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Politique

La Gauche et la question syndicale fin janvier 2020

La grève lancée par les syndicats le 5 décembre 2019 se transforme en échec complet et la question de leur rapport à la Gauche revient logiquement à la surface. La politique reprend ses droits et les points de vue sont assez variés.

Comme la grève a été surtout portée par la CGT, celle-ci est au cœur de l’attention… ou pas. Tout est justement une question de valorisation de celle-ci ou non. Du côté du Parti Communiste Révolutionnaire de France, qui se revendique pour résumer du PCF des années 1960, il n’y a de la place que pour la CGT et si défaite il doit y avoir, c’est en raison de son manque de force. En l’occurrence, c’est la CFDT qui a le mauvais rôle :

« La CFDT n’a donc jamais basculé dans la trahison de classe, puisqu’elle a toujours été une organisation syndicale de collaboration de classe. »

L’idée tient debout, mais paradoxalement l’explication est assez alambiquée. La CFDT est à la base la CFTC, le syndicat chrétien. Mais l’article ne dénonce pas la CFDT comme son prolongement, elle attribue au groupe Reconstruction (qui a impulsé la transformation en CFDT) l’objectif de « créer un syndicat capable de rivaliser et d’écraser la CGT » au moyen de la ligne autogestionnaire. Ce n’est toutefois pas vrai. Reconstruction a toujours assumé à la fois de ne pas être communiste et de ne pas être anticommuniste. La CFDT, ce n’est pas Force Ouvrière (qui elle est ouvertement anticommuniste).

Ce qui compte évidemment toutefois, c’est la dénonciation de la CFDT. C’est une tendance omniprésente du côté de ceux soutenant la CGT. On ne la trouve toutefois pas du côté des anarchistes, qui ont eux vu des tendances intéressantes dans la démarche de la CGT, une sorte de retour aux sources. L’Union Communiste Libertaire y consacre un long article où une circulaire interne de la CGT est même présentée comme le parfait manuel du syndicaliste autogestionnaire. Ce qui revient à dire que la CGT est devenue la CFDT des années 1970. L’article demande même que les sections syndicales soient revivifiés. Il y a beaucoup d’espoir dans une « nouvelle » CGT :

« Dans la CGT, les débats sont ouverts, et ils le sont tout autrement qu’il y a dix ans, si l’on compare la gestion confédérale de Thibault en 2010, refusant explicitement d’accélérer vers la généralisation, et les appels de Martinez en 2020, qui peinent hélas à être suivis. La reconstruction d’un syndicalisme de combat commence aujourd’hui ! »

On a aussi quelque chose d’intéressant avec le dernier éditorial des bulletin d’entreprises de Lutte Ouvrière. Ce mouvement trotskiste a une double tradition : d’un côté rejoindre les syndicats, de l’autre ne pas trop chercher à les mettre en avant. La raison est simple à comprendre : il est considéré que la direction bureaucratique des syndicats est trop pesante et que s’il faut être dans les syndicats, il est nécessaire à un moment de les déborder pour parvenir à quelque chose.

C’est une ligne inspirée du Programme de transition de Léon Trotsky et qui tient également à l’origine de l’organisation, née à Renault d’un comité de grève extérieur à la CGT. Ce mouvement extérieur à la CGT (et au PCF) rejoindra ce qui donnera alors Force Ouvrière. Bien de l’eau a coulé sous les ponts depuis, mais c’est une tradition qui est restée.

Et que voit-on justement ? Qu’il est parlé de « l’exaspération des classes populaires », de la « colère » dans les entreprises privées qui va finir par éclater. L’éditorial a même comme titre « Les travailleurs ont commencé à rendre les coups, il faut continuer ! ». Cependant, l’éditorial ne mentionne pas une seule fois la CGT ! Même le mot « syndicat » n’est pas présent. C’est bien sûr un choix effectué sciemment et il l’est même depuis le départ du mouvement. Il n’y a aucune confiance en la CGT.

Pour résumer, ces trois points de vue sont parfaitement représentatifs des points de vue actuels. Il y a ceux pour qui la CGT doit être renforcée pour maintenir ses positions. Il y a ceux pour qui la CGT s’est lancée dans quelque chose l’amenant à se transformer. Il y a ceux qui n’ont pas confiance en la CGT, car ils n’ont jamais eu confiance en elle de toutes façons.

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Écologie

Journée mondiale des zones humides dimanche 2 février 2020

Comme chaque année, le 2 février marque l’anniversaire de la convention de Ramsar (en Iran) en 1971, qui a établi un traité international censé protéger les zones humides et une organisation internationale permanente à ce sujet. Dans les faits, cette convention n’a que peu de valeur tant les zones humides ont été souillées partout dans le monde ces 49 dernières années. Ainsi, la journée mondiale des zones humides est chaque année un événement passant inaperçu, alors que ce devrait être une date majeure du calendrier écologiste.

Le thème de cette année pour la journée mondiale des zones humides qui aura lieu ce dimanche 2 février 2020 est «  zones humides et biodiversité ». Voici la vidéo présentée par la Secrétaire générale de la convention Ramsar pour l’occasion :

https://www.youtube.com/watch?v=FknLfqzjD9o

Ce discours est forcément intéressant et positif. On ne peut cependant qu’être mal à l’aise quant au décalage qu’il y a entre la gravité ainsi que l’urgence du propos exprimé ici, notamment au sujet de la feuille de route mondiale de la biodiversité en 2020, et le déni total dans laquelle se déroule la journée mondiale des zones humides.

Ce déni est à l’image de la convention de Ramsar elle-même, qui est piétinée par les États censés la reconnaître. En France, c’est la loi sur l’eau qui applique les engagements de cette convention sur les zones humides : cette loi est contournée presque chaque jour, pour construire sur des zones humides tel pont de quatre voies ou tel centre commercial, alors que cela ne devrait même plus être possible légalement.

L’affirmation de la Secrétaire générale de la convention de Ramsar Martha Rojas Urrego disant « plus aucune zone humide ne doit disparaître » devrait être un mot d’ordre indiscutable pour l’écologie pour les nouvelles générations de défenseurs de la terre qui forcément vont émerger durant ces années 2020.

C’est, avec la lutte contre le réchauffement climatique et la question animale, un des trois piliers de l’écologie. C’est quelque chose de concret, à la fois global mais aussi très local, car il y a partout dans le pays des zones humides qu’il faut défendre.

On retrouvera sur le site gouvernemental zones-humides.org, qui ne fait pas grand-chose pour promouvoir cette journée, une liste d’événements ayant lieu partout dans le pays :

> zones-humides.org/agir/ramsar-et-la-journee-mondiale-des-zones-humides/espace-visiteurs-carte

Les événements recensés n’ont pas forcément lieu ce dimanche 2 février 2020, mais également dans les semaines à venir.

La journée mondiale des zones humides est organisée par les associations et organisations suivantes :

Association Ramsar-France ;

Agence française pour la biodiversité ;

Pôles-relais zones humides ;

Ligue pour la protection des oiseaux ;

Société nationale de protection de la nature ;

Réseau Ecole et nature.

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Guerre

Le plan de Trump pour le conflit israélo-palestinien

Donald Trump a présenté, en compagnie des dirigeants israéliens mais d’aucun palestinien, une solution dite à deux États pour la région. Dans les faits, les zones palestiniennes sont encore plus réduites géographiquement et avec comme seul horizon de pouvoir de servir de réserves de main d’œuvre et de consommation.

Depuis 1948, la Gauche oscille entre plusieurs positions au sujet du conflit israélo-palestinien. Que le sionisme soit une utopie identitaire séparée de l’idéal socialiste, cela a toujours été clair pour le mouvement ouvrier. Le fait qu’une partie significative du mouvement sioniste se soit défini comme une composante elle-même du mouvement ouvrier n’y a rien changé.

Puis, la Seconde Guerre mondiale et ses crimes antisémites a modifié la donne ; il y a eu un basculement concret. Ainsi, la reconnaissance de l’État d’Israël par l’ONU n’aurait jamais pu avoir lieu sans l’appui de l’URSS et des pays de l’Est lui étant liés. L’URSS est d’ailleurs le premier pays à avoir reconnu Israël. C’est également la Tchécoslovaquie qui a vendu les armes permettant à l’État israélien de tenir dans la guerre commençant dès sa fondation.

Cette guerre ne s’est jamais terminée et d’autant moins qu’Israël a immédiatement choisi de se mettre sous direction américaine. Car derrière l’image des colons transformant le pays pour le fructifier, il y a une manne financière américaine énorme, et ce jusqu’à aujourd’hui. L’économie est d’ailleurs dans les mains d’une vingtaine de familles d’un côté, des entreprises américaines de l’autre, et cela pour le commerce, les services, l’agriculture, le transport, l’industrie comme la finance, etc.

Joseph Alpher : Settlements and Borders, Centre Jaffee d’études stratégiques, université de Tel-Aviv, 1994.

Le prix de ce qu’on y achète contient une part de 20-30 % allant droit dans les poches de ces entreprises de dimension monopolistique. Il s’agit d’ailleurs même souvent de conglomérats, tel IDB Holdings, regroupant une des deux compagnies d’assurance, la plus grande chaîne de la grande distribution, le plus grand opérateur de télécom, l’un des trois plus grands propriétaires dans l’immobilier, le monopole du ciment, le monopole du papier, etc.

De manière officielle, 1,8 millions d’Israéliens (sur 9 millions) vivent sous le seuil de pauvreté et ce alors que le revenu moyen a doublé en quinze ans. C’est que l’État israélien, loin de ses prétentions utopistes initiales, fonctionne à marche forcée. Une marche forcée dans la technologie militaire, dans l’élargissement territorial, avec un nationalisme à outrance désormais ouvertement allié à la religion.

Il n’y a aucune place possible pour la Gauche dans une telle situation, et ce depuis le départ, puisque le fondement même est une fuite en avant. Le plan de paix de Donald Trump en est d’ailleurs le prolongement assumé, puisqu’il s’agit de faire pleuvoir des milliards de dollars sur une sorte de micro-Palestine satellisée et divisée, afin de la rendre fonctionnelle pour l’État israélien.

