Catégories
Politique

Confinement et immigration: les économies torpillées du Mexique, du Salvador, du Honduras

Au lieu de prôner une humanité unifiée, les libéraux prônent le droit à immigrer comme on le souhaite. C’est là le reflet des intérêts du capital et cette émigration contribue à la dépendance économique de pays entiers.

Aux États-Unis, la question de l’immigration semble évidente : les Républicains seront contre et les Démocrates pour, et les Démocrates seraient de Gauche. En réalité, les Démocrates sont de droite libérale, les Républicains de Droite conservatrice. Et il est facile de voir qu’une large partie de la Gauche française s’est transformée en « Démocrates » à l’américaine.

L’immigration est en effet un puissant outil pour le capitalisme, qui exerce ainsi une pression maximale sur les salaires, tout en empêchant le développement des pays d’émigration. Les forces vives des pays peu développées sont pompées : c’est le brain drain, avec les gens les plus éduqués qui sont littéralement importés dans les pays riches.

Mais il y a aussi les gens voulant ardemment travailler afin de subvenir aux besoins de leurs familles, à quoi s’ajoutent ceux croyant au rêve américain (ou britannique, allemand, français, etc.). Ces gens se retrouvent pris au piège. Ils sont aliénés ou bien, lorsqu’ils ont conscience qu’ils sont devenus dépendants d’un capitalisme despotique, ils sont broyés. Certains font carrière, bien entendu, et ils contribuent puissamment alors à l’idéologie capitaliste, tout en devenant des bourgeois arrivistes avec un esprit de nouveau riche.

Il ne s’agit nullement donc de simples parcours individuels, les conséquences sont catastrophiques à une grand échelle, comme le montre justement les désordres actuels dans l’économie aux États-Unis en raison de la crise sanitaire. En effet, le confinement partiel bloque une partie de l’économie et il s’avère que des pays voient une partie importante de leur propre économie dépendre des envois d’argent depuis les États-Unis.

L’année dernière, 17 % de l’économie salvadorienne consistait en des envois d’argent par des émigrés partis aux États-Unis. Le chiffre monte à 20 % pour le Honduras ; il est d’autour de 10 % pour le Guatemala. Pour le Mexique, le chiffre est de 3 %, mais ici il ne faut pas sous-estimer l’importance de ces quelques pour cents, car son montant est de 34 milliards de dollars.

Le président mexicain Andrés Manuel López Obrador a lui-même fait un appel aux émigrés pour leur demander de ne pas cesser l’envoi d’argent à leurs familles au pays. C’est dire à quel point le Mexique est ébranlé, ce qui révèle sa dépendance.

D’ailleurs, il en est de même pour le Sénégal où il est estimé que 9,1 % du PIB provient des transfert d’argent par les émigrés, ou encore dans l’ouest du Mali où il est estimé que 20 % des dépenses des familles proviendrait de ces transferts d’argent. La crise sanitaire pose exactement les mêmes problèmes pour ces pays, avec des baisses de transferts drastiques constatées par les opérateurs.

Qui plus est, comme on le sait le point de vue libéral voit les choses sous l’angle des individus, mais en réalité l’émigration consiste simplement en le départ de communautés. L’émigration a ainsi été massive depuis la région mexicaine du Michoacan ; pour elle, les envois depuis les États-Unis forment 11,6 % de l’économie, soit 3,4 milliards de dollars. Ici, une région entière se voit torpillée.

Un autre aspect est évidemment que le capitalisme permet l’immigration mais ne permet pas l’accès aux soins de manière aisée. Seule la France, parmi les grands pays capitalistes, a ici une politique d’ouverture systématique, afin de renforcer son secteur de la santé et d’éviter des problèmes de santé contaminant toute la population depuis des zones immigrées particulièrement dense, telle la Seine-Saint-Denis. Dans les autres pays la situation est catastrophique. Les immigrés ont peur pour leur santé, à juste titre, n’ayant pas de couverture sociale en ce domaine ; d’autres, lumpenprolétarisés, se voient devenir malades, devenant des vecteurs du covid-19 de par leur situation misérable.

L’immigration correspond en fait parfaitement au chaos capitaliste : chacun fait ce qu’il veut comme il veut, sans aucune considération pour la collectivité. Comment l’Inde aura-t-elle des médecins si tous ses médecins de qualité émigrent pour faire carrière ? Comment le Mexique pourra-t-il se développer si les États-Unis pompent sa force de travail et le place dans une situation de dépendance ?

On ne peut pas comprendre le terrible ancrage du Front national, aujourd’hui du Rassemblement national, dans les zones ouvrières, sans voir qu’il ne s’agit pas de confondre les immigrés et l’immigration, d’assimiler la misère individuelle des immigrés à l’immigration comme outil du capital. Le mouvement ouvrier a toujours souligné d’ailleurs la différence entre ces deux aspects. Et il n’a jamais considéré que l’internationalisme des ouvriers consistait, comme les anarchistes, à demander à ce que les frontières tombent… dans le cadre du capitalisme.

Catégories
Politique

La lettre incendiaire de Léon Landini (PRCF) à François Ruffin

Léon Landini, figure de la Résistance qui fut également gravement torturé par les nazis est le président du PRCF, un groupe à la fois en dehors du PCF et dans le PCF, qui entend maintenir la ligne du parti d’avant son tournant que l’on pourrait qualifier de post-communiste. Le PRCF a comme modèle le PCF des années 1980 et a une influence notable dans toute une partie de la CGT. Léon Landini s’est retrouvé dans une émission sur YouTube confronté à François Ruffin et explique qu’il s’est fait piégé, notamment en raison de la faiblesse due à son âge. Dans une lettre ouverte à François Ruffin, il remet quelques points sur les « i » tout à fait nécessaires.

« Léon Landini

Officier FTP-MOI – Président de l’Amicale des Anciens FTP-MOI  des  bataillons Carmagnole-Liberté de la Région Rhône-Alpes – Interné de la Résistance – Grand Mutilé de Guerre, suite aux tortures endurées par la Gestapo  pendant mon internement.

Officier de la Légion d’Honneur – Médaille de la Résistance.

Décoré au  titre de Résistant émérite par le Gouvernement Soviétique.

Président du Pôle de Renaissance Communiste en France (Ce que je considère comme un grand honneur).

Réponse de « Landi à Ruffian »

Il s’agit de la vidéo  que tu as présentée  sur  YouTube  le 29 avril 2020

Mon état de santé me joue des tours, c’est ce qui m’a amené à répondre avec quelque retard aux sarcasmes que tu m’as adressés au cours de l’émission, à laquelle Gilles Perret  m’avait invité et qui, avec beaucoup d’égards, m’a présenté en indiquant que j’avais assassiné des soldats allemands. On m’a toujours dit que celui qui assassine est un assassin. Merci Gilles.

Au cours de cette émission, tu m’as appelé « Landi » à plusieurs reprises. Je n’ai pas apprécié, car je sais pertinemment que tu connais parfaitement mon nom, en conséquence n’aimant pas que l’on ampute volontairement mon nom, à mon tour je modifie légèrement le tien, au lieu de Ruffin  je vais t’appeler Ruffian.

J’ajouterai que de la façon dont  tu m’as traité au cours de cette émission, si je me laissais aller, c’est de bien d’autres noms que je te traiterais.

Dès le début de mon intervention, convaincu de bien faire, j’ai indiqué que : « Le programme du Conseil National de la Résistance n’a pas seulement été écrit qu’avec de l’encre, mais également avec le sang de toutes celles et tous ceux qui sont morts pour que nous puissions vivre libre dans un monde où il ferait bon vivre » et  j’ai ajouté, « que 52 de mes proches camarades sont morts sous la torture et malgré les effroyables supplices que Barbie et ses sbires leur ont fait endurer, pas un seul n’a avoué quoi que ce soit ».

À ce moment-là, tu m’as interrompu, cherchant à me mettre dans l’embarras et si possible à me ridiculiser en me posant la question suivante :

« Cela veut quand même pas dire que pour avoir de nouveaux jours heureux, il faut se faire torturer, emprisonné et mourir ».

Question idiote et offensante, posée avec la conviction et que tu allais, tenant compte de mon âge, me désarçonner et  que surpris par une pareille stupidité j’allais me mettre à bafouiller.

Tu vas te rendre compte que ce vieil homme que tu voulais ridiculiser, malgré son âge, il lui reste encore assez de verve pour répondre comme il se doit, à un petit prétentieux, qui se prend pour quelqu’un avant même d’être quelque chose.

Toutefois à cause du respect que tu devrais avoir à l’égard de celles et ceux  qui ont survécu à une telle épopée, tes offenses tu aurais dû te les garder pour toi.

Lorsque Gilles Perret m’a invité à participer à cette émission vidéo, il m’a indiqué qu’il s’agissait d’évoquer le programme du CNR et les Jours Heureux, en conséquence j’ai voulu, en préambule, et surtout en tant qu’ancien résistant, mettre en évidence ce qu’était le CNR et dire, combien ceux qui se sont battus les armes à la main y sont attachés.

Comme tu le dis « on s’est fait torturer, emprisonner et malheureusement trop souvent massacrer ».

Mais pour ton éducation, il me semble utile que tu saches que si nous avons pu supporter l’insupportable et nous sublimer à notre insu, c’est qu’en nous engageant au sein des FTP-MOI et en pratiquant la guérilla urbaine, nous savions tous que nous pouvions à tout moment passer de vie à trépas.

Nous nous battions de toutes nos forces contre l’occupant et contre les sbires qui s’étaient mis à leur service.  Notre courage émanait du fait que nous avions la conviction que s’il nous fallait mourir, nous n’allions pas mourir pour rien, et nous risquions notre vie avec la certitude qu’après la Libération, les survivants pourraient vivre heureux dans Une France Forte, Libre, Démocratique, Indépendante, et Souveraine. Ce qui ne peut être le cas en étant prisonnier d’une Union Européenne (dirigée par Berlin) alors que nous savons tous que l’UE  est antinomique du programme du CNR.

C’est à partir de tous ces combats et de tous ces sacrifices, que le programme du CNR a pu être écrit, et appliqué entre 1945 et 1947 par des ministres communistes et, seulement par des ministres communistes.

Ce sont pour toutes ces raisons que nous, anciens FTP-MOI et militants communistes, nous en revendiquons la paternité et, dès que de sombres individus cherchent à utiliser le CNR à d’autres fins que pour ce qu’il a été créé, nous montons au créneau et nous rappelons à l’ordre celles et ceux qui cherchent à l’utiliser pour se mettre en évidence, désireux apparaître pour ce qu’ils ne sont pas.

Sarkozy n’utilisait-il pas pour se mettre en valeur le nom de Guy Môquet et voici que Macron cherche à cacher toutes ses malhonnêtetés en promettant à notre peuple « Des Jours Heureux » au moment même où il est en train de détruire les derniers  conquis qu’il nous en reste.

En conclusion, je n’accepte pas au final d’avoir été utilisé comme le résistant de service qu’on écoute d’une oreille distraite pour tenter de lui faire cautionner un projet politique dont je n’avais pas été informé avant l’émission et que je ne partage pas : en utilisant le nom du CNR, tout en contournant tout ce qui fit la force du véritable, auquel nous devons les plus grandes avancées de notre histoire. Il ne peut pas y avoir de véritable nouveau CNR en contournant et en écartant les communistes et la classe ouvrière, pas de véritable nouveau CNR sans la nationalisation des banques et des entreprises stratégiques. Et surtout, pas de nouveau CNR sans rupture franche avec l’euro et l’UE.

Après cette brève mise au point, qui j’espère te servira.

Léon LANDINI.

