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Communiqué du Parti socialiste appelant à la protection des forces de l’ordre

Le Parti socialiste a raison d’appeler à la protection des forces de l’ordre dans leur mission vitale de surveillance du confinement. On peut bien penser ce qu’on veut de l’Etat actuel, de la police et des gendarmes, qu’ils sont vendus au capitalisme ou bien qu’ils sont leurs outils, mais dans une crise sanitaire d’une telle envergure, ils sont en première ligne. Ils ne sont pas là dans une ambiance de guerre civile, contrairement aux vains racontars de l’ultra-gauche.

Les policiers et les gendarmes ne tuent pas, ne répriment pas : ils servent la population en veillant à ce que le confinement réussisse. La mission de surveillance du confinement par les forces de l’ordre est incontournable ; elle n’est pas au-dessus des classes, mais on doit faire avec ce qu’on a, à moins de nier la gravité de la situation.

S’il y a une chose à regretter dans le communiqué du Parti socialiste, c’est que tout cela est vu sous un angle administratif et qu’il n’est nullement considéré que c’est le peuple lui-même qui devrait faire la police et forcer au confinement. C’est d’ailleurs la seule manière que cela marche réellement.

Voici le communiqué de presse du Parti socialiste :

« Les forces de sécurité doivent disposer de masques de protection et de gel hydroalcoolique dans le cadre de leur mission de lutte contre la propagation du Covid-19.

Depuis le 17 mars 2020, plus de 100 000 policiers et gendarmes ont été mobilisés pour permettre la mise en oeuvre des consignes de sécurité et des restrictions de déplacement annoncées par le président de la République.

Or, avec près de 900 000 personnes contrôlées à ce jour, policiers et gendarmes sont plus que jamais exposés au risque de contamination. Il est urgent de mettre à leur disposition du matériel de protection, mais également de mieux adapter les consignes de sécurité aux réalités du terrain.

Manque de matériel de protection 
Dès le 17 mars, les policiers et gendarmes nous ont alerté sur le manque de matériel de protection, notamment de masques et de gel hydroalcoolique. Le 25 mars, le ministère de l’Intérieur a annoncé sa décision de mettre à la disposition des Agences régionales de santé un million de masques FFP2, stock initialement attribué à la gendarmerie nationale. Cette décision a été reconnue par l’ensemble des syndicats de police et de gendarmerie, ainsi que par l’ensemble de la classe politique, au vu de l’urgence absolue à soutenir notre équipe soignante. Cependant, l’absence d’alternatives proposées a soulevé l’inquiétude et l’incompréhension de nos forces de l’ordre. Le 27 mars, Christophe Castaner, ministre de l’Intérieur, a annoncé une première distribution de 300 000 masques à l’intention des forces de sécurité, mis à disposition par le groupe La Poste. Cela ne permettra malheureusement pas de répondre de manière satisfaisante au manque de matériel de protection, en cours depuis le début de la mobilisation.

Difficulté d’appliquer les « gestes barrières » sur le terrain, notamment la distance d’un mètre lors des contrôles 
Nous avons également été interpellés concernant la difficulté des policiers et des gendarmes à appliquer les « gestes barrières » sur le terrain. Les distances de sécurité seraient mal comprises par la population, et la distanciation de sécurité d’un mètre serait difficile à respecter lors de certains contrôles, fixes ou mobiles. Les policiers et les gendarmes ne sont pas suffisamment protégés par la seule mise en place des “gestes barrières” : les consignes doivent être mieux adaptées à la réalité du terrain.

Incompréhension face à certaines consignes du ministère de l’Intérieur 
Laurent Nuñez, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Intérieur, a récemment réaffirmé que les policiers et gendarmes ne devaient recourir au port du masque qu’en cas de contrôle de personnes « apparemment symptomatiques ». Or, en l’absence de test, il est impossible de savoir avec certitude si une personne est porteuse ou non du Covid-19 ; ce qui rend difficile l’application d’une telle consigne et suscite de nombreuses interrogations sur son efficacité.

Face à cela, il est urgent de répondre de mettre en place un dispositif garantissant la préservation effective de la santé des policiers et gendarmes présents sur le terrain.

Enfin, à l’ensemble des forces de sécurité, nous souhaitons également leur redire toute notre admiration et notre reconnaissance pour leur courage et leur engagement dans la lutte contre le Covid-19. »

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Crise sanitaire: le yakafocon tragique de la petite-bourgeoisie en panique

Il faut arrêter le confinement ! Il faut réquisitionner et lancer des productions des produits nécessaires ! Relocalisons ! Nationalisons ! C’est l’ère du yakafocon. La petite-bourgeoisie en panique s’imagine que gesticuler comme l’ont fait les gilets jaunes suffit alors que le capitalisme est rentré dans le mur. La seule chose qui aurait pu empêcher la situation actuelle, c’est qu’à Wuhan tout le monde eut été végétalien. Le reste, c’est de la démagogie.

Il existe une « coalition » saisissant le conseil d’État, avec Act Up-Paris, ADELICO (Association de défense des libertés constitutionnelles), Collectif Inter-Hôpitaux, Collectif Inter-Urgences, Syndicat CNI – Coordination nationale infirmière / interprofessionnelle, Observatoire de la transparence dans les politiques du médicament. Elle reflète parfaitement la peur panique d’une petite-bourgeoisie qui a cru au capitalisme et qui voit le sol se dérober sous ses pieds.

Il est appelé à ce que, par magie, le capitalisme sache faire ce qu’il ne sait pas faire :

« La France dispose du savoir-faire, des infrastructures, capacités industrielles, notamment de production, pour mettre en place des mesures décisives maintenant.

La production nationale de masques, de ventilateurs mécaniques et de matériels de réanimation comme des pousses seringues qui manquent pour prendre en charge les patients en réanimation et dans d’autres services de soins intensifs (y compris pour des patients non COVID) et pour accompagner les patients en fin de vie, permettrait de répondre à la demande qui ne cesse d’augmenter avec des stocks qui s’amenuisent chaque jour. »

C’est là soit de la démagogie pure et simple, soit de la folie. Il est totalement mensonger ou fou de dire que dans un pays individualiste, où règne la propriété privée, on puisse disposer d’une telle capacité de décision, d’une telle transformation des mentalités, d’une telle aisance à modifier le tissu productif.

Seulement voilà, les petits-bourgeois ont la trouille. Ce retour du collectif les traumatise et il n’est pas étonnant ici de trouver Act Up, fer de lance historique du libéralisme libertaire. Tout est fait pour nier la crise, pour nier qu’il faut des mesures étatiques, de dimension collective. La « gauche » libérale culturellement se heurte ici de plein fouet à la réalité.

Qui plus est, la crise est fondamentalement liée au sort des animaux sur la planète. Mais les petits-bourgeois ne vont certainement pas assumer la discipline végétalienne. Pourquoi pas devenir vegan pendant qu’on y est ! Hors de question pour ces gens. Il faut donc trouver un fautif.

Un fautif qui ne peut être que l’État, ce représentant de l’ogre collectif qui fait saisir d’effroi le petit-bourgeois qui ne veut aucun contrôle, fut-ce en situation de crise ! Ainsi les petites entreprises parlent déjà parfois de relancer l’activité et tous les démagogues se lancent dans la dénonciation de la « nullité » de l’État, qui empêche les individus de continuer à tout faire comme avant. François Ruffin est ici d’une démagogie abjecte, maniant le mensonge de manière forcenée :

« Si des soignants décèdent aujourd’hui ce n’est pas à cause du virus : c’est à cause de leur nullité. Parce que, dans les hôpitaux français, on se croirait dans un pays du tiers-monde, économisant sur les masques, en appelant aux dons, recevant des stocks moisis. »

« Parce que, depuis un an que les soignants protestent, font grève, voire démissionnent, eux n’entendent rien, ne voient rien, ferment des lits, en obsédés du porte-monnaie, en experts-comptables de la politique. »

Dire que les hôpitaux français sont le tiers-monde, alors qu’il s’agit littéralement des meilleurs du monde, c’est incroyable. Mais tout cela a un but : nier que le ciel soit tombé sur la tête du capitalisme et de l’humanité massacrant la planète avec son béton et ses monocultures. Il faudrait « autre chose » : c’est le retour de l’altermondialisme, comme avec la tribune toute récente sur « le jour d’après ».

Voilà pourquoi tant Jean-Luc Mélenchon que François Ruffin dénonce le confinement, cette preuve du caractère absolu de la crise. Ils en parlent comme si c’était une mesure « moyen-âgeuse », afin de faire croire qu’autre chose est possible, que tout aurait pu été gérer différemment.

Eh bien, non. L’humanité a semé son béton, elle a récolté. Elle n’a pas fini de récolter, d’ailleurs, tellement elle trouble toute forme de vie sur la planète, tellement elle engloutit la vie sauvage. Mais Jean-Luc Mélenchon peut bien s’agiter, cela ne saurait cacher que, comme il l’a d’ailleurs dit dès le départ, plus rien ne sera pareil.

Il s’aperçoit finalement qu’il regrette cela, qu’il aimerait simplement mieux « gérer » la crise, et non pas que tout change. C’est trop tard. C’est Rosa Luxembourg qui a raison et pas lui : c’est soit le socialisme, soit le retour à la barbarie. Comme cette dernière hypothèse est impossible, alors ce sera la grande remise en cause pour assumer l’esprit collectif complet.

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Décès de Patrick Devedjian, figure de la Droite libérale française

Patrick Devedjian est mort à 75 ans ce week-end, après avoir contracté le Covid-19. Il était une figure de la Droite française, profondément libéral et totalement opposé au Socialisme.

Patrick Devedjian est l’exemple même d’une intégration ratée, ou réussie, selon comment on voit les choses. D’origine arménienne, il a assumé un esprit démocratique en étant au début des années 1980 l’avocat de membres de l’ASALA. Cette organisation arménienne clandestine avait mené des actions armées contre des intérêts turcs et il a été très lyrique en leur défense, alors que la veuve de Missak Manouchian était elle-même venue les soutenir au procès.

Mais Patrick Devedjian avait d’autres préoccupations que les causes démocratiques et le romantisme politique, fut-il parfaitement juste. Comme nombre d’immigrés, il préféré être un Rastignac. Avoir comme clients l’ASALA, cela ne vaut pas d’avoir pour ceux-ci Jacques Chirac et Charles Pasqua.

Pour arriver à cela, Patrick Devedjian commença par vouloir être plus français que les Français, en participant dans les années 1960 au mouvement d’extrême-Droite « Occident ». Puis il fit ses classes dans la Droite, ayant notamment été porte-parole du RPR puis présidant l’UMP (les structures ayant précédé LR). Il incarnait le libéralisme le plus strict sur le plan économique et le conservatisme mou.

Avec succès : au moment de son décès, Patrick Devedjian présidait le département des Hauts-de-Seine, aboutissement d’une carrière où il a été ministre à plusieurs reprises, ainsi que maire et député. Il avait l’impression d’être une sorte de petit monarque, comme on le voit dans l’interview extravagante pour la revue bobo Technikart en novembre 2019, interview d’ailleurs menée par Bertrand Burgalat, figure bobo lui-même une ancienne figure de l’extrême-Droite.

C’est Patrick Devedjian qui a par exemple dirigé la privatisation de France Télécoms ; il fut aussi choisi par François Fillon comme ministre chargé du plan de relance suite à la crise financière de 2008. Dans la même veine libérale, c’est lui qui a piloté les très importantes lois de « l’acte II de la décentralisation », consistant en un affaiblissement de la puissance publique d’État.

Ce libéralisme était profondément incarné par Patrick Devedjian, pour qui Raymond Aron, un intellectuel anticommuniste de renom et incontournable à Droite, était une figure d’importance et pour qui il collabora à la revue libérale Contrepoints. Il expliquait par exemple dans un livre que Raymond Aron a fait de lui « un démocrate jusqu’à la dernière de mes molécules » et qu’il a « transmuté le plomb de l’extrême droite en or de la démocratie ».

Les mots de Nicolas Sarkozy, avec qui il eu pourtant de nombreux conflits et divergences, illustrent très bien en quoi c’était une figure pour la Droite :

«Patrick Devedjian était un homme passionné, entier, sincère, engagé. Il incarnait la politique comme je l’aime, avec des sentiments, des convictions, du panache. Je suis fier de l’avoir eu à mes côtés. Je veux dire à ses proches ma vive émotion et ma tristesse infinie»

C’est-à-dire qu’on avait avec Patrick Devedjian un bourgeois français tout ce qu’il y a de plus caractéristique, avec du « panache » dans les propos, mais finalement toujours beaucoup de mesure dans leur application, reconnaissant la civilisation (il était collectionneur d’art ancien, administrateur du musée du Louvre, etc.), mais assumant en même temps de tout renverser par le libéralisme économique.

On se demandera alors bien pourquoi des gens comme Benoît Hamon ou Ian Brossat, censés être pour leur part des figures de la Gauche, ont pu se dire que c’était une bonne idée de saluer sa mémoire. Quelle drôle de conceptions des convictions politiques, surtout quand il est bien connu que Patrick Devedjian n’hésitait pas devant les coups fourrés, en caricature de l’homme politique de Droite.

 

Un homme sincèrement et authentiquement libéral de Droite comme Patrick Devedjian n’aurait jamais commis une telle faute politique dans le cas inverse, puisque lui assumait de vouloir que la Gauche disparaisse. En ce sens, Patrick Devedjian a été cohérent : en abandonnant la Cause démocratique arménienne, il s’est précipité dans le cynisme de la Droite, dans le carriérisme confortable. Rien de plaisant, donc.

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Crise sanitaire et réactivation du véritable fascisme français

Le fascisme est un romantisme réactionnaire ; il ne peut s’appuyer que sur des mentalités propres à un pays. En France, ce fascisme consiste en la nostalgie des campagnes à l’ancienne, d’une spiritualité non marquée par l’urbanisme, avec également la fascination pour le « paysage ». La crise sanitaire va puissamment le renforcer, donnant aux néo-zadistes un élan toujours plus franchement d’extrême-Droite.

Les zadistes ont été l’avant-garde du fascisme français et les gilets jaunes des proto-fascistes. Avec la crise sanitaire, toute cette accumulation romantique réactionnaire va être en mesure de se structurer. Elle l’aurait fait de toutes façons, mais là la nostalgie d’un passé idéalisé va être encore plus aisée à mettre en avant.

Le meilleur moyen pour saisir cela, c’est de se pencher sur le communiqué suite au Covid-19 d’Extinction Rébellion, cette escroquerie pseudo-activiste née dans le cadre de la médiatisation de Greta Thunberg.

Ces pseudos écolos ne sont pas seulement incapables de relier la crise sanitaire actuelle à l’écologie, ce que pourtant même 30 millions d’amis fait dans un excellent communiqué (C’est en altérant la vie sauvage que l’Homme accroît le risque d’épidémies). Rien qu’en voyant cela, on voit qu’Extinction Rébellion n’est qu’une escroquerie d’aventuriers petits-bourgeois malades du capitalisme.

Mais on sait également où mène l’aventurisme petite-bourgeois : au fascisme. Et lorsqu’on voit qu’il est parlé de « culture régénératrice », on voit qu’un cap est passé. Seuls des fascistes peuvent parler ainsi, peuvent penser ainsi.

Dans l’histoire des idées, seul le fascisme prétend régénérer. Le Socialisme affirme qu’il faut aller vers le futur, le libéralisme que le présent émancipe. Le fascisme place lui dans le passé la situation idéale qu’il s’agirait de rétablir – contre le libéralisme et contre le Socialisme.

