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Politique

Le compte-rendu d’une assemblée de la section PCF Paris 18e

La section PCF du 18e arrondissement de Paris organisait une assemblée générale faisant office de debriefing de la dernière campagne européenne et de questionnements pour la suite. Un compte rendu très intéressant a été fait, que nous reproduisons ci-dessous car c’est un travail collectif de qualité.

C’est tout à fait le genre de démarche démocratique qui permet d’aller de l’avant dans la reconstruction de la Gauche : partir de la base en se posant sur le terrains des idées plutôt que de simples discutions entre appareils pour des accords électoraux.

Les problématiques évoquées lors de cette assemblée sont typiques de celles des militants de gauche un peu partout en France. Il y a le constat d’une situation assez catastrophique pour la Gauche, avec une population française largement dépolitisée. Les préoccupations sont l’écologie, l’extrême-droite, la définition de la Gauche, le capitalisme et les classes populaires.

 

« La dépolitisation est immense ! »

Une semaine après l’élection européenne, les communistes du 18e arrondissement de Paris débriefent à chaud. 35 présents, l’ambiance est studieuse. Dans une courte introduction, Alain Wlos, le secrétaire de la section, pointe une abstention en baisse, même si logiquement elle se concentre dans les quartiers les plus populaires quand on fait le détail par bureau de vote. Un fait marquant : celui d’une défaite idéologique de la gauche. Pour Alain, le bilan de la campagne du PCF est décevante. Pas d’élus et pas de remboursement. Mais il note un état d’esprit positif, la très bonne conduite de notre tête de liste, Ian Brossat, relevée par tous les observateurs.

« Nous avons franchi une étape qualitative dans la communication numérique comme dans des tâches militantes plus traditionnelles tel le porte-à-porte. Mais nous n’avons pas été identifiés comme une force capable de porter la transformation qu’attend la population. »

Le débat s’engage sur une interpellation venue de la salle : « C’est quoi la gauche ? » « EELV n’est pas de gauche, car elle ne s’en réclame pas », observe Françoise. « Il y a une confusion qui est entretenue. Si on ne met pas en numéro un la question de la planète, on ne sera pas entendus. Il faut dire que si on ne sort pas du capitalisme, on est foutus ! On est trop timides sur cette question. »

« Il faut réarmer idéologiquement la gauche pour convaincre, trier les bouteilles ne suffira pas », interpelle Philippe. Lounis, lui, est plus circonspect. « Il y a la question du climat, du coût de l’énergie, de la transposition de la directive européenne. Sur toutes ces questions, nous avons un programme mais le combat est très difficile. Le vote s’est cristallisé dans la dernière semaine où nous avons été écartés des médias comme par exemple lors de l’émission de France 2. »

Pour Gérald, « c’est un résultat qui doit nous interroger avec beaucoup d’humilité. Nous avons affaire à un résultat plein de contradictions. Si notre score s’est maintenu par rapport aux législatives de 2017, nous avons tous observé dans la campagne l’arrivée de nouveaux électeurs communistes. Ça veut dire qu’on en a perdu d’un autre côté. » Et il pointe la question du « mouvement des gilets jaunes où notre carton rouge à Macron n’a pas eu l’effet escompté ».

« Il y a un effet de mode sur la question écologique, il ne faut pas être naïfs », doute Nina. Pour qui « l’élection européenne est un terrain naturel pour Europe écologie ». « Notre priorité c’est ceux qui ne votent pas », défend-elle.

Dominique témoigne d’un « électorat qui ne comprend pas nos divisions à gauche. On est bien accueillis à la Goutte d’or, vus comme proche des gens, anticapitalistes, mais nous manquons de crédibilité ». « La question écologique monte. On a raté quelque chose avec le mouvement des gilets jaunes, qui témoigne d’une fracture sociale, de classe, comme d’ailleurs le mouvement syndical. Ça dit quelque chose de notre rapport à la société. »

Catherine nuance : « On est partis d’un rejet des partis politiques aux manifestations de gilets jaunes à un début d’acceptation. Le vote d’extrême droite est devenu le vote crédible anti-Macron. il faut aller plus dans les quartiers. » Et non pas, comme le dit Dominique, « seulement pendant les élections ».

Catherine est perplexe : « On a vu des gens qui se sont décidés au dernier moment, alors qu’on les avait convaincus en porte-en-porte mais qui ont finalement choisi un autre bulletin. »

Pour Jean, « malgré notre excellent candidat, c’était une campagne très difficile qui portera ses fruits. Beaucoup de gens à gauche ne veulent pas des communistes, c’est ainsi. Pour eux, nous ne sommes pas crédibles. Pour eux, c’est impossible de changer les choses. Il faudra beaucoup de discussions pour faire reculer cette pression idéologique. Les mensonges anticommunistes ont fini par porter. »

Jean-Pierre observe que « même ceux qui n’ont pas voté pour Ian ont apprécié sa campagne. On a une faiblesse sur ce qui s’est passé dans les pays de l’Est et le bilan de cette période n’a toujours pas été tiré. Notre faiblesse sur les lieux de travail demeurent. On existe dans les quartiers mais pas suffisamment. »

« La dépolitisation est immense !, dit Marie-France, il y a besoin de se poser, de faire le bilan de notre activité, sur notre rayonnement. On a un atout, notre candidat. Il ne faut pas se replier. »

Pour Pierre, « le PCF ne doit pas céder aux sirènes du capitalisme vert ». Matthieu relativise : « On a marqué des points, tout s’est joué dans les derniers jours. On ne peut pas se limiter à faire l’écho de la “colère populaire” comme l’a fait la France Insoumise. »

Malgré les résultats, et en forme de clin d’œil, nombre de présents ont invité à la défense de leur journal l’Humanité, et insisté sur les abonnements et le paiement des vignettes de la Fête. Incorrigibles communistes !

Gérald Briant

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Rapport entre les classes Réflexions

La vie étriquée au sein de l’entreprise

Le passage de la jeunesse au conformisme adulte s’appuie grandement sur la neutralisation des personnalités au sein de la vie étriquée de l’entreprise. Il faut s’adapter à un environnement entièrement façonné par le capitalisme et au-delà des obligations à assumer, on doit changer ses comportements et son esprit, se forcer à les changer.

Quand on travaille, on est dans un certain milieu. Et lorsque ce milieu consiste en quelques personnes, même plusieurs dizaines, en tout cas toujours les mêmes, on est formaté. Ce qu’on dit, comment on se comporte, la manière de s’habiller… la moindre chose compte de manière disproportionnée, va profondément marquer les esprits. On est alors catalogué et vue la faible intensité des relations, des rapports, cela va durer. On peut se retrouver plomber pendant longtemps, ou bien être mis à l’écart. Et cela n’est pas possible dans une entreprise.

C’est cela qui explique que les jeunes deviennent des adultes. À l’école, à l’université, lors d’une formation… on peut donner son avis. On fréquente des gens dans un milieu temporaire. Quand on passe dans le monde du travail, il y a également une dimension temporaire, puisqu’on peut changer d’entreprise. Mais le fait qu’on dépende du salaire implique qu’on se tienne un minimum. Avec les gens autour, le minimum devient maximum.

On peut expliquer, au lycée ou dans une soirée, qu’on veut la révolution. Cela ne prête pas à conséquence. Dans une entreprise, on ne peut pas le dire. D’ailleurs, cela ne se dit pas, il y a une neutralisation de toutes les considérations politiques ou sociales, sauf lors des grandes élections, mais ce sont au mieux des affinités avec un candidat qu’on exprime, pas un point de vue opposant la Droite et la Gauche.

Dans une entreprise, on est bien sûr connu comme plutôt de droite ou plutôt de gauche, mais cela reste flou, et pas lié à des valeurs, ni à une organisation. On est jamais qu’un individu. Et le point de vue politique est réduit au même niveau que les anecdotes sur le vie privée : on fait de la guitare, on est célibataire, on est allé à tel resto, on est parti en vacances en Provence, etc.

Et de par le poids de l’idéologie beauf, cela est très dangereux pour les femmes, qui deviennent aisément des cibles propices à des « évaluations » sexistes, des opérations de séduction n’étant que du harcèlement. Les personnes non cyniques sont également des victimes potentielles des esprits manipulateurs, car comme on le sait l’entreprise divise pour régner et les carriéristes en profitent pour leurs manigances.

La vie étriquée de l’entreprise, c’est ainsi un petit monde où chacun agit tel un petit Prince tel que décrit par Machiavel, soit pour avoir la paix, soit pour avancer dans l’organigramme. On est en permanence sur le qui vive, au point qu’à un moment d’ailleurs on ne le remarque même plus. On devient chez soi le fantôme qu’on est à l’entreprise, sans s’en apercevoir. Le masque qu’on employait devient une part de nous-mêmes, puis nous-mêmes.

En fait, la vie dans une entreprise est tellement étriquée, qu’aucun densité intellectuelle ne peut être atteinte, aucune densité émotionnelle, aucune affirmation personnelle. On ne peut être qu’un individu, remplaçable, à responsabilité limitée, un spectre. C’est cela qui détruit la démocratie dans son essence même. C’est pour cela que la Gauche historique a toujours mis en avant la démocratie du travail et que le principe des « conseils », les « soviets », relève de la tradition ouvrière. Dans une assemblée générale, on dit ce qu’on pense, on est qui on est, alors que dans la vie étriquée de l’entreprise, on assume son rôle de figure aliénée se pliant aux règles de l’idéologie dominante.

Un vrai mouvement permet toujours de faire vaciller cette idéologie dominante, en posant une telle actualité, si pleine d’acuité, que l’espace démocratique se forme. Un mouvement contre la chasse à courre dynamite en certains endroits les verrous de l’idéologie dominante, tout comme l’a fait en région parisienne la grande grève des transports à Paris en 1995. Des thèmes d’importance nationale ont pu faire de même, comme « Je suis Charlie » ou bien l’opposition à la participation française à la guerre du Golfe contre l’Irak. C’est pour cela que l’État soutient les initiatives nationales « vides » de sens démocratique, comme la victoire à la coupe du monde de football, le 14 juillet… afin de proposer une contre-actualité, à la fois neutre et endormant les esprits.

La Gauche pour exister, ne peut pas contourner ce dispositif d’endormissement des esprits ; il lui faut se structurer pour partir à l’assaut des entreprises, de dépassement de sa vie étriquée.

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Société

Noa Pothoven, un assassinat maquillé en suicide

C’est une affaire bouleversante, dont la portée ne peut pas être sous-estimée. Noa Pothoven s’est suicidée aux Pays-Bas, mais cela a été annoncé sur Instagram et avec l’accord des médecins. Cela s’appelle un meurtre et c’est un exemple de plus de comment le capitalisme va dans le sens de la suppression des « inutiles », faisant de la vie une marchandise comme une autre.

La Gauche historique considère que l’être humain relève de l’humanité, celle-ci de la Nature, et la vie ne procède jamais à sa propre suppression. Cela rentre en conflit ouvert avec le capitalisme qui dit que les êtres humains sont des individus dont la liberté de choix serait totale. Partant de là, le suicide relèverait du libre-arbitre.

C’est pourquoi la médecine a, aux Pays-Bas, accepté de laisser Noa Pothoven aller au suicide. Elle avait décidé de cesser de s’alimenter et de s’hydrater, à la suite d’un stress post-traumatique et d’anorexie consécutif à trois viols subis à 11, 12 et 14 ans. Elle est donc morte à Arnhem, chez ses parents, dans un lit d’hôpital placé dans le salon, supervisé par une clinique de fin de vie.

Les médecins néerlandais se dédouanent en disant que ce n’est pas une euthanasie, ni un suicide assisté, car ils ne sont pas intervenus pour faire en sorte qu’elle meurt. Ils contournent ici la question du « caractère insupportable des souffrances du patient » nécessaire pour l’accompagnement dans la mort. Sauf qu’en pratique ils ont laissé quelqu’un capituler et mourir.

C’est absolument inacceptable. Et ça l’est d’autant plus que Noa Pothoven a annoncé sa décision sur instagram, où elle postait régulièrement. On est là dans le spectacle morbide propre au capitalisme, dans la lignée de la série Netflix 13 Reasons Why qui a mis en scène le suicide en en faisant un « choix ». C’est la faillite de l’humanité sur toute la ligne.

Le capitalisme a réussi à faire en sorte que les choix individuels deviennent des marchandises comme des autres, obtenant une reconnaissance sociale totale. Mais de quels choix parle-t-on d’ailleurs ? En réalité, tout est déterminé. Ce qu’on fait est le produit de la société, il n’y a pas d’individus « libres ».

