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Loi de programmation militaire et restructuration

Le militarisme, c’est la restructuration capitaliste.

En mars 2012, les États membres de l’Union européenne adoptaient le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG). Il prévoyait la mise en place d’un pacte budgétaire européen visant à un contrôle strict des dépenses de l’État dans le but de maîtriser les déficits publics, et donc le niveau d’endettement des États.

Cela faisait suite à la crise de la dette souveraine, notamment avec la Grèce qui avait été placée en défaut de paiement, menaçant d’explosion la zone monétaire européenne.

Cela a eu pour conséquence en France la création d’un Haut conseil aux finances publiques qui a pour but d’évaluer la cohérence et la soutenabilité des dépenses publiques au regard de la croissance intérieure (PIB). Il s’agit de mettre en relation les dépenses de chaque loi dite sectorielle avec la loi de de programmation des finances publiques (LPFP) et la trajectoire de la croissance française pour les prochaines années.

Car lorsque les comptes sont déficitaires, cela a pour conséquence soit de baisser le niveau des dépenses et donc d’assumer l’austérité, soit de trouver de nouvelles recettes fiscales, soit de lever des emprunts de dette.

Le 5 avril 2023, Pierre Moscovici, président du Haut conseil aux finances publiques a donc été auditionné pour fournir l’avis de l’institution pour le budget prévu pour la loi de programmation militaire 2024-2030 (LPM). Cela fait suite à la dépose par le gouvernement du projet de LPM à l’Assemblée nationale le 4 avril, devant donc être débattu au parlement en juin.

Pour le HCFP, tout est pris d’incertitude car la LPFP, présentée en septembre 2022, est pour l’heure rejetée par les députés de l’Assemblée nationale et les prévisions de croissance sont incertaines. Pour autant, le président du HCFP a d’ores et déjà été très clair sur la situation.

Il a rappelé ainsi que le niveau d’engagement budgétaire de la LPM pour la période 2023-2030 était très important. On parle ici de 413 milliards d’euros, en fait de 400 milliards prévus directement par la LPM et de 13 milliards extrabudgétaires, faisant passer le niveau de dépense militaire de 47 milliards en 2024 à 69 milliards en 2030.

Cela aura pour conséquence une « contrainte très forte sur les autres dépenses du budgets de l’État« . Alors que le niveau de dépenses publiques a diminué de 0,3 % entre 2012 et 2019, l’orientation budgétaire de la LPM impliquerait une diminution de 1,4 % entre 2023 et 2027. Comme il l’a déjà été affirmé ici, la nouvelle mouture de la réforme des retraites 2023 est d’ailleurs issue de ces conditions financières.

A cela s’ajoute le fait que la France a « connu une érosion progressive des ses finances publiques » avec une explosion de sa dette, passée de 58 % de son PIB en 2000-2001 à plus de 111 % en 2022.

C’est l’une des plus importantes augmentations de la dette souveraine dans la zone euro, puisque sur la même période, l’Allemagne a augmenté le niveau de sa dette de 10 points, l’Italie de 40 points… Et pourtant la France vise à dépenser encore et encore pour la santé, l’éducation, l’écologie, etc., ce qui pousse Pierre Moscovici a résumer la chose de la manière suivante :

« Face à la montagne d’investissements, nous avons un mur de dettes très élevé. »

On notera la réaction d’Eric Coquerel, député LFI-NUPES de la 1ère circonscription de Seine-Saint-Denis et élu président de la Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire en juin 2022 :

« Je suis d’accord avec lui, le président de la commission défense a expliqué que l’effort en termes de réarmement, l’effort militaire, ne devait pas rentrer en concurrence avec les autres efforts, par exemple en matière de santé, d’éducation, en matière de préservation du climat »

Et d’ajouter que cela pose donc la question des recettes et de la fiscalité. On comprend alors toute la stratégie politique qui vise à légitimer la taxe sur les « superprofits », ce qui révèle parfaitement la nature sociale-impérialiste de La France Insoumise.

Car pour l’auteur de « Lâchez-nous la dette » publié en 2021, l’explosion de la dette est un faux problème puisque l’on peut « partager les richesses » et imposer plus fortement le capital.

Ce qui revient à dire que puisque la bourgeoisie française est grasse, très grasse, on peut lui en prendre un peu plus pour faire se continuer tout comme avant dans un niveau de vie occidental. La chose est donc entendue : oui, l’élévation faramineuse de la dépense militaire est acceptée, mais attention à ce que ne cela ne brise pas le « consensus social » sur le niveau vie dans la grande puissance française.

La taxation des riches est toutefois une perspective réformiste qui pouvait faire illusion avant 2020, mais qui n’est plus qu’une fable tant la France se ratatine et prétend à un niveau de vie qu’elle ne peut plus assumer dans les conditions de la nouvelle situation générale post-Covid-19. Il faut maintenant pressuriser les travailleurs, faire accepter une chute de haut niveau de vie des français pour relancer le capitalisme français.

Il est donc évidement que cette augmentation du budget militaire français relève de la restructuration du capitalisme dans le cadre de l’aiguisement de la compétition économique internationale suite aux dérèglements consécutifs à la pandémie de Covid-19.

A ce niveau, on voit combien la Gauche française s’est liquidée elle-même à l’instar de ce qui s’était passé en 1914. Sa revendication de plus de dépenses sociales en omettant de critiquer le militarisme et la tendance à la guerre ne peut que la faire évoluer vers une position social-impérialiste.

Il faut même dire que cette position est même déjà établie depuis le positionnement officiel de toute la Gauche française lors du premier anniversaire de la guerre en Ukraine. Mais cela va être toujours plus visible, toujours plus officiel à mesure que le vote de la LPM va être sur le devant de la scène.

Sans critique du social-impérialisme, la Gauche ne peut que servir de tremplin au nationalisme comme proposition réaliste de sauvegarde de la « France puissance » par la remise au travail à marche forcée du plus grand nombre.

Servons la Gauche historique, ses valeurs, sa vision du monde, pour la recomposition du prolétariat !

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Échec de la grève syndicale du 7 mars 2023

La « grève générale » n’a pas eu lieu.

L’intersyndicale CFDT, CFTC, CGT, CGT-FO, CFE-CGC, UNSA, Solidaires et FSU avait gonflé les muscles en annonçant la journée du 7 mars 2023 contre la réforme du système des retraites. On allait voir ce qu’on allait voir disaient-ils, jouant leur va-tout pour faire plier le Parlement à quelques jours d’une probable adoption du projet de loi sur la réforme des retraires par le Sénat.

L’ambition était grande, avec en arrière-plan le mythe mobilisateur de la grève générale. Il a été insinué l’idée d’une grève reconductible massive, pour véritablement lancer quelque-chose.

Le communiqué intersyndical du 22 février mettait le paquet :

« l’intersyndicale réaffirme sa détermination pour mettre la France à l’arrêt le 7 mars prochain en appelant les travailleurs.euses à participer massivement aux manifestations et à se déclarer en grève. » 

« Le 7 mars doit être une véritable journée morte dans les entreprises, les administrations, les services, les commerces, les écoles, les lieux d’études, les transports… »

Résultat : c’est un échec patent !

Certes, la mobilisation est forte, les manifestants sont nombreux. Il y a eu 1,28 million de personnes défilant dans toute la France d’après le gouvernement. Mais c’est peu ou prou la même chose que le 31 janvier dernier, le seul véritable « succès » de ce mouvement.

La CGT revendique 3,5 millions de manifestants ce 7 mars, contre 2,8 millions fin janvier. Là encore, c’est le même ordre de grandeur, la même teneur, avec des pics plus ou moins records de manifestants dans de nombreuses villes.

Près de 30 000 personnes à Brest, entre 15 500 et 22 000 à Pau, entre 15 000 et 25 000 à Rodez, 2000 à Bastia, 4500 à Belfort, 6500 à Guéret : c’est significatif pour de telles villes. Et dans les grandes villes, c’était environ 30 000 personnes à Nantes, Marseille, Lyon ou Montpellier, un peu moins, environ 20 000, à Grenoble Rouen ou Rennes et environ 12 000 à Lille, Tours Nice, Le Havre ou Strasbourg.

C’est beaucoup, mais rien de mirobolant pour autant. Surtout, il n’y a pas eu cette « France à l’arrêt », comme cela a été promis et vanté.

Ce qui devait compter, c’est-à-dire la grève massive avec une généralisation, n’a pas eu lieu. L’intersyndicale reste donc très floue à propos de la grève et des chiffres dans son communiqué du 7 mars au soir.

On sait très bien que l’immense majorité des travailleurs, et particulièrement des ouvriers, n’a pas été touchée par la grève. Il est simplement dit, de manière très vague :

« C’est une journée historique par l’ampleur de ces grèves et de ces mobilisations. Des milliers d’écoles et de lieux d’études fermés, des entreprises privées, des administrations, et des villes à l’arrêt. »

Voilà qui est bien prétentieux. En fait de grève générale, il y a eu les habituels secteurs où les syndicats existent encore, surtout la SNCF, EDF ou l’enseignement, avec des taux de grévistes flirtant avec les 50%.

Pas de quoi chambouler l’ordre dominant et le train-train capitaliste français. Tout cela est bien contenu, habituel, ronflant. Et à côté de la plaque historiquement.

Les syndicats en France sont simplement en train de se faire balayer par la crise. Le monde a changé depuis 2020 et la pandémie de covid. La guerre mondiale qui se dessine concrètement et activement sous nos yeux dorénavant, finira de les terrasser, et avec eux leurs pathétiques illusions d’un capitalisme à visage humain.

C’est la fin d’une époque.

