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Faire le contraire de « Révolution permanente »

Tel un miroir.

« Révolution permanente » est un média qui a réussi à s’implanter dans le paysage politique français, d’une manière très concrète. Or, quand on regarde, on ne peut qu’être atterré. Les propos tenus sont démagogiques, le niveau intellectuel est minable, culturellement c’est un désastre.

C’est la contestation de gens dont l’horizon ne dépasse pas Instagram, Twitter, Tik Tok et les youtubeurs. Et c’est justement pour ça que ça marche.

Au lieu de former les gens, d’élever leur niveau, « Révolution permanente » fait comme toute la « gauche de la gauche ». Il est dit aux gens qu’ils ont raison, qu’il faut s’unir, et tout le monde fait plus ou moins n’importe quoi, avec auto-satisfaction.

C’est là où c’est intéressant pour savoir quoi ne pas faire, et ainsi quoi faire. Si on regarde « Révolution permanente » désormais, on voit que ce média a littéralement la forme d’agauche.org, mais en ayant « réussi ». Réussi évidemment à travers la démagogie et le populisme.

Mais donc si agauche.org avait réussi, cela ressemblerait à Révolution permanente… L’horreur !

Si l’on voit cette image de « Révolution permanente », on se dit qu’agauche.org aurait dû être pareil avec des compte-rendus de l’opposition pratique à la guerre, d’actions en défense des animaux, d’initiatives de groupes organisés sur la base de la Gauche historique.

Or, c’était impossible. L’époque était trop vide pour ça. Le fait le plus flagrant est que la guerre en Ukraine a été annoncée plus de six mois à l’avance, et que personne n’en a rien eu à faire. L’époque est ce qu’elle est…

Il faut donc changer le fusil d’épaule, et qu’agauche.org s’adapte à la nouvelle séquence, car nouvelle séquence il y a. La défaite du mouvement de lutte contre la réforme des retraites marque la mort de toute cette vieille « gauche » devenue désormais populiste, post-moderne, ou restant syndicaliste à l’ancienne dans une époque ayant totalement changée.

Par mort, il ne faut pas comprendre que cette « post-gauche » va disparaître. Bien au contraire : c’est un phénomène de décomposition.

Et si agauche.org reste tel quel, on va nous prendre pour des « rageux » vivant à l’ombre de ces gens !

Alors qu’en réalité, la critique était nécessaire pour bien s’en distinguer. Maintenant, tout cette séquence est terminée, et elle a été longue, si longue !

On peut désormais passer à la proposition positive. C’est cela que notre média va mettre en place. Nous ne suivrons plus à la trace les événements pour expliquer les tendances et les erreurs. Nous exprimerons désormais dans chaque article quelque chose d’intéressant et qui pourra être directement utile à la conscience, à la pratique.

Il y a déjà eu des éléments en ce sens. Mais ils ne seront plus noyés dans la masse du « suivi » du quotidien. Nous allons essayer, désormais, d’exprimer la face positive, constructive, du projet socialiste de civilisation. Brique par brique, chacune s’associant aux autres pour construire des escaliers sur des escaliers, faisant franchir des paliers à la conscience.

L’avenir nous appelle, il faut lui répondre, et l’annoncer au présent, sans se laisser happer par le vieux monde !

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La décomposition du mouvement contre la réforme des retraites

Inévitable, elle est triste et sordide.

Nous avions dit le départ que le mouvement contre la réforme des retraites était d’une nature petite-bourgeoise, menant à l’échec. Il fallait être étudiant ou d’esprit syndicaliste pour s’imaginer que, sans culture, ni politique, on puisse arriver à quelque chose.

Un mouvement qui exprime le seul souhait de vivre comme avant, à l’instar des gilets jaunes, n’a pas de place dans l’Histoire. Il n’exprime qu’une décomposition : celle de la société occidentale et de ses acquis.

Alors que se profile une énième journée de mobilisation, déjà se profile l’amertume, le constat d’échec. Anasse Kazib, figure de « Révolution permanente », un mouvement surtout étudiant ayant été aux premières loges de ce lamentable cinéma, constate lui-même le 29 mars 2023 que tout est mal barré.

Naturellement ce constat est fait sur un réseau social, Twitter en l’occurrence, en phase avec la « post-modernité ».

Et il le fait en confondant mouvement social d’un pays riche et luttes des classes, en pleurnichant que l’intersyndicale serait ce qu’elle est, que la grève ce n’est pas évident, etc.

Il ne comprend pas que ni lui, ni les grévistes ne sont à la hauteur de rien. On improvise pas un mouvement de masse affrontant une décision gouvernementale de politique. Il faut du niveau !

Comme là il n’y a rien, il est cherché des boucs émissaires.

« Nous avons tous vu les deux temporalités du mouvement, celle du 19 janvier au 15 mars, des journées certes avec beaucoup de monde, mais avec une radicalité qui ne s’est pas exprimée, notamment du fait du contrôle par l’intersyndicale.

Et depuis le 49.3 nous sommes entrés dans une nouvelle séquence, du moment « Berger » au moment « pré-révolutionnaire ». Malgré la distance qu’à pris l’IS, par son silence médiatique ou encore sa condamnation des violences des manifestants. Le 23 mars a été le pic de la mob.

La journée du 28 mars même si elle a était plus faible, reste dans des niveaux de mobilisation important surtout avec 4 jours d’écart. Cela s’explique pour moi par le rythme en dent de scie, des dynamiques plus faibles de grève à cause de l’isolement des journées.

Néanmoins les cortèges restent très important et nous avons vu l’arrivée massive de la jeunesse depuis 1 semaine qui fait prendre un tout autre visage à la contestation, bien plus qu’une lutte contre une simple réforme des retraites, mais un caractère éminemment politique.

Tout cela témoigne du fait que ce n’est pas l’intersyndicale qui met le monde dans la rue, mais c’est parce qu’il y’a du monde en colère, une opposition massive que l’intersyndicale est contrainte d’appeler encore a des journées.

L’unité est de façade entre les syndicats plus combatifs et les syndicats de collaborations de classe. Ils sont uni car aucun n’aurait pu soutenir la réforme comme Berger l’a fait en 2019 avec la réforme Delevoye. Surtout quand des deputés RN et LR sont contre.

Imaginez vous le syndicat qui aurait osé soutenir la réforme et ne pas appeler à la grève alors que 94% des actifs sont opposés. Cela aurait été du suicide. Berger est contraint par la rue de suivre, mais aussi car il est fasse à un macronisme radicalisé.

La 2eme séquence que l’on connait est le résultat du passage au force mais également d’une forme de maturité du mouvement à comprendre que la passivité ne marché pas. Le fameux 7 mars « France à l’arrêt » était déjà une réponse de l’IS à la colére qui montait du terrain.

Mais à aucun moment l’IS n’a cherché à gagner le mouvement, elle a cherché à le contrôler et en tirer sa plus value pour espérer retrouver une place dans le système institutionnel. Ils n’ont pas arrêté d’envoyer des signaux d’affaiblissement alors que le mouvement est explosif.

Nous avons eu le droit à plein de parade, « attention on tiendra plus les troupes », la lettre à Macron, l’interpellation des députés, le refus de l’appel à la reconductible, le refus d’elargir les mots d’ordre à la question des salaires etc…

Depuis la deuxième phase du mouvement qui combine entré de la jeunesse, manif sauvage, blocage, action, grève reconductible, l’IS cherche à faire des pauses ou encore la parade de la médiation, afin de voir comment sortir de ce mouvement sans perdre des plumes.

Ils savent pertinemment que ce qui se joue aujourd’hui, fait entrer la France dans une crise profonde du régime, la possibilité réelle d’une généralisation de la grève et d’entrée dans une séquence révolutionnaire. C’est le mouvement le plus subversif depuis des décennies.

Berger et Martinez l’on dit, ils ne font pas de politique ( ce sont bien les seuls à le penser ), ils sont la pour parler des gobelets qui manque à la machine à café et aujourd’hui ce n’est plus le cas du mouvement, alors ils veulent tailler la route.

Mais comment faire ? Comment se casser sans voir son syndicat exploser et se faire déborder par la base. Vous aurez remarqué déjà que Martinez et Berger ne mettent plus leur tête dans l’IS depuis le 49.3. Avant ils etaient la à tous les communiqués…

Maintenant ils envoient les remplaçants que personne ne connait. Ils n’interviennent que très rarement dans les médias, sinon pour envoyer des appels de phare à Macron et dénoncer les manifestants. Pas une présence sur un piquet depuis 2 mois, ni même face aux réquisitions.

La méthode est d’éloigner la prochaine date, pour casser définitivement les grèves reconductibles, c’est ce qui est en train de se passer malheureusement dans certains secteurs si nous n’agissons pas. Je vous donne un exemple concret.

Avec mes collègues nous sommes en grève depuis le 7 mars, soit 23 jours au total, attendre le 6 avril cela veut dire de faire 9 jours de grève reconductible supplémentaire. Vous imaginez 9 jours seul avant la prochaine date interpro… C’est criminel quand on connait le terrain.

Alors moi et les militants nous tiendrons, mais comment faire tenir des salariés de base, 9j de plus avec des payes à 0 pour attendre 1 journée interpro sans savoir encore quand sera la prochaine, ptete le 16 avril etc… Comment faire tenir ?

Il y’a pas 36 solutions, la plus part vont reprendre car plus d’argent, d’autre grâce à leur caisse de grève maintiendront un peu les choses. Mais au final cela fait que pendant 10j, les grèves vont s’affaiblir et la dynamique va diminuer si nous ne faisons rien.

De plus le congrès de la CGT qui enlève des centaines de dirigeants syndicaux, de militants de terrain, empêche aussi la possibilité d’intervenir dans cette séquence, de discuter avec la base.Comment tenir un mouvement si les militants sont en train de débattre dans un congrès?

Voilà comment casser une dynamique à bon prix, d’un côté vous apparaissez toujours dans le coup en appelant à une date de grève, mais de l’autre vous l’a mettez assez loin pour que la dynamique se casse et que cela apparaissent comme un baroud d’honneur.

11 journées isolées qui si elles avaient été collé aurait changé le caractère des choses. Même 5j aurait eu plus d’efficacité. Mais l’IS a dit nous ne sommes pas pour le blocage de l’économie car Berger l’a dicté. De plus ils ont fragilisé l’auto-organisation à la base.

Avec l’attente des appels le soir de la manif interpro, ils ont vidé de leur sens les assemblées générale pour la reconduction. Comment discuter d’un plan de bataille en AG le matin, si vous devez attendre le soir quelle sera la prochaine date ?

Voila pourquoi aujourd’hui personne ne doit taire ce qu’il se passe, l’IS joue définitivement contre le mouvement et il faut le dénoncer HAUT et FORT, sinon toutes ces journées ces sacrifices financier n’auront servi à rien. La situation est GRAVE !!! »

La candeur de ce propos est quasi surprenante. On voit vraiment qu’on a affaire à des gens découvrant le monde. On est totalement en dehors de la moindre connaissance historique – et le type se prétend « marxiste ».

C’est comme chez les étudiants, c’est vide de contenu. C’est grotesque, baroque. Il n’y a plus aucun lien, sur aucun plan, avec le mouvement ouvrier historique.

Cette pancarte lamentable se veut même humoristique car reprenant la forme d’un « meme » d’extrême-Droite – une récupération typique chez des gens n’ayant rien à dire

La vérité, c’est que dans ce mouvement contre la réforme des retraites, il y a eu ceux qui ont menti en disant que ce serait simple, ceux qui se sont mentis à eux-mêmes en se disant que ce serait simple.

Sauf que rien n’est simple. Et pour comprendre les choses, il faut étudier Le capital de Marx, pas traîner sur les réseaux sociaux. Il faut organiser les gens avec comme critère le niveau de conscience, et pas pratiquer le spontanéisme des mouvements sociaux d’un pays parmi les plus riches du monde.

Et encore moins alors qu’on est dans le contexte de la 3e guerre mondiale s’érigeant en aspect principal dans tous les domaines.

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Un an de conflit en Ukraine : la Gauche surtout silencieuse et complice

Le bilan est très mauvais.

Elle est belle la « Gauche » française, ou plutôt cette variété française de « Démocrates » à l’américaine. Un an de conflit en Ukraine et même là, elle ne trouve rien à dire, ou alors… surtout pour soutenir l’OTAN. On en est là..

Et encore parle-t-on là de ceux qui font de la politique. Pour d’autres, c’est déjà trop. Les manifestations de la CGT et une vague agitation étudiante leur suffit. Ils ne sont même pas en mesure de comprendre que le premier anniversaire d’un tel conflit interpelle nécessairement les gens. Que c’est faire de la politique, la plus élémentaire même, que de donner sa vision du monde, de montrer qu’elle permet d’éclairer les faits, de dégager des tendances, de tracer des perspectives.

