouvernement honni ?

Le Pôle de Renaissance Communiste en France dit qu’il faut accepter le confinement avec une discipline à la fois collective et individuelle, mais attribue la situation au manque de prévoyance du capitalisme, soulignant longuement que « la macronie en guerre contre les travailleurs » est en train d’en profiter. La situation de crise est attribuée au démantèlement de tout ce qui social par le gouvernement et l’Union Européenne.

Lutte Ouvrière a une approche très similaire dans Coronavirus : les défis d’une pandémie, la faillite d’une organisation sociale, avec un angle relativement différent puisqu’il est parlé en général : « Nous payons l’incurie de nos dirigeants aveuglés par les lois du marché, du profit et de la propriété ». Les travailleurs paieront les pots cassés de la crise sanitaire, les riches s’en tirant car ils ont davantage de moyens pour se confiner adéquatement.

On reconnaît l’analyse trotskiste affirmant que la direction de la société n’est pas aux mains des bonnes personnes :

« Comme toute épidémie, celle du coronavirus est un défi lancé à la société. Mais elle révèle aussi l’irresponsabilité de notre organisation économique et sociale. Quant au mépris de classe, il suinte par tous les bouts (…).

Mais quand Macron déclare que la santé doit passer avant tout le reste, il y a de quoi être en colère. Depuis qu’il est au pouvoir, c’est la santé des profits et des banquiers qu’il a fait passer avant tout le reste, exactement comme l’avaient fait tous ses prédécesseurs. Et aujourd’hui, pour beaucoup, le mal est fait (…).

On le vit tous les jours, mais cette épidémie le confirme : quand on fait partie des exploités, on n’est rien de plus que de la chair à profits !

Et comme toujours dans cette société, les plus riches auront bien plus les moyens de se protéger. Rester confinés dans leurs belles propriétés ne leur posera d’ailleurs pas de problème et ils n’auront pas le souci d’avoir leur compte bancaire à découvert (…).

Tous les moyens doivent être mobilisés pour les hôpitaux et la santé publique. Se protéger du coronavirus et éradiquer le virus du profit et de la rapacité patronale font partie du même combat. »

Du côté du Parti Communiste International, l’analyse va encore plus dans le général, en se plaçant dans une perspective historique. On considère que la bourgeoisie témoigne qu’elle a fait faillite dans son approche générale et tout ce qui l’intéresse dans cette crise, comme toujours, c’est de sauver l’économie. On lit dans Sur les mesures prises par la bourgeoisie à propos de l’épidémie au coronavirus :

« Dépendante d’un mode de production qui vise essentiellement à la valorisation du capital en exploitant sauvagement les énergies physiques, nerveuses et sociales du prolétariat et des couches les plus faibles de la population de tous les pays, la bourgeoisie est congénitalement incapable de structurer la société avec une prévention efficace pour la préservation de la santé de l’humanité dans sa vie économique et sociale (…).

Cette dernière [la classe bourgeoise] prétend « lutter » contre l’épidémie au coronavirus avec des méthodes et des moyens qui, en réalité, peuvent être obtenus pat le simple bon sens, évidemment avec des indications médicales adéquates. Mais la bourgeoisie s’intéresse davantage aux effets négatifs que la propagation de l’épidémie a sur ses affaires, qu’à la santé de la population. »

Les philosophies politiques sont ici très différentes, d’où l’approche différente des textes. Lutte Ouvrière considère que le gouvernement va de disqualifier par rapport aux travailleurs et que par conséquent, il en ressortira une crise politique où la « démocratie ouvrière » prendra le pouvoir. Pour le PRCF, c’est la main-mise de l’Union Européenne sur la France qui va se briser sur la crise actuelle et le ressentiment populaire se tournera vers un Frexit progressiste.

Du côté du PCF(mlm) et du Parti Communiste International, tout est une question d’époque et de changement complet de paradigme. Tous deux considèrent qu’il y aura une vague révolutionnaire mondiale changeant l’ensemble des aspects de la société. Le PCF(mlm) a une lecture culturelle prônant un retour à la nature (avec aussi le véganisme), le Parti Communiste International raisonne en termes de prise de conscience prolétarienne à l’échelle mondiale (d’où son nom).

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La Gauche et les européennes de 2019 : les déclarations optimistes

Il y a une partie de la Gauche qui considère que la situation est finalement bonne, que les gilets jaunes notamment ont exprimé une forme de révolte qui correspondrait au climat général. Partant de là, il n’y aurait qu’à pousser pour que cela marche. Les élections européennes sont vues comme un échec pour tout le monde, sauf pour eux.