PS : Ma fille vient de m’apprendre que tu lui as écrit, en lui disant : « Je connais un peu ton père, son parcours, ses convictions pour l’avoir interrogé durant  près de quatre heures chez lui ».  FAUX ! Tu n’es  jamais venu chez moi. J’ai l’impression que ta mémoire te joue des tours, peut être mon cher François, serait-il bon que tu consultes un psychiatre. »

Catégories
Écologie

Les filets anti-pigeons meurtriers de Bougival

La question des filets placés au niveau d’un pont d’une départementale à Bougival est exemplaire. C’est un véritable piège pour les pigeons et on en trouve de similaires à travers tout le pays.

Il y a tout à fait lieu de soutenir la pétition destinée à Pierre Bedier, président du Conseil Général des Yvelines (78), ainsi qu’aux élus de ce département. Déjà, parce que le filet placé à Bougival sur le pont de la route départementale D321 est intolérable en soi. Mais aussi parce qu’au-delà de cette question particulière, de tels filets existent partout en France.

Naturellement, il y a de bonnes âmes pour intervenir, mais c’est illégal, très difficile car à plusieurs mètres de hauteur et, qui plus est, parce que les filets sont sacrément solides. En clair à moins d’assumer l’interdit et de disposer d’un bras télescopique de quatre – cinq mètres avec au bout une lame bien tranchante ou une tête de cintre bien solidement accrochée, c’est pratiquement impossible d’intervenir.

Raison de plus d’appuyer, au-delà de toute autre considération, également et quoi qu’on pense d’une pétition, qui a le mérite de faire se mobiliser les gens, de leur faire prendre conscience, d’exercer une pression salutaire. C’est à ce genre de détails qui n’en sont pas qu’on voit qui a un cœur et qui n’en a pas.

Pour signer la pétition -> mesopinions.com

Voici le texte de la pétition :

« Demandons le retrait du filet qui tue des pigeons à Bougival (78)

Auteur(s) :
PAZ
Destinataire(s) :
Pierre BEDIER, Président du Conseil Général des Yvelines (78) et les élu-e-s du département
La pétition

Depuis des mois, des dizaines de pigeons meurent d’épuisement sous le pont de la route D321, du côté de Bougival (Yvelines).

En effet, un filet a été placé sous ce pont par le Conseil Général des Yvelines. Ce filet constitue un véritable piège pour les pigeons, qui parviennent à s’y engouffrer et ne peuvent plus à en sortir.

Par ailleurs, les cadavres restent en suspension dans le filet, ce qui soulève également une question d’ordre sanitaire.

Début avril 2020, PAZ a alerté la Mairie de Bougival, qui se déclare incompétente en la matière, en affirmant que le Conseil Général des Yvelines est le gestionnaire de l’ouvrage (le pont).

PAZ a également sollicité le Conseil Général des Yvelines. Après plusieurs échanges, nous n’avons obtenu aucun engagement concernant l’enlèvement de ce filet, source de souffrance et de mort pour plusieurs dizaines d’oiseaux.

Aux côtés de PAZ, nous demandons au Conseil Général des Yvelines :

  • le retrait du filet sous le pont de la route D321, côté Bougival, dans les plus brefs délais ;
  • la prise en considération de la condition animale au moment du choix des méthodes, afin de favoriser systématiquement une cohabitation pacifique avec les animaux. »
Catégories
Culture

Michel: beaux-arts style et culture pop

Michel fait typiquement partie de cette nouvelle génération de rappeur-chanteur ou chanteur-rappeur, assumant l’électro et la pop avec un grand sens artistique. Il est d’ailleurs à la pointe de toute une esthétique florissante dans et autours des écoles des beaux-arts, combinant le style banlieusard de la fin des années 1990 et du début des années 2000 avec une fascination/attraction pour toute une frange de culture populaire, de la culture de masse.

Ce clip, une reprise/détournement de holydays de Michel Delpech, est absolument somptueux de ce point de vue, avec une grande finesse.

Le filtrage vidéo force volontairement le trait pour donner un ton 1990, tout comme l’instrumentale typique de l’eurodance de l’époque. Tout le sens du clip réside dans ce décalage entre lui, jeune branché, qui surjoue l’ennui, et son entourage familial habillé de manière ordinaire, qui s’amuse grandement. Le choix d’un tel film dans une famille populaire, en l’occurrence sa propre famille lors d’une véritable fête, montre d’ailleurs l’approche démocratique/populaire, authentique, que peut avoir l’artiste, originaire de la périphérie de Valenciennes dans le Nord.

On retrouve la même démarche avec cet autre clip, reprise/détournement de Michel Fugain, cette fois dans un bar karaoké de Belleville. Les paroles assumant les drogues dures et le champ lexical de la drogue sont là aussi bien trouvées. Ni apologie, ni critique de la drogue, c’est surtout une manière de jouer sur la contradiction entre une chanson originale assez lisse, pour ne pas dire insipide, typique d’une certaine époque disons insouciante, et sa version actuelle plus rude, à l’image de l’époque nouvelle. Le tout bien sûr autour d’une esthétique faussement kitch, ou volontairement kitch si l’on veut, soigneusement travaillée.

Michel a sortir un EP « Le vrai Michel », en janvier 2020 avec 8 titres d’une grande qualité dont voici un extrait :

Il a sorti hier le clip, là encore très esthétiques, de son dernier titre tejla :

Catégories
Politique

Le plan franco-allemand de relance ou la reconnaissance de l’hégémonie allemande

Emmanuel Macron et Angela Merkel présentaient ce lundi 18 mai 2020 une « initiative franco-allemande pour la relance européenne face à la crise du coronavirus ». Le plan, qui n’a rien d’officiel ni de très précis pour l’instant, consisterait en 500 milliards d’euros empruntés au nom de l’Union européenne et destinés à relancer différents secteurs économiques touchés par la crise. S’il est de grande ampleur, ce plan consisterait pour les pays les plus fragiles surtout en leur mise sur orbite de l’Union européenne en tant qu’organisme structuré, et donc principalement de l’Allemagne.

« Le président de la France fournit une trame narrative et une valorisation romancée, la chancelière allemande les détails. »

Cette phrase issue d’un article de la revue allemande Der Spiegel à propos de l’initiative franco-allemande présentée hier en dit long sur l’état d’esprit qui peut exister en Allemagne. Si Emmanuel Macron peut s’imaginer détenir avec cette initiative une victoire majeure de l’idéologie européenne et en faire des caisses comme il en a l’habitude, les choses ne sont pas considérées de la même manière du côté de la puissance allemande.

Au sens strict, cette initiative, devant être validée par les autres pays avant d’être effective, consiste même justement en la fin de toute perspective européenne fédéraliste, au sens où Emmanuel Macron l’entend, au sens où l’« idéal » supranational européen le concevait. Cela pour une raison très simple : l’Allemagne ne voulait pas entendre parler des « coronabonds » ou « eurobonds » réclamés par la France, l’Italie et l’Espagne réunies ; elle a obtenu gains de cause.

Rappelons que ces « coronabonds » ou « eurobonds » devaient consister en une possibilité d’emprunt au nom de l’Union européenne pour chaque pays, afin de mutualiser la dette. Cela revenait à lier fortement les pays par leur dette, commune, comme elle l’est pour un État, mais en gardant chacun son autonomie.

L’initiative, ou plutôt la proposition faite hier par Emmanuel Macron et Angela Merkel consiste en tout autre chose. L’Union européenne lèverait de la dette en son nom, puis déciderait de comment distribuer cet argent dans des secteurs précis, avec des critères précis. L’argent bien sûr ne sera pas « donné » généreusement, puisque chaque pays contribuera au remboursement de cette dette à hauteur de la proportion à laquelle il participe au budget sur les prochaines années.

Autrement dit, c’est l’Union européenne qui décidera et donc surtout l’Allemagne, principale puissance et principale contributrice au budget. Pour que les choses soient bien claires, la chancelière allemande a tenu à préciser qu’il s’agit là d’un « effort colossal ». Les négociations pour la répartition de ces 500 milliards seront donc importantes et l’Allemagne sera en position de force en sa qualité de première contributrice au budget.

L’Allemagne, mais aussi son satellite autrichien ainsi que les Pays-Bas, la Suède et le Danemark, n’imaginaient pas devoir supporter une dette commune sans contre-partie, risquant de voir leurs économies fragilisées par la crise des pays du sud, surtout l’Italie et l’Espagne, mais aussi de plus en plus clairement la France. Ils auront donc la possibilité avec ce système, s’il est mis en place, d’organiser eux-mêmes la relance des pays fragilisés par la crise, ou en tous cas de contribuer fortement aux choix des secteurs, des formes de contribution, etc. Il en va de même pour les pays de l’Est européen, encore plus satellisés par le couple germano-autrichien.

Le plan annoncé par Angela Merkel et Emmanuel Macron consiste donc en une vassalisation pour les pays ayant recours à cette aide. C’est le même mécanisme que celui du Fonds monétaire international, bien connu dans les années 1990/2000 pour avoir « aidé » des pays pauvres en l’échange de leur soumission aux plus grandes puissances du capitalisme.

L’Allemagne, l’Autriche, les Pays-Bas, la Suède, le Danemark, n’ont pas intérêt à un effondrement total de l’Italie ou de l’Espagne et dans une moindre mesure de la France. Ils ont par contre intérêt à ce que ces pays se transforment en producteurs industriels les intéressant, directement dans leur giron économique, ainsi qu’en des destinations touristiques sur lesquels ils ont relativement la main. Ce qui, d’ailleurs est déjà en partie le cas, surtout pour l’Italie pour l’instant.

Il était question dans la présentation de l’initiative hier de « souveraineté industrielle », notamment par rapport à la Chine. On comprend donc que les pays en difficulté se verraient, avec ce plan, désignés candidats pour accueillir des productions manufacturières à faible valeur ajoutée, rapatriées depuis la Chine.

La France de son côté, a déjà annoncée par la voix de son ministre de l’Économie Bruno Le Maire qu’elle sera directement concernée pour recourir à ce plan de plan de relance, notamment pour « rénover l’hôpital ». Il ne faudrait pas imaginer ici que la France sera en mesure de faire ce qu’elle veut avec cet argent et « rénover » à sa guise le système hospitalier. En position de faiblesse, incapable d’assumer elle-même son système de santé, la France devra se soumettre encore plus aux impératifs du capitalisme, alors que les pays les plus puissants pousseront encore plus dans le sens de la rigueur budgétaire et pour des mesures allant dans le sens de leur propre capitalisme.

Pour donner le ton, les services du chancelier autrichien Sebastian Kurz ont déjà expliqué hier que selon eux, le plan de relance de 500 milliards devrait « se faire sous forme de prêts et non de subventions ». Autrement dit, cela reviendrait pour les pays « aidés » à payer deux fois… une fois avec leur contribution au budget pour rembourser leur part du prêt commun, une autre fois en remboursant directement l’« aide » accordée ! C’est, on l’aura compris, une façon de montrer ses muscles pour les négociations à venir et cela signifie que les pays fragilisés comme l’Italie et l’Espagne, mais aussi la France dans une moindre mesure, n’auront pas d’autre choix que d’accepter beaucoup de chose pour accéder à cet argent dont ils vont avoir un besoin vital.

Cela annonce pour la période à venir une recomposition très nette des rapports de force au sein de l’Union européenne avec un moteur franco-allemand de plus en plus faible et une hégémonie allemande de plus en plus affirmée. Cela renforcera en contrepartie d’autant plus les velléités nationalistes et guerrières, anti-allemandes, en France, en Espagne et en Italie, de la part de bourgeoisies refusant la vassalisation. Il suffit de se rappeler comment Marion Maréchal avait récemment proposé une Union latine, correspondant tout à fait à cette perspective.

Comment la Gauche va-t-elle faire face à un libéralisme pro-allemand et un nationalisme anti-allemand, sans elle-même tomber dans le chauvinisme ni le libéralisme? Voilà le cœur de sa problématique.

