Catégories
Politique

Les mots de Marion Maréchal contre l’« hanounacratie »

Les propos de Marion Maréchal sont rares et toujours très commentés. Elle vient de rédiger un long texte dans lequel elle oppose démocratie et « hanounacratie » ; c’est un positionnement politique.

Marion Maréchal a mis en place une newsletter dans son école hors contrat, l’ISSEP, et a écrit à cette occasion un long texte, intitulé « Le mot de Marion Maréchal : Démocratie ou hanounacratie ? ».

C’est un document très important, car cela a maintes fois été souligné ici, Marion Maréchal est une cadre dirigeante d’avenir, la clef du rassemblement de la Droite et de l’extrême-droite. Sachant que ses propos sont très suivis et commentés, elle place de manière adéquate les bases de ce prochain rassemblement. C’est une menace terrible pour la Gauche.

Ce qu’elle dit en effet, c’est qu’il ne faut pas porter d’attention aux gilets jaunes comme expression « économique, sociale ou territoriale ». Du point de vue de la Gauche, c’est évidemment au contraire là le seul intérêt, puisque culturellement et idéologiquement, les gilets jaunes sont réactionnaires. Mais du point de vue de la Droite évidemment, cela n’a pas d’intérêt et mieux vaut les voir comme expression d’une « maladie française ».

Comme Marion Maréchal relève de la Droite la plus dure, elle considère que cette maladie est « institutionnelle ». Or, justement les gilets jaunes ont évolué de plus en plus dans ce qui doit être considéré comme quelque chose de proto-fasciste, voire de fasciste, comme cela été très clair début février 2019.

Il faut donc en profiter ! Ce qu’elle dit, si on le décode, c’est ni plus ni moins qu’on peut profiter des gilets jaunes pour provoquer une crise de régime. Voici un petit extrait de sa prose :

« Ce n’est pas pour rien que ce mouvement a progressivement muté d’une forme de jacquerie fiscale vers des revendications d’ordre démocratique dont le RIC, référendum d’initiative citoyenne, est le marqueur principal. Cette crise politique est la conséquence d’un pouvoir devenu totalement illégitime. »

Marion Maréchal fournit alors les concepts. Le régime serait aux mains d’une « oligarchie dissimulée » apparue au cours des années 2000. Il s’agit désormais de tenir un discours très dur, anti « système », pour profiter d’une mobilisation populaire. Du point de vue historique, c’est ce qu’on appelle le Fascisme ; voici comment Marion Maréchal tourne cela :

« Le système – entendu comme le consensus idéologique d’une grande partie des dirigeants politiques, des grands décideurs économiques et des médias – vacille sous les coups de boutoir de ceux qui ne veulent plus tolérer un mécanisme démocratique confiscatoire dont ils ne tirent aucun bénéfice. »

Il faut ici comprendre quelque chose de fondamental : la violence, la dimension belliqueuse du fascisme, n’en est qu’un aspect, une sorte de force mobilisatrice initiale.  Celui-ci arrive cependant au pouvoir de manière « légale ». Cette légalité s’appuie bien-sûr sur des milices dans les rues, sur un État déjà policier, sur plein de choses qui ne relèvent pas de la démocratie… Mais le Fascisme s’exprime par l’intermédiaire d’une base populaire, avec une vaste capacité électorale.

C’est vrai pour les fascistes italiens comme les nationaux-socialistes allemands. Cela ne veut pas dire que les agressions systématiques de l’extrême-droite n’aient pas joué, que leurs bastonnades, leurs incendies, leurs meurtres… n’aient pas eu d’impact. Mais ils accompagnent toujours une progression électorale.

> Lire également : nos articles sur Marion Maréchal

Si on rate cela, on ne comprendra pas pourquoi Marion Maréchal explique que le « grand débat » est une fumisterie et que ce qui compte ce sont les élections. Ici notons qu’elle se démasque : elle prétend ne plus faire de politique, alors qu’elle explique que l’objectif c’est la victoire électorale ! Cependant ce qui compte surtout, c’est sa proposition d’une ligne stratégique à toute la Droite.

Une longue citation est ici nécessaire, pour bien voir comment elle définit ce que doit être le populisme.

« L’échange sur un projet de société, qui doit avoir lieu avec les Français, a un nom : il s’appelle élection. Ce sont les élections qui permettent d’encadrer et de trancher le débat. Or, il n’y a pas de réelle crise de l’idée démocratique : 89% des Français pensent que la démocratie est toujours le meilleur moyen de gouverner un pays.

« La tentation totalitaire » dont on accuse souvent « les populistes » français n’existe pas. Il existe une crise de confiance entre les gouvernants et les gouvernés. La concorde est brisée entre un peuple et son élite qui ne respecte pas la confiance qui lui a été accordée. Une élite de plus en plus homogène qui capte le pouvoir au détriment de la nation.
Le populisme du peuple est une réponse à l’élitisme des élites. Ce pouvoir creuse sa tombe en imaginant que la contestation des Français pourra être calmée en leur accordant un débat au paperboard dans une émission de divertissement ; en transformant leur vote en posts ou en tweets ; en faisant de la politique une franche rigolade.

C’est une illusion : l’oligarchie ne sera pas sauvée par l’hanounacratie. »

Il y a ici un aspect essentiel, qui a n’a  jamais été compris en France, malheureusement. Il est dit que le Fascisme est un totalitarisme, que les gens s’y comportent comme des robots, avec un contrôle absolu. C’est totalement inexact. Le fascisme est un libéralisme absolu et général, où chacun peut faire ce qu’il veut, du moment qu’il ne fait pas de politique. Les Italiens et les Allemands n’étaient pas du tout surveillés par une horde de policiers : ils soutenaient le Fascisme dans leur grande majorité, ils le portaient, ils en étaient très contents car ils considéraient qu’ils étaient ainsi débarrassés d’avoir à prendre la moindre responsabilité.

Si une chose est « totalitaire », c’est à l’opposé la Gauche, et c’est une bonne chose ! Car la Gauche est totalitaire quand elle dit que la Droite a tort et doit s’effacer, quand elle dit que le capitalisme est une chose à supprimer, que le partage social doit être la norme indiscutable. Mais cela c’est la Gauche historique et on en est encore loin… Par contre, la Droite historique a clairement commencé à se reconstituer.

Catégories
Politique

De justes rassemblements contre l’antisémitisme le 19 février 2019

Plus de soixante-dix rassemblements ont eu lieu hier contre l’antisémitisme. Même si ce ne fut pas une mobilisation populaire, par en bas, et encore moins portée par la jeunesse, ce fut un marqueur de plus dans une longue bataille. Cette dernière n’est par ailleurs pas tant politique que culturelle.

Les rassemblements d’hier soir contre l’antisémitisme se sont déroulés dans de nombreuses villes, avec des foules de plusieurs centaines ou quelques milliers de gens à Paris, Marseille, Strasbourg, Annecy, Nantes, Pau, Nice, Lille, Lyon, La Rochelle, Dijon, Cherbourg ou encore la Roche-sur-Yon.

Du côté du Rassemblement National, qui a été ostracisé pour les rassemblements, Marine Le Pen est allée avec Jordan Bardella à Bagneux (Hauts-de-Seine) devant une plaque en hommage à Ilan Halimi. Jean-Luc Mélenchon, qui n’est pas du tout antisémite mais a eu un positionnement très oscillant en raison de son populisme outrancier, a participé au rassemblement à Marseille.

S’il faut porter son regard sur les chiffres, cela n’a pas été un succès, cela reste dans la dimension très restreinte des rassemblements de 2012, à la suite des meurtres commis par Mohammed Merah. Cependant, cette fois, il y a une profonde insistance sur le refus général de l’antisémitisme de la part des institutions et du personnel politique. C’est un écho direct du mouvement « Je suis Charlie », qui le premier a mis la question de l’antisémitisme et de son refus sur la table.

Car l’antisémitisme est redevenu un fléau en France ; largement battu en brèche dans les années 1980-1990, il a réémergé de manière virulente par l’intermédiaire de la théologie islamique, du djihadisme et des différents discours nationaux-sociaux, dont Alain Soral est le principal représentant, aux côtés d’un « antisionisme » factice ne s’intéressant aux Palestiniens que comme vecteur d’un fantasme antisémite bien européen.

C’est donc une bonne nouvelle que d’avoir eu une série de rassemblements contre l’antisémitisme dans tout le pays, c’est un marqueur d’envergure nationale et les antisémites ont bien compris cela, d’où leur initiative criminelle et provocatrice de la profanation du cimetière juif de Quatzenheim, dans le Bas-Rhin.

Emmanuel Macron en a bien compris la portée symbolique et s’est rendu sur place ; il est par la suite allé au mémorial de la Shoah. Il est en phase avec le profond rejet de l’antisémitisme de la part des couches éduquées, qui se demandent bien comment cela peut encore exister et qui ne voient pas du tout comme éradiquer un tel irrationalisme. Même la bourgeoisie catholique-réactionnaire a balancé l’antisémitisme par-dessus bord, à l’instar de Georges Bernanos qui a eu ce mot à la fois odieux et révélateur disant qu’Hitler aurait déshonoré l’antisémitisme.

En ce sens, les rassemblements sont également une preuve d’échec de la part de la société française, qui pensait s’être débarrassé d’une infamie et qui la voit réapparaître, avec des traits virulents. Elle s’aperçoit que ses prétentions à disposer d’une éducation avancée à l’échelle du peuple tout entier est un échec complet en ce domaine. La fuite des enfants juifs du système scolaire public en témoigne, dans une proportion massive. On assiste concrètement à une ghettoïsation des Juifs de France et cela est d’autant plus terrible que les Juifs de France s’imaginent « choisir » ce repli communautaire, alors qu’il est littéralement forcé.

Cela correspond à ce grand changement historique : l’antisémitisme, hier d’origine catholique et aristocratique, est désormais populaire et « anticapitaliste romantique », au sens d’une révolte contre les élites. Cela signifie que le national-socialisme, un courant qui n’a jamais réussi à avoir un ancrage de masse en France, émerge finalement… en 2019.

La question de savoir si les gilets jaunes sont antisémites n’a ainsi pas de sens : c’est simplement qu’ils ont la même matrice « nationale-sociale ». Ils sont à la fois concurrents et convergents ; ils correspondent à la même « révolte contre le monde moderne » portée par une petite-bourgeoisie s’agitant en raison de la pression capitaliste toujours plus grande.

Il n’est clairement pas possible aujourd’hui de comprendre l’antisémitisme en France sans cette dimension national-socialiste, et c’est vraiment très inquiétant pour l’avenir !

Catégories
Politique

Liste des rassemblements en France contre l’antisémitisme du mardi 19 février 2018

Voici une liste de rassemblements contre l’antisémitisme partout en France ce mardi 19 février 2018. 

Merci de nous signaler tout rassemblement qui ne serait pas dans cette liste.

Lire également : L’appel des partis politiques à l’union contre l’antisémitisme (« Ça suffit ! »)

Sauf mention contraire, les rassemblements sont à 19h.