Cela a une chance de réussir, malgré tout, parce que les Palestiniens sont dans une situation dramatique. Trompée par l’opinion internationale qui fait semblant de s’intéresser à eux – en particulier avec un antisionisme irrationnel, souvent masque de l’antisémitisme – les Palestiniens sont terriblement divisés et aux mains soit d’une OLP corrompue au maximum, soit d’islamistes. Leur capacité d’affirmation démocratique unitaire est pour cette raison terriblement faible. La résistance des années 1960 et 1970 avait permis l’émergence d’une conscience nationale, mais celle-ci déjà faible est désormais désagrégée, détournée.

Entre le sionisme (désormais religieux) étouffant toute perspective démocratique et un camp démocratique pratiquement inexistant du côté palestinien, c’est un véritable drame historique. C’est là dessus que veut jouer Donald Trump, aux dépens bien entendu de tous les réfugiés palestiniens qui sont trois millions dans des camps dans les pays voisins et qui sont censés disparaître comme par enchantement.

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Société

Coronavirus: le rapatriement des français de Wuhan, une grande légèreté

Depuis le mois de décembre, une épidémie de coronavirus sévit en Chine. Le décompte hier soir 28 janvier 2020 était de 106 décès, tandis que des cas se déclarent dans de nombreux autres pays, y compris en France où 4 cas sont recensés. Le nombre important des français voulant rentrer de Wuhan, le foyer de l’épidémie, tout comme les précautions sanitaires insuffisantes de la France, montrent un bas niveau de l‘esprit collectif dans notre pays.

La ministre de la santé Agnès Buzyn a annoncé dimanche 26 janvier l’organisation du retour des français de Wuhan souhaitant quitter le sol Chinois. Finalement, ce sont deux avions qui ont été annoncé par la Commission européenne pour rapatrier 250 Français et une centaine d’autres citoyens européens, avec un premier départ aujourd’hui.

Ce sont donc presque 800 français qui vivent et font des affaires à Wuhan qui souhaitent maintenant rentrer, pas peur du virus mais aussi parce qu’il est dur de supporter les contraintes de l’isolement lorsque l’on est habitué à un mode de vie de type affairiste/mondain.

Le fait que, parmi les gens qui demandent à rentrer, il existe des personnes qui hésitent à rentrer « en raison du confinement » illustre bien une absence de l’esprit collectif, social, nécessaire pour limiter le risque de contamination au reste de la population.

Ce n’est pourtant pas étonnant d’avoir ce genre de mentalité chez les « expatriés », des gens travaillant dans le vin, la mode, l’industrie automobile, c’est à dire une bourgeoisie française bien éloignée des considérations de bien commun.

Pour ce qui est des retours de séjours « courts », depuis quelques jours, les états renforcent les contrôles sanitaires des avions arrivant de Chine. Pour de nombreux pays comme la Russie ou la Turquie, il s’agit de détecter à la caméra thermique les personnes pouvant avoir de la température.

La France, de son côté, est pointée du doigt pour la légèreté de ses contrôles qui n’en sont pas. Il s’agit en fait de prévention, les mêmes précautions que ce qui peut être vu ou entendu aux informations.

Le relativisme qui caractérise les français s’exprime ici, avec Agnès Buzyn qui balaye d’un revers de la manche les dispositifs de détection de température, au prétexte qu’ « une personne ayant pris du Doliprane ne présentera pas de fièvre ».

Cet argument est d’une grande bêtise assumant de passer à côté de personnes fiévreuses ne ressentant pas encore de gêne au prétexte que d’autres seraient indétectables.

Il y a donc logiquement une méfiance dans la population française à l’égard du retour des expatriés, car le principe de quarantaine c’est justement de minimiser au maximum les axes de contagion de ce coronavirus.

Les rapatriements ne sont pas des mesures sanitaires mais un compromis entre diplomatie, droit individuel et salubrité collective.

Aussi, lorsque l’on voit le manque de sérieux des contrôles sanitaires à l’arrivée des vacanciers en provenance de Chine, on se demande si la quarantaine des expatriés sera bien solide.

La question de la gestion du coronavirus en France dépasse le simple aspect technique du manque de moyens dans les contrôles.

Il y a aussi une question culturelle, qui est celle du relativisme à la française. On le voit par exemple dans le rapport des français à la bise. Même en plein épisode viral, impossible de faire l’impasse sur la bise aux collègues, aux amis… Alors que ce serait la plus sage décision à prendre.

On ne verra par contre jamais un français ayant la grippe mettre un masque pour ne pas la transmettre, il ira même au travail avec de la fièvre pour prouver qu’il est plus fort que cela.

Mais dans une société il y a des personnes pour qui des petits virus deviennent des menaces de mort. Mais ces gens là n’existent pas dans une société basée sur la compétition et l’individualisme.

Ne pas succomber à la légèreté face aux petites et grandes épidémies, c’est au contraire faire preuve d’un esprit socialiste. Et c’est cela que doit porter la Gauche.

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Politique

75 ans après la libération d’Auschwitz: l’antisémitisme qui n’en finit pas

Le 75e anniversaire de la libération d’Auschwitz par l’Armée rouge a été salué un peu partout, avec une grande pudeur, un sens réel de la justesse. Avec une arrière-pensée présente partout : on y arrive pas, cet antisémitisme, on ne s’en débarrasse pas, il reste outrageusement présent. Comment faire ?

Tout a été essayé ou presque contre l’antisémitisme, y compris le portrait guignolesque à travers Eric Cartman dans la série South Park. Mais on ne s’en sort pas, l’antisémitisme réapparaît toujours, vague après vague.

L’épisode de la quenelle avec Dieudonné a rappelé ici un point indiscutable. Plus on est éduqué, moins on est antisémite. L’antisémitisme est, en France, quelque chose de populaire. C’est une constante anecdotique mais ressurgissant par vague, de par son utilité : celui d’être un anticapitalisme romantique.

En ce sens, « l’antisémitisme est le socialisme des imbéciles », même si August Bebel, figure de la social-démocratie allemande à qui on attribue cette phrase à la fin du XIXe siècle, n’a jamais prononcé cette phrase. Car pour lui il n’y a pas de socialisme des imbéciles, il y a le socialisme et il y a le reste. L’antisémitisme est une révolte dévoyée et en ce sens il faut la remettre sur la bonne voie.

Beaucoup de Juifs l’ont vu historiquement et c’est pourquoi ils ont rejoint les rangs de la Gauche, comprenant que tant que le socialisme n’aura pas vaincu, l’antisémitisme servira de paratonnerre au capitalisme.

Il ne faut d’ailleurs ici pas avoir d’illusion sur les discours pro-palestiniens existant en France, qui sont d’une double hypocrisie. Première hypocrisie, car ces gens n’en ont rien à faire de la Palestine, dont la situation est toujours plus dramatique. Islamisme, corruption, influences étrangères massives, division entre factions… La Palestine est asphyxiée, mais cela n’est pas vu, pas su, car en France c’est simplement un lieu de projection. D’où par exemple la scène théâtrale d’Emmanuel Macron le 23 janvier 2020 devant l’église Sainte-Anne, territoire français de Jérusalem.

Seconde hypocrisie, car c’est un antisémitisme qui ne s’assume pas, à part en privé. La pression antisémite est énorme à Gauche, depuis l’opposition à la guerre du Golfe en 1990. À partir de cette date, il y a le commencement d’un exode des Juifs de Gauche. Un « anti-impérialisme » abstrait a pris le dessus sur les valeurs idéologiques de la Gauche et de l’extrême-Gauche existantes auparavant.

Là où il y a le populisme, la véhémence, la recherche d’un bouc-émissaire, le refus de l’organisation, la négations des valeurs du mouvement ouvrier… Il y a forcément l’antisémitisme, comme moyen de se donner une image « anticapitaliste ». C’est évidemment plus facile et plus rapide que de lire Le Capital de Karl Marx… L’irrationalisme est plus rapide, plus marquant, plus efficace à court terme que le rationalisme.

Voilà pourquoi on ne sort pas de l’antisémitisme. Seule la Gauche peut vaincre le capitalisme, qui a besoin du paratonnerre antisémite. Mais la Gauche historique est trop faible, et la gauche populiste vocifère, blâme, cherche un bouc-émissaire pour ne pas combattre le capitalisme : hier Nicolas Sarkozy, aujourd’hui Emmanuel Macron…

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Société

Olivier Faure: «j’ai visité ces lieux d’où toute idée d’humanité s’était retirée»

Voici un récit d’une grande profondeur fait par le Premier secrétaire du Parti socialiste Olivier Faure il y a une dizaine d’années. Il l’a republié hier à l’occasion des 75 ans de la libération d’Auschwitz par l’Armée rouge.

Elie Buzyn et sa femme, par Olivier Faure.

« Il y a 75 ans, le camp de la mort d’Auschwitz était libéré. En cette journée commémorative je remets en ligne le billet écrit il y a une dizaine d’années lorsque j’ai visité ces lieux d’où toute idée d’humanité s’était retirée.

Je savais en me rendant à Auschwitz-Birkenau que ce voyage se graverait dans ma mémoire. Je savais que j’avais rendez-vous avec les abysses de l’Humanité d’où toute lumière s’était retirée, que je visiterai ces camps où l’Histoire a sombré, que je foulerai un cimetière sans tombes. Je croyais tout savoir. Et peut-être même que je savais tout. Mais je ne savais pas que savoir n’est pas tout.

Depuis ce 22 octobre, je suis hanté chaque jour par cette journée. Raison pour laquelle je n’ai pas écrit depuis sur ce blog, en dépit d’une actualité politique et parlementaire chargée. Je voulais d’abord raconter ce que j’ai vu. Jusqu’ici sans y parvenir.