On notera qu’au-delà des déclarations suivantes, la majorité de ce qu’on appelle l’ultra-gauche n’a même pas fait de communiqué à la suite des élections. Il y a eu des appels au boycott avant celle-ci, mais rien à la suite de celle-ci. Ce n’est pas considéré comme une actualité. On notera au passage que dans un autre genre, le Parti socialiste n’a lui non plus pas fait de déclaration !

De tous les communiqués qu’on peut qualifier de relativement triomphalistes à la suite des élections européennes de 2019, le plus marquant est indubitablement celui de Lutte Ouvrière. Il est d’une brutalité extrême, qui tranche étrangement totalement avec la posture précédente, caractérisée par une regard très critique quant aux gilets jaunes et à la capacité de lutte des ouvriers.

Puisant dans ses racines historiquement « gauchistes », Lutte Ouvrière se réjouit ouvertement de l’effondrement de la Gauche, qui pour elle permet l’ouverture d’un espace:

Au moment où la démocratie bourgeoise est minée par la faillite du capitalisme, par la crise économique, par la menace de guerres et de catastrophes écologiques, d’aucuns ont pour ambition de reconstruire la gauche.

La gauche, tant qu’elle avait un certain crédit parmi les travailleurs, a été un moyen d’enchainer le mouvement ouvrier au système institutionnel de la bourgeoisie. Cet instrument s’est brisé en remplissant cette tâche, et tous ceux qui veulent le réparer trompent les travailleurs alors que la société est poussée vers le précipice (…).

Les résultats de Lutte Ouvrière, pour modestes qu’ils soient, confirment la présence d’un courant politique qui maintient la tradition révolutionnaire du mouvement ouvrier, l’internationalisme face à la montée des nationalismes, le drapeau rouge face au drapeau tricolore de la bourgeoisie

Du côté du PRCF, la principale structure issue de la « gauche du PCF » des années 1990, le ton est assez triomphaliste également. Il est considéré que tout le monde échoue, que l’abstention témoignerait d’un rejet et qu’il y a ainsi la place pour l’alternative : le « FREXIT progressiste ».

La vie du pays ne dépend pas (seulement) des élections mais dans le contexte actuel dans les luttes populaires convergentes dont les GJ jaunes ont donné l’exemple avec le soutien de 75 % de la population, permettant au peuple de se constituer en sujet historique collectif et pas en individus isolées dans… l’isoloir… L’euro-politique antisociale et antidémocratique va se poursuivre, les résistances aussi, à nous de construire un front de luttes en le portant par la perspective du frexit progressistes…

Plus que jamais, une seule solution s’impose : FREXIT PROGRESSISTE !

Fier d’avoir porté la voix majoritaire des travailleurs de France, celle de l’abstention citoyenne, honteusement censurée par tous les médias et d’avoir mené campagne grâce à la mobilisation entière et enthousiaste de toutes et tous ses militants, le PRCF continuera de porter les idées et les propositions communistes dans un esprit d’ouverture, mais aussi de fermeté idéologique, face aux terrifiantes euro-illusions portées par les ennemis de classe. Plus que jamais, une seule solution s’impose : FREXIT PROGRESSISTE !

Le PRCF a également souligné l’importance qu’il y a selon lui du fait qu’Emmanuel Macron a mis en place un « duel » entre lui et Marine Le Pen, qu’il s’agirait d’un piège. C’est là-dessus que s’exprime surtout le PCOF, qui dit que l’extrême-droite est très loin d’avoir l’hégémonie dans les masses populaires.

La Gauche républicaine et socialiste s’est contenté d’un simple tweet :

La @Gauche_RS prend acte de la sanction infligée à la gauche. Nous félicitons notre animateur national @emmanuelmaurel pour sa réélection, aux côtés de @ManonAubryFr. Parlementaire de combat et de gauche, son action aura pour horizon la rupture avec le néolibéralisme de l’UE !

Le Courant communiste révolutionnaire du NPA  voit en les élections un simple aléa dans un vaste parcours historique de lutte.

Ce n’est donc qu’en apparence que cette dernière semaine et la séquence post-élections auront permis d’effacer les Gilets jaunes du paysage médiatique et politique. Les 7 mois de contestation historique qu’a connu le pays ne risquent pas de disparaître comme ça, et pourraient au contraire annoncer de nouveaux épisodes de luttes de classe qui n’en ont pas fini de mettre des bâtons dans les roues des projets du gouvernement et du patronat.