Agen, place Armand-Fallières

Amiens, place de la Mairie

Angers, 17h place du ralliement

Annecy, devant le monument aux combattants d’Annecy

Aurillac, 18h30 place des Droits de l’Homme

Bayonne, au pied du Château vieux

Besançon, sur l’esplanade des Droits de l’Homme

Béthune, sur la Grande Place

Bordeaux, place de la République

Brest, place de la Liberté

Caen, place Saint-Sauveur

Chartres, 18h devant le monument Jean Moulin – Esplanade de la Résistance

Clermont-Ferrand, place de Jaude

Dijon, place François Rude

Dunkerque,  18h stèle des Droits de l’Homme à la CUD

Foix, halle au grain

Grenoble, 18h30 place de Verdun

Lille, place de la République

La Rochelle, 18h à l’entrée du Vieux Port

Laval, 18h30 devant la mairie

Le Havre, 18h30 dans les jardins de l’Hôtel de Ville

Lorient, devant l’hôtel de ville

Lyon, place Bellecour

Marseille, sous l’Ombrière du Vieux Port

Mont-de-Marsan, devant le mémorial des enfants juifs déportés, au parc Jean-Rameau

Montluçon, place Piquand

Montpellier, 18h30 autour de la fontaine de la place des Martyrs de la Résistance

Moulin, place de l’Allier

Nantes, devant le Monument aux 50 Otages

Nice, 18h30 place Garibaldi

Nîmes, Maison Carrée

Niort, place de la Brèche

Orléans, place de la République

Paris, place de la République

Pau, devant la Préfecture

Poitiers, place Leclerc

Rennes, place de la République

Rouen, place de l’Hôtel de ville

Saint-Brieuc, place du Général de Gaulle

Saint-Malo, 17H30 esplanade de la Grande-Passerelle

Sarreguemines, devant le palais de justice

Strasbourg, place de la République

Tarnos, 18h30 devant la Mairie

Toulouse, devant le mémorial de la Shoah

Tours, place Anatole France

Valence, devant la Préfecture

Vannes, sur l’esplanade du port

Vichy, place Charles De Gaulle

Catégories
Politique

L’affaire Alain Finkielkraut

L’affaire Alain Finkielkraut a tourné à la polémique nationale, car personne n’est dupe : malgré tous les discours plus ou moins en faveur des gilets jaunes, il est évident que les invectives agressives contre Alain Finkielkraut relèvent d’une démarche fondamentalement d’extrême-droite. Tout le monde a très peur que la France tourne violemment très mal.

L’agressivité contre Alain Finkielkraut en marge d’un cortège des gilets jaunes n’est pas une anecdote. Qui n’a pas perdu entièrement le sens de ce qu’est la civilisation a très bien compris que c’était l’expression du Fascisme, de l’agressivité antisémite à prétention anticapitaliste. Ou, pour dire les choses plus clairement, que c’était un truc de nazi.

Benoît Hamon a parfaitement résumé le point de vue des gens de Gauche au sujet de toute cette affaire :

C’est là la voix de la raison, de la Gauche qui ne sombre pas dans le populisme et qui sait bien reconnaître la nature des choses, au-delà des apparences. Franchement, de toutes manières, en quoi Alain Finkielkraut est-il d’ailleurs une référence pour quelqu’un dont l’agenda intellectuel n’est pas décidé par les plateaux de télévisions ou Le Figaro ? Depuis quand un intellectuel, convergeant ouvertement avec la Droite, représente-t-il quelque chose de si central, de si important ?

Benoît Hamon a donc entièrement raison de dire qu’il combat les idées réactionnaires et radicales d’Alain Finkielkraut, et pas ce dernier sur le plan personnel, car ce n’est pas du tout cela qui compte. La personnalisation est ici un terrible piège populiste, ou médiatique. Et il a raison de dire clairement que tout cela relève de l’antisémitisme. Il est inévitable donc d’opposer à ce court passage sur Twitter, plein de vérités, celui de Jean-Luc Mélenchon, qu’on pourrait remplacer par un simple « bla bla bla bla ».

L’opinion de Jean-Luc Mélenchon est évidemment également celle de l’ultra-gauche, qui organise mardi un contre-remplacement à la manifestation lancée par la Gauche contre l’antisémitisme. Au nom de la lutte contre l’instrumentalisation de l’antisémitisme – qui existe mais est totalement secondaire – l’ultra-gauche vise la même chose que Jean-Luc Mélenchon : la relativisation de l’antisémitisme, sa mise sur le même plan que le racisme « en général ».

Sauf qu’il n’y a pas de racisme en général. Et que l’antisémitisme est un racisme extrêmement particulier de par sa tradition, son ampleur, son rôle moteur comme « anticapitalisme romantique ». Il n’est pas étonnant que l’ultra-gauche et les populistes, qui rejettent la Gauche et ses traditions, qui relèvent donc directement de l’anticapitalisme romantique, ne puissent donc pas dénoncer l’antisémitisme, ni même le voir.

C’est là inévitable de par une vision du monde simpliste, de type anarchiste, populiste, sans fondement historique, culturel, économique, et surtout en-dehors de toutes les traditions de la Gauche.

Au-delà de l’insulte « sale juif » lancé par un manifestant, les propos exprimés par d’autres témoignent de cette logique incohérente, de cet illogisme puissamment cohérent dans l’absence de raison, de connaissance culturelle, historique… Les propos suivants sont tellement idiots qu’ils portent en eux tout le danger de l’aberration se prétendant une proposition politique pour le pays.

« Barre-toi, sale sioniste de merde. Sale merde. Nique ta mère. Palestine. Homophobe de merde. T’es un raciste, casse-toi! Dégage fasciste. La France, elle est à nous. Sale enculé. Espèce de raciste. Espèce de haineux. T’es un haineux et tu vas mourir. Tu vas aller en enfer. Dieu, il va te punir. Le peuple va te punir. Nous sommes le peuple. Grosse merde. Tu te reconnaîtras. Espèce de sioniste. Grosse merde. Il est venu exprès pour nous provoquer. Taisez-vous! »

« Facho! Palestine! Rentre chez toi… Rentre chez toi en Israël. Rentre chez toi en Israël. Antisémite. La France est à nous. Rentre à Tel-Aviv. T’es un haineux. Tu vas mourir. Nous sommes le peuple français. Rentre chez toi. Ici c’est la rue! »

La prétention à affirmer la « justice » de la part de l’anticapitalisme romantique est traditionnelle dans le Fascisme et on en a ici tous les traits. On a tous les ingrédients de l’éclectisme combiné aux faiblesses intellectuelles, avec systématiquement la négation de la lutte des classes, de l’existence même de ces classes, avec toujours un « peuple » opposé à une sorte de minorité aux contours indéfinis, extensibles à l’infini, selon les paranoïas, les préjugés, la stupidité.

Il était un article sur agauche.org publié bien avant l’affaire, annonçant que l’antisémitisme allait puissamment se relancer. Les faits lui donnent raison.

Lire également : L’inévitable prochaine montée de l’antisémitisme

Catégories
Politique

Acte XIV des gilets jaunes : la routine malsaine est installée

Les restes des gilets jaunes ont désormais atteint leur maturité. Alors qu’il y a une semaine avait lieu leur pathétique tentative d’un 6 février 1934, quatre-vingt cinq ans après, ils sont désormais installés dans la routine : celle du populisme haineux, de l’aigreur coriace et de la rancœur néfaste.

Le grand symbole du quatorzième samedi des gilets jaunes, c’est bien entendu la série d’invectives plébéiennes contre le philosophe Alain Finkielkraut, avec des propos évocateurs des arrières-pensées : « sale sioniste », « la France elle est à nous », etc.

Il faut voir les images, où on a des gens qui se forcent à jouer la haine, qui en-dehors de tout raisonnement se précipitent dans la mise en scène de l’aigreur, de la rancœur. Voilà le visage du fascisme, voilà ce qui est le contraire du socialisme. L’agressivité barbare contre un vieil homme, contre un penseur… ne peut être porté que par la lie de l’humanité.

On a maintenant un même et unique schéma, improductif, totalement limité sur le plan politique. Des déambulations plus ou moins inorganisées en début d’après midi dégénèrent et se transforment en relative pagaille en fin d’après-midi, avec des gens très hostiles.

Les chiffres du ministère donnent toujours moins de participants, avec cette fois-ci un peu plus de 40 000 personnes dans toute la France, autour de 5 000 à Paris et à Bordeaux, à peu prêt autant à Lyon et Toulouse, 1 600 à Nantes, 110 seulement à Strasbourg, etc.

Quiconque observe ces scènes avec un petit peu d’attention voit bien que la police est cependant très sereine, qu’elle ne fait pas spécialement grand-chose pour empêcher ces gens. Tout au plus sont-ils contenus dans tel ou tel quartier, à l’aide de fumigènes, de tirs de balles en caoutchouc et de grenades de désencerclement.

Contrairement à ce que prétendent les gilets jaunes de manière hystérique, la police ne fait presque pas usage de la force. Au contraire, elle contient très bien ces foules informes, de manière minutieuse, sans quasiment aucun contact, puisque c’est la doctrine du maintien de l’ordre en France que d’éviter l’affrontement. Dans d’autres pays, ou il y a quelques dizaines d’années en France, on aurait dans de telles situations des images permanentes de gens en sang, de policiers usant énergiquement de leur matraque, avec certainement plusieurs morts déjà.

Tel n’est pas du tout le cas ici. Et s’il y a un peu de casse, des tags, quelques vitrines brisées, et des simulacres d’affrontement avec la police, avec une volonté de violence certaine de la part des manifestants les plus offensifs, cela ne représente en fait pas grand-chose. Ce spectacle de « révolution » suffit néanmoins, pour l’instant, à combler l’esprit vide et bien triste de gens s’imaginant perturber le système, alors qu’ils ne perturbent rien d’autre que le quotidien des gens présent dans ces centre-villes. Et encore, parce qu’en fait les Français vaquent à leurs occupations, occupent les terrasses des cafés en plein soleil, font les magasins, se baladent dans les parcs, mais s’écartent quand le ou les quelques milliers de gilets jaunes locaux arrivent dans le secteur.

On a là une routine terrible qui s’est installée en France, nauséabonde, extrêmement malsaine. Il ne faudrait pas croire que le problème concernerait seulement les gilets jaunes, qui pourrait facilement être contenus, ou même réorientés dans certains cas, si la société le voulait. Ce qui est le plus inquiétant, c’est cette passivité, cette lassitude du reste de la population mais qui ne s’exprime pas : elle se contente de ne pas apprécier, tout en acceptant la routine des samedis après-midi.

Il est évident que le pouvoir en place s’en satisfait, qu’Emmanuel Macron entend bien profiter pleinement de l’espace politique que cela lui offre. Sauf que cela est un jeu très dangereux.

On a en France avec les gilets jaunes quelques dizaines de milliers de gens au style fasciste, presque toujours très politisés, penchant tantôt à l’extrême-droite, tantôt à l‘ultra-gauche, qui s’acharnent encore et toujours dans le nihilisme, les raccourcis idéologiques, la faiblesse politique et la plus grande fainéantise sur le plan culturel.

Ces gens s’enfoncent dans une attitude et des pratiques qui ne mènent à rien, ce qui ne peut que contribuer à les maintenir toujours plus dans l’irrationnel, dans l’hystérie et le chaos.

La Gauche a ici une grande responsabilité. Dans leur grande majorité, les dirigeants de la Gauche française sont tellement coupés des classes populaires françaises qu‘ils n’osent pas critiquer les gilets jaunes, de peur de critiquer le cœur prolétarien de la France. C’est là une terrible erreur, une grossière erreur, qui aura malheureusement des conséquences désastreuses avec ces répétitions de samedis malsains.

