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La reformation de la Droite s’accélère autour d’Eric Zemmour

Conformément à l’époque, la Droite se durcit.

Eric Zemmour sera-t-il au second tour de l’élection présidentielle au printemps prochain ? Probablement pas, mais ce n’est pas une certitude. Et surtout, ce n’est pas tant la question. Ce qu’il faut voir, c’est qu’Eric Zemmour n’est que le produit d’une situation en particulier, et que sa signification politique ne consiste en rien d’autre que la recomposition de la Droite, reflétant un changement d’époque. C’est de toute la période à venir dont il est question.

Plutôt que de recomposition, il faut d’ailleurs parler de reformation d’une Droite véritable avec une ligne dure, assumant la confrontation et les grands clivages socio-culturels. Eric Zemmour est en train de réussir ici ce que Marine Le Pen n’a pas été en mesure de faire, de par sa position à la fois trop isolée sur le plan culturel (étant considérée comme « extrémiste ») et trop sociale sur le plan économique (ce que, en raison de la crise, la bourgeoisie n’est pas en mesure d’assumer).

Eric Zemmour représente lui une droite capable de cogner fort, tant culturellement pour mobiliser derrière le drapeau national, que socialement pour porter la restructuration économique contre les ouvriers. C’est cela qu’illustre sa position à mi-chemin entre la droite classique et la droite « nationale », c’est-à-dire nationaliste.

Les derniers ralliements à Eric Zemmour en provenance du camp de Marine Le Pen sont donc des marqueurs très forts, qui assoient sa position de réformateur de la Droite. On parle ici de cadres et de personnalités majeures de l’entourage de Marine Le Pen, qui la plantent en plein vol à quelques semaines de l’échéance électorale.

Il y a eu Damien Rieu, figure de Génération Identitaire, une structure qui fut dans les années 2010 une sorte de centre de formation de la jeunesse pour le Rassemblement national. Il avait rejoint le RN et en fut un cadre important. Il a claqué la porte jeudi 20 janvier avec un communiqué expliquant que le RN est en recul, que la dynamique est maintenant du côté d’Eric Zemmour. Dans une interview du dimanche 23 janvier, il explique que son objectif est en quelque sorte d’obtenir le ralliement de Marine Le Pen (en tous cas de son électorat) à Eric Zemmour pour le second tour de l’élection présidentielle.

La veille, il y avait eu le ralliement de l’eurodéputé Jérôme Rivière, qui n’était pas moins que le patron de la délégation RN au Parlement européen. Celui-ci considère de la même manière que Marine Le Pen n’est plus en mesure de gagner les élections, alors que le positionnement Droite dure d’Eric Zemmour est par contre considéré comme satisfaisant à « l’urgence » de la situation. C’est un ralliement très important politiquement, et Eric Zemmour considère lui-même qu’il «symbolise [l’] union des droites» (ou plutôt, donc, la reformation de la Droite).

Mais la principale figure « lepeniste » ayant rejoint Eric Zemmour est bien sûr Gilbert Collard, avec une annonce faite en grande pompe pendant un meeting à Cannes. Sur le plan idéologique, Gilberd Collard ne représente pas grand-chose, lui qui n’a jamais été encarté au RN et qui est surtout une sorte d’opportuniste qui s’imagine être une « grande gueule », être dans le vrai, au dessus du lot, etc.

Sur le plan symbolique, c’est une perte énorme pour Marine Le Pen, car il représentait l’un de ses seuls « gages » venu de la société civile comme il est d’usage de le dire pour nommé des gens considérés comme non-strictement politique ou idéologique. Gilbert Collard, pour les personnes qui ont plus de 30 ans, est une figure médiatique incontournable, représentant une notoriété indéniable. C’est une sacré « prise de guerre » pour Eric Zemmour, qui en dit long sur la dynamique qu’il incarne.

A côté de cela, il y a eu également, venant de la droite classique, Guillaume Peltier, dont le ralliement dit contribuer à pousser Valérie Pécresse et les républicains vers le centre, pour aider justement Eric Zemmour à occuper le plus d’espace possible à Droite.

Tout cela est récent, en formation, mais il y a une dynamique énorme autour de cette droite dure. Il s’agit de l’actualité politique majeure, montrant la tendance à venir pour les prochaines années, bien au-delà des échéances électorales du printemps 2022. À la Gauche d’être à la hauteur pour y faire face, mais pour cela il faudra puiser dans les fondamentaux historiques en levant le drapeau rouge de la classe ouvrière et de l’internationalisme anti-guerre.

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La gauche du PCF sur la question de l’Union Européenne

Un document commun à quatre organisations.

L’expression « gauche du PCF » est ici profondément réductrice, même si elle permet de visualiser la conception des quatre structures qui ont en fait rompu avec le PCF dans les années 1990. Il s’agit du Pôle de Renaissance Communiste en France (PRCF), du Rassemblement Communiste (RC), du Parti Communiste Révolutionnaire de France (PCRF), de l’Association Nationale des Communistes (ANC).

Le document qu’ils publient en commun, chacun donnant son avis sur le thème de « la révolution socialiste et la question de l’Union Européenne », constitue le contenu d’une nouvelle revue, Echanges communistes, dont le premier numéro vient d’être mis en ligne. Le voici, mais on peut le télécharger sur le site du PCRF, du PRCF, de RC.

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Christiane Taubira, candidate des bobos et petis-bourgeois de la « primaire populaire »

Cette libérale est typique de la 5e colonne turbocapitaliste dans les rangs de la Gauche.

Entendons-nous bien : si les bobos sont insupportables, on peut inversement être petit-bourgeois et contribuer à ce que les choses aillent dans le bon sens. Mais si l’on fait du mode de vie petit-bourgeois l’alpha et l’oméga des valeurs, si l’on accepte la corruption capitaliste avec notamment un relativisme libéral généralisé, on est un ennemi du peuple.

Parce que la France est un des pays les plus riches du monde (aux dépens des autres, donc), parce que le capitalisme est aliénant en général et exploite les travailleurs en particulier, parce que la question animale exige qu’on ne transige pas, la défense de la Nature, non plus, etc.

En ce sens, la « primaire populaire » est un hold up bobo et petit-bourgeois sur le peuple, comme en témoigne la grève de la faim de sept jours réalisée par dix de ses organisateurs, pour forcer les candidats à la présidentielle du PCF, d’EELV, du PS et de LFI à participer à la « primaire populaire », afin qu’il n’y ait qu’un seul candidat de « gauche ». La grève de la faim est absolument typique de l’impuissance petite-bourgeoise, de l’auto-destruction, de la pleurnicherie et des implorations. Rien qu’avec cela, on a tout compris.

De fait, cette initiative s’appuie sur des bobos et de petits-bourgeois de gauche voulant, au-dessus des partis ou plutôt en niant les partis, faire en sorte qu’il y ait un candidat de gauche unique à tout prix à la présidentielle, afin de sauver leur peau puisqu’il est capital pour cette couche sociale qu’elle ait un poids politique pour asseoir son existence culturelle et idéologique fictive.

Les bobos et les petits-bourgeois n’existent en effet qu’entre les bourgeois et les prolétaires et sans faire du chantage et de la manipulation, ils n’existent pas politiquement, malgré leur nombre. De par la nature sociale de la France, il va en effet de soi qu’on parle ici d’une puissante couche sociale et 320 000 personnes ont embrayé pour soutenir la démarche, avec beaucoup de bruit.

On est là dans une fiction typique d’un pays capitaliste développé, d’où la figure de Christiane Taubira qui est la cheffe de file de cette démarche de « primaire populaire » qui n’est qu’une copie des primaires américaines, une forme consommatrice totalement à rebours des principes de la Gauche historique (qui s’appuie sur des valeurs, des programmes, des organisations faisant un congrès).

Les autres candidats faire valoir, révélés le 15 janvier 2022, sont par ailleurs la militante écologiste sans étiquette Anna Agueb-Porterie, le député européen et fondateur de Nouvelle Donne Pierre Larrouturou, l’ancienne adjointe à la mairie (PS) de Rennes Charlotte Marchandise. Ils servent de décoration et de prétexte pour une « primaire populaire » qui a échoué à intégrer les candidats à la présidentielle du PCF, d’EELV, du PS et de LFI.

Et pourtant, à ces candidats s’ajoutent Anne Hidalgo, Jean-Luc Mélenchon et Yannick Jadot, mis dans la liste contre leur gré (même si Anne Hidalgo avait du jour au lendemain, sans prévenir personne, accepté la « primaire populaire », pour finalement lui tourner le dos). Cela encore, c’est typique du chantage petit-bourgeois.

Tout cela n’est qu’une vaste fumisterie, équivalente aux innombrables messages sur Twitter de la part de petits-bourgeois hystériques donnant leur avis sur tout et n’importe quoi de manière prétendument « progressistes », et en fait turbocapitalistes. On parle ici de gens considérant que promouvoir l’avortement, faire l’éloge des migrants, repeindre le monde aux couleurs LGBT et affirmer le communautarisme serait de « gauche ». Eh bien non, cela ne l’a jamais été et cela ne le sera jamais.

La France a connu une Gauche historique et celle-ci ne s’effacera pas devant des « démocrates » à l’américaine oeuvrant à un renouvellement du capitalisme en estompant les conservatismes.

Oeuvrons à une Gauche historique pour réfuter le scénario à l’américaine de « républicains » conservateurs (à la Eric Zemmour, Valérie Pécresse, Marine Le Pen…) et de « démocrates » libéraux-démocrates (à la Yannick Jadot, Emmanuel Macron, Christine Taubira, Anne Hidalgo…) !

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Crise chez les post-modernes : démission à l’UCL

Exactement comme prévu.

Ce qui devait arriver arriva : la naissance d’une organisation anarchiste de type post-moderne, littéralement post-anarchiste, a produit une fuite en avant petite-bourgeoise délirante humainement parlant. En lieu et place des valeurs, des principes et de l’organisation, cela a été le libre-cours aux invectives subjectives, aux points de vue individuels accusateurs. D’où la démission de nombreux membres de l’Union Communiste Libertaire, dont voici le texte de sortie.

La naissance de cette organisation en 2019 avait été abordé ici (La fusion entre Alternative Libertaire et la Coordination des Groupes Anarchistes). Il y était dit que cela donnerait pas une organisation solide, que :

« La fusion est un saut pour encore davantage abandonner les principes de la Gauche dans son parcours historique (…). C’est en réalité une simple mutation de plus, dans le sens de l’esprit post-industriel, post-moderne (…).