Les zadistes n’ont jamais dit autre chose, les gilets jaunes non plus. On va en France vers l’établissement de l’idéologie de la troisième voie, avec l’identitarisme régionaliste, la décentralisation anti-étatique, l’idéologie de l’auto-suffisance économique et spirituelle, le repli individualiste sur la petite propriété paisible, le culte de « la terre qui, elle, ne ment pas », la fascination pour un artisanat idéalisé et abstrait.

Marine Le Pen représentait tout autant le Fascisme, comme Alain Soral et Dieudonné, et bien d’autres. Cependant, il s’agissait là de Fascisme par en haut. Le mouvement de Marine Le Pen, malgré ses immenses succès électoraux, n’a jamais été en mesure d’asseoir un mouvement populaire ; son parti politique reste purement électoral, sans base organisée avec une dimension de masse.

Les sociaux-réactionnaires, avec leur discours nostalgique, sont eux en mesure de donner au Fascisme français une base de masse. Et ces gens là viennent de la Gauche au sens le plus général du terme, ils viennent plus précisément de l’anarchisme, du proudhonisme, du spiritualisme, de l’existentialisme. Leur scène est un très vaste monde associatif, dont les principaux acteurs signaient début mars le « pacte du pouvoir de vivre ».

On reconnaît ces sociaux-réactionnaires au moyen de critères très précis : le mouvement ouvrier n’existe pas pour eux, ils haïssent le véganisme, leur vision du monde revient au village d’Astérix et Obélix cherchant à se préserver de l’empire romain de la finance.

Ces gens sont les ennemis de la Gauche et plus vite ils sont démasqués et dénoncés, mieux c’est.

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«Jour d’après»: tribune associative et syndicale contre le «néolibéralisme»

Dix-huit dirigeants associatifs et syndicaux (CGT, Attac, Greenpeace, Oxfam, Unef, confédération paysanne, etc.) signent une tribune contre le « néolibéralisme », appelant à préparer le « jour d’après » la crise sanitaire du Covid-19.

C’est véritablement un voyage dans le temps, puisqu’on y retrouve toutes les thèses de l’altermondialisme des années 2000. Il suffirait de circonscrire la finance et d’avoir confiance en le « vrai capitalisme » encadré et soutenu par l’État.

On ne peut qu’être éberlué d’une telle démagogie, un tel rêve social-réactionnaire, réduisant ces représentants à de véritables babos, alors que la crise n’en est qu’à ses débuts et qu’on va vers une conflagration sanitaire et sociale. À moins qu’il ne s’agisse déjà d’une expression de grande peur par rapport à la situation prochaine.

« En mettant le pilotage de nos sociétés dans les mains des forces économiques, le néolibéralisme a réduit à peau de chagrin la capacité de nos États à répondre à des crises comme celle du Covid. La crise du coronavirus qui touche toute la planète révèle les profondes carences des politiques néolibérales. Elle est une étincelle sur un baril de poudre qui était prêt à exploser. Emmanuel Macron, dans ses dernières allocutions, appelle à des « décisions de rupture » et à placer « des services (…) en dehors des lois du marché ». Nos organisations, conscientes de l’urgence sociale et écologique et donnant l’alerte depuis des années, n’attendent pas des discours mais de profonds changements de politiques, pour répondre aux besoins immédiats et se donner l’opportunité historique d’une remise à plat du système, en France et dans le monde.

Dès à présent, toutes les mesures nécessaires pour protéger la santé des populations celle des personnels de la santé et des soignant·e·s parmi lesquels une grande majorité de femmes, doivent être mises en œuvre, et ceci doit largement prévaloir sur les considérations économiques. Il s’agit de pallier en urgence à la baisse continue, depuis de trop nombreuses années, des moyens alloués à tous les établissements de santé, dont les hôpitaux publics et les Ehpad. De disposer du matériel, des lits et des personnels qui manquent : réouverture de lits, revalorisation des salaires et embauche massive, mise à disposition de tenues de protection efficaces et de tests, achat du matériel nécessaire, réquisition des établissements médicaux privés et des entreprises qui peuvent produire les biens essentiels à la santé, annulation des dettes des hôpitaux pour restaurer leurs marges de manœuvre budgétaires… Pour freiner la pandémie, le monde du travail doit être mobilisé uniquement pour la production de biens et de services répondant aux besoins essentiels de la population, les autres doivent être sans délai stoppées. La protection de la santé et de la sécurité des personnels doivent être assurées et le droit de retrait des salarié·e·s respecté.

La réponse financière de l’État doit être d’abord orientée vers tou·te·s les salarié·e·s qui en ont besoin, quel que soit le secteur d’activité, et discutée avec les syndicats et représentant·e·s du personnel, au lieu de gonfler les salaires des dirigeant·e·s ou de servir des intérêts particuliers. Pour éviter une très grave crise sociale qui toucherait de plein fouet chômeurs·euses et travailleurs·euses, il faut interdire tous les licenciements dans la période. Les politiques néolibérales ont affaibli considérablement les droits sociaux et le gouvernement ne doit pas profiter de cette crise pour aller encore plus loin, ainsi que le fait craindre le texte de loi d’urgence sanitaire.

Selon que l’on est plus ou moins pauvre, déjà malade ou non, plus ou moins âgé, les conditions de confinement, les risques de contagion, la possibilité d’être bien soigné ne sont pas les mêmes. Des mesures supplémentaires au nom de la justice sociale sont donc nécessaires : réquisition des logements vacants pour les sans-abris et les très mal logés, y compris les demandeurs·euses d’asile en attente de réponse, rétablissement intégral des aides au logement, moratoire sur les factures impayées d’énergie, d’eau, de téléphone et d’internet pour les plus démunis. Des moyens d’urgence doivent être débloqués pour protéger les femmes et enfants victimes de violences familiales.

Les moyens dégagés par le gouvernement pour aider les entreprises doivent être dirigés en priorité vers les entreprises réellement en difficulté et notamment les indépendants, autoentrepreneurs, TPE et PME, dont les trésoreries sont les plus faibles. Et pour éviter que les salarié·e·s soient la variable d’ajustement, le versement des dividendes et le rachat d’actions dans les entreprises, qui ont atteint des niveaux record récemment, doivent être immédiatement suspendus et encadrés à moyen terme.

Des mesures fortes peuvent permettre, avant qu’il ne soit trop tard, de désarmer les marchés financiers : contrôle des capitaux et interdiction des opérations les plus spéculatives, taxe sur les transactions financières… De même sont nécessaires un contrôle social des banques, un encadrement beaucoup plus strict de leurs pratiques ou encore une séparation de leurs activités de dépôt et d’affaires.

La Banque centrale européenne (BCE) a annoncé une nouvelle injection de 750 milliards d’euros sur les marchés financiers. Ce qui risque d’être à nouveau inefficace. La BCE et les banques publiques doivent prêter directement et dès à présent aux États et collectivités locales pour financer leurs déficits, en appliquant les taux d’intérêt actuels proches de zéro, ce qui limitera la spéculation sur les dettes publiques. Celles-ci vont fortement augmenter à la suite de la « crise du coronavirus ». Elles ne doivent pas être à l’origine de spéculations sur les marchés financiers et de futures politiques d’austérité budgétaire, comme ce fut le cas après 2008.

Une réelle remise à plat des règles fiscales internationales afin de lutter efficacement contre l’évasion fiscale est nécessaire et les plus aisés devront être mis davantage à contribution, via une fiscalité du patrimoine et des revenus, ambitieuse et progressive.

Par ces interventions massives dans l’économie, l’occasion nous est donnée de réorienter très profondément les systèmes productifs, agricoles, industriels et de services, pour les rendre plus justes socialement, en mesure de satisfaire les besoins essentiels des populations et axés sur le rétablissement des grands équilibres écologiques. Les aides de la Banque centrale et celles aux entreprises doivent être conditionnées à leur reconversion sociale et écologique : maintien de l’emploi, réduction des écarts de salaire, mise en place d’un plan contraignant de respect des accords de Paris… Car l’enjeu n’est pas la relance d’une économie profondément insoutenable. Il s’agit de soutenir les investissements et la création massive d’emplois dans la transition écologique et énergétique, de désinvestir des activités les plus polluantes et climaticides, d’opérer un vaste partage des richesses et de mener des politiques bien plus ambitieuses de formation et de reconversion professionnelles pour éviter que les travailleurs·euses et les populations précaires n’en fassent les frais. De même, des soutiens financiers massifs devront être réorientés vers les services publics, dont la crise du coronavirus révèle de façon cruelle leur état désastreux : santé publique, éducation et recherche publique, services aux personnes dépendantes…

La « crise du coronavirus » révèle notre vulnérabilité face à des chaînes de production mondialisée et un commerce international en flux tendu, qui nous empêchent de disposer en cas de choc de biens de première nécessité : masques, médicaments indispensables, etc. Des crises comme celle-ci se reproduiront. La relocalisation des activités, dans l’industrie, dans l’agriculture et les services, doit permettre d’instaurer une meilleure autonomie face aux marchés internationaux, de reprendre le contrôle sur les modes de production et d’enclencher une transition écologique et sociale des activités.

La relocalisation n’est pas synonyme de repli sur soi et d’un nationalisme égoïste. Nous avons besoin d’une régulation internationale refondée sur la coopération et la réponse à la crise écologique, dans le cadre d’instances multilatérales et démocratiques, en rupture avec la mondialisation néolibérale et les tentatives hégémoniques des États les plus puissants. De ce point de vue, la « crise du coronavirus » dévoile à quel point la solidarité internationale et la coopération sont en panne : les pays européens ont été incapables de conduire une stratégie commune face à la pandémie. Au sein de l’Union européenne doit être mis en place à cet effet un budget européen bien plus conséquent que celui annoncé, pour aider les régions les plus touchées sur son territoire comme ailleurs dans le monde, dans les pays dont les systèmes de santé sont les plus vulnérables, notamment en Afrique.

Tout en respectant le plus strictement possible les mesures de confinement, les mobilisations citoyennes doivent dès à présent déployer des solidarités locales avec les plus touché·e·s, empêcher la tentation de ce gouvernement d’imposer des mesures de régression sociale et pousser les pouvoirs publics à une réponse démocratique, sociale et écologique à la crise.

Plus jamais ça ! Lorsque la fin de la pandémie le permettra, nous nous donnons rendez-vous pour réinvestir les lieux publics et construire notre « jour d’après ». Nous en appelons à toutes les forces progressistes et humanistes, et plus largement à toute la société, pour reconstruire ensemble un futur, écologique, féministe et social, en rupture avec les politiques menées jusque-là et le désordre néolibéral.

Signataires

Khaled Gaiji, président des Amis de la Terre France
Aurélie Trouvé, porte-parole d’Attac France
Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT
Nicolas Girod, porte-parole de la Confédération paysanne
Benoit Teste, secrétaire général de la FSU
Jean-François Julliard, directeur général de Greenpeace France
Cécile Duflot, directrice générale d’Oxfam France
Eric Beynel, porte-parole de l’Union syndicale Solidaires
Clémence Dubois, responsable France de 350.org
Pauline Boyer, porte-parole d’Action Non-Violente COP21
Léa Vavasseur, porte-parole d’Alternatiba
Sylvie Bukhari-de Pontual, présidente du CCFD-Terre Solidaire
Jean-Baptiste Eyraud, porte-parole de Droit au Logement
Lisa Badet, vice-présidente de la FIDL, Le syndicat lycéen
Jeanette Habel, co-présidente de la Fondation Copernic
Katia Dubreuil, présidente du Syndicat de la magistrature
Mélanie Luce, présidente de l’UNEF
Héloïse Moreau, présidente de l’UNL »

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Les inévitables ordonnances gouvernementales dans l’état d’urgence sanitaire

Les syndicats ont le droit de critiquer les ordonnances gouvernementales, et même c’est tout à fait leur rôle. Mais politiquement elles sont inévitables et c’est là que la limite des syndicats est patente.

Depuis plusieurs jours et surtout depuis le conseil des ministres d’hier, une large partie de la Gauche est vent debout contre les mesures des ordonnances, qui visent à enchaîner encore plus les travailleurs au travail. Réduction du temps de repos entre deux jours de travail, allongement de la durée de travail à 12 heures par jour, passage à 60 heures hebdomadaires…

Quand on est syndicaliste, c’est normal de dénoncer tout cela : c’est son travail syndical. Mais pourquoi diable tant de partis politiques de gauche s’empressent de dénoncer ces mesures pareillement ? C’est là ne pas comprendre la différence entre la politique et le syndicalisme.

Le syndicalisme a un horizon limité au travail concret dans les entreprises. Quand on lui dit : on met davantage de pression, il doit résister. C’est dans l’ordre des choses. Mais politiquement, toutes ces mesures sont en même temps inévitables. Même quand on est de gauche. Surtout quand on est de gauche.

Pourquoi ? Parce que ces mesures sont sociales, elles sont collectives. Ces ordonnances disent que la société dépasse les droits individuels. C’est tout à fait de gauche. Cela montre que l’État est obligé de rompre avec sa propre mise en perspective : il est obligé de socialiser.

Il y a bien entendu un souci : cette socialisation sera, à terme, la socialisation des pertes sur le dos des travailleurs. Et c’est là où la Gauche doit dire : oui à ces ordonnances, mais la bourgeoisie doit passer à la caisse pour tout cela. C’est là le rôle politique de la Gauche.

Que les syndicalistes ne veulent pas de politique, qu’ils refusent malheureusement de se soumettre à la Gauche politique, c’est leur défaut. Mais que la Gauche politique elle-même ne soit pas à la seule hauteur possible – celle de l’État – voilà qui ne va pas.

Encore faut-il vouloir assumer l’État. Le Monde a par exemple publié une tribune de l’avocat pénaliste Raphaël Kempf : « Il faut dénoncer l’état d’urgence sanitaire pour ce qu’il est, une loi scélérate ». C’est naturellement paranoïaque. Cependant, c’est dans l’ordre des choses pour un avocat qui fait son petit business de la dénonciation de l’État.

Seulement, la Gauche a autre chose à faire que de se plaindre. Soit elle veut assumer ses responsabilités, vouloir que tout le pouvoir lui revienne… Et donc dire : oui aux ordonnances, mais pas forcément comme cela et en plus la facture doit revenir aux classes dominantes.

Soit elle fait la même chose que les populistes et l’ultra-gauche, c’est-à-dire user de la démagogie arguant que les « flics » sont tous des pervers n’attendant que d’assassiner, le gouvernement des marionnettes et le président le super-salaud. On a un bon exemple de ce type d’erreur avec le panneau de Lutte Ouvrière à Roubaix.

Ce qui est écrit peut tout à fait être juste. Mais Lutte Ouvrière est-il prêt, aujourd’hui, à remplacer tous les ministres et à gérer la crise du covid-19 ? Il ne le peut pas. Or, c’est de cela qu’il s’agit. Comment les gens peuvent-ils faire confiance à la Gauche, si celle-ci arrive toujours après la bataille, en disant qu’il faut simplement en tirer des conclusions ?

S’il s’agissait de tirer des conclusions seulement, la Gauche serait au pouvoir dans le monde entier depuis longtemps. On ne peut pas dire : il aurait fallu plus de lits d’hôpitaux, plus d’unités de soins intensifs, on les veut maintenant, tout de suite ! C’est là de la démagogie. C’est là ne pas avoir mené le travail en amont, pour former un gouvernement parallèle, un niveau étatique parallèle, qui seul est capable de rivaliser avec le gouvernement, l’État.