Encore faut-il le comprendre. Reconnaissant indirectement l’échec du 7 mars, l’intersyndicale appelle à recommencer… la semaine prochaine.

Voici le communiqué commun des centrales CFDT, CFTC, CGT, CGT-FO, CFE-CGC, UNSA, Solidaires et FSU :

« Le gouvernement doit dès maintenant retirer son projet !

Depuis le 19 janvier, la population se mobilise massivement contre la réforme des retraites. Les différentes journées à l’appel de toutes les organisations syndicales et de jeunesse ont rassemblé des millions de travailleurs et travailleuses, jeunes et retraité.e.s.

Le 16 février, face à l’absence de réponse du gouvernement et du président de la République,

l’intersyndicale a appelé à mettre la France à l’arrêt le 7 mars. Elle est forte du soutien des 3/4 de la population et de 94% des actifs qui refusent le recul de l’âge légal de départ à 64 ans et l’allongement de la durée de cotisations. Aujourd’hui encore, ce sont plus de 3 millions de travailleurs et travailleuses, du public comme du privé, jeunes et retraité.e.s, qui se sont mobilisés, par la grève et/ou la manifestation.

C’est une journée historique par l’ampleur de ces grèves et de ces mobilisations. Des milliers d’écoles et de lieux d’études fermés, des entreprises privées, des administrations, et des villes à l’arrêt. Plusieurs centaines de manifestations et d’actions sur l’ensemble du territoire pour demander le retrait du projet de loi retraites.

A ce jour, ces mobilisations énormes conduites par une intersyndicale unie n’ont reçu aucune réponse de la part du gouvernement. Cela ne peut plus durer. Le silence du président de la République constitue un grave problème démocratique qui conduit immanquablement à une situation qui pourrait devenir explosive. En responsabilité, l’intersyndicale adressera un courrier lui demandant à être reçue en urgence pour qu’il retire sa réforme.

C’est forte de cette détermination exprimée aujourd’hui que l’intersyndicale soutient et encourage tous les secteurs professionnels à poursuivre et amplifier le mouvement.

L’intersyndicale appelle à se saisir du 8 mars pour pointer la détérioration particulière de la situation des femmes avec ce projet de réforme. L’intersyndicale soutient l’appel spécifique des organisations de jeunesse à se mobiliser jeudi 9 mars et appelle à rejoindre les rassemblements et manifestations, notamment à Paris, place de la République.

L’intersyndicale appelle à une nouvelle mobilisation interprofessionnelle ce samedi 11 mars puis dès la semaine prochaine, à une journée de manifestations et de grève, le jour de la commission mixte paritaire, moment important du calendrier parlementaire. Elle appelle toute la population à continuer la mobilisation et les actions, encore plus massivement pour dire non à cette réforme injuste et brutale,

Paris, le 7 mars 2023″

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La grève du 7 mars 2023 sera un échec, car anti-historique

On n’avance pas à rebours de l’Histoire.

Le 7 mars 2023 est censé être le point culminant du mouvement contre la réforme gouvernementale des retraites. Depuis quinze jours, cette date est présentée comme celle de la mobilisation générale, de la grande bataille. Le 2 mars, les secrétaires généraux de cinq fédérations CGT (Ports et Docks, Cheminots, Industries chimiques, Verre et Céramique et Mines-Energie) se sont même réunis au siège de la centrale syndicale, à Montreuil, pour annoncer qu’il s’agit « de mettre à genoux l’économie française ».

« Ce qui va se passer à partir du 7 est hors du commun » a même osé Jean-Luc Mélenchon.

Est-ce possible ? Le 7 mars 2023 sera-t-il caractérisé par une déferlante de grèves et de mouvements de lutte ?

La réponse est non. Tout cela relève de la fiction syndicaliste-révolutionnaire, c’est une tromperie bien française. Les Français aiment se mentir à eux-mêmes !

Il faut une preuve ? En voici quatre !

La première preuve : l’état d’esprit

La grève ne doit pas avoir lieu que le 7 mars. Elle est censée se dérouler en continu par tranche de 24 heures. C’est-à-dire que le syndicalisme révolutionnaire se la joue à la « révolution permanente ».

On est là dans un maximalisme revendicatif. Or, si on regarde la société française, on ne voit rien chez les gens indiquant un niveau de tension corroborant un épisode majeur dans la société.

Pour un conflit, il faut des acteurs, et on ne voit pas du tout des travailleurs français prêts à l’affrontement jusqu’au boutiste.

La deuxième preuve : Dassault

La première preuve semblera trop idéologique pour certains. Alors regardons ce qui se passe avec un exemple concret. Il y a un important mouvement de grève en ce moment chez Dassault. Sont concernés toutes les usines de cette entreprise d’armement, avec également les sous-traitants de mobilisés.

C’est une lutte réelle, avec de l’agitation, des blocages dans les 3/4 des usines, un état d’esprit qui remue et est revendicatif. Niveau revendication, justement, il est exigé 6 % d’augmentation et 250 euros brut.

Anthony Dupuy, délégué syndical CGT Dassault Mérignac dit que c’est dans l’ordre des choses :

« Notre demande est tout à fait acceptable, car le carnet de commandes est plein pour les dix prochaines années. Nous demandons un meilleur partage des richesses ! »

On a donc des ouvriers qui sont… très contents de travailler pour le capitalisme, de produire des armes, de produire des armes qui se vendent, et qui veulent leur part du gâteau.

Jamais de tels travailleurs n’iront au conflit général avec le capitalisme. C’est mal parti donc pour un mouvement de conflictualité qui déborde le cadre institutionnel…

Il y aura du remue-ménage, mais il n’est dans l’intérêt de personne que les choses aillent trop loin. Le 7 mars 2023 vise à « sauver » le cadre institutionnel des retraites, voilà tout.

La troisième preuve : le niveau

Il ne faut pas se leurrer sur le niveau des travailleurs français et des Français en général. C’est l’effondrement culturel généralisé, la passivité dans la corruption capitaliste, un esprit régressif tendant au niais.

Et à gauche tout ce qui existe est simpliste, anti-culturel, anti-intellectuel. Soit dans une version beauf, soit dans une version LGBT moderniste, mais cela ne change rien à la substance de la chose.

Même chez les jeunes il n’y a rien à sauver. Les jeunes sont vifs, mais ils n’ont pas de culture et se laissent aller à suivre le cours des choses. Ils ne veulent surtout pas heurter ou entrer en conflit.

Comment peut-on être jeune et mettre l’amour au même niveau que la retraite à 60 ans ? Humainement, quel désastre.

La quatrième raison : la restructuration économique

Le capitalisme est ce qu’il est. En l’occurrence, le capitalisme français est imbriqué dans le capitalisme américain, et l’heure est à la guerre contre la Russie.

Tout cela demande un certain budget et il faut procéder, en fonction, à une restructuration économique. La question a bien sûr déjà été abordée ici.

Donc tout le délire d’une « bataille pour le repartage des richesses » sans rien contextualiser, à caricaturer le président Emmanuel Macron comme un vilain, à dénoncer les milliardaires qui ne partagent rien, c’est du cinéma.

Il n’y a pas de bataille pour le « repartage » des richesses sans affrontement avec la bourgeoisie. Mais comme personne ne la veut, personne ne mentionne cette classe et préfère parler des milliardaires et de l’affreux gouvernement, en espérant grapiller…

Grapiller quoi ? Des miettes. Ce que le capitalisme voudra bien donner pour assurer la paix sociale, le consensus afin d’aller à l’affrontement militaire contre la Russie.

Et sinon ? Sinon ce sera la violence contre les travailleurs, le fascisme pour porter la guerre aux visées impériales.

Alors, franchement, le 7 mars, il ne tient pas debout. C’est une vantardise anti-historique, une tromperie, qui s’associera aux multiples gueules de bois de plus de la société française et surtout des travailleurs.

Travailleurs qui vont alors s’empresser… d’encore plus pour voter pour l’extrême-Droite. L’absence de substance du 7 mars 2023 est le rêve éveillé de Marine Le Pen pour la prochaine présidentielle.

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La nature de la réforme des retraites

Pas un choix, mais une nécessité pour la bourgeoisie.

Sur agauche.org, la position a été claire depuis le début : la contestation actuelle de la réforme des retraites relève du passé. Elle illustre un monde militant en déliquescence, qui ne sait plus que se rattacher aux miettes de la puissance française.

Pour autant, il n’en reste pas moins vrai que la réforme des retraites représente en soi une offensive de la bourgeoisie française. Elle exprime la restructuration du capitalisme français dans un tout nouveau contexte, non pas celui des années 1990-2000, mais bien de celui né du grand dérèglement produit par la pandémie de Covid-19.

C’est là que l’on voit que les contestataires sont des opportunistes car ce qu’ils contestent c’est précisément le fait que cette réforme illustre le grande chamboulement des choses, la déstabilisation de la puissance française qui n’a dorénavant plus le choix que d’aller à la confrontation intérieure et extérieure.

Non pas simplement dans une optique d’anticipation budgétaire, comme cela pouvait être le cas avant 2020, mais bien plus dans le but de la survie même du mode de vie capitaliste en France.

La réalité des faits est la suivante : la pandémie de Covid-19 a obligé à des dépenses économiques et sociales faramineuses tout en accentuant les antagonismes entre capitalismes nationaux.

Depuis lors, il s’agit de rester dans la course en conservant la capacité de financement du train de vie des pays riches pour assurer la paix intérieure tout en se militarisant pour limiter la perte des zones d’influences prisées par le bloc russo-chinois, principalement la superpuissance chinoise.

Une tendance vieille comme le capitalisme en crise : la paix intérieure pour la guerre à l’extérieur. Mais contrairement au siècle passé, le capitalisme vomit tellement de richesses qu’il ne peut plus vivre, paradoxalement, qu’à coup de crédits.