L’Union Communiste Libertaire, qui vient de naître ce 11 juin, est ainsi une fuite en avant, qui ne peut être soutenue que par ceux qui sont trop heureux de liquider les expériences passées sans tirer un quelconque bilan. Il n’y a aucun esprit critique qui est fait, c’est encore et toujours le principe de « s’unir » dans quelque chose de « nouveau » et de prétendre que cela serait une solution à tous les problèmes.

C’est le refus catégorique d’assumer quoi que ce soit politiquement, d’établir des bilans, des analyses de fond quant à l’histoire et à la culture de la France, d’évaluer les succès (ou non) des luttes, des méthodes employées, etc. C’est le refus de ce qui a été la social-démocratie historiquement.

La naissance d’un groupe ultra « nouveau » ne changera rien, car il existe déjà bien d’autres groupes du même genre. Mais cela contribuera à la confusion et des esprits se feront piéger, par incapacité de voir que c’est de la camelote anarchiste d’avant le siècle dernier, une attitude anti-socialiste, anti-communiste, anti-rationalité. »

Il suffit de lire le texte de démission pour voir que cette analyse était parfaitement juste. Et que, en même temps, la position des démissionnaires est intenable parce qu’elle parle de motifs politiques sans jamais en conclure quelque chose de politique justement.

Voici leur texte :

« Nous quittons l’UCL pour des motifs politiques

Militantes et militants communistes libertaires depuis des années, plus de quarante ans pour certain.es, nous avons assisté à une transformation profonde de notre organisation, ce qui aurait pu nous convenir. Mais l’Union Communiste Libertaire (UCL), créée il y a deux ans, met à mal les relations humaines qui s’y nouent, adopte un fonctionnement qui ne recherche ni le respect de ses textes fondateurs, ni celui de ses valeurs et ne favorise pas la solidarité militante.

Le communisme libertaire est un ensemble de pratiques qui définit ce que nous prônons politiquement et de valeurs porteuses d’un projet révolutionnaire.

Son combat est de lutter contre toute domination d’un être humain sur un autre, pour construire une société solidaire. Notre courant s’incarne dans la volonté d’ancrer nos combats coordonnés dans le réel, dans le refus du dogmatisme et du sectarisme et dans la recherche de nouvelles voies de transformation sociale.

1) Les orientations

Le plate-formisme, à l’origine fondé pour tirer les conséquences de l’échec total des mouvements anarchistes pendant la révolution russe, est indispensable en ces mauvais temps.

A l’abandon au 1er congrès de l’UCL de cette orientation, s’est ajouté un sectarisme « novateur » dans notre courant. Comme si la révolution pouvait ne dépendre que des seuls anarchistes ! L’organisation n’est donc plus un outil collectif, elle est devenue une fin en soi. Ces éléments marquent selon nous définitivement la rupture de l’UCL avec toute perspective révolutionnaire.

A l’UCL aujourd’hui, la lutte de classes est systématiquement opposée à « l’intersectionnalité », alors que pour nous toutes les luttes doivent être articulées ensemble.

Les postures radicales, ou plus exactement des discours prétendument radicaux, ne remplacent pas les engagements concrets en lien direct avec les classes populaires qu’ils soient associatifs, syndicaux, politiques, ancrés dans les quartiers, les villes et les campagnes. Cela se complète avec une incapacité d’écoute et d’empathie qui contrarie notre implication sociale ; au contraire, l’utilisation d’un langage élitiste ne peut que renforcer la domination sur celles et ceux qui ne le maîtrisent pas.

L’UCL nie, de fait, que tous les prolétaires ont matériellement intérêt à combattre ensemble le sexisme et le racisme, et que c’est sur cette base que nous pouvons construire des luttes sociales articulant les luttes contre toutes les formes de discrimination et pour leurs revendications communes.

Quant à la critique de toutes les religions, incarnée depuis toujours par le mouvement libertaire, elle est devenue tabou et donne même lieu à des accusations de racisme lorsqu’elle est proposée, alors que le Manifeste de l’UCL rappelle son engagement à défendre « un projet de société libéré de l’aliénation religieuse ». Même si la liberté de croire ou non doit être défendue, les libertaires se sont toujours dressé.es contre toutes les formes d’oppression religieuse, notamment chrétiennes, juives et musulmanes.

Concernant « l’islamophobie », dont nous nous ne sommes pas dupes, cela ne doit toutefois pas conduire à exclure toute réflexion critique quand l’islam politique est au pouvoir dans certains pays ou qu’il menace les droits et les libertés dans le monde ou ici.

2) Le fonctionnement

L’évolution de l’UCL met à mal le projet communiste-libertaire.

Cette organisation a accepté le principe d’une communication interne violente où le débat n’est plus nourri par des points de vue politiques mais s’exprime par anathèmes à partir d’une essentialisation des militant.es. Ainsi, ce n’est plus tant ce qui est argumenté que la personne qui parle, définie par la couleur de sa peau, son âge, son genre, etc. Or les personnes doivent être reconnues dans leurs propos et leurs actes, et non par la liste des dominations vécues. Quant aux vécus et aux ressentis, s’ils ont une place, ils ne justifient pas l’imposition d’une ligne politique.

Nous ne sommes pas responsables de qui nous sommes, uniquement de l’impérieuse nécessité d’interroger de quoi nous sommes porteurs ou porteuses et d’entrer par là même en transformation. Et selon nous, l’organisation a vocation à accompagner ses membres dans ce processus intime et politique.

A l’inverse, dans l’UCL s’expriment dorénavant surtout celles et ceux qui sont maîtres du temps et adeptes des faux procès, les autres n’ayant comme choix que de subir l’opprobre public, de s’autocensurer ou de se taire.

Des accusations sans fondement de racisme ou d’antisémitisme, de sexisme, de complicité de la culture du viol, de transphobie, de validisme, de putophobie, etc. sont proférées sans arguments, ni clefs de compréhension. Il est pourtant évident que si celles-ci étaient fondées, des procédures d’exclusion auraient été mises en œuvre.

Ces propos accusateurs, qui ont pu s’exprimer au dernier congrès, sont sans doute minoritaires ; ils camouflent en réalité des divergences politiques. Et la majorité laisse dire.

Au sein de l’organisation, les liens humains sont donc abîmés. Et le 1er congrès a illustré ce malaise relationnel entre les militant.es, devenus incapables ne serait-ce que de boire un coup ensemble après un moment de confrontation politique.

3) L’absence d’élaboration

Les positions politiques sont caricaturées et stigmatisées, la complexité du réel déniée. Et la pratique, certes longue et difficile, de l’élaboration collective et de la confrontation politique n’est plus une réalité. La richesse de la réflexion et la recherche de sens sont passées à la trappe !

A l’image des likes et insultes des réseaux sociaux, le congrès a brillé par sa pauvreté intellectuelle, dans le prolongement d’un fonctionnement où l’entre-soi est privilégié.

Les commissions ne produisent au final que peu de réflexions.

Seul l’antipatriarcat « post-moderniste » semble avoir le vent en poupe et constitue de fait un bureau politique qui ne dit pas son nom, minorant ainsi la parole des militantes qui portent une approche et une méthodologie autres. Le genre est en effet devenu le prisme de tout échange. Les camarades hommes hétérosexuels sont, notamment, soumis à une critique permanente du simple fait de ce qu’ils sont, quel que soit leur engagement concret dans la lutte pour l’égalité des droits, y compris dans leur vie quotidienne.

La réflexion de l’UCL est donc devenue médiocre et réductrice, éloignée de la complexité des classes populaires, son action bien peu mise en œuvre, le travail avec d’autres organisations le plus souvent fustigé, et le débat interne empêché et perverti.

4) Crise à l’UCL

Si notre projet est encore largement utopique parce que la société capitaliste y fait obstacle, notre réflexion et nos pratiques doivent maintenir l’exigence d’une solidarité respectueuse de toutes et tous. Et si le combat libertaire est indispensable dans cette société où l’oppression de classe est centrale, c’est essentiellement au nom de son identité qu’il subit la répression.

De très nombreux et nombreuses camarades ont déjà quitté l’organisation, choqué.es de sa violence interne et de sa dérive politique – sans que cela ne soit toutefois interrogé par ses mandaté.es qui répondent par le déni aux demandes d’explication. Loin de s’être concrétisée, la recherche du « changement d’échelle » ayant conduit à la fusion AL-CGA est déjà un gâchis conséquent.

Car l’UCL ne conçoit plus la remise en questions, alors que celle-ci illustre la spécificité libertaire de notre engagement. C’est à ce titre que notre démission collective de l’organisation rencontrera certainement le mépris de celles et ceux qui en sont les fossoyeurs.

Nous continuerons donc à militer dans d’autres cadres, avec celles et ceux qui restent nos camarades.

Car il est un temps où la cohérence politique conduit à la rupture. Ce temps est devenu le nôtre.

Signataires

Albert (ex UCL 93 centre), Basile (ex UCL 93 centre), Cécile (ex UCL GPS), Cédric (ex UCL Allier), Clo (ex UCL 93 centre), Daniel (ex UCL Aveyron), Edouard (ex UCL Nîmes), Émilie (ex UCL Nîmes), Erwan (ex UCL Lorient), Evelyne (ex UCL Amiens), Gémy (ex UCL 93 Centre), Grégoire (ex UCL Orléans), Guillaume B (ex UCL Orléans), Jacques Dubart (ex UCL Nantes), Jean-André (ex UCL Aveyron), Jean-Michel (ex UCL Amiens), Jérôme (ex UCL Montreuil), Laeti (ex UCL Nantes), Laurent (ex UCL 93 centre), Matthias (ex UCL Orléans), Max (ex UCL St Denis), Nico (ex UCL Thionville), Noël (ex UCL Melun), Nunu (ex UCL Aveyron), Olivier (ex UCL 93 centre), Paul (ex UCL liaison Toulouse), Quentin (ex UCL Orléans), Rémi (ex UCL Lorient), Rémi (ex UCL Orléans), Rodolphe (ex UCL liaison Toulouse), Sébastien (ex UCL Nantes), Valentin (ex UCL Nîmes), Xavière (ex UCL 93 centre)« 

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Le FC Bandera, un club à l’identité nationaliste ukrainienne à Paris

Une association culturello-politique au service du bandérisme en France.

Il y a en France une population ukrainienne, vivant principalement dans les grandes villes. Celle-ci, comme toutes les minorités nationales en France s’organise culturellement, associativement, dans l’idée de se métisser tout en gardant une part de culture nationale d’origine. Cependant il arrive, comme pour d’autres minorités nationales, qu’il y ait une frange ultra, qui consiste en une expression d’un nationalisme exacerbé. C’est là ce que représente le FC Bandera.