Faisons un petit bilan de ces « politiques » et « antipolitiques » au sujet du triste anniversaire de la première année de conflit militaire en Ukraine.

Les politiques

Fabien Roussel, secrétaire national du PCF, député du Nord, a régulièrement soutenu le régime ukrainien, tout en dénonçant le risque d’engrenage. C’est une position intenable, mais qui permettait de sauver la chèvre et le chou. D’un côté le PCF est aligné sur le régime pro-Ukraine au niveau de ses élus, de l’autre il prône la paix pour satisfaire sa base.

Le document « Ukraine : Agir pour la Paix, en priorité » est en ce sens. Fabien Roussel dénonce la Russie, appelle le gouvernement français à devenir l’organisateur de la paix et égratigne l’OTAN. Ce n’est pas cohérent, mais c’est bien amené, ça passe politiquement.

Le Nouveau Parti Anticapitaliste appelle à soutenir la « résistance ukrainienne », sans prendre en compte la nature du gouvernement ukrainien. Tout est de la faute de la Russie et il faut soutenir les opposants là-bas (Assez de la guerre de Poutine ! Troupes russes hors d’Ukraine ! Solidarité avec la résistance ukrainienne !). Cela revient à être un appendice de l’OTAN, mais ça tient debout, c’est cohérent politiquement (si l’on adopte la ligne du NPA).

Lutte Ouvrière a pris position dans son éditorial des bulletins d’entreprise. Son mot d’ordre est Aucun soutien à leur sale guerre ! et l’opposition à la guerre. Lutte Ouvrière est montée en gamme depuis quelques semaines dans sa dénonciation de la guerre, reflétant le fait que pour les travailleurs, la menace d’une 3e guerre mondiale interpelle. Citons le bulletin :

« Les travailleurs n’ont à se ranger ni dans un camp, ni dans un autre. La seule porte de sortie qui puisse garantir que le conflit prenne fin et ne recommence pas demain, c’est que les travailleurs refusent de servir de chair à canon et se retournent contre leurs propres dirigeants.

Sans les travailleurs, rien ne peut se produire. Rien ne peut s’échanger, rien ne peut fonctionner. Même pour faire la guerre, produire les armes et les acheminer, les gouvernements ont besoin de nous. Sans notre consentement, il n’y a pas de guerre possible.

Alors, préparons-nous à refuser l’union sacrée derrière Biden et Macron. Reprenons le mot d’ordre de Marx : prolétaires de tous les pays, unissons-nous contre la classe capitaliste qui nous exploite. Unissons-nous contre ses politiciens qui dressent les peuples les uns contre les autres et nous mènent à la guerre ! »

Le PCF(mlm) considère quant à lui qu’on est déjà dans le processus de 3e guerre mondiale. Celle-ci est le fruit pourri de la crise générale du capitalisme commencé en 2020 et les choses vont empirer en raison de la contradiction américano-chinoise. On est dans le repartage du monde et l’ennemi est avant tout dans son propre pays (Un an de conflit armé en Ukraine: faire face à la guerre de repartage du monde, à l’exemple de Rosa Luxembourg).

Citons le document :

« Quel est le point de vue à l’arrière-plan de toutes les initiatives concernant l’Ukraine ?

Ce pays devrait devenir une base industrielle pour le capital financier occidental, en profitant des ressources d’une Russie démantelée en de multiples petits États et payant des sommes colossales de « réparations ».

Une Ukraine vassalisée, une Russie colonisée, tel est le plan des impérialistes occidentaux, superpuissance impérialiste américaine en tête !

Tel est leur souhait, afin de relancer le capitalisme ! »

Révolution permanente a également pris position, ne ratant pas une telle occasion politique, bien que normalement il n’est jamais parlé du conflit militaire en Ukraine. Comme traditionnellement dans ce courant politique, l’article est prétexte à une analyse « géopolitique » où les tendances sont évaluées. Ce qui donne par exemple :

« Les scénarios sont multiples et nous ne pouvons pas tous les évoquer ici. Cependant, tout semble indiquer qu’une ouverture rapide de négociations et la fin des combats n’est pas la perspective la plus probable.

Les pronostics les plus optimistes estiment que ces négociations ne pourraient commencer que d’ici quelques mois, c’est-à-dire après une éventuelle offensive russe et une probable contre-offensive ukrainienne. Autrement dit, les populations locales vont encore endurer beaucoup de souffrances avant que la guerre s’arrête, même selon les plus optimistes. »

Cette position concerne de toutes façons seulement l’Ukraine et la Russie et il n’est pas considéré dans le document que tout cela ait une incidence politique en France (Ukraine. A un an du début d’une guerre réactionnaire).

On a enfin le Parti socialiste, dont la ligne est ouvertement favorable au régime ukrainien et à l’OTAN. Il faudrait d’ailleurs un soutien total, indéfectible comme le dit la déclaration.

Les anti-politiques

Il y a, à rebours des « politiques », les anti-politiques. Eux veulent de l’agitation et rien d’autre. Les positionnements ne les intéressent pas : ils sont une variété pseudo-politique du syndicalisme. Ils ne parlent strictement jamais du conflit militaire en Ukraine et ils ne voient même pas pourquoi il faudrait en parler.

La France insoumise s’est ainsi contentée d’un communiqué de presse de quelques lignes signé par ses parlementaires, pour demander le soutien au régime ukrainien mais également d’aller dans le sens d’une solution négociée. Pas un mot sur l’OTAN, naturellement. Jean-Luc Mélenchon ne dit quant à lui rien du tout sur son blog, lui pourtant si bavard au sujet de tout.

Les anarchistes conservent pareillement le silence. Rien chez l’Union Communiste Libertaire, rien chez la Fédération anarchiste, rien chez Contre-attaque (ex-Nantes révoltée), rien chez la CNT, rien chez la CNT-SO, rien chez la CNT-AIT, rien chez l’OCL.

C’est tout de même notable, car il existe en France une tradition anti-militariste. Il faut croire qu’elle s’est évaporée et que l’armée française peut soutenir le régime ukrainien autant qu’il l’entend.

Du côté « marxiste-léniniste » ou pseudo-maoïste version étudiant, on ne trouve rien non plus. Ils ne parlent jamais de la guerre, ils ne vont pas s’y mettre même à l’occasion d’une année de conflit d’une telle importance. C’est « politique » et ça ne les intéresse pas.

Le Parti Communiste des Ouvriers de France, le Parti Communiste Révolutionnaire de France, Unité Communiste, La Cause du peuple, Nouvelle époque, l’UPML, l’OCML-VP… tous ces gens, qui normalement sont censés dénoncer « l’impérialisme », continuent de ne rien dire.

Initiative Communiste, le site du PRCF, ne dit rien non plus à cette occasion, mais au moins parle-t-il de manière assez régulière du conflit en Ukraine, dénonçant l’OTAN et appelant à la paix.

Le panorama des « politiques » n’est guère brillant, mais celui des « anti-politiques » révèle encore plus le fond du problème, qui est que la Gauche française est surtout sans fondamentaux et sans envergure.

Comment être pris au sérieux sans économie politique développée ? Comment prétendre changer le monde, transformer les choses, sans valeurs développées, sans vision du monde ?

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Le congrès toujours aussi mystérieux de « Révolution permanente »

On n’en sait pas plus.

La photo originale n’a pas été floutée par « Révolution permanente », ce qui est une erreur de base

Le 2 janvier 2022 était ici publié l’article Le congrès mystère de « Révolution permanente » et, le même jour, « Révolution permanente » a rendu public, quinze jours après, le compte-rendu du congrès de fondation d’une nouvelle organisation révolutionnaire.

Une excellente occasion de voir si l’analyse effectuée était juste ou pas, même si cela ne change pas le fait que 15 jours après, un compte-rendu de fondation d’une organisation révolutionnaire, c’est tard, décalé, incorrect.

« Révolution permanente » a par ailleurs rendu public seulement deux documents directement produit par le congrès : la déclaration Une nouvelle organisation révolutionnaire est née ! et un compte-rendu des discussions.

La déclaration est très courte, elle mentionne une divergence interne sur la guerre en Ukraine et fait la part belle au Nouveau Parti Anticapitaliste (dont est issu « Révolution permanente »). La seule chose qu’on retient et qu’on savait déjà, c’est que :

« Révolution Permanente affirme également vouloir participer à la refondation d’une gauche révolutionnaire en France. L’enjeu est de construire une alternative au néo-réformisme et à la gauche institutionnelle. »

Il n’y a dans la déclaration strictement aucune référence idéologique. Le mot marxisme n’apparaît donc pas. Le mot « impérialisme » non plus, et il n’est pas parlé de risque de guerre mondiale.

Le compte-rendu du débat précise cependant les choses, alignant « Révolution permanente » sur la « Fraction Trotskyste – Quatrième Internationale » basée en Argentine, ce que l’on savait déjà. Et c’est surtout le Nouveau Parti Anticapitaliste, qui a récemment implosé, qui a été le thème de fond. « Révolution permanente » prendrait bien sa place, en prétendant faire mieux bien entendu.

On ne peut pas dire que cela soit intéressant, percutant, nouveau. En fait, « Révolution permanente » met simplement en place une boutique où, comme au McDonald’s, « on peut venir comme on est ». Impossible de ne pas être d’accord, rien n’est dit, à part qu’il faut militer pour changer les choses.

Les Français étant un « peuple politique », ce genre d’approche n’a aucune chance de réussir. C’est un produit d’importation de l’extrême-gauche argentine, c’est cosmopolite et hors-sol, simplement bon pour des gens traînant sur Twitter.

Il aurait d’ailleurs été bien plus simple, et cela aurait été une moindre perte de temps, que de dire que « Révolution permanente » c’est la Gauche Twitter et forcément qu’un congrès ne peut avoir qu’une forme fictive, artificielle. D’où l’absence de tout contenu.

Ce qui montre que l’article du 2 janvier 2022 tapait juste. On ne sait rien de ce congrès, qui n’a en fait rien donné, parce qu’il ne le pouvait pas. On a simplement 118 délégués disant qu’ils sont d’accord avec ce sur quoi ils étaient d’accord, et qui officialisent que « Révolution permanente » existe, ce que tout le monde savait déjà.

Mais un programme, des valeurs? Il n’y en a pas. On ne sort pas du « militantisme » avec le triptyque « syndicat » – « antiracisme » – « lgbt ».

L’aliénation de la société de consommation? Connais pas. L’OTAN comme menace principale? Connais pas. La question animale, moralement et culturellement essentielle? Connais pas. L’art, la culture, la civilisation, les classiques? Connais pas. L’idéologie, la science, les acquis de la pensée? Connais pas.

C’est la Gauche Twitter, celle qui pense que McDonald’s est populaire et le kébab révolutionnaire. Celle pour qui l’actualité ce sont les manifestations dans les grandes villes et les réseaux sociaux.

Et cela donne 118 personnes se disant d’accord avec elles-mêmes, en étant issues de discussions de 400 personnes, pour dire qu’il faut lutter contre la réforme des retraites.

Pas de quoi rêver, pas de quoi emplir son esprit, pas de quoi en tirer quelque chose, pas de quoi marquer son époque, pas de quoi ancrer quelque chose culturellement, historiquement, scientifiquement.

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Le congrès mystère de « Révolution permanente »

On ne sait rien et on n’en saura pas plus.

« Révolution permanente » était une tendance du Nouveau Parti Anticapitaliste ; exclue en 2021, elle a réussi à devenir l’un des principaux pôles « militants » en France à gauche de la gauche. Elle a annoncé un congrès de fondation d’une nouvelle organisation révolutionnaire, congrès qui s’est tenu les 16, 17 et 18 décembre 2022.

Trois textes servaient de fondements à cet effet : un sur l’organisation, un autre sur la situation en France, et enfin un portant sur la situation internationale.

Or, nous sommes le 2 janvier 2023 et « Révolution permanente » n’a toujours rien dit au sujet de ce congrès. Les seuls documents proposés sont des interventions de gens extérieurs présents au congrès, tels l’économiste version « Monde diplomatique » Frédéric Lordon (« Un parti révolutionnaire sert à tout niquer, avec méthode », sic), ou Assa Traoré du « Comité vérité et justice pour Adama ».

Mais on ne sait rien de ce que le congrès a donné. Cela a-t-il été un succès ? Un échec ? Car enfin, on peut imaginer que les personnes présentes n’ont pas tout laissé tomber pour regarder la finale de la coupe du monde 2022 de football France – Argentine.