N’importe quel gouvernement aurait mis en place des ordonnances gouvernementales dans l’état d’urgence sanitaire. Soit la Gauche reste à l’extérieur de ce niveau de complexité, soit elle l’assume, pour prendre le pouvoir.

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Communiqué de la CGT sur les ordonnances du gouvernement

Voici le communiqué de la CGT s’inquiétant des ordonnances du gouvernement concernant le droit du travail :

« ORDONNANCES : LE GOUVERNEMENT DÉRÉGLEMENTE À TOUT VA !

Le conseil des ministres, réuni ce jour, vient de rendre publique ses ordonnances, mettant en place des déréglementations majeures, en matière de droit du travail, en particulier sur le temps de travail, les congés, la prise des RTT ou encore le compte épargne temps.

Le gouvernement profite, ainsi, de manière scandaleuse, de la crise sanitaire pour déroger, dans certains secteurs économiques dits essentiels mais non définis, aux règles du droit du travail.

La durée quotidienne maximale de travail est portée à 12 heures, au lieu de 10 heures actuellement, celle du travail de nuit à 12 heures au lieu de 8 heures.

De même, il décide de réduire le temps de repos, entre 2 journées de travail, à 9 heures contre 11 heures minimum aujourd’hui.

Il fixe la durée maximale de travail hebdomadaire à 60 heures contre 48 heures jusqu’ici et augmente également les durées de travail hebdomadaires, dans le secteur agricole ainsi que le travail de nuit.

Il instaure l’extension du travail le dimanche et prévoit la possibilité d’user de ces régressions jusqu’à décembre 2020.

Toutes ces décisions expriment sans nul doute la volonté gouvernementale et patronale de préparer une intensification de la production économique. Veulent-ils déjà assurer l’après crise sanitaire ?

Pire, la liste des secteurs concernés par ces déréglementations sera définie unilatéralement par le gouvernement par le biais de décrets, alors que le gouvernement refuse toujours de définir quels secteurs non essentiels doivent arrêter leur activité et mettre enfin les salariés en sécurité.

Il y a donc un vrai risque que ces régressions, en matière de droit du travail, soit étendues à de très nombreux secteurs voire à toutes les activités.

Les ordonnances actent également des reculs majeurs en matière de prise des congés payés qui pourraient être imposés jusqu’à 6 jours ouvrables, avec un délai de prévenance réduit à 1 jour franc après accord soit collectif, soit directement entre le salarié et l’employeur dans les petites entreprises.

Ces ordonnances sont, pour la CGT, inacceptables, injustifiées et représentent une remise en cause sans précédent du droit du travail. Elles constituent bien un effet d’aubaine pour les employeurs.

L’urgence, au contraire, est de garantir la protection et la santé de tou.te.s les travailleur.euse.s, en listant l’ensemble des activités ne répondant pas à des besoins essentiels pour la population.

Ce dont ont besoin les travailleu.euse.s, c’est d’aides et non pas de nouvelles contraintes ! »

 

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Le professeur Didier Raoult, la Droite et la trottinette

Le professeur Didier Raoult, directeur de l’IHU Méditerranée Infection, fait parler de lui en prétendant faire mieux que tout le monde et soigner le Covid-19 avec de l’hydroxychloroquine en dehors des procédures médicales institutionnelles. Son attitude est typique de la Droite, glorifiant les attitudes individualistes aventuristes et désinvoltes… et dont Didier Raoult fait objectivement partie.

La science est une activité qui se fonde sur la vérité et qui vise la vérité. Encore faut-il se mettre d’accord sur la vérité et là est bien le problème. Ainsi, le professeur Didier Raoult s’est illustré en 2013 dans la revue ultra-conservatrice Le Point par sa négation du réchauffement climatique (« La planète ne se réchauffe plus depuis 1998 »).

On reconnaît là l’esprit sceptique, une tradition imprégnant les scientifiques actuels tendant toujours à tout relativiser. Le Covid-19 a valu chez lui la même réaction. Voici ce qu’il disait en effet dans la presse le 28 janvier dernier :

« Concrètement, si vous ramenez les morts chinois infectés par le coronavirus à la taille de la population de 1,6 milliard, il y a probablement plus de gens qui sont tués en trottinette en Chine que par le virus. »

C’est là tout le fond du problème. Véritable chercheur, Didier Raoult veut trouver et il déteste les prévisions statistiques et tout ce genre de choses, encore moins qu’on en parle à tort et à travers. Soit. C’est un chercheur, un chercheur émérite sur les virus, une sommité mondiale. Très bien ! Mais alors qu’il se taise quand il n’a pas trouvé. Car nier que le covid-19 est un virus mutant qui peut très bien provoquer des ravages, c’est de l’inconscience.

Une inconscience relativiste ; Didier Raoult avait déjà fait le coup en 2015 dans Le Point (« Le vélo tue plus… que tout ce qui vous fait peur »), opposant les tués à vélo à ceux de « la crise de la vache folle, la grippe aviaire, Ebola, le bioterrorisme, le Chikungunya, le SRAS et le coronavirus du Moyen-Orient ».

Sauf que le vélo, lui, ne mute pas, n’est pas le produit d’une mutation causée par les déséquilibres de l’Homme dans la nature… Et qu’à moins de prendre tous les États de la planète pour des entités paranoïaques ne visant que le contrôle…

Mais Didier Raoult préfère jouer les scientifiques médiatiques et se targuer de relativiser, d’être un sceptique. Ses propos explicatifs à sa thèse de la « trottinette » de janvier le montrent bien :

« Il y a 36 000 raisons de mourir. Il y a 60 millions de gens qui meurent dans le monde chaque année. En comparaison, qu’il y en ait 80 qui meurent d’une pneumonie identifiée ou non, cela ne change rien. Ce n’est pas visible.

Et donc on est en train de parler d’une population de 60 millions d’habitants qui a été mise en quarantaine pour 50 ou 80 morts. Tout cela est disproportionné.

Globalement, et pour les semaines à venir, je peux vous dire, parce que l’on mesure le nombre de morts qui sont dus à la grippe ou autres coronavirus, qu’il y a plus de chances de mourir de virus qui sont là depuis longtemps que de mourir du coronavirus chinois. »

Ces propos sont sidérants ! Mais il y a un mouvement aux aguets, cherchant à se distinguer lors de cette crise, en tapant sur le gouvernement mais sans vouloir passer pour des saboteurs. C’est la Droite. Et, cela tombe bien, depuis longtemps Didier Raoult converge avec la Droite. Ce n’est pas pour rien que Didier Raoult publie déjà ce 26 mars 2020 Épidémies, vrais dangers et fausses alertes en annonçant cela dans Le Point, lui qui a écrit pour Le Figaro, ainsi que pour Les Échos.

Un article payant, qui vise donc un public bien particulier, tout comme les tribunes qu’on trouve comme article payant dans Le Monde. On vise un public bien délimité.

Comment cette convergence Droite – Didier Raoult se réalise-t-elle ? Didier Raoult est infectiologue et professeur de microbiologie et avec cette aura il s’est montré populaires en faisant que l’Institut hospitalo-universitaire (IHU) Méditerranée infection de Marseille mène des tests de dépistage ouverts au public.

L’IHU ? Pour comprendre ce que c’est, regardons d’abord ce que dit Didier Raoult au sujet de la chloroquine. Précisons tout de suite : il n’a pas « découvert » que la chloroquine pouvait éventuellement fonctionner comme anti-viral contre le SARS-CoV-2, qui entraîne la maladie Covid-19. Il n’a fait que lire des publications chinoises qui testent cela depuis février, cela et l’hydroxychloroquine, une molécule proche.

Ils le font cependant avec de nombreuses précautions, sans triomphalisme et en prenant soin d’étudier cliniquement les effets, car le médicament est très dangereux et peut facilement être létal. Ce sont des médecins faisant leur travail, avec probablement leurs limites, mais en tous cas avec de la méthode. Il y a de nombreux médecins et professeurs en France suivant leurs travaux et les poursuivant, sans s’en vanter particulièrement.

La particularité du Professeur Didier Raoult, c’est de se séparer des procédures institutionnelles médicales et d’utiliser directement et massivement la molécule. Et surtout de le faire savoir. C’est sa marque de fabrique, il se présente régulièrement comme étant « à contre courant », envoyant balader le système au nom du pragmatisme et assumant la désinvolture, etc.

Il est pour cela apprécié par exemple par Christian Estrosi le maire de Nice, personnalité typique de ces gens de Droite valorisant l’accomplissement individuel, l’esprit d’entreprise au-delà de tout « collectivisme », etc.

Il y a aussi Philippe Douste-Blazy, ancien ministre de la Santé de droite, qui dit de lui que « c’est un très grand médecin » et a « beaucoup de respect tant pour l’homme, que le chercheur. » C’est le même discours du côté du président de la région PACA Renaud Muselier, lui-même médecin et proche de lui, qui explique au Figaro qu’il lui verrait bien décerné le Prix Nobel, ou encore Jean-Luc Harousseau, ancien directeur de la Haute Autorité de Santé, de droite également, qui va dans son sens.

De la même manière, Arnold Munnich, le fondateur de l’IHU Imagine (la structure parisienne équivalente à son IHU marseillais), en fait l’éloge, le considérant comme « homme extraordinaire, engagé, militant de la science. » Arnold Munnich est lui aussi de droite : c’est l’ancien conseiller santé de Nicolas Sarkozy et c’est justement ensemble qu’ils ont mis au point ces fameux IHU, instituts hospitalo-universitaires.

À tel point que le Figaro expliquait hier :

« Quand Nicolas Sarkozy a créé les IHU, Didier Raoult lui a été extrêmement reconnaissant d’avoir tout fait pour que le mérite soit récompensé. Pour que ceux qui travaillent plus soient récompensés. Comme s’il y avait quelque chose de l’ordre d’une réparation. »

On a affaire ici à des libéraux classiques, détestant tout ce qui relève d’un État fort, structuré, organisé, procédurier (sauf en ce qui concerne la répression ou l’Armée, évidemment). Les IHU ont été créés précisément dans ce cadre, afin de contourner les institutions publiques médicales françaises, et pouvoir faire les choses dans son coin, avec une grande liberté de recrutement, de communication et d’exercice en général, tout cela au service du partenariat public-privé.

Pour résumer, les IHU sont des pôles d’excellence au service du capitalisme ; on lit en 2016 dans Le modèle économique des instituts hospitalo-universitaires :

« Les politiques de partenariat industriel et de valorisation conduites par les IHU donnent par ailleurs lieu à des perspectives porteuses, mais dont il ne fautpas surestimer la contribution possible à une éventuelle autonomie financière.

Ces politiques s’inscrivent dans un contexte économique mouvant, marqué par la remise en cause des lignes de partage entre recherche de base et recherche appliquée, mais aussi par des difficultés rémanentes à engager des partenariats à grande échelle pour des recherches très «en amont».

Les partenariats durables des IHU se développent ainsi davantage avec les fabricants de matériels chirurgicaux, d’imagerie ou de diagnostic, voire de dispositifs médicaux, qu’avec les grands groupes du secteur pharmaceutique. Ils sont aussi relativement fréquents avec des entreprises des biotechnologies ou de la pharmacie de taille moyenne, spécialisées sur des segments très spécifiques du marché. »

Didier Raoult n’est donc pas sorti de nulle part et n’est certainement pas un grand ennemi des laboratoires pharmaceutiques, comme le prétend toute une petite-bourgeoisie paranoïaque tout à fait l’esprit des gilets jaunes.

Didier Raoult n’en a que faire et fonctionne dans son coin, à la manière de l’hôpital privé… tout en bénéficiant de grandes subventions publiques. Et cela avec l’appui de la Droite, qui pousse en son sens, ayant trouvé une brèche politique dans cette situation de crise ; Ouest France le constate sans ambages (Coronavirus. Usage de la chloroquine : la droite pousse, le gouvernement tente de calmer le jeu).

Tout cela est anti-rationnel, anti-populaire, c’est une véritable foire libérale. Cela déboussole encore plus les gens, alors qu’il faut se préparer à une terrible vague de maladies et de morts. C’est, très exactement, anti-démocratique.

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Décès de Lucien Sève, philosophe figure du PCF

Lucien Sève, né en 1926, est décédé le 23 mars 2020 en raison du covid-19. Il fut la grandes figure philosophique du PCF depuis le milieu des années 1970.

Pour comprendre qui était Lucien Sève et quel fut son importance, il faut basculer dans les arcanes du PCF, de la philosophie communiste, des polémiques autour du matérialisme dialectique, etc. On est là dans un espace extrêmement étroit intellectuellement, mais important politiquement.

Dans les années 1960, le grand philosophe du PCF était Roger Gauraudy ; son approche philosophique consistait en un humanisme philosophique, dans l’esprit de « l’eurocommunisme » des années 1970 qui suivra, c’est-à-dire d’une émancipation intellectuelle et culturelle par rapport à l’URSS.

Une opposition intellectuelle de la part des « pro-chinois » dans l’Union des Étudiants Communistes se développa alors, notamment sous l’influence du philosophe Louis Althusser. Ce dernier ne les rejoindra cependant pas dans leur rupture en 1966, dont le coup d’éclat consista en le document « Faut-il réviser le marxisme-léninisme ? Le marxisme n’est pas un humanisme ». Ces étudiants allaient ensuite fonder l’Union des Jeunesses Communistes (marxistes-léninistes), dont le principal prolongement sera la Gauche Prolétarienne.

Roger Garaudy finit quant à lui par rompre avec le PCF et poursuivra son orientation « humaniste » en devenant musulman, puis basculera dans la négation des chambres à gaz. Le PCF s’était quant à lui enlisé dans l’alliance avec le Parti socialiste et c’est là qu’intervint Lucien Sève, à partir de 1976, c’est-à-dire du 22e congrès marquant le triomphe de l’idéologie de Georges Marchais (le socialisme oui, la dictature du prolétariat non).

Son objectif fut, intellectuellement, le même que Maurice Thorez. Il s’agissait de justifier l’existence du PCF, de la référence marxiste voire léniniste, tout en se séparant entièrement de l’URSS de Staline. Lucien Sève s’acquitta ainsi de cette tâche en tant que philosophe officiel du PCF. L’Humanité s’est fendu d’un article nécrologique décrivant adéquatement ce rôle :

« Travaillant ardemment à sortir le parti communiste du stalinisme, il fut néanmoins très attentif à son ancrage théorique et à la fidélité aux concepts issus du marxisme.

Il tint alors, contre vents et marées, une position originale et solidement argumentée entre l’humanisme de Roger Garaudy et le structuralisme de Louis Althusser.

Sa position fut théorisée dans un ouvrage au fort retentissement publié en 1969 Marxisme et théorie de la personnalité qui se fixait pour objectif d’exposer une conception marxienne de l’individu, à rebours d’une conception désincarnée du socialisme alors en vogue. »

Lucien Sève était ainsi un penseur que l’on peut appeler ouvert ou éclectique, selon ses horizons ; il n’hésita pas à considérer que Heidegger était un nazi, mais en même temps un grand philosophe préfigurant la véritable écologie. Il se tourna également vers les penseurs opposés à Staline en URSS, tel le psychologue Lev Vygotski. Au sens strict, il définit son approche comme marxienne et non « marxiste » ; il fallait pour lui se fonder sur une approche non dogmatique pour changer la vie en profondeur, avec Marx, Gramsci ou encore Jaurès.