Catégories
Politique

L’appel des partis politiques à l’union contre l’antisémitisme (« Ça suffit ! »)

Ce mardi 19 février 2019 aura lieu à Paris une initiative commune des partis politiques français pour marquer le coup contre l’antisémitisme. Si la Droite est également concernée (mais pas le Rassemblement National et Debout La France), c’est la Gauche qui est à l’origine de la démarche. En voici l’appel, lancé par le Parti Socialiste, qui ne peut cependant pas être publié sans que soit noté une série de points au sujet de cette question brûlante.

En effet, il y a déjà lieu de constater que la reprise d’une vague d’antisémitisme fait suite à un puissant recul provoqué par le mouvement « Je suis Charlie ». Or, la Gauche a totalement balancé par-dessus bord ce qui a été pourtant la plus grande mobilisation de masse depuis 1945 ! On peut tout à fait être critique de « Je suis Charlie », mais en reconnaître la dimension surtout positive est essentiel. La Gauche a ici failli en passant ce mouvement par pertes et profit, comme s’il n’avait jamais existé.

Le second point, tout aussi important, est que les juifs et juives de notre pays ne supportent plus la Gauche, se sentant profondément trahi alors qu’ils ont toujours été proche d’elle dans leur grande majorité. L’utilisation ultra-démagogique de la question palestinienne par une partie de la Gauche (surtout le PCF, le NPA, l’ultra-gauche), avec une rhétorique antisioniste directement parallèle à un antisémitisme larvé, a provoqué une cassure très profonde. Il faudra des années de travail pour changer cela et les actes symboliques ne suffiront plus.

Le troisième point, et non des moindres, est enfin qu’il ne suffit pas de se dire opposé à l’antisémitisme pour ne pas être soi-même antisémite. Disons les choses telles qu’elles sont : le niveau d’autocritique de la Gauche au sujet de l’antisémitisme est totalement nul. Il n’y aucune étude historique, culturelle de l’antisémitisme, il n’y a aucune réflexion de fond sur la dimension anticapitaliste romantique de l’antisémitisme, il n’y a aucune recherche sur les erreurs et fautes ayant pu être commises.

Lorsque François Hollande, avant d’être élu président de la république, a lancé son « mon ennemi c’est la finance », cela peut plaire à une Gauche voulant taxer les riches, mais c’est intellectuellement un raccourci terrible, correspondant à l’opposition antisémite d’un capitalisme « productif » à un capitalisme « parasitaire ». Cela ne veut pas dire bien entendu que François Hollande soit antisémite, la question ne se pose même pas. C’est toutefois un bon exemple de profonde erreur d’approche, d’une utilisation des mauvais codes, d’un incompréhension des profonds enjeux culturels à l’arrière-plan à l’échelle de la société.

 

« Ça suffit ! » : l’appel à l’union contre l’antisémitisme

14 février 2019

Les actes antisémites se sont dramatiquement multipliés au cours de l’année 2018. Ça suffit !

L’antisémitisme n’est pas une opinion, mais un délit. Il est redevenu une incitation au meurtre. Ilan Halimi, les enfants de l’école Ozar Hatorah, les victimes de l’Hyper Cacher, Sarah Halimi, Mireille Knoll, tous ont été assassinés, parfois torturés, parce que Juifs. Ça suffit !

Nous sommes tous concernés. L’antisémitisme n’est pas l’affaire des Juifs. Il est l’affaire de la Nation toute entière.

Nous portons dans le débat public des orientations différentes, mais nous avons en commun la République. Et jamais nous n’accepterons la banalisation de la haine. C’est pourquoi nous appelons l’ensemble des Français à se réunir dans toutes les villes de France pour dire ensemble : NON, l’antisémitisme, ce n’est pas la France ! »

Un grand rassemblement est organisé à Paris,
place de la République
Mardi 19 février 2019 à 19 heures

Parti Communiste Français • Gauche Républicaine et Socialiste • La République en Marche • Europe Écologie Les Verts • La France insoumise • Les Républicains • Parti Radical de Gauche • Mouvement des Citoyens • Mouvement Démocrate • Union des Démocrates et des Écologistes • Les Centristes • Parti socialiste • Union des Démocrates et Indépendants • CAP 21 • Mouvement Radical • Agir • Les Radicaux de Gauche • Génération.s • Alliance Centriste • République & Socialisme • Mouvement des Progressistes • Place publique • GayLib • MJLF • ULIF • LICRA • SOS Racisme

Catégories
Politique

Tribune : « L’antisémitisme et le racisme sont un poison ! » par Jeunesse contre la Haine Haute-Savoie

L’antisémitisme et le racisme sont un poison !

Voilà plusieurs jours que les médias et différents hommes et femmes politiques alertent sur la montée dangereuse de l’antisémitisme.
Il y a 30 ans, lors de la profanation du cimetière juif de Carpentras, ce sont plusieurs dizaines de milliers de personnes dont le président de la République Mitterrand qui défilent dans les rues pour dire « non au racisme et à l’antisémitisme ». Que reste t-il aujourd’hui de ce « non » ?

Malgré les sursauts populaires lors de l’assassinat du jeune Ilan Halimi en février 2006, malgré l’énorme rassemblement républicain de la France «Je suis Charlie » en janvier 2015, les digues contre la haine raciale semblent toujours plus se fissurer.

L’antisémitisme n’est pas un racisme « comme les autres », il a cette particularité que n’ont pas les autres racismes : il est toujours complotiste. On ne hait pas un juif parce que juif, mais parce qu’il détient quelque chose ou influe sur quelque chose. De George Valois à Hitler, en passant par Georges Sorel, le journal Gringoire, l’islamisme fondamentaliste et Charles Maurras… Tous ont en commun la haine des juifs car selon eux ils seraient le vecteur d’une grande machination à l’échelle mondiale. Il n’y aurait plus de juifs que les fascistes voudraient tout de même leur mort.

Quiconque a appris les leçons du passé sait bien que les moments de crise sociale et de difficultés économiques sont le prélude au déferlement antisémite. Lors de ces moments de turbulences l’étranger à côté de chez soi devient toujours le bouc-émissaire et le juif le pseudo-organisateur de la misère. Dans la France de la fin du XIXè siècle, à l’antisémitisme de l’affaire Dreyfus correspond la haine anti-italienne illustré par le massacre des Aigues-Mortes. Dans la France des années 1930, au violent racisme anti-polonais du Nord répondait le terrible antisémitisme des ligues factieuses. La vague antisémite n’est qu’un reflet de la banalisation raciste car l’antisémitisme ne peut pas exister sans le racisme, et le racisme ne peut exister sans l’antisémitisme.

A l’époque où nous vivons, la division anti-démocratique est un véritable poison. Nous l’avons bien vu ces dernières années. Au regard de la dernière hausse des actes antisémites, qui ne peut pas s’inquiéter de manifestations où l’on a pu voir des antisémites défiler sous le vieux mot d’ordre démagogique « A bas les voleurs ! ». Ce mot d’ordre est d’ailleurs directement issu du 6 février 1934. Mais depuis les années 1930 les douloureuses expériences de l’Histoire ont permis d’amener ensuite les lois dites antiracistes. En effet la Loi Pléven (1971) et la Loi Gayssot (1990) font partie d’un patrimoine populaire de la lutte contre la haine raciste. Mais ces lois ne sont pas ou suffisamment peu appliquées et c’est pour cela qu’il faut un sursaut et une fermeté populaire.

On entend souvent des personnes défendre l’antisémitisme au nom d’une prétendue liberté d’expression. La liberté d’expression n’est pas un prétexte à la haine. Ce n’est pas normal que des personnes puissent déverser leur haine raciste et antisémite impunément en public. Les paroles et gestuelles haineuses entraînent les actes haineux qui entraînent la violence.

Nous devons nous unir face au racisme et à l’antisémitisme et ce rapidement, si l’on ne veut pas se retrouver coincés comme dans les années 1930. Il est plus qu’urgent que le peuple trouve la voie de son unité contre la haine, la barbarie et les semeurs d’illusions.

En tant que jeunes qui combattons l’antisémitisme nous subissons l’isolement.
Jeunesse contre la Haine Haute-Savoie
Catégories
Politique

Acte XIII des gilets jaunes : un 9 février 2019 au goût de 6 février 1934

Presque en phase avec le 85e anniversaire de la tentative de coup d’État fasciste du 6 février 1934, les gilets jaunes ont essayé pareillement de forcer l’entrée de l’Assemblée nationale. Est-il vraiment encore possible de dire que les gilets jaunes ne sont pas un mouvement de type pré-fasciste ou fasciste ?

L’acte XIII des gilets jaunes était un défi pour eux, puisque c’était la première mobilisation après que la CGT se soit lancé elle aussi dans un mouvement parallèle. Ce dernier n’a pas eu d’ampleur autre qu’habituelle ; quant aux gilets jaunes, ils restent fidèles à eux-mêmes, avec encore et toujours ces drames propres à un mouvement chaotique et velléitaire, jouant avec le feu de la révolte de manière désordonnée.

Un manifestant a ainsi eu la main arrachée devant l’Assemblée nationale : ce photographe « gilet jaune » prenait les photos des manifestants cherchant à forcer les palissades empêchant l’accès à l’Assemblée et a commis l’étonnante et très lourde erreur de repousser de la main une grenade de désencerclement tombé à ses pieds.

Forcer l’accès à l’Assemblée nationale ! Est-ce qu’on sait ce que cela signifie ? Que contrairement aux mensonges des populistes et de l’ultra-gauche, les gilets jaunes ne dépassent pas l’horizon pré-fasciste ou fasciste. Il ne se tournent pas vers la question sociale. Ils n’adoptent pas les traits relevant de la lutte des classes. Ils ne s’ouvrent pas aux questions d’idéologie, de politique, de culture, de projet social. Ils sont résolument extérieurs à la Gauche et ils comptent bien le rester. Ils sont un mouvement contestataire, mais de Droite.

Car il est des symboles en politique et peu importe même que les gilets jaunes sachent ou non que le 6 février 1934, l’extrême-droite ait cherché le coup de force en essayant de prendre l’assaut de l’Assemblée nationale. Ce moment critique a été suivi, comme on le sait, de l’unité immédiate des ouvriers communistes et socialistes afin de mobiliser sur une base antifasciste ; il en découlera le Front populaire, né de l’unité de toute la Gauche, à la base.

L’antiparlementarisme est une valeur étrangère à la Gauche et celle-ci a toujours su à quoi s’en tenir avec ceux qui dénonçaient les « voleurs », le « parlement », la « république », le « complot » des « élites », etc. Le mot d’ordre des gilets jaunes « On lâchera rien tant que Macron et la 5e république ne seront pas destitués ! » ne peut avoir aucun rapport avec la Gauche. On peut penser ce qu’on veut de l’Assemblée nationale et vouloir, si on le souhaite, un pays de Soviets. Mais jamais la Gauche n’a fait de l’antiparlementarisme le vecteur de son message. Qu’on soit pour le parlement ou qu’on pense que ce n’est qu’une marionnette du capitalisme, dans tous les cas l’antiparlementarisme est l’expression de forces anti-démocratiques.