Cette équipe de football parisienne est à la gloire du collaborationniste ukrainien Stepan Bandera. Il est une figure érigée par les ultra-nationalistes ukrainiens en héros national. Elle évolue en Commission Football Loisir, c’est un championnat dans un esprit associatif, de loisir.

Le club de football est aux couleurs de l’UPA (Armée insurrectionnelle ukrainienne) , structure armée pro-nazi, anticommuniste et antisémite. L’UPA a massacré les Polonais en Volhynie, participé aux côtés des nazis à la Shoah, et a tenté de liquider les partisans soviétiques.

Il existe aujourd’hui en Ukraine toute une frange du fascisme ukrainien qui se revendique de Bandera et de son héritage, c’est notamment Pravy Sektor (secteur droit).

Sur le site est fièrement affiché le slogan, le salut en fait, du milieu nationaliste ukrainien: « Gloire à l’Ukraine ! Gloire aux Héros ! » «  Слава Україні! Героям слава! » L’un dit « Gloire à l’Ukraine », l’autre personne répond « Gloire aux héros ».

Les joueurs posent avec le drapeau ukrainien et la bannière bandériste avant les différents matchs disputées en CFL. Le maillot des joueurs est fait par l’équipementier polonais Gera, et le sponsor de l’équipe n’est autre que l’entreprise de BTP du président du FC Bandera, étant lui-même un notable dans la diaspora ukrainienne à Paris.

Sur le groupe Facebook du club il y a plus de 1000 membres, et sur le Facebook personnel du président du club, des partages de l’ancien conseiller du ministère de la Défense qui détient un média suivi en Ukraine, mais aussi de la propagande de Pravy Sektor (le secteur droit). Parmi ses mentions « j’aime », de la propagande nationaliste, des médias pro-américains comme radio svoboda mais aussi des groupes armés comme UNA (Assemblée nationale ukrainienne – Autodéfense ukrainienne).

Le club est une véritable association culturello-politique au service du bandérisme en France, il organise aussi des soirées pour ses membres et des sorties. C’est par le biais culturel que se développe le nationalisme chez ses joueurs.

Cela témoigne bien sûr d’un esprit au sein de la diaspora ukrainienne en France, au-delà du club. Il y a par exemple chaque année les commémorations de l’ « Holodomor » organisées par les nationalistes ukrainiens.

La vision passéiste de l’Ukraine avec la glorification d’un traître à la culture ukrainienne qu’est Bandera ne peut à terme que renforcer l’escalade vers la Guerre en Ukraine, en mobilisant y compris ici, en France, la diaspora ukrainienne vers un nationalisme exacerbé. Cela prépare les Ukrainiens en France à laisser l’Ukraine être un pion au service des États-Unis contre la Russie et ses rêves impérialistes. De fait, en mettant en avant Bandera comme symbole du club, cela l’inscrit dans la lignée des clubs fascistes, et donc militaristes.

Il existe pourtant une culture ukrainienne progressiste et populaire. Les ukrainiens de France ne doivent pas tomber dans le panneau proposer par le club FC Bandera qui n’est qu’une antenne culturelle du fascisme ukrainien. Les peuples d’Ukraine et de Russie sont des peuples amis, ayant une base culturelle commune.Paix entre nous, guerre aux tyrans.

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Les motivations de la dissolution des « Zouaves Paris »

Le ministre de l’Intérieur a publié un décret très motivé contre un groupement fasciste.

Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmin a décrété mercredi 5 janvier 2022 la dissolution de la bande de fascistes néo-nazis « les Zouaves Paris ». Voici l’exposé des motifs, qu’il a d’ailleurs lui-même publié avant la parution officielle du décret. La motivation du ministre, sur instruction du Président de la République, est extrêmement politique, avec en préambule la question de la violence, puis surtout une vigoureuse condamnation idéologique et culturelle sur le fond.

L’argumentaire est extrêmement détaillé, montrant que les services de police français connaissent bien leur dossier (il en est de même en ce qui concerne l’ultra-gauche, malgré ce que ces gens s’imaginent). On remarquera par ailleurs l’emploi du terme « antifa » sans guillemets pour évoquer les groupuscules d’ultra-gauche opposés à l’ultra-droite, banalisant ainsi leur existence et leur nomination sous ce terme. On remarquera également une défense évidente de l’idéologie LGBT ainsi que l’usage de la notion post-moderne (typique de l’idéologie LGBT) d’« identité de genre ».

En tant que libéral, membre d’un gouvernement dont le fondement est la défense et le renforcement du capitalisme « entrepreunarial », Gérald Darmanin ne s’oppose évidemment pas au fascisme au nom du Socialisme. Toutefois, la ferveur de son exposé antifasciste, notamment sur la question du racisme (« les Zouaves Paris » sont des suprémacistes « blancs » et des antisémites assumés) montre bien la grande erreur que fait l’ultra-gauche (et parfois la Gauche elle-même) d’associer Emmanuel Macron et son gouvernement au fascisme, ou en tous cas à relativiser sa différence d’avec l’extrême-Droite.

Voici le texte [le ministre n’a pas publié la dernière page avec le décret lui-même, qui ne consiste probablement qu’en un article et une phrase comme d’habitude] :

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L’opération Christiane Taubira, hold-up centriste sur la Gauche

« Haut les mains et votez pour moi ! »

Faut-il que la Gauche soit à ce point au fond du trou pour qu’une Christiane Taubira puisse ainsi débarquer, tirant elle-même du chapeau sa propre candidature, pour l’imposer à tous ? A moins de quatre mois de l’élection présidentielle ?

Quel spectacle lamentable offre en effet la « gauche » française, errante dans le néant des sondages et des opinions, sans les idées, sans le peuple, très loin de son histoire et de ses immenses conquêtes du XXe siècle. Alors il y a une nouvelle candidate, du moins l’envisage-t-elle, pour faire une simple vidéo de 3 minutes disant à tout le monde qu’il faut la rallier, pour la seule raison qu’elle est là… Le fond, le programme, les idées ? Pas besoin, les formules creuses et autres successions de lieux communs sont censées suffire à faire d’elle la bonne personne, là où tous les autres échouent.

Cela ne tombe pas du ciel. Christiane Taubira est ici la terrible illustration de la faillite de la Gauche, la vraie, celle de la classe ouvrière et du Socialisme. Car Christiane Taubira n’est pas de gauche, elle ne vient pas de la Gauche. Par contre, elle a depuis longtemps gravité autour, tantôt pour la faire perdre, comme en 2002 où elle a maintenu coûte que coûte une candidature, pour le Parti radical de gauche, ayant fini de plomber Lionel Jospin et ouvert la voie à Jean-Marie Le Pen et Jacques Chirac au second tour, tantôt pour la pourrir de l’intérieur, comme en 2012 quand elle est devenue l’insupportable ministre de la Justice de François Hollande.

« Insupportable », car ministre d’un État en faillite et d’une « Justice » à la dérive, incapable de protéger la population d’une ambiance toujours plus violente et corrompue, laissant pourrir la société sur elle-même, particulièrement dans les cités populaires où règnent les bandits devenus mafieux.

De ce point de vue, Christiane Taubira a été une bénédiction pour la Droite et l’extrême-Droite : qu’il est facile face à elle de prétendre être le parti des classes populaire et de la société, en critiquant le laxisme de cette (fausse) gauche béate et hors-sol, bobo et stupide.

Il ne faut pas être dupe de l’opération menée par Christiane Taubira, qui n’a rien de spontanée. En amont, il y a toute une mouvance de bourgeois parisiens à l’origine d’une pseudo-primaire « populaire », taillée sur mesure justement pour Christiane Taubira, dont elle est forcément la figure ayant été la plus plébiscitée. Cette « primaire » n’a rien à voir avec le fonctionnement historique de la Gauche, basée sur les idées et la démocratie militante. Cela a tout à voir par contre avec la machinerie anti-démocratique et surtout anti-socialiste des Primaires américaines, ce qui de surcroît est tout à fait conforme à la perspective des fondateurs bobos des primaires à la française.

Il s’agit en effet de bons petits soldats du turbo-capitalisme et de la consommation « inclusive ». Il y a parmi eux surtout Samuel Grzybowski, à la tête du cabinet de conseil Convivencia, une « équipe d’experts en inclusion et management de la diversité ». Le but est d’aider à la « conquête de nouveaux marchés » et la « Réduction des risques et conflits » dans les entreprises. En l’occurrence, il y a comme entreprises clientes d’immondes monopoles du capitalisme tels Total, Décathlon, Orange, Michelin. Il y a aussi le Ministère de la Justice…

Voilà le cœur de cette pseudo-gauche post-moderne.

Tout cela est puant, et s’il y avait une vraie Gauche en France, tous ces gens n’oseraient même pas ne serait-ce que prononcer le mot « gauche ». Ils seraient considérés comme ce qu’ils sont, c’est-à-dire d’horribles libéraux, plus proches de la Droite que du peuple, des cousins de Valéry Giscard d’Estaing et d’Emmanuel Macron, et des ennemis farouches de la classe ouvrière.

Et il faut ici dénoncer ici le rôle de la direction actuelle du Parti socialiste, qui déroule le tapis rose à Christiane Taubira. Un tapis peu reluisant certes, car la « peut-être » candidate n’a pas beaucoup de chances dans cette élection. Mais politiquement, historiquement, un tournant se produit, avec un Parti socialiste renonçant peut-être définitivement à sa propre existence.

C’était déjà le cas avec la candidature incroyable Anne Hidalgo, la maire d’une des plus riches et florissantes métropoles du capitalisme mondial. Mais face à son échec dans les sondages, la maire de Paris s’est tournée du jour au lendemain, sans prévenir personne, descendant même d’un train pour repartir dans l’autre sens pour l’annoncer, vers l’idée d’une primaire (qu’elle avait auparavant refusé et critiqué). Mais là c’est la faillite complète.

Tout est à reconstruire. Il faut la Gauche historique, sans céder en rien aux libéraux-sociaux gouvernementaux, à l’ultra-gauche spontanéiste, aux post-modernes au service du turbo-capitalisme. Il faut un retour aux sources, au drapeau rouge!

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La Gauche française n’est-elle plus qu’une variante de radical-socialisme?

Le radicalisme est si puissant qu’il a neutralisé le mouvement ouvrier lui-même.

On connaît l’histoire : proclamée en septembre 1870, la IIIe République ne se consolide pleinement qu’à la fin du XIXe siècle. Pour cela, il lui faudra certes réprimer la Commune de Paris, mais aussi et surtout passer deux crises politiques portées par les courants national-populiste, le boulangisme avec un général putschiste, puis l’antisémitisme lors de l’Affaire Dreyfus.