D’ailleurs, Noa Pothoven avait par ailleurs également publié un livre au sujet de son parcours, de ce qu’elle appelait son « combat ». On est là dans un positionnement identitaire. Sa souffrance était réelle, mais passant par le prisme des médias, elle prenait une ampleur aliénée d’autant plus forte, ne pouvant que nourrir encore plus sa tendance à l’auto-destruction.

C’est la société capitaliste qui a tué Noa Pothoven, après s’être délectée de sa souffrance réduite à un parcours individuel unique. Le choix de Noa Pothoven n’a été que le prolongement conséquent de l’individualisme forcené établi comme unique horizon.

Il est justement ici bien connu que l’anorexie, comme expression d’une souffrance personnelle, est l’apanage de jeunes filles de la petite-bourgeoisie et de la bourgeoisie. Incapables, malheureusement, de saisir la nature sociale (et naturelle) de leur mal-être extrêmement profond, ces jeunes filles expriment leur désarroi en se mutilant, en cherchant l’auto-destruction comme moyen d’expression.

C’est précisément ce qu’on a avec Noa Pothoven et vue comment la société est en train de tourner, de tels phénomènes ne peuvent qu’empirer. D’où la volonté du capitalisme de légaliser les suicides assistés pour quiconque considère « souffrir de manière insupportable ». C’est un effacement de toute question sociale et naturelle, pour tout focaliser sur l’individu, ses choix, son parcours unique, son ressenti unique, etc.

Une telle société va droit dans le mur. Et vue comment la Gauche est pourrie par le post-modernisme et son individualisme, non seulement on va aller dans le mur, mais en plus on aura l’extrême-droite qui elle va prétendre s’opposer à tout cela au moyen du conservatisme. Alors qu’on a besoin vite fait du Socialisme pour sauver les gens de leur souffrance, pour trouver des points d’appuis positifs, par la nature, le travail, la culture.

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Politique

L’appel « Convergeons ! » pour l’unité des Verts et de la Gauche

Voici un nouvel appel à l’unité à gauche, qui cette fois défend l’idée d’une « nouvelle maison commune » entre la Gauche et les écologistes, sur la base du bon score aux élections européennes d’Europe Écologie-Les Verts.

L’appel est initié justement par des membres d’Europe Écologie-Les Verts, mais de ceux qui ne souhaitent pas se couper de la Gauche, comme l’a fait au contraire Yannick Jadot.

On retrouve parmi les signataires Clémentine Autain, à l’origine hier d’un appel au Big bang à Gauche, ainsi que des membres du mouvement Génération-s et quelques personnes liées au PCF, ou biens des personnalités politique non-associées à un parti actuellement. Il y a des personnalités non directement politiques comme les réalisateurs Coline Serreau et Robert Guédiguian ou l’acteur Jean-Pierre Darroussin.

Tout cela sonne très « bobo » évidement et n’est pas une initiative venant de la Gauche historique, celle qui croit encore en le Socialisme et la primauté de la classe ouvrière.

Ce n’est pas un projet précis et concret, mais un appel à faire, comme sait très bien le faire la Gauche avec ce genre de tribunes, très nombreuses dans l’histoire politique récente. Néanmoins, il y a la volonté saine et indispensable de vouloir confronter les points de vue tout en ayant à l’esprit la recherche d’unité.

On pourra regretter cependant que l’appel ne réussisse pas à dépasser l’horizon immédiat des prochaines élections municipales. L’alliance électorale immédiate apparaît finalement comme un horizon indépassable, alors que cela ne résoudra rien aux problèmes de fond de la Gauche, et que c’est peut-être même l’un des problèmes de fond les plus évident de la Gauche.

Voici donc l’appel :

« Convergeons !

« Quand les blés sont sous la grêle
Fou qui fait le délicat
Fou qui songe à ses querelles
Au cœur du commun combat »
Louis Aragon, la Rose et le Réséda.

Les résultats des élections européennes confirment la poussée des forces nationalistes et d’extrême droite, un effondrement des partis sociaux-libéraux, ainsi que le recul important des forces de gauche de transformation. La responsabilité dans ces bouleversements du social-libéralisme au pouvoir, en avalisant et en encourageant toutes les politiques néolibérales et antiécologiques, est manifeste.

Par ailleurs les écologistes, comme dans plusieurs pays européens, réalisent une poussée significative. Ce résultat montre que l’enjeu écologique est devenu primordial et que le cEcoutons-nous ! Trouvons les formes qui nous permettront de bâtir ensemble : assises, états généraux, constituante, archipels, actions communes ou autre fédération populaire autour de combats communs, à l’échelle locale, régionale, nationale, européenne… Rien ne doit être par avance écarté. Mettons tout sur la table sans tabous, nos projets, nos analyses, les incompréhensions réciproques comme les combats partagés ces dernières années.livage productivisme libéral-écologisme social prend corps.

Pour autant, les écologistes doivent prendre garde au péché d’orgueil et d’isolement.

Chaque élection est différente, nous le constaterons rapidement pour les élections municipales qui se profilent. Une hirondelle de 13,5% de voix ne fait pas le printemps de la transformation sociale et écologique et ne met personne en capacité de peser sérieusement dans le débat public et de représenter une alternative au capitalisme néolibéral.

Ce score confère au parti écologiste une responsabilité historique accrue. Aujourd’hui, il doit plus que jamais être à la hauteur des enjeux, participer activement à la reconstruction d’un grand mouvement populaire, écologiste et social, engager une démarche qui s’adresse aux forces politiques de la gauche d’émancipation et plus largement à toutes celles et ceux qui veulent s’engager dans un tel projet.

Alors que le mouvement des gilets jaunes et les marches pour le climat ont exprimé une volonté de changer de modèle de développement, de société et de vie politique, les forces politiques de l’écologie sociale, de la gauche d’émancipation, des mouvements citoyens et alternatifs, syndicaux et associatifs restent divisées, enfermées dans des habitudes usées, incapables de construire et défendre un projet commun.

Nous pensons que la division et la dispersion des forces qui se situent dans une perspective d’émancipation et qui font de l’écologie un point central de leur projet sont mortifères au moment où l’immense majorité des vivants est confrontée au réchauffement de la planète, à la perte de la biodiversité, à la sixième extinction des espèces, à la déforestation, au pillage des ressources de la planète, au creusement des inégalités sociales, à l’augmentation de la pauvreté dans le monde, à la souffrance animale, aux discriminations sous toutes leurs formes.

Plutôt que les méfiances, les rancœurs, nous devons confronter avec bienveillance nos points de vue et abandonner l’esprit de clocher ou d’hégémonie, dépasser nos «petites» différences qui ont fait tant de mal ces dernières années aux millions d’individus en colère qui cherchent une solution politique au désastre environnemental, social et démocratique.

Ecoutons-nous ! Trouvons les formes qui nous permettront de bâtir ensemble : assises, états généraux, constituante, archipels, actions communes ou autre fédération populaire autour de combats communs, à l’échelle locale, régionale, nationale, européenne… Rien ne doit être par avance écarté. Mettons tout sur la table sans tabous, nos projets, nos analyses, les incompréhensions réciproques comme les combats partagés ces dernières années.

Faisons tomber nos murs pour construire une nouvelle maison commune !

La préparation des élections municipales peut être l’occasion d’inverser le cours des choses. Il faudra rassembler dès avant le premier tour le camp écologiste et social, construire ensemble listes et programmes, pour prétendre gagner des milliers de municipalités. En effet, les politiques qui seront menées par les collectivités territoriales représentent une formidable opportunité de recréer de la justice sociale et d’engager la transition écologique indispensable.

Nous avons plus à partager, nous avons plus de désirs et de projets qui nous rassemblent que de différends qui nous séparent. Ne laissons pas le fossé se creuser entre les forces écologistes, les forces de gauche et nos concitoyens, qui un peu partout expérimentent, cherchent de nouveaux chemins, œuvrent dans leurs engagements citoyens, associatifs, mouvementistes, syndicaux et politiques pour une société plus juste et plus résiliente construite autour d’un axe écologiste, féministe, populaire et social.

Parce que nous partageons l’essentiel du diagnostic, parce que nous en avons assez de la désunion des forces de gauche et écologistes, nous, signataires de ce texte, nous engageons à favoriser et à participer à toutes initiatives politiques, syndicales, altermondialistes, culturelles, citoyennes, allant dans le sens du rapprochement de nos forces autour de la responsabilité écologique, de la justice sociale et de l’exigence démocratique.

La multiplicité de nos engagements et de nos parcours politiques ne doit plus être un frein mais une ressource dans laquelle puiser pour bâtir la cité écologique, la cité sociale et des justices que toutes et tous nous voulons.

A toutes celles et ceux qui déclarent vouloir se battre pour la planète et l’humanité, nous disons :

Cela ne peut plus durer, écoutons-nous, bâtissons, convergeons ! »

La liste des signataires est disponible sur la page de l’appel.

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Politique

Gauche : l’appel « pour un big bang »

Clémentine Autain, qui évolue en marge de la France insoumise, avait annoncé une initiative en faveur de la reconstruction et de l’unité de la Gauche. La voici, nommée « pour un big bang », avec un appel, relayé ci-dessous, et une date, le 30 juin, pour un rendez-vous au Cirque Romanès à Paris (qui est un cirque sans animaux).

C’est une démarche nécessaire, politique, qui part du constat essentiel que la Gauche n’arrivera à rien temps qu’elle est divisée et qu’elle refuse le débat d’idée, alors qu’il y a urgence à s’organiser face au libéralisme et au nationalisme, face à la Droite et l’extrême-droite.

La députée PCF Elsa Faucillon qui défendait l’initiative de ce « big bang » hier soir à la télévision a eu tout à fait raison de dire qu’il faut assumer à Gauche de « s’engueuler », de manière constructive, en pointant le risque de « disparition des idées et du corpus de valeurs de la Gauche ».

On retrouve parmi les premiers signataires mis en avant surtout des universitaires, ainsi que quelques élus, du PCF, du Parti de Gauche ou de Génération-s.

Ce n’est pas la Gauche historique bien sûr, qui se revendique du mouvement ouvrier et du Socialisme, mais une Gauche des valeurs, plutôt urbaine et intellectuelle, qui a en tous cas le mérite de vouloir assumer le débat d’idée, en partant de la base.

Voici le communiqué, publié sur pourunbigbang.fr :

« BIG BANG Il est minuit moins deux. L’urgence nous oblige.

Où sont passés la colère sociale et l’esprit critique qui s’aiguisent depuis des mois dans notre pays ? Ils demeurent dans les têtes, dans les cœurs et dans la rue. Mais la situation politique est catastrophique. Au lendemain des élections européennes, le bon résultat de l’écologie politique ne peut masquer le fait que la gauche est en miettes, désertée par une très grande partie des classes populaires. La gauche et l’écologie politique sont loin de pouvoir constituer une alternative alors même que le pouvoir en place et la droite fascisante dominent la scène politique dans un face à face menaçant où chacun se nourrit du rejet de l’autre et le renforce. Le pire peut désormais arriver. Nous n’acceptons pas ce scénario. Nous devons, nous pouvons proposer un nouvel horizon.

​La raison essentielle de ce désastre est l’absence d’une perspective émancipatrice qui puisse fédérer les colères et les aspirations autour d’un projet politique de profonde transformation de la société. Un big bang est nécessaire pour construire une espérance capable de rassembler et de mobiliser.

Il y a du pain sur la planche : réinventer nos modèles et nos imaginaires, rompre avec le productivisme et le consumérisme qui nous mènent au chaos climatique, à la disparition des espèces et à une dramatique déshumanisation, substituer le partage des richesses, des pouvoirs et des savoirs aux lois de la finance et de la compétitivité. L’enjeu, c’est aussi d’articuler les différents combats émancipateurs pour dégager une cohérence nouvelle qui s’attache aux exigences sociales comme écologiques, à la liberté des femmes comme à la fin de toutes les formes de racisme, aux conditions et au sens du travail comme au droit à la ville, à la maîtrise de la révolution numérique comme à l’égalité dans l’accès à l’éducation et à la culture, à la promotion des services publics comme au développement de la gratuité. Nous n’y parviendrons qu’en assumant des ruptures franches avec les normes et les logiques capitalistes. Ce qui suppose de nous affranchir des logiques néolibérales et autoritaires qu’organisent les traités européens et de donner à nos combats une dimension internationaliste.