C’est ce qui a été expliqué par l’économiste libéral Alain Minc, comme quoi la réforme des retraites est là pour assurer la capacité d’endettement de la France à un niveau soutenable. Cela est tout à fait juste et exprime bien en quoi elle est liée historiquement au « quoi qu’il en coûte » de la période 2020-2021. La réforme des retraites n’est pas « imposée » par les marchés financiers, elle est rendue nécessaire par la configuration même du capitalisme entré en crise générale en 2020.

Mais en période de crise du capitalisme, à la capacité financière s’ajoute une autre nécessité de toute grande puissance, la capacité militaire. A ce titre, une commentatrice déclarait sur la chaine télévision LCI à propos du manque de munitions occidentales en direction de l’Ukraine la chose suivante :

« Certains choix budgétaires ont prix le dessus sur la défense. On a choisi dans nos sociétés, surtout en France mais aussi dans certains autres pays européens, on a dit que qu’en ces temps de dividende de la paix [période d’après la chute de l’URSS] où la guerre n’était plus concevable, où l’Europe allait pour toujours vivre en paixle budget devait se concentrer sur les dépenses sociales et donc maintenant on est vraiment dans la merde. Parce qu’on est face à un choix absolument cornélien, c’est-à-dire que la France endettée comme on l’est n’a pas les moyens de fournir l’effort de défense qu’il faudrait pour se réarmer et récupérer notre niveau d’antan et pouvoir répondre de manière conséquente à toutes les crises qui nous menacent, et je pense que celle d’Ukraine n’est que la première, après on risque d’avoir la crise iranienne et la crise Chine-Taïwan, on aura pas les moyens suffisant pour gonfler le budget de défense et de garder le niveau d’aides et de dépenses sociales qui est le notre. »

Le gouvernement aurait pu assumer entièrement cette position, tant les français sont attachés au modèle pavillon-consommation. Quoi de plus simple que dire aux français que s’ils veulent conserver leur taux de crédit pour devenir propriétaire et avoir une belle voiture équ’il faut passer par le fait de travailler deux ans de plus tout en acceptant le renforcement militaire ?

Et quoi de plus simple si une crise parlementaire intervenait avec dissolution de l’Assemblée nationale que de dire : qui est responsable ? Voulez-vous payer trois fois plus cher votre emprunt immobilier car la France est en train de perdre toute crédibilité financière ?

Car les français sont piégés, ou plutôt ils se sont auto-piégés en acceptant les règles du mode de vie capitaliste alors même que la situation issue de la pandémie de covid-19 va toujours plus les mettre sous pression pour continuer à bénéficier de ce mode de vie dont ils n’osent pas se séparer. Ils veulent la paix intérieure, c’est-à-dire qu’ils veulent conserver à tout prix le mode de vie qui pourtant les précipite dans l’abime de part ce qu’il implique historiquement – militarisation et restructuration anti-sociale.

Les français sont de bout en bout des petits-bourgeois. Pour eux, il n’y a pas vraiment de crise, les riches se gavent et la dette ne seraient que des choses abstraites sans rapports avec la réalité, la pandémie aurait montré qu’on peut « générer » de l’argent sans aucunes conséquences, etc., etc.

Et les contestataires de la réforme des retraites ne les aident pas à sortir de l’ornière. Car ils soulèvent une pierre trop grosse pour eux, ils se heurtent à un problème qu’ils refusent de traiter pour ce qu’il est : l’illustration de la crise du capitalisme français. Historiquement, ils apparaissent comme des brouilleurs de la prise de conscience historique.

Quand on voit que leur seule perspective c’est la « taxation des ultra-riches » sur fond d’acceptation totale du mode de vie bourgeois, ces gens ne peuvent que nous précipiter dans les bras de l’extrême-droite par leur incapacité même d’assumer la crise.

Du fait de sa nature, la réforme des retraites devrait se heurter non pas à une contestation syndicale du type de celle qui existe depuis 40 ans en France, mais à une grève politique de masse. Elle devrait être le prélude à une remise en cause générale du mode de vie occidental, à la perspective de la prise du pouvoir par le peuple à tous les niveaux pour transformer de fond en comble le mode de vie capitaliste.

Cela passe par une nouvelle conscience, une conscience de la crise du capitalisme et de sa sortie historique, le Socialisme.

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Comment la CGT torpille le mouvement contre la réforme des retraites

La CGT est l’un des principaux outils du capitalisme.

La « gauche de la gauche » est perplexe. Elle mise absolument tout sur la CGT, parce qu’elle se soumet au syndicalisme. Cependant, elle voit qu’après le succès des manifestations du 19 janvier 2023, la journée suivante a été programmée pour le 31 janvier, soit aujourd’hui. Cela a fait loin, et n’aurait-il pas été logique de précipiter les choses ?

D’autant plus que depuis le 19 et avant le 31, la CGT a organisé avec FO, la FSU et Solidaires, de multiples… marches aux flambeaux : à Paris, Avignon, Limoges, Périgueux, Béziers, Nîmes, Marseille…

Des marches aux flambeaux ! Faut-il rappeler que ce genre de démonstration relève de l’extrême-Droite historiquement ? Et ce n’est pas pour rien : il y a une sorte de solennité malsaine, d’exigence mauvaise de « l’ordre » qui se dégage d’une telle initiative.

C’est totalement extérieur historiquement au mouvement ouvrier. Cela montre la nullité des syndicalistes, qui sont entièrement coupés de l’Histoire et vivotent au jour le jour dans le réformisme au sein du capitalisme et dans l’inculture.

Et c’est là qu’on voit à quel point la mythomanie syndicaliste révolutionnaire conditionne les raisonnements et les démarches de la « gauche de la gauche ». Comme avant 1905, il y a l’idée d’une division du travail et on attend du syndicat qu’il massifie la contestation. Les « politiques » se contentent de faire de la propagande entre les périodes de contestation.

C’était déjà faux avant 1905. La social-démocratie avait parfaitement montré que le syndicat doit être soumis au Parti. Mais c’est encore plus faux en 2023. Pourquoi ? Parce qu’entre-temps, la CGT est devenu un élément essentiel du fonctionnement du capitalisme français.

La grande preuve historique, c’est que la CGT a été le plus grand obstacle à la contestation en mai – juin 1968. Le mouvement remettait en cause le régime, les valeurs dominantes – la CGT a tout réduit à de l’économisme, en empêchant les ouvriers de rejoindre les organisations d’extrême-Gauche voulant la révolution.

Une autre preuve, c’est cette permanence de l’idéologie de la merguez, propre au délégué syndical toujours enclin au parasitisme social, et dont la seule ambition est de proposer de meilleurs projets à l’État et aux entreprises !

Difficile de faire plus ennuyeux, sans envergure, plus corporatiste, sans culture, que les cortèges syndicaux et en particulier ceux de la CGT.

En considérant la CGT comme le seul syndicat authentique, en lui attribuant des vertus contestataires, la gauche de la gauche montre qu’elle n’a pas d’ambition révolutionnaire. Elle indique par sa soumission à la CGT qu’elle désire simplement une version sociale du capitalisme d’un pays riche comme la France.

S’il en était autrement, la gauche de la gauche romprait avec la CGT, qui est l’un des grands vecteurs de l’idéologie de l’ouvrier corrompu par le capitalisme qui s’achète un petite propriété et veut vivre sa petite vie à l’écart de toute responsabilité historique.

S’il en était autrement, la gauche de la gauche se tournerait vers la culture pour affronter l’aliénation du 24 heures sur 24 du capitalisme.

Depuis plus de cinquante ans, le capitalisme ne connaît en France aucune contestation majeure. Et la CGT est un pilier de cette pacification sociale.

Il va de soi qu’à moins de nier la réalité, il est très facile de voir ça. Mais comme la « gauche de la gauche » est dans la mythomanie, elle en revient toujours à accorder à la CGT des valeurs magiques.

La « gauche de la gauche » aurait un formidable projet et la CGT permettrait, miraculeusement, par la « grève générale », de changer les choses en profondeur, dans un sens anticapitaliste ou on ne sait quoi.

En attendant… l’opportunisme est justifié, car tout dépendrait de ce moment formidable qu’il faut espérer – c’est en ce sens un « mythe mobilisateur ». Le véritable concepteur de la « gauche de la gauche » française, c’est Georges Sorel.

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Le PCF et la CGT rêvent d’un 19 janvier 2023 de masse

Comme d’ailleurs toute la gauche du capitalisme français.

Si la réforme des retraites passe sans « contestation », le grand risque est que la contestation ne soit plus réformiste, qu’elle s’exprime depuis le capitalisme lui-même. Telle est la grande peur de la bourgeoisie, mais également de tous ceux qui vivotent du « militantisme » misérabiliste au sein d’une des grandes puissances économiques mondiales.

Il faut bien parler de misérabilisme. Voici le texte de la… pétition de la CGT. Une pétition ! Voilà le niveau où est tombé le syndicalisme français. Une pétition pour dire littéralement « Bouh la réforme est vilaine ».

Pétition

Le gouvernement a annoncé le report de l’âge de la retraite à 64 ans avec un allongement accéléré de la durée de cotisation.

Cette mesure est injustifiée : le rapport du Conseil d’orientation des retraites (COR) l’indique clairement, le système de retraites n’est pas en danger. Il n’y a aucune urgence financière. 

Cette réforme va frapper de plein fouet l’ensemble des travailleurs, et plus particulièrement ceux qui ont commencé à travailler tôt, les plus précaires, dont l’espérance de vie est inférieure au reste de la population, et ceux dont la pénibilité des métiers n’est pas reconnue. Elle va aggraver la précarité de ceux n’étant déjà plus en emploi avant leur retraite, et renforcer les inégalités femmes-hommes.