Dans cette ville d’Auschwitz qui comprenait 60% de juifs avant-guerre, il n’en restait plus qu’une. Elle vient de disparaître. C’est la première pensée qui vient en pénétrant ce village sans attrait : la mémoire peut disparaitre. On imagine une population polonaise partagée entre la nécessité de garder témoignage de l’horreur nazie et le désir de faire oublier que les fumées noires et âcres qui s’échappaient des crématoires obscurcissaient le ciel sans arracher la compassion et encore moins la résistance des voisins. C’est la seconde pensée qui assaille, il est possible de vivre en regardant passer des trains de femmes, d’enfants, de vieillards, d’hommes condamnés à l’humiliation, la torture et la mort. Il y a quelques années, la polémique enfla autour de la volonté de construire un supermarché en face du camp. Il y a aujourd’hui une grande pizzeria de l’autre côté de la route…

Nous avons franchi ce portail de fer forgé. Relu cette inscription : « Arbeit macht frei » (le travail rend libre). Ironnie glaçante de nazis qui n’hésitaient pas à faire jouer l’orchestre pour accueillir les familles épuisées et inquiètes.

Il faisait un temps magnifique ce 22 octobre. Il ne faisait pas froid. Il n’y avait pas de boue, pas de prisonniers squelettiques en pyjamas rayés, pas de kapos, ni de soldats SS. Juste une caserne qui aligne des bâtiments de briques rouges. Le camp d’Auschwitz I fût en effet d’abord une caserne de l’artillerie polonaise. On est presque gêné par la banalité de l’endroit. Les mots de Hannah Arendt sur la banalité du mal trouvent là un écho particulier. Lieux ordinaires pour hommes ordinaires qui se transforment en bourreaux quotidiens.

Rien n’a été fait dans ce lieu pour impressionner outre mesure le visiteur. Ce n’est peut-être pas utile. Des échantillons d’horreur sont entreposés derrière des vitres : des valises abandonnées marquées du nom de leurs propriétaires, des chaussures d’enfants amassées, des montures de lunettes empilées… J’écris des « échantillons d’horreur » parce que ce sont des dizaines de milliers de prothèses, des dizaines de milliers de poupées de porcelaine, des dizaines de milliers de bagages, des montagnes de cheveux que l’on aurait pu amasser ici pour donner à saisir ce que crime de masse signifie. Il y a accrochée au mur cette carte d’Europe, sinistre, dont Auschwitz est le centre vers lequel pointent des rayons qui ont pour origine les villes de provenance des convois : Riga, Hambourg, Berlin, Bruxelles, Rome, Paris, Drancy, Pithiviers, Lyon…

Vers 16 heures, nous avons atteint Birkenau, le camp d’Auschwitz II. Le soleil se couche. Derrière les barbelés électrifiés, se profile un camp à perte de vue. Des baraques de part et d’autres d’une voie ferrée. Des miradors hauts perchés. Le gigantisme des lieux m’anéantit. Dans un dortoir, un rabbin a entamé une prière. Peut-être le kaddish, la prière des morts. Le soir tombe vite en Pologne. L’humidité monte. La fraîcheur aussi. Les bois sont tous prêts. J’entre dans les bâtiments des femmes. Dehors on entend des chiens aboyer. Une sirène de police hurle au loin. Dans la pénombre, je découvre ces couches superposées où s’entassaient celles qui n’avaient pas été condamnées au gaz dès leur arrivée. Elles devaient survivre à quelques dizaines de mètres des douches et des fours. Je reste une dizaine de minutes, seul dans ce bâtiment. Je suis englouti. Submergé. J’imagine ces filles auxquelles on offrit pour tout écrin à leur jeunesse, ces matelas de planches et ces murs de briques. J’imagine ces mères arrachées à leurs enfants. J’imagine ces coeurs serrés qui, la nuit venue, devaient scruter au travers des quelques ouvertures cet horizon fermé par d’autres baraques et saturé par d’autres douleurs.

Le soleil s’est pratiquement éteint lorsque j’atteins les ruines des chambres à gaz et des krématoriums, dynamités par les nazis avant l’arrivée des alliés. C’est ici que se perpétua l’organisation industrielle du crime. Tout fût pensé et planifié. Moll, le spécialiste de l’élimination des cadavres, alla jusqu’à imaginer un système de combustion à l’intérieur des fosses pour que la graisse humaine ainsi dégagée soit récupérée par des canalisations et vienne alimenter la flamme des fours en se passant de carburant… Des machines à broyer les os furent inventées pour réduire en poudre les restes humains qui n’avaient pas été réduit en cendres.

J’ai beaucoup hésité à écrire sur ce voyage. Devant tant de misère, je ne me sentais pas légitime à décrire l’indescriptible et l’insondable souffrance. Complexe du témoin qui se désole en se prenant pour un voyeur. Mais je sais aussi que ce sentiment doit s’effacer devant la nécessité de témoigner. Les nazis avaient décidé de retirer aux juif jusqu’au statut d’êtres humains. Ils ne voulaient pas seulement les exterminer, mais effacer jusqu’à leur passage et interdire le deuil et le souvenir.

J’ai fait de nombreuses photos. En les regardant, je les ai trouvées souvent trop esthétiques. Il y a une esthétique de l’horreur. Pour illustrer ce billet je me suis interrogé sur celle que je choisirais. J’ai préféré ce portrait parce qu’il évite tous les « clichés » avec miradors et barbelés. Cet homme s’appelle Elie Buzyn. C’est un des rescapés d’Auschwitz. Au premier plan, c’est sa femme qui parle. C’est la première fois qu’elle l’accompagnait sur les traces de son passé tragique. Au moment où je prends cette photo, elle raconte comment Elie sauva l’un de ses camarades d’une mort certaine en lui offrant sa ceinture (un pantalon qui tombe et c’est la mort), ne conservant pour lui-même qu’une ficelle… Elie a décidé de vivre le plus longtemps possible pour pouvoir emmener pour leurs 15 ans, tous ses petits enfants.

J’ai remonté dans la nuit noire le chemin de fer de Birkenau, éclairé par les projecteurs le long des chemins de ronde. Sur le ballast qui supporte les rails, j’ai prélevé trois petits cailloux. Un caillou pour chacun de mes enfants.

Trois cailloux comme ces cailloux que l’on dépose sur les tombes juives, symboles de la mémoire et de la permanence du souvenir. Dans l’antiquité, les pierres que chaque passant déposait, protégeaient aussi les corps des défunts des charognards.

Trois cailloux pour qu’ils se souviennent.

Trois cailloux pour que ce cri rapporté par Primo Levi, de cet homme qui fût pendu quelques heures avant la libération du camp, soit exaucé : « Kameraden, ich bin der letze ! « (Camarades, je suis le dernier !) »

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Société

Kobe Bryant dit le «Black Mamba», figure de la culture populaire

Le basketteur américain Kobe Bryant est décédé ce dimanche 26 janvier 2020 dans un accident d’hélicoptère en présence de sa fille aînée et de deux autres personnes. Le « Black Mamba » était très apprécié pour son talent et sa ferveur au travail, mais aussi comme figure représentant la culture pop, dans sa version américaine.

Les légendes du sport ont l’avantage d’être des figures universelles représentant l’humanité dans ce qu’elle peut faire de meilleur sur le plan de la performance physique et de l’intelligence physique. Kobe Bryant était de ceux-là, ayant succédé à Michael Jordan en NBA, qui lui-même avait succédé à Magic Johnson et à Larry Bird. L’annonce de sa mort hier suscite donc logiquement de l’émotion et ravive des souvenirs pour beaucoup de gens, tant il fait partie de la culture populaire, même pour ceux ne suivant pas vraiment le basketball américain.

Kobe Bryant s’était façonné un personnage, le « Black Mamba », en référence à un serpent africain très vif et rapide, mentionné dans le film Kill Bill. Ce personnage est acharnée de travail et il était ainsi connu pour s’exercer longtemps avant et après les autres à l’entraînement, parfois même dès très tôt le matin, etc.

Son habilité en match était fascinante, tout comme son sang-froid, combinés à une extraordinaire confiance en soi qui lui permettait de marquer énormément de paniers par match. Avec cinq titres NBA, deux sacres olympiques, 18 All Star Game et plus de 33 000 points marqués, il fait partie des meilleurs basketteurs de l’histoire.

Le jeune numéro 8 avait marqué les esprits au tournant des années 2000 au sein des Lakers de Los Angeles, mais aussi en dehors des terrains comme figure commerciale pour la marque Adidas qui lui a fait un modèle de chaussures dès 1997.

Ces pubs ont marqué des adolescents du monde entier, parfois même simplement à travers des magazines qui relayaient tout un style de vie, une attitude ultra moderne et sophistiquée à l’américaine.

Sur le plan strictement sportif, il a marqué les esprits en réalisant la performance de marquer 81 points dans un match, contre les Toronto Raptors en 2006, puis en enchaînant des saisons de très haut niveau avec désormais le numéro 24.

Il a mis fin à sa carrière en 2016, avec un match à 60 points, à l’issue duquel il a prononcé son fameux « Mamba out », avant de poser le micro par terre.

C’est par un poème qu’il avait annoncé quelques mois plus tôt la fin de sa carrièreavec des mots très bien vus, représentant bien l’esprit du sport : un amusement sérieux, qui devient souvent beaucoup plus qu’une passion.

On dit de Kobe Bryant qu’il tenait de très bonnes bases techniques et tactiques de par sa formation au basketball en Italie, où son père évoluait comme joueurs professionnel. Le basketball américain est en effet beaucoup plus physique et spectaculaire que le basketball en Europe, où on reproche souvent à la NBA ses largesses sur l’application des règles, mais aussi le peu de mise en place tactique pour la défense. Kobe Bryant lui était un passionné de football, ce qui peut-être est quelque-chose ayant marqué son style de jeu, avec sa capacité à chercher et trouver des espaces.

Le fait qu’il soit mort dans son hélicoptère privé en dit bien entendu long également sur les fortunes faramineuses attribuées à ceux qui sont utilisés comme vecteurs de l’appauvrissement culturel et psychologique à travers de véritables bonnes choses, comme le sport. C’est une contradiction de toute notre époque : d’un côté, c’est l’ère des masses… de l’autre, elles sont asservies par la logique entrepreneuriale décidant de tout.

Voici une vidéo des meilleurs moments de Kobe Bryant :

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Société

Décès du cabarettiste Michou, l’ancêtre du style LGBT

Bon enfant, stupide, frivole, sans profondeur : le cabaret de Michou avait tout pour plaire à qui voulait s’encanailler à bon compte, en espérant rencontrer le tout Paris fréquentant assidûment le lieu. Le décès de Michou a donc été prétexte à un nombre important de réactions dignes de Guignol, montrant à quel point le niveau culturel imposé par la bourgeoisie est lamentable.