Du fait d’une opposition à la Droite légitimiste, donc d’orientation monarchiste, le Radicalisme est classé comme d’ « extrême gauche » dans le dernier tiers du XIXe siècle. Puis, avec l’émergence du Socialisme en parti constitué, il devient de Gauche, pour finir de centre-Gauche avec la naissance du Communisme en Russie en 1917. C’est pourquoi ce courant passe l’Histoire à travers de multiples déclinaisons : républicanisme, républicanisme social, radicalisme, radical-socialisme…

Alexis Corbière, qui a été à la Ligue communiste révolutionnaire de 1993 à 1997, au Parti socialiste de 1997 à 2008, puis avec Jean-Luc Mélenchon, se définit ainsi comme « républicain-social ». C’est typique des gens réfutant le mouvement ouvrier, le socialisme et cherchant une alternative « républicaine ».

En France, le poids de l’idéologie radicale est telle qu’elle a d’ailleurs littéralement neutralisée le mouvement ouvrier dans sa conquête du socialisme. On parle alors du « radical-socialisme » et il suffit de voir que la SFIO a été dirigée à ses débuts par Jean Jaurès pour comprendre que même le parti supposé du Socialisme ne fut en réalité qu’une variante de ce Radicalisme.

Jean Jaurès est en effet à la base un professeur de philosophie qui se moque de la politique. Là aussi, c’est l’histoire qui le soulève et le fait rejoindre la politique, bon gré mal gré. Sa lecture des choses ne sera qu’une synthèse de Gauche du radicalisme, quand un Georges Clémenceau en proposera une synthèse de Droite.

Il suffit de regarder les lignes directrices émises par Camille Pelletan lors du congrès de fondation officielle du Parti radical en 1901, soit quelques mois avant la formation du gouvernement d’Émile Combes réalisant le radicalisme :

« Ce qui nous sépare à cet égard des socialistes collectivistes, c’est notre attachement passionné au principe de la propriété individuelle (…). L’ère des résolutions doit s’ouvrir. C’est ce que le suffrage universel exigera, et alors l’union des républicains de toutes nuances contre le cléricalisme, contre les entreprises césariennes, contre les pouvoirs d’argent, pour la cause de la justice sociale, cette union dont ce congrès a été une si éclatante affirmation sera féconde pour la République et pour la patrie. »

On retient du gouvernement d’Émile Combes la grande loi de séparation de l’Église et de l’État de 1905, en oubliant qu’il fut aussi à l’origine des premiers dispositifs départementaux d’aide sociale à l’enfance et de la première loi d’assurance sociale pour les vieux infirmes et incurables. Le radical-socialisme, c’est l’attachement au principe de la justice sociale par l’impôt progressif.

Voici comment Léon Bourgeois, militant radical de la première heure définit la « politique radicale » en 1908 :

« La nation ne jouira de la paix que lorsqu’elle aura créé un ensemble complet d’assurances qui garantisse tout individu contre les risques de la maladie, des accidents, du chômage, de l’invalidité, de la vieillesse. De là la nécessité de lourdes charges pour la collectivité (…). [C’est pourquoi il faut] une progression qui imposera nettement à chacun une charge véritablement correspondante aux bénéfices qu’il tire de la société. Réforme fiscale et assurance sociale, ce sont donc bien les, deux articles essentiels et inséparables par lesquels se caractérise la politique immédiate de notre parti. »

Que disait Jean Jaurès ? En substance, à peu près la même chose, à ceci près que pour lui l’affirmation de la République devait finalement abolir les classes sociales, réaliser la « démocratie sociale », et donc selon lui le Socialisme. Ce n’était donc bien qu’une variante de Gauche de ce tronc commun radical. On retrouve souvent la franc-maçonnerie comme force intellectuelle « universelle » et rassembleuse à l’arrière-plan, Jean-Luc Mélenchon s’en revendiquant historiquement.

D’où le fait que la social-démocratie allemande a tiré à boulets rouges sur le « socialisme » à la française, incapable de n’être pas autre chose qu’un radicalisme-social ultra-poussé. Le marxisme, le Socialisme comme courant distinct du radical-socialisme, n’a été concrètement qu’un produit d’importation extérieure, au départ lié à la social-démocratie allemande, puis à l’Internationale communiste après 1919.

Une influence d’ailleurs toute limitée : les grands moment de la Gauche française n’ont-ils pas été qu’une application par la Gauche de l’idéologie radical-socialiste ? C’est le Front populaire de 1936 avec le PCF qui devient le champion de la défense de la République, ou le programme du CNR de 1944 avec « l’éviction des grandes féodalités économiques et financières de la direction de l’économie ».

Cela ne pouvait pas marcher et au fur et à mesure le radicalisme a pris le dessus. D’ailleurs, pour Sciences-Po, François Hollande et tous les candidats de la Gauche gouvernementale depuis plusieurs décennies, la France se gouvernerait au « centre », il faudrait se fonder sur le « centre », on se ferait élire grâce au « centre », etc.

Le grand lessivage des années 1990-2000 a simplement fini de raccorder la Gauche française à cette matrice radicale, avec le Parti socialiste comme héritier principal, Fabien Roussel et Jean-Luc Mélenchon en variante de Gauche, et Emmanuel Macron comme variante de Droite.

Qu’on compare leurs propositions avec le programme commun de 1972. C’est la nuit et le jour.

Ce n’est clairement pas comme cela que la Gauche va pouvoir sortir de l’impasse politique dans laquelle elle est plongée. Pour faire face aux turbulences historiques telles qu’elles se présentent actuellement, la Gauche française ne pourra s’en sortir qu’en assumant le meilleur de l’héritage politique, rouge, du mouvement ouvrier français, mais aussi et surtout international.

C’est là un devoir historique!

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Le leader des « Zouaves Paris », en passant par l’Ukraine et l’Arménie

L’extrême-Droite activiste est formée.

Les « Zouaves Paris » sont un regroupement de castagneurs comme l’extrême-Droite en a toujours connu ; il s’agit ici d’une sorte de prolongement du GUD basé à la faculté d’Assas et qui n’existe plus depuis quelques années. Et on se dit qu’il ne s’agit que de cela, en particulier quand on voit ce qui s’est déroulé au meeting d’Eric Zemmour du 5 décembre 2021, où celui-ci a lancé son mouvement politique « Reconquête ».

Des gens de SOS Racisme ont en effet tenté le buzz facile en plein meeting en tentant de dénoncer le racisme au moyen de t-shirts (« non au racisme »), ce qui leur a valu une volée de bois vert de la part justement des « Zouaves Paris ». De par la présence très nombreuse de journalistes, tout a été filmé et on se dit qu’ils ont été idiot de faire cela. D’ailleurs, le leader des « Zouaves Paris », Marc de Cacqueray-Valmenier, a été interpellé le 14 décembre 2021.

Or, il faut voir les choses avec bien plus de profondeur, bien plus d’intelligence, c’est-à-dire certainement pas comme les anarchistes et tous les spontanéistes fonçant tête baissée dans les pièges de l’extrême-Droite.

Pourquoi cela ? Parce que l’extrême-Droite activiste en France ne vise pas à la formation d’un mouvement de masse. Sa stratégie n’est pas celle historiquement du fascisme italien et du nazisme allemand. Sa stratégie est similaire au fascisme espagnol : organiser des provocations parallèlement à un mouvement de Droite très dur de type électoral et à une tendance militaire au coup d’État.

Si l’on se dit que l’extrême-Droite activiste vise à recruter, à se présenter de manière un minimum correctement, alors c’est idiot. Si l’on comprend toutefois que son rôle est provocateur-paramilitaire, alors on saisit que c’est parfait. Cela fait du bruit, cela pousse à l’affrontement : c’est la politique de la provocation permanente, une forme perverse de la guerre à l’intelligence.

Pour preuve, regardons ce qu’a fait le leader des « Zouaves Paris ». Lors de l’intervention militaire de l’Azerbaïdjan au Nagorny Karabagh, il s’est précipité là-bas du côté arménien. Il faut des réseaux pour cela, en plus d’une certaine orientation politique. Rappelons qu’Eric Zemmour a choisi justement mi-décembre un voyage en Arménie, pour tenter de présenter ce pays en souffrance comme un rempart chrétien conservateur nationaliste identitaire.

Le leader des « Zouaves Paris » a également fait le voyage en Ukraine, rencontrant toute la mouvance néo-nazie autour du bataillon Azov. Le voici avec Olena Semenyaka, la porte-parole de ce mouvement proposant la « reconquête » de l’Europe, un terme repris… par Eric Zemmour.

Les néo-nazis ukrainiens ont servi d’importante plaque tournante idéologique pour l’extrême-Droite activiste français, en remplacement en quelque sorte du mouvement italien « Casa Pound ». Que ce soit pour la mouvance du « Bastion social », celle des hooligans « indépendants » de « Ouest Casual » ou celle de « Autour du Lac », basée en Haute – Savoie.

Qu’est-ce que cela montre ? Disons les choses directement. La scène « antifa » à la française est composée d’une mouvance sans idéologie, sans perspectives politiques, elle existe de manière spontanéiste, sur une base sociale petite-bourgeoise un jour-là, un autre jour là-bas, sans continuité ni principes.

L’extrême-Droite activiste fait elle de la politique, elle a des orientations, elle suit des stratégies bien précises, d’ailleurs toujours plus élaborées. Elle accompagne une droitisation de la société, l’émergence du mouvement « Reconquête » d’Eric Zemmour, ainsi bien sûr que le « Rasemblement National » de Marine Le Pen.

Il faut donc arrêter de se moquer des « fachos », il faut prendre les fascistes au sérieux. Pour cela il faut comprendre le fascisme comme l’a fait la Gauche historique. Les fascistes sont un outil pour le capitalisme en crise, comme la guerre. Ils sont cela et ils ne sont rien d’autre que cela.

Qui veut vaincre les fascistes doit vaincre le fascisme, et cela veut dire comprendre ce qu’est le capitalisme, sa crise, sa course inéluctable à la guerre.

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Politique Rapport entre les classes

Le programme commun socialiste-communiste de 1972

Un document historique très important.

En comparaison avec le Parti socialiste et le Parti Communiste Français du début du 21e siècle, c’est pratiquement de l’ultra-bolchevisme!

progcm72

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Reconquête ! d’Eric Zemmour: la naissance d’un grand mouvement de droite «dure»

L’UNI a son parti…

En lançant son nouveau parti nommé Reconquête !, Eric Zemmour réactive la militance de Droite. Autour de lui, il y a en fait tout ce que la Droite compte de cogneurs, de « fachos » adeptes du coup de force et de l’action directe, bref, de militants.

Il faut penser ici bien sûr à l’organisation étudiante UNI, typique de cette démarche militante dure de la Droite… Et donc avec Reconquête !, ces gens ont maintenant une organisation ayant une envergure nationale et une audience massive.