Ce projet gouvernemental n’a rien d’une nécessité économique, c’est le choix de l’injustice et de la régression sociale.

Renforcer notre système de retraites nécessite en revanche des mesures de progrès et de partage des richesses.

D’autres solutions sont possibles ! Je soutiens la mobilisation intersyndicale et je m’oppose à cette réforme: « je signe la pétition »

Qu’on ne nous fasse pas croire que la signature de 350 000 personnes est une avancée historique, un progrès des consciences, une avancée sur le plan de l’organisation. C’est juste pathétique. On fonce dans la troisième guerre mondiale et on a ça. C’est fou.

Mais cela a un sens, historique. Le sol se dérobe sous les pieds de tous les alliés objectifs du capitalisme, de tous ceux qui servent à sa pacification sociale, aux accords corporatistes, à la corruption des masses.

Voilà la vraie raison pour laquelle tous les syndicats en intersyndicale (CFDT – CGT – FO – UNSA – FSU – CFE-CGC – CFTC – Solidaires), l’ensemble de la gauche associative et « militante »… se mettent en branle pour que la manifestation du 19 janvier contre la réforme soit une réussite. Il en va de leur crédibilité, de leur légitimité…

Si c’est l’échec – et ce sera l’échec de toutes façons – les choses iront d’elles-mêmes sans eux, et même contre eux.

Le secrétaire national du Parti communiste français, Fabien Roussel a ainsi expliqué dans le Journal du Dimanche que le 19 janvier 2023 était la seule chose qui comptait :

« On n’avait pas vu une telle intersyndicale depuis douze ans. Elle nous oblige, nous, forces de gauche. Communistes, socialistes, Insoumis, Verts, nous sommes aussi unis pour nous opposer au projet du gouvernement.

Dès le 17 janvier, avec les quatre leaders de la Nouvelle Union populaire écologique et sociale [Nupes], nous lancerons une campagne de meetings communs au gymnase Japy, à Paris. L’enjeu pour la gauche est d’incarner une alternative de progrès. La Nupes appelle à manifester le 19 janvier afin de grossir les cortèges syndicaux.

Public, privé, jeunes, retraités, nous devons tous sortir massivement jeudi prochain pour dire non à cette réforme. Soyons 1 million à déferler dans la rue. Il n’y a que ce rendez-vous qui compte. »

Un million de personnes, quel populisme ! Jamais il n’y aura un million de personnes conscientes dans la rue. Et si on parvient à une telle quantité, cela sera au prix d’une déficit terrible de qualité, avec un esprit gilets jaunes et des gens s’orientant plus par rapport à Marine Le Pen qu’autre chose.

Il suffit de constater le niveau culturel et idéologique des travailleurs dans le pays. Toute la société française est imbibée de capitalisme, à tous les niveaux de la vie quotidienne.

Ces appels à ce que le privé se mobilise sont également d’une immense hypocrisie, alors que les syndicats n’existent somme toute que dans le public et que la manifestation a lieu comme d’habitude en semaine. Rien qu’avec ça on voit qu’on est dans la fiction de secteurs protégés du capitalisme français qui sentent que désormais leur statut à part va être abandonné…

Fabien Roussel a en fait la trouille, comme le révèle le propos suivant :

« Est-il responsable en pleine crise, en peine guerre, en pleines difficultés pour les salariés et les chefs d’entreprise, de mettre à l’ordre du jour un projet aussi dur pour les Français ?

Emmanuel Macron va plonger le pays dans un énorme désordre. Le Medef devrait hurler que cette réforme arrive maintenant ! »

Le désordre, voilà la grande peur d’une gauche du capitalisme qui ne combat nullement l’Otan et soutient tacitement la guerre faite contre la Russie. Ce dont elle rêve, c’est de stabilité, pour maintenir son existence. C’est pour cela qu’il veut que la manifestation du 19 janvier 2023 réussisse à tout prix. Sinon, les fractures au sein de la société capitaliste française vont précipiter des choses bien plus dures…

Philippe Martinez, le dirigeant de la CGT, ne dit pas autre chose, mais lui ne veut pas un million de personnes, il en veut carrément plusieurs millions, comme il l’a expliqué à BFMTV-RMC :

« Le 19 janvier, il faut des millions de personnes en grève et dans la rue. »

Tels sont les rêves de corrompus ayant bien profité du capitalisme lors de sa croissance depuis 1945. La crise de 2020 les met le dos au mur. Ils sentent qu’ils n’ont plus leur place, ils s’agitent vainement, ils tentent de prétendre représenter quelque chose.

C’est à ces vanités que sert le mythe mobilisateur de la « grève générale ». On peut être certain même que les plus hystériques viseront à du « spectaculaire » afin de se prétendre « révolutionnaire » aux yeux des masses.

Tout cela n’a rien à voir avec la Gauche historique. Tout cela ne fait que relever du panorama de l’effondrement de l’occident.

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Restructurations économiques

La réforme des retraites 2023 ou le dilemme du petit-bourgeois français

Lutter contre la réforme alors que le monde plonge dans la guerre mondiale?

Les Français ont des espérances petites-bourgeoises ; ils n’ont aucune autre ambition à part celle de profiter d’une vie individuelle, à l’écart de soucis, en passant le temps de manière plutôt agréable. Ce sont des beaufs façonnés par le terrorisme de la société de consommation.

Ce point de vue est juste car il se place d’un point de vue historique, international. La preuve flagrante, c’est que la France est dans l’Otan et appuie à fond le régime ukrainien, sans que cela ne dérange personne dans le pays.

Naturellement, si l’on voit les choses depuis l’intérieur de l’Occident, on s’imagine qu’au contraire les Français sont pauvres et combatifs, et que la France n’est pas vraiment en guerre, voire pas du tout.

C’est là où la question de la réforme des retraites qui se joue au début de l’année 2023 a son importance. Sur le fond, c’est une restructuration économique. Il s’agit de rogner des acquis, parce que les bilans comptables ne sont vraiment pas bons.

Par conséquent, il s’agit de faire passer l’âge de la retraite à 64 ans au lieu de 62, de faire sauter les régimes spéciaux, de jouer sur la pénibilité pour faire vaciller les acquis en place.

Ça, c’est le côté capitaliste de la question.

Sur la forme, c’est une question qui se place sur le terrain du compromis entre travail et capital. Les syndicats font office d’intermédiaire afin de négocier la réforme, l’objectif étant de maintenir le compromis général, pour que les choses ne tanguent pas.

Ça, c’est le côté réformiste – syndical de la question.

Maintenant, y a-t-il un autre aspect? La réponse est non. Cela tient à la nature de la société française. Divisons la en trois catégories.

Il y a les vieux, qui ont 50, 60, 70 ans ou plus. Avec eux c’est très simple, ils n’en ont rien à faire de rien. Après moi le déluge et ils sont bien contents de ne pas avoir à vivre ce qui va les suivre. Ils ne s’en cachent pas du tout. Ceux-là on peut les oublier.

Il y a les adultes, qui ont 30, 40 ans. Avec eux, c’est très compliqué: ils sont dans le feu de l’action du travail, mais ont bazardé tous leurs rêves adolescents et se tournent vers une nostalgie régressive d’autant plus qu’ils ne comprennent rien à ce qui se passe. Ils rêvaient de profiter d’un capitalisme à visage humain. La retraite les angoisse, mais dans un sens petit-bourgeois, car leur rêve c’est d’être propriétaire ou de préserver leur propriété.

Il y a les jeunes, adolescents ou qui ont la vingtaine. Ils sont blasés et ne font confiance en rien, ne croient en rien, ne savent rien. Ils sont une page blanche produite par l’Histoire. Et on voudrait faire de la question des retraites des lignes d’or sur ces pages blanches?

Car c’est bien le but de la gauche de la gauche qui fantasme d’une grève générale en France, qui si elle arriverait serait une caricature bouffonne de mai 1968.

Hors de question de participer à une telle fumisterie. L’actualité c’est la troisième guerre mondiale. Soit l’Occident tombe et la révolution devient possible, soit il gagne et le capitalisme surmonte sa crise devenue générale pour toute une nouvelle période.

Dans le premier cas, la question des retraites n’a aucun sens alors que le pays deviendra instable, jusqu’à devenir à feu et à sang. Dans le second, elle n’a aucun sens, car elle serait juste un accompagnement du capitalisme occidental se relançant pour toute une période.

L’actualité, c’est la chute de l’Occident, c’est cela qui compte. La réforme des retraites n’a aucune réalité à part celle de l’espoir capitaliste de parvenir à une petite restructuration ou d’un songe petit-bourgeois d’un vie individuelle beauf et consommatrice.

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Restructurations économiques

Les coupures d’électricité posent encore une fois la question de l’opposition ville/campagne

Le chaos du développement propre au capitalisme s’exprime ici.

La situation énergétique en France est catastrophique. Dès cet été, comme il l’avait été remarqué sur agauche.org, un membre de la majorité présidentielle promettait « du sang et des larmes » pour cet hiver.

Nous y voilà et le gouvernement tente de sauver ce qu’il peut sauver en assurant une continuité des activités tout en annonçant clairement de possibles délestages, c’est-à-dire concrètement des coupures d’électricité.

Et lorsque le capitalisme est confronté à une crise d’une telle ampleur, il fait payer les pots cassés aux classes populaires qui sont sa variable d’ajustement.

Cette situation se comprend bien à travers la lecture de l’opposition ville/campagne, que les coupures d’électricité risquent de mettre encore une fois à nu.