La bourgeoisie prétend aimer le burlesque ; en réalité, elle aime le grotesque. Michel Catty alias Michou en a été une figure avec son cabaret depuis les années 1960, voyant passer dans le 18e arrondissement de Paris des gens venant s’encanailler devant des spectacles de travestis. L’arrière-plan, bien plus chic, est que c’était un lieu de passage strass et paillettes des plus hauts hommes politiques, des stars du show business, de grands bourgeois psycho-rigides en quête d’émotions.

C’est ici la France de Jean-Pierre Pernaut et de Johnny Halliday, de Jean-Paul Belmondo qui vient connaître le festif de grand bourgeois sablant le champagne de qualité, Michou revendiquant d’en boire deux bouteilles par jour (car « L’eau, c’est fait pour se laver les fesses »).

Le magazine ultra-conservateur Causeurs y est bien entendu aller de son couplet nostalgique :

« Paris a le blues cet après-midi. Michou, c’était le douzième homme de notre sélection nationale, l’ami des Présidents et des stars du chobizenesse (…). Cette vedette représentait quelque chose de léger, d’impalpable, un rêve ancien brouillé par la télévision de Guy Lux, les lumières de la nuit, une sorte de Paris fantasmé des années 60/70, thébaïde des libertés et du divertissement. »

Car la haute bourgeoisie s’ennuie et c’est pourquoi elle a toujours eu ses clubs échangistes, ses boîtes sado-masos, ses réseaux de prostitution chics ou trash, voire pédérastes ou pédophiles. Michou n’était que la version la plus accessible, la plus légère, la plus superficielle, la moins engageante. C’était une caricature et cela suffisait pour faire semblant pour des gens cherchant à faire semblant d’exister.

Le cabaret de Michou fut, concrètement, la véritable avant-garde historique de la scène LGBT à la française, avec sa remise en cause de tout bon goût, de toute culture, de toutes normes. Ce qui a amené la maire de Paris, Anne Hidalgo, à parler de Michou sur Twitter comme ayant été « une immense figure de la tolérance et de la nuit parisienne ».

Car on est pas du tout ici dans une question d’homosexualité ou pas. On est ici dans une mise en scène, dans une négation de toute hétérosexualité ou homosexualité, dans un rejet de toute identité, pour se mettre au service d’un esprit faussement joyeux, d’un goût de la fête entièrement surfait, d’une logique de consommation superficielle.

C’est une mise au service d’une haute bourgeoisie, par ennui, par désœuvrement, pas vide existentiel, s’occupe avec du bruit. La scène LGBT, avec ses revendications ultra-libérales dans les mœurs (et en économie aussi d’ailleurs), n’est qu’une expression moderne d’une fausse fête mise au service du bruit pour occuper les esprits. Il n’y a aucun profondeur, que du vide.

Que l’on compare d’ailleurs le style LGBT avec les romans de Jean Genet, avec les paroles des Communards, avec la démarche rupturiste queer. Quoiqu’on puisse en penser, il n’y a strictement aucun rapport avec la scène LGBT et son pseudo hédonisme identitaire individualiste !

Michou n’a fait qu’anticiper ce qui existe aujourd’hui de manière régulière : la fuite identitaire dans un pseudo abri. Pour les uns, c’est la religion, cette aberration du passé, pour les autres c’est la couleur de peau, la nationalité ou un peuple même fictif, d’autres ne raisonnent qu’en termes de sexualité, etc. De manière plus particulière, Michou a anticipé la niaiserie de l’idéologie LGBT désormais arboré fièrement par absolument tous les principaux pays capitalistes du monde et toutes les grandes entreprises, depuis la CIA jusqu’à Google, de Louis Vuitton à Mercedes.

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Politique

Municipales: Andréa Kotarac, tête de liste du Rassemblement national à Lyon

En avril 2019, Andréa Kotarac alors à la France insoumise de Jean-Luc Mélenchon était présent lors d’un forum international organisé par la Russie de Poutine, à Yalta. Le malaise fut profond à Gauche puisque Marion Maréchal et Thierry Mariani, passé au Rassemblement national pour les Européennes, étaient également de la partie. Le 15 mai 2019, Andréa Kotarac appelait officiellement à voter RN, avant de complètement basculer en devenant militant du parti d’extrême droite.

En octobre 2019, Andréa Kotarac est investi à Lyon pour le Rassemblement National dans le cadre des élections municipales. Il est ainsi propulsé comme tête de liste du parti pour la métropole, alors que le mandat pour la ville est assuré par Agnès Marion, une « historique » entrée au parti grâce à l’appui de Bruno Gollnisch, professeur de japonais à l’université Lyon 3 surnommé le « baron » de l’extrême-droite locale.

Le RN jubile de cette grosse prise et avance l’idée que ce sont « deux profils complémentaires », l’un incarné par Agnès Marion, catholique et mère de six enfants, l’autre incarné par Andréa Kotarac à la métropole afin de faire la jonction « avec les classes populaires ».

Ce qui est terrible, c’est qu’Andréa Kotarac était considéré il y a encore quelques années comme une figure montante du mouvement de Jean-Luc Mélenchon. Non pas simplement de la France insoumise, lancée comme mouvement d’appui à la candidature de Jean-Luc Mélenchon aux Présidentielles de 2017, mais également du Parti de gauche qu’il avait rejoint dès ses débuts. Il était même devenu coresponsable de la jeunesse du Front de gauche en 2012.

En effet, aux élections municipales de 2014, alors âgé de 24 ans, Andréa Kotarac était investi sur la liste « Lyon citoyen et solidaire » soutenu par le Parti de gauche dans la course au mandat du 8e arrondissement lyonnais, un secteur populaire de Lyon, avec son quartier des États-Unis.

C’est en ce sens qu’on comprend que ce basculement d’Andréa Kotarac est un coup dur pour la Gauche lyonnaise. En mai 2019, Jean-Charles Kohlhaas, élu du Rassemblement Citoyen Ecologiste et Solidaire (RCES) à la région Auvergne Rhône-Alpes au journal « 20 minutes » précisait à propos de lui :

« Il a été formé au sein du mouvement de lutte antifa. Cela faisait partie de son ADN. Il a pris des coups dans les manifestations (et s’est retrouvé e garde à vue). Il était vraiment à 10.000 lieues du front national »

En effet, sans être forcément « antifa », Andréa Kotarac, s’est retrouvé en garde en vue en avril 2012 après des échauffourées avec des militants d’extrême-droite devant l’université Lyon 3. Et c’est bien là le problème !

Car le transfuge du parti de gauche vers le RN est-il un retournement contre-nature ? Évidemment non, mais faut-il encore comprendre comment l’extrême-Droite fonctionne, comment elle avance au niveau idéologique et politique. Il faut pour cela comprendre que « lutter » ou défendre le « social » n’est pas en soi un marqueur à Gauche, car cela peut être absorbé par une proposition nationaliste, souverainiste.

Or, cette analyse liée à la Gauche historique, c’est toujours ce qu’ont refusé Jean-Luc Mélenchon et son entourage. Pourtant, avec une telle analyse, il était facile de constater que les signaux était déjà au rouge. Andréa Kotarac était depuis longtemps très proche du souverainiste populiste Djordje Kuzmanovic, lui aussi parti de La France insoumise pour fonder un micro-parti (« République souveraine »).

Le cas « Andréa Kotarac » exigerait une grande remise à plat, un retour critique de ses anciens camarades… Perdre un sympathisant est une chose, perdre un cadre au bénéfice des fachos en est une autre !

> Lire également : De la FI au RN, Andréa Kotarac : l’inévitable convergence des populismes

Andréa Kotarac, tête de liste du RN à la métropole de Lyon, c’est la mort de deux stratégies de lutte contre l’extrême droite, celle du nivellement par le bas représenté par le populisme insoumis et celle du « coup de poing » ultra des « antifas ».

Cela les cadres du RN l’ont bien compris. Comme le dit Thibaut Monnier, co-fondateur avec Marion Maréchal de l’ISSEP et chargé de cours en négociation, également présent sur la liste d’extrême-droite :

« Je suis très fier de vous proposer ma candidature sur cette circonscription qui réunit le 5ème et 9ème arrondissement de #Lyon et très heureux d’être aux côtés d’André Kotarac qui a réussi l’exploit historique de réunir tous les amoureux sincères de notre beau territoire et de la France ! ».

Une telle percée politique de l’extrême-Droite doit nécessairement provoquer un électrochoc à Gauche. La situation exige un retour aux traditions historiques de la Gauche, celles de la SFIO et de la SFIC, du refus du nationalisme, de l’unité populaire à la base, du Front populaire contre la montée du fascisme.

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Écologie

ASPAS: «Stop à la chasse en enclos!»

La chasse dans un environnement fermé, avec des animaux spécifiquement élevés pour être les victimes de coups de fusil sans possibilité de s’enfuir, est l’une des expressions les plus barbares de la toute-puissance consommatrice.
L’association ASPAS essaie de faire bouger les choses au sujet de la chasse en enclos, avec une campagne de mobilisation :

Cliquez ici pour télécharger un petit PDF explicatif très bien fait, à diffuser.
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Politique

Échec du 24 janvier 2020: la cause est la fascination de la CGT pour les mythes mobilisateurs

Les syndicalistes prétendent être mieux que les politiques, car ils auraient le sens du concret. En réalité, ils mobilisent sur des fictions, prétendant qu’il y aura un déclic. C’est la négation de la politique et de la culture et la CGT s’enlise dans ses propres mensonges, tout cela pour sauver sa peau dans une situation inextricable.

Remontons à la source du problème, à savoir la prétention des syndicalistes à faire tout mieux que tout le monde, à porter l’avenir, à être les seuls qui soient purs, objectifs, sincères. Pour tout cela, il faut étudier Les Réflexions sur la violence de Georges Sorel, paru en 1908.

Bien entendu, c’est un ouvrage qui n’a jamais été lu par les syndicalistes eux-mêmes à l’époque, parce que ceux-ci étaient déjà anti-intellectuels comme ils le sont aujourd’hui. Même aujourd’hui, ils ne l’ont pas vraiment lu, pas plus que d’autres ont d’ailleurs lu Lénine ou même Marx. En France on a une culture à la Sciences-Po : si on a lu des fiches de résumé, on pense que cela suffit.