Cela dit, l’arrière-plan de « Révolution permanente » ce sont des trotskistes argentins, et surtout, de manière plus concrète, « Révolution permanente » vise un public étudiant, petit-bourgeois, par définition versatile et consommateur. Dire qu’on fonde une organisation révolutionnaire avec de tels gens est du suicide.

On peut toujours faire semblant d’être une organisation, nombreuses sont les petites structures hyper « radicales » portées par des petits-bourgeois et des étudiants. Cependant, c’est de l’aventurisme sans portée ni envergure, c’est du « militantisme » et il n’y a pas de programme, pas de fond, rien qui reste réellement dans la société.

Là, « Révolution permanente » a visé trop haut en pensant pouvoir « formaliser » son militantisme. L’idée était de s’ancrer dans le paysage militant français. Sauf que tout cela est artificiel. Il y a toute une scène de gens qui « militent », mais ils sont là où ils sont comme ils pourraient être ailleurs. Cela n’a pas de réel fond politique programmatique.

Dans tous les cas, il n’est pas correct de dire qu’on fonde une organisation révolutionnaire lors d’un congrès, pour ne rien dire à ce sujet. Quinze jours, ne rien savoir à ce sujet, c’est tout savoir. C’est un fiasco.

Si cela avait été un réel échec, cela aurait eu sa dignité, les choses ne vont pas en ligne droite. Cela aurait été une expérience, une contribution sur la voie vers le Socialisme. Là c’est juste un épisode digne d’un feuilleton. Et cela ajoute à la confusion générale.

On dira que la critique est facile, l’art est difficile. Mais c’est « Révolution permanente » qui a affirmé faire un congrès avec plusieurs centaines de personnes pour former la véritable organisation révolutionnaire en France. De ce qu’on voit, la proposition tombe à l’eau : elle n’a été donc qu’une expression de décomposition contribuant à la dépolitisation, à la délégitimation de la Gauche. Ce qui est typique du « militantisme » anarchiste et trotskiste.

Pour une analyse de fond, on peut résumer ainsi : c’est une erreur que de vouloir un « militantisme » de masse organisé au moment où la société française toute entière se replie sur elle-même dans la consommation et la futilité.

Il y a eu un million de personnes sur les Champs-Elysées à Paris le soir du 31 décembre 2022 ! C’est lamentable, et c’est ça la réelle tendance de fond. « Révolution permanente » paie le prix de ne rien comprendre à la vie quotidienne des gens dans le 24 heures sur 24 du capitalisme, dans un capitalisme en crise depuis 2020.

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« Révolution permanente » fonde son parti : la situation internationale (3)

Un troisième aspect du projet : la situation internationale.

De par le titre du document de préparation de fondation du nouveau parti, La guerre en Ukraine et l’accélération des tendances aux crises, guerres et révolutions, on s’attend à ce que « Révolution permanente » pose les choses stratégiquement au niveau des rapports internationaux.

Ce n’est pas le cas, ce qui avait déjà été analysé ici (Guerre en Ukraine: l’absence d’autocritique de « Révolution permanente »). En effet, la guerre n’est jamais conçue comme inéluctable, mais toujours seulement comme un chemin possible, plus exactement comme une péripétie.

La présentation du document est la suivante :

« La guerre en Ukraine a exacerbé les tensions géopolitiques entre les principaux pôles du système mondial, tout en ouvrant la perspective d’une grave crise économique. Des éléments qui accélèrent les tensions et la crise des régimes et laissent présager de nouvelles explosions de la lutte des classes. »

C’est l’inverse qu’il eut fallu dire. Il n’aurait pas fallu dire :

« La guerre en Ukraine a exacerbé les tensions géopolitiques entre les principaux pôles du système mondial, tout en ouvrant la perspective d’une grave crise économique. »

Mais :

« Une grave crise économique ouvre la perspective de tensions géopolitiques entre les principaux pôles du système mondial, qui a exacerbé la guerre en Ukraine. »

Pareillement, il n’aurait pas fallu dire :

« Des éléments qui accélèrent les tensions et la crise des régimes et laissent présager de nouvelles explosions de la lutte des classes. »

Mais :

« De nouvelles explosions de la lutte des classes laissent présager la crise des régimes et les tensions qui accélèrent les éléments [mentionnés]. »

A voir une telle introduction, qui renverse la réalité, on comprend la nature du document, qui est une simple analyse « géopolitique ».

Le coeur de l’économie politique proposée c’est de dire que la situation est mauvaise :

« Plus la base matérielle deviendra restreinte, plus la lutte entre les classes et les groupements différents pour le partage des revenus nationaux sera acharnée. »

Et d’ensuite d’expliquer que par conséquent des choses vont se passer, et d’essayer de les deviner au moyen d’évaluations « géopolitiques ». Il y a ainsi des lignes et des lignes sur la situation des fronts militaires dans le conflit en Ukraine, sur ce que fait telle puissance, ce que fait telle autre puissance, etc.

Ces analyses « géopolitiques » sont le plus souvent fausses d’ailleurs : il est expliqué que la superpuissance américaine ne veut pas une défaite complète de la Russie et essaierait même par conséquent de calmer le régime ukrainien ! Mais comment peut-on dire une chose pareille ?

Il en découle, forcément, qu’est alors dénoncé la thèse comme quoi nous assistons à la troisième guerre mondiale, thèse défendue sur agauche.org.

« Révolution permanente » dit ainsi :

« La dynamique de la guerre en Ukraine, et en particulier les premières difficultés de l’armée russe, ont conduit les États-Unis à la percevoir comme une opportunité stratégique d’affaiblir la Russie, de mettre l’UE sous leur commandement en revitalisant l’OTAN, et de se positionner dans le conflit avec la Chine en alignant ses alliés dans cette lutte pour l’hégémonie.

C’est pourquoi, bien que du point de vue de l’action militaire, il soit resté strictement limité au territoire ukrainien (c’est-à-dire que nous ne sommes pas confrontés à une « troisième guerre mondiale » comme certains le disent), il s’agit d’un conflit de dimension internationale. »

On lit également :

« La guerre entre l’Ukraine et la Russie a accéléré la dislocation de ce qui restait de l’ordre mondial jusqu’au début de cette année. Toutefois, nous ne sommes pas encore entrés dans la troisième guerre mondiale, qui ne se produirait que si les grandes puissances, telles que les États-Unis, la Chine et la Russie, s’affrontaient ouvertement. »

C’est là une analyse formelle et fausse. Croire que la troisième guerre mondiale commence quand les protagonistes déclarent la guerre officiellement, c’est en rester à la forme et rejeter le fond, c’est ne rien comprendre au marxisme.

Affirmer que la guerre en Ukraine est un « conflit de dimension internationale » est une stupidité qui découle d’une telle approche.

Et que propose par conséquent « Révolution permanente » ? Eh bien puisque l’enjeu n’est pas la guerre mondiale, ce sont les revendications sociales : il faut faire mieux que les néo-réformistes.

« Révolution permanente » s’imagine ainsi révolutionnaire, alors que c’est une variante du néo-réformisme, comme en témoigne son incompréhension des enjeux historiques.

Cela se lit avec ce point mis en avant, qui est une citation de propos de Claudia Cinatti lors de la discussion internationale du 19e congrès du Parti des Travailleurs Socialistes d’Argentine :

« Depuis la crise capitaliste de 2008, il y a eu deux grandes vagues de lutte de classe, qui se sont étendues au niveau international avec des inégalités. La première, en réponse directe aux effets de la Grande Récession, a connu son point culminant avec le Printemps arabe, une rébellion généralisée contre les dictatures arabes pro-américaines, déclenchée par rien de moins que la hausse du prix du pain.

Cette vague a trouvé son expression en Europe avec le mouvement des Indignados en Espagne et les dizaines de grèves générales en Grèce, capitalisées surtout par les organisations néo-réformistes comme Podemos et Syriza.

La deuxième vague a commencé en France en 2018 avec la mobilisation des gilets jaunes contre la hausse des carburants, qui s’est transformée en une rébellion majeure contre le gouvernement Macron.

Cette vague a atteint l’Amérique latine avec le soulèvement en Équateur (contre la hausse du prix des carburants ordonnée par le FMI), les protestations et grèves nationales en Colombie et la révolte au Chili en octobre 2019, qui aurait pu ouvrir la voie à la révolution mais n’a pas dépassé le caractère de révolte, canalisée par la Constituante puis par le gouvernement Boric.

Cette vague s’est interrompue à cause de la pandémie de coronavirus, mais après les premiers confinements, la lutte des classes est revenue en force, aux États-Unis notamment, avec le déclenchement du mouvement Black Lives Matter, un processus de mobilisations en réponse au meurtre de George Floyd, un Afro-américain tué par la police, auquel plus de 25 millions de personnes ont participé.

Dans le contexte d’inégalité et de précarité croissantes aggravé par la pandémie, l’inflation – qui touche surtout les prix des aliments et des carburants – agit comme un déclencheur de conflits sociaux et politiques.

Nous voyons ainsi déjà les premières réponses ouvrières et populaires à cette nouvelle situation. Elles vont de luttes pour les salaires chez des secteurs de la classe ouvrière organisée à des révoltes et des soulèvements. »

Les gilets jaunes, première expression d’une vague révolutionnaire mondiale, qui aurait réussi « une rébellion majeure contre le gouvernement Macron?

Quel fantasme ! Voilà où mène le rejet de la compréhension réelle de la situation mondiale, qui est celle de la bataille pour le repartage du monde.

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« Révolution permanente » fonde son parti : la situation française (2)

Un second aspect du projet : la situation de la France.

Le groupe « Révolution permanente » annonce la formation d’un nouveau parti fin décembre 2022. Il justifie cela par la nécessité de rassembler la contestation révolutionnaire. Que dit le document sur la France au sujet de la situation présente?

On trouve un panorama de la France qui est, de prime abord, le même que présenté sur agauche.org, et même lire ce que dit « Révolution permanente » prête à sourire. La France serait une puissance déclinante, en perte de vitesse, débordée par l’Allemagne, frappée par la crise.

Sa situation va être celle de l’instabilité, plus rien n’est même de son ressort, elle est dépassée par les événements.

Tout cela est vrai. C’est résumé ainsi :

« Comme le reste de l’Europe, la France est frappée par la crise économique et l’aiguisement des tensions entre puissances dans le cadre de la guerre en Ukraine. Cette situation vient aggraver des éléments de déclin de sa puissance.

C’est le cas notamment de sa position en Europe, qui subit le contrecoup du basculement allemand vers une politique de plus en plus unilatérale. Ce changement de stratégie a été symbolisé par le choix de l’Allemagne d’initier une remilitarisation de son pays.

Non seulement ce renforcement de l’Allemagne sur le terrain politique international vient remettre en cause la position française de leader européen sur le terrain militaire, mais elle affaiblit le couple franco-allemand qui était un point d’appui essentiel pour l’influence française en Europe. »

Très bien, bravo ! Sauf que cette explication est abandonnée au bout de quelques paragraphes. Ce qu’on trouve après pendant des lignes qui n’en finissent pas, cest une dénonciation d’Emmanuel Macron et du « macronisme ».

Tout ça pour ça ?!

C’est assez typique des gens qui nous lisent et que nous influençons, directement ou indirectement. Ils prennent les grandes idées. Seulement, ils n’ont pas le niveau pour les assumer, alors ils agissent en contrebandiers.

On passe ainsi d’un haut niveau de perspective à des propositions d’un niveau faible, associatif, syndicaliste.

Ici, on passe d’une lecture historique-stratégique d’une France en déclin à un catalogue de luttes sociales qui depuis plusieurs années formeraient soit-disant une formidable actualité révolutionnaire, avec toujours les « gilets jaunes » en centre de mire.

C’est totalement incohérent. On passe de la notion de crise comme générale, complète, absolue même si on veut… à un combativité présentée comme « révolutionnaire » alors qu’elle est néo-réformiste.

Autrement dit, si l’on veut caricaturer, le texte commence en disant de manière succincte que c’est la fin du monde et que les carottes sont cuites pour la France, pour ensuite tartiner pendant des pages qu’il faut concurrencer la NUPES, la gauche gouvernementale en général.

C’est typique : au lieu de voir une crise historique, une crise du mode de production capitaliste, le néo-réformisme se tourner vers la crise gouvernementale, ou bien de régime.

Voici ce qui est proposé comme solution par « Révolution permanente » :

Une orientation qui défende un programme offensif pour refuser de payer la crise, mais qui ne se limite pas au terrain économique.