En effet, dans son annonce d’un plan de coupures d’électricité, le gouvernement a repris une circulaire du 5 juillet 1990 qui prévoit l’organisation de délestage par zone, en excluant 14 000 sites prioritaires et secrets, mais dont on se doute qu’ils rassemblent les lieux de sécurité, de santé et de la défense.

Cela signifie qu’il sera procédé au cas échéant à des coupures sur des zones d’environ 2 000 habitants qui sont raccordées à la même ligne électrique, soit entre 8h et 13h, soit entre 18h et 20h. Sauf si cette même ligne alimente un site prioritaire !

Ce sont 40 % de la population qui sont quasi certains d’échapper à ces coupures parce qu’ils vivent dans un quartier relié par leur ligne électrique à un site prioritaire. Ainsi de nombreux foyers de grandes villes comme Paris, Lyon, Marseille, Bordeaux, Nantes, vont voir le risque de coupure amoindri car la densité urbaine est telle qu’il sont forcément rattachés à une ligne alimentant un site stratégique.

D’ailleurs, si l’on peut parler de délestage pour un quartier en ville, ce sera plusieurs communes en campagne.

On pourrait se dire « ô et bien c’est comme ça »… Or non car c’est là l’expression de tout un développement réalisé par le capitalisme, ou plutôt à travers le capitalisme, et son anarchie intrinsèque.

Car ce que cela signifie c’est qu’il y a une majorité de gens qui sont éloignés de sites qualifiés de prioritaires mais en fait essentiels à la vie quotidienne, tel un hôpital, un commissariat, une caserne de pompier, etc.

Ce n’est pas un hasard si plus de 6 millions d’habitants vivent à plus de 30 minutes d’un service d’urgence, l’immense majorité vivant à la campagne.

A ce titre, un scénario parlant serait celui de la perte d’accès aux donnés mobiles téléphoniques (4g et mobile) car l’antenne relais à côté de chez soi serait touchée par un délestage alors que ne le serait pas l’électricité courante pour chez soi car la ligne serait différente que celle alimentant l’antenne téléphonique !

Dans les grandes villes, ce risque serait là aussi moins prononcé du fait d’un réseau bien plus dense d’antennes relais mobiles qu’à la campagne…

Cela montre combien le capitalisme a concentré ses éléments clefs en ville et sa proche périphérie, à commencer par sa matière humaine tels les cadres supérieurs, les ingénieurs, les directeurs et présidents-directeurs, etc., et les infrastructures fondamentales.

Alors qu’il a dans le même temps expulsé dans la campagne les prolétaires qui travaillent dans des zones industrielles infâmes, se déplacent en voiture sur des routes dangereuses tout habitant dans des maisons uniformisées et loin de tout…

Et maintenant, à ce triste panorama, il faut s’imaginer la pagaille que va être la fermeture de l’école délestée et l’absence de feux de circulation…

Le délestage de l’électricité révèle en fait tout le pourquoi du comment le capitalisme est un mode de production qui est périmé…parce que cette situation est l’expression de tout un système bancal, inégal et anarchique, et que la propension qu’a prise l’opposition ville/campagne illustre parfaitement.

La bourgeoisie croit ainsi qu’il suffit de faire un plan pour « s’adapter » aux « crises », mais c’est une illusion qui masque le fait que c’est bien tout le développement des choses qui est à revoir.

Sans même parler que ces délestages sont le résultat nécessaire de toute une situation historique marquée par la guerre (de repartage) en Ukraine ainsi que par l’écocide (effets de la pandémie sur les retards de maintenance des centrales, sécheresses pour les barrages hydroélectriques…).

Bref, c’est tout le logiciel de civilisation qui est à revoir et au coeur de ce reformatage, il ne peut y avoir que les prolétaires, marqués au fer rouge par l’opposition ville/campagne et qui s’ils s’emparent de la Gauche historique, seront à même de tout surmonter.

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Restructurations économiques

Le lithium en Alsace, une catastrophe

C’est la restructuration du capitalisme vers l’économie de guerre.

De vastes opérations de restructurations industrielles agitent l’appareil de production français en Alsace autour de la question du lithium. Cette question est venue à travers celle de la géothermie, c’est-à-dire de la captation de la chaleur d’une poche de magma sous la surface terrestre dans des zones où la profondeur de ces poches est relativement faible, ce qui est le cas en Alsace, qui sur le plan géomorphologique est un morceau du vaste bassin d’effondrement rhénan.

L’exploitation des capacités géothermiques en Alsace a cependant une dimension toute autre, qui pour les capitalistes français est en fait l’aspect principal : c’est l’opportunité d’exploiter les eaux de profondeur, dont la teneur en lithium est ici particulièrement élevée. C’est notamment le cas en Alsace du Nord, où ce métal est présent aggloméré dans des roches volcaniques formée il y a près de 400 millions d’années. Il s’agit en fait un type de granit abondant dans le sous-sol, dans un vaste secteur autour de la petite ville thermale de Niederbronn.

Et les travaux de géothermie menés depuis plusieurs décennies ont permis de constater que les eaux géothermales avaient une teneur en lithium intéressante au plan industriel.

Présentée comme une énergie propre et abondante, la géothermie avait une relative popularité au sein des masses locales, mais tout a changé depuis l’échec catastrophique de Fonroche, ayant provoqué en décembre 2020 une série de 11 séismes en un mois frappant tout le nord de la ville de Strasbourg, et dépassant souvent une magnitude 3,5 sur l’échelle de Richter. Après de longs atermoiements, un arrêt administratif de la production et de toutes les activités sur le site, avait été décidé par la préfecture du Bas-Rhin.

> Lire aussi : https://agauche.org/2020/12/06/strasbourg-violent-seisme-cause-par-un-projet-industriel-geothermique/

La large émotion ayant alors agité les masses avait fait prendre conscience de l’enjeu du lithium dans la question. Les capitalistes ont donc provisoirement reculé, pour revenir depuis quelques semaines en ciblant une zone moins densément peuplée que l’agglomération strasbourgeoise.

L’entreprise en charge de cette nouvelle opération s’appelle de manière significative « Lithium de France », et elle développe une active propagande en direction des masses devant illustrer la capacité des industriels du capitalisme français à gérer correctement la question. Il est assuré déjà qu’il s’agit là d’une activité « décarbonée » sans que personne ne comprenne vraiment en quoi de manière concrète, mais surtout, il s’agit de paralyser les interrogations des masses sur les dangers environnementaux en rationalisant en apparence la technique mise en oeuvre par les industriels. Voici comment Guillaume Borel, le directeur de Lithium France a présenté cela :

« Pour l’instant, et c’est aussi une leçon retenue de Fonroche, on prend les choses les unes après les autres. On va se concentrer sur notre première centrale, et faire les choses proprement. C’est aussi un devoir moral vis-à-vis de la population. On doit montrer qu’on sait travailler de façon correcte et propre, avant d’envisager la suite. L’un des deux puits servira à remonter l’eau, afin d’en extraire son lithium, mais également ses calories. Car il s’agit de faire d’une pierre deux coups, et de permettre par la même occasion de chauffer des bâtiments industriels ou des serres agricoles dans un rayon d’une quinzaine de kilomètres. Ce sera comme une éponge sélective, qui ne va capter que le lithium, et ensuite, il ne restera plus qu’à rincer l’éponge. C’est un circuit fermé. Et ce n’est pas de l’eau de consommation, on est loin des nappes phréatiques. On veut s’assurer dès le départ que le procédé qu’on met en œuvre sera effectivement celui avec le plus faible impact environnemental »

« L’éponge » dont il parlé ici est en fait constituée de titanate de lithium, nécessitant en lui-même du lithium, dont la fabrication en masse sera assurée par des usines chimiques locales : GeoLith à Haguenau et Tronox à Thann. Tout cela est présenté comme relevant d’une technologie propre, sûre et fiable, mais s’il participe des profonds cycles équilibrant le sous-sol de notre biosphère en rapport avec sa surface, le lithium est justement un matériau extrêmement délicat à ramener à la surface terrestre.

Le lithium métallique réagit en effet autant avec l’azote, l’oxygène et la vapeur d’eau dans l’air. Par conséquent, la surface de lithium devient une mixture d’hydroxide de lithium (LiOH), de carbonate de lithium (Li2CO3) et de nitrure de lithium (Li3N). Or, le lithium d’hydroxide présente un risque potentiel significatif car il est extrêmement corrosif, en constituant donc une menace directe sur les environnements aquatiques et les organismes s’y étant développés. Le risque est donc considérable de fait, et l’exploitation industrielle sera forcément définitivement instable et dangereuse.

Mais la population doit donc ici se contenter bien lamentablement des assurances a priori de l’appareil industriel aux mains des monopoles de la bourgeoisie française pour se rassurer.

Le matraquage en faveur du lithium, malgré la méfiance croissante des masses, est à mettre directement en relation avec le vaste mouvement de restructuration de l’économie française, dans le cadre de l’Union européenne. On trouve là le projet industriel LIFE (LIthium For Europe), déclinaison de la tendance au « souverainisme industriel et numérique », devant couper l’appareil industriel européen de sa dépendance à l’égard des pays émergents, et désormais adversaires, avec la Chine comme cible de premier ordre, et de ses approvisionnements énergétiques extérieurs.

Cette restructuration est en elle-même entraînée par la Crise du capitalisme dans son mouvement en direction de l’économie de guerre, en ce qu’il s’agit explicitement de tenter d’assurer au capitalisme français une relative indépendance dans le cadre de l’Union européen, afin de l’élancer à nouveau contre les pays émergents, en restaurant sa capacité industrielle à être une puissance du capitalisme.