Il ne s’agit pas de former un dogme : « le refus d’objectiver un  » marxisme  » est bien le préalable obligé de toute authenticité marxienne ». Le paradoxe, c’est que tout cela se situait en même temps pour lui tout à fait dans la tradition marxiste-léniniste dont il se revendiquait, qu’il prétendait prolonger et dépasser.

Cette position traumatise bien entendu les tenants de cette tradition, qui ne consistent concrètement qu’en deux organisations, le niveau exigé étant particulièrement élevé. Il y a ainsi la gauche du PCF, avec le Pôle de renaissance communiste en France dont le dirigeant Georges Gastaud est lui-même quelqu’un ayant un parcours philosophique. Pour le PRCF, Lucien Sève est à la fois un ange et un diable :

« Dans le temps « court » de la lutte politique et idéologique pour la renaissance communiste, L. Sève est peu à peu devenu un adversaire. Dans la temporalité moyenne de la théorie politique, et même s’il a produit dernièrement des travaux de grand intérêt sur l’éthique ou sur le concept du communisme, l’orientation générale défendue par Sève relève principalement à nos yeux du révisionnisme théorique (…).

[Cependant] il y va des fondamentaux d’une conception communiste conséquente de la transformation de la nature et de la société. Et sur cette temporalité « longue », Sève est un allié de premier plan du marxisme orthogramme de par sa culture philosophique et scientifique de premier ordre, de par son inventivité conceptuelle et de par sa puissance polémique, critique et démonstrative difficilement surpassable. »

Le PRCF considère que les « fronts sont étanches » et que Lucien Sève peut être excellent philosophe, mais un mauvais politique. Cette conception est évidemment considérée comme aberrante pour les maoïstes du PCF(mlm) pour qui tous les fronts sont entremêlés et pour qui il faut accepter soit tout, soit rien. Il n’y a pas de marxisme sans matérialisme dialectique, donc pas sans réalisme socialiste, sans conquête spatiale, etc.

On a ici trois approches concernant l’URSS de Staline : soit s’en couper, en considérant que ce fut du national-étatisme (comme le dit Lucien Sève), mais profiter de l’élan passé pour constituer une perspective marxienne, ce qui est la ligne du PCF.

Soit ne pas s’en couper mais rectifier le tir et réfuter le côté systématique, ce qui est la ligne du PRCF. Soit l’assumer en bloc de manière invariante en constituant en noyau dur le côté systématique, ce qui est la ligne du PCF(mlm).

On a là des choses bien compliquées et dont les problématiques ne touchent que bien peu de monde. Mais le communisme étant, aussi, une passion française, on a ici des démarches très complexes, très élaborées, qui ont par conséquent un impact intellectuel et culturel massif sur la Gauche et sur les perspectives de celles-ci. Qu’il s’agisse ici de laboratoires d’idées ou bien de matrices révolutionnaires potentielles, difficile de faire l’économie de ces poids lourds dans une critique sérieuse du capitalisme.

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La lettre d’Olivier Faure du Parti socialiste à Emmanuel Macron

Dans une longue lettre adressée à Emmanuel Macron, le premier secrétaire du Parti socialiste critique les insuffisances de la politique gouvernementale face à la crise du Covid-19. Adoptant le point de vue d’homme d’État, il formule les propositions du Parti socialiste dans ce contexte et la façon dont celui-ci envisagerait de gérer la crise.

« Ivry-sur-Seine, le 22 mars 2020

Monsieur le Président de la République,

Je reprends vos mots. Nous sommes en « guerre ». Le combat contre le Covid-19 suppose que nous nous mobilisions tous ensemble autour du même but.

Dans ce combat, personne ne doit manquer. L’unité nationale est nécessaire. Nous y avons souscrit dès le premier jour. Nous avons relayé au plan national, comme dans l’ensemble des collectivités locales que nous dirigeons, les consignes gouvernementales. Nos maires innovent au-delà même de leurs compétences pour mettre en place des services à la population.

L’adhésion et la mobilisation de tous doivent être en permanence recherchés. À cette fin, la coercition ne peut totalement remplacer une vraie appropriation des consignes. De ce point de vue, la communication gouvernementale au compte-gouttes, relevant parfois de l’injonction paradoxale, rajoute à la défiance et au climat anxiogène. Les prises de parole intempestives abîment la parole de l’État. Les messages se succèdent au détriment de la cohérence et du sentiment de maîtrise. Faut-il rester chez soi ou faut-il participer à
l’ « effort national » en allant travailler ? Qu’est-ce qu’une « activité essentielle » ? Qui en décide ? C’est pourquoi je vous demande, Monsieur le Président, de renforcer les moyens d’une communication claire, stable et accessible pour l’ensemble de nos concitoyennes et concitoyens, par exemple au moyen d’un portail Internet qui concentre toutes les informations utiles et une application dédiée qui permettra de sensibiliser les plus jeunes et d’orienter les bonnes volontés, nombreuses, qui veulent servir leur pays.

L’exigence d’unité appelle en regard une totale transparence dans les choix opérés. La confiance suppose la vérité. Vérité sur les choix stratégiques. Vérité sur les moyens disponibles. Vérité sur l’articulation entre les moyens et les choix opérés. Tout le monde peut se tromper. Mais le danger vient lorsque le pouvoir n’accepte plus de se laisser contredire par les faits et quand il plie la doctrine à son propre récit de la crise.

Ainsi, s’agissant des masques et des tests, les ministres n’ont cessé de répéter sur toutes les antennes qu’il n’en manquait pas. Contre toute évidence. De tous les territoires nous remontent en effet les mêmes témoignages. Il manque des masques dans les EHPAD, dans les centres médico-sociaux, dans les prisons, dans les entreprises, dans la police, dans la gendarmerie, dans les services publics, et en premier lieu dans les hôpitaux et dans les cabinets médicaux. Quant aux tests, il n’en est pratiqué, au mieux, que 5 000 par jour.

Si nous sommes en « guerre », il faut une économie de guerre. Dans cette « guerre » contre le Covid-19, il y a des premiers de tranchée. Médecins, infirmiers, aides-soignants, policiers, gendarmes, éboueurs, caissières, livreurs… Ils font notre admiration unanime. Nous devons tout faire pour les soulager. Et d’abord les protéger. Nous ne pouvons plus compter sur la fabrication de 6 millions de masques par semaine (8 millions en avril) quand les besoins sont évalués par votre ministre à 25 millions par semaine pour les seuls
soignants et qu’il conviendrait d’équiper a minima la population au travail et les personnes présentant les symptômes du Covid-19. C’est pourquoi je vous demande, Monsieur le Président, de réquisitionner toutes les industries qui peuvent fabriquer des masques, des tests de dépistage, des respirateurs, du gel hydro-alcoolique…

Compte tenu de la pénurie de tests et de masques, le confinement est, par défaut, l’unique solution pour endiguer la contagion. C’est pourquoi je vous demande, Monsieur le Président, de le faire appliquer désormais plus strictement et de limiter l’activité aux fonctions vitales du pays pour freiner drastiquement la progression du virus. Ne perdons plus un temps précieux dont ont besoin nos soignants. En période de confinement, les autorisations de sortie sont une exception et ne doivent pas être prises comme l’espace du relâchement.

Par ailleurs, la question de l’accompagnement des soignants, comme des familles, qui seront confrontés aux décès doit être anticipée et abordée humainement. Concilier la dignité humaine, la nécessité du deuil et les obligations sanitaires doit être un impératif des semaines qui viennent.

Lorsque cette période de confinement s’achèvera, la population française ne sera pas immunisée et le risque d’un rebond existe. Il faut donc anticiper cette phase dès à présent. Le dépistage systématique prôné par l’Organisation mondiale de la santé est la voie à suivre. Nous avons noté positivement, enfin, que le ministre allait faire évoluer la doctrine du gouvernement en la matière. Cela ne fait que renforcer la nécessité
d’engager une production massive dès à présent.

Penser l’après-confinement implique de soutenir nos entreprises. Des mesures ont été prises. Pour l’essentiel, elles visent à soulager leur trésorerie en reportant leurs échéances de paiements fiscaux et sociaux. Mais il faudra aller au-delà et viser l’annulation pour les indépendants, les PME, les compagnies, qui ne seront pas en mesure de payer à partir d’un chiffre d’affaires qui n’a pas été réalisé. Tout doit être entrepris pour éviter les faillites et les licenciements, mais aussi éviter la spéculation et l’enrichissement
éhonté de certains. Il faut également anticiper une forte impulsion budgétaire pour relancer la machine économique. Aux États-Unis, certains élus évoquent la possibilité de soutenir directement la consommation, de manière simple et massive, à travers un chèque versé aux ménages. C’est pourquoi je vous demande, Monsieur le Président, d’envisager un plan de relance massif.

Ne laissez pas la fracture sanitaire élargir la fracture sociale. Les personnes sans-abri, les travailleurs pauvres, les personnes isolées ne doivent pas être les grands oubliés de la crise sanitaire, et les associations de solidarité qui leur viennent en aide doivent être soutenues pour éviter un drame social. Quant aux héros actuels du quotidien, caissières, livreurs, logisticiens, agriculteurs, etc., ils ne méritent pas de voir demain leurs droits rognés sans discussion, bien au contraire. Puisque le « monde d’après » ne doit pas ressembler au « monde d’avant », le poids de la préservation et du redémarrage de notre économie ne peut reposer prioritairement sur les classes populaires et les classes moyennes.

La solidarité ne peut s’exercer à sens unique, de bas en haut. C’est pourquoi je vous demande, Monsieur le Président, de reconnaître, à l’issue de la crise, la contribution de tous les personnels mobilisés aujourd’hui, de manière concrète. C’est-à-dire en termes de protection et de droits économiques et sociaux (retraite, pénibilité…).

S’agissant des droits des salariés (congés payés, RTT, durée légale du travail), il n’est pas admissible qu’à l’occasion de cette crise sanitaire soient remis en cause, même provisoirement, des droits sociaux sans la moindre négociation. Chacun de nous pressent qu’une fois vaincu le virus, il sera exigé de tous des efforts pour redresser notre économie. Mais ces efforts doivent être librement consentis et également répartis.

Il faut anticiper tous les sujets. Qu’en sera-t-il notamment des personnels de santé à l’issue de la crise ?
Pourront-ils se reposer ? Ou devront-ils enchaîner pour prendre en charge les patients dont les opérations ont été repoussées pour libérer des lits ? C’est pourquoi je vous demande, Monsieur le Président, la création d’un groupe parlementaire chargé de réfléchir à ces sujets stratégiques et de penser l’après-confinement en lien avec le gouvernement et les services de l’État.

Cette crise globale doit imposer l’Europe comme l’échelle de réponse la plus appropriée. Enfin, le totem des 3 % est tombé. Qu’il reste à terre. Même tardivement, la BCE permet aujourd’hui d’éviter la spéculation sur les dettes publiques. C’est heureux. Mais la crise actuelle révèle l’obsolescence d’un logiciel économique et d’un système de gouvernance de l’Union qui ne permettent pas d’anticiper les crises et génèrent des dépendances excessives vis-à-vis de l’extérieur sur des biens essentiels et n’encouragent pas une solidarité entre les États, pourtant vitale. C’est pourquoi je vous demande, Monsieur le Président, de réunir un groupe de travail, composé d’experts et d’élus, d’entrepreneurs et de salariés, pour penser à la sortie de crise économique et à ses conséquences en matière de relance, de souveraineté économique et sanitaire, ou encore de modèle européen. Il s’agit dès à présent de penser cet « après-Covid-19 » et ne pas répéter une fois de plus le défaut d’anticipation qui a été trop souvent la règle jusqu’ici.

Nous devons regarder cette épidémie à l’aune de ce qu’elle est, à savoir une pandémie. La situation mondiale du Covid-19 est une bombe à retardement pour des milliers de femmes et d’hommes, en particulier en Afrique. Elle est une menace pour l’Europe et pour la France. Il n’y aura pas d’éradication de la maladie tant que des foyers d’infection subsisteront dans le monde. C’est pourquoi je vous demande, Monsieur le Président, d’engager dès à présent la coopération internationale nécessaire pour que la France
et l’Europe contribuent à la lutte contre la pandémie, notamment en donnant les moyens à la recherche fondamentale de travailler dans la durée sur les épidémies.

Monsieur le Président, la gestion de la crise suscite chaque jour de plus en plus de questions légitimes qui dépassent désormais le seul cadre sanitaire.

L’unité nationale implique d’avoir des espaces continus de discussions et d’échanges. Le maintien de l’unité nationale ne peut reposer que sur un large consentement. Même en temps de guerre, Clemenceau ou Churchill étaient tous les jours devant le Parlement.

La seule façon de ne pas laisser s’installer la polémique, c’est de donner toute sa place à la politique en préservant l’échange démocratique. Jusqu’ici les trois réunions auxquelles les chefs de groupe parlementaire et chefs de parti ont été conviés se sont bornées à des réunions d’informations partielles, souvent sans rapport avec les annonces de l’exécutif qui ont suivi. Nous n’avons jamais, par exemple, eu connaissance des différents scenarii d’endiguement de la contagion ; pas plus que nous n’avons été consultés sur le maintien
du premier tour des élections municipales, contrairement à ce que vous avez pu affirmer à plusieurs reprises.

Vous ne pouvez exiger l’unité nationale sans, symétriquement, partager l’information et consulter avant la décision. L’unité nationale ne peut se confondre avec la décision unilatérale. Les droits du Parlement ne peuvent être réduits à l’approbation d’ordonnances aux périmètres larges, interdisant tout contrôle réel. Les
nouvelles technologies offrent des ressources qu’il est impératif de saisir. La crise n’implique pas moins de démocratie mais, au contraire, plus de démocratie. C’est pourquoi je vous demande, Monsieur le Président, d’instaurer un conseil national de lutte contre le Covid-19 qui permette le dialogue et la consultation régulière des élus locaux et nationaux, de la majorité comme de l’opposition, voire des partenaires sociaux.

Nous sommes, à notre place, à la disposition du pays pour apporter notre part.

Signature

Olivier Faure

Je vous prie d’agréer, Monsieur le Président de la République, l’expression de ma très haute considération.

Olivier FAURE
Premier secrétaire du Parti socialiste
Député de Seine-et-Marne »

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Les médecins hospitaliers appellent à un renforcement des mesures de confinement

Voici la tribune, initialement publiée hier par le Parisien, des médecins hospitaliers appelant le Président et le gouvernement à la mise en place d’une application plus stricte du confinement. C’est le seul moyen d’éviter que la catastrophe, déjà là, n’empire, alors qu’il y a déjà un médecin hospitalier décédé en raison du Covid-19.

« Appel au Président de la République et aux Membres du Gouvernement

Nous, professeurs des universités-praticiens hospitaliers et praticiens hospitaliers de France, chefs de cliniques, internes, demandons avec gravité un respect strict des mesures de confinement à domicile à nos concitoyens sur tout le territoire, accompagné d’une communication plus explicite.

L’ensemble des soignants médicaux paramédicaux, à l’hôpital ou en ville, œuvre sans relâche, et pour répondre continuera à le faire le plus efficacement possible à cette épidémie d’une ampleur exceptionnelle.