C’est justement cette mouvance qui est à l’origine de la candidature d’Eric Zemmour, et donc de son nouveau mouvement. On retrouve comme personnage principal (en tant que première conseillère politique) la jeune Sarah Knafo (née en 1993), qui est une des principales organisatrices de la fameuse « Convention de la droite » en 2019. Nous avions bien insisté dessus à l’époque : cette convention était un moment clef pour cette Droite militante, autour de la figure politico-idéologique de Marion Maréchal. C’était l’affirmation d’un néogaullisme conquérant, en mode « dur », dans le sens de rentre-dedans, assumant franchement la confrontation.

Il faut ajouter à cela évidemment tout l’apport politique et surtout culturel de la mouvance des identitaires. Ces gens, pendant les années 2010, ont eu en quelque sorte le rôle de mouvement de jeunesse militante parallèle au Front national (devenu Rassemblement national), mais sur une base bien plus à droite que ce que faisait Marine Le Pen. Tous ces apports, des identitaires à Marion Maréchal en passant par l’UNI, de la Droite militante dure donc, synthétise maintenant quelque chose autour d’Eric Zemmour. Et cela se fait maintenant avec des relais haut-placés, en l’occurrence le Général de la Chesnais qui est maintenant directeur de campagne d’Eric Zemmour. On parle ici de quelqu’un ayant été major général de l’armée de terre de 2014 à 2017 (soit le « numéro 2 » de ce corps). Sans surprise, ce général quatre étoiles est un proche du général Pierre de Villiers, dont nous avons régulièrement parlé ici.

Il y a comme organe de presse surtout le magazine Valeurs Actuelles, qui assume, diffuse et génère cette ligne de droite dure, en mode militant. On y lit beaucoup de choses allant dans le sens de la candidature d’Eric Zemmour, mais surtout d’une nouvelle droite dure et militante.

C’est, dit autrement, tout l’inverse de la Droite libérale et technocratique représentée par Valérie Pécresse (vainqueur de l’investiture de la Droite au congrès Les Républicains) ou encore du quotidien Le Figaro. La droite dure de Reconquête ! vise bien sûr Les Républicains également, avec des « noms » comme Guillaume Pelletier ou Eric Ciotti (second du congrès Les Républicains pour l’investiture de la Droite à la présidentielle), qui assument ouvertement leur proximité avec Eric Zemmour.

Il y a là tout un magma, quelque chose de nouveau et de très dangereux qui prend forme. Cela change considérablement la donne politique en France pour la Gauche. Il va falloir être à la hauteur, avec tout le sérieux idéologique et la dimension culturelle qu’il faut pour faire face à cette nouvelle vague de droite dure. Marion Maréchal avait prédit et milité pour un « mai 68 » de Droite… C’est clairement ce qui est en train de se passer avec Eric Zemmour et son mouvement Reconquête ! attirant une génération de militants radicaux qui n’hésitent pas à user de la force, politique certes, mais aussi physique, pour peser et exister.

Rappelons ici les nombreuses arrestations de militants d’extrême-Droite, présentés par l’État comme d’ultra-Droite et retrouvés en possession d’armes, d’explosifs, etc. C’est une expression de la crise, une polarisation violente caractérisant la lutte des classes.

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Eric Zemmour: la « Reconquista » national-populiste

Le mythe de la « reconquête » contre le « grand remplacement ».

Le candidat à la présidentielle 2022 Eric Zemmour a tenu dimanche 5 décembre 2021 son premier grand meeting de campagne à Villepinte, en région parisienne. Devant une foule d’au moins 12 000 personnes qu’il a sans-cesse harangué à la manière d’un tribun, le nom de son nouveau parti a été dévoilé : Reconquête!

Le terme a été répété à de nombreuses reprises, comme un fil conducteur marquant une idée forte et incontournable. C’est évidemment une référence à la « Reconquista », terme castillan désignant la reconquête de l’Espagne par les chrétiens face aux différents peuples musulmans. Débuté en 722 et aboutissant en 1492 par la prise de Grenade, la « Reconquista » fait désormais figure de mythe mobilisateur identitaire.

Ce genre de lutte d’influence territoriale du Moyen Âge n’a évidemment rien à voir avec la modernité des nations au XXIe siècle, mais c’est justement cela qui est utile et efficace pour un Eric Zemmour. Ce dont il a besoin, ce dont il est l’expression, ce n’est pas la rationalité, ni l’Histoire avec un grand « H », bien au contraire.

Eric Zemmour est un dangereux populiste, car il galvanise les foules avec des raccourcis faciles, de fausses grandes idées clefs en mains empêchant toute réflexion et prise de conscience politique sérieuse et constructive. Ce qu’il vise, c’est maintenir la France petite-bourgeoise et pantouflarde dans son fantasme d’un âge d’or des années 1950-1960 avec d’une prétendue vie paisible et harmonieuse. La base de son audience, c’est typiquement les gilets-jaunes, la France des petits entrepreneurs qui veulent un État fort et puissant, mais ne surtout pas payer d’impôts ni ne respecter de normes sociales et collectives.

Ce qu’il y a en réalité, c’est que le capitalisme est en crise, et qu’il a besoin d’un Eric Zemmour pour abrutir les consciences et détourner les regards des vraies questions. Le nationalisme est ici la substance parfaite, le poison terriblement efficace pour ne pas assumer la réalité. Alors Eric Zemmour est là pour parler de « reconquête » (sous entendu, de la France), face à ce qu’il nomme le grand remplacement. S’il gagne dit-il, « ce ne sera pas une alternance de plus, mais le début de la reconquête du plus beau pays du monde ».

La cible de la reconquête est évidemment, et sans aucune ambiguïté, l’immigration musulmane, dont il a parlé à de nombreuses reprises durant son meeting. Il n’a presque parlé que de ça d’ailleurs, ciblant ici l’islam, là « l’immigration venue de l’autre côté de la méditerranée ».

Voici un petit extrait qui résume quasiment à lui seul ses 1h30 de meeting national-populiste à la Donald Trump :

« Depuis des mois, je sillonne la France, je rencontre les Français. Deux craintes les hante : celle du grand déclassement, avec l’appauvrissement des Français, le déclin de notre puissance et l’effondrement de notre école, et celle du grand remplacement, avec l’islamisation de la France, l’immigration de masse, l’insécurité permanente ».

Il ne s’agit pas là de racisme à proprement parler, et d’ailleurs Eric Zemmour se défend d’avoir une vision nationaliste fondée sur une pureté racialiste de type national-socialiste : « Comment pourrais-je penser cela, moi, petit juif berbère venu de l’autre côté de la méditerranée ? ».

Non, le cœur de sa démarche, le fondement de son existence, c’est simplement de galvaniser la foule et la diriger vers le nationalisme ; le ciblage de l’immigration musulmane n’est ici qu’un moyen, un outil servant à raccourcir les choses et empêcher la réflexion sociale. Cela sert le racisme bien sûr, le racisme lui est utile, évidemment, mais c’est bien pire que cela.

Il veut faire croire aux gens qu’on pourrait faire disparaître la crise du capitalisme, et qu’il suffirait pour cela de rejeter les musulmans trop musulmans, d’avoir une immigration zéro, de restreindre le droit d’asile à quelques vraies demandes depuis les consulats, d’en finir avec le regroupement familial, de supprimer l’aide médicale d’État et le droit du sol, de durcir les conditions de naturalisation, de renvoyer les clandestins, d’expulser les délinquants étrangers, de déchoir de leur nationalité les criminels bi-nationaux ou encore d’expulser les chômeurs étrangers au bout de six mois…

C’est un formalisme typiquement bourgeois, très RPR (le parti de la Droite conservatrice-populaire avec Jacques Chirac) des années 1980. D’ailleurs, à la fin de son discours, Eric Zemmour a largement insisté sur sa filiation avec cette Droite de la fin du XXe siècle.

Et en effet, c’est un homme de droite, mais d’une Droite en temps de crise, ayant besoin de gens furieusement aveuglés par le nationalisme et prêts à tout pour défendre le capitalisme français dans la grande bataille pour le repartage du monde engendré par la crise.

Eric Zemmour est en ce sens très dangereux, car il simplifie tout et ratisse large. Ses simplifications et ses tirades populistes sont très efficaces dans un pays aussi riche que feignant intellectuellement qu’est la France (à l’image de la plupart des autres grands pays capitalistes). Il assume donc sans ambage de marcher sur les plates bandes de la Droite et de l’extrême-Droite :

« je veux rendre le droit de vote aux électeurs du front national et je veux rendre la droite aux électeurs de LR »

L’opposition à Eric Zemmour est l’actualité politique principale et incontournable de la Gauche actuellement. Cette opposition ne pourra gagner que si elle est massive et populaire, que si elle est fondée sur l’intelligence et la foi en la société. Si donc elle se fonde sur la Gauche historique.

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Quelques manques de réalisme le 5 décembre 2021

Il y a un réel manque de cohérence.

Le 5 décembre 2021, c’était le meeting d’Eric Zemmour et il faut croire que, malgré les bonnes intentions de certains, c’était trop pour eux. Il y a un manque de réalisme qui, tout de même, est plus que suspect, vraiment étrange.

On a par exemple Antoine Léaument. Ce n’est pas n’importe qui : c’est le responsable de la communication numérique de Jean-Luc Mélenchon et de La France insoumise. Jean-Luc Mélenchon tenait justement à la Défense, en périphérie de Paris, un meeting le même jour qu’Eric Zemmour. Il y avait un peu plus de 2000 personnes (dans une salle pouvant en accueillir 2500), alors que pour Eric Zemmour il y avait plus de 12 000 personnes (dans une salle pouvant en accueillir 20 000).

Et là que voit-on ? Qu’Antoine Léaument raconte ouvertement n’importe quoi. Voilà ? Voilà le mensonge, oui.

Il y avait également une manifestation contre Eric Zemmour, le même jour, à Paris, partant de Barbès pour rejoindre la Villette. La manifestation était organisée par la Jeune Garde, l’Union Locale CGT de Paris et le syndicat Solidaires. Il a été prétendu d’ailleurs qu’Eric Zemmour avait quitté le Zenith de la Villette pour le parc des expositions de Villepinte en raison de la « pression » sur lui. C’est faux : le Zénith était simplement trop petit, le meeting accueillant finalement pratiquement deux fois plus de monde.

Mais donc, que nous dit une Journaliste de Mediapart, service Politique ? Que Barbès est un « quartier populaire » ! C’est évidemment une vaste blague. C’est un quartier en partie grand bourgeois, en partie bobo, en partie lumpen, avec encore quelques couches populaires. Mais c’est tout sauf un quartier populaire, à moins de comparer avec la plupart des autres quartiers parisiens, peut-être, enfin, bref, c’est de la fiction.