Il suffit d’ailleurs d’écouter le chantage qui est fait sur cette question aux emplois et à la souveraineté économique de la France, devant faire bloc dans le cadre de l’Union européenne contre ses rivaux capitalistes pour s’en rendre compte. Tout se met en place donc pour piéger les masses dans la fuite en avant du capitalisme dans son agression généralisée contre la Vie. Rien ne manque en fait avec cette question du lithium, ni le pillage et la destruction de la biosphère comme horizon économique, ni la volonté de paralyser les masses dans les exigences toujours plus furieuses du capitalisme en crise, ni la tendance à la guerre, en fait au centre même des dynamiques.

Le lithium des capitalistes n’est donc pas un miracle pour les masses qui leur assurera une énergie propre et abondante. C’est un piège à tout point de vue qui alimente la fuite en avant folle furieuse du capitalisme dans son impasse historique tragique. Et quand on sait en outre que le lithium fournit aussi un isotope permettant la fabrication d’armes nucléaires, on se dit vraiment que l’horreur est ici complète.

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Restructurations économiques

Le FMI demande la privatisation de l’éducation française

Les bases culturelles pour ça sont déjà posées.

Dans son rapport sur la France, le FMI explique la chose suivant le 21 novembre 2022.

« Remédier à la faiblesse des résultats scolaires et aux inefficiences des dépenses d’éducation pourrait contribuer à améliorer les compétences de la population active. 

Le niveau d’instruction et les résultats des élèves en France sont relativement faibles par rapport à leurs pairs, tandis que les dépenses sont relativement élevées, laissant entrevoir des possibilités de réaliser des gains d’efficience. Il pourrait s’agir notamment de rééquilibrer les dépenses excédentaires en faveur du deuxième cycle du secondaire vers l’enseignement primaire et de rationaliser les dépenses relatives au personnel non enseignant.

Pour continuer de réduire ces déficits de résultats en matière d’éducation, il conviendrait en outre d’améliorer la formation des enseignants et de prévoir une rémunération en fonction des résultats, compte tenu du faible niveau des salaires des enseignants par rapport à leurs pairs.

Les disparités liées au statut socio-économique pourraient être réduites en incitant les enseignants à travailler dans des zones défavorisées, notamment à travers la rémunération. Donner davantage de responsabilités et d’autonomie aux administrations scolaires pourrait favoriser les innovations pédagogiques. »

Ce que demande là le Fonds monétaire international n’a rien d’original, puisque depuis trente ans les bases pour en arriver là sont établies par les gouvernements successifs. La décentralisation des collèges et des lycées, avec des proviseurs choisissant eux-mêmes les professeurs, est un objectif tout à fait clair du capitalisme. Pareillement, la rémunération au « mérite », tant des professeurs dans un établissement que des établissements eux-mêmes par l’État, est considéré comme une nécessité concurrentielle.

Naturellement, tout cela est présenté comme une « amélioration », pas une mise en concurrence ; néanmoins, l’idée de compétition est souvent soulignée, même si masquée (comme ici avec les « innovations pédagogiques »).

Et s’il n’est pas parlé de privatisation, c’est parce que la décentralisation est une privatisation masquée : formellement, il n’y aura pas privatisation, mais davantage d’autonomie. La privatisation aura lieu tout de même, mais parallèlement à la décentralisation, comme effet secondaire si on veut.

Tout cela apparaît comme inéluctable non seulement de par la force du capitalisme, mais également de par le caractère réactionnaire des enseignants. Si depuis 1981 on nous vend que les enseignants sont de gauche, en réalité ils sont culturellement de droite. Avec leurs démarches engagées mais bornées et toujours agressivement hiérarchiques, du moins clairement anti-démocratiques, les enseignants ont dégoûté les élèves ou les ont écrasés.

Il faut ajouter à ça les contenus totalement anti-classe ouvrière, anti-Gauche historique qu’on trouve dans toutes les matières. Et par là il ne faut pas seulement entendre les cours d’Histoire : il faut aussi entendre la géographie, qui est vu par un prisme mercantile capitaliste. Il y a le français où toutes les valeurs post-modernes sont portées au firmament. Il y a la physique qui professe l’idéalisme et le hasard, il y a les mathématiques qui sont présentées comme une vérité en soi.

Tout cela est invisible bien entendu pour qui ne voit que la forme et ne cherche pas la signification du contenu des cours… et inversement. L’école, en France, c’est l’ennui et le par cœur, ou bien du temps qui passe de manière chaotique et qui est perdu.

Cela fait que la mise en compétition passe comme un lettre à la poste, comme le montre l’instauration sans opposition aucune de Parcoursup, la plateforme de sélection pour l’inscription aux études supérieures lorsque les élèves sont en terminale.

Il faut également mentionner l’effondrement général du niveau, dans toutes les matières… Mais naturellement, de manière beaucoup plus relative dans les bons lycées, le plus souvent privés, alors que l’ensemble des couches supérieures de la bourgeoisie française envoie ses enfants faire des études post-bac en Angleterre ou aux États-Unis (soit une dépense de 40-100 000 euros par an par enfant).

Il y a lieu de prendre conscience de cette réalité, c’est important pour cesser de croire les fictions syndicales et réformistes sur « l’école de la République ». Celle-ci est en décomposition complète, en comptant qu’elle ait jamais existé en tant que tel.

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10,6% d’augmentation en un an des prix des produits de grande consommation

La bourgeoisie récupère ses profits.

L’inflation n’avait pas jusqu’à présent été aussi élevée en France que dans la plupart des autres pays européens. Cette fois, c’en est bien fini. Si les prix des produits de grande consommation vendus dans la grande distribution (les hypermarchés et les supermarchés) n’avaient pris que 0,3% d’inflation au moins de septembre, en octobre cela a été de 1,5%.

Sur un an, cela donne 10,6% d’inflation. Pour les prix hors grande distribution (supérettes et épicerie du coin), l’inflation est la même, après avoir pris 1,3% au mois d’octobre.

L’inflation est naturellement très inégale selon les produits. Il est intéressant ici de voir que l’un des fameux arguments contre le véganisme comme quoi cela coûte cher tombe totalement à l’eau, puisque c’est la viande qui voit ses prix exploser.

Cela étant, c’est vrai également des produits simili-carnés, une bonne occasion donc de quitter les produits d’alimentation transformés pour retourner aux mélanges céréales – légumineuses historiquement développés par les peuples (pain et lentilles, semoule et pois chiches, maïs et haricots rouges, sésame et pois chiches, etc.).

Car l’inflation touche en fait tous les produits transformés industriellement. Plus le produit est transformé, plus il va coûter cher. La faute en est d’une part à la pénurie provoquée dans de nombreux domaines par la pandémie, d’autre part par la crise énergétique provoquée par la guerre en Ukraine…

Ces deux aspects en formant un troisième, par synthèse : la bourgeoisie compte rattraper ses profits aux dépens des travailleurs consommateurs.

Si au 19e siècle en effet, la base consommatrice était étroite, ce n’est pas le cas au début du 21e siècle. Au 19e siècle, le bourgeois était gros, les travailleurs minces ou maigres. Au début du 21e siècle, c’est le contraire. Au bourgeois les produits de qualité, aux travailleurs la quantité médiocre. Le bobo va de temps en temps au resto, le travailleur tout le temps au McDo ou au kebab.

L’élévation des prix permet ainsi un rattrapage des profits par la consommation. Naturellement, la perte de valeurs de l’argent joue également pour ceux qui en ont beaucoup. Sauf que ceux qui ont beaucoup d’argent en font quelque chose, alors que ceux qui en ont peu ne le peuvent pas.

On notera d’ailleurs ici un aspect important qu’il reste à étudier. Il y a la légende selon laquelle acheter un logement coûte moins cher, à terme, que payer un loyer. Cela est entièrement faux. Les études économiques à ce sujet sont formelles. Elles ne sont évidemment pas étalées dans la presse ni les médias, et pour cause ! Le logement est en fait un vecteur de consommation capitaliste et de sens de la propriété absolument essentiel au capitalisme moderne.

Cette légende profite en réalité de la constatation de l’élévation massive des prix des logements depuis une quinzaine d’années. Mais outre que c’est une période particulière qu’on ne peut pas généraliser, cela profite concrètement aux propriétaires de dizaines, de centaines, de milliers de logements, pas au propriétaire individuel. Ce dernier voit son logement prendre de la valeur, mais s’il le revend et qu’il veut en prendre un autre, c’est le serpent qui se mord la queue.

De plus, les gens oublient systématiquement l’apport financier massif de papa-maman dans l’opération d’achat du logement. Et ils sont également contents d’être propriétaire, au point d’oublier psychologiquement les frais divers et variés.

Il y a là un aspect important de la question de l’inflation, parce que les « classes moyennes » vont payer plein pot dans la période actuelle, l’inflation visant à les appauvrir pour rattraper les profits capitalistes perdus avec la crise ouverte en 2020.

L’inflation correspond à la polarisation de la société entre bourgeoisie et prolétaires, avec la prolétarisation de la petite-bourgeoisie si massive encore en France. On n’en est qu’au début du processus. Les faits sont là toutefois : ce processus est enclenché.

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La manifestation du 16 octobre 2022 aurait dû être syndicale… pour une grève politique de masse

La politique est une chose, les revendications économiques une autre chose.

La manifestation parisienne du 16 octobre 2022 contre la vie chère n’a pas obtenu le soutien de la CGT, ni de Force ouvrière. C’est dans l’ordre des choses. La politique est une chose, les revendications économiques une autre chose.