Nous aider, c’est respecter strictement le confinement. Malgré cet engagement sans faille de l’ensemble de nos équipes soignantes, nos capacités de soins arrivent à saturation. Dès à présent, des conditions de soins extrêmement difficiles et éprouvantes s’imposent aux professionnels du soin qui se mobilisent avec une solidarité exemplaire.

Nous pouvons encore éviter des milliers de décès. Nos collègues chinois, bien que ne connaissant pas initialement l’histoire naturelle, les symptômes possibles et la contagiosité de l’infection Covid-19, ont pu, par un confinement massif et contrôlé, réussir à maitriser l’épidémie et limiter le nombre de décès. Leur expérience et l’analyse des nombreuses publications scientifiques qui paraissent aujourd’hui nous permettent de mieux définir les moyens pour contenir cette épidémie. Ainsi, seul un respect strict du confinement à domicile peut limiter les conséquences de l’épidémie en arrêtant la propagation du Covid-19. En effet, malgré le travail acharné de nos chercheurs, il ne faut pas compter à court terme sur des vaccins ou thérapies efficaces et validées, qui arriveront surement, mais trop tard.

L’Inter-syndicale nationale des internes, qui sont en première ligne dans cette bataille épuisante et sans merci contre le Covid-19, a envoyé hier une lettre au président de la République qui souligne l’incontournable nécessité d’un confinement strict. Cette lettre a pour but de relayer et d’amplifier ce message.

Nous sommes conscients que l’efficacité des mesures de confinement nécessite une pédagogie pour leur acceptabilité, avec la garantie de la subsistance de chacun pendant leur application. C’est pourquoi nous avons tenu à rappeler avec force l’impérieux respect du confinement à domicile.

Tous les soignants sont très émus des marques de soutien de l’ensemble de la population chaque soir à 20 heures. Ils le seront encore plus si chacun suit scrupuleusement les règles de vie qui permettront de contenir l’épidémie. Les dérives que nous observons nous apparaissent inacceptables pour la sécurité collective. Aussi, nous considérons que le non-respect des mesures de confinement imposerait un renforcement de ces mesures. »

Les signataires

Le collectif de signataires dit représenter « plus de 50 000 médecins hospitaliers français, internes, chefs de clinique, praticiens hospitaliers, professeurs de médecine de toute la France, des Antilles à Paris et de toutes les disciplines, médicales, psychiatriques et chirurgicales ». Parmi les signataires, figurent l’Intersyndicat des praticiens hospitaliers (INPH) qui fédère les 17 syndicats de praticiens hospitaliers, et l’Intersyndicat des internes (ISNI ) qui représente les 18 000 internes.

ADAMS David ; ABADIE Veronique ; ACHARD Sophie ; ADAM Jean Philippe ; ADAMSBAUM Catherine ; AGHAKHANI Nozar ; AKKARI Mohamed ; ALBOUY Marion ; ALEZRA Eric ; ALKHODER Soleiman ; AMARENCO Pierre ; AMOURA Isabelle ; AMOURIQ Yves ; AMOUYEL Philippe ; AMSELEM Serge ; ANDRES Emmanuel ; ANDRIEU Sandrine ; ANDUJAR Pascal ; ANGOULVANT Denis ; ANHEIM Mathieu ; ANNWEILER Cedric ; AOUIZERATE Bruno ; APARICIO Thomas ; ARNULF Isabelle ; ASFAR Marine ; ATTALI Claude ; ATTARIAN Shahram ; AUCOUTURIER Pierre ; AUDARD Vincent ; AUDARD Virginie; AUDUREAU Etienne ; AUPY Jérôme ; AYACHE Denis ; AZIZI Michel ; BADAOUI Bouchra ; BAHI-BUISSON Nadia ; BAKCHINE Serge ; BAKHOS David ; BALEYTE Jean-Marc ; BARAT Maxime ; BARDIER Armelle ; BARRE Jean ; BARREAU Xavier ; BARTOLUCCI Pablo ; BASTUJI-GARIN Sylvie ; BATS Anne-Sophie ; BAUBET Thierry ; BAYLE Catherine ; BEAUDREUIL Johann ; BÉGUÉ Thierry ; BELIN Catherine ; BELKACEMI Yazid ; BELKESSA Helima ; BENAROUS Xavier ; BENHAMOU Pierre-Yves ; BENHAMOU Dan ; BENMOUSSA Leila ; BENVENISTE Olivier ; BENYAMINA Amine ; BÉRARD Xavier ; BERENBAUM Francis ; BERNA Fabrice ; BERNARD-BOURZEIX Laurence ; BERNHARD Jean-Christophe ; BERTHERAT Jérôme ; BERTSCHY Gilles ; BIAIS Matthieu ; BILHOU-NABERA Chrystele ; BILLAUD Eliane ; BING Fabrice ; BIOULAC ROGIER Stéphanie ; BLANCO Patrick ; BLASCO Hélène ; BLAUWBLOMME Thomas; BOCHER Rachel ; Boddaert Nathalie ; Bodemer Christine ; BODERE Françoise ; BONGARD Vanina ; BONNARD Damien ; BONNET-BRIHAULT Frederique ; BONNEVILLE Fabrice ; BOUCCARA Didier ; Boudghene Frank ; Bouhnik Yoram ; BOUILLERET Viviane ; Boulanger Éric ; BOULOUIS Gregoire ; BOURNET Barbara ; BOURZEIX Jean Vincent BOUSSON Valérie ; BRANGIER Antoine ; Bremond Dominique ; BRENHARD Jean-Christophe ; Bretzner Martin; BREYSSE Julien ; BRIHAULT Jean ; Brocheriou Isabelle ; BROCHET Bruno ; Budor Philippe; Cadranel Jacques ; CAHEN DOIDY Laurence; CALVEZ Vincent ; Campana Matthieu; CANALES Justine; CANDELIER Gaelle Canouï-Poitrine Florence ; Cantagrel Alain ; CARLIER Robert ; Carpentier Françoise ; Carrat Fabrice ; CARRIE Alain ; CASTETBON Vincent Cattin Françoise; CAUQUIL Cecile CECCALDI Mathieu ; CHA-BANUS Florence; Chalouhi Christel; Champroux Thierry; Charbonneau Frédérique; CHARLIER Caroline; CHARRON Philippe ; CHASSAING Augustin CHASSIN Olivier CHATELUS Emmanuel; Chau Yves Chauveau Dominique ; CHAUVIRE Valerie Chevalier Xavier ; CHEVRET Sylvie; Cholley Bernard ; Chougar Lydia CHOUGAR Taous CHOUGHRI Hussein Ciambelli Luca; Clarençon Frédéric ; Claudepierre Pascal ; Claudon Noémie; Clément Karine ; Clément Olivier ; Clement Delmas COHEN SOLAL Alain ; COLLET Jean-Philippe ; Combes Alain ; Compérat Eva ; Conroy Thierry ; Corcia Philippe ; Cordel Hugues; Coriat Romain ; Cornelis François ; CORRE Alain CORRUBLE Emmanuelle ; Costalat Vincent ; COTTON Francois COULOIGNIER Vincent ; COURATIER Philippe ; CRENN Pascal ; RESTANI Bruno; CREUX Aurore Sage Femme; Czernichow Sebastien ; Da Silva Fabio; DAHMANI Souhayl ; Darrouzet Vincent ; Daruich-Matet Alejandra MCUPH; Daubigney Antoine; DAUGER Stéphane ; DAVI Frédéric ; David Valérie; DE BOUVERIE Marc ; DE GABORY Ludovic ; DE KERVILER Eric ; De Monès Erwan ; Debrix Isabelle Dechartres Agnes; Delacourt Christophe ; Delattre Jean-Yves; DELHOMMEAU François ; Deniziaut Gabrielle; DENOYELLE Françoise ; Descriaud Celine; Desguerre Isabelle ; Désilles Jean-Philippe Destrieux Christophe ; DI MEGLIO Lucas Président de l’ANAINF; Dillard Clementine; DIMITRI BOULOS Dalia DINOMAIS Mickael ; Diop Abdoul Aziz Dormont Didier ; Douri Alexandra; Dubois-LAFORGUE Danielle; DUCOU LE POINTE Hubert ; DUGRAVIER Romain Dugue Cecile; DUPIN Nicolas ; DUPONT Charlotte; Durand François ; DURDUX Catherine ; DUVAL GuillaumeGuillaume Duvoux Christophe ; ECHANIZ-LAGUNA Andoni ; Edjlali-Goujon Myriam ; Ehrmann Stephan ; Eker Omer ; EL BEHI Nawel EL-HAGE Wissam ; ELGHONEIMI Alaa ; EMERAUD Cécile; Escalard Simon EVEN SILBERSTEIN Marc; Extramiana Fabrice ; Fabbro-Peray Pascale; Faber Camille; FARGE-BANCEL Dominique ; FARGEOT Guillaume Fartoukh Muriel; FARZIER Aline; Febvre Sylvie ; FERNANDEZ Christine; FILIPPINI Jean François; Fléjou Jean-François ; FLORENTIN Arnaud ; FOSSATI Philippe ; Fouzi Bala PHC; FRANCO Valerie ; FRAZIER-MIRONER Aline FREDERIC Charlotte MCUPH; Freynet Nicolas; Froelich Sebastien ; Funck-Brentano Christian ; Gaillard Raphaël ; Galanaud Damien ; GAMBIER Arsène GANGI Afsin ; GARABEDIAN Noël ; Gardette Virginie; GARIN Antoine GARIN Tristan ; Gaume Mathilde; GEHANNO Pascal; GENDRON Christophe ; GEORGES WALRYCK Agnes GEORGIN-LAVIALLE Sophie ; Ghodhbane Walid; GHORAB Karima Gignon Maxime ; GILAIN Laurent ; Gilbert Ferretti ; Gille Olivier ; GIRODEAU Amelie Sage femme; Gligorov Joseph ; Glorion Christophe ; GODARD Sophie GOROCHOV Guy ; GOSSEC Laure ; GOUDOT Patrick ; Goujard Cécile ; Goupille Philippe ; GOURONNEC Adeline Grapin-Dagorno Christine ; Grenier Nicolas; GRENIER Nicolas ; GRESSIER Florence Gronnier Caroline MCUPH; Guédon Alexis Guignard Sandra; GUIGU Pierre ; Guillotte Marie-Laure; Haas Jessica; Haesebaert Julie; Hajage David MCUPH; HALIMI Jean Michel Hamamah Samir ; Hammel Pascal ; HANACHI Mouna HANACHI GUIDOUM Mouna; HAPPIETTE Adele; HAYMANN Jean-Philippe ; Hélénon Olivier ; HELFT Gérard ; HENNEQUIN Christophe ; Herman Philipe ; Hernandorena Intza HERVIER Baptiste HINDLET Patrick MCUPH; HOCKE Claude ; Horion Julien Houdart Professeur Emmanuel Houdart ; Houenou Josselin ; HOUENOU Josselin ; HOUSSET Bruno ; Housset Chantal ; HUBAT Maxime Hue Sophie ; Ilharreborde Brice ; Irsutti Fjortoft Muriel; Isnard Richard ; Jabot Laurence ; JANIAN Pascale Secrétaire générale adjointe du SYNPREFH; Jenkins Marine Joannes-Boyau Olivier Joly Francisca ; Jondeau Guillaume ; Julia Pierre ; Juvanon Jean-Marc; Kadlub Natacha ; KAHILA Laurent Kamenický Peter Kamenický ; KAPEL Nathalie ; Kas Aurélie ; Kastler Adrian KEITA-MEYER Hawa ; KERIMIAN Mélodie KERLAN Veronique ; Korobelnik Jean-François ; KOSKAS Sarah KROLAK-SALMON Pierre ; LABAUGE Pierre ; LABEYRIE Celine LACAVE Roger ; LACOMBE Didier ; LACORTE Jean-Marc ; LACROIX Claire Lagard Daniel; Laloi Marie; LANDAIS Paul ; Lantz Brigitte LAPILLONE Hélène ; Larabi Amine; Larger Etienne ; Laribe-Caget Sandra Lasocki Lasocki ; LASPOUGEAS Alban AHU; Latrémouille Christian ; LAUNAY Odile ; LAURENT Christophe ; Lawrence Christine; Le Gouez Morgane; Le GUERN Eric ; LE TAILLANDIER DE GABORY Ludovic ; LEBOULANGER Nicolas ; Leboyer Marion ; LEBRUN FRENAY Christine ; Lechowski Laurent ; LECLUSE Alderic Lecoeur Anne; Léglise Alain INPH; LEGRIS Nicolas LEJEUNE Julie; LEJEUNNE Claire ; Lelièvre Jean-Daniel ; Lemogne Cédric ; Lemoine Antoinette ; LEPAJOLEC Christine Leplay Céline PHC; Leprince Pascal ; LERSY François; LESCANNE Emannuel ; LEVY Raphael Lévy Rachel ; Lévy Philippe ; LIGUORO Dominique ; LISTRAT Antoine LLEONART Sebastien LOEB Emmanuel LOMBRAIL Pierre ; Longrois Dan ; Lubicz Boris Bruxelles; LUTEYN Alexandra Mahévas Matthieu ; Mailloux Agnès; Maingon Philippe ; MAJOUFRE Claire ; Mallet Luc ; MALLET Cindy MALLET Luc ; Mandonnet Emmanuel ; MANIER Salomon MCUPH; Mansour-Hendili Lamisse; Manzo Silberman Stéphane; MARCELIN Anne-Geneviève ; MARIA Alexandre ; Marini Hélène Marjanovic Zora MARTELLI Catherine MARTIN Severine ; Maruani Annabel ; Maubec Eve ; MAUROUSSET Aude ; MAZARI Assia Mebazaa Alexandre ; MEJEAN Arnaud ; Melica Giovanna; Menegaux Fabrice ; MERLE Veronique ; Meyer Laurence ; MEYTADIER Helène MEZZACAPPA Antonia ; MICHEL Marc ; MILADI Lofti ; MOLIMARD Mathieu ; MONNET Elisabeth ; Montravers Françoise ; MORINIERE Sylvain ; Morizot Bruno; Morlat Philippe ; MORLENT Fanny ; Mournet Sandy; Mouthon Luc; Msika Simon ; NABBOUT Rima ; Nabhan Abou Nabhan Abou; NETCHINE Irène ; NEVOUX Jerome MCUPH; NGUYEN KHAC Florence ; Niemczyk Sophie NIZARD Remy ; NORKOWSKI Emma AHU; NOT Adeline NOUETTE-GAULAIN Karine ; ODRI Guillaume; OPPENHEIM Catherine ; Catherine ; OPPERT Jean-Michel ; Orliaguet Gilles ; ORSSAUD Christophe; OUBAYA Nadia ; Oudard Stéphane ; Oziol Eric Paillaud Elena ; Panis Yves ; Pannier Stéphanie ; PAPON Jean François ; PAPON Jean-François ; PAQUET Claire; Para Marylou; PARAF Francois ; PARKER Fabrice ; PAULHAC Sophie PAUTAS Eric ; PAVLOV Ioana ; PAWLOTSKY Jean-Michel ; PAYA Christophe ; PAYE François ; PEFFAULT DE LATOUR Regis ; PELISOLLO Antoine ; PELISSIER Philippe ; PERLEMUTER Gabriel ; Perouse de Montclos Marie Odile; PERRIGAULT Pierre Francois ; PIARROUX Renaud ; Picard Arnaud ; PINLONG Eric PINSOLLE Vincent ; PIRNAY Philippe ; Pirnay Philippe ; PLAINARD Xavier; PLAUD Benoît ; PLU BUREAU Geneviève; POL Christine ; Polak Michel ; POLO DEVOTO Jose ; PONDAVEN LETOURMY Soizick ; POUCHOT Jacques ; PRUVO Jean-Pierre ; Puy Hervé ; Puybasset Louis ; Pyatigorskaya Nadya; QUIRINS Marion RABAUD Christian ; RABEL Constance Assistante spécialiste; RABEL Constance Assistante spécialiste; RANQUE Brigitte ; Raphaël Pierre; Raspaud Sylvie; Ravaud Philippe; Rebours Vinciane Reffet Kévin; Revelo Feli ; REYRE Anthony ; Ribadeau Dumas Alix; Ricard Jean-Damien ; Rigaud Anne-Sophie ; Riveline Jean-Pierre ; ROBERT Jérôme ; ROBERT Gregoire ; Robert Elodie Sage-femme; Roger Vivien; ROQUELAURE Yves ; Rouanet François; ROUCHAUD Aymeric ; ROUF Charles Edouard; Roulot Dominique ; ROUSSELOT Dominique ; ROUSSET Pascal ; Rufat Pierre ; Ruszniewski Philippe ; Sabaté Jean-Marc ; SACCONI Sabrina ; Saiag Philippe ; SAIN MARTIN Pauline ; Salomon Philippe; Samama Marc ; Samimi Mahtab ; SANS Nicolas ; SAROV Mariana Sauvanet Alain ; Sazio Charline; SCHERER Clarisse Schiff Manuel ; Schröder Carmen ; SCHURHOFF Franck ; SEMAH Frank ; Sermet-Gaudelus Isabelle ; Siauve Nathalie ; Sibon Igor; Sifer Christophe; SIFFROI Jean Pierre PUP; SIMILOWSKI Thomas ; SOBHANI Iradj ; Sola Gazagnes Agnès; SOLE Guilhem ; Soubrane Olivier ; Souchet Philippe; SOUDRIE Brigitte ; SPELLE Laurent ; Speranza Mario ; STEPHANT Maeva ; Stephant Maeva ; Tabassome Simon Simon ; Tachdjian Gérard ; Tadayoni Ramin ; Tahon Florence; TANKERE Fréderic ; Tavitian Bertrand ; Teillet Laurent ; Teissier Natacha ; Tezenas du Montcel Sophie ; Thomassin-Naggara Isabelle ; THUILLEAUX Denise; TIMSIT Serge ; TISON Francois Francois ; TOUBOUL David ; Touraine Philippe ; TOURNIGAND Christophe ; TRETON Xavier ; TRINGALI Stéphane ; Trivalle Christophe; Trunet Stéphanie; Trystram Denis; Vaillant Jean-Christophe ; VALENSI Paul ; VALLA Dominique; VAN DEN ABBEELE Thierry ; Vaubourdolle Michel; Vazquez Marie-Paule ; VELUT Stéphane ; VENDITTI Laura Verny Christophe ; VERNY Marc ; VEYRAT-MASSON Hélène VICAUT Eric ; Vidal Jean-Sébastien VITAL Jean Marc ; Vodovar Dominique ; Vourc’h Patrick ; WAGNER-BALLON Orianne ; WEISS Laurence ; Wendum Dominique ; WICART Philippe ; WIELART Joy; YAKOUB-AGHA Ibrahim ; YOUNG Jacques ; ZELEK ZELEK ; ZEMMOURA Ilyess ; ZINS Marie. »