L’attaque du Parlement ne peut avoir été menée que par des gens objectivement au service du populisme, de la Droite « révolutionnaire ». On notera également, non pas l’incendie d’une Porsche car cela n’est guère critiquable pour le fond symbolique de la chose, mais celui d’un véhicule de la mission Vigipirate sous la Tour Eiffel, ce qui pour le coup relève de la stupidité politique la plus totale.

Tout cela montre par ailleurs de la fuite en avant de la part de ceux qui cherchent à contourner la politique, la Gauche, le peuple. Plus le mouvement régresse numériquement, plus sa charge « ultra » est forte pour compenser. Les faits sont là : le nombre de manifestants s’estompe, contrairement aux prévisions fantasmagorique des populistes, de l’ultra-gauche et même de la CGT, qui s’imaginaient que le mouvement ayant « continué », il allait connaître un saut qualitatif.

Il y a eu 6 000 personnes à Toulouse, 4 000 personnes à Paris, Bordeaux et Lyon, 1 500 à Lille, Marseille et Montpellier ou encore 1 000 à Clermont-Ferrand.

Catégories
Politique

L’inévitable prochaine montée de l’antisémitisme

L’antisémitisme, cette infamie, est profondément enraciné dans la société française. Après les gilets jaunes, il connaîtra une inévitable progression, tant quantitative que qualitative. Et autant par la droite que par une « gauche » coupée de la Gauche historique.

Manifestation pro palestinienne à Sarcelles, juillet 2014

L’antisémitisme ne s’est pas exprimé, à part de manière extrêmement marginale, lors des gilets jaunes. C’est logique : l’antisémitisme sert historiquement de paratonnerre, de fiction anticapitaliste. Quand la crise l’emporte malgré tout, cette fiction perd son sens. La dimension sociale réelle l’emporte. Mais comme rien ne sortira des gilets jaunes, l’antisémitisme reprendra forcément sa fonction. Et avec la crise sociale approfondie, il réapparaîtra de manière bien plus renforcée.

Il y a ici quelque chose de fondamentalement mécanique. L’antisémitisme est consubstantiel aux pays marqués par une idéologie religieuse chrétienne où le moyen âge a fait de certains Juifs des banquiers, le prêt à intérêt étant interdit entre coreligionnaires. L’antisémitisme médiéval s’est maintenu par la suite, notamment dans tout le milieu monarchiste, avec son anticapitalisme romantique idéalisant le moyen âge. Et il s’est modernisé, devenant le leitmotiv de tous les communautarismes, religieux comme nationaliste ou « anticapitaliste ».

La situation en France va donc être mauvaise, elle aurait pu pourtant être bonne si la loi Gayssot avait été appliquée. Mais l’État a laissé faire tous les foyers d’antisémitisme, avec leur propagande, leurs innombrables publications, leurs activités culturelles et politiques. Que Dieudonné ne soit pas en prison est une absurdité historique, et il en va de même pour Alain Soral. Cela montre bien que l’État est dans les mains de gens non pas incapables, mais totalement vendus aux couches dominantes, qui se désintéressent de tout ce qui n’est pas eux.

Ce qui est malheureux, avec cet antisémitisme, c’est que les Juifs réagissent, là aussi c’est mécanique, en se repliant sur eux-mêmes. Le sionisme ne prend pas : au-delà d’une sympathie certaine pour Israël, il n’y a aucune vague de départ réelle et les Juifs se sentent dans notre pays français avant tout. Même ceux qui partent sont considérés par les Israéliens irrémédiablement français dans leur style, leur culture, leur attitude.

Cependant, il y a un repli communautaire avec la religion servant de romantisme. Les prénoms donnés ne sont souvent plus des prénoms juifs, même pas des prénoms israéliens ; ce sont des prénoms bibliques jamais employés jusqu’à présent. Cela alors qu’auparavant, c’était des prénoms français qui étaient choisis de manière quasi systématique !

Ce repli, regrettable, critiquable, est évidemment secondaire et sans importance par rapport à l’antisémitisme, ce véritable danger, cette barbarie arrachant aux esprits tout ce qu’il peut y avoir de dignité, de rationalité, d’humanité. Et ce qui est terrifiant, c’est vraiment le terme, c’est que l’antisémitisme profite de larges appuis dans une « gauche » qui n’est plus la Gauche historique. Les populistes et les « ultras », ayant rejeté les principes et traditions de la Gauche, vivent en cercle fermé intellectuellement parlant, dans un romantisme forcené, avec un antisémitisme rampant à l’arrière-plan.

Il y a ici une convergence avec l’utilisation d’un argumentaire « social » dans le camp nationaliste. Comme dans les années 1920 en Italie et dans les années 1930 en Allemagne, on a le refus de la Gauche historique, au profit d’une sorte de spontanéisme populiste, sans principes autre que le succès pragmatique, avec des raisonnements à court terme.

La clef de tout cela, c’est bien entendu la destruction de la culture, qui se généralise. La destruction de la culture musicale, de la culture historique, de la culture littéraire, de la culture cinématographique, de la culture des idées. L’antisémitisme apparaît ici comme une anti-culture, comme une idéologie ayant l’apparence d’une culture, comme un véritable prêt à porter intellectuel. C’est là où réside son terrible danger.

On n’en pas a fini avec cet horrible défi que représente l’antisémitisme, tant sur le plan de son ancrage que de sa diffusion. On peut même dire qu’on ne fait que commencer avec ce problème, tellement rien n’a été fait de manière solide, durable, malgré l’épisode positivement marquant de « Je suis Charlie », qui a fragilisé et freiné la vague antisémite d’alors.

Il appartient à la Gauche de ne pas se contenter de postures ou de positions, mais bien de mener un travail de fond pour analyser et extirper les racines de l’antisémitisme. Les morts de la destruction des Juifs d’Europe nous avertissent du danger !

Catégories
Politique

Décadence ou inversion des valeurs ?

A moins de penser que tout va pour le mieux ou d’être nihiliste, il y a deux manières de considérer les choses. Soit on assume le point de vue de la Gauche qui avait bien compris dans les années 1920 qu’il y avait une décadence des valeurs, car les riches ne pensent qu’à se goinfrer et ont jeté la culture par-dessus bord. Soit on adopte le point de vue de l’extrême-droite comme quoi les valeurs auraient été inversées.

Illustrataion Phèdre (Jean Racine), Acte V

Le grand discours de la « fachosphère » depuis une décennie est qu’il y aurait une inversion des valeurs. Les criminels seraient mieux traités que les victimes, les femmes adopteraient un patriarcat inversé, les élèves compteraient davantage que les professeurs, etc. La France aurait été prise d’assaut et il y aurait eu un retournement de la hiérarchie de ce qui compte vraiment. Il faudrait donc un retour aux sources.

Certains prônent donc un retour à la France des années 1960, avec un racisme marqué, mais d’autres ont une autre approche. La grande idée d’Alain Soral et de Dieudonné est ainsi de s’appuyer sur une partie des gens issus de l’immigration pour prôner ce « retour aux valeurs », en s’appuyant sur leurs préjugés religieux, leurs valeurs patriarcales, leur romantisme anticapitaliste. Cela a donné une forme « populaire » à ce discours de la « fachosphère ». Alain Soral a eu de très grands succès de ventes avec ses écrits complotistes.

Et il est impossible de ne pas remarquer que les gilets jaunes sont ici en partie les successeurs des tenants de la quenelle de Dieudonné. Il y a le même populisme, le même rejet des « élites », la considération selon laquelle les politiques sont « tous pourris », une obsession petite-bourgeoisie pour l’État, etc. Avec la « quenelle », Dieudonné a popularisé avec un très grand succès un certain style rentre-dedans, revendicatif, sur la base de valeurs anticapitalistes romantiques.

L’antisémitisme virulent, le complotisme délirant, les fascinations pour les élites manipulatrices, etc., tout cela correspond à la mentalité comme quoi les choses auraient été déréglées, que des forces « obscures » auraient procédé à une inversion des valeurs. Comme ce qui devrait compter ne compte pas, on s’imagine qu’elles ne comptent plus, car n’est-il pas logique qu’elles aient compté par le passé, puisqu’elles doivent compter ?

On retrouve ici la logique de nombreux gilets jaunes, qui s’aperçoivent qu’ils sont exploités et pauvres, mais qui ne conçoivent pas que cela soit possible. Ils imaginent donc qu’avant ils n’étaient ni exploités, ni pauvres, alors qu’ils l’étaient également, mais qu’il y avait un peu plus de marge, et que donc ils ne le saisissaient pas… Ils idéalisent alors le passé, au lieu de s’assumer comme pauvres. C’est très étrange que cela : on a des pauvres ne voulant pas être pauvres, mais refusant le fait de s’assumer pauvres. Comme si c’était une honte et qu’il fallait, plutôt que de s’assumer prolétaire, toujours en revenir à la classe moyenne, cette forme sociale idyllique, au-delà du bien et du mal (c’est-à-dire des bourgeois et des ouvriers).

Ce qui saute aux yeux bien sûr, c’est que chez les tenants de l’inversion des valeurs comme processus « sabotant » la France, la culture est un thème qui n’existe pas. On est dans un style violemment beauf, avec une négation brutale de toute réflexion fondée sur la culture. Il n’y aucune référence en termes de romans, films, sculptures, monuments, peintures, pièces de théâtre, etc. On est dans un mouvement « élémentaire », brut de décoffrage, et qui s’assume comme tel. D’où tous les raccourcis, la paranoïa, le complotisme, la rage éparpillée, etc.

Il est important de voir cela, parce que cela montre que la fachosphère ne prône justement pas de réelles valeurs. La question de l’art contemporain est ici un très bon exemple. La fachosphère explique qu’il est scandaleux que l’art contemporain s’impose autant. Cependant, elle ne propose rien en remplacement. Le discours de la fachosphère consiste uniquement à parler d’une inversion des valeurs, pour mettre en avant des valeurs réactionnaires, mais de manière floue. Il ne faut pas croire que la fachosphère mette en avant Raphaël, Donatello, Michel-Angelo ou Leonardo de Vinci.

La fachosphère ne consiste pas à dire que Racine c’est autre chose maître Gims ou Molière autre chose que Booba ; la fachosphère n’est que du ressentiment. La culture n’y existe pas et pour cause : l’extrême-droite n’est que le produit de la décadence de la société française. Une décadence qui a une source simple : les couches sociales dominantes se goinfrent, de manière barbare, ayant abandonné ou abandonnant toujours plus la moindre valeur culturelle. L’ultra-consommation sur un mode nouveau riche devient la règle. On se moque beaucoup des oligarques russes et des millionnaires chinois consommant de manière ostensible et sans réel goût, mais croit-on vraiment que les riches français soient différents ?

La France va mal, elle est en crise, mais ce n’est pas qu’une crise sociale : c’est une crise morale, culturelle, idéologique. C’en est fini de la bourgeoisie hyper éduquée, extrêmement posée, techniquement efficace des années 1960. La bourgeoisie nouvelle est libérale, seulement libérale, et ne peut plus assumer son rôle de dirigeante de la société. D’où la décadence.

Catégories
Réflexions

Le capitalisme remplace la solennité par le conventionnel

La distinction entre les concepts de solennité et de conventionnel est très importante. Il y a le risque sinon, en effet, de ne pas saisir les exigences de gens d’une perspective de civilisation. Et le capitalisme en crise saborde cette perspective.