Et pour cela, ce big-bang doit aussi toucher aux formes de l’engagement. La politique est en crise globale. La défiance est massive à l’égard des représentants et des partis politiques, et plus généralement à l’égard de toutes les formes délégataires de représentation. Il est impératif d’inventer la façon de permettre, à toutes celles et ceux désireux de s’engager, de vivre ensemble et d’agir avec des courants politiques constitués qui doivent intégrer dans leurs orientations les expériences alternatives en cours. Et cela suppose de repenser les lieux et les modalités du militantisme autant que les rouages de la délibération collective. L’exigence démocratique se trouve dans toutes les luttes de notre époque, sociales, écologistes, féministes, antiracistes…, des nuits debout aux gilets jaunes. Elle implique de penser les médiations, de favoriser des liens respectueux, loin de toute logique de mise au pas, avec les espaces politiques, sociaux, culturels qui visent l’émancipation humaine. Puisque nous prônons une nouvelle République, la façon dont nous allons nous fédérer dira notre crédibilité à porter cette exigence pour la société toute entière.

Le pire serait de continuer comme avant, de croire que quelques micro-accords de sommet et de circonstances pourraient suffire à régénérer le camp de l’émancipation, que l’appel à une improbable « union de la gauche » à l’ancienne serait le sésame. Nous sommes animés par un sentiment d’urgence et par la nécessité de briser les murs qui se dressent au fur et à mesure que la situation produit des crispations et des raidissements. Il est temps de se parler et de s’écouter, de se respecter pour pouvoir avancer en combinant le combat pour les exigences sociales et écologiques. Nous pensons bien sûr aux forces politiques – insoumis, communistes, anticapitalistes, socialistes et écologistes décidés à rompre avec le néolibéralisme. Mais ce dialogue entre mouvements politiques constitués ne suffira pas à soulever les montagnes pour redonner confiance et espoir. C’est plus largement que les portes et les fenêtres doivent s’ouvrir aux citoyens, à la vitalité associative, au monde syndical, aux espaces culturels et intellectuels critiques, aux désobéissants du climat, à celles et ceux qui luttent au quotidien contre les oppressions et les violences policières.

Il y a urgence. Nous savons la disponibilité d’un grand nombre de citoyen.ne.s et de militant.e.s à unir leurs énergies pour ouvrir une perspective de progrès. Ces forces existent dans la société mais elles n’arrivent pas à se traduire dans l’espace politique. C’est ce décalage qu’il faut affronter et combler. Sans raccourci. Un travail patient autant qu’urgent de dialogue, d’ouverture, d’expérimentations est devant nous si nous voulons rassembler pour émettre une proposition politique propulsive. Il faut de la visée, du sens, de l’enthousiasme pour qu’une dynamique s’enclenche, pour qu’elle se fixe l’objectif d’être majoritaire. C’est d’une vision plus encore que d’une juxtaposition de colères et de propositions dont notre pays a aujourd’hui besoin. Loin du ressentiment et de la haine pour moteur, nous devons faire vivre un horizon commun de progrès pour l’humanité. La réussite de cette entreprise tient en grande partie à la capacité à assumer un pluralisme authentique tout en dégageant de nouvelles cohérences partagées. Toute logique de ralliement, de mise au pas derrière un seul des courants d’idées qui composent ce large espace à fédérer, se traduira par un échec à court ou moyen terme.

C’est pourquoi nous appelons au débat partout pour la construction d’un cadre de rassemblement politique et citoyen, avec l’objectif de participer activement à la réussite de cette invention à gauche que nous appelons de nos vœux. Nous savons la difficulté de l’entreprise. Mais elle est indispensable. Et beaucoup de voix s’élèvent pour en affirmer l’exigence. Faisons converger nos efforts. Engageons-la ensemble le 30 juin prochain au Cirque Romanès. »

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Communiqué du mouvement Génération-s sur la colère dans les services hospitaliers

Voici le communiqué de Génération-s, qui reflète la grande colère qui existe dans les services hospitaliers en France face à un service qui se dégrade, avec des situations toujours plus compliquées tant pour les personnels que pour les personnes soignées.

« Après 3 mois d’une grève qui touche désormais 65 services hospitaliers d’urgence, le point de rupture est atteint.

Le mouvement Génération.s soutient l’ensemble des revendications des grévistes et participera aux deux journées d’action du 6 et du 11 juin aux côtés des personnels des hôpitaux en lutte.

Après 3 mois d’une grève qui touche désormais 65 services d’urgence, les personnels hospitaliers de Lons-Le Saulnier et de l’hôpital Lariboisière à Paris durcissent leur position. Professionnels dotés d’une incontestable conscience professionnelle, ils sont épuisés par le rythme infernal et les conditions de travail dégradées et en sont arrivés à n’avoir plus d’autre recours que d’être eux-mêmes en arrêt maladie. Cette forme de protestation peut sembler extrême. Mais c’est bien la surdité et l’absence de réponses du gouvernement qui conduisent à de telles extrémités.

Conscients du poids qui pèse sur leurs collègues réquisitionnés, les personnels restent cependant déterminés quant aux revendications communes concernant leurs conditions de travail, les effectifs et notamment la titularisation des contractuels, les revendications salariales ainsi que la création d’un statut spécifique pour les urgentistes.

À Mme Buzyn, ministre de la Santé, qui affirme : “Ce n’est pas bien, cela entraîne une surcharge de travail pour les autres”, nous disons que “ce qui n’est pas bien” c’est de mettre en cause le manque d’engagement des personnels hospitaliers alors même qu’ils se battent pour pouvoir continuer à offrir la meilleure qualité de soins possible. Pour Génération.s, l’inacceptable ce n’est pas le comportement des soignants mais bien la négligence et le mépris des pouvoirs publics face à un mouvement qui n’a d’autre souci que de préserver ce qui constitue un bien absolu : notre santé. »

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Société

Le rapport caricatural de l’OIP sur les gardiens de prison

L’Observatoire international des prisons a publié un rapport mettant en cause la violence des gardiens de prison : c’est typique de la « Gauche » qu’on définira comme chrétienne-démocrate si l’on est gentil, comme bisounours si on est réaliste. La prison est à l’agonie comme institution, les prisonniers basculent dans la folie alors que la démarche anti-sociale de beaucoup d’entre eux est une norme. Mais ce serait la faute au personnel pénitentiaire !

La société est toujours en retard par rapport à sa propre transformation. Elle s’aperçoit bien après que des choses ont changé. Prenons les policiers et les gardiens de prison. Auparavant, c’était des gens arriérés culturellement, venant directement de la campagne. Cela en faisait des cogneurs, des « fachos ». Et cela était vrai jusque les années 1980.

Puis la société s’est urbanisée et maintenant le policier, le gardien de prison, c’est bien souvent simplement quelqu’un cherchant du travail et se disant : là je peux aider, j’ai une certaine sécurité de l’emploi, c’est rude, mais j’aime bien me confronter au réel.

Or, les prisons françaises sont explosives. Locaux vétustes, surpopulation, manque de moyens à tous les niveaux, c’est une catastrophe. À cela s’ajoutent des détenus gangrenés par la folie et les comportements anti-sociaux virulents pour une large partie d’entre eux. Ce n’est pas de leur faute : c’est la société qui est responsable. Cela n’en rend pas les choses plus faciles pour autant au quotidien.

On imagine donc que tout est moche et que les salauds se révèlent vite du côté des matons, que même sans en être un on tombe forcément dans la pratique d’une forme d’injustice. C’est inévitable, c’est un déterminisme social évident.

Que faut-il comprendre de cela ? Que les matons sont des ordures, ou bien que le capitalisme est décadent et incapable de gérer l’emprisonnement ? L’Observatoire international des prisons a choisi son camp : la prison est une institution dont les employés ont des comportements mauvais, car eux-aussi sont mauvais. C’est ce qu’on comprend de son rapport qui vient de sortir.

C’est un raccourci, c’est trop simple, c’est de la fausse Gauche, qui se donne bonne conscience pour pas cher. C’est une manière de ne pas dénoncer la prison comme institution chaotique, laissée à l’abandon… Parce que la société ne fait qu’obéir au capitalisme et à son souci de rentabilité. C’est d’ailleurs cela ou l’enfer des prisons américaines, avec leur privatisation, etc.

L’Observatoire international des prisons fait donc son Victor Hugo, en déconnexion complète de la réalité. Voici par exemple ce qui est raconté dans son rapport.

« Il est fréquent que, lors d’altercations entre un détenu et un ou plusieurs surveillants, des personnels soient appelés au renfort pour contenir la situation. Il existe, dans ces situations à l’occasion desquelles les surveillants sont amenés à recourir à la force, des risques de dérives. »

Une recherche en sociologie note qu’ils sont plus importants encore « lorsque l’intervention fait suite à l’agression d’un agent ». Elle cite notamment un surveillant qui explique : « Quand il y a une alarme, tout le monde arrive parce qu’ils sont contents de maîtriser et de donner des coups, ou de protéger des collègues. »

Quelle incroyable recherche en sociologie ! Lorsqu’un collègue ou un ami est agressé, la motivation est d’autant plus grande pour le défendre ! Et c’est transformé en maton salaud cherchant un prétexte pour faire sa crapule.

Voici un autre exemple, tout aussi significatif.

« Plusieurs affaires récentes révèlent des complicités de violence ciblant tout particulièrement les auteurs d’infraction à caractère sexuel (AICS). Fin 2018, neuf personnes incarcérées pour des affaires de mœurs à la maison d’arrêt de Metz portaient plainte : elles se plaignaient d’avoir été passées à tabac par d’autres détenus, avec la complicité de surveillants qui leur ouvraient les portes. »

Pauvres violeurs, agressés par des gens qui, au-delà d’être anti-social bien souvent individuellement, connaissent personnellement les valeurs populaires fondamentales…

L’Observatoire international des prisons n’est tout simplement pas sérieux. Les prisons sont des lieux de corruption, de mal-être, de maladies, d’isolement, de folie… Et il serait possible de faire abstraction de cela, et de dénoncer le personnel pénitentiaire, toujours plus prolétarisé ? C’est tout simplement ridicule, à moins que ce soit pour donner raison à Marine Le Pen et surtout Marion Maréchal, en publiant des documents caricaturaux.

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Société

Communiqué de l’OIP : « Violences des surveillants de prison : brisons le silence »

Voici le communiqué de l’association Observatoire international des prisons présentant un rapport présenté comme un état des lieux de la violence des gardiens dans les prisons.

Le rapport est disponible en cliquant sur ce lien. C’est un document très unilatéral, qui fait un raccourci caricatural en prétendant que tout serait la faute des « maton ».

« Violences des surveillants de prison : brisons le silence

Derrière les portes closes des prisons, des personnes détenues sont régulièrement victimes de violences physiques de la part d’agents pénitentiaires. Après une enquête d’une ampleur inédite, l’OIP publie aujourd’hui un rapport qui dresse un état des lieux de ces violences, décrypte les rouages qui leur permettent de se perpétuer et propose des recommandations pour mettre fin au déni et à l’impunité.

Ces deux dernières années, l’OIP a reçu près de 200 appels ou courriers de détenus qui déclarent avoir été violentés par des personnels pénitentiaires – deux signalements par semaine en moyenne, qui ne sont que la partie émergée de l’iceberg. Pourtant, rares sont les cas qui font l’objet d’un traitement médiatique ou d’une décision de justice. Pourquoi ? Parce que vérifier les faits pour faire éclater une affaire de ce type au grand jour est souvent mission impossible. Parce que pour une personne détenue, porter plainte est un véritable parcours du combattant et un pari risqué. Parce que ces violences surviennent le plus souvent à l’abri des caméras de vidéosurveillance et sans témoins, et que ceux qui voudraient les dénoncer, qu’ils soient détenus ou agents pénitentiaires, s’exposent à des représailles. Parce que l’institution préfère souvent fermer les yeux, et que saisir la justice ou les organes de contrôle est presque toujours vain. Parce qu’en prison, opacité et omerta se conjuguent, jusqu’à l’impunité.

Après un an d’enquête et une centaine d’entretiens avec des victimes, des surveillants, des directeurs de prison mais aussi des magistrats, des avocats, des médecins, etc., c’est tout un système que ce rapport entend faire éclater au grand jour. Un système qui permet à ces violences de perdurer, quand bien même elles seraient le fait d’un petit nombre. Un système où des dysfonctionnements en série font qu’aucun des acteurs et institutions ne joue son rôle de garde-fou, où chacun s’en remet à l’autre pour rendre une justice qui, le plus souvent, ne vient pas. Un système enfin sur lequel repose une véritable chape de plomb.

À l’heure où les violences policières sont régulièrement pointées du doigt, ce rapport rappelle qu’il est un autre espace, non public, où la légitimité de la violence étatique devrait être questionnée, où aucun débordement ne devrait être toléré, où le silence devrait être brisé : la prison. »

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Politique

Les caractéristiques de la gauche post-industrielle, post-moderne, post-historique

La « nouvelle Gauche » qui s’est développée à partir des universités américaines a largement contribué au démanchement de la Gauche historique française. Posant des questions parfois pertinentes, ses réponses sont systématiquement la « déconstruction » et l’ultra-individualisme comme lecture du monde.