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Coronavirus et capitalisme: les meilleures analyses

La crise due au coronavirus a appelé deux sortes de réaction. La Gauche activiste n’a pas pris la chose au sérieux, s’imaginant que cela allait rapidement passer et prenant de rares positions consistant à dire : « on attend que ça se passe ». La Gauche programmatique, c’est-à-dire la gauche sérieuse, a quant à elle produit des analyses élaborées critiquant l’ordre du monde lui-même.

La Gauche activiste ne peut pas supporter le confinement, qui pour elle aussi un confinement politique. Il n’est plus possible d’appeler aux manifestations, de mettre des photos sur Facebook, etc. Son mot d’ordre est donc que la lutte contre la réforme des retraites continue, que tout cela n’est que temporaire. Il y a, clairement, une sorte de déni par rapport à la période historique que l’on vit, car cela dérange l’unique aspect activiste.

Il y a ici une pesanteur qui est très choquante. Pour donner un exemple assez aberrant, le Parti Communiste Révolutionnaire de France n’aborde pas la question du coronavirus à part sous la forme de deux communiqués extérieurs, préférant publier les documents de son congrès qui s’est tenu… en novembre 2019.

L’OCML-VP parle carrément de la crise actuelle comme… d’une « anecdote » pour le capitalisme – un terme furieux qui insulte l’avenir de manière insensée – et appelle à se rebeller sur un mode ultra dans Coronavirus : vote, bosse et ferme-la ! :

« Jamais le patronat et le gouvernement n’auront notre soutien !

Nous ne sommes que de la chair à patron dans la guerre économique, et l’épisode Coronavirus n’est qu’une anecdote pour le capitalisme, comme d’habitude ce sera tant pis pour nous, les exploités. Jamais nous ne nous rendrons complice de notre propre exploitation ! Et Mélenchon qui ose dire que l’heure est à la cohésion et à l’entraide !

Le Coronavirus n’est évidemment pas un virus de classe, il touche également puissants et misérables. Par contre, toutes les mesures proposées ont un caractère de classe bien marqué, pas question de rentrer dans le jeu de Macron et des autres ! »

L’unique document valant sans doute le coup de ce côté ici est Le confinement ne s’applique pas aux exigences ouvrières et populaires !, du Parti Communiste des Ouvriers de France, qui a le mérite de chercher à justifier un tel positionnement.

Du côté de la Gauche programmatique, on a par contre un véritable effort de réflexion, s’appuyant sur un engagement militant. Les points de vue sont par contre très différents, correspondant aux mentalités relevant d’idéologie. S’agit-il de critiquer le gouvernement ? Le capitalisme ? Le capitalisme à l’échelle mondiale ?

Il y a, déjà, ceux prenant l’écologie au sérieux. L’Union Prolétarienne Marxiste-Léniniste a publié, dans son bulletin, une analyse approfondie de la situation actuelle, soulignant la dimension sanitaire et le refus de voir la bourgeoisie « profiter de la situation ». On trouve cependant, à la toute fin, une petite note critique de « l’agro-business, l’élevage en masse d’animaux », « le réchauffement climatique », « l’entassement de populations dans des mégapoles ».

Le mot d’ordre final de ce petit aparté, dont la thématique n’est bizarrement pas du tout abordée dans le reste du document, est « Pour une agriculture et une économie qui respecte l’homme et ses bases naturelles de vie ! ».

Cette approche « naturelle » est par contre au cœur du document plus long et plus dense intitulé « La maladie à coronavirus 2019 (COVID-19) : un produit du mode de production capitaliste », du PCF(mlm).

La thèse y est relativement simple : l’humanité est sortie de la nature et, par ses activités capitalistes, provoquent des choses allant contre le cours des choses, tel ce coronavirus mutant franchissant une barrière des espèces normalement infranchissable.

De manière plus poussée, il est insisté sur le fait qu’il s’agisse là d’un saut qualitatif montrant que toute l’époque est à la rupture, au décrochage, à la transformation complète, car le capitalisme, « mode de production planétaire », a fait son temps. Les métropoles qui poussent comme des champignons sont invivables et asphyxient la vie sur Terre.

La contradiction entre le capitalisme et sa « base matérielle » est complète, donc il s’effondre et l’humanité, mondialement unifiée, doit retourner dans le giron de Dame nature, en conservant les « acquis » de son développement inégal.

Du côté des autres réactions élaborées, point de préoccupation écologiste ou envers les animaux. L’approche est la suivante : un événement se produit, comment faut-il accepter ou pas les mesures d’un gouvernement honni ?

Le Pôle de Renaissance Communiste en France dit qu’il faut accepter le confinement avec une discipline à la fois collective et individuelle, mais attribue la situation au manque de prévoyance du capitalisme, soulignant longuement que « la macronie en guerre contre les travailleurs » est en train d’en profiter. La situation de crise est attribuée au démantèlement de tout ce qui social par le gouvernement et l’Union Européenne.

Lutte Ouvrière a une approche très similaire dans Coronavirus : les défis d’une pandémie, la faillite d’une organisation sociale, avec un angle relativement différent puisqu’il est parlé en général : « Nous payons l’incurie de nos dirigeants aveuglés par les lois du marché, du profit et de la propriété ». Les travailleurs paieront les pots cassés de la crise sanitaire, les riches s’en tirant car ils ont davantage de moyens pour se confiner adéquatement.

On reconnaît l’analyse trotskiste affirmant que la direction de la société n’est pas aux mains des bonnes personnes :

« Comme toute épidémie, celle du coronavirus est un défi lancé à la société. Mais elle révèle aussi l’irresponsabilité de notre organisation économique et sociale. Quant au mépris de classe, il suinte par tous les bouts (…).

Mais quand Macron déclare que la santé doit passer avant tout le reste, il y a de quoi être en colère. Depuis qu’il est au pouvoir, c’est la santé des profits et des banquiers qu’il a fait passer avant tout le reste, exactement comme l’avaient fait tous ses prédécesseurs. Et aujourd’hui, pour beaucoup, le mal est fait (…).

On le vit tous les jours, mais cette épidémie le confirme : quand on fait partie des exploités, on n’est rien de plus que de la chair à profits !

Et comme toujours dans cette société, les plus riches auront bien plus les moyens de se protéger. Rester confinés dans leurs belles propriétés ne leur posera d’ailleurs pas de problème et ils n’auront pas le souci d’avoir leur compte bancaire à découvert (…).

Tous les moyens doivent être mobilisés pour les hôpitaux et la santé publique. Se protéger du coronavirus et éradiquer le virus du profit et de la rapacité patronale font partie du même combat. »

Du côté du Parti Communiste International, l’analyse va encore plus dans le général, en se plaçant dans une perspective historique. On considère que la bourgeoisie témoigne qu’elle a fait faillite dans son approche générale et tout ce qui l’intéresse dans cette crise, comme toujours, c’est de sauver l’économie. On lit dans Sur les mesures prises par la bourgeoisie à propos de l’épidémie au coronavirus :

« Dépendante d’un mode de production qui vise essentiellement à la valorisation du capital en exploitant sauvagement les énergies physiques, nerveuses et sociales du prolétariat et des couches les plus faibles de la population de tous les pays, la bourgeoisie est congénitalement incapable de structurer la société avec une prévention efficace pour la préservation de la santé de l’humanité dans sa vie économique et sociale (…).

Cette dernière [la classe bourgeoise] prétend « lutter » contre l’épidémie au coronavirus avec des méthodes et des moyens qui, en réalité, peuvent être obtenus pat le simple bon sens, évidemment avec des indications médicales adéquates. Mais la bourgeoisie s’intéresse davantage aux effets négatifs que la propagation de l’épidémie a sur ses affaires, qu’à la santé de la population. »

Les philosophies politiques sont ici très différentes, d’où l’approche différente des textes. Lutte Ouvrière considère que le gouvernement va de disqualifier par rapport aux travailleurs et que par conséquent, il en ressortira une crise politique où la « démocratie ouvrière » prendra le pouvoir. Pour le PRCF, c’est la main-mise de l’Union Européenne sur la France qui va se briser sur la crise actuelle et le ressentiment populaire se tournera vers un Frexit progressiste.

Du côté du PCF(mlm) et du Parti Communiste International, tout est une question d’époque et de changement complet de paradigme. Tous deux considèrent qu’il y aura une vague révolutionnaire mondiale changeant l’ensemble des aspects de la société. Le PCF(mlm) a une lecture culturelle prônant un retour à la nature (avec aussi le véganisme), le Parti Communiste International raisonne en termes de prise de conscience prolétarienne à l’échelle mondiale (d’où son nom).

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Crise sanitaire: le désespoir à venir

Les Français n’ont toujours pas compris l’ampleur de la crise en cours, sa dimension historique. Ils pensent que c’est quelque chose de passager, un coup de tabac qui n’aura guère de conséquence : la vie reprendra son cours. C’est la même stupide naïveté qu’au moment de la lutte contre la réforme des retraites. Le monde s’effondre comme un château de cartes, mais le Français se dit : « Je pense, donc je suis ».

Les Français ont pris la route directe vers le désespoir. Quiconque s’intéresse à la culture et au monde des idées sait que depuis une décennie, les Français ont totalement abdiqué. Ils laissent les choses passer et ne se préoccupent plus de rien. Il suffit de regarder les rangs des partis politiques, quels qu’ils soient : ils sont vides.

Il y a des adhésions à des mouvements. Mais une pensée organisée, des références construites, une vraie démarche intellectuelle… tout cela n’existe plus. Quand on voit qu’à Droite, qui dispose d’une immense tradition de réflexion, c’est Eric Zemmour qui est une référence, et qu’à Gauche, on est passé à Raphaël Glucksmann, on a tout compris.

Il n’y a donc guère de pensée élaborée, construite, donc décisive, pour saisir l’ampleur de la crise sanitaire en cours, pour préparer psychologiquement à ce qu’elle va apporter, ce qu’elle apporte déjà : la désorganisation et la mort.

Prisonniers de leur croyance complète en un capitalisme tout puissant, les Français se sont réfugiés dans le déni, dans le refus de toute complexité. L’emprunt et l’accès à la propriété, voilà autour de quoi tourne selon eux le monde ! Que tout soit bouleversé, comme maintenant, est inconcevable.

Le désespoir va donc surgir. Et, avec lui, les nietzschéens, qui diront que la vie, c’est forcément régulièrement la désorganisation et la mort, et que ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort. Cette crise sanitaire transporte la barbarie avec elle, et ce depuis le départ avec ses massacreurs de la vie sauvage, jusqu’à l’arrivée avec un impact dévastateur.

On rentre dans une époque totalement différente. Jeudi 19 mars, le Premier ministre Édouard Philippe a d’ailleurs tenu ces propos qu’il savait historique :

« Nous sommes entrés dans une crise sanitaire jamais vue, jamais connue en France depuis un siècle et cette crise sanitaire va imposer un coup d’arrêt puissant, massif, brutal, à notre économie. »

Le capitalisme n’est en effet pas un train qui peut s’arrêter à une station et repartir. C’est un train qui ne s’arrête jamais. Et là, il s’arrête. Les conséquences se produisent donc immanquablement à tous les niveaux, économique comme social, culturel comme politique. Chômage, faillite, effondrement de réseaux dans la société, changement des habitudes, modification des mentalités, bouleversement des visions des choses… On n’en a pas fini de chercher à discerner les aspects.

Mais les Français seront-ils à la hauteur des défis intellectuels, moraux qui seront posés ? La peste de Camus parle d’une catastrophe et des réactions individuelles, morales ou non, selon les gens. Mais c’est là du virtuel. Même l’Occupation allemande a été, dans une grande mesure, quelque chose de virtuel pour les Français.

Là, c’est le sol qui se dérobe sous leurs pieds. C’est totalement différent. Le pseudo rationalisme béat à la française, cette ignoble combinaison de cartésianisme et de positivisme, ne peut plus tenir la route.

Il y a une ampleur inédite, quelque chose de très profond d’ébranlé. Le pire, ce serait que les Français n’en aient pas conscience, malgré les drames. Si c’est le cas, la société française se consumera d’elle-même.