Blow, Blow Thou Winter Wind, 1892, John Everett Millais

Pour former les esprits, il faut qu’il y ait des moments de solennité pour souligner ce qui est important. Or, rien ne peut être important au sens strict dans une société capitaliste, car tout dépend des individus et est par conséquent relatif. La loi du marché, qui célèbre le particulier, rentre inlassablement en conflit avec la civilisation, qui présuppose l’universel.

C’est pour cela que des événements comme le 14 juillet, le 11 novembre, qui auparavant se voulaient des moments emprunts de solennité, ne sont désormais pris que comme des conventions incontournables qu’il faut respecter, parce qu’il en est ainsi. L’idéologie dominante n’est plus en mesure de proposer du contenu, elle ne peut que justifier un cadre en disant qu’après tout cela pourrait être pire, et qu’en plus cela peut être mieux.

Il y a ici un aspect important sur le plan de l’histoire des idées, un changement profond qu’il faut bien évaluer à sa juste mesure, car cela ne peut pas en rester ainsi. Si l’on prend les années 1920-1930, l’extrême-droite prétendait affirmer une nouvelle solennité.

Aujourd’hui, elle ne le fait plus du tout, elle a abandonné toute prétention « totalitaire » pour se cantonner dans des dénonciations populistes.

Si l’on prend la Gauche des années 1920-1930, on peut s’apercevoir qu’elle aussi affirmait la solennité. Pas la même que l’extrême-droite bien sûr, mais une solennité quand même, celle du Socialisme, de la classe ouvrière, du Parti de la classe ouvrière. Or, aujourd’hui la Gauche se cantonne dans l’affirmation de conventions « modernisées », voire la philosophie de la remise perpétuelle en question des conventions. C’est la « Gauche » version turbocapitaliste, de philosophie post-industrielle, post-moderne.

Or, si le capitalisme qui relativise tout ne tourne plus, alors sa pression va céder d’autant. Ce qui signifie qu’il y aura, en conséquence, une réaffirmation de la solennité. Marion Maréchal Le Pen est ainsi bien plus dangereuse que Marine Le Pen, car si cette dernière est une populiste opportuniste, elle est en ce qui la concerne une véritable conservatrice révolutionnaire, ayant la solennité en ligne de mire.

Face à cela, seule une autre solennité pourra être mise en avant. Parce que c’est une question de civilisation, et que si le capitalisme ne tourne plus, alors tout s’effondre et les gens ne veulent pas que tout s’effondre. Le Fascisme proposera une nouvelle solennité, et par conséquent la Gauche devra en faire de même, qu’elle le veuille ou non.

Cela signifie que ni la gauche version post-moderne ni les anarchistes ne pourront être des alliés de la vraie Gauche. Car leur ligne est la déconstruction, la déstructuration, le refus des conventions. C’est la même philosophie « progressiste » que La République En Marche et Emmanuel Macron.

S’imagine-t-on, alors que le capitalisme est en crise, aller voir les gens et dire que ce n’est pas grave et que ce qui compte, c’est de faire sauter les conventions ? Personne ne comprendrait. Les gens attendront une proposition d’ordre, de valeurs, de construction, de perspective. Ils voudront que soit proposée une orientation allant dans le sens de la civilisation. Ils savent qu’il faut des moments de solennité – et cela, les ouvriers le savent.

Le fascisme, s’il faut définir sa substance, consiste justement en une tentative de hold-up de cette quête de solennité. C’est pour cela qu’il a besoin de mises en scène théâtrales, d’une esthétique « monumentaliste » sans contenu autre que symbolique, de mots d’ordre volontaristes, etc.

À la Gauche d’assumer ses propres valeurs jusqu’au bout et d’être capable de proposer des perspectives de maintien et de développement de la civilisation. Sans cela, non seulement elle ne sera pas elle-même, mais, en plus, ce sera la défaite face au Fascisme !

Catégories
Guerre

L’effondrement des investissements chinois en Europe et aux États-Unis

La Chine monte en puissance sur le plan technologique et industriel, et les États-Unis ne comptent pas accepter d’abandonner leur position de force. On va vers un conflit armé pour le repartage du monde et l’effondrement des investissements chinois en Europe et aux États-Unis est un reflet de cette montée de tension à l’échelle mondiale.

Les journaux économiques mondiaux ont beaucoup parlé ces derniers jours des chiffres concernant les investissements chinois aux États-Unis et en Europe. On sait en effet que Donald Trump a lancé la guerre commerciale américaine contre la Chine ; tous les observateurs de « géopolitique » ont compris que les États-Unis ne comptaient pas attendre passivement que la Chine devienne une grande puissance militaire, ce qu’elle n’est pas encore.

La situation est donc de mauvaise augure et savoir si les investissements chinois se prolongent ou pas est un bon critère pour savoir quelle est la tendance de fond. Va-t-on vers la guerre ou bien les échanges continuent-ils comme avant, indiquant par conséquent qu’il y a au mieux des frictions ?

Il apparaît qu’on va au désastre : les investissements chinois aux États-Unis et en Europe se sont effondrés de 73 % par rapport à l’année dernière, passant de 111 à 30 milliards de dollars. La Chine ne se désengage pas : elle a des positions très fortes dans certains pays comme la Grèce. Sa présence continue également de croître en France, en Espagne, en Allemagne, ainsi qu’au Canada (de 80 % l’année dernière).

Mais elle sait qu’il n’est pas dans son intérêt de mettre l’accent de ses investissements dans ce qui risque de se retourner contre elle. La preuve de cela apparaît quand on sait que 66 % des investissements chinois vont en Asie, 12 % en Amérique latine, qu’il y a une présence chinoise massive en Afrique.

L’Europe et les États-Unis ne sont que des choix secondaires pour les investissements chinois et le repli chinois montre bien qu’on va vers un affrontement pour le repartage du monde.

Les États-Unis ne comptent évidemment pas attendre que la Chine se soit renforcée au point de parvenir à un éventuel équilibre militaire. D’où la guerre commerciale américaine contre la Chine, d’où l’arrestation d’une dirigeante de Huawei au Canada (et sa libération sous caution au bout d’un certain temps), d’où l’arrestation d’un cadre de Huawei en Pologne pour espionnage.

Huawei est en termes financiers la sixième plus grande entreprise de technologie, avec 170 000 employés ; les États-Unis ne comptent pas laisser cette entreprise continuer sa croissance. Il faut également penser à ZTE, qui fournit des entreprises de télécoms et des gouvernements dans 160 pays.

C’est parce qu’il représente la ligne de l’affrontement que Donald Trump a été élu, de même que Bolsonaro a été élu au Brésil, que le Brexit est devenu la ligne du Royaume-Uni, que des forces isolationnistes – protectionnistes – nationalistes sont au pouvoir ou au gouvernement en Italie, en Hongrie, en Autriche, en Pologne, etc. Il faut bien entendu aussi prendre en compte la Russie, qui met de l’huile sur le feu. On aurait tort d’ailleurs de penser que la France ne relève pas de ce petit jeu, surtout avec sa présence massive en Afrique.

Dans un tel panorama, ne pas voir que la guerre est une tendance inexorable serait de la naïveté. Penser que la France, avec l’Union Européenne, pourrait éviter la guerre, serait également du cynisme, ou bien un espoir vain.

Il appartient à toutes les forces de Gauche de prendre conscience de ce à quoi amène la compétition mondiale sur le plan économique, et de prendre l’initiative pour faire face à la guerre qui vient. Il y a ici une responsabilité historique et ne pas l’assumer serait un crime !

Catégories
Société

Sur le meurtre antisémite barbare du jeune Ilan Halimi

Il y a 13 ans, le 20 janvier 2006, Ilan Halimi, 23 ans, était enlevé, torturé durant 24 jours et tué parce que juif.

Le jeune et beau Ilan était vendeur de téléphones portables dans un magasin boulevard Voltaire à Paris. Dans la semaine précédent son enlèvement, il s’est fait « dragué » par Sorour Arbabzadeh, mais appelé « Emma » et « Yalda ». Ilan l’appelle pour lui proposer de passer la soirée ensemble. Elle accepte ; mais elle n’a en réalité pas du tout l’intention de passer la soirée avec lui, elle servait d’appât à la solde du Gang des barbares, mené par Youssouf Fofana, qui cherchait à enlever un juif depuis quelques temps, afin de soutirer de l’argent.

Commencera pour Ilan l’horreur véritable. C’est sa copine, Monny, qui alertera en premier la police, car Ilan n’est pas rentré à son domicile la veille. Assez rapidement, Fofana rentre en contact avec la famille Halimi pour leur demander une somme exorbitante, car il est convaincu d’un préjugé antisémite féodal : « les Juifs ont de l’argent et ils sont solidaires ».

Sa demande varie entre 450 000 euros et 500 000 euros. Lorsque Fofana comprend que la famille d’Ilan n’a pas les moyens, sa mère est secrétaire et lui ne touchait que 1 200€ par mois, il appelle un rabbin choisi au hasard dans l’annuaire et le charge de « récolter l’argent dans sa communauté ».

Ilan est torturé, séquestré dans un appartement d’un HLM à Bagneux puis dans la cave de l’immeuble. Le jeune homme n’est que très peu nourri, il est humilié ; plusieurs de ses geôliers jouent de lui, il a les yeux bandés en permanence, ils lui écrasent des cigarettes et des joints sur tout le corps. Ils ne le douchent que très peu aussi. Et après 24 jours d’un cauchemar inimaginable, Ilan est découvert agonisant le 13 février le long des voies ferrées du RER C à Sainte-Geneviève-des-Bois.

Il décédera lors de son transfert à l’hôpital. L’ordure antisémite qu’est Fofana fuit en Côte d’Ivoire. La justice française ira le chercher et le ramènera en France. Lui ainsi que les 26 autres accusés sont condamnés à des peines ridicules pour leurs actes émanant de la pire barbarie antisémite.

Fofana est le seul condamné à perpétuité, avec 22 ans de sûreté. Sorour Arbabzadeh est condamnée quant à elle à seulement 9 ans de prison, et ce malgré son rôle décisif.

Justice n’a donc pas été rendu pour le jeune Ilan. Il n’a pas été la seule victime morte de l’antisémitisme ces dernières années : le 19 mars 2012, Mohammed Merah abat de sang froid Gabriel Sandler, 4 ans, Arié Sandler, 5 ans, Myriam Monsonego, 7 ans et Jonahtan Sandler, 30 ans ; le 4 avril 2017, Sarah Halimi, 65 ans est assassiné chez elle ; le 23 mars 2018, Mireille Knoll, survivante de la Shoah est poignardée chez elle.

En novembre 2018, le Premier ministre Édouard Philippe a annoncé que les actes antisémites en France étaient en très forte hausse (+ 69 %). Après un pic « record » en 2015, les actes antisémites officiellement recensés avaient reculé en 2016 puis en 2017, avec 311 actes répertoriés. Ils sont repartis à la hausse.

Ces chiffres ne montrent cependant pas deux choses : ces actes sont de plus en plus violents tandis que les personnes juives, désabusées et en perte de confiance vis-à-vis des institutions, portent de moins en moins plainte pour les actes les moins violents.

Il est nécessaire que la Gauche comprenne que l’antisémitisme n’est pas un racisme comme les autres, mais que c’est bien le « socialisme des imbéciles », qu’il est donc toujours complotiste. La tuerie de Toulouse et les assassinats d’Ilan, de Sarah et de Mireille ne doivent pas être oubliés. Pas plus que chacune des victimes quotidiennes de l’antisémitisme.