Les Réflexions sur la violence forment donc surtout un prétexte à une méthode, assez facile à comprendre même tellement elle est française. Pour gagner socialement, pas besoin de réflexion, on fait du rentre-dedans et on annonce que tout va craquer. On ne sait pas si c’est vrai, mais en rentrant dedans on galvanise les combattants et, à force, le mythe mobilisateur de « ça va péter » est censée devenir une prophétie autoréalisatrice.

Voilà ce que fait la CGT en ce moment. Évidemment, au fond, elle n’y croit pas, elle espère surtout que le privé va lutter pour ses propres intérêts et que la situation aura alors tellement changé que les compteurs vont être à remis zéro. Mais elle fait semblant et même on peut soupçonner certains de croire en leur propre mensonge. Par exemple, lorsque Laurent Brun, Secrétaire Général de la Fédération CGT des Cheminots, fait le 24 janvier une analyse rapide comme quoi Emmanuel Macron est sur la pente savonneuse menant à la dictature du maréchal Pétain.

Le type sait que c’est n’importe quoi, c’est obligé. Mais il le dit, histoire de faire monter la sauce, au mépris de tout sens des réalités et du respect de la raison. Foutu pour foutu, autant y aller !

Et que dire de la centaine d’avocats en robe noire en train de chanter à Bordeaux une version au texte modifié du Chant des partisans, ce 24 janvier ? Sans conviction aucune, heureusement, on devine une initiative forcée, comme tout ce qui a trait d’ailleurs au mouvement contre la réforme des retraites. Mais quelle ignominie !

Ceci dit la honte est partout, car la version originale de la chanson a été chantée un peu partout lors de marches au flambeau, comme à Angoulême. Une marche au flambeau… Est-ce une tradition du mouvement ouvrier, ou de l’extrême-Droite, qui plus est ? On a atteint un niveau de faiblesse qui n’a comme équivalent que celui de l’auto-intoxication.

Il faut lire l’article de Libération sur la grève sur le barrage EDF de Grand’Maison, la centrale hydroélectrique la plus puissante de France. Le délégué syndical explique à fierté :

«Avec Grand’Maison, on est à la tête d’une centrale de 1 800 MW de puissance, l’équivalent de deux réacteurs nucléaires classiques ou d’un EPR. C’est le moyen de se faire entendre de l’Etat mais aussi de l’opinion publique.»

Soit ! Mais quand RTE passe un coup de fil en disant : on a besoin d’électricité, allez bosser de telle heure à telle heure, il est obtempéré. On peut penser que cela est juste, qu’il faut éviter les révocations, cela va même de soi. Cela étant, il y a un décalage énorme entre dire que tout est sous contrôle ouvrier et qu’en réalité, cela ne le soit pas.

Les premiers perdants sont les ouvriers. La CGT les amène droit dans le mur. Elle ne peut en effet plus reculer. Elle est obligée de se prétendre la garante de tout le système social, elle est obligée de prétendre que la victoire est en train d’être obtenue. Elle est obligée d’utiliser des mythes mobilisateurs.

En faisant cela, elle mobilise ses propres rangs et ses sympathisants, mais empêche toute mobilisation en mode « lutte de classes ». Tout tourne alors sur soi-même… jusqu’à l’épuisement. Jusqu’au vide politique qui sera occupé par l’extrême-Droite, à moins qu’une Gauche unie vienne sauver le tout.

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Politique

Mobilisation du 24 janvier 2020: des chiffres invraisemblables

Le mouvement de contestation contre la réforme des retraites est en perte de vitesse. La grève s’est enlisée, alors qu’elle n’a pas pris ailleurs qu’à la SNCF et à la RATP, que même dans des secteurs mobilisés comme à EDF-Enedis, elle n’a été que minoritaire. Pourtant, la CGT triomphe et s’imagine qu’en annonçant des chiffres de manifestants invraisemblables, cela suffira à ce qu’il se passe quelque-chose.

Le gouvernement a adopté ce matin le projet de loi sur la réforme des retraites en conseil des ministres en ignorant totalement la contestation et les syndicats. Mais la CGT triomphe : « Qui a parlé d’essoufflement de la mobilisation sociale ? » titre son communiqué.

C’est sûr que quand on raconte ce qu’on veut sans aucune vraisemblance pour le nombre de manifestants, il est facile de triompher… Il y aurait eu ce vendredi 24 janvier d’après la CGT entre 350 000 et 400 000 personnes manifestants à Paris. Cela ferait donc 100 000 personnes de plus que la semaine dernière le 16 janvier. Mais d’où viennent ces 100 000 néo-manifestants, qu’on avait pas vu depuis le 17 décembre et le 9 janvier, au plus fort du mouvement, où la CGT annonçait autant à Paris ?

Cela ne tient pas la route, alors que la Préfecture ne parle que de 31 000 personnes hier et que le chiffre des médias est de 39 000 manifestants. Rappelons que le 17 décembre 2019, la Préfecture avait annoncé 76 000 manifestants, ce qui est plus du double que le nombre annoncé hier, et que le 9 janvier elle annonçait 56 000 manifestants.

On se demande également comment à Marseille la CGT peut avoir vu 180 000 personnes là où la police n’en annonce que… 8000. Même chose à Toulouse où la CGT voit 95 000 manifestants quand la police n’en voit que 5000. C’est tout simplement ridicule.

C’est la même chose pour les chiffres nationaux, la CGT annonçant 1,3 millions de manifestants, soit presque autant que le 5 décembre (1,5 millions et 800 000 selon le gouvernement), alors que le gouvernement annonce 250 000 manifestants dans tout le pays.

Cela paraît d’autant plus improbable que beaucoup de manifestations en France ont réuni bien moins de personnes qu’en décembre :

à Lyon, 9000 manifestants selon la police et 20 000 selon la CGT,
à Bordeaux,7500 manifestants selon la police,
à Nice, 2900 manifestants selon la police et 10 000 selon la CGT,
à Nantes, 5500 manifestants selon la police et 10 000 selon la CGT,
à Rennes, 4000 personnes selon la presse,
au Havre, 6000 manifestants selon la police,
ou encore à Boulogne-sur-mer, 500 manifestants selon la police et 1000 selon la CGT.

La CGT prétend s’en sortir avec l’idée, qu’elle avait annoncée avant la journée d’hier, qu’il y aurait en fait eu beaucoup plus de rassemblements.

On notera pourtant que même avec ses chiffres invraisemblables, la CGT n’est pas cohérente quand elle prétend qu’il n’y a pas d’essoufflement : 1,3 millions, c’est moins que le pic d’1,8 millions du 17 décembre (615 000 selon le gouvernement) et les 1,7 millions d’après les fêtes le 9 janvier (452 000 selon le gouvernement).

Mais peu importe, car ce qui compte ici n’est pas la cohérence, mais la surenchère. C’est du même ordre que les opérations coup de poing isolées menées contre la CFDT ou les coupures d’électricité : il s’agit de bomber le torse, avec l’espoir que cela suffise. C’est une terrible erreur, et c’est d’autant plus terrible qu’il y a beaucoup de personnes qui y croient, ou qui choisissent d’y croire si l’on veut.

La déception va être d’autant plus terrible, générant surtout de la rancune, et pas de la volonté de changer le monde. Marine Le Pen, qui depuis le début a pris soin de ne pas critiquer le mouvement, tout en critiquant la CGT, se tient évidemment prête pour récupérer toute cette amertume…

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Politique

«Un 24 massif et déterminé pour le retrait»

Voici le communiqué des organisation syndicales CFE-CGC, CGT, FO, FSU, Solidaire, Fidel, MNL, UNEF, UNL pour la grève de ce vendredi 24 janvier 2020 :

« Un 24 massif et déterminé pour le retrait

Le Président de la République a donné son feu vert à l’examen en Conseil des ministres du projet de loi sur les retraites le 24 janvier 2020. Ce projet renvoie à de nombreuses ordonnances et décrets qui définiront ultérieurement et sans débat les dispositions structurantes du régime prétendu universel qui impliqueraient des conséquences désastreuses pour toute la population. Nous sommes donc face à un projet qui est toujours totalement flou mais dont l’analyse des grandes lignes, y compris par des experts indépendants, montre qu’à l’opposé de la communication gouvernementale sur une réforme de justice sociale, son objectif est de nous faire travailler plus longtemps et de baisser les pensions. La population n’est pas dupe et continue à être opposée à cette réforme et à soutenir majoritairement la mobilisation contre ce projet absurde et injuste.

L’absence de transparence du Gouvernement sur les impacts individuels et globaux est inadmissible. Après un simulacre de dialogue social de 2 ans avec les organisations syndicales, le gouvernement méprise les salarié-e-s, les grévistes, la population et la jeunesse et maintenant les prérogatives du Parlement.

Les actions et les grèves se multiplient sur l’ensemble du territoire. Nos organisations se félicitent du succès annoncé des nombreuses mobilisations organisées jeudi 23 au soir, notamment des retraites aux flambeaux. Nos organisations appellent à une mobilisation maximale le 24 janvier par la grève et les manifestations massives pour rejeter cette réforme, pour obtenir le retrait de ce projet de Loi et de véritables négociations sur la base des revendications portées par l’intersyndicale majoritaire.

Le Parlement devrait commencer à discuter du projet de Loi. D’ici là nos organisations appellent à poursuivre et amplifier les actions, y compris en multipliant les arrêts de travail, en interpellant les parlementaires et en organisant des actions de dépôt des outils de travail dans des lieux symboliques.

La détermination à faire retirer ce projet de loi est entière. Nos organisations décident de se revoir dès le 24 janvier matin pour décider ensemble des suites. »

 

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Société

Réforme du baccalauréat: la situation compliquée dans les Lycées

Symbole du libéralisme triomphant, le baccalauréat a été démantelé au profit de parcours individuels à la carte, avec une place faite au contrôle continue en plus de l’examen final traditionnel. Ce contrôle continu consiste finalement en des minis épreuves assez similaires aux partiels universitaires et leur organisation pour les élèves de Première qui a lieu en ce moment se fait dans une grande confusion.