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Covid-19: la terrible crise économique qui se profile en arrière-plan

Après la crise sanitaire, la crise économique ? Malgré les mesures d’ampleur annoncées par les gouvernements et l’Union européenne, il faut s’attendre à ce scénario catastrophe. Le ralentissement de la production porte un coup majeur à l’économie et l’endettement massif des États, plutôt que d’y remédier, risque fort d’aggraver la situation.

Depuis le début de l’année, d’abord en Asie puis maintenant en Europe et de plus en plus dans le reste du monde, de nombreux secteurs économiques sont à l’arrêt, ou bien tournent au ralenti.

Il y a bien sûr toute l’économie du tourisme et du transport qui est déjà gravement affectée comme chacun le sait. Le groupe Aéroports de Paris (ADP) vient par exemple d’annoncer la mise au chômage partiel de 80% de ses 6295 salariés, avec une demande d’autorisation pour… six mois.

Il y a tout un arrière-plan à cela, avec en particulier la production aéronautique qui sera impactée dans les prochaines semaines ou les prochains mois. Cela d’autant plus que le secteur est déjà en crise avec l’affaire du Boeing 737-Max et les prévisions de ralentissement de la croissance du trafic aérien préalables à la crise sanitaire en cours.

Il en est de même pour la production automobile, qui est déjà affectée par des prévisions de baisse de production à moyen et long terme pour des raisons environnementales. Depuis le début de la semaine, la production automobile (directe et sous-traitante) est à l’arrêt en France. Les constructeurs s’attendent par ailleurs pour les six semaines à venir, en raison du contexte, à une baisse de commandes de l’ordre de 75 %.

Donc, pas de production d’un côté (ce qui signifie pas de valeur créée) et pas de vente de l’autre (ce qui signifie pas liquidités pour valoriser la production réalisée) : cela mène tout droit à une crise majeure pour le secteur. Dans la presse économique, il est déjà parlé pour les mois à venir d’entrées d’argent amputées de 5 à 6 milliards d’euros par rapports à ce qui était prévu. C’est évidemment gigantesque.

Si les grands groupes seront éventuellement en mesure de surmonter cela, ce ne sera probablement pas le cas de nombreuses PME et TPE liées à cette production. Sans parler des nombreux ouvriers intérimaires du secteur, qui seront directement sans emplois pour une longue période.

Le schéma est le même pour tout un tas de secteurs industriels, sans compter l’économie des services, comme la restauration, qui de toutes manières est liée en amont à une production industrielle pour ses infrastructures et ses matières premières.

En une semaine, il est déjà observé qu’un nombre très important d’entreprises a mis de côté tous les projets de recrutement. Et plus les perspectives économiques vont s’avérer moroses suite à telles et telles annonces, plus la méfiance sera de mise, et donc le ralentissement de l’activité, et donc l’emballement dans une spirale négative.

C’est un mouvement de crise tout à fait classique et bien connu par le capitalisme, qui en connaît de manière récurrente, plus ou moins grave. Il faut néanmoins redouter que cette fois, les conséquences générales soient terribles.

Les gouvernements en ont conscience et, face à des cas concrets et immédiats (paiement des salaires, paiement des cotisations des entreprises), ils annoncent déjà des mesures de grande ampleur, voir d’une ampleur exceptionnelle, alors que la crise sanitaire ne fait que commencer.

Un plan de 200 milliards d’euros (16 % du PIB) a été annoncé en Espagne, 9,2 milliards d’euros (4,3 % du PIB) au Portugal, 47 milliards d’euros en Pologne, etc.

En France, l’Assemblée nationale a voté hier, à l’unanimité, le projet de loi de finances rectificative, permettant les mesures d’urgence. Anticipant que l’impact du Covid-19 sera très lourd, provoquant une récession (1 % du PIB), le texte assume un déficit public de 3,9% du PIB en 2020.

Autrement dit, l’État assume de s’endetter encore plus qu’il ne l’est pour supporter lui-même les défaillances de l’économie. Concrètement, cela signifie que l’État doit prendre en charge le paiement du chômage partiel des entreprises n’ayant plus d’argent et qu’il renonce, au moins temporairement, à des entrées d’argent dans les caisses.

En tout, 45 milliards d’euros d’aides ont déjà été annoncées par le gouvernement (essentiellement en report de charge), ainsi que 300 milliards d’euros de garanties publiques de prêts (cela signifie que l’État se portera garant à hauteur de 300 milliards en tout pour les entreprises qui emprunteront).

Ce mécanisme d’endettement, pour l’État et pour les entreprises par l’intermédiaire de l’État, est directement appuyé par l’Union européenne. La Banque centrale européenne (BCE) vient en effet d’annoncer 750 milliards d’euros qui seront déversés dans l’économie d’ici à la fin de l’année 2020. C’est gigantesque, cela représente 7,3 % du PIB de la zone euro.

Cette monnaie va servir ni plus ni moins qu’à racheter de la dette, notamment celle d’État en difficulté avant la crise sanitaire (comme l’Italie et l’Espagne) et qui vont l’être encore plus après celle-ci. On l’aura compris, la France sera aussi concernée.

Cela est très risqué, car la machine peut s’enrayer très vite, à cause d’une perte de confiance dans la monnaie notamment. Tout est, en effet, une question de confiance des investisseurs dans la capacité des États à rester solvable indéfiniment, et surtout dans la valeur de la monnaie.

Le problème, et on le comprend aisément si on raisonne de manière concrète et pas de manière abstraite, c’est que la valeur ne s’invente pas, elle ne se décrète pas. En injectant 750 milliards d’euros dans l’économie, la BCE prend un risque énorme, celui que ses 750 milliards d’euros ne correspondent à aucune valeur réelle, ou en tous cas pas suffisamment.

Comme l’économie est en grande partie à l’arrêt, cela peut provoquer une crise de la valeur. Autrement dit, une crise de la valeur de l’argent, exactement comme lors de la crise de 1929, puisqu’il est injecté de la valeur numéraire, sans que cela puisse correspondre suffisamment à de la valeur réelle, c’est-à-dire des marchandises produites.

Quand les gouvernements, et l’Union européenne qui est leur prolongement pour les pays membres, déclarent qu’ils vont dépenser tel ou tel milliard, ils ne vont en effet rien payer concrètement. Ils vont simplement contracter encore plus de dette.

C’est là littéralement jouer avec le feu et les marchés financiers, qui supportent cette dette, en s’enrichissant dessus, peuvent exploser du jour au lendemain, en renonçant de la financer. La panique était déjà très grande lors des crises de 2008 et de 2012, avec des mécanismes liés à la dette similaires ; elle le sera probablement d’autant plus que cette fois la production industrielle est grandement ralentie, et donc la production de valeur est réduite.

Il n’y a d’ailleurs aucune raison que les marchés financiers ne « paniquent » pas puisque même la présidente de la BCE Christine Lagarde, qui a débloqué ces 750 milliards d’euros, parle dans le même temps d’une récession considérable à venir.

Si la dégringolade s’est stabilisée hier sur les marchés boursiers, probablement suites aux annonces de la BCE censée rassurer, il faut bien voir que la situation est catastrophique depuis plusieurs jours et que « l’embellie » n’est que relative.

Rien que pour la France, le CAC 40, c’est-à dire la cotation des 40 plus grandes entreprises françaises, ou autrement dit la valeur de ces entreprises estimée par les marchés financiers, avait chuté de près de 40 % en un mois. Sur les différentes places boursières, les mécanismes d’urgence pour stopper les emballements négatifs (baisse drastiques des cours) ont été actionnés de nombreuses fois ces derniers jours, ce qui n’a rien d’anodin.

Et il ne faudrait pas croire ici, comme aiment à le faire croire les populistes de gauche, que la « finance » serait une abstraction ne représentant rien du tout. Au contraire, elle représente la façon principale dont la valeur est répartie (et donc accaparée par la bourgeoisie) dans l’économie. Quand la finance tangue, ce n’est pas la cause, mais simplement le symptôme de la crise économique, tout à fait concrète et immédiate pour tout un chacun.

Le capitalisme, qui est instable par nature, voit se profiler en arrière plan de la crise sanitaire du Covid-19, une crise économique d’une ampleur redoutable.

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«Appel au Président de la République pour le confinement total de la population»

Voici le communiqué l’InterSyndicale Nationale des Internes dont le propos est clair,  précis et ferme, face à l’urgence de la situation. Tout le contraire du gouvernement qui tergiverse sans cesse, incapable d’interdire ne serait-ce que les footing, alors même que la plupart des sportifs professionnels ont eux-mêmes cessé tout entraînement extérieur depuis le début de la semaine. Il faut un confinement massif et total de la population, un point c’est tout…

« Appel au Président de la République pour le confinement total de la population

« Vous devez cesser les demi-mesures et les discours équivoques. »

Votre responsabilité est d’être clair, précis et ferme. C’est un confinement total et absolu de l’ensemble de la population dont nous avons besoin, à l’instar des mesures déployées en Chine : aucune sortie, aucun contact interpersonnel extérieur au foyer, arrêt strict de toutes les entreprises non vitales, des transports en commun, ravitaillement des familles au domicile par des personnels protégés intégralement et avec des masques FFP2.

« Moins le confinement sera strictement appliqué, plus les réanimations seront saturées, plus nous devrons faire des choix. »

La situation à l’hôpital ne doit pas être cachée à la population :

Depuis novembre 2019, les internes se sont ralliés à tous les corps professionnels hospitaliers pour alerter sur le manque de moyens, le manque de personnel, le management délétère qui se sont instaurés à l’hôpital public depuis des années.

Tous ces problèmes sont exacerbés par la crise sanitaire actuelle. Les cadres de santé refusent que les personnels paramédicaux soient testés en masse par crainte de manquer de bras dans les services, les soignants sont contraints de travailler alors qu’ils ou elles présentes tous les signes objectifs d’une infection à coronavirus.

Les internes de médecine sont sur-mobilisés et ont accepté de faire des sacrifices importants sur leur vie et leur formation pour se mettre en ordre de marche face à l’épidémie.

« La crise de l’hôpital public n’a pas disparu avec l’arrivée du coronavirus.

En novembre, nous redoutions l’épidémie de grippe qui pourtant arrive tous les ans, imaginez ce que l’on redoute maintenant ! »

Ne soyons pas dupes, le matériel manque dans tous les services. Les masques sont manquants ou rationnés conduisant les soignants à utiliser parfois des masques en tissu cousu main, des masques chirurgicaux non protecteurs, de ne les changer qu’au plus 2 ou 3 fois par jour ce qui est propice à l’auto-contamination. Le matériel de dépistage (écouvillon, machine de test) n’est pas disponible pour tester tous les cas et les personnels afin de pouvoir mener des stratégies correctes de prise en charge. Les personnels soignants sont déterminés à sauver la population, mais la colère est à son apogée contre les politiques qui ont dégradé depuis 10 ans, d’année en année, les capacités de notre système de santé et installé, aux fonctions hiérarchiques sanitaires des technocrates incompétents et assidus à l’application des restrictions budgétaires.

« Le message actuel des pouvoirs publics est : apprenez à gérer la pénurie… »

Nous tenons à alerter la population du fait qu’il n’y aura pas de places en réanimation pour tous les patients graves quel que soit leur âge : les médecins devront faire des choix humainement très difficiles. Les jeunes en bonne santé présentent des formes mortelles. A l’heure où nous écrivons, plus de 900 personnes COVID+ occupent des lits de réanimation alors qu’il n’y en a que 5000 dans tout le pays.

« Au rythme actuel de progression de l’épidémie en France, les réanimations seront saturées dans moins de 15 jours, voire plus rapidement dans certaines régions. »

Nous exhortons enfin le gouvernement à appliquer les recommandations de l’Organisation Mondiale de la Santé et donc à investir dans des moyens pour mener un dépistage massif de toute la population !

Nous terminons cet appel par une requête adressée aux Françaises et Français. Nous apprécions vivement les démonstrations de soutien que vous manifestez par des applaudissements à vos fenêtres. Si vous souhaitez réellement protéger les soignants, nous vous invitons à respecter un confinement total, et ce même malgré l’ambiguïté des messages diffusés par le gouvernement.

« Restez chez vous : c’est le modeste prix à payer pour enrayer l’épidémie.

Nous vous sauvons, sauvez nous. »

Justin BREYSSE – Président de l’ISNI

Contact presse :

Léonard CORTI – Secrétaire général de l’ISNI

06.71.02.62.05 – sg@isni.fr »

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Politique

Décès du fasciste russe Édouard Limonov

Le russe Édouard Limonov vient de décéder, ce qui est simplement une anecdote dans notre période actuelle si difficile. Mais comme il a été une grande figure du fascisme authentique – celui à prétention romantique – et qu’il est très connu en France, il y a lieu de rappeler sa nature trouble.

Si Édouard Limonov est connu, c’est en raison d’un roman d’Emmanuel Carrère, fils de la très connue et très réactionnaire Hélène Carrère d’Encausse, qui pendant la guerre froide était la principale soviétologue française. Ce roman, au titre sobre de Limonov, a gagné le prix Renaudot en 2011 et a connu un très grand succès dans les milieux littéraires du Paris raffiné, c’est-à-dire bourgeois et ennuyé.

Limonov y est présenté comme une sorte d’aventurier des temps modernes, « voyou à Kharkov, poète underground à Moscou, loser magnifique à New York, écrivain branché à Paris, soldat de fortune dans les Balkans et, à Moscou de nouveau, vieux chef d’un parti de « jeunes révolutionnaires ».

En réalité, Limonov fait partie de l’extrême-Droite russe, dont il a été une des principales figures. D’ailleurs, le roman à prétention biographique raconte avec détails la participation massive de Limonov et de ses partisans « nationaux bolcheviques » à l’opération russe de partition de l’Ukraine.

Initialement, Édouard Limonov est un écrivain mystique, à prétention avant-gardiste. De nombreuses œuvres de lui ont été publiées en français d’ailleurs.

Dès les années 1970, il part aux États-Unis dans les années 1970, en tant que jeune dissident d’une trentaine d’années. Rapidement sans le sou malgré une vraie médiatisation, il termine à Paris où il fréquente avec succès les milieux littéraires, avant de retourner en Russie fonder, dans les années 1990, le Parti national-bolchévique.

Ce mouvement, qui avait comme symbole le drapeau nazi où la croix gammée était remplacée par le marteau et la faucille, avait en réalité deux dirigeants. D’un côté, donc, Limonov, qui ramenait toute une scène alternative pour chercher à en faire des punks et des gothiques nazis. De l’autre, le véritable théoricien de l’entreprise, Alexandre Douguine, élabora toute une théorie où « l’Eurasie » a comme mission de rétablir l’ordre dans un monde en proie au chaos à cause des valeurs occidentales.

Légende : Limonov et Alexandre Douguine

Par la suite, le « douguinisme » deviendra pratiquement une composante de la stratégie de la Russie, alors que Limonov cherchera à faire vaciller le pouvoir. Mais le mouvement, qui regroupa environ 20 000 personnes et fut adoré par les médias occidentaux en quête de sensation forte, fut finalement interdit dans les années 2000.

Légende : Les « nationaux-bolcheviques » : aucun contenu mais beaucoup d’esthétisme

Limonov s’est alors cantonné en apparence dans des publications littéraires, tout en participant à l’opposition libérale à Poutine. Une opposition tout à fait fictive, malgré les arrestations et les ennuis judiciaires, car Limonov considère en fait que Poutine ne va pas assez loin, qu’il n’est pas assez « agressif », comme il le dit.