Michel Foucault

La société de consommation implique que tant qu’on n’a pas choisi, on est indépendant du reste. On choisit ce qu’on achète et ce qu’on n’achète pas, on choisit pour qui travaille et pour qui on ne travaille pas, avec qui on partage des éléments de sa vie ou pas, et tout est fixé par un contrat. La « nouvelle gauche » est le produit de cette société de consommation, dont elle a assimilé l’existence de bout en bout.

Elle raisonne ici en termes d’individus et prône l’élargissement maximal des possibilités pour l’individu de s’affirmer. Tout ce qui empêche cela doit être déconstruit. Pour la « nouvelle gauche », il n’y a donc plus de pays et de liens de l’individu avec lui, il n’y a plus non plus de données biologiques, comme le fait d’être homme ou femme, qui amèneraient l’individu à être par nature comme ci ou comme cela.

Il n’y a pas non plus de classes sociales. Il y a seulement des individus pauvres et des individus riches, les premiers connaissant des « injustices » en tant qu’individus. La société entière serait même traversée de préjugés, d’idées qui façonneraient les rapports sociaux. C’est le contraire du marxisme, pour qui les rapports sociaux donnent naissance aux idées, qu’elles reflètent.

Pour la « nouvelle gauche », farouchement opposé à tout déterminisme, il ne peut exister que des individus avec parfois des influences, mais jamais totalement décisives. C’est le libre-arbitre qui serait la substance de chaque individu, qui serait en mesure de choisir ce qu’il veut, comme il veut, d’avoir la capacité d’utiliser sa conscience en dominant tous les aspects de la réalité. L’individu serait tout-puissant.

Toute observation extérieure, toute remarque concernant un individu, serait un « truc de facho ». Chaque individu serait une micro-société, voire un micro-univers. Personne ne pourrait ni évaluer, ni juger un autre individu pour ses choix, qui seraient uniques. Chacun fabrique sa vie indépendamment des autres, ou au moyen de rapports bien choisis. Comme l’a dit Sarte, chacun consisterait en ses « choix ».

Le capitalisme propose justement les choix, mais cela la « nouvelle gauche » ne le voit pas. Elle ne peut plus le voir, car elle rejette les notions d’histoire, d’industrie, le pays comme cadre politique. Elle vit dans une « modernité » ayant dépassé tout cela, et même dans une « post-modernité ». L’impressionnisme avait déjà affirmé la modernité subjective contre le réalisme, la « nouvelle gauche » est elle même partisane de l’abstraction, de l’art contemporain, de la subjectivité la plus totale.

queer
« Cologne est colorée – La diversité au lieu de la simplicité »

L’individu serait donc au-dessus de tout, car le monde ne consisterait qu’en ses choix. Chacun serait un micro-monde façonné par ses choix : tel est l’idéal de la « nouvelle gauche », qui voit là un monde parfait. Pour elle, la société doit accorder le plus de droits et de possibilités à l’individu, pour qu’il vive de manière totalement indépendante.

Ce qui est faisable est donc possiblement à faire. Il n’y a plus de normes, tout est possible, surtout ce qui permet de s’affirmer individuellement, de « développer » son individualité, tel se prostituer, acheter des enfants à une mère porteuse, avorter à n’importe quel comment, « changer » de sexe, élever son enfant de manière « neutre » quant à son « genre », « aimer » plusieurs personnes en même temps, avoir des rapports sexuels avec autant de gens qu’on veut (y compris en même temps), prendre n’importe quelle drogue, etc.

L’individu n’est pas au-dessus des responsabilités, mais seules les responsabilités qu’il a choisies auraient un sens. Le reste serait une « construction », une « structure » oppressive pour l’individu. On retrouve ici la philosophie structuraliste née en France, qui exportée aux États-Unis a amené l’émergence de la philosophie de la « déconstruction ».

En France, c’est l’université de Paris 8 qui a alors servi de laboratoire à tout cela, puis de caisse de résonance. Elle a été fondé après mai 1968 à Vincennes en banlieue parisienne, pour rassembler les professeurs et les élèves correspondant aux exigences libérales-libertaires du moment. On y trouve notamment Michel Foucault et Gilles Deleuze, l’un « structuraliste », l’autre exprimant une ligne « désirante ». Après l’exportation des idées dans les universités américaines, Paris 8 a récupéré les idées pour les diffuser dans notre pays.

Cependant, c’est toute la couche sociale des étudiants de gauche, notamment en sciences humaines, qui a adopté la ligne de la « nouvelle Gauche ». Souvent leurs parents ont capitulé par rapport à leur engagement à Gauche, tout en gardant des espoirs, et la nouvelle génération a trouvé un nouveau terrain, plus conforme à leur mode de vie propre à la petite-bourgeoisie, résolument étrangère au peuple.

Il y a vraiment un parallèle strict entre la contamination de toute la Gauche par cette « nouvelle Gauche » et le triomphe du Front National dans les classes populaires lors des années 2000 ! C’est qu’aucun ouvrier, et encore moins un jeune ouvrier, ne peut ne serait-ce que saisir les thèses de la nouvelle gauche. C’est trop irrationnel, cela reflète trop un style de vie décadent propre aux villes d’une certaine taille, caractéristique d’une certaine oisiveté propre justement aux étudiants en sciences humaines.

Qui dans le peuple, de toutes façons, pourrait soutenir une « nouvelle Gauche » hostile à tout principe ? Quel ouvrier, quelle femme du peuple, quel employé pourrait dire : oui, supprimons tous les principes, faisons ce qu’on veut comme on veut ? C’est là simplement un rêve de bourgeois moderne, qui plein d’aisances, a envie d’être encore plus à l’aise, et de résumer sa vie à ses propres choix, dans la négation de toute collectivité, de toute société, de tout engagement, de tout devoir.

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Guerre

Le communiqué de la CGT refusant de charger des armes au port de Marseille-Fos

Il a beaucoup été question ces derniers jours des dockers refusant de charger des armes sur un navire à destination de l’Arabie Saoudite.

Il y a d’abord eu une alerte en provenance des dockers du Havre, puis c’est au port de Gêne en Italie que le chargement a été refusé, avant que ce soit au Grand Port Maritime de Marseille-Fos.

Voici le communiqué de la CGT des Dockers de ce port, qui rappel à juste titre les fondamentaux du mouvement ouvrier, et donc de la Gauche, concernant la guerre :

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Culture

Roky Erickson, figure hippie marquante

La mort de Roky Erickson a été annoncé et cela a marqué les personnes aimant la musique et particulièrement celle produite par la scène hippie. C’est que l’histoire est connue et terrible : ce musicien formidable est devenu très rapidement totalement fou en raison des drogues. La carrière du groupe The 13th Floor Elevators, une grande référence, s’effondra ici dès le départ, ce qui marqua fortement les esprits.

La sortie de l’album The Psychedelic Sounds of the 13th Floor Elevators en octobre 1966 fut un tournant sur le plan musical. Il y avait un esprit d’expérimentation, de découverte de nouveaux sons, sans jamais pour autant perdre de vue la mélodie ni le haut niveau de musicalité. La musique psychédélique, c’est pour résumer comme le grunge, mais avec l’enthousiasme et la volonté d’affirmer une culture nouvelle, de faire des mélodies accrocheuses et populaires.

La chanson You’re Gonna Miss Me est un classique du genre.

Seulement voilà, les hippies combinaient esprit de révolte, mise en avant de la culture, et un comportement anti-social expérimentateur typiquement classes moyennes. Les expérimentations avec les drogues étaient censées apporter un « plus » pour l’ouverture d’esprit.

Il y a ici deux interprétations, justement. Pour l’une, reflétant le libéralisme culturel, c’est bien par les drogues qu’un haut niveau culturel a été atteint. Ce sont les individus créatifs qui apportent des choses. Pour l’autre, c’est malgré les drogues que le haut niveau culturel a été atteint.

On remarquera bien entendu que la première interprétation est partagée par la « Gauche » post-moderne, post-industrielle, la seconde par la Gauche historique.

Il y a ainsi la légende comme quoi Roky Erickson ne serait devenu fou qu’après un passage en hôpital psychiatrique, qu’il a choisi pour éviter la prison pour possession de marijuana. Il aurait été maltraité au point de succomber mentalement. Et il a indubitablement été torturé, puisqu’il a subi des électro-chocs.

Mais en réalité il avait craqué déjà à la base, ce qui l’amena donc à se considérer comme un extraterrestre. Roky Erickson n’a par la suite été plus que l’ombre de lui-même, produisant quelques disques sans valeur, finissant sa vie dans un taudis avec sa mère, tout en consommant du LSD de manière hebdomadaire.

Son apport a marqué et en 1990, une compilation de reprises (When the pyramid meet the eye-tribute to Roky Erickson) avait été faite pour l’aider financièrement. Mais si l’idée est sympathique, c’est se focaliser sur un individu, alors qu’il s’agissait d’une personne membre d’une large scène en 1965-1968, dont le grand témoignage sont les fameuses compilations Nuggets, incontournables.

Quant à l’album des 13th Floor Elevators, il est vraiment incontournable et fait partie des plus grandes œuvres musicales de la seconde moitié du XXe siècle.

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Société

La Collectivité Européenne d’Alsace, une expérimentation au service du marché

À compter du 1er janvier 2021, les conseils départementaux du Haut-Rhin (68) et du Bas-Rhin (67) fusionneront au profit d’une innovation institutionnelle nommée Collectivité Européenne d’Alsace. Cette expérimentation transfrontalière menée dans le cadre de l’intégration européenne s’appuie sur la sensibilité régionaliste alsacienne pour développer le capitalisme local.

Le Haut-Rhin et le Bas-Rhin formaient la région Alsace, dont le nom a disparu avec la création de la région Grand Est ; ils ne formeront bientôt plus qu’un sous le nom de Collectivité Européenne d’Alsace. Les deux Préfectures et leurs prérogatives liées à l’État resteront cependant.

Bien sûr, on peut discuter de ce que représente l’Alsace en tant qu’expression nationale germanique minoritaire dans le cadre de notre pays. Mais alors, il faudrait le faire dans un cadre forcément populaire et dans une perspective démocratique. Ce n’est en rien le cas dans la situation présente. Il n’est pas non plus simplement question ici de se poser la question de la nécessité d’un cadre administratif pour affirmer l’histoire ou la culture alsacienne.

Il est question de comprendre comment la sensibilité régionaliste est littéralement instrumentalisée par les libéraux alsaciens de type centristes, qui dominent culturellement la vie politique de la région, afin de promouvoir un démantèlement du cadre administratif national au profit du marché et de ses soutiens institutionnels locaux, qui ne voient dans l’Alsace qu’un label de promotion.

Le terme « collectivité » tout d’abord permet de contourner la question de la région, voire d’en sortir de facto, en faisant des deux départements un genre de « super-département » ou de « sous-Région » intégrée au Grand Est. La réactivation du terme « Alsace » permet de faire un clin d’œil opportuniste à la sensibilité régionaliste à peu de frais, tout en liquidant l’héritage anti-provincialiste de 1791, qui avait voulu proposer par la division départementale, une organisation brisant l’ancien cadre hérité du féodalisme.

L’air de rien, on réactive donc ainsi sur une base pseudo-romantique un prétendu cadre significatif qui lui est bel et bien réactionnaire. Ce que le gouvernement présente comme relevant d’un nouveau « Pacte girondin ».

Le Conseil d’État lui-même a toutefois relevé cette attaque contre ce qui été jusque là considéré comme un acquis républicain, et le côté aventureux, provocateur et irrationnel de la dénomination du CEA.

Le terme « Européen » enfin n’est aussi qu’un simple faire valoir permettant d’affirmer une certaine modernité, un esprit d’ouverture nuançant de manière contradictoire la base identitaire « Alsace » qui se voudrait à la fois « locale » et « Européenne », sans que le cadre national ne soit pris pour autre chose qu’une sorte de violence post-jacobine qu’il serait bienvenue de dépasser par une intégration européenne unilatéralement vue comme forcément positive.

La CEA telle que définit par ses fondateurs pose les choses clairement :

[…] Il s’agit de construire une collectivité européenne d’Alsace dont le territoire et les compétences opérationnelles seront de nature à répondre au « désir d’Alsace » et à doter l’Alsace d’une pleine capacité à agir en faveur de l’attractivité du territoire et de la vie quotidienne de ses habitants […]

Il s’agit dans le même élan de s’appuyer de manière démagogique sur les aspirations régionalistes, en se donnant à peu de frais des allures « populaires », voire une contenance démocratique. Il est d’ailleurs significatif de parler de « désir », une chose bien abstraite qui n’engage à rien, au lieu de « besoin », exprimant concrètement et rationnellement un projet, un contenu reflétant les aspirations des masses alsaciennes.