Contre l’offensive autoritaire et le durcissement du régime, utilisé pour attaquer nos droits, il faut exiger d’en finir avec la Vème République et ses dispositifs d’exception et défendre un programme démocratique radical, à commencer par la suppression de l’institution présidentielle, du Sénat et la création d’une chambre unique concentrant les pouvoirs législatifs et exécutifs dont les membres seraient élus pour deux ans et révocables.

Dans une période de crise où les attaques pleuvent contre les personnes minorisées, le mouvement ouvrier doit également reprendre haut et fort les revendications de celles et ceux qui luttent contre les oppressions, en s’alliant avec les mouvements anti-racistes, féministes, LGBT ainsi qu’avec la jeunesse, organisée dans le mouvement étudiant ou le mouvement écologiste.

Ces mouvements, au sein desquels des ailes radicales se détachent, reprenant à leur compte la question de la « grève » appliquée à leurs luttes, ont joué et continueront à jouer un rôle important dans l’opposition au gouvernement. Porter en leur sein une politique pro-ouvrière mais aussi révolutionnaire sera décisif. »

C’est là typique du néo-réformisme : il est parlé de crise d’ampleur, et la solution serait de modifier le régime en s’appuyant sur des contestations sociale. Et tout cela est présenté comme révolutionnaire… Quelle escroquerie, si caractéristique d’une lecture petite-bourgeoise du monde!

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« Révolution permanente » fonde son parti : l’organisation (1)

Un premier aspect du projet : la forme de la structure.

Issu du Nouveau Parti Anticapitaliste (dans lequel on trouve notamment Olivier Besancenot et Philippe Poutou) dans lequel il était une tendance, le groupe « Révolution permanente » annonce la formation d’un nouveau parti fin décembre 2022.

Des comités, rassemblant 400 personnes, se sont montés à ce sujet, débattant de trois textes :

Il est important de se confronter à ces documents, car il s’agit là d’une proposition stratégique pour la révolution en France. Soit c’est juste d’une manière ou d’une autre et il faut soutenir cela d’une manière ou d’une autre, soit c’est erroné et alors il faut le critiquer d’une manière ou d’une autre.

Cela dépend de ce qui est principal et il faut juger sur pièces, même si naturellement le nouveau parti fera immanquablement partie de la « Fraction trotskyste – Quatrième Internationale (FT-QI) », un regroupement international dont la principale base est en Argentine.

Que dit « Révolution permanente »? Que le nouveau parti est un facteur de recomposition à l’extrême-gauche :

« Dans un contexte de reflux de ce courant et de crise et marginalité des principales organisations de l’extrême-gauche, poser aujourd’hui la nécessité d’une refondation de la gauche révolutionnaire est décisif. Celle-ci doit offrir aux nouvelles générations militantes qui se politisent et se radicalisent un cadre politique et organisationnel, et permettre d’engager un renforcement substantiel des révolutionnaires et de leur capacité à influer sur les évènements à venir. »

Est-ce juste? Non, ça ne l’est pas. Ce qu’on a d’ici exposé, c’est la conception d’ultra-gauche opposée à la Gauche historique. Au lieu de mettre en avant les idées, la conscience politique, on met en avant le spontanéisme et l’actionnisme.

C’est une ligne capitularde sur le plan du combat des idées, au nom de pouvoir « influer sur les événements » à tout prix.

Comment « Révolution permanente » conçoit-il la crise? Il est expliqué que :

Depuis 2016, un nouveau cycle de lutte des classes s’est ouvert en France. Celui-ci a vu s’enchaîner des mobilisations de quasiment tous les secteurs des travailleurs, mais de façon dispersée et désynchronisée : les grands bastions du privé et la jeunesse en 2016, les cheminots et la fonction publique en 2018, les secteurs paupérisés de la France périurbaine avec les gilets jaunes, les travailleurs des transports principalement en 2019 pour les retraites, de nombreuses entreprises du privé dans le cadre de luttes contre les licenciements et pour les salaires à partir de la fin du premier confinement en 2020. Des mobilisations ouvrières auxquelles il faut ajouter les dynamiques de la jeunesse, lycéenne et étudiante, mobilisée dans ses lieux d’étude et dans la rue pour le climat, contre les violences sexistes, pour les droits LGBT ou contre le racisme et les violences policières.

2016 a marqué un saut dans la crise organique en France, avec l’enchaînement par le gouvernement Hollande-Valls d’une offensive liberticide sans précédents à la suite des attentats de 2015 et d’une réforme pro-patronale du code du travail qui a entraîné un mouvement interprofessionnel puissant

Il est totalement absurde de voir en l’année 2016 un tournant de quoi ce soit. C’est là attribuer à des contestations petites-bourgeoises comme « Nuit debout », les LGBTQ, les « post-coloniaux » ou ensuite les « gilets jaunes » une valeur révolutionnaire subjective, alors qu’en réalité c’est 2020 qui ouvre objectivement la période de la crise fondamentale du capitalisme.

Quelle forme d’organisation prône « Révolution permanente »? Cela n’est pas clair du point de vue français. Il est dit :

« Il est évident qu’une forme de centralisation est indispensable. C’est pourquoi la nouvelle organisation se dotera d’une direction politique, élue par le congrès selon les règles établies dans la charte statutaire.

Cette centralisation n’est cependant pas contradictoire avec la plus large démocratie interne, avec la possibilité pour chaque militant de contester l’orientation proposée par la direction et de chercher à convaincre l’organisation, à condition, bien entendu, de ne pas faire obstacle à la mise en œuvre de l’orientation une fois que celle-ci a été adoptée par une majorité de militants. »

On aurait pu commencer directement par là. En effet, le nouveau parti, avec une telle démarche, ne peut pas exister en France. En Argentine, peut-être, mais en France ce n’est même pas la peine d’y compter.

Pourquoi? Parce qu’il n’y a pas le droit de tendance.

Non pas que le droit de tendance soit une bonne chose, bien au contraire. Mais il n’existe que trois courants pouvant assumer l’absence de droit de tendance, et « révolution permanente » n’en fait pas partie.

Les socialistes français et l’ensemble du courant trotskiste qui, dans les faits, se rattache à cette tradition « socialiste français », considèrent le droit de tendance comme absolument sacré.

Partant de là aucun parti ne peut se monter en France du côté socialiste ou trotskiste sans droit de tendance. C’est impossible en raison du poids des traditions et de la vision du monde.

Il y a des courants anti-droit de tendance, mais ils relèvent inversement de la tradition communiste, au sens le plus large.

En fait, on ne trouve pas non plus de droit de tendance dans la social-démocratie historique. Il n’y a jamais eu de droit de tendance dans la social-démocratie allemande, autrichienne, tchèque etc. avant 1914, et même après dans la social-démocratie devenue réformiste, ce droit de tendance n’a pas existé, et ce jusqu’à aujourd’hui. Mais en France il n’y a jamais eu de social-démocratie, seulement un « socialisme français » né du rassemblement assumé des tendances différentes en 1905.

Pour ces raisons historiques, on ne trouvera pas de droit de tendance du côté de la tradition communiste :

  • dans les mouvements liés au PCF des années 1980, parce ce qui compte c’est la « tradition » (PRCF, PCRF) ;
  • dans le maoïsme avec le PCF(mlm) au nom de la centralité de l’idéologie produisant une ligne rouge (et une seule) ;
  • dans le courant dit pro-albanais qui se pose comme constructif, unificateur, anti-idéologique, anti-sectaire (PCOF, Unité communiste ou encore les restes du « PC maoïste » fondé par un renégat du maoïsme passé au PCOF et inventant ensuite un maoïsme « albanais »).

« Révolution permanente », au-delà des erreurs subjectives de fonder un mouvement rassembleur de la « nouvelle » contestation, fait face ici à un obstacle insurmontable. De par sa base sociale, petite-bourgeoise dans l’esprit et pour la plupart y compris dans le fond, le « démocratisme » en son sein prédomine, et le droit de tendance est incontournable.

Il n’est ainsi pas possible de monter en France un parti centralisé à partir d’un tel matériau humain.

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Pour Lutte ouvrière, « Révolution permanente » et le PRCF, la Russie n’est pas « impérialiste »

Qu’est-elle alors, juste « méchante »?

Il est tout de même fou qu’en 2022, les principaux nostalgiques de l’URSS des années 1980 ne reconnaissent toujours pas qu’en Russie il existe un capitalisme exacerbé, une bourgeoisie élitiste de type d’ailleurs oligarchique. Même sans aller en Russie, il suffit de faire un petit voyage à Paris dans les quartiers des magasins de luxe ou bien d’aller dans les coins chics sur la côte d’Azur…

Au-delà de nostalgie, il y a aussi l’hypocrisie de ne pas vouloir remettre sa propre idéologie en cause. L’URSS étant bien, elle ne peut pas fondamentalement mal tourner. Il reste toujours un petit quelque chose…

Le Pôle de Renaissance Communiste en France est ainsi le principal courant historique oppositionnel au PCF des années 1990 : il est en fait fidèle au PCF des années 1960, avec son pro-soviétisme exacerbé. Lutte ouvrière est par contre fondé sur le trotskisme, et comme pour Trotski l’URSS était un « État ouvrier dégénéré », il faut maintenir coûte que coûte cette position.

Il est intéressant de noter ici que tant le PRCF que Lutte ouvrière disent qu’ils ont d’autant plus raison qu’eux, au moins, ne s’alignent pas sur l’Otan. Ce n’est pas vrai.

Sur la forme, c’est vrai. Mais vous chercheriez en vain tant chez l’un que chez l’autre une dénonciation régulière et systématique de l’Otan. Une telle chose ne se trouve que sur agauche.org.

Le PRCF et Lutte ouvrière parlent rarement de la guerre en Ukraine et de l’Otan, ils ne le font que de loin en loin, de manière symbolique, pour simplement dire : sur tel thème, notre position c’est ça. Mais cela s’arrête là. C’est totalement noyé par de multiples autres considérations, principalement syndicales pour ne pas dire syndicalistes.

Cela se lit d’ailleurs tout à fait dans le symbolisme intellectuel de leurs positions. Voici ce que dit le PRCF en date du 4 déccembre 2022.

Pour résumer cela donne : on s’en moque de ce qu’est la Russie, ce n’est pas important, le seul impérialisme est occidental. C’est là clairement converger avec la Russie !

Pour se dédouaner le PRCF dit alors qu’il ne sympathise pas avec le régime russe… qui serait « bonapartiste ». Ce qui revient à faire comme Trotski qui voyait pareillement l’URSS comme bonapartiste, mais à soutenir quand même… Le PRCF fait du Trotski cent ans après avec la Russie capitaliste et son oligarchie ! C’est abracadabrant.

« 1°) il nous semblerait erroné, face à la guerre mondiale qui menace, de renvoyer dos à dos, d’une part, l’impérialisme euro-atlantique et ses épigones, l’impérialisme allemand en plein réarmement et rêvant de revanche sur Stalingrad, mais aussi l’impérialisme français d’autant plus agressif qu’il perd pied dans son ex-pré-carré africain, et d’autre part, la Fédération de Russie et la République populaire de Chine qui, aussi bien sur leurs marches respectives du Donbass ouvrier qu’à Taiwan, Hongkong, au Tibet et au Sinkiang, sont menacées d’un repartage de type néocolonial.

Redisons que l’impérialisme transatlantique veut prévenir par la guerre son affaiblissement structurel face, non seulement aux BRICS, qui composent  la presque majorité de l’humanité, mais à l’Afrique, à l’Indonésie, à l’Inde, à l’Amérique latine, aux masses dites arabo-musulmanes du grand Arc méditerranéen dont la Palestine est le point focal, à ces 7 milliards d’humains trop longtemps humiliés qui ne supporteront pas éternellement l’arrogance des maîtres anglo-saxons et euro-atlantistes, de leurs « valeurs » boursières et de leur domination étouffante sur tous les plans, financier, monétaire, militaire, technologique, musical et même linguistique. 

La question n’est du reste pas seulement de savoir s’il existe un impérialisme russe, car existât-il que cela ne règlerait pas en soi la question de savoir qui est l’instigateur n°1 de l’oppression du Donbass et de la guerre en Ukraine.

Déjà au VIIème Congrès de l’I.C., Georges Dimitrov notait qu’il ne suffisait pas que l’Angleterre, la France et l’Allemagne hitlérienne fussent toutes les trois des Etats impérialistes pour qu’on pût les renvoyer dos à dos avec l’Allemagne comme il était très juste de le faire en 1914: le Komintern déclara avec justesse que, dans le conflit qui approchait, le Troisième Reich revanchard serait le fauteur de guerre principal et qu’il convenait donc de décliner nationalement et internationalement contre lui une ligne clairement antifasciste que corrobora pleinement la suite des évènements. 