Voici les propos intéressants tenus par le président de la fédération de parents d’élèves FCPE au Conseil Supérieur de l’Éducation d’hier, jeudi 23 janvier 2020.

Il y est expliqué que ces nouvelles épreuves de contrôle continue (E3C), en plus du grand flou dans lequel elles ont lieu, entraînent une pression permanente de l’examen, au détriment de l’enseignement lui-même. Beaucoup d’enseignants et de syndicats d’enseignants déplorent la même chose, en plus de nombreuses autres critiques.

« Déclaration liminaire

Conseil Supérieur de l’Education du jeudi 23 janvier 2020

Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs les membres du Conseil,

Nous assistons à une situation inédite dans l’école de la République. D’un point de vue réglementaire, des élèves ont passé les premières épreuves communes de contrôle continu(E3C), alors même que le décret relatif à la fraude ou tentative de fraude n’est pas paru. Ce texte, nous l’avons vu le mois passé en CSE et il s’appliquera bien à la génération Bac2021.

La FCPE se répète à chaque CSE : la méthode Coué ne fonctionne pas pour la conduite de changement et en particulier dans l’éducation qui exige un temps long, un temps de consensus, un temps d’explication, un temps d’organisation.

Il n’est pas possible de mettre en péril la confiance de la jeunesse en l’Ecole et en son avenir. C’était tout le sens de la communication des présidents départementaux de la FCPE dès le 26 janvier 2019 qui appelait à faire une pause. Une pause pour anticiper les difficultés, travailler à réduire les inégalités scolaires, de territoire ou de parcours. Nous n’avons pas été les seuls à demander ce temps. Mais, rien. Tout a continué et nos propositions n’ont pas été entendues.

La tension est palpable chez les parents. Nous avons lancé un questionnaire début janvier pour appréhender le niveau de compréhension et d’information des parents d’élèves sur les réformes en cours. 5000 répondants,dont plus de 40% d’entre eux ne sont pas adhérents à la FCPE et 68 % d’entre eux ont des enfants en première. Et les connections continuent.

Ce sont 70 % des parents qui se trouvent mal informés sur les réformes, qui ne savent pas comment s’organisent les E3C. 67% qui ne connaissent pas les 54h dédiées à l’aide à l’orientation et près de 60% qui se repèrent difficilement dans les spécialités.

Néanmoins, les enjeux de la réforme sont assimilés, puisque les 5 sujets de préoccupation majeurs sont l’orientation, le choix des spécialités, les E3C, Parcoursup et les nouveaux programmes.

Rappelons-nous ensemble ce qu’est le lycée, trois ans pour apprendre et préparer son projet d’avenir post bac. Trois ans de scolarité et trois de construction citoyenne pour les jeunes adultes qu’ils seront au sortir de l’Ecole. Au début des travaux sur la réforme, le nouveau bac devait permettre aux élèves de sortir d’un examen sanction, source de stress, en intégrant le contrôle continu. Un enjeu essentiel pour la FCPE.

Mais il y a eu les épreuves communes de contrôle continu, les fameuses E3C pour les initiés. Ce format hybride à mi-chemin des modus operandi des épreuves terminales et du contrôle continu, version «super devoir blanc». Dans les faits, elles ressemblent énormément aux partiels universitaires.

Par deux fois ce dernier mois, nous avons alerté publiquement sur les questions techniques comme pédagogiques, sur les inégalités qui seraient à l’œuvre dans la mise en place des E3C cette année. Nous avons demandé un ajournement.

Oui, les difficultés n’ont pas été anticipées. Oui, nous sommes dans une situation inédite et ce sont les élèves en premier lieu qui en pâtissent et qui y jouent leur diplôme national du baccalauréat. Alors même qu’il n’y avait nul besoin de créer une telle usine à gaz pour évaluer leur travail sur l’année. Nous recevons tous les jours des témoignages de situations d’élèves ou d’établissement à propos des difficultés générées par les E3C. C’est une usine à gaz qui explose aujourd’hui.

Alors, est-ce une solution pertinente pour évaluer la progression des élèves ? 18 mois de scolarité, trois sessions sur plusieurs matières, sans ôter le contrôle continu, les épreuves anticipées et les épreuves terminales. Les élèves sont ainsi continuellement sous pression d’examen: en lieu et place d’apprendre, d’analyser leurs erreurs pour progresseravec les équipes éducatives, ils bachotent.Onest bien loin d’un climat serein de travail pour les élèves, de moins d’examen et de moins de stress.

Pour la FCPE, nous sommes loin de la prise en compte de l’évaluation progressive de l’élève dans ses apprentissages et de son bien-être. Enfin, je finirai mes propos sur une alerte concernant la génération Bac 2020, les élèves qui sont en terminale cette année. Parcoursup a ouvert hier et ils passeront leurs épreuves en juin. Aujourd’hui, ils souffrent des répercussions indirectes de la réforme et des E3C, les bacs blancs sont reportés. Oui, ils sont angoissés, car ils savent être la dernière génération d’un système. Que deviendront celles et ceux qui possiblement échoueront au baccalauréat ?

Nous attendons des réponses et avant le mois de juin.

Je vous remercie de votre écoute. »

Notons également que la FCPE, à l’issue d’une conférence de presse hier, a critiqué les actions de certains professeurs jouant la surenchère en boycottant ou bloquants les épreuves. Il a ainsi été déclaré de manière assez juste, ou en tous cas illustrant bien le climat délétère ambiant :

« Cela suffit que nos gamins soient toujours les victimes de ces adultes qui n’arrivent pas à trouver les clés du dialogue […]. On est dans une situation de rapport de force, une guerre de positions entre un ministre et des enseignants, et personne ne veut lâcher »

À cela s’ajoute une grande confusion pour les élèves de Terminale, la dernière génération passant le bac sous sa forme traditionnelle, devant faire leur choix d’orientation sur la Parcoursup avec un grand flou qui règne encore sur les choix optimaux à faire, des professeurs peu au courant pour aider les familles et les élèves, etc.

> Lire également : La remise en cause du principe d’un baccalauréat universel

Cela en dit long sur l’effondrement de notre société, dans laquelle les points de tensions se multiplient, avec une dégringolade généralisée de tout un tas de secteurs du quotidien, de tout un tas d’aspects, menant tout droit à une rupture de grande ampleur.

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Politique

Deux arrestations suite aux coupures de courant par la CGT en Dordogne le 10 janvier 2020

La CGT Mines et Énergie a connu un premier avertissement avec deux agents d’Enedis (l’ancienne Électricité Réseau Distribution France, formée dans le cadre de la privatisation du secteur) arrêtés dans le cadre d’une enquête pour mise en danger de la vie d’autrui. Face aux coupures de courant, le gouvernement réagit exactement comme le faisait celui du début du 20e siècle face exactement aux mêmes problèmes.

L’idée de couper le courant pour produire de la nuisance n’a rien de nouveau ; la toute jeune CGT l’a déjà massivement employé à Paris au début du 20e siècle. Émile Pataud, le syndicaliste dirigeant la Fédération, était présenté par la presse de l’époque comme « le roi de l’ombre » de par sa capacité de nuisance. Cette pratique se situe dans le cadre de l’action directe pour la grève générale et lui valut une répression sévère.

Pour cette raison, la pratique disparut plus ou moins, les annales de l’électricité constatant en 2008 dans l’article « Un siècle de coupures de courant dans les grèves des électriciens. De la centralité à la marginalisation (1905-2004) » :

« L’utilisation originelle de la coupure remonte aux premiers conflits du travail majeurs des électriciens qui se produisent en 1905-1907 à Paris, avec pour objectif prioritaire l’assimilation au personnel municipal. Les grands moyens sont utilisés dans cette bataille pour le statut . Ces mouvements sont dirigés par Émile Pataud, l’une des figures de proue du syndicalisme d’action directe qui oriente alors la CGT.

Il décide donc d’initier l’utilisation d’une technique de grève qui s’avère d’abord efficace et frappe les esprits : la coupure de courant. Historiquement, c’est en effet entre 1905 et 1910 que cette pratique est la plus usitée. »

Le Émile Pataud en question pensait même que les travailleurs de l’énergie combinés à ceux du bâtiment seraient la proue de la grève générale renversant le capitalisme. Il a écrit un ouvrage science-fiction racontant cette épopée, Comment nous ferons la Révolution, rédigé en commun avec Émile Pouget, un dirigeant de la CGT, et republié en 1995 aux éditions Syllepse.

Ce goût anarchiste pour le grand soir – cette calamité française – fut calmé par la police, l’armée et les révocations. En 2020, le gouvernement d’Édouard Philippe a lancé une première salve d’avertissement en ce sens.

C’est en effet une affaire déjà passée qui est au centre des deux arrestations, puisque c’est le 10 janvier que l’entreprise Interspray, qui s’occupe de produits chimiques et est classée Seveso, a été privée de courant durant trois heures. Et on parle ici d’arrestations en mode brutal, du type la gendarmerie qui débarque très tôt le matin, dans une ambiance tendue.

C’est donc un avertissement du gouvernement, qui sait très bien que les syndicats, refusant de faire de la politique, basculent au mieux dans du syndicalisme « dur », avec comme seul appui une ultra-gauche sans impact dans le pays.

Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT, alors à la centrale nucléaire de Gravelines lorsqu’il a appris la nouvelle, n’a pas été dupe et a affirmé en réponse que c’était « jeter de l’huile sur le feu » que de mener une telle répression. La CGT et FO ont également organisé un rassemblement devant la gendarmerie de Neuvic en protestation.

Parallèlement, la CGT continue de lancer toutes ses forces. La Fédération CGT du Commerce a menée hier une petite manifestation à Paris et l’action menée la nuit au 22 janvier au Centre administratif du Grand Port Maritime du Havre en dit long sur le fond de la question : c’est une bataille identitaire qui se joue.

On comprend que, de plus en plus, l’affrontement réel qui existe à l’arrière-plan dans le refus de la réforme des retraites prend place : celui entre la CGT, ainsi que FO, et le gouvernement entendant « moderniser » les partenaires sociaux, abandonner les vieilles formes de cogestion sociale.