Catégories
Écologie

Les cas de covid-19 dans les abattoirs, un symptôme du capitalisme

Plusieurs cas de contaminations au covid-19 ont été détectés dans des abattoirs français, avec plus d’une centaine de cas recensés. Cela place l’industrie de la viande au centre des attentions sanitaires, et sociales.

À Saint-Jacut-du-Mené, près de Saint-Brieuc dans les Côtes d’Amor, il y a 69 cas positifs confirmés. À Fleury-Les-Aubrais, près d’Orléans dans le Loiret, ce sont 34 cas et il y a aussi une vingtaine de cas confirmés à Essarts-en-Bocage en Vendée.

Cela n’est pas une exception française puisqu’en Allemagne, aux États-Unis mais aussi en Australie, des centaines de salariés de ce secteur sont touchés. Aux États-Unis, ce sont quatre inspecteurs sanitaires d’abattoirs qui sont décédés du Covid-19 et on estime que ce secteur est touché à hauteur 4 %.

D’après l’Agence régionale de santé de Bretagne qui s’est penchée sur le cas de l’abattoir de Saint-Jacut-du-Mené, les « clusters » en abattoir résulte de la promiscuité qui règne dans les ateliers et les vestiaires.

La manipulation de scies et surtout de karchers augmentent également la diffusion d’aérosols qui transportent des potentielles gouttelettes humaines porteuses du Covid-19. Il y a aussi la question des travailleurs détachés, souvent issus d’Europe de l’Est, qui ont du mal à respecter les consignes sanitaires, ne comprenant tout simplement pas le français. Leurs conditions de logement, dans la promescuité, pourrait aussi être une cause de la diffusion du virus.

Dans les ateliers, l’organisation du travail à la chaîne avec des postes de découpes nécessitant un travail manuel répétitif très précis rend difficile la distanciation physique. C’est une différence par exemple avec d’autres branches de l’industrie agroalimentaire, notamment de fruits et légumes, où ce n’est pas un animal qui est débité et découpé en plusieurs parties très fines.

À Saint-Jacut-du-Mené, petit village de 726 personnes, l’abattoir Kermené filiale de Leclerc, emploie près de 2 000 personnes. Ce sont 7 700 cochons, 500 gros bovins et 200 veaux qui sont tués et transformés tous les jours, nécessitant un nettoyage régulier au karcher… Les abattoirs de Fleury-Les-Aubrais, propriété de Sicarev Coop, et Les Essarts, propriété de LDC (Lambert Dodard Chancereul) , emploient respectivement 400 et 700 salariés.

Les grandes entreprises de l’agroalimentaire qui détiennent ces usines montrent l’incapacité du capitalisme à assurer la vie dans des conditions naturelles normales. D’ailleurs, l’abattoir de Fleury-Les-Aubrais était déjà à l’arrêt au début de l’année pour cause de listériose et il est évident que la promiscuité humaine dans un environnement traitant des milliers d’animaux morts à la journée n’est pas logique écologiquement.

Ces usines sont l’expression directe de la nature anti-démocratique et anti-populaire d’un capitalisme agonisant, et la gauche doit assumer une critique générale de cet horrible « secteur » qui doit, à terme, être démantelé.

Catégories
Culture

Moby appelle à un retour à l’esprit techno de la fin des années 1980

Moby vient de sortir un album et c’est toujours l’occasion de saluer cette figure musicale, culturelle, politique. Il a réussi à maintenir une profonde cohérence, des valeurs sérieuses tout en cherchant autant que possible à éviter toute forme de corruption.

Moby a sorti son 17e album et on aurait tort de le juger selon des critères traditionnels. Moby ne prétend pas à la nouveauté et il n’est pas là pour étaler son ego. Il aurait pu aisément mener une carrière commerciale, mais il a réussi à maintenir son intégrité punk initiale. L’un de ses coups marquants a été, après l’important succès de l’album Everything Is Wrong en 1995, la sortie l’année d’après d’un album d’alternative rock au son parfois carrément abrasif, sur une base punk ou hardcore, Animal rights.

Sa carrière commerciale fut torpillée, mais lui s’en moqua très clairement. C’était une question d’intégrité. Il considère d’ailleurs Animal rights comme son meilleur album. Et l’album suivant, Play, avec un retour à la musique électronique fut son plus grand succès. Là les choses se passèrent mal : il sombra dans la décadence. Drogues, alcool, coucheries, jusqu’à l’implosion. Qu’à cela ne tienne, assumant le combat et la rupture, il vit désormais dans un trois pièces, rejetant ce passé corrompu.

Car, de quel « succès » parle-t-on ? Moby est l’un des nôtres. Lui, qui a désormais « vegan for life » de tatoué sur le cou, a distribué ces dix dernières années la quasi totalité de son argent gagné à des associations, notamment en faveur des animaux. On ne peut pas le juger selon des critères propres au capitalisme et il en va de même pour son dernier album.

Si demain il y avait le Socialisme et qu’on confisquait ses richesses, en admettant qu’il en ait réellement, il dirait : ah, cool. Et il faut bien faire attention : Moby ne vient pas de la petite-bourgeoisie intellectuelle. Il vient des couches populaires. Il a même vécu à un moment dans une usine à moitié abandonnée, sans eau courante mais avec l’électricité gratuite, lui permettant d’élaborer de la musique électronique après qu’il ait participé à la scène punk hardcore.

Il n’a d’ailleurs jamais pu s’entendre avec les « majors » de l’industrie musicale ni tous les escrocs de ce milieu et finalement il est bien content d’être un énorme travailleur produisant énormément de choses, faisant de la « méditation », « déçu » d’être hétéro mais ne passant pas pour autant dans les délires postmodernes. Il est à la frontière : son difficile parcours et ses racines, tant alternatives que populaires, en font quelqu’un d’ancré dans le réel. Il faut dire que le véganisme ne pardonne pas niveau ancrage dans le réel, surtout quand on l’est comme lui depuis 1997.


Sur son compte Twitter, Moby se définit comme « un amoureux de l’ALF » et il est d’ailleurs évidemment également straight edge, avec VX (pour vegan straight edge) tatoué à côté de son œil droit. Il a un regard très critique sur ses errements passés à la suite du succès de l’album Play et dans une interview au JDD à l’occasion du nouvel album, il raconte avoir rencontré Donald Trump « à plusieurs reprises quand [il vivait] à New York durant [ses] années décadentes ».

Tout cela pour dire qu’il est un personnage terriblement sympathique, à rebours des beaufs et Dieu sait s’il y en a en France et aux États-Unis. Ce qui amène la question : pourquoi n’y a-t-il pas plus de Moby ? Et puis où sont tous nos Moby français ? Il faut dire ici que les Français considèrent la viande, l’alcool et les coucheries comme un haut niveau de civilisation, ce qui fait qu’on est évidemment très loin du compte.

On ne doit pas s’étonner que le nouvel album, All visible objects, a ainsi une approche assez recherchée. Musicalement, c’est en quelque sorte un retour de la fin des années 1980, avec ce son des début de la musique électronique, dont Voodoo Ray d’A guy called Gerald fut un sacré emblème. On est dans cet esprit mêlant sonorités house, dub, revendication d’universalisme et de paix, avec des nappes électroniques ambiantes.


C’est un choix esthétique de Moby, sa contribution. Il est conscient que la fin des années 1980, dont il explique être nostalgique avec « 10 000 autres ravers », portait dans la musique électronique une énorme volonté de changement, avec une profonde dimension existentielle. Ce qui s’est déroulé en Grande-Bretagne a été énorme, d’une ampleur formidable, malheureusement anéantie par les drogues. La techno assumait l’universalisme, la modernité technologique, le fait de vivre en paix, de vouloir l’harmonie avec la planète. C’est avec cela que Moby appelle à renouer. Et il a raison.

Catégories
Société

Le Monde part en défense des clubs «libertins»

La ligne éditoriale du Monde est subtile : d’un côté il y a un positionnement chrétien-démocrate, avec une mise en perspective discrète en faveur de la ligne catholique de gauche. De l’autre, il y a le libéralisme assumé dans les mœurs avec le soutien à toute la décadence des grands bourgeois parisiens.

Le quotidien Le Monde a publié un article plein de tristesse : « L’horizon n’est pas dégagé pour les clubs libertins ou les fêtes échangistes ». On reconnaît cette lyrique décadente propre à la bourgeoisie intellectuelle urbaine :

« La sociabilité sexuelle peut-elle survivre aux lenteurs du déconfinement ? La question mérite d’être posée. Car après les théâtres et les restaurants, après les grands festivals, il faudra encore se préoccuper du sort des discothèques, des saunas gays, des fêtes échangistes, des clubs libertins – ces lieux où l’on se touche, où l’on s’embrasse, et dont le rapprochement physique constitue la raison d’être (…).

Dans ces conditions, pourquoi ne pas retrouver de la fluidité sexuelle… en consommant directement en ligne ? En déportant nos ébats et orgies sur les plates-formes de vidéoconférence ? »

Suit un catalogue de sites « libertins » en ligne et l’appel à « donner de sa personne » à la réouverture de ces clubs pervers absolument typiques de la grande bourgeoisie. Ce qui est fou, c’est que cette dernière phrase aurait semblé normale à la Gauche en général des années 1905 au début des années 1980, alors qu’aujourd’hui, lessivée par le libéralisme, une bonne partie des gens de Gauche considéreraient que cela relève d’un point de vue de Droite !

Pour les libéraux s’imaginant de Gauche, il serait tout à fait normal de coucher avec n’importe qui, de considérer la fidélité comme un préjugé du passé, de voir en l’hétérosexualité une norme aliénante. Le capitalisme a réussi entièrement son entreprise idéologique auprès de tels gens.

Pour aider à remettre les points sur les i, voici une chanson de 1979 du groupe Trust. La chanson dénonce les mœurs décadentes de la discothèque Le Palace, haut lieu parisien ayant connu un apport de gens clairement alternatifs (Public Image Limited y enregistrera un album), mais au service de grands bourgeois décadents. La chanson de Trust dénonce avec vigueur la fascination pour cet environnement sordide.

« Très cher tu vas payer ta place
Pour montrer ton brushing tes badges et ton costard
Installe-toi bien là dans tes godasses
Danse, danse t’es au Palace
Regarde-toi dans la glace
T’es là tu frimes au Palace
Pour ce qui était du palais
Tu étais mieux crois-moi où tu étais
Bouche à sexe sexe à bouche
On te paie et toi salope tu te couches
Sur le dos là comme il faut
Fais gaffe dans ce boulot on devient vite parano
Univers de girls bidons
Pour des mâles qu’ont pas un rond
T’es qu’un zonard au rencard
Et le bouffon des couches-tard
Bouche à sexe sexe à bouche
On te paie et toi salope tu te couches
Sur le dos bien comme il faut
Fais gaffe dans ce boulot on devient vite syphillo
Dernière boîte à la mode
Où tu jouis à coups de gode
Finie la nuit fini ton rêve
L’autobus de St Denis te ramène vers Monoprix
Bouche à sexe sexe à bouche
On t’as payé et toi salope tu t’es couchée
T’étais sur le dos bien comme il faut
Dans ce genre d’endroit t’excelle tellement t’es disco …
Ta place tu l’as payée
Dans le Palace tu es entré
Comme les ringards tu as dansé … »
Catégories
Société

Bundesliga: la démonstration de force du capitalisme allemand

Le championnat allemand de football professionnel, la Bundesliga de 1ère et de 2e division, a repris ce week-end. C’est une démonstration de force de grande envergure pour le capitalisme allemand, disposant de moyens gigantesques et capable de mobiliser énormément de choses pour relancer la machine. Cela même malgré la réticence d’une majorité de la population et des supporters.