Si l’on prend le mouvement ouvrier d’avant 1914, tant dans la social-démocratie que chez les « socialistes français », il était considéré que le travail politique et le travail syndical étaient deux choses distinctes, qu’il ne fallait pas mélanger les genres.

Naturellement, il y avait une différence de fond. Pour la social-démocratie, forte en Allemagne, en Autriche-Hongrie notamment, le Parti avait la primauté et le syndicat, tout en ayant sa spécificité, était un rouage de la stratégie politique générale du Parti.

Pour les socialistes français, le Parti et le syndicat étaient indépendants et marchaient côte à côte ou plutôt parallèlement, les syndicalistes révolutionnaires refusant d’ailleurs même l’idée de Parti, les partis étant considérés comme des « sectes » comme il est dit dans la Charte d’Amiens de la CGT en 1906.

Après 1918, les choses sont restées tels quels, à ceci près qu’en France il y avait le PCF avec la CGT-Unitaire et le Parti socialiste SFIO avec la CGT. Lorsqu’il y a une réunification avec le Front populaire en 1936, la liaison de la CGT unifiée avec les socialistes ou les communistes est flagrante.

Après 1945, la CGT marche avec le PCF et la CFDT (issue du syndicalisme chrétien) avec les socialistes, ou peut-être plutôt l’inverse d’ailleurs, en tout cas au moins pour le PCF, car la ligne impulsée par Maurice Thorez fut vraiment celle du PCF comme « Parti du syndicalisme ». Force Ouvrière, ouvertement mise en place par les États-Unis comme scission de la CGT, reste indépendante ou proche des socialistes.

Tout cela est désormais bien loin. Aujourd’hui, alors que la CGT est en perte de vitesse, que Force ouvrière est en crise d’identité et que la CFDT est devenu le syndicat moderniste accompagnant ouvertement les gouvernement, la question se pose de la nature même du syndicalisme.

Et si les syndicats CGT, FO et CFDT avaient appelé à la manifestation du 16 octobre 2022, ils se suicidaient. Reste à savoir désormais quoi faire.

Leur penchant naturel est un syndicalisme anti-politique, et c’est là une erreur, une faute historique. Le syndicalisme doit assumer sa place, mais seulement sa place. Il doit se soumettre à la politique, comme la CGT l’a d’ailleurs fait au moment du Front populaire en 1936.

Il n’y a guère ici à attendre de la CFDT, qui accompagne les gouvernements comme force « moderniste », ni de Force ouvrière façonné par un anti-communisme virulent. Reste la CGT.

Elle avait appelé à une journée de grève interprofessionnelle, le 29 septembre 2022, et cela n’a pas été une réussite ; elle espérait être aux premières loges ainsi. Et il n’y a pas à attendre qu’elle s’imagine autre chose. Elle vit dans un mythe politique où elle joue le premier rôle.

En admettant que cela soit possible, alors cela aurait eu lieu en mai 1968, là la CGT pouvait jouer ce rôle central. Elle ne l’a pas fait car elle ne le pouvait pas, et d’ailleurs elle ne le voulait pas : elle a été l’un des pires ennemis de mai (et juin) 1968.

Son organisation est qui plus est corrompue et bureaucratique depuis des décennies. Et s’imaginer qu’on peut faire repartir la CGT sur une base de « lutte de classe », d’unité de classe, ou en formant des syndicats « syndicalistes révolutionnaires », c’est ne pas comprendre les défauts inhérents au syndicalisme.

Le syndicalisme français ne peut renaître qu’en assumant d’être une forme secondaire de lutte de classe par rapport au Parti, donc en cessant les délires sur la « grève générale » pour assumer la grève politique de masse.

Le Parti ne doit pas se réduire aux revendications économiques, les revendications économiques n’ont un sens que dans la stratégie du Parti pour aller au Socialisme.

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16 octobre 2022 : l’appel de « personnalités » contre la vie chère

Que le diable emporte les bobos, les « artistes » et les sociologues !

Tous les parasites intellectuels du capitalisme sont en panique devant l’époque qui grandit, car leur position de parasite va se révéler au grand jour. Annie Ernaux par exemple vient de gagner le prix Nobel de littérature, elle se la joue très à gauche et signe cet appel de « personnalités » pour la manifestation parisienne du 16 octobre 2022 contre la vie chère.

La littérature d’Annie Ernaux est une sorte de vomi subjectiviste, fondée sur une complainte d’une dévalorisation sociale et le vécu d’une « transfuge de classe ». Il ne faudrait pas avoir honte de venir d’un milieu populaire, et accepter « l’ascenseur social », voilà le fond d’une forme littéraire illisible par le peuple.

Et donc tous ces gens, qui vivent « bien », qui sont tout à fait à leur aise dans le capitalisme, qui reproduisent toutes les conceptions bourgeoises, s’acoquinent avec des gens à l’esprit gilet jaune, pour essayer de contribuer à former « quelque chose » qui ne soit surtout pas le Socialisme, le drapeau rouge, la lutte des classes.

Le jour où les choses changeront vraiment, ces bourgeois de gauche seront les premiers à devoir se faire rééduquer par le travail !

Pour beaucoup de personnes, la peur des fins de mois s’accentue. Les factures s’alourdissent. Le montant du ticket de caisse grimpe en flèche. Mais le salaire, la pension de retraite ou le RSA, eux, ne décollent pas. Tandis que les profits de certaines des plus grandes firmes françaises atteignent des sommets.

C’est la stratégie du choc : Emmanuel Macron se saisit de l’inflation pour creuser les écarts de richesse, pour doper les revenus du capital, au détriment du reste. Pour laisser flamber les prix des produits essentiels et de l’énergie, et avec eux les profits de multinationales.

Pour éviter toute taxation supplémentaire de ces profits. Mais pour profiter de l’inflation afin que s’effondrent les salaires réels. En refusant de compenser les collectivités locales, il prémédite la démolition, inévitable, des services publics qu’elles assument.

Le choc sidère. Et cette sidération permet au gouvernement des riches d’enclencher une nouvelle phase : attaquer les piliers de la solidarité, le cœur de la protection sociale. D’abord l’assurance chômage, puis le système de retraites. L’offensive se veut rapide, intensive : elle doit abasourdir autant que possible tous les récalcitrants.

Le gouvernement a su se saisir d’une autre onde de choc : les difficultés d’approvisionnement en énergie. Parfait pour en appeler à la responsabilité personnelle, asséner la fin d’une abondance que n’ont jamais connue les gens modestes, et ainsi tenter de faire oublier les premiers responsables de la surconsommation et du désastre écologique : les grands détenteurs du capital, au premier rang desquels les multinationales et les plus riches.

Emmanuel Macron assume de ne pas les contraindre, car ce serait s’en prendre au moteur de la rentabilité des capitaux : l’exploitation sans limite du travail et du vivant. Peu importe l’enchaînement des canicules, des incendies, des tornades, les famines, les océans et les glaciers à l’agonie.

Les néolibéraux martèlent depuis 40 ans qu’il n’y a pas d’alternative. Ne laissons pas les héritiers de M. Thatcher détruire l’espoir, et liquider nos droits sociaux. Un autre monde est possible. Fondé sur la satisfaction des besoins humains, dans les limites des écosystèmes.

Blocage des prix des produits de base et gel des loyers, augmentation générale des salaires et des minimas sociaux, retraite à 60 ans, taxation des superprofits, investissements massifs dans la bifurcation écologique, les transports et les services publics… Tout n’est qu’une question de volonté politique, et dépend de notre détermination.

Le choc peut mener au pire. Comme en Italie, qui vient de renouer avec son passé fasciste. La France n’est pas à l’abri de ce destin. À la suite des mobilisations syndicales de ces dernières semaines, nous avons besoin d’un sursaut populaire pour résister aux régressions et rouvrir un destin collectif fait de justice, de solidarité et de responsabilité écologique.

Face à l’extrême-marché qui corrompt tout, face à l’extrême-droite qui tire parti de la désolation pour avancer ses pions racistes, sexistes et liberticides, nous appelons à unir nos forces dans la rue et à marcher ensemble.

Personnalités engagées, du monde de la culture, des sciences, des mouvements sociaux, que nous soyons anticapitalistes, communistes, écologistes, insoumis, socialistes… nous marcherons le 16 octobre prochain à Paris, contre la vie chère et l’inaction climatique.

Les premiers signataires

Annie ERNAUX, écrivaine, prix Nobel de littérature

Laurent BINET, écrivain, prix Goncourt 2010

Liliane ROVÈRE, citoyenne et actrice

Éric VUILLARD, écrivain, prix Goncourt 2017

Isabelle ALONSO, romancière

Pierre LEMAÎTRE, écrivain, prix Goncourt 2013, César 2017

Marie-Monique ROBIN, documentariste et écrivaine

Édouard LOUIS, écrivain

Éva DARLAN, comédienne

Bruno GACCIO, auteur

Florence GAUTHIER, historienne

Cédric HERROU, fondateur Emmaüs Roya

Mariana OTERO, cinéaste

Gérard MORDILLAT, romancier, cinéaste

Danièle D’ANTONI, agent artistique

Geoffroy DE LAGASNERIE, philosophe

Yvan LE BOLLOC’H, artiste

Laurence DE COCK, historienne et enseignante

Omar SLAOUTI, militant antiraciste

Sabrina ALI BENALI, médecin

Olivier NEVEUX, enseignant-chercheur

Alfred SPIRA, professeur de médecine, membre de l’Académie nationale de médecine

David DUFRESNE, écrivain, réalisateur

Geneviève LEGAY, gilet jaune et citoyenne altermondialiste

Anthony SMITH, inspecteur du travail

Olivier RABOURDIN, acteur

Séverine CORDIER, artiste-illustratrice

Denis QUINQUETON, militant pour les droits LGBT+

Chloé DELAUME, écrivaine

François BERDOUGO, militant pour l’accès à la santé et droits des LGBTI

Antoine PEILLON, journaliste

Stefano PALOMBARINI, enseignant-chercheur

Anne-Laure DELATTE, chercheure en économie

Thomas COUTROT, économiste

Caroline MECARY, avocate

Jérémy MANESSE, comédien, auteur et traducteur

Michael LÖWY, sociologue

Farida CHIKH, infirmière

Didier ERIBON, philosophe

Roland GORI, psychanalyste, professeur honoraire des universités

Fanny GALLOT, historienne, syndicaliste et féministe

Pierre KHALFA, fondation Copernic

Éric BERR, économiste

Yolande BOUIN, membre de la convention citoyenne sur le climat

Nicolas CADÈNE, co-fondateur de la Vigie de la Laïcité

Mathilde LARRÈRE, historienne

Samy JOHSUA, professeur émérite – Université Aix-Marseille

Abdourahman WABERI, écrivain

Jean-Marc SCHIAPPA, historien

Michel SIMONOT, écrivain et sociologue

Malika ZEDIRI, militante des droits des chômeurs et des précaires

Anne DEBRÉGEAS, porte-parole de la fédération syndicale SUD-Energie, économiste de l’énergie