Le capitalisme de la « start up » nation n’a plus besoin de centrales syndicales formant une partie des institutions (tout en prétendant être hors de l’État). Il coupe donc les vivres. Pour la CGT, et pour FO, c’est simplement une question de vie ou de mort.

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Le site nosretraites.org par des partis de gauche

De nombreux partis et organisations de gauche ont lancé le site nosretraites.org, sur lequel sont faites des propositions unitaires sur la question des retraites et en opposition à la réforme gouvernementale.

Le site nosretraites.org est une plateforme commune, dans un style gestionnaire typiquement keynésien, avec une orientation sociale. Cela ne soulèvera probablement pas les foules et ne fera rêver personne, mais en attendant la démarche a le mérite d’exister et de rassembler assez largement.

Les organisations signataires de ce site et des propositions qui y sont formulées sont :

Ensemble, Europe Écologie-Les verts, Gauche démocratique et sociale, Gauche républicaine et socialiste, Génération-s, Les Radicaux de gauche, Nouvelle donne, PCF, Parti socialiste, Place publique, Pour une écologie populaire et sociale, République et socialisme, ainsi que Union des démocrates et écologistes.

Six « piliers concrets » sont formulés. On notera cependant qu’à défaut d’être véritablement « concrets », ils consistent surtout en une formulation inverse à la réforme gouvernementale, de manière quasi-symétrique  :

1- Améliorer le système par répartition ;
2- Garantir un droit à la retraite en bonne santé, pour toutes et tous ;
3- Une règle d’or (assurant la parité du niveau de vie entre les retraités et les travailleurs) ;
4- Meilleure prise en compte de la pénibilité ;
5- Une retraite minimum au niveau du SMIC ;
6- Réaliser l’égalité femmes-hommes.

Six « pistes de financement » sont également formulées. Là encore, ce n’est pas le « grand soir » de la lutte des classes, mais des mesures gestionnaires assez floues, n’engageant finalement à pas grand-chose :

1- mobiliser le fonds de réserve des retraites (un fonds d’investissement sur les marchés financiers, tout comme le très critiqué Blackrock, mais en version « public », c’est-à-dire géré par l’État) ;
2- assurer la compensation financière de l’État à la Sécurité sociale pour les pertes de recettes liées aux mesures d’exonérations de cotisations sociales ;
3- réflexion sur l’élargissant l’assiette de financement aux revenus du capital, et en particulier aux revenus financiers ;
4- maintien de la cotisation à 28,1 % jusqu’à 27 000 € de revenus par mois ;
5- création d’emplois, notamment dans les services publics
6- augmentation des salaires et l’application réelle de l’égalité salariale entre les femmes et les hommes

Le site est à retrouver à cette adresse : nosretraites.org

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Société

Du pain et des jeux: la Fédération de boxe organise la légalisation du MMA

L’importation du MMA, ce produit américain mêlant spectacle, technicité et ultra-violence dans un « octogone », va être organisée par une fédération existante déjà, pour faire passer la pilule de la barbarie. Téléréalité, ultralibéralisme dans les mœurs, atomisation individualiste… le modèle américain s’impose, avec l’assentiment d’une Gauche ayant capitulé culturellement.

L’impact sur la jeunesse va être énorme, et bien entendu on parle ici de la jeunesse masculine. Sont également visés en particulier les secteurs où le patriarcat est puissant, comme chez les jeunes hommes des cités.

L’idée est simple : tout comme les gladiateurs hier, il est possible de prostituer son corps en le mettant en jeu dans des affrontements alliant brutalité et spectaculaire. Il va de soi que comme on est plus chez les Romains, il faut par contre qu’il y ait tout un package culturel adéquat.

Sont donc mis en avant le côté technique, la dimension sportive, le fait qu’il y ait des règles, une assurance, un classement avec un titre, etc. Et la ministre des Sports Roxana Maracineanu a confié à la Fédération Française de Boxe la tâche de procéder à la légalisation du MMA, pour que l’ensemble passe d’autant mieux.

En un sens, tant mieux, comme cela la Gauche pourra condamner la boxe en soulignant son rôle dans la reconnaissance du MMA. La boxe professionnelle doit être interdite, comme d’ailleurs tout sport où l’objectif est d’obtenir le KO. Le fait de chercher à démolir quelqu’un doit être condamné culturellement, mieux encore : réprouvé.

Les Jeux du cirque version 21e siècle doivent être rejetés. Entendons-nous bien, ce n’est pas simplement une initiative de massacre culturel, c’est aussi des centaines de millions de dollars qui sont ici en jeu. L’entreprise Ultimate Fighting Championship a été vendue en 2016 pour… plus de quatre milliards de dollars. Mais il en existe de très nombreuses autres.

Pour cette raison, quand on parle du MMA on parle en fait simplement de la boîte de Pandore d’un massacre en règle dans un « octogone ». Inévitablement, de par le relativisme culturel et la décadence du capitalisme, cela ira plus loin. On ne peut que rire quand Cyrille Diabaté, ancien sportif de haut niveau dans les sports de combat et président de l’Alliance française du MMA, explique à Paris Match :

« Je me réjouis de cette nouvelle, notamment pour les jeunes qui vont pouvoir s’inspirer de la pratique et de ses valeurs fortes qui manquent dans notre société : la ponctualité, le respect, l’humilité, le courage, la volonté ou encore l’abnégation. »

La ponctualité aux réunions associatives ? Le respect des personnes âgées ? L’humilité face à la vie animale ? Le courage face à la brutalité patronale ? L’abnégation en faveur de l’environnement ? Car le problème du MMA, au fond, au-delà de la violence, c’est bien celui-là : prôner des valeurs abstraites, qui auraient une valeur en soi. C’est là précisément le contraire de tout art martial tel qu’il s’est développé historiquement : comme produit du peuple, lié à une société, avec un objectif qui est toujours la victoire sur soi-même. Car la plus grande victoire est sur soi-même.

> Lire également : La ministre des Sports va légaliser les combats de MMA

Le MMA n’a rien à voir avec tout cela, c’est le produit du capitalisme le plus vil, qui cherche des terrains toujours nouveaux pour asseoir sa soif de profit. Qui peut prétendre qu’il y a quelque chose de culturellement positif à passer à la télévision pour démolir quelqu’un en espérant ramener des milliers, des dizaines de milliers, des centaines de milliers de dollars ?

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Réactions à l’action commando contre la CFDT et nouvelles actions de la CGT mines-énergie Île-de-France

L’action commando de coupure du courant au siège de la CFDT a mis la CGT dans un embarras profond. L’ambiance est d’autant plus tendue que l’échec de la grève contre la réforme des retraites se pointe. La CGT mines-énergie Île-de-France a elle prolongé son initiative substitutiste en coupant le courant dans le sud de Paris.

Le plus simple, pour la CGT, cela a été de tenter d’oublier cette histoire d’un groupe menant une opération coup de poing, en mode commando, pour aller couper le courant au siège de la CFDT. Déjà la première occupation avait produit une situation intenable, mais alors là !

Il y a ainsi bien eu un communiqué de la CGT, mais il est resté très confidentiel, et surtout très mesuré, voire flou, pour ne pas dire obscur.

« Une nouvelle intrusion a eu lieu ce jour au siège de la CFDT afin d’y couper l’électricité. Cet acte, commis par des personnes non identifiées, est revendiqué par quelques syndicats de la CGT énergie.

La Confédération Générale du Travail ne cautionne pas de telles actions comme elle a déjà eu l’occasion de le dire à plusieurs reprises. Elle réaffirme son attachement à un débat démocratique dans lequel chaque organisation syndicale a le droit de défendre ses positions en propre.

Par ailleurs, la CGT dénonce l’attitude de mépris et de provocation permanente de la part du gouvernement qui ne cesse de stigmatiser les grévistes et qui fait clairement fi d’une très large opinion publique qui reste largement opposée à son projet.

La CGT soutient l’ensemble des salariés des industries électriques et gazières, comme des autres secteurs massivement en grève depuis plusieurs semaines, démontrant ainsi la forte opposition au projet de contre-réforme du gouvernement.

Elle appelle à une mobilisation massive dans tous les secteurs de l’économie, ce vendredi 24 janvier, jour de l’examen du projet de loi au Conseil des ministres »

Donc, si on ne sait pas qui c’est et qu’en plus ce sont seulement certains syndicats qui l’ont revendiqué, c’est comme si après tout rien ne s’était passé ! Par contre, pour ceux passant à la télévision, c’était forcément plus compliqué que dans un communiqué, alors il a fallu jongler.

À quelques minutes d’intervalle, deux secrétaires confédéraux ont ainsi réagi en cherchant le bon axe, de manière très différente. Fabrice Angei a pris ses distances avec « ce genre d’opération [qui] n’apporte rien au combat, voire même peut être contre-productif », tandis que Céline Verzeletti a défendu l’action en disant que ce n’était pas violent, préconisant même d’aller plutôt couper l’électricité à l’Élysée.

C’est qu’à la CGT, on joue le coup de Gribouille qui saute dans l’eau pour ne pas être mouillé par la pluie. Chacun cherche à tirer la couverture à lui alors que, forcément, la défaite s’affichant à l’horizon, il faudra bien rendre des comptes. Les couteaux s’aiguisent avec, à l’arrière-plan, la ligne négociatrice mais dure de Philippe Martinez et celle, dure mais négociatrice, de Laurent Brun de la CGT Cheminots et de Sébastien Menesplier de la CGT Mines et Énergie.

Le premier pense que la situation ne peut guère être favorable à la CGT et qu’il faut louvoyer, les autres veulent un retour à la CGT des années 1980, et au PCF des années 1980. Il y a d’ailleurs toute une base derrière ces derniers, avec par exemple le secrétaire général de la CGT Énergie Paris Cedric Liechti qui a expliqué sur un site lié à une partie de la CGT :

« C’est pour ça que le siège de la CFDT a été visé et qu’on a évidemment décidé de le revendiquer en tant que syndicat CGT et y compris, ne nous en cachons pas, par rapport à la sortie de Martinez d’il y a quelques jours suite à l’action de la coordination RATP SNCF où Martinez s’est désolidarisé de cette action et a apporté son soutien à Laurent Berger. Ça nous a paru totalement incroyable que notre syndicat apporte son soutien à une des principales courroies de transmission du capital et du patronat.