Alors qu’aucun grand championnat européen n’envisage encore concrètement une reprise malgré différentes annonces, la Bundesliga avait obtenu la reprise des entraînements pour ses joueurs et annoncé la date du 16 mai il y a plusieurs semaines. Elle s’y est tenu et tout s’est déroulé comme prévu hier pour les six rencontres au programme. Il en sera très probablement de même aujourd’hui pour les deux autres rencontres, dont celle du mastodonte Bayern de Munich, leader de la première division.

Le protocole mis en place est drastique, d’une envergure inimaginable dans de nombreux pays, et en tous cas certainement pas en France.

Les joueurs sont dépistés deux fois par semaine ainsi que la veille de chaque rencontre. Rien que cela nécessite des milliers de tests que seul un capitalisme aussi puissant et conquérant que le capitalisme allemand peut se permettre de réserver pour une telle activité. La réticence d’une majorité de la population et de supporters n’y fait rien, puisqu’il y a là une dynamique enclenchée qui est de grande ampleurs, avec des enjeux économiques de type industriel qui s’imposent à la société.

La Bundesliga donc, est capable de mobiliser de nombreux véhicules pour transporter les joueurs et le personnel avec une distance suffisante entre les sièges. Il y a ensuite un protocole très strict, pour ainsi dire millimétré, prévoyant sur plus de cinquante pages le comportement et la place de chacun dans le stade. Seules 322 personnes peuvent y être présentes, réparties dans trois zones avec chacune des règles précises à respecter.

En ce qui concerne les joueurs, leur température est prise à l’arrivée au stade, il y a un roulement pour l’occupation des vestiaires, qui sont désinfectés au bout de 40 minutes maximum. À l’issue du match, pas question d’y prendre sa douche, chacun étant invité à le faire chez soi ou à l’hôtel pour l’équipe visiteuse. Au bord du terrain, même les remplaçants doivent respecter une distance minimale entre-eux et porter un masque.

Sur le terrain, aucune poignée de main, crachat, cérémonie, échange de maillot, photo de groupe, etc. Même les célébrations de but avec trop de promiscuité sont à éviter, et ont été largement évitées hier ; la promiscuité liée au jeu, lors des phases de coup de pied arrêtés notamment, n’ayant bien sûr pas pu être proscrite par contre.

Les interviews à l’issue d’une rencontre sont possibles, mais seulement derrière un plexiglas.

Malgré le peu d’entraînements collectifs qu’ils ont pu avoir avant les rencontres de ce week-end (à peine l’équivalent deux matchs entiers à 11 contre 11 en général), les joueurs ne se sont aucunement plaints de cette reprise et de ces protocoles.

Au contraire, le capitalisme allemand est puissant et triomphant, il sait très bien faire les choses pour que tout se déroule sans accrocs.

Les propos dans la presse française du Marseillais Benjamin Stambouli, joueur du Schalke 04, sont à cet égard très évocateurs :

« La perception de cette crise et la façon de la gérer ont été différentes entre les deux pays. C’était plus souple ici avec la réouverture plus rapide des magasins.

Je me souviens de la fameuse phrase du président Macron sur le fait qu’on soit en guerre, elle m’a beaucoup marqué. J’ai vraiment pris conscience de la gravité de la situation. En France, il y a eu un vrai confinement d’où la naissance d’une crainte légitime. En Allemagne, la chancelière Angela Merkel a répété vouloir faire confiance aux comportements de ses concitoyens, en réclamant discipline et rigueur.

Attention, je ne dis pas que la gestion en France était mauvaise, mais il y avait juste un peu plus de liberté et moins de crainte ici. Pour nous, c’est la suite logique de reprendre le championnat, avec des conditions sanitaires strictes.

Le club nous a mis à l’aise de suite. Avec un message clair : si on avait peur pour notre santé, notre vie, on pouvait rester chez nous, sans aucune amende ou sanction morale. C’est super parce qu’on ne nous a jamais mis le couteau sous la gorge.

Le dialogue a toujours été présent. Cette liberté de décision est fondamentale et le comportement du club a été classe. »

L’international français et défenseur du Bayern de Munich Benjamin Pavard, a eu des propos de la même teneur :

« je pars du principe que si le gouvernement autorise les matches, cela veut dire qu’il estime que les conditions sont réunies. »

Dans le même temps, lui et les autres joueurs de son équipe ont accepté sans broncher de laisser 20 % de leur salaire au club, ce qui en général est loin d’être aussi simple dans de nombreux clubs d’autres pays.

Tout cela peut sembler l’anecdotique et est de fait entièrement secondaire. Cela reflète cependant la vigueur du capitalisme allemand. Il a les moyens de réagir, de s’opposer à la population, de décider, de mettre en place. Rien qu’avec cet exemple on voit très bien que ce pays a l’hégémonie dans l’Union européenne et que la France ne suit pas. Imagine-t-on les couches dominantes françaises accepter cela passivement ? Soit elles voudront encore plus se rattacher à l’Allemagne, soit elles chercheront au contraire à s’en décrocher. Dans les deux cas on a une poussée capitaliste autoritaire, très autoritaire, en perspective.

 

Catégories
Politique

En France, même le ministre de l’intérieur ne respecte pas les règles sanitaires

Les mesures sanitaires sont simples et connues de tous. Pour éviter la propagation du Covid-19, il faut éviter à tout prix la proximité entre les individus et porter un masque pour éviter les projections de gouttelettes, notamment quand on parle. Ces règles ne semblent pas intéresser le ministre de l’intérieur Christophe Castaner qui s’en est affranchie en toute quiétude lors d’un déplacement hier. Cela en dit long sur les mentalités françaises et leur terrible arriération.

Le ministre de l’intérieur était en déplacement en Normandie ce samedi 16 mai. Il venait notamment pour « vérifier » le bon respect des règles en ce qui concerne l’accès aux plages. Il a d’ailleurs expliqué :

« Je ne tolérerai aucun manquement concernant l’application des gestes barrière et des règles de distanciation ».

On voit pourtant, lors d’une séquence filmée par BFMTV, Christophe Castaner manquer à toutes ces obligations sur le remblais de Veules-les-Roses :

Le premier ministre semble très heureux de discuter face à face avec des passants, sans masque, avant de s’approcher d’eux pour prendre une photo, allant même jusqu’à s’accroupir pour se mettre à la hauteur d’un petit garçon, à qui il parle à quelques centimètres du visage.

On voit ensuite le ministre repartir pour sa « vérification » du respect des règles, accompagné de tout un groupe de personnes, dont le maire de la ville, sans masques et se tenant toutes à proximité immédiate les unes des autres.

L’attroupement, badauds et journalistes compris, fait d’ailleurs bien plus que dix personnes, alors que c’est normalement la limite maximale autorisée sur la voie publique en France en ce moment. Le ministre de l’intérieur, censé être à la tête de l’organisation du respect de ces règles, n’est donc même pas capable de le respecter lui-même.

C’est non seulement indécent, mais surtout le signe d’une grande décadence des élites politiques françaises, à l’image d’une grande partie de la population prenant très à la légère les règles sanitaires nécessaires pour faire face au Covid-19.

Avec de tels comportements, avec une mentalité aussi stupide qu’inconsciente, le pays se dirige droit dans le mur et on a du mal à imaginer comment une seconde vague de contamination pourrait être évitée.

Catégories
Écologie

La stratégie de la tension menée par le patron des chasseurs Willy Schraen

Lors d’une interview au site chassons.com, le président de la Fédération nationale des chasseurs Willy Schraen s’est adonné à l’une de ces provocations dont il a le secret. «À un moment on va devoir finir par agir sur le chat» explique-t-il en se justifiant par le fait que selon lui il tue « bien plus d’animaux que les chasseurs ».

Dans son interview à chassons.com, Willy Schraen a suggéré que :

« Le piégeage du chat à plus de 300 mètres de toute habitation, ce serait une bonne chose »

Ce propos ne pouvait évidemment que provoquer une vague d’indignation. Suite à cela, il ne dormirait pas depuis plusieurs jours, serait sous anxiolytiques, recevant des menaces ou étant l’objet de « contrat » sur sa tête, etc. Il serait même sous protection policière, ainsi que sa famille.

Tout cela ne doit rien au hasard, mais fut savamment calculé. Willy Schraen savait très bien les réactions qu’il allait provoquer et c’est ce qui était recherché. Pour se poser en victime, pour augmenter la tension, pour attiser le feu.

Il avait d’ailleurs tout prévu : d’abord susciter l’émoi à propos des chats, puis expliquer ensuite qu’il ne s’agissait que de « chats errants revenus à l’état sauvage », qui constitueraient une menace pour la « biodiversité » et de nombreux oiseaux.

Ce faisant, il pose un véritable problème, pour apporter une solution relevant du problème. Car tant les chasseurs que le développement urbain anarchique, associé à une « consommation » d’« animaux de compagnie » anarchique, relève du déséquilibre apporté par les humains au situation naturelle.

Opposer les chats aux oiseaux est exemplaire d’une vision du monde totalement erronée. C’est pour cela que les défenseurs des animaux ne font pas cette opposition, mais combattent pour aider les oiseaux et pour chercher à améliorer la situation des chats, ceux-ci étant massivement abandonnés, la situation ayant empiré comme jamais ces dernières années.

Mais cela n’intéresse pas les chasseurs qui veulent surtout s’en prendre aux chats en en faisant les bouc-émissaires de la destruction de la vie sauvage. Ils ne sont pas là pour s’opposer à des désastres provoqués par les humains, mais pour renforcer leur propre position.

C’est un jeu tactique, de bout en bout, et d’ailleurs Willy Schraen a même finalement prétendu que les gens ont mal interprété ses propos, qu’il n’a jamais parlé de tuer les chats. De la part d’un chasseur, on a du mal à le croire. Surtout quand il parle ensuite pour se défendre… de les remettre à la SPA !

Comme on le voit, à la provocation succède la provocation ; c’est absurde et totalement infaisable de toutes manières, mais l’idée est d’en rajouter, toujours d’en rajouter.

Tout défenseur des animaux sait d’ailleurs que la réponse immédiate n’est pas la SPA, mais le mouvement en soutien aux « chats libres ». Il faut ainsi savoir que la loi du 6 janvier 1999 a donné un statut de « chats libres » aux chats errants, à condition qu’ils soient stérilisés, identifiés (tatouage avant et désormais une puce), par des bénévoles indépendants, des associations de protection animale ou des communes, qui s’engagent à les nourrir après les avoir remis où ils étaient.

Cette activité est essentielle et les gens la menant font partie de la première ligne au service des animaux. C’est un travail concret, comme celui pour les oiseaux, qui ne relève d’aucune médiatisation, d’aucun soutien ou si peu. Et réaliser une telle activité implique une rupture avec la vie quotidienne exigée par l’idéologie dominante, car culturellement cela apparaît comme totalement « bizarre ».

On a donc de la part de Willy Schraen, plutôt qu’un véritable sujet, une opération provocation savamment orchestrée. La chasse n’est pas qu’un simple « loisir » en France, elle représente un élément fondamental du dispositif réactionnaire français. Willy Schraen agit ainsi en militant, pour mobiliser toute une frange de la population réfractaire à tout changement, culturel, écologique, etc.

En ce temps de crise, alors que la société est profondément bouleversée par la situation sanitaire, les réactionnaires voient une occasion en or à saisir pour répandre leur vision du monde. S’en prendre au chat n’est ici qu’un prétexte afin de pouvoir critiquer les défenseurs de la natures et des animaux.

C’est la raison pour laquelle dans la même interview il a assumé tout une posture violente, virile, digne des mentalités les plus arriérées :

« j’aimerais bien qu’on en choppe quelques-uns quand-même », « il y a quelques coups de poing dans la gueule qui se perdent », « je comprends le chasseur aujourd’hui qui dit si j’en choppe un, il va prendre une bonne branlée ».