Catégories
Politique

Adam Andruszkiewicz, un fasciste au gouvernement polonais

Depuis 2015, la Pologne est gouvernée par le parti Droit et Justice, un parti réactionnaire et nationaliste. Le 28 décembre 2018, le réactionnaire Morawiecki, premier ministre polonais et membre du parti Droit et Justice (Prawo i Sprawiedliwosc), a appelé Adam Andruszkiewicz pour devenir le vice-ministre des affaires digitales.

Comme on l’apprend sur le site officiel du gouvernement polonais, Adam Andruszkiewicz en tant que nouveau Secrétaire d’État aura comme missions d’être le représentant du ministère au Parlement polonais et sera chargé de la mise en place de la 5G (la technologie télécoms succédant à la 4G) ainsi que des affaires de cyber-sécurité pour le pays.

Ce point est très important, car si l’on se penche sur son parcours, on comprend que c’est un véritable fasciste. Il y a donc largement de quoi craindre pour les donnés informatiques des militants de Gauche, qui pourraient « fuiter » dans les prochaines semaines… Cela, bien sûr, fait craindre directement pour leur sécurité.

Pendant ses études en relations internationales dans l’est de la Pologne à Bialystok, Adam Andruszkiewicz a rejoint le mouvement clérico-fasciste Młodzież Wszechpolska (MW), que l’on peut traduire par « jeunesse de Toute la Pologne ».

Ce nom est par ailleurs inspiré de l’organisation fasciste Związek Akademicki Młodzież Wszechpolska (union académique de la jeunesse de Toute la Pologne), créée par le théoricien « national-démocrate » Dmowski, connu dans les années 1930 pour ses actions antisémites.

Adam Andruszkiewicz est devenu le leader de l’organisation MW entre le 21 mars 2015 et le 2 juillet 2016, et a rejoint en 2014 le Ruch Narodowy (Mouvement National), la branche adulte de ce mouvement se voulant un rassemblement de nationalistes, puisque les fascistes de Oboz Narodowo-Radykalny en faisaient partie jusqu’en fin d’année 2015.

Lors du premier congrès du Mouvement National étaient présents les représentants du parti néo-nazi hongrois Jobbik, les fascistes italiens de Forza Nueva, ainsi que les franquistes espagnols de Democracia Nacional.

Sur directive stratégique de son parti, Adam Andruszkiewicz s’est présenté aux élections législatives de 2015 sous l’étiquette du mouvement populiste Kukiz ‘15, lancé par un chanteur populaire polonais.

Il a remporté son siège de député dans sa circonscription. Il démissionne alors du Mouvement National en 2016, et quelques jours après de la direction du MW, pour se consacrer à son nouveau mouvement, en créant une association à l’intérieur de celui-ci nommé  Endecja, qui se veut dans le prolongement idéologique du Związek Akademicki Młodzież Wszechpolska.

En rentrant au gouvernement, il a marqué un virage encore plus à droite, et avec le poste qu’il occupe maintenant, les personnes progressistes polonaises doivent véritablement craindre pour leur sécurité, puisqu’il y a quelque temps, il rendait hommage au NSZ, l’organisation fasciste anti-allemande et anti-communiste polonaise qui a tué des innocents après-Guerre.

Il arborait aussi fièrement des tee-shirts de cette organisation. À l’époque où il dirigeait MW, il voyait des communistes partout en Pologne et incitait à « tuer les ennemis de la Patrie » (Śmierć wrogom ojczyzny) – ce slogan étant repris par l’ensemble des forces réactionnaires et fascistes polonaises.

Depuis plusieurs semaines, Adam Andruszkiewicz avait montré son soutien à l’actuel premier ministre Morawiecki, notamment via des messages sur les réseaux sociaux. Le nouveau vice-ministre a montré à de nombreuses reprises sa haine de la Gauche et du progrès, son ascension au gouvernement et les moyens techniques qui vont être à sa disposition sont donc de terribles nouvelles pour les progressistes de Pologne et du monde entier.

Catégories
Politique

Les propos grandiloquents de Jean-Luc Mélenchon sur Eric Drouet

Jean-Luc Mélenchon a présenté hier ses « remerciements » de manière grandiloquente en l’honneur de la figure des gilets jaunes Eric Drouet. Il valorise la posture contestataire des gilets jaunes, les présentant comme des figures historiques alors qu’ils ne sont qu’une manifestation hystérique et improductive de la crise du capitalisme.

Jean-Luc Mélenchon aime s’imaginer important et adopter la posture de celui qui commente l’Histoire avec un grand H. C’est ainsi qu’il a déterminé hier dans un petit texte sur son blog, pour finir l’année 2018, que « l’histoire de France a pris un tournant » avec les gilets jaunes. Rien de moins ! Comme si un petit message au soir du 31 décembre suffisait à déterminer ce qui est historique pour la France.

Lui et son mouvement La France Insoumise considèrent en fait depuis le début ce mouvement comme étant de grande valeur. Dans un autre commentaire publié la veille le 30 décembre, il expliquait que les gilets jaunes justifient l’ orientation populiste, à rebours de la Gauche historique :

« Car le fait est que bien des organisations politiques de la gauche traditionnelle en France finirent aussi leur naufrage intellectuel dans cette circonstance. En effet, l’évènement confirma l’obsolescence de leurs logiciels d’analyse. L’obsession anti-populiste et l’hostilité de principe aux choix stratégiques des insoumis ont été de bien piètres boussoles. »

Il s’agirait donc avec les gilets jaunes d’une « révolution citoyenne », dont Eric Drouet serait une figure. De manière totalement délirante, il met ce dernier en parallèle avec un homonyme acteur de la Révolution française à qui Napoléon aurait dit « sans vous l’histoire de France aurait été toute différente ».

Cette comparaison est très intéressante car elle permet à Jean-Luc Mélenchon d’expliciter sa conception des choses, de la politique. Ce qui est flagrant, c’est qu’il n’est pas quelqu’un prônant la rationalité et la culture, mais plutôt le coup de force comme expression populaire.

Pour lui, ce ne sont pas les Lumières, en tant qu’expression idéologique et culturelle de la lutte des classes entre la noblesse et la bourgeoisie soutenue par les masses populaires qui ont permis la Révolution. Ce sont simplement des individus qui auraient osé s’opposer, dans un grand élan spontané.

Il est ainsi incroyablement parlant de voir une explication comme celle-ci de la part de Jean-Luc Mélenchon :

« Ce Drouet-là est un vrai modèle dans ce qu’est une révolution populaire : on n’attend pas les consignes pour agir ! Le peuple qui accourut pour ramener le roi à Paris, les soldats qui refusèrent de passer en force sur le pont, tous ont pour point de départ la situation créée par Drouet. »

Un tel propos propos n’a rien de Gauche, ni de près ni de loin. Il a d’ailleurs traditionnellement bien plus à voir avec le fascisme qui a toujours valorisé le spontanéisme, à l’image d’un George Sorel.

Parce que justement, sans organisation, sans la rationalité ouvrière, sans une grande remise en cause et de grands bouleversements sur le plan culturel, aucun réel mouvement populaire n’est possible.

Sauf que le fascisme ne veut pas d’un mouvement populaire, il n’en est que l’illusion, ou plutôt le détournement.

Et c’est précisément pour cela que les gilets jaunes ne représentent en définitive rien de bon ; ils ne se sont pas organisés de manière démocratique et populaire. Leur attitude diffuse et vindicative est tout à fait conforme au fascisme.

Jean-Luc Mélenchon explique être fasciné par Eric Drouet, par sa « sage et totale détermination », alors qu’il est en fait précisément une expression de la vacuité des gilets jaunes.

Il avait marqué les esprits au mois de décembre pour avoir refusé de se rendre à une convocation du Premier Ministre à Matignon, précisément pour cette raison du caractère disparate, nébuleux, du mouvement. Rien n’y a fait pour autant, les gilets jaunes n’ont à aucun moment permis une organisation démocratique, il n’y a jamais eu de structuration ni d’expression élaborée.

Ils sont restés figés dans la posture hystérique historiquement insignifiante de gens se contentant de dire « non », « Macron démission ».

Il est nécessaire ici d’aller voir en détail la nature des nombreuses vidéos « selfie » diffusées en « live » sur Facebook par cet Eric Drouet. Disons-le franchement, le niveau est lamentable, il y est raconté tout et n’importe quoi, avec des commentaires à l’emporte pièce sur différents sujets qui ne sont pas étudiés, avec beaucoup de choses imprécises qui sont dites, voir même des contre-vérités.

Il s’agit là de gens qui débarquent, ne connaissent rien à la politique, en tant qu’actualité économique, culturelle et sociale du pays, refusent même tout étude de la politique, et s’imaginant pouvoir peser, juste parce qu’ils donnent leur avis et qu’à un moment donné il y a des milliers de personnes qui les écoutent.

Que Jean-Luc Mélenchon trouve cela fascinant, qu’il s’agisse pour lui de « la fin d’année politique la plus motivante de [sa] longue vie d’engagements » en dit long sur ce qu’il représente, sur son populisme.

Ce populisme qui est d’ailleurs tout à fait en phase avec la rhétorique nationaliste antisémite critiquant « l’argent roi » emprisonnant le pays :

« J’ai donc le cœur plein de gratitude pour ces gilets jaunes qui mènent avec tant de bon sens, tant de sang-froid, tant de constance, le combat pour libérer notre pays des chaînes de l’argent roi. »

Les gilets jaunes ne représentent rien d’historique en eux-mêmes, ils ne sont qu’un sous-produit, un soubresaut populiste annonçant l’avancée terrible du fascisme dans la France en crise du XXIe siècle.

Et Jean-Luc Mélenchon converge avec ce phénomène.

Catégories
Politique

L’effondrement des gilets jaunes mène au Fascisme

Comme cela était prévu, le mouvement des gilets jaunes s’effiloche toujours plus. De par sa nature sociale, il s’éteint, les « classes moyennes » étant incapables de porter quoi ce soit de positif par elle-même. Et forcément, ce n’est pas beau à voir : on a droit à des scènes littéralement baroques de grossièreté, de stupidité et d’arriérations intellectuelles.

Depuis la « quenelle » de Dieudonné entonnée sur les marches de la butte Montmartre à Paris au pantin représentant Emmanuel Macron dont la tête a été coupé à la hache par un « bourreau » à Angoulême, en passant par les violences stériles contre les policiers, on est dans le simplisme et la farce.

C’est un véritable cinéma qui prend fin, et il faut bien voir également qu’il y aura eu peu d’acteurs. 40 000 personnes mobilisées hier, c’est peu, et même si l’on prend le pic, avec un peu moins de 300 000 personnes le 17 novembre, c’est tout à fait comparable à une mobilisation syndicale ayant un peu de succès.

Le succès des gilets jaunes s’explique par la conjonction des opérations coup de poing sous l’égide de la petite-bourgeoisie radicalisée, des médias, de franges populistes se lançant dans la mêlée, avec également l’appui d’une partie de la bourgeoisie elle-même.