C’était donc aussi pour affirmer que nous, les bases CGT, on a aucun problème [avec cette action] et que nos positions sont extrêmement claires sur le rôle que joue la CFDT qui n’est sûrement pas un partenaire de la CGT. »

Non content de l’opération quasi comando au siège de la CFDT lundi, de nouvelles coupures d’électricité ont eu lieu dans le sud-est de la région parisienne hier. Celles-ci ont été directement revendiquées par le Secrétaire général de la Fédération CGT Mines et Énergie Sébastien Menesplier qui promet qu’il y en aura d’autres :

« Ce type d’action nous permet justement de faire mesurer au grand public que nous sommes en grève. Et donc, nous sommes médiatisés, on peut faire passer un message. »

En lieu et place de la lutte des classes, il y a donc la quête de bruit médiatique. Rappelons ici tout de même que si 75 000 électriciens et gaziers étaient en grève le 9 janvier 2020 selon la CGT FNME, ils n’étaient plus que 30 000 le 16 janvier. Cedric Liechti de la CGT Mines et Énergie Paris le reconnaît d’ailleurs lui-même pour justifier ce genre d’action et expliquer qu’elles vont se multiplier :

« la grève reconductible est encore minoritaire au sein de l’Energie. Elle est présente et active, s’organise très régulièrement de manière très visible. Pour l’instant, notre seule limite c’est l’élargissement à une plus large proportion de nos collègues. »

On est ici dans une fuite en avant typique du syndicalisme, par une tentative de compenser les faiblesses par l’action « directe ». Avec beaucoup d’hypocrisie également, puisque si l’impact sur l’économie était visé, en réalité tant le Marché d’intérêt national de Rungis que l’aéroport d’Orly disposent de systèmes de relais en cas de coupure de courant.

Ce n’est pas le cas bien sûr pour les familles qui se sont retrouvées sans électricité pendant plusieurs heures dans le pire des cas, ou de ces personnes coincées dans des ascenseurs. Mais cela ne semble pas être un problème et on a même Franck Jouanno de la CGT-Energie Val-de-Marne qui a eu le toupet de dire à la télévision :

« Ça me gêne mais bon il y a toujours des impacts. C’est pas non plus la fin du monde d’avoir une coupure, en général ça ne dure pas plus que la matinée. »

Ce n’est pas la fin du monde certes, mais ce n’est pas ainsi qu’on peut penser élargir un mouvement de grève dans le pays. Cela, les syndicalistes refusent de le comprendre. Entre l’UNSA et FO qui récusent la politique et la CGT qui n’en veut pas, il n’y a de place que pour la fuite en avant, et donc la défaite. Seule la Gauche aux commandes peut amener la victoire réelle d’une grève ! Les syndicalistes doivent se soumettre à la Gauche et ils le feront qu’ils le veuillent ou non.

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Le siège de la CFDT de nouveau pris pour cible, cette fois par des syndicats CGT énergie

Après la première affaire de l’occupation par des syndicalistes de la RATP et de la SNCF, le siège de la CFDT a été de nouveau pris pour cible. La démarche se veut ouvertement une provocation, avec une sorte d’opération commando masquée pour aller couper le courant.

La grève s’enlisant et échouant, il faut pour les syndicalistes de la CGT trouver un coupable. Plutôt que de se remettre en cause et de comprendre pourquoi il n’y a pas eu de mouvement populaire, il y a le raccourci populiste d’accuser la CFDT, dont les locaux du siège ont été l’objet d’une opération coupure de courant.

Il ne faut pas se leurrer : en plus de la dénonciation populiste, il y a ici une tambouille interne, au sens où il y a des batailles de factions, rendues encore plus agressives par l’ambiance de défaite inavouée.

La première action vendredi dernier était menée par un « marxiste révolutionnaire » (c’est-à-dire quelqu’un se revendiquant du courant trotskiste) et la seconde dénonce la « collaboration » de classe dans un communiqué signé par les différents syndicats de la CGT énergie d’Île-de-France (Paris, 91, 93, 94, 95, 77, 78, Ouest IDF, Bagneux).

On en revient pour cette seconde occupation à l’arrière-plan du conflit indirect entre le secrétaire général de la CGT Philippe Martinez et celui des cheminots Laurent Brun, c’est-à-dire entre la ligne post-PCF et une ligne promouvant plutôt un retour au PCF des années 1980. Philippe Martinez avait bien entendu dénoncé la première occupation des locaux du siège de la CFDT… et les syndicats d’Île-de-France de la CGT énergie (FNME) provoquent un chaos complet en réalisant ouvertement la même chose, en pire.

Parallèlement, la CGT FNME cherche à relancer le mouvement. Elle a revendiqué des filtrages devant le centre nucléaire de Gravelines, le blocage des stockages gaziers de Storengy (Gournay, Manosque, Beynes, Etrez), celui des plateformes Serval d’Enedis-Grdf (Bordeaux, Caen, Champigneulles, Gennevilliers, Ploërmel), la réduction au minimum technique et l’absence de remplissage des citernes des terminaux méthaniers d’Elengy Fos et Montoire, une baisse de production en général dans le thermique, l’hydraulique et le nucléaire, le blocage de plusieurs sites Enedis-Grdf et EDF, etc.

Cet élargissement de la lutte est une bonne chose, mais on voit à l’occupation de la CFDT qu’il s’agit surtout de témoigner d’une capacité de nuisance. Considérant que le mouvement ne s’élargit pas, la CGT se défend surtout elle-même.

Rappelons ici tout de même qu’il y a une chose qui s’appelle la Caisse centrale d’activités sociales (CCAS), servant de comité d’entreprise à EDF (ainsi qu’à ENGIE) et gérée par la CGT. Son budget c’est 1 % hors taxe des ventes d’électricité et de gaz en France depuis 1946 – soit 500 millions d’euros par an. Des centaines de milliers de gens partent notamment en vacances de manière liée à la CCAS qui, comme on le sait, a servi pendant des décennies d’arrosoir financier au PCF et à la CGT.

Qui perd cela de vue et s’imagine que les dirigeants de la CGT sont sincères oublie l’énorme dimension bureaucratique et financière de cette structure aux ramifications multiples. Cela est vrai d’ailleurs de tous les syndicats : il faut toujours chercher à décrypter les confits d’intérêt, batailles de factions, etc.

La ligne dure de la CGT joue son va-tout pour assurer la survie de cette structure et ne pas se faire remplacer par la CFDT dans le nouveau dispositif de négociations que veut impulser Emmanuel Macron en remplacement de ce qui s’est fait pendant cinquante ans.

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«Choose France»: le capitalisme tourne à plein régime en France

Emmanuel Macron ne s’en est jamais caché, son idéologie est celle de la bourgeoisie et sa préoccupation est l’élargissement du capitalisme. Il y a donc eu ce grand sommet au Château de Versailles ce lundi 20 janvier 2020 pour soi-disant mettre en relation des investisseurs, en fait surtout mettre en avant de grands investissements capitalistes et en faire une « bonne nouvelle ».

Huit milliards d’euros vont être investis en France selon le ministre de l’Économie Bruno Le Maire. C’est que le capitalisme tourne à plein régime en France et il s’agit pour ses défenseurs d’en faire la promotion coûte que coûte, pour masquer la crise profonde de ce système économique et gagner la population à sa cause plutôt qu’à la lutte des classes.

La notion d’« investissement » est très utile pour cela et c’est donc ce terme qui est largement mis en avant par la communication gouvernementale dans le cadre de ce sommet « choose France » (choisir la France). Les commentateurs médiatiques, les syndicats, les patrons de PME, les petits commerçants : tout le monde adore cette idée qu’il y ait des « investissements ».

Le tapis rouge a donc été déroulé pour 180 chefs d’entreprises français et étrangers au Château de Versailles, avec quasiment tout le gouvernement (19 ministres) mis à contribution pour cette grande fête du capitalisme. Les pires exploiteurs et destructeurs de la planète avaient donc hier tous les honneurs, dans l’un des endroits les plus prestigieux du monde. Étaient présents des dirigeants de Coca-Cola, Fedex, Google, Netflix, Hyundai, Samsung, General Electric, Mastercard, Rolls Royce, Unilever, Total ou encore BNP-Paribas.

Cela aurait été un succès et il faudrait se réjouir de quatre milliards d’euros investis à Saint-Nazaire pour construire d’immondes paquebots, ceux-là même qui nuisent à Venise, pour des croisières d’un vide culturel affligeant.

Il faudrait également se réjouir que Coca-Cola investisse un milliard à Dunkerque pour continuer à produire sa bombe à diabète et à obésité, ou bien de l’ouverture d’un siège français par Netflix, ce monstre anti-culture dont on se rendra compte dans quelques années qu’il a tué le cinéma avec des milliers d’heures de séries aussi insipides qu’interminables.

Il faudrait encore se réjouir des investissements des groupes d’interim Adecco et Manpower, de Mastercard, de Fedex, de la banque américaine JP Morgan, de Toyota, d’Ericson ou des groupes pharmaceutiques AstraZeneca, Bection Dickinson et Biogen.

Tout cela serait formidable et il faudrait bien sûr remercier le président, ce monarque républicain à la française, sans qui rien ne serait possible à lire le ministre de l’Économie Bruno Lemaire :

« #ChooseFrance est un succès: les investisseurs sont au rendez-vous avec 8 milliards d’€ d’investissements! Pour tous les Français, tous les territoires, cela veut dire plus d’emplois et de prospérité. Depuis l’élection d’@EmmanuelMacron notre pays retrouve sa puissance économique »

Mais quand on est à Gauche, on ne se réjouit pas de ces grands investissements capitalistes. Quand on est à Gauche, on sait qu’ils ne signifient que plus de capitalisme, plus de pénétration du capitalisme dans le pays, plus de soumission des travailleurs et de la population tout entière au règne de la marchandise.

La Gauche, si elle ne renie pas ses fondamentaux historiques, a beaucoup mieux à proposer que l’élargissement du capitalisme : le socialisme, le pouvoir de la classe ouvrière, la grande utopie d’un monde meilleur et tourné vers la nature, les animaux et tous les êtres humains de la Terre !