C’est de toute une vision du monde dont il s’agit là, celle refusant de voir les exigences historiques de l’époque, s’imaginant trouver refuge dans un passé fantasmé, avec l’attitude du gaulois « bon vivant », grande gueule et adepte du coup de point érigé art de vivre.

Willy Schraen avait exactement ce genre d’attitude et d’appel à la violence contre la mobilisation démocratique et populaire opposée à la chasse à courre. On ne sera pas étonné à ce sujet que Willy Schraen ait reçu immédiatement le plein soutien de la part de Guy Harlé d’Ophove, figure majeure de la réaction, président de la fédération des chasseurs de l’Oise, département bastion de la chasse à courre.

On a encore ici un exemple de ce qu’on doit appeler la lutte des classes. La lutte des classes authentique, pas celle imaginée par la CGT.

Catégories
Culture Culture & esthétique

Playlist «soviet wave»

La chute de l’union soviétique en 1991 s’est accompagnée d’une vague de brutalité et d’une corruption massive, étouffant la société toute entière. Née dans les années 1990, la génération qui a franchi sa vingtième année dans les années 2010 est marquée par une enfance socialement et moralement troublée.

C’est l’essor d’un capitalisme russe issu de l’ancien appareil militaire d’État, s’appropriant tout ce qu’il peut, notamment en priorité la rente gazière et pétrolière, et laissant prospérer des activités décadentes auparavant réprimés (comme par exemple la banalisation de la prostitution, des drogues…).

Dans cette ambiance de déliquescence culturelle, PPK, un groupe de musique électronique très actif entre 1999 et 2003 et entre 2010 et 2011, a joué le rôle d’incubateur d’un style combinant une esthétique rétrofuturiste nostalgique de l’URSS, essentiellement abordée à travers la conquête spatiale, à des mélodies de synthétiseurs surfant sur la cold wave anglaise des années 1980.

Dans les années 2010, la génération née dans les années 1990 s’est appropriée ce style culturel donnant lieu à une grande vague musicale nommée la « soviet wave », un mélange de post-punk, de cold wave et de musique électronique fondée sur la nostalgie de l’URSS.

Il y a une progression de ce phénomène dans les grandes villes de Russie mais aussi dans l’ancienne ère soviétique (Ukraine, Lettonie…), que l’on trouve dans les très nombreuses playlist de « doomer music », le mouvement s’élargissant au-delà, avec par exemple le groupe italien « Soviet soviet ».

Un « doomer » (traduire par « condamné ») est une jeune personne précaire qui sombre dans une profonde tristesse sans pour autant tomber dans la violence misogyne des « incels ». Il est plutôt découragé, bloqué par une mélancolie existentielle, mais sans développer une rancœur. La « soviet wave » est une expression directe de l’état d’esprit « doomer » d’une génération Z, née après 1997, qui ne se reconnaît ni dans la ringardise des « boomer » (génération papy-boom) ni dans l’optimisme naïf des « bloomer ».

Il y a là un phénomène musical et culturel très intéressant à saisir dans le contexte de la société russe post-soviétique dominée par une oligarchie rentière anti-démocratique, et dans laquelle la jeunesse cherche, tant bien que mal et sans y parvenir, une nouvelle perspective pour l’avenir.

Voici la playlist :

Voici les titres de la playlist :

  1. Nürnberg – Adny (Minsk)
  2. дурной вкус – пластинки (Mauvais goût – Enregistrement / Saint Pétersbourg)
  3. Ploho – Город устал (« La ville est fatiguée » – Novorsibrisk)
  4. Где Фантом? – Это так архаично (Où est le fantôme ? –C’est tellement archaïque / Oufa)
  5. Molchat doma – Volny (Maisons silencieuses – Vagues / Minsk)
  6. Перемотка – Стреляй (Rembobiner – Tirer/Chasser / Yekaterrinburg)
  7. Стыд – Одинокий гражданин (Honte – citoyen solitaire / Tomsk)
  8. Nürnberg – Biessensounasc
  9. PXWLL – Лето (été, Riga, Lettonie)
  10. Улица Восток – Дурак (Vostok street – Fool / Kiev)
  11. Soviet soviet – Ecstasy
Catégories
Culture Planète et animaux

Les incontournables vidéos écologistes de Steve Cutts

Représenter la vie quotidienne dans une courte vidéo est une gageure : il faut que cela soit accessible à tout le monde, sans perdre sa substance. On a ici un admirable exemple.

L’illustrateur anglais Steve Cutts produit des œuvres marquantes, d’autant plus en cette période de crise. Ses dessins et ses vidéos sont bluffants et à ne surtout pas rater. On est évidemment dans un esprit très anglais, que ce soit pour l’’humour noir, une dénonciation de type végan assumée, un regard écologiste s’asseyant sut une riche histoire.

La critique de la vie quotidienne qu’on y trouve est, somme toute, exactement celle qu’est incapable, malheureusement, de fournir la Gauche et l’extrême-Gauche françaises. Alors que c’est exactement cela qu’il faudrait !

Catégories
Politique

L’initiative commune lancée par de nombreuses figures de la Gauche

C’est « à titre personnel » que de nombreuses figures de la Gauche ont lancé une « initiative commune », dont voici le manifeste. Cela regroupe l’ensemble du spectre centristes de gauche, EELV, PS, PCF, avec une volonté sous-jacente de dépassement de ces structures.

Cette initiative commune vise clairement à passer au-dessus des partis et organisations, voire au-delà de la notion de parti, dans la perspective d’une unification nouvelle de la Gauche.

Parmi les signataires, notons le premier secrétaire du Parti socialiste Olivier Faure, l’économiste Thomas Piketty, l’ex secrétaire général de la CGT Bernard Thibault, la figure du PCF Ian Brossat, la porte-parole du PCF Cécile Cukierman, la directrice d’OXFAM France et ancienne figure d’EELV Cécile Duflot, le fondateur de Place publique Raphaël Glucksmann, la principale figure d’EELV Yannick Jadot, le maire EELV de Grenoble Éric Piolle, la centriste écologiste ex-LREM Corinne Lepage, Virginie Rozière co-présidente des Radicaux de gauche.

« Au cœur de la crise, construisons l’avenir

La France affronte un séisme d’une ampleur inouïe. Favorisée par la destruction de la nature, la pandémie a généré une crise économique de grande ampleur, une commotion sociale brutale, notamment pour les plus précaires, et une mise entre parenthèse du fonctionnement démocratique. Elle a révélé l’improvisation des pouvoirs publics face à cette crise majeure. L’engagement extraordinaire des soignantes et des soignants, le courage de celles et ceux qui n’ont cessé de travailler sans relâche au service de tous et le civisme de millions de personnes confinées dans des conditions difficiles appellent une reconnaissance unanime. Dès maintenant, il s’agit d’éviter le pire et de préparer l’avenir. La réparation des dégâts annoncés, la défense des libertés, l’obligation de préparer une société résiliente nécessitent de fortes dynamiques collectives. La crise confirme l’urgence radicale des grandes transitions. De cette impérieuse nécessité, faisons naitre une espérance. Nous ne sommes pas condamnés à subir !

Au coeur de cette crise, il nous faut tourner la page du productivisme. Il faut affronter les périls immédiats, s’accorder pour engager la transition écologique et dans un même mouvement les transformations sociales et économiques trop longtemps différées. L’impasse où nous ont conduits les politiques dominantes depuis quarante ans et le capitalisme financier exige une offensive résolue. Avec cette initiative commune, dans le respect de nos différences, nous nous engageons à la hauteur des principes que nos prédécesseurs ont affirmés dans la « reconstruction » qui suivit la seconde guerre mondiale. Aujourd’hui, en temps de paix, nous devons faire preuve d’une égale ambition, avec la volonté que les Français s’emparent de ces débats.

L’état d’urgence sociale doit se déployer dès maintenant dans l’ensemble du pays, à commencer par les quartiers populaires et les territoires ruraux, partout où la crise remet à vif la grande pauvreté et les inégalités. Les familles déjà vulnérables, comme celles qui viennent brutalement de plonger dans le chômage et la pauvreté, se comptent par millions. La solidarité nationale doit intervenir pour aider les locataires, contribuer à payer les factures d’eau et d’électricité, par l’aide alimentaire et la fourniture gratuite de masques, par des soutiens exceptionnels individualisés pour que vivent décemment celles et ceux, y compris les jeunes, qui ont vu leur travail et leurs revenus disparaitre. Cette crise doit enfin imposer un basculement des politiques publiques : « sortir » des dizaines de milliers de personnes de la rue, c’est affaire de dignité d’abord, mais aussi d’ordre public sanitaire et social.

Pour aller plus loin, la France, comme d’autres en Europe, doit imaginer et mettre en chantier dès cette année un nouveau modèle de protection sociale. Pour ces temps de grande transition, il y a urgence à assurer un revenu digne rendant possibles à toutes et tous la formation, l’accès à un nouvel emploi ou un projet professionnel. Compte tenu de la hausse explosive du nombre des sans-emplois, ce serait une faute historique de maintenir la « réforme » de l’assurance chômage de 2020. Il faut permettre dès maintenant à tous les territoires volontaires de mettre en oeuvre la belle initiative Territoires zéro chômeur de longue durée, inspirée des expériences du mouvement associatif. Quant aux travailleurs étrangers en situation irrégulière, soutiers plus anonymes encore de nos économies, leur accès au droit au séjour doit être facilité.

Pour pouvoir mobiliser les énergies de toutes et tous, il faudra inventer et consolider des protections collectives plus adaptées à notre temps, combler les failles majeures que la crise a soulignées, agir pour l’accès à la santé et des retraites décentes. Certains, à l’inverse, manifestent déjà la volonté de réduire les droits sociaux à la faveur de l’émotion générale, notamment sur la question du temps de travail. Nous ne laisserons pas faire, et nous demandons qu’il soit renoncé définitivement au projet de réforme des retraites qui mine la cohésion nationale dont nous avons tant besoin. Face à la précarité ou aux inégalités femmes-hommes, tous les travailleurs et travailleuses, indépendants, artisans et commerçants, professionnels des plates-formes, salariés en CDD, intermittents ou intérimaires, doivent être dotés de droits sociaux individuels complets et d’une capacité réelle de négociation collective.

Le statu quo n’est plus possible. Nous défendons une société de la reconnaissance, qui sache valoriser celles et ceux sans lesquelles elle ne tiendrait pas, dans la crise comme après. Travailleurs de l’aube et du soir, fonctionnaires de jour comme de nuit, soignants et enseignants dévoués, elles (très souvent) et ils sont en droit d’attendre bien sûr des primes immédiates et légitimes, mais aussi une amélioration significative et sans délai de leurs conditions d’emploi et de salaire, à commencer par le Smic. Lorsque ces personnes ont des enfants, la prise en charge par les employeurs des frais de garde, l’organisation de nouveaux centres de vacances dès 2020 avec les mouvements d’éducation populaire seraient aussi de justes rétributions. Le confinement a mis également en exergue la nécessité de reconnaitre le féminicide en droit français et de ne plus reporter un plan national d’ampleur contre les violences faites aux femmes et aux enfants, en doublant le budget alloué aux associations venant en aide aux victimes et aux lieux de prise en charge

Les Français vivent intensément les effets de l’affaiblissement de notre système de santé. Sous tension bien avant le tsunami du Covid19, l’hôpital public a été asphyxié par des années d’austérité budgétaire et la marchandisation de la santé. Une loi de programmation doit assurer au plus vite un financement pérenne des investissements des hôpitaux et des Ehpad, rompre avec la spirale des fermetures de lits et permettre la revalorisation des métiers de soignantes et soignants. Cette refondation permettra de retrouver une capacité de prévision et d’anticipation, et les moyens d’affronter collectivement les chocs de grande ampleur. Elle devra également garantir à tout moment la disponibilité des principaux médicaments sur le territoire national. Elle assurera enfin la réhabilitation des soins de premiers recours, efficients et réactifs face à de nouvelles crises et la fin des déserts médicaux, indignes de notre pays.