C’est comme le mot d’ordre de la manifestation, « Paris fera taire Zemmour ». Paris ne fera rien du tout parce que la moitié de ses habitants sont des cadres sups, que vu les loyers ou le prix d’achat il faut un certain capital, patrimoine, revenu pour y être, etc.

La manifestation n’a d’ailleurs certainement pas rassemblé 8 000 personnes. Ce n’est pas raisonnable de dire cela. La préfecture dit 2200.

Il y avait d’ailleurs 64 organisations qui appelaient à cette manifestation. Même en comptant 8 000 personnes, cela ferait 125 personnes par organisation. En comptant de manière ultra-optimiste, disons 2500, cela fait moins de 40 personnes par organisation. Dans tous les cas il vaut mieux dire qu’il y a beaucoup de travail de fond à mener, qu’il faut souffrir pour avancer, trouver de nouvelles voies, etc. Mais une dynamique ?

Après, il ne faut pas se leurrer. Les gens restent à 99% imperméables à la politique antifasciste pour l’instant. Le terrain est prisonnier pour l’instant par un aventurisme anti-État, anti-police, anti-racisme, anti-homophobe, anti-etc. à l’infini. Ce sont les « fachos » qui sont dénoncés, pas le fascisme. Et dans cet aventurisme, tous les subjectivismes ont cours, portés par des étudiants hors sol, pétris d’esprit petit-bourgeois et de philosophie américaine même pas digérée. « Dehors les facho-es », sérieusement ?

Mais la palme de l’incohérence revient à SOS racisme, qui en plus de l’inconscience, a ouvert la boîte de Pandore de la violence fasciste. Il y a en effet des gens qui sont allés à Villepinte pour tenter de bloquer le meeting. C’est de l’ultra-gauchisme, mais c’est assumé, et il y a une grande conscience de ce que cela implique. 39 personnes ont été arrêtées par la police dans ce cadre.

SOS racisme a toutefois envoyé des gens au casse-pipe, sortant une banderole anti-raciste en plein meeting. Naturellement, ils se sont fait frappés. Rien d’étonnant malheureusement, une telle provocation ne pouvant passer. Et c’est là que c’est ultra-gauchiste, parce que cela ouvre la banalisation de l’affrontement violent.

Qu’à l’extérieur, l’extrême-Droite se confronte physiquement à des gens cherchant à empêcher le meeting, c’est une norme. Que cela se déroule à l’intérieur, de manière médiatique, c’est un appel d’air, c’est un signal. Les gens de SOS Racisme qui ont voulu se faire une publicité nationale à peu de frais ont concrètement, malgré eux, donné le signal à tous les gens d’extrême-Droite du pays que, désormais, il y avait un parti politique qui était leur fer de lance, que désormais il et possible d’aller à la confrontation.

Pour donner un exemple de quoi on parle, voici une image tirée d’un dossier (en anglais) d’un groupe de journalistes concernant les liens entre les nazis ukrainiens et des groupes français (Ouest casual, les Zouaves, etc.). A un moment donné il faut être sérieux et faire de la politique. Sinon, le fascisme l’emportera comme un rouleau compresseur.

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Faut-il avant tout s’opposer physiquement à l’extrême-Droite ?

Cette question a déjà été réglée.

Lors de la montée du nazisme, les communistes allemands ont à un moment employé le slogan « Schlagt die Faschisten, wo ihr sie trefft! », c’est-à-dire « Frappez les fascistes, là où vous les rencontrez ! ». Autrement dit, quand on rencontrait des fascistes, il fallait leur tomber dessus.

Cette approche a ensuite été abandonnée, car elle était trop élémentaire, pas suffisamment politique, et qu’à terme une telle démarche était perdante.

Pourquoi cela ?

Pour deux raisons.

La première, c’est que le fascisme avait atteint une telle dimension de masse, que de toutes façons de telles actions, à un moment, ne sont plus possibles. En Allemagne le fascisme était un mouvement de masse. On ne peut pas rejeter les masses.

Il suffit de penser ici au vote Marine Le Pen dans les quartiers populaires en France : pense-t-on aller insulter des centaines, des milliers d’ouvriers dans le Nord ? Cela n’aurait aucun sens, déjà, et en plus le fascisme est trompeur dans sa substance même : il vise à tromper les travailleurs. Donc, il faut regagner les travailleurs, mais on ne peut pas si on les exclut, si on les insulte…

La seconde, c’est que cela focalise de manière erronée sur les fascistes et non sur le fascisme, réduisant le fascisme à des individus fascistes. On est alors dans un analyse réductrice typique de l’anarchisme (et du trotskisme d’ailleurs). Comme si le fascisme était un coup de force mené par des gangsters fascistes, et non une réorganisation du capitalisme en crise.

« Frappez les fascistes, là où vous les rencontrez ! » est donc un slogan simpliste. Il faut effectivement s’opposer physiquement aux fascistes dans certains cas. Mais cela ne peut pas être la question principale, car la question est toujours politique. D’où l’héroïsme d’antifascistes allant, dans des meetings nazis, aller porter la contradiction.

Il faut imaginer le cran de ces gens-là. Vous êtes en 1931, vous allez dans un meeting de 10 000 personnes organisées par les nazis, vous vous revendiquez antifascistes et vous êtes tout seul ou à deux, au milieu d’une foule fanatisée et hostile. Quelle immense pression ! Mais il faut bien le faire, puisqu’il y a des gens du peuple qui sont présents… Quel courage.

Et donc les communistes allemands, en juin 1930, balancent par-dessus bord leur slogan « Frappez les fascistes, là où vous les rencontrez ! », en expliquant ainsi pourquoi :

« La lutte contre les fascistes doit correspondre à toute la ligne politique du Parti. Solidement liée à la lutte quotidienne des masses laborieuses pour l’amélioration de leurs conditions de vie, celle-ci doit avoir un caractère résolu et offensif.

La désagrégation naissante au sein des partisans ouvriers du mouvement fasciste, qui est sans aucun doute en croissance, rend nécessaire la distinction entre les dirigeants fascistes et les masses induites en erreur de leurs partisans ouvriers.

Par conséquent, l’application schématique du mot d’ordre « Frappez les fascistes, là où vous les rencontrez ! » est inopportune dans la phase actuelle d’intensification de la lutte. Le mot d’ordre principal dans la situation actuelle doit être la lutte de masse politique et défensive du prolétariat et de tous les travailleurs contre le fascisme dans le but de son annihilation complète.

Le fascisme en Allemagne ne se limite en aucun cas aux organisations fascistes de combat et d’assassinat, les nationalistes, les milices des casques d’acier, etc., mais comprend également tous les partis bourgeois importants.

La fascisation de l’Allemagne a lieu à la fois à travers les organisations de combat fascistes et à travers l’appareil d’État bourgeois et ses agents social-fascistes. »

Ce qu’on comprend, c’est que lorsque le fascisme est à ses débuts, lorsqu’il est marginal, cela a un sens que de briser les organisations fascistes, afin de les empêcher de se développer. Mais lorsque le fascisme a atteint un tel niveau qu’il devient de masse… et qu’en plus il s’inscrit dans un contexte historique… alors concentrer l’antifascisme sur l’opposition physique aux fascistes, c’est une erreur anti-politique.

L’antifascisme exige donc la politique. Et la politique, ce sont les idées, les conceptions, les valeurs qui ne peuvent être portées que par des organisations politiques. Il n’y a pas d’antifascisme possible sans alignement sur ces organisations politiques. Sinon, on réduit l’antifascisme à des actions immédiates et élémentaires et on s’imagine qu’une défense syndicale des travailleurs peut suffire face à l’idéologie fasciste. Ce qui est vain.

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5 décembre 2021 : Éric Zemmour du Zénith au Parc des expositions de Villepinte

Comment interpréter ce changement de lieu ?

Le meeting du 5 décembre 2021 est très important pour Eric Zemmour. C’est le premier depuis qu’il s’est déclaré candidat et il va falloir qu’il abatte ses cartes, qu’il présente des soutiens ayant un certain poids. Et il va falloir qu’il fonde un mouvement politique, ce qui est bien entendu une terrible menace d’extrême-Droite de plus. C’est d’ailleurs l’aspect principal de la question.

Cela va en effet jouer sur tous les mois qui suivent, avec le risque d’être un mouvement de masse. D’ailleurs, Eric Zemmour a modifié le lieu du meeting. Initialement, cela devait être au Zénith de Paris, qui a 6 000 places. Mais devant l’affluence de demandes, le meeting est déplacé au parc des expositions de Villepinte, non loin de l’aéroport Charles-de-Gaulle.

Est loué le hall 6, d’environ 45 000 m2 et accueillant 20 000 personnes. C’est là quelque chose de terrible, bien entendu. Car même si Eric Zemmour ne gagne pas la présidentielle, il joue un très grand rôle dans la réorganisation de la Droite, avec l’établissement de troupes de choc prêts à la confrontation.

On notera ici que ce déplacement est interprété différemment par le porte-parole de la Jeune Garde, structure qui appelle à une manifestation de protestation contre le meeting, avec deux structures syndicales : la CGT Paris et Solidaires.

Il va de soi que s’il y a plus de 6 000 personnes à Villepinte, cette argumentation tombe à l’eau. Mais là n’est pas la question : ce qui compte, c’est de voir quelle est la nature d’Eric Zemmour. Faut-il le considérer comme une fin en soi ou comme un outil pour le Fascisme comme tendance historique?

Eric Zemmour fait-il des choix lui-même? Ou bien est-il porté par une tendance historique?

C’est le grand problème de la personnalisation. Il est vrai qu’Eric Zemmour en rajoute à ce niveau. Comme avant lui Donald Trump, ou comme toutes les figures populistes, nationalistes, en appelant à l’irrationnel. Seulement, c’est un piège dans lequel il ne faut justement pas tomber.

Car le fascisme est une tendance, qui transcende les individus qui sont à son service. Il suffit de se rappeler du parcours originel d’Adolf Hitler, un simple soldat, de Benito Mussolini, un cadre socialiste, ou bien d’Oswald Mosley, un député. Eric Zemmour était quant à lui initialement un journaliste besogneux, qui encore il y a quelques années n’aurait même pas imaginé son parcours actuel. Tous ces gens n’ont pas choisi. Ils sont devenus des outils.

Dans quelle mesure sont-ils des outils, c’est là la vraie question. Et en fondant un mouvement organisé de « droite dure », sur une base nationaliste, Eric Zemmour joue ici un rôle éminent. C’est cela qu’il faut bien voir, en portant un regard profond, allant au-delà des apparences trompeuses.