Car les gilets jaunes, c’est comme le Fascisme : c’est social, mais cela ne critique pas le bourgeois, cela n’utilise pas le terme de capitalisme mais désigne comme ennemi seulement la « banque » et « l’oligarchie ». L’état d’esprit est patriotique, la vision du monde est complotiste, la démarche communautaire, le degré de conscience politique est à zéro avec une même haine de la politique et du principe de parti.

C’est un cadeau des dieux pour la bourgeoisie, trop heureuse d’avoir affaire à un tel type de révolte, à une sorte d’anti-lutte des classes. Et le contre-coup va être énorme. L’ultra-gauche s’imaginait que les gilets jaunes portaient la révolution, en réalité ceux-ci sont une expression de crise et ils vont être un vecteur historique du Fascisme.

La vague post-gilet jaune arrivant va être terrible, elle va ébranler les fondements culturels de la société française. Ce qui a été remué, ce qui a été transporté – et notamment la convergence ultra-gauche / extrême-droite – va nous exploser à la figure.
Bien entendu si on imagine que le Socialisme ce sont des gens qui protestent en cassant des vitrines, on peut continuer de rêver. Mais si on sait que le Socialisme c’est la rationalité, l’organisation, la classe ouvrière, une réflexion intellectuelle avec une exigence de haut niveau, alors on voit bien que les gilets jaunes, c’est l’anti-Socialisme.

Quand on connaît l’histoire de France, on ne peut que voir en les gilets jaunes les ombres de Bergson et Sorel, de Proudhon et des Croix de Feu. Cette ambiance de gens qui ont « vécu », dans une logique de rudesse et de vitalisme, de négation de la politique avec une vision du « peuple » comme au-delà des classes… relève du fascisme, au mieux du proto-fascisme.

Cette expérience historique des gilets jaunes va marquer les esprits et va générer une multitude de structures relevant de cet état d’esprit. Cela est valable pour avant l’émergence des gilets jaunes, car il s’agit d’une convergence historique de toute une couche sociale. Le parallèle entre l’émergence d’une ultra-gauche glorifiant la casse pour la casse ces dernières années et celle des gilets jaunes doit être constaté avec rigueur, en en tirant les conclusions qui en découlent.

Nous vivons l’agonie de la petite-bourgeoisie, et cette agonie s’exprime par le symbolisme de la révolution, pour une contre-révolution par en bas. Cela mène tout droit au Fascisme.

Catégories
Politique

Gilets jaunes et chemises noires

Quiconque s’est intéressé un tant soit peu aux mouvements élémentaires comme les chemises noires ou les SA ne peut pas manquer de voir chez les gilets jaunes des similarités très nettes. Si l’idéalisme manque, la dynamique reste la volonté de « restauration » communautaire, au-delà des classes sociales.

gilets jaunes

La victoire du Front populaire a malheureusement fait oublier l’importance dans les années 1930 en France du Fascisme comme mouvement élémentaire, avec surtout le Parti Social Français du colonel De La Rocque, issu des Croix de Feu. A cela s’ajoute la volonté des historiens des universités de masquer ce fascisme français, en prétendant qu’il n’a jamais existé…

Les Français voient les SA comme un mouvement de robots défilant au pas de l’oie, conformément à ce qu’est censé être l’esprit allemand, et ils voient les chemises noires comme une sorte de truc chaotique d’hurluberlus en chemise noire tapant dans tous les sens, en correspondance avec une sorte de caricature des Italiens. L’esprit français serait évidemment au-delà de telles choses primitives, le Français étant « cartésien » par principe et éloigné de tout extrémisme. N’a-t-on pas une franc-maçonnerie où discuter entre gens de gauche et de droite, de manière raisonnable ?

Si l’on sort de tels raccourcis et qu’on porte un regard en historien, c’est-à-dire qu’on regarde les faits et qu’on en généralise des concepts, on voit pourtant que les gilets jaunes ont, dans leur attitude et dans leur positionnement, un mode de fonctionnement très proche des chemises noires et des SA.

Le principe des chemises noires et des SA est en effet le suivant. Il faut exiger une remise à plat de la société, dans le bon sens. Il faut donc adopter un esprit d’unité totale, dans le sens de l’affirmation de l’intérêt de la communauté générale. Il ne s’agit pas de discuter ou d’élaborer des concepts, mais d’affirmer des slogans et une volonté commune. Pour cela, un symbole identitaire est adopté dans l’habillement.

Il n’y a pas d’assemblée générale, pas d’élections, pas de hiérarchie. Mais il y a des meneurs, des chefs, qui s’affirment « spontanément ». Cette non-hiérarchie hiérarchique se constitue « spontanément » en allant de plus en plus haut. Elle devient le point de repère d’un mouvement diffus à la base, où des gens vont, viennent, dans un turn-over relativement important, tout se maintenant uniquement par esprit affinitaire.

Là le Fascisme se distingue des gilets jaunes, car le premier a un idéalisme que le second n’a pas, ou pas encore. Le Fascisme propose une mobilisation pour affirmer une forme de restitution d’un idéal qui aurait été volé. Les gilets jaunes n’en sont pas loin, mais ils sont surtout dans une nostalgie des décennies précédentes, avec leur stabilité. Malgré tout le misérabilisme qu’on entend ici ou là, voire partout, la France n’est pas du tout l’Italie des années 1920 ni l’Allemagne des années 1930.

Un argument contre cette manière de voir les choses pourrait constituer à dire que les gilets jaunes n’ont pas choisi de camp et qu’on peut encore les pousser dans telle ou telle direction, alors que les fascistes sont par définition des ennemis de la Gauche. C’est là une grossière erreur. Toute l’autocritique des antifascistes italiens et allemands a justement consisté à dire qu’il aurait fallu chercher à faire décrocher la base fasciste du Fascisme.

Non pas qu’il n’y ait pas eu de tentatives en ce sens, par ailleurs : on doit imaginer le courage de ces communistes venant dans les meetings nazis pour apporter la contradiction. Ces gens-là sont des héros. Il fallait un cran terrible pour aller dans un meeting avec des centaines de personnes a priori fondamentalement hostiles, pour trouver la force de trouver des failles dans la démagogie fasciste, pour prendre alors la parole et taper là où ça fait mal, afin de retourner l’opinion.

Il y a de nombreux autres exemples d’une approche similaire justement après la défaite, comme « la lettre aux chemises noires » du Parti Communiste italien, visant à démolir les certitudes fascistes. Le Parti Communiste français a fait quelque chose d’équivalent d’ailleurs (« Nous te tendons la main… »).

Dans un même ordre d’idées, après la défaite, il a fallu également mettre son ego de côté et assumer d’infiltrer les organisations fascistes de masse, les organisations para-syndicales, pour miner le régime de l’intérieur, pour toucher un maximum de gens et les pousser dans le bon sens. Un travail harassant et horrible : être de Gauche et devoir s’habiller en fasciste, faire semblant de l’être… C’est dégradant, et pourtant…

Par conséquent, considérer que les gilets jaunes présentent des similarités très fortes avec le fascisme ne signifie pas le rejeter de manière unilatérale. Cependant, cela veut dire ne pas croire qu’il suffit d’y participer ou de le fréquenter pour l’appréhender de manière adéquate.

Catégories
Politique

Un discours d’Emmanuel Macron qui converge avec la montée du refus de la démocratie

Emmanuel Macron n’a pas compris le sens des gilets jaunes et propose des mesures sociales, accompagnées de propositions pour renouveler la gestion de l’État. C’est une démolition par en haut des principes démocratiques, les gilets jaunes agissant par en bas pour les détruire également. Cela forme un boulevard pour la démagogie fasciste.

 

Le discours « à la nation » d’Emmanuel Macron en réponse au mouvement des gilets jaunes a été d’une faiblesse ahurissante. On a immédiatement vu le fossé qui sépare quelqu’un comme lui, ou Nicolas Sarkozy, François Hollande, des véritables ténors politiques du passé comme François Mitterrand, Georges Pompidou ou Valéry Giscard d’Estaing.

Ses mesures sont de véritables recettes de cuisine sociale, consistant en des annonces censées étouffer les motivations sociales (annulation de la CSG pour les retraités gagnant moins de 2000 euros par mois, suppression des impôts et charges pour les heures supplémentaires dès 2019, augmentation du Smic de 100 euros par mois en 2019).

Il passe complètement à côté de la nature de la révolte des gilets jaunes, dont le noyau dur consiste en une petite-bourgeoisie prise de rage par les déséquilibres du capitalisme. Ce qu’elle veut ne peut pas être défini, conceptualisé, et donc a fortiori on ne peut y répondre autrement que par l’apparence de modifications du régime lui-même, au minimum.

Tout va donc encore plus rapidement qu’on ne pouvait le craindre. Emmanuel Macron a asphyxié Marine Le Pen lors de l’élection Présidentielle, ce qui était autant de temps de gagné, mais là on se retrouve déjà dans la période d’après, où son positionnement libéral se confronte à une immense secousse populiste.

Il est évident que c’est là non seulement le résultat d’une question française, mais aussi le produit de toute une situation internationale marquée par le Brexit, la victoire de Donald Trump et de Jair Bolsonaro, l’arrivée de l’extrême-droite au gouvernement en Autriche et en Italie, la montée de l’AFD en Allemagne, la poussée expansionniste de la Russie et son soutien aux courants ultra-nationalistes en Europe occidentale.

La machine capitaliste s’emballe et la Gauche est inexistante pour mobiliser et encadrer. Pire encore, la révolte se développe désormais de manière populiste, de manière soi-disant apolitique, donc nécessairement portée par des populistes, des cadres d’extrême-droite, des gens qui récusent le débat intellectuel et les questions démocratiques et ne raisonnent qu’en termes de référendum, de corporatisme « par en bas ».

C’est l’effondrement de la démocratie « à l’ancienne » et il y a désormais convergence avec ce qu’Emmanuel Macron représente justement : une « modernisation » servant de tremplin à la liquidation de la démocratie « à l’ancienne ».

Dans son discours, Emmanuel Macron a d’ailleurs souligné l’importance que des gens sans-partis soient présents dans les débats, que l’État cesse sa gestion « trop centralisée » car « depuis Paris », etc. C’est une contribution directe à la tendance à la négation de la démocratie comme principe général.

Il ne s’agit pas de dire qu’auparavant on était en démocratie, mais qu’il y avait au moins l’apparence de l’exigence de celle-ci. Là on est dans sa liquidation, par en bas et par en haut. Les couches supérieures de la société sont dans une gestion technocratique et avec les gilets jaune on a le vecteur direct des exigences du fascisme comme mouvement romantique en bas.

Comment dans un tel contexte la Gauche peut-elle exiger la raison, la réflexion, des principes, une discipline de parti autour d’un programme ? Il va de soi que cela va demander un vrai travail de fond, de la part des gens conscients que le mouvement ouvrier est social et démocrate, que le socialisme qu’on doit exiger s’appuie sur une forme d’organisation rationnelle, réfléchie, avec des principes bien déterminés.

Quiconque fantasme sur les gilets jaunes doit bien voir qu’en quatre semaines, il n’est jamais allé dans le sens des grèves, des assemblée générales, de la formation de conseils populaires. C’est pourtant le critère de base pour juger la nature démocratique, au sens révolutionnaire, d’un mouvement.

Il faut bien être conscient qu’en n’étant pas capable de canaliser les gilets jaunes comme révolte des « classes moyennes », Emmanuel Macron et le régime laissent le champ libre au fascisme comme mouvement romantique par en bas.