De plus, quand bien même on déclarerait impérialiste la Russie actuelle, cela ne changerait rien en pratique au devoir des communistes occidentaux, notamment français pour ce qui nous concerne: il reste de combattre prioritairement l’impérialisme occidental dont le régime macronien est un rouage subalterne, en rappelant le mot de Liebknecht « l’ennemi principal est dans ton pays ».

C’est d’autant plus vrai que dans la dynamique du conflit qui oppose l’UE-OTAN alliée au régime pronazi de Kiev à l’Etat russe soutenu par le Donbass ouvrier et par la majorité écrasante des communistes russes, les euro-atlantistes amis de Zielensky sont amenés à prendre appui symboliquement sur le souvenir horrifique du génocideur  Bandera. A l’inverse, leurs ennemis, y compris Poutine à son corps défendant, sont forcés de laisser remettre en place des statues de Lénine et d’exploiter, si inconséquemment que ce soit, la symbolique rouge de la Grande Guerre patriotique. Mais c’est là LEUR contradiction, et non pas la nôtre !

2°) Ce constat que l’euro-atlantisme allié aux néonazis est l’ennemi principal de la paix n’implique de notre part aucun alignement politico-idéologique sur le régime bonapartiste et contre-révolutionnaire de Poutine. 

Non seulement en Russie même le PRCF n’est pas solidaire de Poutine, non seulement il apporte un modeste soutien humanitaire et politique concret aux ouvriers communistes du Donbass, mais notre camarade, le philosophe Georges Gastaud, a  publiquement interpellé Poutine sur ses attaques contre Lénine, qualifié de traitre à la Russie, contre le droit à l’existence d’une Ukraine soviétique disposant du droit à l’autodétermination.

Tant il est évident que ces tirades anticommunistes et, sur le fond, antisoviétiques, sont le pire moyen pour fédérer le patriotisme russe, pour détacher de Zelensky les éléments ukrainiens non fascistes, pour faire revivre le grand élan à la fois patriotique et communiste de la guerre patriotique symbolisée par le drapeau rouge orné des « outils ».

Combien la résistance à l’hégémonisme étatsunien serait-elle renforcée si ces forces, au lieu de dénigrer Lénine, le fédéralisme soviétique et les communistes, se référaient, non pas au « monde russe » et à la Sainte Eglise orthodoxe russe, mais à la libre Union des quinze Républiques soeurs luttant ensemble, sous l’autorité du prolétariat, contre l’envahisseur nazi et pour l’idéal internationaliste du communisme! »

Le PRCF c’est vraiment la nostalgie des défilés des tanks et des bombes atomiques sur la place Rouge à Moscou dans les années 1980. Quand on lit leurs éloges de l’URSS, on a l’impression de voir un vieux pro- napoléonien admirer un empire qui a enfin réussi avec l’URSS, et qui en a la nostalgie. C’est si français !

Ce que dit Lutte ouvrière est relativement similaire, mais au moins c’est du trotskisme traditionnel. Sa position a été répétée plusieurs fois déjà, mais en novembre 2022 elle a été rééditée en large à l’occasion d’une dénonciation d’une autre tendance du trotskisme (l’ex-Secrétariat unifié, auquel appartient le NPA, qui effectivement s’aligne carrément sur l’Otan, à l’instar d’Ensemble! en France d’ailleurs membre de cette tendance trotskiste internationale).

Depuis l’effondrement de l’URSS, Lutte ouvrière considère que la Russie n’est pas capitaliste au sens strict, encore moins impérialiste, qu’il y a encore des acquis socialistes.

« Le SU [l’ex-Secrétariat unifié], à l’époque où il reprenait au moins formellement l’analyse de l’URSS stalinienne faite par Trotsky, définissait à juste titre ce régime comme un État ouvrier dégénéré.

Maintenant, il décrit la Russie comme un régime capitaliste et impérialiste. Pourtant, nulle part à notre connaissance il n’a pris la peine d’expliquer de façon convaincante comment, d’une URSS qui venait d’éclater et dont l’économie se trouvait en ruine, aurait pu surgir un État capitaliste développé, impérialiste au sens où les marxistes l’entendent.

Il y a plus d’un siècle, quand Lénine a caractérisé l’impérialisme comme le stade suprême du capitalisme, il se fondait sur l’analyse des transformations survenues au sein du capitalisme et du nouveau mode de domination mondiale qui en résultait, en liaison avec l’exportation de capitaux dont les bourgeoisies des pays les plus riches ne trouvaient plus à tirer assez de profit à domicile.

La société et l’économie russes actuelles ne sont pas les produits de l’évolution organique du capitalisme parvenu au stade impérialiste. Certes, la Russie « investit » dans l’espace ex-soviétique, et surtout là.

Car elle y est poussée par des motifs d’abord politiques, et non par les impératifs de la reproduction élargie du capital, comme les pays impérialistes d’Europe de l’Ouest et d’Amérique du Nord.

Et cela se vérifie de bien des façons. Ainsi, depuis qu’il est parvenu au sommet de l’État russe, Poutine déplore, périodiquement et en vain, la fuite des capitaux organisée par les nantis russes. À tel point que, pour moderniser son économie, la Russie dépend du bon vouloir intéressé des trusts occidentaux.

Résultat : ce pays de 150 millions d’habitants, qui a hérité une certaine base économique de l’URSS, a un PIB voisin de celui de l’Espagne, trois à quatre fois moins peuplée. Résultat plus inquiétant dans la guerre du Kremlin en Ukraine : la Russie, reléguée au rang de pourvoyeuse de matières premières dans la division mondiale du travail, dépend en partie de firmes occidentales pour se procurer des composants indispensables à son industrie d’armement. »

Le groupe « Révolution permanente dit exactement la même chose :

« L’invasion de l’Ukraine par la Russie a un caractère profondément réactionnaire. Il s’agit d’une action typique de l’« impérialisme militaire » même si, en raison de l’ampleur de son économie et de son rôle dans le système mondial, la Russie n’est pas une puissance impérialiste.

Cette invasion et cette guerre s’inscrivent dans le contexte géopolitique et historique d’une politique étatsunienne hostile à l’égard de la Russie, qui s’exprime par l’expansion de l’OTAN vers l’est, et en particulier par la relation établie entre les États-Unis (et l’UE) et l’Ukraine après le soulèvement de Maïdan en 2014, sans laquelle elle ne peut être comprise. »

Un « impérialisme militaire » qui n’a pas comme base un impérialisme… Il fallait oser.

Comme on le voit, tant pour le PRCF que Lutte ouvrière et « Révolution permanente », la Russie n’est pas « impérialiste », voire même pas « capitaliste ». Elle est une sorte de bureaucratie usurpant… la grande URSS, qu’on appelle à revenir de ses voeux.

C’est là une drogue idéologique, car en 2022 rien de cela ne colle à la réalité. Sans compter que cela converge totalement avec le discours de la Russie de Vladimir Poutine.

Si encore le PRCF et Lutte ouvrière dénonçaient l’Otan, à la limite ce serait compréhensible ou du moins secondaire, ce serait une illusion politique. Mais ils ne le font que symboliquement et une fois de temps en temps. Cela fait partie du discours, mais ce n’est pas politique.

Cela montre qu’en France en ce moment, il y a ceux passés dans le camp de l’Otan d’une manière ou d’une autre (l’ensemble de la gauche électorale-gouvernementale ainsi que les anarchistes), et d’autres qui ne veulent pas mais s’arrêtent là, restant à une position symbolique.

Et il y a aussi – surtout ! – la ligne juste d’agauche.org qui fait de la question de la guerre mondiale l’aspect principal, laissant les autres à leur misérabilisme syndicaliste et leurs intérêts démesurés pour des questions secondaires sans importance historique.

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Révolution permanente : contre la Gauche historique

Le trotskisme cherche à se renouveler.

Révolution permanente a tenu son université d’été avec 500 personnes, ce qui est une grande défaite du point de vue numérique pour cette organisation trotskiste. On parle en effet de la seule structure « militante » qui a su, ces derniers mois, impulser une réelle dynamique. Cependant, l’époque n’est pas du tout à un essor « militant », bien au contraire même.

Notons tout de suite quelque chose d’important : Révolution permanente prétend être un nouveau phénomène, une nouvelle vague militante pour la première fois depuis 40 ans, avec des centaines de personnes dans une organisation tout à fait nouvelle. C’est tout à fait faux.

Tous les 5-10 ans, il y a une nouvelle structure « militante » qui se développe, récupérant plein de gens de partout pour les épuiser rapidement et finir par s’étioler. Il suffit de penser à la très grande vague d’adhésion et d’activisme qu’a connu le syndicat d’esprit anarchiste CNT au début des années 2000, ou encore le Nouveau Parti Anticapitaliste à la toute fin des années 2000. Auparavant, dans les années 1990, on avait eu également Socialisme International, ou bien les Jeunesses Communistes Révolutionnaires – Egalité. Des militants très nombreux, aguerris, hyperactifs, hyperproductifs. Qu’en reste-t-il ? Strictement rien.

Révolution permanente est justement sortie du Nouveau Parti Anticapitaliste au milieu de l’année 2021, après avoir tenté de pousser son propre candidat à la présidentielle, ce qui a fait du bruit mais n’a pas été concrétisée par un développement. L’université d’été a été prétexte pour parler de former une « nouvelle » organisation révolutionnaire, cela avait d’ailleurs déjà été annoncé en juin 2022. Révolution permanente a annoncé que cette nouvelle organisation sera fondée durant l’automne, sous la forme d’un « Parti ». Voici le meeting de l’université d’été par ailleurs, qui comptabilise moins de mille vues.

C’est que Révolution permanente est, comme toute structure trotskiste, fondée sur une lecture cosmopolite des choses. Il est parlé des choses en général et toute question ne pourrait avoir qu’une réponse mondiale, dans un horizon lointain, très lointain. C’est d’ailleurs une structure dépendante de la Fraction trotskyste – Quatrième Internationale, dont la base est en Argentine et sa seule nature est revendicative, suivant le principe du « Programme de transition » de Léon Trotski où en mettant de l’huile sur le feu des revendications, on arriverait par miracle à une « révolution » mondiale.

Et comme on parle de trotskisme renouvelé, les travailleurs sont vus à travers le prisme post-moderne des « races », des LGBTQ, de la « radicalité » étudiante, d’une liste d’oppressions sous la forme de catalogue, car le socialisme… cela ne « suffit » pas en soi. Daniela Cobet de Révolution permanente dit ainsi :

« Pour renverser le capitalisme, la classe ouvrière, et pas uniquement les prolétaires en bleu de travail, a un rôle central parce qu’elle est au cœur de la production. Mais son combat ne peut se mener qu’en alliance avec l’ensemble des opprimés en lutte, et en portant leurs revendications spécifiques. »

C’est très exactement le discours américain contre le « classisme », le racisme, le sexisme, et autant de « -ismes » que l’on voudra. On a ici des gens qui ne connaissent pas l’Histoire du mouvement ouvrier, qui d’ailleurs la réfutent au nom du trotskisme, et qui accompagnent la diffusion des valeurs libérales et communautaires, bref l’élargissement du marché par l’atomisation individuelle. C’est présenté comme le « véritable » marxisme, la véritable radicalité, alors que c’est anti-historique et cosmopolite, totalement hors-sol et avec un esprit de contestation étudiante.

Révolution permanente racole tellement qu’ils ont réussi à employer à leur service Jean-Marc Rouillan (dont on peut entendre le point de vue ici), ancienne figure de l’organisation de lutte armée Action Directe. Jean-Marc Rouillan avait par ailleurs rejoint le Nouveau Parti Anticapitaliste depuis de nombreuses années et a toujours représenté les pires traditions anarchistes dans Action Directe. C’est un peu le désastre d’ailleurs ici, car on a affaire à une vente opportuniste à la découpe, puisqu’il y a les deux romans de 2022 directement « Action Directe » La Fille de Deauville de Vanessa Schneider (une journaliste et essayiste politique) et La Vie clandestine de Monica Sabolo (Voici, Elle, Grazia, etc.).

Tels sont les temps, où il faut vendre pour exister, racoler pour faire agir, etc. Révolution permanente tente concrètement de suivre les modes capitalistes, principalement américaines, pour se présenter comme l’aile « radicale » d’un libéralisme libertaire en lutte contre toutes les oppressions, notamment la « transphobie ».