Concernant les compétences du nouveau cadre administratif « alsacien » en revanche, on quitte la fantaisie hypocrite pour exposer les choses clairement. En s’appuyant notamment sur la question transfrontalière, la CEA chercher à multiplier les dérogations et les petits arrangements avec les Ministères ou les Régions, dans le but de mieux servir les intérêts locaux du marché et du capital. Toute l’action déployée s’articule donc dans ce cadre, y compris le bilinguisme perçu dans une logique capitaliste de « ressources » à promouvoir dans une optique marchande.`

C’est là tout le sens donné à cette « décentralisation » des moyens publics pour mieux les mettre dans les mains des acteurs économiques locaux et des élus qui les servent. On est loin de l’intérêt général et de la démocratie, rien donc d’étonnant à ce que cette réforme bureaucratique n’intéresse finalement pas les Alsaciens.

On peut donc dire clairement que le projet du CEA n’est pas celui d’une Alsace démocratique et populaire, mais celui d’une fraction libérale pensant en désarticulant le cadre national, conforter ses positions au prétexte du régionalisme, afin d’orienter les fonds publics vers l’appui au « petit » capitalisme local.

Alors même qu’une large majorité des Alsaciens reste attachée à l’idée de maintenir une institution administrative appelée « Alsace », la proposition de la fusion puis du projet de CEA n’a jamais obtenu un quelconque appui populaire et démocratique digne de ce nom.

Le moins que l’on puisse dire, c’est que tout le processus se déroule par le haut, sans élan, sans enthousiasme populaire. On n’est là dans la pure démarche bureaucratique typique de la gestion des affaires publiques par le capitalisme. Même la consultation référendaire de 2014 témoigne de cette indifférence populaire : une majorité de voix avait rejeté la fusion telle que proposée dans le Haut-Rhin, et même dans le Bas-Rhin, où le « oui » l’a emporté, le vote n’avait même pas mobilisé le quart du corps électoral.

Les élus qui mènent ce projet proposent donc ouvertement de gérer l’Alsace comme on manage une entreprise capitaliste. Les compétences retenues seront donc principalement des compétences de nature économique destinées à appuyer les entreprises privées dans une optique de compétitivité et d’attractivité du territoire.

Cinq domaines ont été ainsi visés :

  • l’action transfrontalière,
  • le bilinguisme,
  • le développement économique,
  • l’attractivité,
  • le tourisme,
  • les transports,
  • la culture,
  • le sport.

C’est-à-dire que cette collectivité « alsacienne » se fixe comme objectif premier d’être non pas au service des Alsaciens, mais ni plus ni moins à celui du marché et des acteurs économiques du capital. La culture et le patrimoine alsaciens ne sont simplement affirmés dans la mesure où il peuvent porter une dimension marchande, se traduire en un label dans le cadre notamment du tourisme ou de la consommation de masse.

Les compétences plus sociales des départements (gestion du RSA ou des collèges par exemple) devraient forcément être intégrées, mais ce sont bien sûr les compétences économiques précitées, jusque là domaine des Régions, que les débats sont les plus vifs. Et cela veut en soi tout dire. Cela va même jusqu’à la précision des futurs budgets, fléchés par l’accord même : le développement économique (c’est-à-dire l’aide aux entreprises) devant représenter 55% des dépenses, l’attractivité et le marketing territorial 25%, l’insertion par l’activité économique 5%, la solidarité territoriale 10% et l’accès aux services départementaux 5%.

Les moyens alloués aux différentes compétences parlent d’eux-mêmes et se passent de tout commentaire.

Au-delà de la question des missions propres de cette CEA, il y a aussi la perspective de la coopération transfrontalière, telle que posée dans le Traité de l’Élysée de 2018, dont la CEA est définie comme un agent. Il s’agit de pousser les communes à fusionner dans des Eurodistricts aux compétences élargies et qui seraient maîtres des fonds publics municipaux.

Dans le même ordre d’idée, il apparaît clairement la volonté de s’appuyer sur l’idée de la coopération transfrontalière pour liquider des services publics en matière de santé au nom de leur présence outre-rhin au sein d’une structure intégrée. Un futur Eurodistrict par exemple devrait liquider certains établissements de soin « redondants » de l’autre côté de la frontière comme cela est explicitement évoqué à Wissembourg par exemple.

Le seul point à peu près positif pourrait être l’idée (mais qui reste encore au niveau de l’intention) de faire de la requalification de la centrale nucléaire de Fessenheim un projet transfrontalier, si tant est encore que ce chantier puisse prendre une réelle dimension internationale visant le progrès de l’Humanité dans son ensemble.

Les besoins de formation, de compétences, d’expériences, d’accumulation et de partage des connaissances en un mot sur la question du démantèlement des centrales nucléaire puis de la requalification des sites industriels sont en effet encore immenses, en France comme dans toute l’Europe.

On a là en tout cas concernant cette CEA, tous les ingrédients pour développer un système bureaucratique, confisquant les moyens publics des besoins du peuple pour les mettre avant tout au service du capital et des intérêts des entreprises locales au motif du régionalisme et de l’intégration européenne.

Toute cela montre à quel point le gouvernement, qui a fait voter la loi adoptant la CEA, est incapable de proposer un cadre répondant aux besoins populaires et démocratiques des masses de notre pays, particulièrement de celles portant une culture nationale minoritaire comme l’Alsace. Il n’a à proposer qu’une démarche aventureuse en vue d’appuyer l’élan capitaliste dans une perspective de conquête du marché européen.

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Politique

Socialistes et communistes, l’un miroir de l’autre

Pour les communistes, les socialistes sont des communistes qui n’ont pas tout compris. Pour les socialistes, les communistes sont des socialistes qui pensent trop avoir tout compris. C’est la clef d’une différence historique, qui se maintient encore, même si de manière bien différente dans notre pays.

SPD Rosa Luxemburg

Après la révolution russe, Lénine n’a cessé de pester contre les communistes des pays occidentaux, c’est-à-dire les socialistes qui ont été d’accord avec lui. C’est paradoxal : il est mécontent des gens qui ont rompu avec ce qu’ils avaient été et qui adoptent ses propres positions ! Mais la raison de cela est très simple à comprendre. Il avait vu que la social-démocratie était un mouvement de masse et que seule une partie était devenue communiste.

Voilà pourquoi il disait aux communistes, ex-socialistes, d’aller chercher les autres. Sauf qu’évidemment, les communistes ne comptaient pas du tout le faire. Ils n’étaient tout de même pas devenus communistes pour aller avec les socialistes, qui eux justement refusaient de devenir communistes. Alors, ils ont refusé, ou bien fait semblant, ou bien traîné des pieds.

On notera que Rosa Luxembourg avait constaté le même problème lors de sa fondation du Parti Communiste d’Allemagne – Spartacus. On est trop peu, on est loin d’avoir les masses avec nous, disait-elle en substance. On s’en fout, répondaient en substances les ultras. La différence est que Lénine avait lui centralisé tous les partis communistes dans l’Internationale Communiste.

Pas une, pas deux, Lénine leur force la main. Il fait donc en sorte d’éjecter des nouveaux partis communistes tous les « ultras », publie Le gauchisme, maladie infantile du communisme, force les communistes à s’allier avec autant de forces que possible, notamment en Allemagne. Ceux qui ne sont pas contents peuvent aller voir ailleurs, et le font (cela donnera les bordiguistes italiens, les conseillistes hollandais et allemands, plus tard les trotskistes français, etc.)

Les socialistes s’en aperçoivent bien, évidemment. Alors ils font monter les enchères et disent que si les communistes ne cessent de se tourner vers eux, c’est qu’au fond ils savent qu’ils se trompent. Les communistes leur répondent en les traitant de salauds ou de traîtres, ou bien les deux. Les socialistes les accusent d’être des charlatans, des autoritaires, voire pire. Tout continue ainsi, jusqu’à la catastrophe allemande, qui met tout le monde d’accord.

Front populaire

C’est alors le Front populaire, né par en bas, par la pression des socialistes et des communistes, dont les associations populaires fusionnent alors. Cela deviendra le modèle pour les communistes et pour certains socialistes, surtout après 1945 dans les pays de l’Est. D’autres socialistes considèrent par contre alors que la fracture est complète et irrémédiable et rejettent les communistes de manière formelle. Cela sera le cas dans les pays occidentaux, notamment en France, jusqu’en 1981.

Les communistes sont-ils alors les mêmes ? Les socialistes sont-ils alors les mêmes ? Et y a-t-il encore aujourd’hui, au sens strict, historique, au-delà des mots, des socialistes et des communistes ? En tout cas, on ne peut pas comprendre les uns sans comprendre les autres. Forcément, les deux relèvent du mouvement ouvrier et il n’y a qu’un mouvement ouvrier.

Il est ainsi inévitable qu’à l’avenir, les identités socialiste et communiste ressurgissent, comme fruit historique du patrimoine du mouvement ouvrier. Mais cette fois, il ne faudra pas faire les mêmes erreurs, qui ont coûté si cher. Le Fascisme n’aurait jamais gagné en Allemagne si toute la Gauche avait agi collectivement, massivement, de manière unanime. À un moment, il faut bien assumer si on veut que la Gauche gagne, et si on est prêt à assumer que pour la Gauche gagne, il ne faut qu’il y ait plus que la Gauche, car inévitablement la Droite bascule du côté de l’extrême-Droite.

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Société

La consommation d’aliments ultra-transformés et le risque de maladies cardiovasculaires

Les chercheurs de l’étude Nutrinet-santé ont publié jeudi un article alertant sur les liens entre la consommation d’aliments ultra-transformés et le risque de maladies cardiovasculaires.

L’article publié dans le British Medical Journal (en anglais) se base sur des données statistiques issues d’une grande enquête menée par des chercheurs en France sur l’alimentation de milliers de personnes.

Ce qu’on y apprend n’est pas nouveau et a déjà été montré depuis au moins les années 1980, notamment par des universitaires américaines. Cependant, l’agro-industrie accroît toujours plus son emprise sur l’alimentation et cela commence à faire des dégâts très facilement observables.

Dans leur incessante quête de profit, les industriels inondent le marché de produits de mauvaises qualité, transformés à l’aide de procédés qui ne devraient pas exister et gorgés d’additifs, de sucres, de matières grasses et de sel.

Voici le communiqué publié sur le site de l’étude Nutrinet-santé qui présente l’article et ses enjeux :

CP_AUT_CARDIO.pdf

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Politique

L’étape pour aller au Socialisme existe-t-elle ?

C’est un débat intéressant qui se joue à l’arrière-plan de certaines structures de Gauche. Intéressant et ô combien important sur le plan des batailles d’idée, puisqu’il s’agit pas moins de savoir comment le Socialisme peut être mis en place. Existe-t-il une étape préalable et si oui laquelle ? Si la question n’est pas d’actualité au sens strict, elle détermine la définition même d’engagement à Gauche pour beaucoup de monde.

C’est un thème vraiment intéressant, mais aussi très compliqué. Aussi est-il assez rassurant, finalement, de voir des gens se posent des questions d’un tel niveau en 2019. Cela montre qu’il y en a qui réfléchissent, cherchent à montrer des perspectives. De quoi s’agit-il précisément ?

Déjà, précisons que cela concerne la Gauche historique dans son ensemble, tant les socialistes que les communistes. Il s’agit en effet de savoir comment le Socialisme peut s’instaurer. Cela se passe-t-il directement, ou bien y a-t-il des étapes ? Historiquement, ce qu’on appelle les « gauchistes » disent : pas d’étapes, mais la révolution permanente. La très grande majorité dit : non, il y a des étapes.

Le Parti Communiste Révolutionnaire de France (PCRF), né en 2016 d’une structure de la gauche du PCF et l’ayant quitté grosso modo dans les années 1990, a publié une longue analyse de la question, qui vaut la peine d’être lu. Elle s’intitule « L’étapisme » : une question stratégique fondamentale.

Le PCRF rejette formellement la notion d’étape. En voici un extrait, qui ne résume pas toute l’approche, mais est exemplaire de l’esprit posé.

« Il n’y a pas d’autre alternative susceptible de l’emporter que la révolution socialiste. Pourquoi ? Parce que l’ère que nous vivons est celle du passage du capitalisme au communisme (étape socialiste). Nous venons (le prolétariat et son avant-garde) de subir une défaite historique, il faut reconstruire le mouvement révolutionnaire, redonner à la classe ouvrière sa confiance en elle, mais pour autant nous n’avons pas changé d’ère !