L’avenir de notre économie et sa conversion écologique se jouent en ce moment. Le soutien public à la survie du système productif est vital. Il doit être associé à une conditionnalité environnementale et sociale exigeante. Des fleurons de notre économie sont au bord de la faillite, avec le cortège habituel de restructurations brutales et de chômage massif. Face à ces risques, la réaction de l’État en faveur de l’emploi doit être couplée à la mise en oeuvre accélérée de la transition écologique, à commencer par le respect des Accords de Paris sur le climat. C’est seulement ainsi que le sauvetage des emplois sera durable. Une politique industrielle crédible implique des choix stratégiques nationaux ; elle se construit dans chaque région avec toutes les parties concernées, entreprise par entreprise, branche par branche. La mobilisation doit intégrer pleinement les enjeux d’indépendance et de relocalisation, de recherche et d’innovation, mis en lumière de façon éclatante dans la crise actuelle.

D’ici la fin de cette année, il appartient à la puissance publique d’identifier avec tous les acteurs les secteurs stratégiques à relocaliser au niveau français ou européen, les chaines de valeurs à contrôler et les productions à assurer au plus proche des lieux de consommation. Les événements récents confirment une fois de plus les fragilités de l’Europe quand elle se limite à n’être qu’un marché livré aux excès du libre-échange, renonçant à protéger son économie. La signature des traités qui amplifient cet abandon doit être stoppée, et ceux qui existent déjà révisés. Rien ne sera possible sans un pilotage ambitieux du système de crédit, avec un pôle public de financement et la BPI jouant enfin réellement son rôle. La mise en oeuvre de nationalisations là où il le faut doit permettre non de mutualiser les pertes, mais d’atteindre des objectifs d’intérêt général. Dans ce but, il faudra aussi miser davantage sur l’économie sociale et solidaire pour mieux ancrer l’économie dans les territoires et impulser le nouveau modèle de développement.

Cette épidémie et sa propagation rapide sont liées à la destruction accélérée des habitats sauvages combinée à une mondialisation insuffisamment régulée. Elles renforcent l’urgence d’une remise en cause de notre mode de production et de consommation : la transformation écologique de la France est le nouveau défi de notre République au XXIème siècle. Cette prise de conscience des communs naturels à protéger et de l’impasse des modes de consommation actuels est essentielle, tout comme les combats de la gauche. Les propositions des participants de la Convention citoyenne pour le climat et sa méthode ont permis que progressent dans la société des projets d’une grande richesse. Les politiques publiques doivent être au rendez-vous de cette urgence planétaire.

Nous proposons que soit discutée et mise en oeuvre rapidement une Prime pour le climat, afin d’éliminer en priorité les passoires thermiques et sortir les plus pauvres de la précarité énergétique. Elle accompagnera aussi les travaux de rénovation énergétique rendus obligatoires pour l’ensemble du bâti afin d’atteindre deux millions de logements par an, en privilégiant les rénovations complètes. Des dizaines de milliers d’emplois non délocalisables pourraient être ainsi créés.

La France a besoin également de bâtir un plan ambitieux de transition vers une mobilité durable, pour soutenir l’électrification des motorisations, les modes de transports collectifs et partagés, la relance des réseaux ferroviaires, mais aussi l’extension du droit au télétravail dans des conditions protectrices pour les salariés.

Conçue pour éviter un recours accru aux énergies fossiles, dont les prix baissent du fait de la crise, la Contribution Climat Énergie doit s’accompagner de mesures de redistribution de grande ampleur pour en compenser les effets sur les plus vulnérables. Une relance publique du soutien à la transition écologique locale est plus que jamais indispensable afin d’impliquer beaucoup plus les territoires et les citoyen.ne.s dans le déploiement des projets collectifs d’énergies renouvelables. Ces investissements supplémentaires dans la transition écologique devront être sortis des critères budgétaires européens.

La refonte des aides de la PAC en soutien des petites et moyennes exploitations doit être accélérée, pour permettre une agriculture respectueuse de l’environnement, la croissance des productions bio, et pour développer le paiement des services environnementaux (stockage du carbone, arrêt des intrants chimiques…). Il faudra enfin donner toute sa place dans nos textes fondamentaux au droit de la nature et mettre en oeuvre de façon strict sur l’ensemble du territoire la politique du « zéro artificialisation nette » et la protection de la biodiversité.

Ces investissements massifs, pour l’immédiat ou le futur, exigent un financement soutenable et équitable. L’engagement de l’Europe en est l’une des clés. C’est une nécessité qui conditionne la survie de l’Union, quand les forces de démembrement prospèrent grâce au manque de solidarité européenne dans chaque moment de crise. On attend de l’Europe qu’elle conduise durablement une politique monétaire à la hauteur du risque actuel, mais aussi qu’elle mette en oeuvre des formes inédites de financement en commun pour empêcher une hausse de l’endettement des États, en particulier les plus affectés par la crise sanitaire. Il faudra aussi dès les prochains mois engager le chantier de la restructuration des dettes héritées des crises successives.

Tous les pays en ont en effet un urgent besoin pour permettre un nouveau départ et la transformation de leurs économies tellement interdépendantes. Ces financements européens ne sauraient être assortis des mesures d’austérité qui ont creusé entre les peuples des blessures encore inguérissables. Les conditionnalités aujourd’hui se nomment écologie, cohésion sociale et respect de la démocratie. Une transformation profonde des structures de l’Union européenne est indispensable pour rendre possibles ces politiques ambitieuses de solidarité. Cela implique la remise en cause du pacte budgétaire.

Mais l’Europe ne pourra pas régler seule l’addition de la crise. Les États devront eux aussi apporter une réponse fiscale et budgétaire dans un esprit de justice. Pour corriger les inégalités creusées au cours des dernières décennies et aggravées par la crise, et pour prévenir l’effondrement de nos sociétés. La France doit rétablir un Impôt de solidarité sur la fortune, mettant à contribution les patrimoines les plus élevés, et renforcer la progressivité de sa fiscalité sur les revenus, notamment ceux du capital, largement érodée depuis 2017. Compte tenu de l’ampleur des dépenses engagées pour faire face à la crise, elle devra appeler une contribution anti-crise des citoyens les plus aisés. La taxation des secteurs qui ont bénéficié de la crise et de ceux qui ont décidé, au coeur de la tempête, de continuer à distribuer des dividendes ou à s’enrichir à l’abri des paradis fiscaux doit être proposée sans délai au Parlement. La maitrise à l’avenir des écarts de salaires au sein des entreprises participe de ces préalables de justice : au-delà d’un écart d’un à douze, il ne serait plus possible de déduire les rémunérations et les cotisations de l’impôt sur les sociétés. Ces choix sont inséparables d’une action ambitieuse pour que les bénéfices des sociétés multinationales cessent d’échapper largement à la fiscalité française, notamment en les obligeant à une totale transparence sur leurs activités et les taxes payées dans les pays où elles sont présentes. Cette reconquête ne sera complète que lorsque les géants du numérique contribueront par un impôt juste aux efforts d’investissement qui attendent la France et l’Europe.

Ces mesures n’auront de sens et d’efficacité que si dans l’après-crise, une transition démocratique offre à tous la capacité d’agir pour un monde commun. La verticalité du pouvoir fracture la société. Elle alimente l’impuissance et la défiance. C’est l’échec de la Vème République. Seule une refondation de nos institutions permettra de le dépasser. Il est impératif de ne pas confier à un « sauveur suprême » ou au pouvoir technocratique « la sortie de crise », mais au contraire d’augmenter la participation des citoyen·ne·s aux décisions qui les concernent et cela à tous les niveaux.

Réussir les transitions exige un développement des emplois publics partout où leur manque cruel se vérifie aujourd’hui. Il faudra aussi rénover l’action publique en inventant les outils, l’organisation, les métiers du secteur public de demain. Rien ne progressera sans des délibérations collectives, valorisant bien davantage les citoyens et leurs compétences, l’éducation, l’innovation sociale et la création culturelle, les territoires, villes et villages.

Cet impératif s’adresse aussi aux entreprises : pour réussir la sortie de crise, il faut y faire entrer la démocratie en associant réellement les salariés à leur stratégie. Cela doit s’incarner dans une codétermination à la française avec la présence de 50% de représentants des salariés dans les conseils de surveillance ou les conseils d’administration des grandes entreprises et le renforcement des pouvoirs des représentants des salariés à tous les niveaux.

Lourde de souffrances inédites, cette période ne doit pas confisquer les espoirs de changement, bien au contraire. Faisons place à l’action collective et à ces premières convergences. Pour être à ce rendez-vous de notre Histoire, nous proposons qu’un grand événement, une « convention du monde commun », réunisse dans les prochains mois toutes les énergies disponibles, les citoyennes et citoyens épris de profonds changements, les formations politiques, les forces associatives, les initiatives que portent syndicats et ONG. C’est une première étape cruciale et attendue pour une alternative démocratique, écologique et sociale. Nous voulons lui donner la force de notre engagement.


Premiers signataires* : Syamak Agha Babaei, Christophe Aguiton, Amandine Albizzati, Claude Alphandery, Nathalie Appéré, Gérard Aschieri, Guillaume Balas, Jeanne Barseghian, Marie-Laure Basilien-Gainche, Laurent Baumel, Romain Beaucher, Anne-Laure Bedu, Jacqueline Belhomme, Esther Benbassa, Patrice Bessac, Olivier Bianchi, Habiba Bigdade, Loïc Blondiaux, Alice Bosler, Maurice Braud, Rony Brauman, Axelle Brodiez, Ian Brossat, Philippe Brun, Julia Cagé, Sophie Caillat, Andrea Caro, Fanélie Carrey-Conte, Lucas Chancel, Pierre Charbonnier, Christian Chavagneux, Alain Coulombel, Annick Coupé, Jezabel Couppey-Soubeyran, Françoise Coutant, Thomas Coutrot, Cécile Cukierman, Ronan Dantec, Joël Decaillon, Carole Delga, Stéphane Delpeyrat, Laurianne Deniaud, Emmanuel Denis, Gregory Doucet, Marie-Guite Dufay, Cécile Duflot, Antoine Dullin, Jérôme Durain, Guillaume Duval, Timothée Duverger, Nicolas Duvoux, Anne Eydoux, Olivier Faure, Rémy Féraud, Aurélie Filippetti, Diana Filippova, Alain Foix, Didier Fradin, Philippe Frémeaux, Guillaume Garot, Karl Ghazi, Jean-Luc Gleyze, Raphael Glucksmann, Daniel Goldberg, Guillaume Gontard, Gaëtan Gorce, Aziliz Gouez, Bernadette Groison, Florent Gueguen, Denis Guenneau, Hélène Hardy, Jean-Marie Harribey, Anne Hessel, Catherine Hoeffler, Pierre Hurmic, Marie-Hélène Izarn, Pierre Jacquemain, Yannick Jadot, Hugues Jallon, Vincent Joineau, Régis Juanico, Nina Karam-Leder, Pierre Khalfa, Yazid Kherfi, Hella Kribi-Romdhane, Thierry Kuhn, Joël Labbé, Guillaume Lacroix, Delphine Lalu, Aurore Lalucq, François Lamy, Sandra Laugier, Pierre Laurent, Guillaume Le Blanc, Joël Le Coq, William Leday, Claire Lejeune, Corinne Lepage, Elliot Lepers, Nadine Levratto, Medhi Litim, René Louail, Benjamin Lucas, François Mandil, Bénédicte Manier, Edouard Martin, Gus Massiah, Nora Mebarek, Dominique Meda, Philippe Meirieu, Claire Monod, Beligh Nabli, Naïri Nahapetian, Jean-François Naton, Alexandre Ouizille, Christian Paul, Renaud Payre, Willy Pelletier, Camille Peugny, Maxime Picard, Thomas Piketty, Eric Piolle, Dominique Plihon, Dominique Potier, Alexis Poulin, Angèle Préville, Audrey Pulvar, Valérie Rabault, Jean-Paul Raillard, Gilles Raveaud, Sandra Regol, Nadine Richez-Battesti, Martin Rieussec-Fournier, Jacques Rigaudiat, Marie-Monique Robin, Johanna Rolland, Barbara Romagnan, Laurence Rossignol, Muriel Rouyer, Virginie Rozière, Michèle Rubirola, Jérôme Saddier, Bernard Saincy, Eva Sas, Mounir Satouri, Frédéric Sawicki, Laurence Scialom, Sabrina Sebaihi, Aissata Seck, Véronique Sehier, Gabrielle Siry, Emmanuel Soulias, Jo Spiegel, Olivier Szulzynger, Sophie Taillé-Polian, Bernard Thibault, Benoît Thieulin, François Thiollet, Isabelle This Saint-Jean, Stéphane Troussel, Henri Trubert, Hulliya Turan, Boris Vallaud, Najat Vallaud-Belkacem, Shahin Vallée, Antoine Vauchez, Denis Vicherat, Anne Vignot, Patrick Viveret.