C’est la ligne anti Gauche historique. Anasse Kazib, principale figure de Révolution permanente en tant que porte-parole, résume bien cette démarche en disant à l’université d’été que :

« Le stalinisme a transformé le marxisme en caricature, nous on revendique un marxisme qui prend en compte l’ensemble des oppressions, et on veut construire une organisation révolutionnaire à l’image de cette salle, remplie d’ouvrières et d’ouvriers, d’étudiantes et d’étudiants, de femmes, de personnes LGBT, racisées, etc. »

Le prolétariat ne suffit pas, le Socialisme en suffit pas : il faut quelque chose en plus. Cette ligne trotskiste a toujours été le fond même faisant converger trotskisme et fascisme. Et ce n’est qu’un début : moins le prolétariat se bouge, plus il faut des fictions comme les LGBTQ pour prétendre à la radicalité. Et lorsque le prolétariat se bougera vraiment, il y aura encore plus de fictions pour le tromper, pour le pourrir de l’intérieur, pour agir comme cinquième colonne.

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Guerre en Ukraine: l’absence d’autocritique de « Révolution permanente »

Il était expliqué qu’il n’y aurait pas de guerre.

« Révolution permanente », une tendance trotskiste du NPA qui en a été exclu, est l’une des très rares structures de la Gauche à avoir parlé de la situation en Ukraine avant que la guerre ne se déclenche. C’est plutôt très bien. Le souci, c’est que la ligne de « Révolution permanente » a été de faire de la géopolitique – d’ailleurs cela continue – et à force de couper les cheveux en quatre, d’expliquer que la guerre n’aurait pas lieu.

Dans l’article « Pourquoi la Russie menace-t-elle l’Ukraine ? » du 20 janvier 2022, il est ainsi dit ouvertement qu’il n’y aurait pas la guerre, que la Russie mobilisait ses troupes pour réaliser une « posture ». Même si la Russie finissait par désirer la guerre, elle n’aurait pas les moyens d’enchaîner l’Ukraine et d’ailleurs « d’un point de vue des intérêts de l’impérialisme nord-américain un affrontement avec la Russie autour de l’Ukraine ne fait aucun sens ». 

Pas de chance, les faits ont montré très exactement le contraire : la superpuissance américaine a mis tout le paquet pour une confrontation à ce sujet, et ce n’est pas fini.

Le fait que la Russie entendait envahir l’Ukraine a également été littéralement mise de côté, au nom de la dénonciation de l’OTAN. L’article du 28 janvier 2022 Crise Russie-Ukraine. Quid de l’agressivité de l’OTAN ? dresse encore et toujours un panorama géopolitique où la principale menace, ce n’est pas la Russie entendant envahir l’Ukraine. C’est erroné comme les faits l’ont montré.

« C’est donc dans ce contexte qu’il faut comprendre les frictions, les menaces de guerre, la « diplomatie armée » et les tentatives d’arrangements. Et comme on voit on est loin de l’image présentée par les médias dominants où l’escalade serait seulement du fait de la Russie.

En réalité le principal responsable de la menace de conflit est avant tout l’OTAN : cette alliance militaire impérialiste et réactionnaire qui utilise sa force collective pour contraindre les différents États à travers le monde à se plier à ses intérêts géopolitiques et économiques. »

Cette thèse de l’OTAN comme principale menace de conflit témoigne de l’incompréhension par « Révolution permanente » des contradictions entre les grandes puissances. Bien entendu, tant l’OTAN que la Russie sont dénoncés. Mais la contradiction des deux blocs n’est pas comprise en tant que tel, c’est considéré comme un arrière-plan géopolitique seulement, il n’y a pas la considération que la tendance à la guerre prime, que l’actualité historique c’est la guerre entre les blocs.

Pour preuve, dans le long document du regroupement international auquel appartient « Révolution permanente », « A bas l’escalade militaire de l’OTAN en Europe de l’Est. Ni intervention impérialiste, ni ingérence militaire russe en Ukraine ! » du 29 janvier 2022, le terme de guerre n’est présent au sens strict que… deux fois.

Le document du même regroupement, le 2 mars 2022, « Non à la guerre ! Troupes russes hors d’Ukraine ! OTAN hors d’Europe de l’est ! A bas le réarmement impérialiste !« , présente la guerre simplement comme un accrochage produit par la concurrence :

« Cette montée du militarisme et l’arrivée de la guerre au cœur de l’Europe de l’est dévoilent le mensonge selon lequel la « mondialisation » néolibérale et la fin de la Guerre froide auraient ouvert une nouvelle ère, dans laquelle le pouvoir des États se serait transformé et les guerres appartiendraient au passé. Après que le mirage d’un monde capitaliste dirigé par une seule « hyperpuissance » se soit estompé, le déclin de la puissance étatsunienne est désormais visible aux yeux de tous.

L’intégration accrue de l’économie mondiale par le biais de « chaînes de valeur » liées à la production industrielle et aux services, de même que le système financier et des télécommunications ont accru la concurrence entre monopoles et entre États, qui n’a pas du tout diminué.

La lutte pour se tailler une part accrue du pouvoir mondial, entre les États-Unis, la Chine et la Russie, mais également avec les tentatives de l’Allemagne et de la France, ainsi que du Japon, de mener une politique impérialiste plus indépendante pour renforcer leur poids respectif dans leur aire d’influence, rend l’ensemble de la situation internationale plus instable. »

On comprend pourquoi il y a une tendance de la part de « Révolution permanente » à basculer dans la géopolitique, jusqu’à reproduire des points de vue de pseudos « agences » géopolitiques comme « Strafor » (Invasion de l’Ukraine : les 4 scénarios de Stratfor sur l’issue de l’offensive russe, le 28 février 2022). C’est là profondément erroné, c’est une incompréhension que le capitalisme va inéluctablement à la guerre, c’est résumer la guerre à un militarisme accompagnant le capitalisme, comme un simple fruit de la concurrence… C’est historiquement la ligne de droite de la social-démocratie d’avant 1914.

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Société

Un constat sur le rapport entre anti-pass sanitaire et anti-vax

Le mouvement anti-pass sanitaire a un noyau anti-vax.

C’est un constat très intéressant contribuant à la question de l’importance des anti-vax dans le mouvement anti-pass sanitaire. Il provient d’un article d’Anasse Kazib, qui compte se présenter à la présidentielle de 2022 pour Révolution permanente, qui publie justement le 20 août 2021 l’article source, Où va le mouvement contre le pass sanitaire?.

Rappelons, car cela renforce la valeur de ce qui est constaté, qu’Anasse Kazib et Révolution permanente soutiennent depuis le début le mouvement anti-pass sanitaire, appelant à le renforcer.

Oui, nous sommes contre le pass sanitaire et appelons à lutter contre sa mise en place, car c’est une stratégie une fois de plus autoritaire et surtout qui n’est en rien efficace pour faire face à la crise sanitaire, un permis de réprimer les salariés.

La loi votée au parlement s’accompagne d’ailleurs de décisions contradictoires avec les enjeux de santé publique comme le déremboursement des tests PCR ou encore le fait de ne plus isoler les personnes vaccinées en cas de contact avec une personne positive au Covid.

Mais il faut aller plus loin, et mettre au centre la question de la stratégie sanitaire pour en finir avec l’épidémie.

Sur ce plan, on peut entendre dans les manifestations l’idée selon laquelle « que l’on soit vacciné ou non, l’essentiel est de lutter contre le pass sanitaire ».

De fait, il y a bien un certain nombre de personnes vaccinées dans les manifestations.

Pourtant il faut reconnaitre que la pression anti-vax y est très forte, et les mots d’ordre favorables à la vaccination rares.

Pire, au-delà des mots d’ordre contre le pass sanitaire, on a pu voir de nombreux manifestants dénoncer la vaccination, parfois avec des slogans et des symboles antisémites.

Dans ce cadre, une pression s’exerce pour ne pas se prononcer sur la vaccination.

Cette pression se ressent y compris sur l’ensemble des organisations syndicales et politiques de gauche qui sont favorables à la vaccination, mais ne le disent que du bout des lèvres afin d’éviter de cliver, quand elles n’entretiennent pas volontairement une ambigüité.

Ce constat est sans appel. Anasse Kazib poursuit en disant qu’il faut prôner la vaccination, de la même manière qu’il dit que l’extrême-Droite tente de prendre le contrôle d’un mouvement anti-pass sanitaire qui, en soi, serait une très bonne chose.

En réalité, le mouvement anti-pass sanitaire est totalement réactionnaire et si l’on prend l’aspect anti-vax, et uniquement celui-là, Anasse Kazib est obligé d’admettre qu’il est culturellement omniprésent.

Cependant, comme Anasse Kazib est trotskiste et se focalise sur le social, sans donc saisir la question de la culture, il dit que ce n’est pas grave ou, du moins, que cela peut changer que c’est tout à fait secondaire. Il raisonne ainsi comme le font les populistes à gauche, pour qui toute revendication sociale serait en soi positive.

Or, c’est faux. Car la société repose sur des visions du monde en conflit et il faut voir lesquelles sont appuyées par tel ou tel phénomène, car le domaine « social » s’inscrit toujours dans un contexte.

On ne peut pas considérer une gigantesque bouderie de gens vivant dans un pays parmi les plus riches du monde comme une « protestation » potentiellement révolutionnaire. C’est bien plutôt un reflet de décadence. Et la dimension anti-vax, elle-même parfaitement lisible, visible, intouchable, en est une preuve très claire… En plus de la révolte anti-collective contre le pass sanitaire.

La Gauche doit rejeter le mouvement anti-pass sanitaire et bien comprendre l’interaction réactionnaire des revendications anti-pass sanitaire et antivax!

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Société

« Transphobie »: le discours libéral-libertaire de « révolution permanente »

Quand on est de gauche on ne converge pas avec le turbocapitalisme.

Révolution Permanente, qui exprime le point de vue du courant du Nouveau Parti Anticapitaliste désirant refonder un parti trotskiste (de masse), a publié un article « États-Unis. Deux semaines de violences transphobes à Los Angeles« . Y a-t-il vraiment eu de telles violences à Los Angeles ?

Absolument pas, c’est simplement un titre racoleur. L’arrière-plan consiste simplement en une vidéo sur Instagram, des insultes sur les réseaux sociaux et de petits accrochages de quelques dizaines de manifestants devant un spa à Los Angeles. Un homme se définissant comme une femme s’était fait en effet rejeté de l’espace féminin, étant physiquement un homme.

L’argument de Révolution Permanente consiste alors en trois choses :

– affirmer que l’affaire est un coup monté, qu’il n’y a jamais eu de personne refoulée du SPA,

– dire qu’il s’agit d’une opération commune de l’extrême-Droite et des féministes « TERF (Trans-Exclusionary Radical Feminist – un acronyme qui désigne les féministes hostiles aux personnes trans) »;

– appeler à la violence en France contre les gens ne s’associant pas à leur démarche.

Le texte de Révolution Permanente est sans ambiguïtés aucune concernant cet appel à la violence. Il nomme d’ailleurs une personne qui a justement déjà été victime de violence, en faisant très clairement une cible.

« Ce qui se passe aux États-Unis doit être une sonnette d’alarme pour les organisations de notre classe en France. Les attaques transphobes à la Marche des Fiertés de cette année, mais aussi la présence pour le moment marginale mais de plus en plus ouverte de figures transphobes et réactionnaires comme Marguerite Stern, montrent que nous nous trouvons devant un phénomène grandissant.

En ce sens, il est plus que jamais nécessaire que les organisations mouvements féministes et LGBTI se positionnent de façon nette et tranchée pour organiser une riposte d’ampleur face aux réactionnaires de tous bords, des TERF jusqu’à l’extrême-droite. »

Cette argumentation est d’autant plus agressive que Révolution Permanente sait très bien que ses propres discours en faveur des trans ou du mouvement LGBT est exactement le même que celui des États-Unis, de l’Union européenne (et notamment de la France).

Comme Révolution Permanente se définit comme révolutionnaire, c’est bien entendu un souci : comment être révolutionnaire quand on dit exactement la même chose que les gouvernements et les institutions ?

Alors Révolution Permanente est obligée d’en rajouter autant que possible, d’en faire des caisses, et de parler de l’extrême-Droite, de dire qu’elle est à l’offensive, qu’elle veut retourner en arrière, qu’elle ne veut pas aller de l’avant, etc.

Seulement, est-il possible d’aller de l’avant dans le capitalisme ? Oui, bien entendu, aller de l’avant… vers le turbocapitalisme. Et c’est bien là tout le problème. En pratique, Révolution Permanente pense qu’il peut y avoir de réels progrès dans cette société, qu’il peut exister des changements… « sociétaux » de grande échelle.