Est-ce que cela veut dire que la situation est révolutionnaire ? Non. Cela veut dire que l’objectif qui doit guider notre stratégie, c’est la révolution socialiste, et que nous ne devons pas nous préparer à une « étape » politique de transformation sociale. Ce qu’il faut, c’est avancer un programme, à plus ou moins court terme, (et à l’heure actuelle c’est plutôt moins, hélas…) programme qui mobilise la classe ouvrière et l’ensemble des travailleurs contre la politique du Capital, pour la satisfaction des revendications et des besoins fondamentaux, pour les droits démocratiques, en aidant à comprendre que pour gagner vraiment, c’est le capitalisme qu’il faut renverser.

C’est d’ailleurs dans cette perspective, dans nulle autre sur le plan purement stratégique (donc programmatique), que le PCRF se prononce pour la rupture avec l’Union Européenne.

Et pour rassurer ceux qui auraient besoin de l’être, il y aura des étapes :
reconstruire le parti, unifier les communistes, redonner son contenu de classe au syndicalisme, reconstruire un mouvement pour la paix reposant la bataille contre l’impérialisme … Mais pas d’étape genre « démocratie avancée » ou « République sociale » ouvrant la marche au socialisme, car nous pensons que c’est la voie de garage : cela part de l’idée que la gestion des affaires de la bourgeoisie (c’est son appareil d’État) pourrait assurer les intérêts du prolétariat ! »

Encore une fois, l’analyse vaut la peine d’être lue. Mais opposons là ici à deux analyses affirmant, justement, qu’il y a bien une étape nécessaire. Ces deux analyses se veulent un « retour » à la position du mouvement communiste des années 1950, mais pas de la même manière.

Commençons avec le Pôle de Renaissance Communiste en France (PRCF). Pour lui, le « Frexit progressiste » est justement une étape nécessaire et inévitable. Cette position est souvent considéré comme relevant d’un certain souverainisme de gauche. Il y aurait l’étape nationale, et ensuite l’étape sociale, pour ainsi dire.

Voici un extrait de son argumentation, qu’il faut lire en entier pour bien saisir les tenants et aboutissants, bien entendu, et éviter tout malentendu.

« Dans ces conditions, contre Macron-MEDEF, l’UE et Le Pen, il faut réactualiser la belle alliance du drapeau rouge et du drapeau tricolore que portait jadis le véritable PCF : l’enjeu est de remettre le monde du travail au centre de la vie nationale dans la perspective du Frexit progressiste, de l’Europe des luttes et du socialisme pour notre pays. C’est pourquoi en cet anniversaire du 29 mai 2005, le PRCF appelle,

Les communistes à s’unir, indépendamment de la direction du PCF-PGE, sur une stratégie claire et nette de sortie par la gauche de l’euro, de l’UE, de l’OTAN et du capitalisme, sans perdre de vue l’urgence de reconstruire ensemble le parti communiste de combat dans notre pays.

Les syndicalistes de classe à construire le tous ensemble en même temps ; sans craindre les directions confédérales euro-formatées, tendons la main aux gilets jaunes et osons contester radicalement la « construction » européenne du capital

Les progressistes opposés à l’UE, à s’unir pour l’indépendance nationale, le progrès social, la démocratie et la paix en combattant d’un même élan ce président radicalement illégitime, l’ « alternative » mortelle du FN et cette UE du grand capital rivée à l’OTAN qui détruit notre pays, ses libertés et ses acquis sociaux.

Les progressistes opposés à l’UE, à s’unir pour l’indépendance nationale, le progrès social, la démocratie et la paix en dénonçant cette UE atlantique de plus en plus fascisante qui détruit notre pays et ses acquis sociaux (…).

Dans cet esprit, le PRCF continuera

– A aller au plus près des travailleurs, tout particulièrement de la classe ouvrière, notamment vers les entreprises et vers les manifestations de lutte

– A dialoguer avec tous les communistes, les patriotes progressistes et les syndicalistes de classe avec des propositions pour agir

– A échanger à l’international avec tous les communistes et progressistes d’Europe qui s’opposent clairement à la fois à l’UE et aux forces néofascistes

– A débattre avec les intellectuels de plus en plus nombreux qui comprennent que l’UE n’est pas un rempart du « progressisme », mais un puissant accélérateur de la casse sociale, de fascisation et de marche aux guerres impérialistes. »

Le PRCF parle de « la belle alliance du drapeau rouge et du drapeau tricolore que portait jadis le véritable PCF », ce qui est une allusion au PCF de Maurice Thorez. Il s’agit de retourner à la ligne des années 1960. Évidemment, les maoïstes considérant que Maurice Thorez n’a pas été un grand dirigeant du tout, ils remontent plus loin dans anti-monopoliste dl’interprétation d’un PCF idéal posant correctement la notion d’étapes.

Voici comment posent la question les maoïstes du PCF (mlm) :

« La démocratie populaire, en brisant le pouvoir des monopoles et des grands propriétaires terriens, frappe le mode de production capitaliste en son cœur. Cela satisfait à la fois les intérêts de la classe ouvrière, mais également de la petite-bourgeoisie qui n’est plus alors sous le joug des monopoles.

Naturellement, la petite-bourgeoisie veut de son côté développer le capitalisme, cependant elle ne peut plus le faire de manière suffisamment ample pour devenir une bourgeoisie, avec des monopoles qui se reforment. De plus, la part principale de la production se fait par l’intermédiaire des monopoles anciens qui n’ont en effet pas été démantelés, mais socialisés. Cela présuppose bien entendu un État au service des larges masses, avec la classe ouvrière organisée comme force décisive historiquement.

La démocratie populaire se présente donc comme l’étape adéquate pour rassembler suffisamment les larges masses pour briser les monopoles et ouvrir la voie au socialisme.

Le Parti Communiste de France (marxiste-léniniste-maoïste) affirme que l’objectif actuel n’est pas la révolution socialiste, mais la démocratie populaire comme étape historique obligatoire dans le cadre du capitalisme avancé (…).

Pour synthétiser :

a) la révolte de la petite-bourgeoisie n’a de valeur historique que si elle se place en décalage par rapport au mode de production capitaliste, et donc qu’elle se place dans l’orientation portée par la classe ouvrière :

b) sans cela, elle va dans le sens d’un vecteur du fascisme comme mouvement romantique de masse cherchant à la neutralisation des contradictions :

c) le Front populaire contre les monopoles, contre le fascisme, contre la guerre, est l’orientation politique des communistes ;

d) l’établissement de la Démocratie populaire est le programme politique des communistes. »

Voilà bien une question épineuse, qui a plusieurs réponses. Pas d’étapes d’un côté, de l’autre une étape, mais pas la même : Frexit progressiste anti-UE pour les uns, front populaire antifasciste anti-monopoliste de l’autre. Il y a de quoi réfléchir !

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Société

Pétition : « Pas de tomate bio en hiver : non aux serres chauffées !  »

La Fédération Nationale d’Agriculture Biologique a lancé une pétition avec le Réseau Action Climat, la Fondation Nicolas Hulot et Greenpeace qui a eu un certain retentissement médiatique. Elle est adressée au Ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation Didier Guillaume, dans le but de défendre les principes de l’agriculture « bio » en encadrant mieux le secteur.

L’agriculture « bio » a été prise d’assaut ces dernières années par les grands groupes de l’agro-industrie et de la grande distribution. Ce label n’est pour eux qu’un moyen d’augmenter le profit en valorisant mieux les marchandises et en s’ouvrant à de nouveaux marchés. Cela passe bien sûr par une pression très forte sur les prix afin d’écraser la concurrence, ce qui signifie une quête perpétuelle de baisse des coûts.

L’industrialisation de l’agriculture « bio » qui existe depuis longtemps déjà en Espagne arrive donc en France et tend à écraser littéralement tout un secteur, qui voit ses principes disparaître.

On a ainsi des petits-producteurs dont la situation se complique sous la pression des gros, qui industrialisent la production « bio » et inondent le marché, qui plus est toute l’année. Les serres chauffées en sont un symbole très fort, en plus d’être une hérésie sur le plan de l’écologie et de la gastronomie.

On remarquera que les signataires mis en avant dans la pétition sont principalement des chefs cuisiniers, sur un mode « cuisine traditionnel ». Si on ne peut qu’être d’accord pour défendre la nourriture de qualité contre les horreurs agro-industrielles, il faut bien voir ici ce que cela signifie. On est pas dans une critique socialiste, qui consisterait à dire qu’il faut changer la production, pour la mettre au service de la population.

Il s’agit plutôt de la panique d’une petite-bourgeoisie aimant bien manger « bio », qui craint de voir s’effondrer tout un secteur auprès duquel elle peut s’approvisionner en produits de qualité, en marge de l’agriculture destinée à la grande majorité de la population.

Voici donc le texte de la pétition, que l’on peu signer en se rendant sur ce lien :

« Non à l’industrialisation de la Bio !

Monsieur le Ministre de l’Agriculture, il faut interdire la production de fruits et légumes bio hors saison !

Le marché bio se développe et les appétits aussi. Avec l’arrivée de nouveaux acteurs économiques poussant des pratiques incompatibles avec le cahier des charges bio, c’est tout le système qui est menacé !

Halte aux rendements à tout prix, oui aux saisons !

Depuis quelques mois, on voit se développer des projets de conversion biologique de serres chauffées pour la production de fruits et légumes hors saison (Pays de la Loire, Bretagne…). Ces projets en gestation vont permettre de retrouver sur les étals de la tomate bio française en plein mois de mars. Une aberration gustative, agronomique et environnementale !

Le chauffage des serres est incompatible avec le label bio

Le cahier des charges bio impose le « respect des cycles naturels » et une « utilisation responsable de l’énergie ». Chauffer sa serre pour produire des tomates ou des concombres en plein hiver ne peut donc pas être compatible avec l’agriculture biologique. Selon les régions et les années, la saison de la tomate peut aller de mai/juin à octobre/novembre, mais certainement pas en hiver.

Pour rentabiliser leurs serres chauffées, les industriels se spécialisent sur un ou deux légumes à forte valeur ajoutée. En diminuant la diversité des cultures, ils appauvrissent leurs sols et ainsi contreviennent encore aux principes de l’agriculture biologique.

Mobilisons-nous pour lutter contre l’industrialisation de la bio !

Nous avons jusqu’au 11 juillet 2019, prochaine date du Comité national de l’agriculture biologique, pour convaincre le Ministre de l’Agriculture de lutter contre l’industrialisation de la bio en limitant le recours au chauffage des serres à la production de plants et au maintien hors gel, garantissant ainsi que la production reste de saison.

Ne discréditons pas le label bio : soutenons les paysannes et paysans bio qui respectent les saisons, pas de serres chauffées pour produire à contre-saison !

Signez la pétition pour demander au Ministre de l’Agriculture de soutenir un encadrement strict du chauffage des serres en bio afin d’interdire la production de fruits et légumes bio hors saison.