* à titre personnel »

https://linitiativecommune.fr/

Catégories
Politique

Une économie française déboussolée à l’heure du déconfinement

La France est un pays qui, économiquement, se ratatine depuis plusieurs années. En train d’être encore plus déclassée avec la crise sanitaire, son capitalisme voudra avancer à marche forcée. L’instabilité est à l’ordre du jour.

Pour accompagner le choc du confinement, l’État a mis en place un chômage partiel. 12,4 millions de salariés d’un million d’entreprises ont reçu environ 84% du net, payé par l’État (et 100 % lorsque le salaire est au SMIC). Ce dernier a été très généreux avec les couches sociales supérieures puisqu’il a accepté de suivre cette compensation jusqu’à 4,5 SMIC.

Or, tout cela a un coût : 26 milliards d’euros. Il va falloir les trouver. À cela s’ajoute un plan pour aider l’économie (capitaliste) : 52 milliards. Il va falloir les trouver aussi. D’autant plus qu’il y a déjà 599 milliards à payer en 2023, en raison des dettes de l’État.

Tout cela est bien compliqué et il n’y a que trois moyens : la guerre, les impôts, les emprunts. La guerre n’est pas à l’ordre du jour encore, les impôts ce n’est pas faisable car la pression des capitalistes est énorme surtout que les exigences sont déjà hautes. Reste l’emprunt : l’État va devoir emprunter au moins 300 milliards d’euros. Cela représente 15 % du PIB français.

Notons d’ailleurs ici une chose au niveau du PIB, en prenant celui par habitant. Il est au niveau du Japon, clairement derrière l’Allemagne (ainsi que son satellite autrichien) et les États-Unis, ainsi que le Royaume-Uni, la Belgique, le Canada, la Finlande, les Pays-Bas, la Suède, l’Australie.

La France a décroché. Et on sait qu’un endettement implique une dépendance, à moins de disposer d’une base productive forte. Et la France se ratatine. En 2018, les exportations agroalimentaires avaient une valeur de 44 milliards d’euros en France, 72 milliards en Allemagne, 94 milliards aux Pays-Bas. Rien que ces chiffres, dans un secteur où la France est historiquement puissante, en dit très long. Le plan économique de relance en Allemagne est d’ailleurs trois fois plus grand qu’en France, culminant à 160 milliards.

Peut-on penser que le secteur du luxe, avec 76 milliards d’euros à l’exportation peut relancer à lui seul le capitalisme français ? Naturellement pas. Il est d’ailleurs plombé par l’absence des touristes, notamment étrangers, ceux-ci formant 40 % des touristes en général.

Il n’y a donc que deux options. Soit la France accepte une situation italo-espagnole, tendant à celle de la Grèce. C’est celle d’une satellisation relative dans le capitalisme, d’une mise en orbite de l’Allemagne. La France ne serait pas une colonie bien entendu, cependant ses couches dominantes devraient se mettre sous la coupe de l’Allemagne.

Soit la France tente de se réaffirmer en s’appuyant sur son vaste appareil militaire, soit en forçant l’Allemagne à être encore plus agressive dans un tandem, soit en y allant seule. Cette tendance va évidemment recevoir dans les mois prochains un appui gigantesque de la part de très nombreux secteurs. Cela est d’autant plus vrai que Jean-Luc Mélenchon, Marine Le Pen… instillent cette vision du monde depuis longtemps déjà.

Dans tous les cas, c’est une instabilité complète qui est à l’ordre du jour et seule la Gauche historique peut y faire face. Elle seule peut refuser avec force le militarisme, elle seule peut mettre en échec le plan menant à la satellisation.

On se doute qu’entre les tenants d’une Union Européenne sous domination allemande et ceux du nationalisme, la situation de la Gauche historique sera très difficile. Elle est coincée entre le marteau et l’enclume. Tout est d’ailleurs très mal partie, puisque la Gauche historique est d’une faiblesse inouïe. Mais il n’y a simplement pas le choix !

Catégories
Politique

L’État sera-t-il en mesure de faire respecter la limite de 100 km pour les déplacements?

Le déconfinement du 11 mai avait commencé par un lamentable couac et la loi restreignant les déplacements à un périmètre de 100 km autour de son domicile n’était pas prête. Maintenant que l’interdiction est en vigueur, la question se pose de savoir comment la faire respecter… Et ce n’est pas une mince affaire.

C’est aux forces de l’ordre que revient essentiellement, voire entièrement, le rôle d’encadrer et faire respecter l’obligation de rester dans un périmètre de 100 km autour de son habitation. Le problème, c’est qu’elles n’ont pas les moyens matériels, techniques ou procédurales, pour vérifier cela.

S’il est facile de savoir qu’un Parisien à Bayonne est en infraction, dans d’autres cas c’est plus compliqué. Comment les policiers sont-ils censés savoir que Montceau-les-Mines est à moins de 100 km de Moulins, mais que Sète est a plus de 100 km de Carcassonne ?

Encore plus compliqué : un habitant de Valence se rendant à Saint-Étienne par l’itinéraire le plus rapide parcourra 123 km, mais les deux villes sont situées à moins de 90 km l’une de l’autre à vol d’oiseau. Une application internet très simple est bien-sûr mise à disposition par le gouvernement : bilancoronavirus.fr/carte-sortie-100km Il suffit de rentrer son code postal et le périmètre est tracé. Sauf que les policiers ne sont généralement pas équipés de moyens professionnels pour y avoir accès. Doivent-ils alors utiliser leur smartphone personnel ? C’est impensable, évidemment.

En vérité, le gouvernement a pris une mesure générale, pour dissuader globalement et prétendre avoir agi, mais n’envisage nullement une interdiction effective de circuler dans le pays. Et pour cause, aucune consigne précise n’a été donnée aux forces de l’ordre avec une liste de motifs impérieux justifiant les déplacements hors périmètre. Le ministère de l’intérieur se contente de les appeler au discernement et au bon sens… Ce qui veut tout, et surtout rien dire, laissant libre cours à l’interprétation de chacun, et donc à des situations compliquées.

Les fraudeurs pourront de toute façon tricher facilement, puisqu’il n’y a pas de liste de justificatifs de domicile précis. Un simple carnet de chèques suffit, alors qu’il peut être très ancien et pas à jour. De la même manière, de riches Parisiens ayant une résidence secondaire à 200 km, par exemple en Normandie, pourront facilement jouer avec deux justificatifs de domicile, en le changeant à mi-chemin.

Mais comment s’étonner de cette « légèreté », quand on voit que le ministre de l’intérieur lui-même en est rendu à simplement « conseiller » aux grands-parents de ne pas venir voir leur petit enfant au-delà de 100 km… C’est-à-dire qu’au plus haut sommet de l’État, la personne directement en charge du dossier, n’est même pas en mesure de définir strictement ce qui rentre ou non dans le cadre d’un motif légitime. Ses propos à ce sujet sont affligeants de libéralisme, signe d’une grande décadence de la classe politique :

« Moi, là, je parle comme papa. Je pense que, peut-être, il vaut mieux attendre un mois ou deux plutôt que de proposer à ses grands-parents qui sont en province, de venir nous voir à Paris pour voir le petit dernier qui est né et de s’exposer dans un département qui est encore en rouge à un risque »

Et les policiers vont donc devoir jongler avec tout cela, gérer l’urgence, alors qu’ils auront en face d’eux bien souvent des Français au comportement immature, voire puéril, les défiant comme ils défiaient les surveillants pour se balader dans les couloirs au collège. Les policiers ou les gendarmes brutaux pour leur part s’en donneront à cœur joie, ce qui ne fera que renforcer la grande instabilité sociale, morale, culturel, dans laquelle s’enfonce la France…

Catégories
Société

Covid-19 comme mot masculin ou féminin: la faillite de l’Académie française

Les médias ont informé du choix de l’Académie française quant au genre du mot covid-19. L’institution aura donc attendu début mai avant de choisir, malgré que le terme ait été employé des millions et des millions de fois.

On ne peut pas dire que l’Académie française a attendu le déconfinement : son communiqué passé inaperçu date du 7 mai. Ce n’est pas un communiqué d’ailleurs, mais un exemple de « dire ne pas dire », mis sur le même plan que « Car, pour, par et avec prononcés careu, poureu, pareu et avecqueu », « Les gestes barrière ou Les gestes barrières », « Drive », « Followers », « Dépister un malade pour Dépister une maladie », « Distanciation sociale », « Confins, confiner, confinement », « Confire, confit, confiture ».

Voilà un mélange tout à fait baroque et donc totalement à rebours de l’approche française. Avec de terribles erreurs d’ailleurs, expression d’une démarche formelle. L’Académie française dit ainsi qu’on doit parler de dépister une maladie contagieuse et non pas dépister un malade. Elle n’a pas compris qu’il s’agit de retrouver le malade en question dans une sorte de jeu de piste urbain pour éviter qu’il ne propage la maladie…

Ayant d’ailleurs décidé de tout rater jusqu’au bout, l’Académie française a décidé de ne pas aborder la question du mot « déconfinement », qui n’existe pas en français. Il est pourtant employé massivement, même par les institutions. L’Académie française est donc incapable de faire son travail : elle reflète la décadence de la société.