Elle le pense d’autant plus que Révolution Permanente a les mêmes valeurs culturelles que l’ancienne Ligue Communiste Révolutionnaire, c’est-à-dire des considérations d’ultra-gauche : la famille est réactionnaire, il faut l’amour libre, toutes les normes en matière relationnelles sont à condamner, etc.

Cela est dit de manière ouverte dans l’article en question, par ailleurs.

« Ce que menacent les personnes trans pour ces prétendues féministes [définies comme « TERF »], c’est la norme biologique qu’elles définissent pour les femmes, en particulier autour de la notion de fertilité et de sexe biologique.

Un logiciel profondément réactionnaire dans lequel se retrouve sans surprise la droite chrétienne et l’extrême-droite et dont la finalité, en réduisant les femmes à leur rôle de mère, est de protéger les “bonnes moeurs” : c’est-à-dire le carcan des rôles assignés aux femmes par la société patriarcale et la famille nucléaire. »

Ce rejet de la biologie est tout à fait en phase avec le turbocapitalisme. Et ce rejet de la figure de la mère est, sans doute, l’expression la plus perfectionnée de l’anti-féminisme. Car on a tous une mère et cette réalité maternelle est en contradiction fondamentale avec le patriarcat, le virilisme, la prétention à être « au-dessus » de la réalité. Les gens de Révolution Permanente sont anti-matérialistes, jamais ils ne comprendront ces lignes de Lucrèce, ce grand auteur romain du premier siècle avant notre ère :

« Souvent, au seuil d’un temple magnifiquement décoré, au pied d’un autel où brûle l’encens, un jeune veau tombe immolé et de sa poitrine jaillit une source chaude de sang ; sa mère cependant, restée seule, parcourt les vastes bois cherchant à reconnaître sur le sol l’empreinte de ses sabots fendus ; elle jette des regards en tous lieux, elle espère y découvrir le petit qu’elle a perdu ; elle emplit de sa plainte le bocage feuillu, à l’orée duquel elle s’arrête, puis à tout instant revient visiter l’étable, son cœur de mère percé de regrets. 

Ni les tendres pousses des saules, ni les herbes que vivifie la rosée, ni les fleuves coulant à pleins bords, ne sont capables d’attacher son esprit, ni de détourner le souci qui l’occupe ; les autres veaux qu’elle voit dans les gras pâturages n’ont pas le pouvoir de la distraire et d’alléger sa peine : tant il est vrai qu’elle recherche un bien qui lui est propre et qu’elle connaît entre tous.

Les chevreaux aussi, dont la voix tremble, savent reconnaître leurs mères cornues ; les agneaux bondissants distinguent le bêlement des brebis : ainsi le veut la nature, chacun accourt à la mamelle qui lui donne son lait ».

Telle est la nature, encore faut-il la reconnaître ! Et ce n’est pas pour rien que les fanatiques du turbocapitalisme, de l’idéologie LGBT, trans et autres échappées illusoires éprouvent le plus grand mépris pour les animaux. Les animaux sont naturels et c’est incompatible avec leur idéologie anti-naturelle.

C’est l’alternative de toute une époque. Soit on reconnaît le réel, et on salue donc forcément le couple de loutres sur la berge… soit on le nie et on considère que tout ce qui existe dépend de sa propre conscience, que l’esprit est séparé de la matière, même de son corps.

Ceux qui reconnaissent le réel reconnaissent donc la planète comme Biosphère, ceux qui le nient réduisent la réalité à leur nombril.

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La candidature d’Anasse Kazib

Le style trotskiste argentin apporte-t-il un air frais ?

En présentant Anasse Kazib à la présidentielle, le « courant communiste révolutionnaire » du Nouveau Parti Anticapitaliste, dont le média est Révolution permanente, va au clash avec l’organisation mère. De son côté le NPA présente Philippe Poutou pour la troisième fois. C’est surtout un pari pour les premiers : celui de parvenir à fonder une nouvelle organisation à l’extrême-gauche, qui soit en mesure d’être moderne, dans l’air du temps et de prendre une large place dans le camp des travailleurs.

Par moderne, il faut clairement entendre quelque chose d’opposé à la Gauche historique. L’idée, c’est de combiner les gilets jaunes, le mouvement « black lives matter », les revendications sociales, les exigences sociétales LGBT, le combat contre « l’islamophobie »… en parvenant (sous une forme inversée) à une « dialectique des secteurs d’intervention », pour reprendre l’expression résumant la stratégie de la Ligue Communiste Révolutionnaire. La différence est que la Ligue Communiste Révolutionnaire dispersait ses militants dans les luttes, dans toutes les directions, dans les années 1980-1990, en espérant que tout se fasse écho. Là, il s’agit de donner un centre à un mouvement éparpillé, de construire l’organisation dans le feu de l’action.

Qui s’intéressera au fond théorique de l’approche peut lire « La catastrophe capitaliste et la lutte pour une organisation mondiale de la révolution socialiste », le manifeste trotskyste à l’origine de la démarche, ou bien se renseigner sur l’Argentin Nahuel Moreno, à l’origine de la variante dite « moréniste » du trotskisme. On parle ici d’une scission du courant dit « pabliste », terme venant de Michalis Raptis dit Pablo, qui a posé les bases de l’idéologie de la Ligue Communiste (Révolutionnaire) française, avant un recentrage.

Tout cela est bien compliqué, mais on peut voir les choses plus simplement. Il y a un grand vide politique : la Gauche française est hors-service. Il y a bien des partis électoralistes et une petite agitation militante, mais c’est sans valeur aucune historiquement, surtout alors que la crise arrive. Il y a donc l’exigence d’établir quelque chose de fort.

Et là, il n’y a pas 36 options. Soit on dit qu’il faut partir du parcours français, du mouvement ouvrier dans ses acquis et on entend réaffirmer la base qui a été corrompue pour X ou Y raisons. C’est la ligne de reconstruction d’un Parti Communiste, avec une évaluation différente de la période et de la source de la corruption, des communistes patriotiques du PRCF, des marxistes-léninistes du PC-RF et des maoïstes du PCF(MLM).

Soit on dit qu’il faut se fonder sur une tendance internationale, car la révolution est mondiale de manière immédiate, et surtout permanente. C’est le choix fait par le courant communiste révolutionnaire du NPA, qui propose ni plus ni moins que de reformer une organisation trotskiste de masse, prenant le relais de feu la LCR, feu le Parti Communiste Internationaliste… mais pas feu Lutte Ouvrière, qui est parvenue à se maintenir. Mais comme Lutte Ouvrière n’est pas mouvementiste, il y a une place à prendre, en théorie.

Il faut pour cela que cela soit juste, ou du moins que cela corresponde à un style français. Et on sait comment le trotskisme, avec son militantisme para-syndical révolutionnaire en mode léniniste, a eu un très important succès dans notre pays, depuis les années 1930 jusqu’aux années 2010. Le style argentin – car le courant communiste révolutionnaire du NPA est très clairement porté par la maison mère argentine – viendrait donc réactiver cela.

On va vite savoir si c’est le cas. Soit dans six mois un an, le pari est réussi et il y a une nouvelle organisation trotskiste avec un véritable écho populaire. Soit ce n’est qu’une illusion « activiste » déconnectée de la réalité nationale française.

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Tribune: « Anasse Kazib doit pouvoir se présenter à la présidentielle 2022 ! »

Un appel à soutenir le candidat d’une tendance du NPA.

On notera la présence dans la liste de soutien de Jean-Marc Rouillan, ancien membre de l’organisation armée Action Directe, qui s’était déjà totalement reconverti en rejoignant le Nouveau Parti Anticapitaliste.

« Depuis un an, le climat politique en France est marqué par l’offensive sécuritaire, raciste et liberticide initiée par le gouvernement. De la loi sécurité globale à la loi séparatisme en passant par l’instrumentalisation de l’ignoble assassinat de Samuel Paty, les attaques contre les droits démocratiques et les militants qui les défendent s’enchaînent. Ce choix politique a ouvert la voie à des phénomènes aussi réactionnaires que la tribune des militaires ou les appels au meurtre de militantes et militants de gauche lancés par des youtubeurs d’extrême-droite.

D’ores et déjà, la majeure partie des forces politiques travaille activement à faire de la sécurité, de l’immigration ou des déficits engendrés par les milliards de cadeaux au patronat le cœur des débats. Autant de thématiques en décalage total avec les préoccupations de la population, après plus d’une année d’une pandémie qui a mis en lumière les conséquences des politiques austéritaires, notamment à l’hôpital.

A l’issue d’un quinquennat marqué par des mobilisations historiques, du mouvement des Gilets jaunes à la grande grève contre la réforme des retraites en passant par le mouvement étudiant contre la sélection en 2018, le déferlement écolo de la jeunesse en 2019 ou encore les mobilisations antiracistes de juin 2020, celles et ceux qui ont pris la rue et constitué la principale opposition au gouvernement et à l’extrême-droite risquent fort d’être évincés du tableau de l’élection.

Ce décalage entre un scrutin qui vise à élire un monarque présidentiel, incarnation suprême des traits les plus bonapartistes de la Vème République, et la situation de la majorité de la population, n’est en rien une surprise. Il n’est qu’une nouvelle expression d’un régime conçu pour empêcher ou limiter au maximum la représentation des travailleuses, des travailleurs et des classes populaires, dans toute leur diversité. Les fameux « 500 parrainages », filtre puissamment anti-démocratique visant à limiter la possibilité de faire entendre une autre voix dans l’échéance électorale centrale du pays, sont une des incarnations de cette logique.

Malgré ces obstacles, Anasse Kazib a annoncé son intention de se présenter à la prochaine élection de 2022. Non pas qu’il pense que ce sont des élections qui changeront la vie, mais parce qu’une voix radicalement alternative doit pouvoir s’y exprimer. Cheminot, figure de proue des luttes qui se sont succédé depuis 2016, fils de chibani et petit-fils de tirailleur marocain ayant grandi dans la cité rose de Sarcelles, il est l’un des visages d’une nouvelle génération militante qui rassemble le combat contre un système capitaliste profondément injuste et la lutte contre le racisme, le sexisme et la destruction de la planète. Il a également été l’un des premiers, au sein du mouvement ouvrier organisé, à soutenir le mouvement des Gilets jaunes.

En pleine offensive sécuritaire et alors que le rôle central des travailleurs et travailleuses a été mis en lumière par la crise sanitaire, sa présence à l’élection permettrait de contrecarrer l’entreprise d’étouffement de la parole populaire. Sa voix permettrait d’offrir un peu d’espoir à toutes celles et à tous ceux qui, dans les hôpitaux, les entreprises, les gares, les quartiers populaires, les écoles, les territoires, refusent les discours mortifères des politiciens professionnels. Elle constituerait, dans la foulée du mouvement Black Lives Matter qui a embrasé le monde il y a un an, un petit événement, comme première candidature d’un militant du monde du travail, issu de l’immigration maghrébine et africaine, à la présidentielle en France.

Au-delà des propositions politiques précises qui seront portées par Anasse, nous nous prononçons pour qu’il puisse être candidat à l’élection présidentielle et invitons toutes celles et tous ceux qui le peuvent à contribuer à rendre cela possible. En aidant à faire connaître sa campagne, en la soutenant financièrement et, surtout, en l’aidant à obtenir les 500 parrainages nécessaires.

Premiers signataires :

Frédéric Albert, délégué CGT Total sur la plateforme pétrochimique de Carling

Fernande Bagou, ex-gréviste d’Onet-SNCF

Allan Barte, dessinateur

Savine Bernard, avocate en droit du travail

Ahmed Berrahal, délégué CGT RATP

Taha Bouhafs, journaliste

Sidi Boussetta, militant CGT

Youcef Brakni, militant antiraciste

Adrien Cornet, délégué CGT Total Grandpuits

Florent Coste, délégué CGT Latécoère

Karim Dabaj, cheminot syndicaliste

Quentin Dauphiné, syndicaliste enseignant

Thierry Defresne, délégué syndical central CGT Total

Vikash Dhorasoo, ancien footballeur international

Serge D’Ignazio, photographe

Gaëtan Gracia, délégué CGT Ateliers de Haute-Garonne

Sylvain Grandserre, auteur, maître d’école

Kamel Guémari, ancien syndicaliste chez McDonald’s, membre fondateur de l’Après-M

Oumou Gueye, ex-gréviste d’Onet-SNCF

Simon Hallet, délégué CGT Thiolat Packaging

Kaoutar Harchi, écrivaine, sociologue

Xavier Hatterer, militant CGT à Leroy Merlin Mulhouse

Almamy Kanouté, activiste politique

Mara Kanté, militant antiraciste

Rozenn Kevel, étudiante, ex-salariée de Chronodrive et militante CGT Chronodrive

Reynald Kubecki, militant syndical CGT au Havre

Aude Lancelin, journaliste

Olivier Long, peintre, maître de conférence à l’Université Paris 1

Matthieu Longatte, auteur et comédien

LouizArt, photographe

Léa Michaelis, photographe

Mélanie N’Goye Gaham, gilet jaune membre du collectif Les Mutilés pour l’Exemple

Jean-Joseph Omrcen, machiniste à l’opéra de Paris et militant syndical

Christian Porta, délégué CGT Neuhauser et gilet jaune

Lissell Quiroz, historienne, professeure à l’Université de Cergy

Jean-Marc Rouillan, militant, ancien membre d’Action Directe, écrivain

Alaixys Romao, footballeur international

Mouloud Sahraoui, délégué CGT Geodis

Christophe Schirch, délégué CGT dans la sous-traitance automobile

Soumeya, rappeuse

Fred Sochard, dessinateur

Assa Traoré, comité La vérité pour Adama

Audrey Vernon, comédienne

Sasha Yaropolskaya, militante, journaliste, fondatrice de XY Média

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Le Courant Communiste Révolutionnaire veut former un Parti trotskiste

Ce courant est en train de rompre avec le Nouveau Parti Anticapitaliste.