Les premiers signataires :

Iñaki AIZPITARTE, Chef cuisinier Le Chateaubriand (1 étoile, Paris) ; Gaétan BERTHELOT, Chef cuisinier du traiteur bio Ressources (Paris) ; Tugdual de BETHUNE, chef cuisinier, Holen (Rennes), Nicolas BRIAND, Chef cuisinier, Le Château d’Apigné (Le Rheu) ; Cyril BORDRIER , Chef cuisinier Le verre volé (Paris) ; Clément CHARLOT, Chef cuisinier Fragments (Caen) ; Emmanuel CHARTRON, Chef de la Cuisine centrale de la Ville de Saint Tropez ; Ollie CLARKE, Chef cuisinier La Régalade (Paris) ; CLÉA, autrice culinaire et bloggeuse (Cléa Cuisine) ; Richard CORNET, Chef cuisinier L’Aménité (Nantes) ; Pascal DAUPHIN, Chef de cuisine Lycée Camille Pissarro (Pontoise) ; Sabine DELMAS, Chef de cuisine du Lycée Marie Curie (Versailles) ; Christophe DEMANGEL, Chef de Cuisine au Collège Jules Grévy (Poligny), membre des Cuisiniers de la République Française ; Xavier DENAMUR, restaurateur, propriétaire de cinq établissements dans le quartier du Marais à Paris ; Nicolas FERRÉ, Chef cuisinier Le Quai des Saveurs (Les Sables d’Olonne) ; Olivia GAUTIER directrice du restaurant Les Orangeries (Lussac-Les-Châteaux) ; Rémi GIRAUD, Chef cuisinier du restaurant Les hauts de Loire (2 étoiles, Onzain) ; Bernard GISQUET, Chef cuisinier de Lou Cantoum (Cestayrols) ; Arnaud GUILLOUX, chef cuisinier à Coquille (Rennes), Adeline GRATTARD, Cheffe cuisinière Yam’tcha (1 étoile, Paris) ; Sylvain GUILLEMOT, Chef cuisinier L’Auberge du Pont d’Acigné (1 étoile, Noyal-sur-Vilaine) ; Lionel HÉNAFF, Chef cuisinier L’Allium (1 étoile, Quimper) ; Thomas HUBERT, Chef cuisinier Olive & Artichaut (Nice), Fumio KUDAKA, Chef cuisinier La Table de Breizh Café (1 étoile) à Cancale ; Kevin LEPINE, Chef cuisinier de Texture (Saint Malo) ; Céline LE GALL, Cheffe cuisinière, et Yann ANDRÉ, gérant, La Renverse (Saint-Froult) ; Julien LEMARIE, chef cuisinier à l’IMA de Rennes, Ewen LE MOIGNE, Chef cuisinier de Saturne (1 étoile, Paris) ; Thierry LEBIGRE, Chef cuisinier du Centre hospitalier d’Embrun ; Flore MADELPUECH, artisane cuisinière, Cheffe de La table de Flore (Rouen) ; Bruno NOURRY, responsable de la cuisine municipale de St Hilaire de Riez ; François PASTEAU, Chef cuisinier de L’Epi Dupin (Paris), Morgan PERRIGAUD, Chef cuisinier Les Prémices (Bourron-Marlotte) ; Laurent PORÉE, cuisinier, créateur de La cantine de Babel (Le Mesnil-Rouxelin) ; Olivier ROELLINGER, Chef cuisinier, Maisons de Bricourt (Cancale), Hugo ROELLINGER, chef , Le Château Richeux (Saint Méloir des Ondes), David ROYER, Chef cuisinier étoilé du Château de sable (Porspoder) et du Roc’h Ar Mor (Plouescat) ; Sibylle SELLAM et Grégoire FOUCHERS, cuisiniers du Bercail (Rennes), Ndeye SOUMARÉ, Cheffe de cuisine de la Cité scolaire Chaptal (Paris) ; Didier Thévenet, directeur et cuisinier de la cuisine centrale de Lons-le-Saunier ; Jonathan THULLIEZ, Chef de cuisine du restaurant Le Bichat (Paris) ; David VACQUÉ, Chef cuisinier du Bistro gourmand (Nice) ; Caroline VRIGNAUX, Cheffe de cuisine R&D chez FoodChéri ; 4 diététiciennes et 13 chef.fes membres du Collectif les Pieds dans le Plat (restauration collective bio et locale) »

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Politique

La vague nationaliste en Europe

Si l’on regarde les résultats de ces élections européennes dans leur globalité, le constat est flagrant : les nationalistes réalisent un percée générale sur le continent. Les députés d’extrême-droite seraient 115 au Parlement européen, soit trois fois plus que pour la dernière mandature.

Les commentaires sont nombreux sur les résultats des élections européennes. Parmi les plus courants, il y a celui comme quoi la vague d’extrême-droite aurait, finalement, été moins forte que prévue. Sur 28 pays qui se rendaient aux urnes, ce ne sont « que » six d’entre eux qui placent une formation nationaliste en tête, dont la France.

La vague semble ainsi stoppée et la poussée écologiste forme un écran de fumée sur une réalité bien plus grave. En effet, il y a une tendance de fond qui devrait être analysée comme le fait principal pour la Gauche.

En Finlande par exemple, il est parlé de la percée des écologistes. Il est vrai que les Verts passent de 14 % en 2014 à 16 % en 2019. Mais, avec comme ailleurs un regain de participation (43 %), le fait que le parti des « vrais Finlandais » ait obtenu 14 % (contre 12 % en 2014) a de quoi alerter. Les « Vrais finlandais » avaient déjà réussi à obtenir 39 députés au parlement lors des élections législatives d’avril.

La situation est bien plus avancée dans de nombreux autres pays, avec une extrême-droite ayant acquis une position hégémonique.

En Grande-Bretagne, l’option nationaliste s’est concentrée sur le Brexit et portait carrément le nom de Brexit Party. Cette liste a recueilli 31,6 % des suffrages contre 14 % pour les travaillistes sur fond d’abstention élevée (63 %). C’est un coup de vis donné aux intérêts nationalistes et aux élans guerriers.

Paralysée, la société civile anglaise se réfugie dans une abstention stérile alors qu’à la fin mars, ce n’était pas moins d’un million de personnes qui défilaient à Londres pour exiger un nouveau référendum sur le Brexit. Malgré une protestation écologique naissante avec le médiatique mouvement « Extinction Rebellion », les verts anglais ne réunissent que 11 % des voix, ce qui est plus faible qu’en France.

Avec ce nouveau score très favorable pour le Brexit, il y a là un aiguisement des rapports de forces avec une probable sortie sans accords de l’Union Européenne. Cela ne peut que renforcer la tension internationale générale, et il faut penser ici en particulier à la situation de Gribaltar, l’enclave britannique qualifiée de colonie par l’Espagne et depuis récemment par le Parlement européen.

De la même manière en Italie, la Liga obtient 33 % alors qu’elle en rassemblait seulement 6 % en 2014… Son allié populiste, le « Mouvement 5 étoiles », ne recueille que 17 % des suffrages et la véritable Gauche se retrouve loin derrière, écrasée et broyée. La coalition de gauche Coal La Sinistra n’atteint que 1,74 % et le reste de la Gauche italienne s’est faite torpillée par les libéraux-centriste du Partito Democratico, qui siège avec les socialistes européens.

C’est comme si tout était a refaire, car finalement les leçons du passé n’ont pas été comprises. Pourtant, s’il y a une leçon à retenir de la tradition antifasciste, c’est bien que l’arrivée d’une force nationaliste au pouvoir n’est pas l’expression passagère d’une « crise ». Elle est surtout, et essentiellement, une expression profonde de l’état dysfonctionnel du capitalisme en route vers le repli chauvin à l’intérieur et la guerre ouverte à l’extérieure pour se relancer. C’est pour cela qu’il trouve un appui solide dans la société et pas simplement dans l’« élite ».

Le cas de la victoire triomphante de la Liga aux élections européennes de 2019 en Italie en est une nouvelle illustration, et cela ne présage vraiment rien de bon…

Et que dire de la situation polonaise où le parti « Droit & Justice », ultra-conservateurs et complaisants avec les forces néonazies, a obtenu 45, 4 % des suffrages ? Pourtant dans ce pays, une très large alliance entre libéraux, conservateurs, verts, et sociaux-démocrates s’était bâtie pour empêcher son triomphe. Ce fut peine perdue puisque cette coalition obtient seulement 38,5 % des voix, alors même que l’augmentation de la participation des polonais a été spectaculaire (45,7 % contre 23, 8 % en 2014…) En Hongrie, le parti réactionnaire du premier ministre Victor Orban a obtenu 52 % des voix (51 % en 2014), avec 35 points d’avance sur le parti libéral en seconde position. Le Parti socialiste hongrois, allié aux Verts, n’obtient que 6,66 % des suffrages.

En Autriche, la Droite, qui avait placé depuis décembre 2017 un ministre d’extrême-droite au ministère de l’intérieur (tout récemment démis de ses fonctions), arrive largement en tête avec 10 points de plus que le SPÖ qui obtient 23,40 % des voix. Le FPÖ, l’extrême-droite, qui s’émancipe de plus en plus de la Droite, est en faction juste derrière avec un score important de 17,20 %.

C’est la déroute en Grèce pour la coalition de gauche « radicale » SIRIZA d’Alexis Tsipras qui a fait campagne « contre l’extrême droite » et « pour un front progressiste ». La Droite, qui a mobilisé de manière nationaliste en s’opposant à l’accord de reconnaissance de la Macédoine du Nord, arrive en tête des élections européennes avec 10 points d’écart et fait aussi un carton aux élections municipales et régionales qui avaient lieu en même temps.

Il faut parler de la Belgique également où c’est la division avec d’un côté l’extrême-droite qui fait un carton en Flandre et de l’autre la Gauche qui se maintient en Wallonie et arrive en tête du scrutin du collège francophone (avec 26,69 % pour le Parti socialiste et 14,59 % pour le Parti du travail de Belgique).

On est donc bien loin d’un essoufflement des nationalistes. Cela d’autant plus que dans les pays où cette force dirige ou domine la vie politique, elle est écrase les autres forces à plate couture.

Comment pourrait-il en être autrement ? C’est la tendance à la guerre qui s’exprime, et s’est une fois de plus renforcée ce dimanche 26 mai en Europe. La Gauche va devoir se ressaisir en assumant le Socialisme et une identité antifasciste, anti-guerre, à la hauteur de l’époque.

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Société

L’alliance des vieux fuyant le monde et des jeunes se l’accaparant

Oui, la révolution est possible ! Elle va être l’alliance des vieux maintenant le flambeau en fuyant un monde anti-culturel et des jeunes s’appropriant le monde pour qu’il devienne à la hauteur de leur exigence d’épanouissement.

Si on a plus de trente ans, on se retrouve confronté à des responsabilités. Le travail, le logement, la famille… viennent, au minimum, encadrer des vies quotidiennes finalement toujours plus répétitives, ennuyeuses, fastidieuses.

Les meilleurs cherchent un refuge. Un style de musique, une activité sportive, un créneau culturel particulier… n’importe quoi fait l’affaire, du moment qu’on fuit la stupidité du monde et le caractère soporifique d’une société faisant de BFMTV et de TF1 des monstres sacrés.

Mais que peut-il y avoir de commun, par exemple, entre un cinquantenaire écoutant de la musique industrielle, se façonnant une actualité culturelle avec des vieux groupes comme Cabaret Voltaire, SPK, Throbbing Gristle ou Nurse with wound, avec des adolescents ne sachant même pas que cela puisse exister ?

C’est que justement, la jeunesse connaît un tournant. Elle sait qu’il est possible d’avoir accès à toute la musique, tous les films, toutes les images, tous les jeux vidéos, toutes les retransmissions de sport, voire toutes les informations. Cependant, c’est toujours plus difficile de par la domination des monopoles qui verrouillent l’accès. Il y a là quelque chose de fâcheux. Il y a encore quelques années, cela pouvait être difficile, mais il y avait l’attrait du nouveau. Là tout est devant eux.

Les jeunes veulent donc s’approprier le monde. Et les plus de trente ans qui n’ont pas cédé aux exigences du conformisme capitaliste entendent le changer. Leur alliance est donc objective et si jamais elle se transforme en unité subjective, alors tout peut changer. Évidemment, les vieux doivent cesser un certain snobisme… surtout que la jeunesse est smart comme jamais. Évidemment, les jeunes doivent apprendre à faire des efforts prolongés sur le plan psychique pour découvrir la vraie richesse culturelle… Cela va exiger des efforts hors du commun.

Au final, pourtant, on peut espérer que chacun y trouve son compte. De toutes façons, comment les choses pourraient-elles changer sinon ? On voit bien qu’il y a là quelque chose de très fort, une vraie contradiction. Celle-ci est par ailleurs accentuée par la crise climatique, qui force les événements à s’accélérer. Et comme en plus les grands pays capitalistes, à force d’être en compétition, vont vers la guerre pour procéder au repartage du monde, qu’ils espèrent en leur faveur…

C’est tout un monde qui s’écroule, celui des trente glorieuses. Fini le capitalisme qui urbanise et qui permet, au moyen d’une voiture, de se faire un petit chez soi dans une vie encadrée et protégée socialement, alors que le développement économique permet d’acheter plus, de disposer d’une meilleure santé. Tout ce petit monde n’aura été qu’une parenthèse, la vie reprend son cours et l’odieux visage du capitalisme réapparaît pour ce qu’il a toujours été : un opportuniste qui peut faire de bonnes choses uniquement contraint et encore, pour une durée limitée.

C’est à se demander ce qu’ont cru les Français pendant si longtemps. Pensaient-ils vraiment que tout resterait pareil ? Que le monde ne changerait pas ? Que le capitalisme permet à chacun de profiter comme il l’entend ? Les gilets jaunes sont vraiment une naïveté et une réaction qui, dans la société de l’avenir, seront vus comme une capitulation totale sur le plan de la pensée, comme une psychose de gens ayant cru leurs propres mensonges. Peut-être est-ce cela : les Français aiment se raconter des histoires, et apprécient de les entendre, comme des enfants.

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Politique

La Gauche et les européennes de 2019 : les déclarations critiques

La Gauche a réagi très différemment aux résultats des élections européennes de 2019. On peut distinguer deux tendances : il y a ceux pour qui la situation est catastrophique et pour qui un travail de fond est à mener d’urgence. Il y a ceux pour qui au contraire la situation est porteuse d’une situation de rupture. Voici la position des premiers.