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Présidentielle 2022 : le gaulliste-pétainiste Eric Zemmour officialise sa candidature

C’est une tentative de synthèse fasciste.

Mardi 30 novembre, le polémiste d’extrême-droite Eric Zemmour a officialisé sa candidature à l’élection présidentielle 2022 dans une courte vidéo publiée sur YouTube. La mise en scène fait ouvertement référence à l’appel du 18 juin du général de Gaulle, avec pareillement un micro imposant, des notes papiers lues en direct, jusqu’à la disposition de l’homme par rapport au micro.

Cette référence à de Gaulle est incontournable pour toute démarche nationaliste française se voulant conséquente. C’est exactement ce qu’a compris et mis en place Marine Le Pen depuis 2012 justement, avec une ligne néo-gaulliste représentant directement les intérêts du grand capital français.

Toutefois, et c’est flagrant pour n’importe qui ayant les bases de la culture politique française, Eric Zemmour a tout autant un discours pétainiste qu’il se veut gaulliste, et inversement. Ou, comme l’a dit Olivier Faure le premier secrétaire du Parti socialiste avec un bon mot (et une faute) :

« Le micro de De Gaulle [sic] mais le discours de Pétain. »

Il y a en effet dans cette vidéo de 10 minutes du néo-candidat tout ce que la Gauche qualifie (et conspue) de pétainiste : le fantasme d’un pays « éternel » à défendre comme sa propre chair, le rejet romantique du monde moderne, une tendance évidente à la xénophobie et au repli culturel, les raccourcis haineux plutôt que la compréhension sociale des choses.

D’ailleurs, Eric Zemmour s’était fait remarquer ces derniers temps pour des propos on ne peut plus polémique réhabilitant la figure du Maréchal Pétain, pourtant honnie (formellement, mais pas forcément en pratique) par tout le spectre politique français. Il doit donc forcer les choses pour appuyer sur son côté « gaulliste » avec une mise en scène grotesque. Cela jusqu’à évoquer directement, dans sa liste-inventaire de figures françaises, le général de Gaulle et le chef de la Résistance (bourgeoise) Jean Moulin.

Il ne faudrait pas faire l’erreur de penser qu’il ne s’agit ici que d’opportunisme ou de communication de surface. Ce qu’il y a en jeu est ni plus ni moins que la tentative de la formulation d’un fascisme français du XXIe siècle.

Marine Le Pen est allée très loin en ce sens, en travaillant au corps la société française de manière minutieuse pendant des années. Mais elle a un gros problème, c’est qu’elle apparaît bien trop « gaulliste », c’est-à-dire pas assez « pétainiste », donc pas assez à droite, aux yeux de la bourgeoisie.

Eric Zemmour représente une proposition similaire, mais inversée. Il a lui aussi longuement travaillé au corps la société française ces dix dernières années, mais franchement par la droite, de manière très « pétainiste » et probablement pas assez « gaulliste » pour la grande bourgeoisie qui a des vues impériales et qui a besoin d’une adhésion populaire aux projets nationalistes. Alors Eric Zemmour tente sa chance avec la mise en scène du micro « gaulliste », pour dérouler le discours « pétainiste » expliquant qu’on ne reconnaîtrait plus le pays, que l’idéal serait la France des années 1950 avec des garçons en culotte courte jouant dans la rue comme dans un film en noir et blanc.

C’est très caricatural bien sûr, c’est exactement le pendant des discours post-modernes (ou « woke ») voulant tout déconstruire de manière aussi agressive qu’unilatérale, au nom du turbocapitalisme. C’est donc du niveau du café du commerce, c’est-à-dire bas de plafond et rageux.

C’est, pour le dire autrement, tout l’opposé de l’esprit Charlie, typiquement français, voulant la synthèse culturelle, et rejetant le conflit.

Alors, est-ce la vidéo de trop pour Eric Zemmour, qui marquerait la fin d’un phénomène et d’une expérience ? On peut l’imaginer, par exemple quand on voit la violence avec laquelle le quotidien traditionnel de la Droite, Le Figaro, tacle le néo-candidat dans son éditorial du premier décembre :

« Pourquoi un journaliste, sans parti, sans mandat, sans aucune expérience politique, est-il venu percuter cet automne de campagne?

Certes, la société liquide, celle de la compulsion numérique qui permet les roulades de MacFly et Carlito à l’Élysée et envisage Cyril Hanouna comme animateur du débat d’entre-deux-tours, rend tout, même l’impensable, possible.

Il serait pourtant paresseux de s’arrêter à cette écume pour comprendre le phénomène. »

La bourgeoisie française a besoin de sérieux et d’une figure ayant les épaules solides pour mener ses desseins. C’est probablement pourquoi le présentateur du 20H de TF1 a osé, de manière incroyablement irrévérencieuse, demander à Eric Zemmour s’il ferait par exemple un doigt d’honneurs aux autorités britanniques en négociant avec eux sur l’épineuse question de l’île Jersey… (c’est une référence au fait qu’Eric Zemmour a fait un doigt d’honneur à une passante lui en faisant un).

Cependant, l’Histoire est ce qu’elle est et personne ne peut la prédire dans le détail. Eric Zemmour a un rôle historique, il est une contribution majeure à la tentative de formulation d’un fascisme français du XXIe siècle. Sa candidature à la présidentielle reste à considérer de manière sérieuse, pour s’y opposer fermement et profondément.

Cette contradiction « pétainiste »/« gaulliste », tant qu’elle n’est pas résolue dans une nouvelle synthèse politique, est certainement autant de temps de gagner pour la gauche et les forces démocratiques en France, repoussant la victoire du fascisme.

On peut très bien se dire que les voix allant à Eric Zemmour n’iront pas à Marine Le Pen, et inversement, et que cela pourra suffire à les disqualifier. On peut se réjouir du fait que Marine Le Pen voit rouge en ce moment justement pour cette raison, et qu’elle est très agressive à l’encontre du néo-candidat dont elle qualifie la déclaration vidéo de « passéiste et crépusculaire ».

Mais cela ne change rien au fait que le fascisme avance à grands pas en France en raison de la crise, qu’il synthétise justement ses positions de manière toujours plus précise, à mesure que la crise s’intensifie et qu’il se généralise à tous les aspects de la vie. Eric Zemmour n’est ni plus ni moins qu’un produit de cette crise, il représente une des tentatives de la bourgeoisie de sauver les meubles du capitalisme par le nationalisme.

Car ce qui se joue derrière, c’est la bataille pour le repartage du monde. En fait, qui ne voit pas la guerre arriver ne peut pas voir le fascisme et l’analyser adéquatement : c’est cela qu’il faut bien comprendre.

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L’erreur d’appréciation à propos du fascisme en France

Éric Zemmour, Marine Le Pen relèvent du fascisme, mais faut-il encore saisir ce que signifie le fascisme en France.

Il y a un problème terrible en France : le fascisme n’est pas compris dans sa substance. Il est toujours analysé comme un décalque d’un modèle extérieur au pays, comme les modèles italiens et allemands. Et de fait, le décalque n’est jamais parfait, et il est donc proclamé que le fascisme français n’existe pas vraiment.

Quand Éric Zemmour parle d’unir la bourgeoisie patriotique et les classes populaires pour « sauver la France », c’est un élément capital du fascisme. Un même état d’esprit qui se retrouve chez Marine Le Pen écrivant une tribune dans « Les Echos » pour « augmenter les salaires et préserver la capacité des entreprises françaises à rester profitables et compétitives ».

Quand on a un minimum étudié l’Histoire, il apparait que le fascisme est un mouvement de masse qui cherche à unir les classes sociales dans un projet de grandeur nationale. La division du peuple sur une base ethnique n’est qu’un moyen, non pas la finalité du projet fasciste. La finalité, c’est la sauvegarde d’une puissance en perte de vitesse, et pour cela il faut couper court à la lutte des classes.

Mais le problème en France, c’est que le fascisme est opposé formellement à la République. Cela est lié à l’opposition De Gaulle / Pétain qui forme un obstacle idéologique de taille pour l’analyse. Car avant 1940, il y a deux lignes dans l’extrême-droite française : celle, historique, pro-monarchiste, liée aux réseaux de l’armée, arc-boutée sur l’idée d’un putsch minoritaire, et celle portée par le colonel de la Rocque avec son Parti Social Français.

En juillet 1940, avec Pétain, c’est la victoire du courant monarchiste et minoritaire des officiers et des ultras de la collaboration, sur le mouvement du Colonel de La Rocque, qui avait proposé un fascisme authentiquement français. C’est lui qui a été à la base d’une véritable révolution intellectuelle. Son apport est capital, et pourtant si simple : en France, la République est trop installée, trop enracinée pour être contestée.

Les ligues d’extrême-droite, celles de l’Affaire Dreyfus, du 6 février 1934, sont nées sur le terrain politique du catholicisme social et sur la base d’une défense de la Monarchie. Pour de la Rocque, elles ne peuvent qu’échouer dans leur entreprise de mobilisation. Et s’il y a une caractéristique fondamentale du fascisme, c’est bien celle de mobiliser socialement les gens dans un sens nationaliste.

Les réseaux des Ligues, c’était surtout la petite caste de militaires, d’officiers qui surent sauvegarder l’héritage catholique- monarchiste après la victoire de la IIIe République à la fin du XIXe siècle. Il suffit de lire n’importe quelle autobiographie de hauts gradés du début du XXe siècle pour voir à quel point Charles Maurras ou Charles Péguy forment des cadres idéologiques pour cette couche sociale.

Lorsque le Colonel de la Rocque forme son « Parti Social Français » en 1936, il va très vite atteindre plus d’un million d’adhérents. Il fait vivre des clubs de sports, tient des jardins ouvriers, animent des réunions de femmes, tout en générant des sections paramilitaires, entrainées et relativement bien armées.

Voici par exemple un extrait du programme du PSF, une base véritable à la pensée de De Gaulle plus tard :

« Nous voulons un État dégagé des influences anonymes et irresponsables : coalitions de partis, de clientèles, d’industries, de banques, de journaux, d’agence, etc. […] Le Président de la République, chef effectif de l’État cessera d’être le personnage effacé qu’il est devenu par l’effet d’une lingue coutume, contraire à l’esprit de la Constitution elle-même. »

Tout cela sur une base claire : la République ne doit pas être heurtée de plein fouet, mis investie pour en transformer le contenu dans un sens nationaliste afin de dépolitiser la société et ainsi barrer la route à la Gauche socialiste et communiste.