C’est une polémique concernant un secteur bien particulier de la Gauche, mais dont la nature préfigure peut-être un thème important de demain. Il s’agit en effet de la question du « Parti », c’est-à-dire de l’organisation centralisée autour de principes bien déterminés. Le thème du Parti avait largement disparu ces dernières années, ou plus exactement ces dernières décennies. Il réémerge lentement mais sûrement, avec des organisations plus ou moins restreintes mais toutes se proposant comme un « canal » vecteur des bases de ce que doit être un Parti (on parle principalement ici du PRCF, du PCRF et du PCF(mlm), prenant respectivement comme modèle le PCF des années 1970-1980, des années 1960-1970 et des années 1940-1950).

La polémique dont on parle ici concerne le Nouveau Parti Anticapitaliste, dont une tendance, le Courant Communiste Révolutionnaire qui publie Révolution permanente, est en train de se faire dégager pour avoir clairement pris trop d’autonomie. Cependant, il y a à l’arrière-plan une conception fondamentalement différente de la notion de « Parti ». Le NPA assume de ne pas assumer cette forme, dans la tradition de la « Ligue Communiste Révolutionnaire » dont elle est issue, alors que le Courant Communiste Révolutionnaire prône de plus en plus l’établissement d’un Parti de type trotskiste.

Voici un extrait d’une critique faite à une autre tendance du NPA, L’étincelle (issue de Lutte Ouvrière où elle fut l’opposition de 1996 à 2008), qui publie Convergences Révolutionnaires. Le principe d’un NPA « abri » des courants trotskistes en perdition depuis dix ans est dénoncé au profit d’une réaffirmation idéologique assumée. C’est la ligne de la Fraction Trotskyste pour la Quatrième Internationale à la quelle appartient le Courant Communiste Révolutionnaire. Cette tendance troskiste est issue d’une scission de 1988 du courant trotskiste dit « moreniste » (de l’Argentin Nahuel Moreno).

« De notre point de vue, après plusieurs années de lutte de classes et de l’émergence d’une nouvelle génération ouvrière, en partie jeune et n’ayant pas sur ses épaules les défaites du passé, nous pensons qu’il existe en France un espace pour la construction d’une organisation révolutionnaire qui se propose de regrouper le meilleur de cette avant-garde autour d’un projet politique révolutionnaire clair et offensif.

Votre affirmation selon laquelle il n’y a pas encore les conditions pour la construction d’un parti révolutionnaire, en plus d’être anti-léniniste, permet surtout d’évacuer d’un revers de main tout bilan de ces dernières années de la lutte des classes et les expériences de construction des uns et des autres.

Ce n’est en aucun cas de l’auto-proclamation que de dire que ce n’était pas une fatalité que de passer à côté de tous ces phénomènes, de la loi travail aux gilets jaunes, en passant par la grève contre la réforme des retraites, ou encore les mobilisations antiracistes de la jeunesse.

Le renforcement du CCR, qui en 2016 était un petit noyau de militants essentiellement étudiants, est pour nous la démonstration, certes modeste et insuffisante au regard des défis qui sont les nôtres, qu’il n’était pas impossible de réussir à organiser quelques secteurs de cette avant-garde, à condition d’avoir un projet politique révolutionnaire et clairement délimité.

De notre point de vue, si le NPA avait eu dans son ensemble cette stratégie et cette politique, la réalité de l’extrême-gauche aujourd’hui pourrait être bien différente de la situation actuelle.

La routine de la diff de boîte et des discussions avec les collègues autour de la machine à café dont vous revendiquez un savoir-faire millénaire n’est heureusement pas la seule façon de militer et la classe ouvrière mérite davantage d’audace et de créativité de la part des révolutionnaires à un moment où la crise capitaliste va très probablement donner lieu à des explosions sociales encore bien plus importantes que celles auxquelles nous avons pu assister depuis 2016.

Elle mérite aussi une organisation politique qui soit autre chose qu’une succursale vaguement anticapitaliste de LFI, ou même un parapluie commun (de plus en plus étroit) censé protéger différentes petites chapelles trotskistes des intempéries de la réalité.

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« La catastrophe capitaliste et la lutte pour une organisation mondiale de la révolution socialiste »

Un manifeste d’un mouvement trotskiste international.

« La catastrophe capitaliste et la lutte pour une organisation mondiale de la révolution socialiste » est le manifeste de la Fraction Trotskyste-Quatrième Internationale. En France, c’est le Courant Communiste Révolutionnaire du Nouveau Parti Anticapitaliste qui la représente. En voici un résumé des thèses, en considérant qu’il est toujours intéressant de se tourner vers le document complet (par ailleurs très long).

Conformément à la tradition trotskiste il faut une Internationale pour relier les groupes actifs.

« La crise économique, sociale et politique ainsi que le dynamisme de la lutte des classes à échelle internationale renforcent l’urgence de la nécessité d’avancer dans la construction d’un Mouvement pour une Internationale de la révolution socialiste. »

Il y a une nouvelle génération porteuse de luttes.

« Le manifeste que nous publions aujourd’hui, rédigé par la Fraction Trotskyste – Quatrième Internationale, se propose de relancer le débat sur la nécessité d’un Mouvement pour une Internationale de la révolution socialiste. Il s’adresse à l’avant-garde de la jeunesse, du monde du travail et de tous les opprimés qui a pris part aux récentes vagues de rébellions populaires et aux grèves générales dans différents pays. Il s’adresse à celles et ceux qui ont été à la tête de luttes emblématiques comme Black Lives Matter aux Etats-Unis, comme la rébellion populaire chilienne, la lutte contre le coup d’État en Bolivie, la lutte des Gilets jaunes et les grandes grèves contre la réforme des retraites en France, la lutte du mouvement des femmes dans le monde entier, les occupations de terre, les grèves et les blocages (…).

De nouvelles générations ont émergé au cours des combats de ces dernières années, tant dans le cadre de mobilisations ouvrières qu’autour de revendications spécifiques du mouvement des femmes, qui a connu des avancées fondamentales en termes de capacité de lutte et d’organisation. D’autres mouvements ont également gagné en importance, à l’instar de la mobilisation contre la crise écologique, au sein de laquelle la jeunesse joue un rôle central »

La crise a commencé en 2008.

« La pandémie a conduit à un saut dans la crise économique mondiale, qui était irrésolue depuis 2008, après la faillite de Lehman Brothers. Une fois de plus, les États ont sauvé leurs entreprises alors que des millions de personnes perdaient leur emploi ou étaient obligées de travailler dans des conditions précaires (…).

Les nouveaux secteurs de la jeunesse, des femmes et du monde du travail qui aujourd’hui commencent à lutter pour un ensemble de revendications dont la résolution intégrale et définitive est impossible dans le cadre du capitalisme, peuvent être le point d’appui pour une nouvelle recomposition de la gauche révolutionnaire à échelle internationale.

Nous nous référons tout particulièrement à ce que l’on appelle aujourd’hui la « génération Z », composée de jeunes âgés de 16 à 23 ans et qui avaient moins de 10 ans lorsque la crise de 2008 a éclaté. »

La classe ouvrière doit s’allier aux « secteurs opprimés ».

« A travers différents mécanismes, allant de l’annualisation des heures de travail, la constitution de comptes-temps dans les entreprises et d’autres outils de précarisation et d’attaques contre les conquêtes du monde du travail, le capitalisme a démontré qu’il ne développe la technologie qu’à condition que celle-ci permette d’accroître ses profits, et non en fonction des besoins de la population.

Cette puissance sociale du monde du travail ne peut gagner que si elle entreprend de liquider le capitalisme impérialiste. Sur cette voie, elle doit s’articuler politiquement avec les revendications de l’ensemble des secteurs opprimés (…).

Depuis le Collectif inter-gares [en France], hérité de la grande grève ferroviaire de 2018, et le Comité Vérité et Justice pour Adama, nous avons défendu, dès les premières actions des Gilets jaunes, ce qui s’est appelé le « Pôle Saint-Lazare ». Ce pôle de travailleurs, de jeunes et de secteurs des quartiers populaires, appelait à marcher ensemble, depuis la gare Saint-Lazare, pour ensuite rejoindre les Gilets jaunes et manifester avec eux, sur la base de ses propres revendications (…).

Dans le même sens, nous entendons souligner l’importance qu’il y a à articuler les combats du monde du travail aux mouvements des femmes et des personnes LGBTI qui se sont massivement développé, à travers le monde. »

La défense des libertés démocratiques est un axe essentiel.

« En tant que révolutionnaires, nous luttons pour une démocratie ouvrière basée sur les organes d’autodétermination des masses exploitées. Nous nous situons en première ligne de la lutte contre toute attaque contre les libertés démocratiques. Dans l’État espagnol, aux côtés de nos camarades du Courant Révolutionnaire des Travailleuses et Travailleurs (CRT), nous avons défendu les revendications légitimes du mouvement démocratique en Catalogne pour le droit à l’autodétermination qui s’est exprimé ces dernières années à travers de multiples manifestations de masse, des mobilisations de la jeunesse et le référendum du 1er octobre 2017. »

Le Programme de transition de Léon Trotski est valide à condition de l’actualiser.

« Les revendications les plus immédiates que nous avons mises en avant doivent s’articuler à d’autres, de caractère transitoire anticapitaliste. Elles doivent chercher à construire un pont entre la conscience actuelle des masses et l’objectif du socialisme de façon à garantir de manière pleine et entière la mise en place des revendications que pose le développement de la lutte des classes. La crise du logement conduit à l’expulsion de millions de familles pauvres de leur domicile, avec la complicité des forces de répression.

Face à cela, nous exigeons l’expropriation des logements vides du parc immobilier contrôlé par les grandes entreprises de façon à répondre à cette crise. Nous exigeons également, entre autres, la nationalisation des entreprises stratégiques sous contrôle ouvrier dès lors que ces entreprises augmentent les tarifs des services dans les quartiers populaires. A travers ce programme, nous cherchons à unifier les revendications du monde du travail et à encourager le développement des luttes sectorielles en les liant à une lutte généralisée contre le gouvernement et l’État.

Les problèmes d’articulation entre les revendications de classe et celles d’autres secteurs populaires ont également été abordés par Léon Trotsky, dans les années 1930, dans sa théorie de la révolution permanente et dans le Programme de transition. Le monde d’alors était plus agraire et rural et moins urbain et industriel qu’aujourd’hui. La théorie de la révolution permanente n’oppose pas la lutte pour des revendications sociales ou démocratiques spécifiques à la révolution et au socialisme. Bien au contraire. En soulignant l’importance de ces revendications comme moteurs de la mobilisation des masses, elle rappelle que leur application intégrale et définitive est impossible si on la détache d’une lutte contre le capitalisme qui vise à en finir avec la propriété privée des moyens de production et qui conduise la société vers le communisme. »

La tentative de se tourner vers les mouvements populistes de gauche a été une erreur.

« Les expériences telles que celle du gouvernement Syriza, qui a appliqué le plan d’ajustement de la Troïka, ou de Unidas PODEMOS, qui s’est transformé en une béquille du PSOE au gouvernement, ont montré que les tentatives de canaliser les luttes sociales avec des formations politiques opportunistes, qui proposent des réformes minimales dans les cadres du système en éludant toute remise en cause de la propriété capitaliste, est le meilleur moyen pour que les revendications de ces mouvements soient écrasées ou détournées. »