Le PCF s’est exprimé par l’intermédiaire de Ian Brossat et de Fabien Roussel. Une partie de la déclaration s’adresse aux membres du PCF, appelant à ce qu’ils ne se démobilisent pas. Une autre partie s’adresse à la Gauche en général et tient somme toute le même discours qu’on peut lire sur Agauche.org : l’extrême-droite en tête c’est une catastrophe, la Gauche est à reconstruire entièrement.

Première leçon. L’extrême-droite arrive en tête de ce scrutin. Rappelons-nous, il y a encore 10 ans, la liste du Front National ne dépassait pas les 6% (…).

Deuxième leçon. La gauche a également sa part de responsabilités. Je prends ma part de responsabilité, il ne s’agit pas de se dédouaner. Ce soir, la gauche est affaiblie, tout est à reconstruire.

J’ai l’intime conviction que l’avenir passe par l’humilité, le travail collectif, le respect mutuel, le refus de la tentation hégémonique. Ecoutons-nous, respectons-nous, travaillons ensemble.

Cette gauche, cette gauche que nous devons reconstruire, que nous allons reconstruire, doit placer au coeur de son projet la justice sociale et l’urgence écologique.

Et soyons clairs: cette reconquête des coeurs et des esprits ne sera possible que dans la rupture avec le libéralisme.

Génération-s a le même positionnement : l’extrême-droite est en première place, la Gauche à reconstruire, cela va être un travail de longue haleine.

Nous n’avons jamais ignoré que notre combat prendrait du temps, exigerait de la constance dans les idées et beaucoup de travail sur le terrain. Nous poursuivrons cet engagement, au service de notre projet d’une société du partage, de la reconstruction et de l’unité de la gauche et des écologistes que le résultat de ce scrutin appelle intensément.

Le NPA tient un discours similaire. L’extrême-droite a un succès qui sonne comme un avertissement, il faut se retrousser les manches.

Plus que jamais, l’heure est à la construction des résistances, à travailler à leur convergence. Les votes ne nous protègent pas des injustices sociales, de la casse des services publics, du racisme et de la xénophobie, du réchauffement climatique, nous en avons encore la preuve ce soir.

Sur les lieux de travail et d’étude, sur les ronds-points, nous devons nous organiser, débattre de comment, ensemble, notre camp social peut reprendre la main et remporter des victoires sur nos revendications. Les résultats de ce soir, s’ils sonnent comme un avertissement, ne font pas disparaître les luttes de ces derniers mois qui doivent continuer.

Ces derniers mots sont une allusion aux gilets jaunes, considérés comme grosso modo quelque chose plus positif qu’autre chose. Ce n’est pas le cas du PCF (mlm), qui voit en eux l’expression d’un apolitisme généralisé, voyant en l’extrême-droite l’affirmation justement du rejet total de la politique.

Pour la grande masse des gens, la vie consiste uniquement à sa propre vie, entre famille et emploi, consommation de divertissement et vacances, avec l’écran de télévision, d’ordinateur ou de smartphone comme nœud central permettant de disposer d’une liaison censée être objective avec la réalité (…).

La passivité politique est la règle, et cela jusqu’à l’apolitisme. L’abstentionnisme n’est même plus un mépris, c’est simplement un dédain, et ceux qui se mobilisent consistent surtout en ceux qui justement affirment l’amertume de ne pouvoir satisfaire leur parfaite intégration dans la consommation et le style de vie capitaliste. Les gilets jaunes sont représentatifs de cette partie de la petite-bourgeoisie qui compte bien perpétuer son existence sociale (…).

Les élections européennes de 2019 sont un autre exemple de victoire du dédain et du populisme, avec la grande abstention, le succès de l’extrême-droite, l’apathie générale à ce sujet (…).

Le capitalisme est ébranlé et en même temps se renforce comme jamais en profitant de ses gigantesques vagues successives d’accumulation de capital et de marchandises. Ce n’est pas un paradoxe, c’est une contradiction et cela est propre au développement non harmonieux du capitalisme lui-même.

Cela en est au point où la notion même de société se voit étouffée. Apolitisme et populisme sont, dans les faits, indissociablement liés. Ils sont le produit du 24 heures sur 24 de la vie sous le capitalisme, tout comme de l’effondrement du niveau culturel de la bourgeoisie, qui elle-même se confond toujours plus avec les possibilités de valoriser le capital.

La position du Parti Révolutionnaire Communistes n’est pas très claire. Il s’est présenté aux élections, sans aucun résultat patent. Cependant, il voit cela comme une avancée dans un contexte interprété comme mauvais.

Le Parti Révolutionnaire Communistes remercie les électrices et électeurs qui ont voté pour la seule liste ouvrant une perspective claire : abolir le capital, l’empêcher de nuire, lui enlever tout pouvoir économique et politique pour confier au peuple la gestion de la société pour le progrès social et humain.

Malgré tous les obstacles rencontrés, liés en premier lieu au financement de la campagne électorale, l’impossibilité d’imprimer les bulletins de vote et les circulaires, les directives de quelques préfectures demandant à retirer les bulletins remis aux maires des communes, malgré l’obstruction des médias, des bulletins du Parti Révolutionnaire Communistes ont été utilisés dans plus de 60 départements confirmant ainsi notre ancrage national (…).

La « gauche » et ses nombreuses ramifications sont en échec total, la recomposition politique se poursuit visant à centrer le combat pour le pouvoir politique entre l’équipe dirigeante et l’extrême droite, phénomène déjà observé dans d’autres pays d’Europe.

Cette recomposition politique vise à marginaliser les partis traditionnels, on voit à quel point l’action des « gilets jaunes » a été utilisée pour servir les objectifs politiques des serviteurs du capital (…).

Il n’y a que les luttes pour freiner et stopper le capital, c’est le seul outil dont disposent les travailleurs pour y parvenir. L’amplification, la convergence des luttes qui n’ont pas cessé doit devenir l’objectif urgent et essentiel de la classe ouvrière pour satisfaire les revendications, augmenter les salaires, les pensions et allocations sociales… (…) Il n’y a pas de temps à perdre.

Enfin, le ton est relativement similaire à la France Insoumise (qui n’est habituellement pas considéré comme de gauche par Agauche.org). Citons ici la déclaration de Jean-Luc Mélenchon :

« Ce n’est pas une soirée heureuse que celle-ci. Pour la seconde fois en France, l’extrême-droite gagne l’élection européenne. Ainsi se confirme que la France prend une pente que nous continuerons à combattre par tous les moyens dont nous disposons.

Monsieur Macron semble avoir perdu le match qu’il avait voulu installer de façon si irresponsable. De fait, la victoire de l’extrême-droite, l’effondrement du pouvoir dans le match qu’il avait engagé et le niveau de l’abstention qui reste considérablement élevée montrent que notre pays s’enfonce dans une crise profonde.

Nul n’en aperçoit à cette heure d’issue positive. Cela restera notre responsabilité de tâcher de l’ouvrir. De continuer à tracer le chemin que nous avions d’abord inauguré si vaillamment.

Dans ce contexte, notre résultat est très décevant. Il n’est pas à la hauteur de nos espérances, cela va de soi, et encore moins de nos efforts. Mais je veux saleur Manon Aubry et ses colistières et colistiers qui ont, dans cette bataille, jeté toute leur force de conviction et d’espérance (…).

La pente qui est prise est mauvaise. Il est possible de l’inverser. Mais cela reste impossible si chacun, en conscience, ne prend pas pour lui même ses responsabilités.

C’est l’heure des combats et des caractères. La France en a toujours disposé en abondance. Je forme le vœux qu’elle sache se manifester et se rassembler pour parvenir aux objectifs qu’elle doit se donner : libérer une bonne fois le pays, le système de notre pays, de la pesanteur économique anti-écologique qui pèsent sur lui et des ombres que projette sur son destin l’extrême-droite.

Vive la République, vive la France.»

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Politique

La Gauche et les européennes de 2019 : les déclarations optimistes

Il y a une partie de la Gauche qui considère que la situation est finalement bonne, que les gilets jaunes notamment ont exprimé une forme de révolte qui correspondrait au climat général. Partant de là, il n’y aurait qu’à pousser pour que cela marche. Les élections européennes sont vues comme un échec pour tout le monde, sauf pour eux.

On notera qu’au-delà des déclarations suivantes, la majorité de ce qu’on appelle l’ultra-gauche n’a même pas fait de communiqué à la suite des élections. Il y a eu des appels au boycott avant celle-ci, mais rien à la suite de celle-ci. Ce n’est pas considéré comme une actualité. On notera au passage que dans un autre genre, le Parti socialiste n’a lui non plus pas fait de déclaration !

De tous les communiqués qu’on peut qualifier de relativement triomphalistes à la suite des élections européennes de 2019, le plus marquant est indubitablement celui de Lutte Ouvrière. Il est d’une brutalité extrême, qui tranche étrangement totalement avec la posture précédente, caractérisée par une regard très critique quant aux gilets jaunes et à la capacité de lutte des ouvriers.

Puisant dans ses racines historiquement « gauchistes », Lutte Ouvrière se réjouit ouvertement de l’effondrement de la Gauche, qui pour elle permet l’ouverture d’un espace:

Au moment où la démocratie bourgeoise est minée par la faillite du capitalisme, par la crise économique, par la menace de guerres et de catastrophes écologiques, d’aucuns ont pour ambition de reconstruire la gauche.

La gauche, tant qu’elle avait un certain crédit parmi les travailleurs, a été un moyen d’enchainer le mouvement ouvrier au système institutionnel de la bourgeoisie. Cet instrument s’est brisé en remplissant cette tâche, et tous ceux qui veulent le réparer trompent les travailleurs alors que la société est poussée vers le précipice (…).

Les résultats de Lutte Ouvrière, pour modestes qu’ils soient, confirment la présence d’un courant politique qui maintient la tradition révolutionnaire du mouvement ouvrier, l’internationalisme face à la montée des nationalismes, le drapeau rouge face au drapeau tricolore de la bourgeoisie

Du côté du PRCF, la principale structure issue de la « gauche du PCF » des années 1990, le ton est assez triomphaliste également. Il est considéré que tout le monde échoue, que l’abstention témoignerait d’un rejet et qu’il y a ainsi la place pour l’alternative : le « FREXIT progressiste ».

La vie du pays ne dépend pas (seulement) des élections mais dans le contexte actuel dans les luttes populaires convergentes dont les GJ jaunes ont donné l’exemple avec le soutien de 75 % de la population, permettant au peuple de se constituer en sujet historique collectif et pas en individus isolées dans… l’isoloir… L’euro-politique antisociale et antidémocratique va se poursuivre, les résistances aussi, à nous de construire un front de luttes en le portant par la perspective du frexit progressistes…

Plus que jamais, une seule solution s’impose : FREXIT PROGRESSISTE !

Fier d’avoir porté la voix majoritaire des travailleurs de France, celle de l’abstention citoyenne, honteusement censurée par tous les médias et d’avoir mené campagne grâce à la mobilisation entière et enthousiaste de toutes et tous ses militants, le PRCF continuera de porter les idées et les propositions communistes dans un esprit d’ouverture, mais aussi de fermeté idéologique, face aux terrifiantes euro-illusions portées par les ennemis de classe. Plus que jamais, une seule solution s’impose : FREXIT PROGRESSISTE !

Le PRCF a également souligné l’importance qu’il y a selon lui du fait qu’Emmanuel Macron a mis en place un « duel » entre lui et Marine Le Pen, qu’il s’agirait d’un piège. C’est là-dessus que s’exprime surtout le PCOF, qui dit que l’extrême-droite est très loin d’avoir l’hégémonie dans les masses populaires.

La Gauche républicaine et socialiste s’est contenté d’un simple tweet :

La @Gauche_RS prend acte de la sanction infligée à la gauche. Nous félicitons notre animateur national @emmanuelmaurel pour sa réélection, aux côtés de @ManonAubryFr. Parlementaire de combat et de gauche, son action aura pour horizon la rupture avec le néolibéralisme de l’UE !

Le Courant communiste révolutionnaire du NPA  voit en les élections un simple aléa dans un vaste parcours historique de lutte.

Ce n’est donc qu’en apparence que cette dernière semaine et la séquence post-élections auront permis d’effacer les Gilets jaunes du paysage médiatique et politique. Les 7 mois de contestation historique qu’a connu le pays ne risquent pas de disparaître comme ça, et pourraient au contraire annoncer de nouveaux épisodes de luttes de classe qui n’en ont pas fini de mettre des bâtons dans les roues des projets du gouvernement et du patronat.