Ce que de la Rocque n’a pas pu faire à cause de l’occupation de la France par le régime nazi, c’est le général De Gaulle qui s’en réclamera dans le discours de Bayeux en 1946, puis l’appliquera en 1958 avec la Ve République, cette « monarchie républicaine » vantant la collaboration de classe et un chef au-dessus des partis politiques. Le RPF sera l’héritier du PSF :

« Le salut vint d’abord d’une élite, spontanément jaillie des profondeurs de la nation et qui, bien au-dessus de toute préoccupation de parti ou de classe, se dévoua au combat pour la libération, la grandeur et la rénovation de la France. (Bayeux, 1946) »

Quand Éric Zemmour ou Marine Le Pen se présentent comme des défenseurs de la République, ils le font sur cette base fasciste française où il est sauvegardé la forme institutionnelle pour mieux modifier le fond politique et idéologique. Cela est d’autant plus aisé que le régime n’est plus parlementaire, mais justement une République présidentielle…

Le fonds du fascisme dans ce pays, c’est une sorte de néo-gaullisme, c’est-à-dire une synthèse dans les années 1950-1960 des deux courants de l’extrême-droite. Vouloir combattre le fascisme en ne ciblant seulement les quelques groupuscules de l’extrême droite anti-républicaine serait une grave erreur d’appréciation historique. Plus que l’extrême-droite, c’est le fascisme qui doit être combattu dans la période.

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Eric Zemmour à Marseille : fiasco ou succès politique ?

La visite marseillaise d’Eric Zemmour est révélatrice.

Faites vos jeux ! Parier, c’est moralement erroné, mais la politique rend cela inévitable, parce qu’il faut analyser les tendances et choisir ce qu’on considère juste, repoussant ce qu’on imagine faux, et qu’on mise tout dessus. Et là on a un exemple très parlant.

Le 27 novembre 2021, Eric Zemmour était de passage à Marseille, alors voilà différentes considérations à ce sujet, en provenance de ce dépotoir-défouloir qu’est Twitter, tout un symbole de notre époque. D’un côté, Eric Zemmour tentant d’inventer un mythe mobilisateur, avec le fameux parcours de l’homme providentiel à la rencontre de son peuple. De l’autre l’ultra-gauche qui n’en invente pas un puisqu’elle l’a déjà, avec son substitutisme et son « action directe ».

Qui est le gagnant de cette séquence ? Marseille s’est-elle vraiment soulevée contre Eric Zemmour ? Ce dernier a-t-il vraiment pris un pied au derrière dans la construction de sa figure politique ?

Bien entendu, on peut être horrifié et penser qu’il faut un antifascisme politique, parce que là…

Laetitia Avia est Députée de Paris, vice-présidente du bureau exécutif & Porte-parole LREM.

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Le premier pari réussi d’Eric Zemmour

La Droite est réactivée.

Eric Zemmour sera au Zénith de Paris le 5 décembre 2021 et l’entrée sera libre. Cela explique aussi pourquoi il n’a pas intérêt à se déclarer candidat jusque-là. Les frais de campagne et le temps de parole médiatique ne sont pas comptabilisés. De plus, peut-être qu’il cédera la place à quelqu’un comme le général de Villiers.

Car Eric Zemmour a déjà réussi son pari. Il a joué son rôle historique : propulser les idées de Droite sur le devant de la scène, de telle manière à passer en force pour remettre en place une offensive politique. C’est une grande réussite, qui a triomphé sans réelle opposition. Les bourgeois modernistes d’Emmanuel Macron n’y ont pas cru et se sont fait débordés, quant à la Gauche elle n’a pas compris le phénomène.

Eric Zemmour a bien perdu de l’élan à la mi-novembre, car un semblant d’opposition à son nationalisme s’est mis en place, mais enfin il est dans la place, il a des partisans, il est intégré au paysage et, surtout, il se fout de savoir que l’opinion publique hégémonique est contre lui. Il est une expression de la crise et il sait que tout peut changer très rapidement, que tout va changer très rapidement. Il compte être là à ce moment-là, avec une proposition stratégique lisible et des partisans.

C’est le contraire d’Anne Hidalgo qui n’a pas saisi les enjeux du temps, elle qui arrive avec le droit de vote à seize ans. Il y a une pandémie, des dettes monstrueuses des États, des ménages et des entreprises, des tensions militaristes en accentuation, une crise climatique, et elle débarque avec cela. C’est un suicide politique, par inadéquation avec les exigences du temps.

On arguera que les exigences du temps ne sont pas vues par grand monde. C’est vrai. On dira que l’extrême-Droite étant populiste, c’est plus facile pour elle de proposer quelque chose de fantasmatique semblant répondre aux défis de notre époque. C’est vrai aussi.

Cependant, avec des efforts on peut triompher de ces obstacles. Encore faut-il faire des efforts prolongés. Or, comme on le sait, le capitalisme a corrompu tout le monde. Seule la haute bourgeoisie fait de réels efforts, car il en va de ses intérêts immédiats dans un paysage nouveau produit par la pandémie et le ralentissement du capitalisme.

Pour prendre un exemple, sur le twitter d’une féministe et syndicaliste, qui se veut donc très radical, on trouve au milieu des dénonciations des fachos des commentaires personnels de l’émission « Danse avec les stars ». Cela veut tout dire. Le capitalisme permet de vivre sur le tas, sans recul, sans exigence de valeurs développées. Il nivelle par le bas. Et même les gens engagés tombent dans une consommation passive, par refus d’avoir une vision historique, de se mettre au niveau culturellement.

Les gens, y compris de gauche, se contentent de consommer, en ayant des positions de gauche ou qu’ils imaginent être de gauche (car bien souvent c’est simplement du turbocapitalisme, comme avec les LGBT). Être à gauche ne les intéresse pas plus que cela : cela implique de se positionner, d’aller à une certaine confrontation, d’établir quelque chose de concret. Le capitalisme propose trop un confort feutré, malgré une certaine précarité (sociale, sentimentale, au niveau du logement…), pour que se produise un tel dépassement de soi.

Il y a donc au mieux des dénonciations bruyantes de l’extrême-Droite, mais dans un grand mélange où le gouvernement est associé au fascisme, voire identité à lui. C’est de l’ultra-gauche et il y a donc toujours du triomphalisme, un grand aveuglement quant à la dimension populaire historique du fascisme, comme lorsque le porte-parole de la « Jeune Garde » dit que « l’extrême-droite n’est audible que dans les zones bourgeoises ou sur les chaînes du milliardaire Vincent Bolloré ».

Eric Zemmour intervient donc dans une telle situation avec d’autant plus de facilité. Il s’est installé, simplement, sans confrontation réelle, à part quelques petits accrochages. La prochaine étape sera par contre évidemment bien plus rude, bien plus politique, bien plus agressive, bien plus violente.

Pour avancer, Eric Zemmour doit polariser. Ce sera l’alliance d’une vague électorale et de coups de force par les petits groupes d’extrême-Droite. Et peu importe si cela tourne mal, car l’idée c’est au pire de tellement tout déstabiliser que l’armée intervienne rétablir l’ordre, ou en tout cas une figure tombée du ciel comme le général de Villiers.

C’est typiquement français historiquement. Qui ne le voit pas a été lessivé par l’américanisation de la société.

Les choses vont commencer à tanguer : il faut être prudent et intelligent politiquement, tout étant ici une bataille de positions qui exige des raisonnements tactiques et stratégiques qui ne peuvent être que ceux de la Gauche historique.

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Eric Zemmour, défenseur de la chasse à courre

Qui se ressemble s’assemble.

Le magazine Chassons.com publiait en novembre 2021 une interview vidéo d’Eric Zemmour qui lui permet de poser quelques marqueurs pour son projet. Dans un lieu bien choisi, la forêt de Marly, où Louis XIV aimait chasser, Zemmour commence par comparer les écologistes d’aujourd’hui aux gauchistes des années 1970. Il en vient ensuite tout naturellement à la chasse à courre et à sa dimension symbolique socialement, pour ses opposants comme pour ses défenseurs :


« On voit bien ce qu’il y a derrière, on voit bien le fantasme, on va à Marly c’est le fantasme de Louis XIV, de l’aristocratie, des beaux costumes, etc. »

Il se lance ensuite dans une récitation somme toute banale des éléments de langage des veneurs, distribués régulièrement par prospectus à tous le personnel politique du régime depuis que cette pratique est dans le collimateur d’un fort mouvement d’opposition populaire.

Dans tout ce fatras de lieux communs, peu lui importe ce qui est vrai ou faux, il s’agit pour lui de se présenter comme au service des gens qui pratiquent cette chasse. Par cette intervention, Zemmour assume donc la défense de la chasse mais pas seulement : il invoque tout spécialement la chasse à courre comme totem de ce que sa candidature représente socialement. C’est le seul qui aille aussi loin, là où un Macron cherche seulement à désamorcer une possible opposition « rurale » à son modernisme et où un Xavier Bertrand n’assume la chasse que comme un bloc de beaufitude patriarcale.

Pour Zemmour, c’est précisément la chasse à courre qui est intéressante. Car il faut le savoir, cette chasse particulière est ouvertement revendiquée comme un bastion par l’aristocratie (à travers le site de l’Association de l’Entraide de la Noblesse Française, en même temps que l’Église, l’Académie Française et un certain surnombre parmi les officiers de l’Armée). En ce sens, elle possède toutes les clefs idéologiques dont un fasciste a besoin pour mobiliser les esprits dans le sens du nationalisme et de la marche à la guerre.

L’aristocratie (ou ce qu’il en reste) est une force sociale à laquelle Zemmour s’adresse ici directement, pas pour sa force numérique dans le cadre d’une élection, mais parce qu’elle porte quelque chose qui culturellement sert son projet politique : le code de l’Honneur chevaleresque, l’héroïsme individuel, le sens de la Famille et de l’héritage, la charité envers les classes populaires, la Piété, l’abnégation en faveur de la Patrie…

A travers ce vecteur qu’est pour lui la chasse à courre, il peut très bien se permettre de combiner une vision fantasmée de Louis XIV avec une revendication des acquis de la Révolution Française :

« dans les cahiers de doléances, les gens disent on veut chasser comme les aristocrates. La première revendication de 1789, c’est le droit de chasse pour tous, c’est profondément révolutionnaire et républicain ».

Zemmour n’a pas à s’embarrasser des détails. Peu importe si la Révolution, en ouvrant le droit de chasse aux citoyens, a aboli la chasse à courre dans le même temps, et qu’elle est donc tout l’inverse d’un « acquis révolutionnaire ». Ce qui compte, c’est la mise en place de symboles, d’un imaginaire national favorable au projet de la haute bourgeoisie hyper agressive, à l’impérialisme conquérant.