Elle bascule ouvertement dans une forme artistique littéralement postmoderne pour sa justification du féminin pour covid-19. Voici cette œuvre d’art qui ne dépareillerait pas dans une exposition d’art contemporain :

« Covid est l’acronyme de corona virus disease, et les sigles et acronymes ont le genre du nom qui constitue le noyau du syntagme dont ils sont une abréviation. On dit ainsi la S.N.C.F. (Société nationale des chemins de fer) parce que le noyau de ce groupe, société, est un nom féminin, mais le C.I.O. (Comité international olympique), parce que le noyau, comité, est un nom masculin. Quand ce syntagme est composé de mots étrangers, le même principe s’applique. On distingue ainsi le FBI, Federal Bureau of Investigation, « Bureau fédéral d’enquête », de la CIA, Central Intelligence Agency, « Agence centrale de renseignement », puisque dans un cas on traduit le mot noyau par un nom masculin, bureau, et dans l’autre, par un nom féminin, agence. Corona virus disease – notons que l’on aurait pu préférer au nom anglais disease le nom latin morbus, de même sens et plus universel – signifie « maladie provoquée par le corona virus (“virus en forme de couronne”) ». On devrait donc dire la covid 19, puisque le noyau est un équivalent du nom français féminin maladie. Pourquoi alors l’emploi si fréquent du masculin le covid 19 ? Parce que, avant que cet acronyme ne se répande, on a surtout parlé du corona virus, groupe qui doit son genre, en raison des principes exposés plus haut, au nom masculin virus. Ensuite, par métonymie, on a donné à la maladie le genre de l’agent pathogène qui la provoque. Il n’en reste pas moins que l’emploi du féminin serait préférable et qu’il n’est peut-être pas trop tard pour redonner à cet acronyme le genre qui devrait être le sien. »

On aurait dû employer Corona virus morbus ? L’Académie française est déconnectée du réel. Et elle pense pouvoir imposer le féminin alors que le masculin a été utilisé à l’échelle de la société française toute entière depuis plus de deux mois ? En expliquant… « qu’il n’est peut-être pas trop tard » ?

Pire que le choix effectué avec une explication digne d’un alchimiste médiéval, tout est dans ce « peut-être ». Une institution qui décide et qui dit « peut-être » est morte. Elle n’a pas de sens, car elle ne fixe aucune orientation, elle ne détermine aucun choix. À quoi sert donc l’Académie française si elle arrive après la bataille pour dire « peut-être » ?
Et pourquoi les « immortels » n’ont-ils pas travaillé sur ce choix dès le départ ? C’est pourtant leur travail. Mais ils sont à l’image de la France bourgeoise : dépassés, parasitaires, totalement étrangers à la société.
Catégories
Société

«La pire journée de ma vie professionnelle»

Voici le récit d’un mécanicien/vendeur dans une grande enseigne de sport à propos de lundi 11 mai, premier jour du déconfinement. Sont racontés des comportements terriblement irresponsables, qui font froid dans le dos tellement tout cela relève de la stupidité la plus crasse et de l’inconscience totale sur le plan sanitaire.

Ce genre de gens sont-ils majoritaires dans la société française, ou bien simplement une minorité sabotant tout effort collectif et responsabilité sociale ? Dans un cas comme dans l’autre, c’est de la faillite de l’ensemble de la société française qu’il s’agit ici. Si de tels comportements sont possibles (et tout à fait typiques), c’est qu’il ne s’agit pas simplement de la faillite individuelle des gens les ayant, mais de la responsabilité collective, incapable de les empêcher, les prévoir, les punir, etc.

Et l’individualisme s’exprimant sans freins ne peut que contaminer l’ensemble des comportements, aboutissant à une seconde vague du covid-19…

Catégories
Politique

Malgré la crise sanitaire, le gouvernement ouvre les frontières pour la main-d’œuvre immigrée dans l’agriculture

Les frontières sont normalement fermées en raison de la crise sanitaire, mais les impératifs de santé ne font pas le poids face aux besoins du marché. Le gouvernement a donc décidé des dérogations afin de faire venir des immigrés dans l’agriculture. Les capitalistes du secteur ont en effet besoin d’une main-d’œuvre bon marché et surtout peu regardante sur les conditions de travail, provenant essentiellement de Roumanie et de Bulgarie.

Alors que les récoltes de fraises et d’asperges ont déjà commencé, c’est bientôt la saison pour les cerises, les pêches, les nectarines, les poires ou encore les abricots. Les besoins passeraient en quelques jours de 45 000 personnes à 80 000 personnes.

Les agriculteurs du secteur, qui ne sont nullement des paysans mais de véritables chefs d’entreprises capitalistes, prétendent manquer de main-d’œuvre. Cela paraît étonnant tant on connaît la réalité du chômage en France, particulièrement en ce moment. N’a-t-on pas entendu parler d’ailleurs ces derniers jours de ces milliers d’étudiants ayant perdu leur job avec le confinement ?

Le problème en réalité n’est pas celui de la main-d’œuvre, mais de la nature de la main-d’œuvre. Le secteur a besoin d’une main-d’œuvre immigrée afin d’exercer une pression sur le travail, en maintenant des conditions difficiles, des rendements importants et une rémunération faible.

De part leur situation, les immigrés, en l’occurrence venant principalement d’Europe de l’Est et en partie du Maghreb, acceptent des conditions inacceptables pour les travailleurs français en général. Ils l’acceptent d’autant plus facilement que les salaires sont élevés en comparaison de ceux de leurs pays. Il y a bien sûr des Français faisant « les saisons », notamment des étudiants, mais non seulement c’est de moins en moins vrai, mais en plus ceux-ci sont en général jeunes, vivant une situation considérée comme seulement temporaire. La concurrence immigrée exerce sur eux une pression sociale : soit les conditions sont acceptées, soit il faut prendre la porte.

Cette pression est d’autant plus forte qu’il y a chez les travailleurs immigrés du secteur une mentalité surtout opportuniste, imprégnée de féodalisme, s’imaginant faire un bon « deal » avec l’employeur, avec un bon salaire contre un dur labeur, lui-même valorisé en tant que tel.

Dans ces conditions, les capitalistes de l’agriculture ne veulent absolument pas entendre parler des travailleurs français, ou alors seulement dans la mesure où ces derniers se plient aux standards acceptés des travailleurs immigrés.

Il faut à ce propos rappeler l’épisode récent où une campagne a été menée pour inciter des chômeurs partiels à venir travailler dans les champs, intitulée « Des bras pour ton assiette ». Cela a été un véritable fiasco, tant les travailleurs français arrivant ont été stupéfaits des conditions de travail, préférant tout simplement ne pas revenir le lendemain. Les employeurs, anticipant souvent ces réactions, ont dans la plupart des cas refusé d’eux-mêmes les embauches, préférant s’asseoir sur une partie de la production (15 % à 20 % des récoltes d’asperges et de fraises).

Les chiffres sont ainsi édifiants : sur 300 000 candidatures, seules 15 000 ont abouti d’après le ministère de l’Agriculture, et pas forcément durablement.

Le secrétaire général de l’Interprofession des fruits et légumes frais (Interfel), Daniel Sauvaitre, a très bien résumé cette situation dans la presse :

« Pour la main-d’œuvre locale c’est : un jour il fait trop chaud, un jour il fait trop froid, et il faut s’arrêter le vendredi midi. Les cueilleurs habituels, notamment venus de l’étranger, sont davantage rompus au travail de la terre. »

Les travailleurs français osent demander des bonnes conditions de travail ? C’est inacceptable pour les capitalistes du secteur, alors il faut impérativement ouvrir les frontières pour importer de la main-d’œuvre, peu importe la crise sanitaire. Telle est l’immonde logique du capitalisme, utilisant l’immigration pour maintenir les profits et freiner la lutte des classes, faisant fi des nécessités sanitaires.

Ce qui est vrai dans l’agriculture l’est d’ailleurs aussi pour de nombreux secteurs : la restauration dans les grandes villes, le BTP, le ménage, la sécurité privée, une partie de la sous-traitance industrielle, etc. La différence étant que dans ces cas-là, la main-d’œuvre immigrée est déjà sur place, souvent en situation irrégulière, contrairement à la main-d’œuvre agricole qui n’est que saisonnière et pour qui le capitalisme ouvre les frontières avec empressement.

Catégories
Politique

L’État incapable de mettre en place les lois pour le déconfinement du 11 mai

Les couches dominantes de la société étant décadentes, plus rien ne va et malgré la préparation du déconfinement du 11 mai, les lois l’encadrant n’ont pas été mises en place à temps. C’est très révélateur de l’effondrement en cours.

Le déconfinement du 11 mai a comme principe fondateur l’impossibilité de se déplacer à plus de 100 km de son département. Sauf que, problème, il faut une loi pour cela et la validation du conseil constitutionnel. La loi ayant été votée le 9 mai, le conseil constitutionnel ne l’a validé que le 11 mai… rendant impossible toute vérification étatique au moyen des forces de l’ordre.

Il en va de même pour l’attestation obligatoire dans les transports en commun d’Île-de-France, qui relève de la même loi sur l’état d’urgence sanitaire. La vérification de ces attestation est d’ailleurs remise à… mercredi 13 mai.

On a ici un exemple de ratage total. D’ailleurs, le conseil constitutionnel a cassé deux autres mesures, montrant à quel point le libéralisme a tout vérolé. Il a dit : pas de quarantaine obligatoire pour les gens arrivant en France, sauf sous supervision d’un juge. Le conseil constitutionnel nie ainsi le principe d’état d’urgence, au nom des « droits de l’Homme » si chers à la petite-bourgeoisie anti-État.

Le conseil constitutionnel agit ici de manière purement idéologique, totalement libérale-démocrate :

« S’agissant du régime de l’état d’urgence sanitaire, le Conseil constitutionnel a jugé que la Constitution n’exclut pas la possibilité pour le législateur d’en prévoir un. Il lui appartient, dans ce cadre, d’assurer la conciliation entre l’objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé et le respect des droits et libertés reconnus à tous ceux qui résident sur le territoire de la République.

Parmi ces droits et libertés figurent la liberté d’aller et de venir, composante de la liberté personnelle, protégée par les articles 2 et 4 de la Déclaration de 1789, le droit au respect de la vie privée, qui découle de cet article 2, la liberté d’entreprendre qui découle de cet article 4, ainsi que le droit d’expression collective des idées et des opinions résultant de l’article 11 de cette déclaration. »

Vie privée, droit d’entreprendre, dire ce qu’on veut… la liberté est ici entièrement au service de l’initiative capitaliste. Le conseil constitutionnel est d’ailleurs très content que le gouvernement n’ait pas étendu l’interdiction de se réunir lors du confinement aux locaux à usage d’habitation. C’est la pure négation de la primauté du collectivisme.

D’ailleurs, le conseil constitutionnel se prononce… contre le traçage des malades. Selon lui, c’est une atteinte à la vie privée ! Ainsi, il a :

« relevé que les dispositions contestées autorisent le traitement et le partage, sans le consentement des intéressés, de données à caractère personnel relatives à la santé des personnes atteintes par la maladie du covid-19 et des personnes en contact avec elles, dans le cadre d’un système d’information ad hoc ainsi que dans le cadre d’une adaptation des systèmes d’information relatifs aux données de santé déjà existants. Ce faisant, ces dispositions portent atteinte au droit au respect de la vie privée. »

L’individualisme avant tout ! D’ailleurs, dans un même ordre d’idée, Lille a ouvert son plus grand parc, celui de la Citadelle. La région est en zone rouge ? Pas grave, les « droits » individuels avant tout !

Le conseil constitutionnel a également retoqué le principe enlevant la responsabilité pénale des élus en cas de catastrophe sanitaire. En apparence, on dira : c’est normal, les élus doivent rendre des comptes. Sauf que cela signifie simplement que les élus serviront de fusibles et que les grandes décisions gouvernementales, étatiques, à la base des actions des élus, disparaissent du champ de la critique. On ne dira pas : l’État a mal agi, de par ses orientations, ses valeurs, ses fondements. On dira : un tel a mal agi et doit être condamné.

Entre le conseil constitutionnel garant de la main-mise complète du capitalisme et un gouvernement incapable de ficeler des lois malgré une grande préparation du déconfinement, on voit bien que l’État ne tient plus. D’aucuns diront qu’au contraire c’est la démocratie, c’est l’équilibre des pouvoirs, etc. Mais une telle conception des choses ne fait que refléter le libéralisme. En réalité, tout est instable, précaire. Le personnel politique bourgeois est de plus en plus nul, l’administration étatique toujours plus bureaucratique. C’est l’effondrement étatique reflétant la profonde crise du capitalisme dans notre pays.