On a ici la posture classique de l’aventurier prêt à tout pour arriver à ses fins, à se dire de gauche, de droite, à soutenir Poutine, à être contre lui, à être pour les démocrates, à être contre, etc. Ce n’est pas pour rien que, lors de son séjour en France, il écrivait à la fois pour la presse du PCF et pour la revue d’extrême-Droite Le choc du mois, ainsi que pour le journal d’extrême-Droite se prétendant de Gauche L’idiot international.

Légende : Limonov en couverture du magazine Rolling Stone, version russe, avec sa compagne bien plus jeune que lui, nue : un cliché patriarcal pour l’opposant pop star apprécié des médias russes

Limonov avait déjà, dans les années 1990, participé à la guerre en Yougoslavie du côté des ultra-nationalistes serbes. Cela a servi de modèle, pour une tentative de coup d’État pro-russe au Kazakhstan du Nord, ainsi que lors de l’intervention russe dans l’Est de l’Ukraine. 2000 personnes des restes de la mouvance « national-bolchevique » ont en effet intégré les formations militaires anti-ukrainiennes, en espérant conquérir une autonomie politique du territoire sous leur contrôle.

Évidemment, la Russie en a bien profité pour son opération de partition de l’Ukraine, pour mettre ensuite au pas ces « nationaux-bolcheviques » qui ont servi d’idiots utiles. Des idiots utiles depuis longtemps d’ailleurs, car les « nationaux-bolcheviques » étaient en fait déjà impliqués dans un esprit de division pro-russe dans l’Est de l’Ukraine dès le début des années 1990. Limonov a lui-même grandi dans l’Est de l’Ukraine, à Kharkiv.

légende : Roman « Et ses démons » de Limonov avec en couverture une radio de sa tête

Édouard Limonov est le prototype même du type sordide, du poète mystique basculant dans des romans délirants et une posture politique fasciste. Il a été un ignoble produit d’un URSS des années 1970 en totale perdition alors que le complexe militaro-industriel asphyxiait toute vie démocratique.

Et son idéologie « national-bolchevique », prototype même de l’idéologie fourre-tout, justifiant tout et n’importe quoi, sans aucune valeur morale ni culturelle, est aussi exemplaire d’une société russe déboussolée dans les années 1990-2000, avant d’être devenue totalement atone aujourd’hui.

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Coronavirus: le scandale Agnès Buzyn en dit long sur l’État

L’ancienne ministre de la Santé, qui a connu un échec cinglant aux municipales parisiennes, a décidé de balancer toute sa rancœur. Elle a montré qu’à la tête de l’État, la position adoptée sur la crise sanitaire en cours a connu de très profonds déséquilibres. Cela révèles les immenses faiblesses des classes dominantes.

Faut-il espérer que les choses se tassent en maintenant la continuité, ou faut-il privilégier la sécurité complète ? La tête de l’État n’a, selon Agnès Buzyn, pas su gérer. Elle dit ainsi, provoquant le scandale :

« Quand j’ai quitté le ministère, assure-t-elle, je pleurais parce que je savais que la vague du tsunami était devant nous. Je suis partie en sachant que les élections n’auraient pas lieu. »

« Depuis le début je ne pensais qu’à une seule chose : au coronavirus. On aurait dû tout arrêter, c’était une mascarade. La dernière semaine a été un cauchemar. J’avais peur à chaque meeting. J’ai vécu cette campagne de manière dissociée. »

Faut-il la croire ? Elle a après tout démissionné de son poste de ministre de la santé au début de la tourmente, tout cela pour espérer devenir maire de Paris. Arrivée en 3e position, c’est un échec complet. Alors que restée à son poste, elle serait une figure célèbre en France, célèbre et soutenue !

Tout cela est anecdotique sur le plan individuel, Agnès Buzyn est sans intérêt aucun. Ce qui est marquant par contre, c’est de voir que l’appareil d’État n’a pas su gouverner. Comme le dit l’adage, gouverner, c’est prévoir. Là, rien n’a été prévu, tout a simplement été évalué, de manière libérale et pragmatique.

C’est d’ailleurs encore le cas et Emmanuel Macron ne convainc pas. Jean-Luc Mélenchon, qui connaît très bien toute cette problématique étatique puisqu’il vise à prendre l’appareil d’État par une vague populiste de gauche, a parfaitement résumé la problématique qui en découle :

« Les aveux d’Agnès Buzyn dans le journal «Le Monde» (https://bit.ly/2Uh2MmL) sont consternants. Il est impossible de laisser passer sans rien relever. Il faut d’abord pouvoir vérifier si ce qu’elle dit est vrai. A-t-elle su et prévenu trois mois avant ? Et dans ce cas pourquoi rien n’a-t-il été fait ? Pourquoi raconte-t-elle cette histoire maintenant, quand il est trop tard ? Se rend-elle compte qu’elle engage sa responsabilité pénale et celle des autres personnes qu’elle dit avoir prévenues ? La mission d’information décidée ce matin en conférence des Présidents à l’Assemblée nationale doit se saisir de ces aveux. »

Là où Jean-Luc Mélenchon a tort, c’est quand il pense qu’il suffit de changer le personnel et que tout ira bien. En réalité, le capitalisme a corrompu toutes les « élites » et seul le peuple peut gouverner en tant que tel. Le souci, c’est qu’il ne le veut pas, du moins pas encore. On est donc condamné à avoir des Agnès Buzyn, ce qui fait évidemment les affaires de l’extrême-Droite qui aura beau jeu d’en appeler à un pouvoir fort.

Les deux messages de Marine Le Pen sont ainsi beaucoup plus simplistes que ceux de Jean-Luc Mélenchon, mais plus directifs :

« A PARTAGER MASSIVEMENT !

Les propos d’Agnès Buzyn, ancienne Ministre de la Santé, sont effarants.

Y a-t-il eu dissimulation de la véritable gravité de la situation aux Français ? Les mesures qui s’imposaient ont-elles été retardées en connaissance de cause ?

Nous sommes peut-être à l’aube d’un SCANDALE SANITAIRE majeur. »

« Si les propos de Agnès Buzyn reflètent la vérité, il s’agit d’un très grave scandale d’Etat. Mme Buzyn sera probablement amenée à donner des explications à la Cour de Justice, peut-être que la Haute Cour devra être saisie. »

C’est avec un exemple pareil qu’on voit bien que le populisme de Droite est toujours plus direct, plus efficace dans sa démagogie que le populisme de Gauche qui, d’ailleurs, au sens strict est une monstruosité. On a pratiquement un petit résumé de l’avenir qui nous tend les bras : des libéraux à bout de souffle, des populistes de gauche déconnectés, une extrême-Droite apparaissant de manière trompeuse comme les seuls à pouvoir gérer sans que tout s’effondre.

C’est la crise dans la crise dans le crise, et ce n’est qu’un début.

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Emmanuel Macron déclare une guerre libérale au Covid-19

Comment préserver les mentalités françaises libérales-démocrates avec un défi exigeant un sens de l’organisation et de la discipline sans failles ? Le discours d’Emmanuel Macron du 16 mars 2020 laisse sur sa faim, la rhétorique guerrière restant sans esprit de décision et sans valeur populaire.

Emmanuel Macron a largement profité du caractère présidentiel du régime ; il en paie le prix avec deux erreurs magistrales. La première, c’est d’avoir maintenu le premier tour des municipales, ce qui a été considéré comme incompréhensible. Surtout que, maintenant, le second tour est repoussé, ce qui est anti-constitutionnel, puisqu’un second tour doit nécessairement se dérouler la semaine qui suit le premier.

La seconde erreur, c’est d’avoir considéré que la crise serait gérable comme un bon père de famille français. Le 7 mars, il appelait ainsi encore les gens à ne pas modifier leurs habitudes et à sortir comme si rien n’avait changé. Le 16 mars, il en est à parler de guerre.

Or, tout le monde le comprend tout de suite, la guerre c’est la guerre. Soit on y va, soit on y va pas. Une guerre est une mobilisation générale. Emmanuel Macron est un libéral, donc il a cherché à contourner la question au maximum.

Ainsi, si on ne se confine pas sauf exception, on risque une amende de… 38 euros. En Italie, c’est la prison, en Autriche des milliers d’euros d’amendes. Et depuis 48 heures, plusieurs médias distillent déjà l’annonce de confinement au moyen d’articles indirects, faisant passer le message de l’Élysée.

Les dénégations sont d’ailleurs assez ridicules. On a ainsi hier des colonnes de véhicules militaires de l’Armée de Terre qui sont arrivées à Paris, ainsi qu’un décret « relatif aux organismes susceptibles d’accueillir des militaires en affectation temporaire » émis dimanche par le gouvernement, après avoir été pris vendredi.

Malgré la mise en place du décret un dimanche, l’armée a démenti tout rapport avec la crise actuelle, ce décret étant selon elle prévu depuis 2019 :

« Ce décret n’a strictement rien à voir avec le Covid-19 et l’implication des forces armées. Il précise la situation administrative des militaires qui servent temporairement en dehors du ministère des Armées, pour les besoins du ministère des Armées. »

L’armée a toujours pris les gens pour des idiots. Cela tient d’autant moins qu’en plus, Emmanuel Macron a annoncé la mise en place d’un hôpital de campagne du service de santé des armées en Alsace, ainsi que l’emploi de l’armée pour transporter des malades vers d’autres hôpitaux.

Le choix est de toutes façons évident. Plus rien ne fonctionne réellement en France à part l’armée. Tout le reste est travaillé par le libéralisme économique et culturel. Notons que l’armée elle subit des coupes budgétaires massives en certains domaines, notamment la médecine. Mais niveau encadrement, elle est fonctionnelle.

En situation de crise, on a donc vite fait de passé de Bonaparte à Napoléon, du président au général, et inversement, tout se ressemblant tellement qu’on ne sait plus trop. Est-ce l’homme providentiel qui en appelle à l’armée ou l’inverse ?

Les Français, indisciplinés car pourris par le libéralisme, se soumettent historiquement aisément au patriarche et à l’armée. L’armée changeant le patriarche s’il le faut et ici Emmanuel Macron joue avec le feu. Contournant le pouvoir populaire – il est en effet pour le capitalisme – il est obligé de se soumettre à une logique d’État totalement en-dehors de son périmètre libéral.

L’armée va sortir renforcé de cette situation et un appel à une remise en ordre général va de plus en plus se faire entendre. Cela ne changera rien au libéralisme quotidien et cela ne dérangera pas les Français, qui ne font plus de politique depuis longtemps. Mais cela implique la mise en place d’un régime anti-démocratique, anti-populaire.

Toute personne de Gauche sait qu’Emmanuel Macron ne peut pas, en raison de son libéralisme, assumer des mesures collectives. La Gauche est faible, désorientée, incapable d’assumer quoi que ce soit. L’ombre de l’armée se profile alors…

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Un bien étrange premier tour des municipales de mars 2020

Le maintien du premier tour des municipales par le gouvernement contraste totalement avec le confinement toujours plus nécessaire. Les résultats apparaissent ainsi comme en décalage avec la gravité de la situation.

Légalement, le second tour est censé se dérouler une semaine après le premier, mais l’incertitude prédomine dans l’ensemble de la société française, qui a regardé dubitative la tenue des élections. L’abstention a ainsi été de 56 %, contre 35,5 % en 2014.

Il va de soi que si le gouvernement a forcé les choses, c’est par souci de maintenir le légitimisme en situation de crise. Le régime se doit de montrer qu’il sait passer les crises. Car le plus dur reste à venir et de par le caractère volcanique de la situation sociale française, il faut maintenir la pression.

Comment les Français vont-ils en effet réagir quand le gouvernement ne donnera pas seulement des consignes, mais obligera par la police et l’armée, à l’instar des Tchèques et des Autrichiens, à appliquer le principe de quarantaine ? Sans parler de l’Italie, où il est formellement interdit de sortir de chez soi ne serait-ce que pour se promener seul.

Comment dire aux Français que tout rassemblement de plus de cinq personnes est interdit, alors que samedi les rues commerçantes étaient aussi pleines que les parcs le dimanche ?

Les Français ne supportent pas le changement, sauf quand il va dans le sens du non-changement. L’extrême-Droite conserve ainsi ses bastions à Béziers et Hénin-Beaumont dès le premier tour (respectivement 66 % et 78 % des suffrages), ainsi qu’à Fréjus, Beaucaire, Hayange, Villers-Cotterêts.

Et à Perpignan, seule ville de plus de 100 000 habitants gagnable pour l’extrême-Droite, Louis Alliot est arrivé en tête des scrutins avec 36,5 % des voix.

C’est le même conservatisme faisant qu’EELV engrange des succès, moins grand qu’espéré par cette structure de centre-gauche. EELV arrive en tête à Bordeaux, Lyon, Strasbourg ou encore Grenoble, pesant dans de nombreuses autre situations, remplaçant de facto la Gauche.

On constate un repli, une contraction des mentalités, et d’ailleurs la Droite se maintient tant bien que mal à de nombreux endroit en ayant misé sur les enjeux locaux, alors que LREM ne sort pas du tout gagnante, contrairement à ses espoirs.

La seule perdante, c’est finalement la Gauche. Quand il y a eu des listes d’union, les succès ont été là, mais pour le reste, elle a disparu comme proposition politique. En fait, elle perd à tous les niveaux, tant sur le plan local que sur le plan national, puisqu’elle est sans voix dans cette situation de crise.

Elle paie ici le prix de s’être mis pendant des mois à la remorque de la CGT, qui est totalement dans les cordes. Sur son site on ne trouve toujours rien quant à la situation actuelle très difficile pour les salariés, et même encore un appel irréaliste pour se mobiliser le 31 mars !

La France paie ici son décalage total, son libéralisme, son relativisme, son attitude de girouette. La France est à l’image de ce petit groupe d’ultra-gauche dénonçant ce lundi le relativisme ambiant et les attitudes individualistes, alors que deux jours auparavant il participait à un rassemblement pour le climat dans une grande ville, acte le plus relativiste et le plus individualiste qui soit.

La France est une gigantesque comédie et tant de vanité ne peut conduire qu’au désastre.

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Marseille: une attaque armée dans un bureau de vote et des irrégularités démocratiques

La dynamique populaire d’unité de la Gauche a fonctionné à Marseille, permettant de se placer devant l’extrême-Droite. Le score est toutefois très serré avec celui de la Droite et un bureau de vote a connu une agression de type mafieuse très grave avec des armes de type Paintball, pour saisir les urnes. La candidate de la Gauche déplore également de nombreuses irrégularités dans les bureaux de vote de la deuxième plus grande commune de France.

Voici le témoignage à la presse d’un proche du Printemps marseillais, la liste de la Gauche, qui était présent au moment de l’attaque armée (avec des armes de loisir, à air comprimée) :

« Ils ont déboulé à cinq dans le bureau armés de Kalachnikov, on a entendu des tirs. Tout le monde s’est caché sous les tables, ou est parti dans la cuisine. Le président a tenté de garder l’urne, mais il fait partie du clan Vassal et personne n’est en mesure de dire si l’urne a été échangée ou pas. La sécurité n’est pas du tout assurée. »

Voici le communiqué du Printemps marseillais dénonçant le contexte anti-démocratique marseillais et intitulé « La santé démocratique de Marseille mise en péril » :