Catégories
Politique

Marion Maréchal, la réaffirmation politico-culturelle du conservatisme de Droite

L’ultralibéralisme et la décadence sur le plan des valeurs dans lesquels baigne la France produisent nécessairement leur pendant : le conservatisme ultra. Marion Maréchal est assurément la figure de ce conservatisme, qu’elle entend régénérer politiquement et culturellement, en réaffirmant la Droite. Elle considère dans cet optique le mouvement des gilets jaunes comme la possibilité d’un « grand mouvement conservateur ».

Marion Maréchal Le Pen

Marine Le Pen aurait commenté récemment, a priori sur le ton de la boutade, que sa nièce devrait prendre la direction du parti de la Droite Les Républicains, parce que sa ligne serait celle de la droite de Laurent Wauquiez, le chef du parti.

Cela n’a rien d’absurde, tellement une partie de la Droite est de plus en plus proche du Rassemblement National tandis qu’une autre se situe dans l’orbite d’Emmanuel Macron, du libéralisme de l’Union-Européenne, et donc finalement surtout du modernisme centriste.

Cette Droite qui s’oriente vers le Rassemblement National est justement celle qui soutien et voit d’un bon oeil le mouvement des gilets jaunes. Il est donc tout à fait logique que depuis le début, Marion Maréchal soutienne « l’énervement général » porté par les gilets jaunes et qu’elle n’avait pas hésiter à se rendre à la manifestation des Champs-Élysées le 24 novembre. C’est un moyen pour elle d’exprimer politiquement et culturellement son affirmation de la Droite.

Le grand projet de Marion Maréchal est son école de science politique, l’ISSEP, qui se veut précisément une École de droite, en opposition aux Écoles classiques françaises qu’elle considère de gauche.

Sa récente intervention sur le thème « Quel avenir pour les Droites ? » lors du lancement du Cercle AUDACE était de cet acabit. L’ambition de ce réseau est de permettre une alliance des courants de la Droite avec un horizon plus ou moins affirmé des prochaines élections municipales.

Le propos de Marion Maréchal n’était pas politique dans le sens électoral, mais politico-culturel. La question du conservatisme y était centrale. Il s’agit pour elle d’expliquer que le souverainisme, ce que nous appelons le nationalisme, n’est pas suffisant. Elle a compris qu’il faut surtout des valeurs, une vision du monde, pour mobiliser la société.

Elle a donc surtout parlé d’« ordre social » contre « le relativisme ambiant », de marchandisation de la filiation en dénonçant la « pratique abominable » de la GPA ou encore d’islamisation.

Il y a en arrière-plan de cela une critique de la ligne de sa tante qui avaient fait du FN avec Florian Philippot un parti focalisant sur des thèmes économiques et sociaux, s’adressant majoritairement aux classes populaires, débauchant des syndicalistes, tendant à brouiller le clivage Droite/Gauche.

Elle a dénoncé, de manière très complexe et intelligente, les limites du populisme, qu’elle considère de manière bienveillante en tant qu’opposition au libéralisme, mais insuffisant en tant que cela porte un style plébéien. Le problème selon elle est de viser les élites de manière unilatérale, alors qu’il faudrait plutôt reformer ces élites, ce qu’elle envisage avec l’ISSEP.

Devant un public composé surtout de « chefs d’entreprise, industriels, entrepreneurs ou financiers âgés de 25 à 70 ans » comme l’a rapporté le journal de la Droite Le Figaro, elle a donné l’exemple la Ligue italienne qui a su rassembler une partie de la base industrielle du Nord du pays. Elle a expliqué de manière tout à fait typique à Droite qu’un projet de justice pour les classes populaires n’était pas incompatible avec les classes moyennes et la bourgeoisie.

Il faut bien-sûr considérer ici les choses électoralement, avec cette question du « plafond de verre » que le FN n’a jamais réussi à dépasser, qui pourrait voler en éclat en cas d’alliance avec la Droite.

Mais l’arrière-plan de cette alliance qu’elle souhaite est surtout culturel. C’est pour cela qu’elle verrait d’un bon œil la tête d’affiche aux élections européennes de l’adjoint au maire de Versailles François-Xavier Bellamy pour Les Républicains. Celui-ci s’était affirmé sur le plan des valeurs en tant que meneur du mouvement des Veilleurs, issu de la Manif pour tous.

Pour l’ancienne plus jeune députée de la Ve République, ces valeurs s’incarnent dans le refus de la « fascination pour le progrès » des élites qui s’oppose à « l’héritage ». C’est la définition de son conservatisme, qui s’oppose également à l’« universalisme » des élites, qui est en fait surtout un cosmopolitisme à lequel elle oppose « le particulier et le local ».

Sa proposition est donc le repli sur soi, selon cette considération que « le passé est toujours plus inoffensif que l’avenir ». Dans cette optique, la pensée des Lumières, qui est un matérialisme, une expression progressiste, est critiquée ouvertement, ce qui est typique et caractéristique du fascisme dans son essence idéologique.

Le conservatisme qu’elle défend se pose comme défenseur de la civilisation face à la décadence du capitalisme, mais il ne s’oppose aucunement au capitalisme.

La question du capitalisme est considéré comme secondaire, relative, parce qu’il suffirait de le soumettre au projet politico-culturel du conservatisme. Il s’agit pour elle d’abord d’une « disposition à penser et agir d’une certaine manière », qui ensuite doit se transformer en mouvement politique.

On aura compris bien-sûr a quel point cela fait écho à la démarche des gilets jaunes, dont elle est une des expressions intellectuelles. La question est celle de l’alternative, pour faire face au désenchantement que génère la crise du capitalisme.

Et c’est là que le clivage entre la Gauche et la Droite s’affirme, ou en tous cas devrait s’affirmer de plus en plus pour savoir qui porte la civilisation. Sont-ce les conservateurs ou les progressistes ? Faut-il la Nation ou le Socialisme ? Qui doit diriger, la bourgeoisie ou la classe ouvrière ? Tels sont les grandes questions de notre époque, qui nous opposent frontalement et directement à cette figure qu’est Marion Maréchal.

Catégories
Politique

La filiation des gilets jaunes avec l’antiparlementarisme

Quand on regarde de près le mouvement des gilets jaunes, il y a des paradoxes qui sautent aux yeux. Le mouvement avance sur terrain éminemment politique mais se déclare en dehors des clivages politiques. Il refuse toute forme de représentation intermédiaire mais est pourtant dirigé par les couches sociales intermédiaires, les fameuses « classes moyennes ». Il s’affirme pour la révolution mais est enfermé dans les limites du mode de vie actuel.

Cette expression paradoxale des gilets jaunes tient à sa nature sociale et idéologique dans un contexte historique particulier. Toute personne de gauche sait bien que lors des périodes tumultueuses comme la nôtre, ce qu’il est convenu de nommer « fascisme » est toujours en embuscade pour parasiter toute expression autonome des luttes de classe.

En tant que projet de « Révolution nationale », le fascisme en France comporte plusieurs dynamiques idéologiques. De part son expérience historique, on retient souvent le racisme, l’antisémitisme ou l’exaltation nationaliste. On oublie pourtant un autre aspect central du fascisme, qui lui a d’ailleurs permis d’acquérir une dimension populaire de masse : l’antiparlementarisme.

Que ce soit le boulangisme, les ligues factieuses ou bien le poujadisme, tous ces mouvements d’extrême-droite ont développé une rhétorique et une vision du monde antiparlementaire. Le parlement serait ainsi la cause de tous les maux sociaux, avec ses députés qui se « gavent » sur le « dos du peuple » et s’égosillent dans des débats interminables et bien trop détachés de la vie concrète. Cet antiparlementarisme tient à la nature démagogique de mouvements dont les porte-paroles sont souvent issus des secteurs économiques de la petite-bourgeoisie des zones populaires.

Effrayée par le « déclassement », c’est-à-dire la prolétarisation, et donc relativement attirée par la condition de vie bourgeoise, la petite-bourgeoisie de ces zones développe une idéologie conforme à sa condition sociale. C’est une « idéologie anti-idéologie » qui refuse tout positionnement stable. L’idéologie intermédiaire est donc orientée contre toute forme de représentation et la source du malheur n’est pas la bourgeoisie propriétaire des moyens de production, mais le Parlement, les élus, les « voleurs » contre lesquels il faut opposer le peuple avec son « bon sens » et son « honnêteté ».

En ce sens, il est peu étonnant de voir circuler dans les groupes Facebook de gilets jaunes une vidéo de TV Libertés (média d’extrême droite) qui valorise la réussite individuelle dans l’entrepreneuriat contre la réussite scolaire avec le diplôme (symbole du parvenu politicien, du « politichien »). C’est typiquement l’idéologie de l’ancien ouvrier devenu petit indépendant : le pays contre la « farce politicienne », celui qui produit concrètement contre les agitateurs d’idées en dehors de la vie « réelle ».

Lorsqu’on voit la nature des gilets jaunes, on ne peut que penser à cette filiation avec ce courant particulier du fascisme. Largement dirigé par des auto-entrepreneurs et des artisans, les gilets jaunes s’inscrivent dans cette continuité antiparlementaire, à la suite du boulangisme, des ligues factieuses et du poujadisme. Il est d’ailleurs peu étonnant que c’est surtout dans les zones périurbaines et rurales que le mouvement puise sa force puisque c’est là que cette couche sociale intermédiaire, au plus proche du quotidien ouvrier, peut générer un mouvement populaire massif ; son ancrage dans les grandes villes la rapprochant bien trop de la bourgeoisie en tant que telle.

À  ce titre, Pierre Poujade était lui-même un petit libraire issu d’une petite ville du Lot, Saint-Ceré. De la même manière que les gilets jaunes, il proclamait déjà la « défaillance » du parlement et la convocation d’ « États généraux », vu comme une nouvelle forme républicaine. Le journal poujadiste Fraternité française disait « lorsque la patrie est en danger… il n’y a plus de politique, il ne doit rester que des citoyens » et demandait ainsi de baisser le nombre de députés, de supprimer l’indemnité parlementaire, de sanctionner sévèrement l’abstention, etc.

Le problème est que les gilets jaunes se heurtent à leur propre paradoxe, celui de l’organisation cohérente de leurs revendications et de leur représentation, comme le prouve les débats houleux sur les représentants à choisir. En ce sens, la composition ouvrière des gilets jaunes en dit long sur l’incapacité de la classe ouvrière à imposer une idéologie stable et conforme à ses intérêts de classe.

Si les gilets jaunes étaient sous hégémonie de la Gauche ouvrière, avec toute l’héritage historique qu’il comporte, il n’y aurait pas la diffusion d’un antiparlementarisme stérile. Il y aurait le développement d’une dynamique organisée autour de la formation de comités populaires qui éliraient de manière démocratique des délégués révocables. Car la Gauche, dans ses traditions socialistes et communistes, a toujours été claire : l’action parlementaire, légale, doit exister mais être subordonnée à l’agitation extra-parlementaire, extra-légale.

C’est là la grande différence entre un mouvement populaire extraparlementaire et un mouvement populiste antiparlementaire, l’un n’étant que le miroir négatif de l’autre. C’est le prix à payer pour toute une Gauche qui a renoncé à son héritage tout autant qu’à une extrême-gauche qui s’est enfermée dans l’anarchisme velléitaire.