Didier GELOT, économiste

Almamy KANOUTÉ, activiste et acteur

Émilie MOUTSIS, artiste

Manuel CERVERA-MARZAL, sociologue

Razmig KEUCHEYAN, professeur de sociologie

Angélique HUGUIN, militante antinucléaire

Ugo PALHETA, sociologue

Léo COUTELLEC, paysan et philosophe des sciences

Nawel DOMBROWSKY, chanteuse

Antoine VAYER, chroniqueur

Marie MESMEUR, ex-secrétaire nationale de L’Alternative

Olivier LE COUR GRANDMAISON, universitaire

Jimmy BEHAGUE, président de la Neurodiversité-France

Léa LE BRICOMTE, artiste plasticienne

Paul POULAIN, philosophe des risques

Léo CHARLES, enseignant-chercheur en économie

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16 octobre 2022 : l’appel des partis contre la vie chère

Une lecture opportuniste de la vie chère.

L’appel pour une manifestation à Paris le 16 octobre 2022 contre la vie chère est littéralement hallucinant. Non pas parce qu’on n’y parle de capitalisme, parce que ça, ça n’est pas hallucinant, c’est traditionnel de la part de gens cherchant à se faire une place « sociale » dans le capitalisme.

Non, c’est hallucinant, parce qu’il n’y a pas un mot sur la guerre en Ukraine. On est en pleine bataille pour le repartage du monde, l’Union européenne et la France ont instauré des sanctions contre la Russie, cela provoque une inflation importante dans le domaine de l’énergie…

Et ces gens font tous semblant que la France soit une île capitaliste-sociale bien heureuse peuplé de gens aux rêves de propriétaire petit-bourgeois, où il s’agit juste de chercher à grappiller un peu plus de sous afin de pouvoir davantage consommer dans le capitalisme.

Cet appel est une honte absolue sur le plan historique.

« 16 organisations politiques et syndicales ont lancé un appel pour une grande marche contre la vie chère et l’inaction climatique le 16 octobre à Paris.

Europe Écologie-Les Verts, Ensemble !, Gauche Démocratique et sociale (GDS), Gauche Écosocialiste, Génération·s, La France insoumise, L’Alternative, La Voix lycéenne, Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA), Nouvelle Donne, Parti de gauche (PG), Parti ouvrier indépendant (POI), Parti socialiste, Place publique, Pour une Écologie Populaire et Sociale (PEPS), Révolution Écologique pour le Vivant (REV) s’adressent à toutes celles et ceux, associations, syndicats, partis politiques, à toutes les personnes, structurées ou non dans un collectif de lutte, qui se reconnaissent dans le mot d’ordre “fin du monde, fin du mois même combat” à se rassembler pour marcher le 16 octobre contre la vie chère et l’inaction climatique d’Emmanuel Macron. 

[Le PCF s’est ajouté à la liste.]

Vie chère, urgence climatique, retraites : mobilisons-nous !

Les prix explosent et les fins de mois sont de plus en plus difficiles. Mais le pouvoir macroniste refuse d’augmenter les salaires, de geler les loyers ou de bloquer les prix face à la vie chère.

Pire encore, il prévoit de nouvelles attaques contre le régime des retraites et l’assurance-chômage et organise la destruction des services publics, notamment ceux de l’éducation et de la santé.
La planète brûle et l’eau manque. Mais le gouvernement, déjà condamné pour inaction environnementale, poursuit une politique antiécologique qui met en danger l’avenir même de notre écosystème. Il y a urgence à agir pour planifier la transition indispensable face à l’urgence climatique pour en finir avec notre dépendance aux énergies fossiles et aux fluctuations des prix du gaz et du pétrole. 

Pendant que le peuple subit et que la planète souffre, Macron protège ses amis les plus fortunés : quelques superprofiteurs continuent à engranger. Les dividendes versés aux actionnaires ont atteint cette année un record historique. Les hyper riches peuvent toujours profiter de leurs jets et yachts super-polluants : les restrictions ne les concernent jamais. La taxe sur les superprofits, pourtant mise en place dans de nombreux pays d’Europe, n’est toujours pas à l’ordre du jour ! 

Cette situation ne peut plus durer. Nous lançons un appel à une grande marche contre la vie chère et l’inaction climatique à Paris le dimanche 16 octobre, précédée par des initiatives symboliques le samedi 15 octobre.

Cette initiative nationale s’inscrira dans la continuité des mobilisations engagées par les syndicats et associations, dont les journées nationales d’action des 22 et 29 septembre et la mobilisation climat du 23 septembre.
Nous marcherons :

– pour la hausse des salaires et des minimas sociaux et contre la réforme de l’assurance chômage
– pour le blocage des prix de l’énergie, des produits de première nécessité et le gel des loyers
– pour la taxation immédiate des superprofits 
– pour des investissements massifs dans la bifurcation écologique créatrice d’emplois locaux ; et notamment dans les transports en commun pour les rendre accessibles à tous, dans l’isolation des logements pour réduire les factures et les pollutions, dans la conversion vers une agriculture écologique pour rendre l’alimentation saine accessible à tous, dans les énergies renouvelables moins coûteuses et écologiques 
– contre le report de l’âge de départ à la retraite et pour le retour à la retraite à 60 ans
– pour une allocation d’autonomie pour les jeunes dès 18 ans

Nous proposons à l’ensemble des organisations syndicales, associatives, politiques et aux collectifs de citoyens qui partagent ces revendications de construire avec nous cette initiative commune.

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Restructurations économiques

16 octobre 2022 : l’appel des associations contre la vie chère

Une lecture misérabiliste de la vie chère.

Il existe en France une multitude d’associations, et ces associations ont une idéologie associative. Ce sont, pour le dire simplement et ouvertement, des lobbys, qui n’ont toutefois pas la dimension des lobbys à l’américaine. Mais ils aimeraient bien.

L’appel à la manifestation parisienne du 16 octobre 2022 contre la vie chère le reflète parfaitement. On est dans un misérabilisme où, à lire l’appel, la solution serait de déverser des millions d’euros sur ces associations, de les intégrer à l’Etat, et tous les problèmes seraient réglés.

Cela présuppose bien entendu de ne pas parler du capitalisme et de la guerre inévitable pour le repartage du monde… D’où une tentative de bifurcation sur la question climatique, comme si cela avait un rapport ici avec la vie chère.

La dimension artificielle de telles initiatives saute aux yeux ; leur caractère anti-lutte de classes en est d’autant plus flagrant pour qui a conscience de l’époque.

16 octobre : toutes et tous dans la rue !

Incapable d’enrayer l’inflation, il refuse de taxer les super-profits des grandes entreprises. Total, Engie… les entreprises du secteur énergétique engrangent des profits record, alors que ceux d’en bas doivent se contenter de miettes.

En annonçant la « fin de l’abondance », Emmanuel Macron exhorte les Français·es à se serrer la ceinture pendant qu’il multiplie les cadeaux fiscaux en creusant les inégalités.

Résultat : les 5 premières fortunes de France ont doublé leur richesse depuis la crise du Covid, et possèdent autant que les 40 % les plus pauvres. Les crimes climatiques des ultra-riches sont le symbole d’une société d’hyper-consommation, d’un mode de vie détruisant la planète et du refus de contribuer au bien commun. Et maintenant Macron n’hésite pas à agiter la possibilité d’un passage en force avec un 49.3 sur les retraites.

Face à cette stratégie, construisons un plan de bataille. Les journées du 23 septembre sur le climat, la grève interprofessionnelle du 29 septembre sont les premiers pas pour une riposte d’ensemble à la politique néolibérale autoritaire du gouvernement Macron qui fait le lit de l’extrême droite.

Marchons le 16 octobre

Bien que la marche du 16 octobre soit initiée par les partis politiques et que nous comprenons les réticences des mouvements sociaux à la soutenir, elle est aujourd’hui un élément de la création d’un rapport de forces face aux projets de régression sociale et à l’inertie écologique du gouvernement. La violence des attaques du gouvernement appelle une riposte commune et prolongée.

C’est pourquoi, en toute indépendance, nous participerons à la marche du 16 octobre :

pour la hausse des salaires, des pensions et des minimas sociaux et contre la réforme de l’assurance chômage et du RSA

pour l’égalité des salaires femmes – hommes.

pour le blocage des prix de l’énergie, des produits de première nécessité.

pour le gel des loyers et la réquisition des logements vides.

pour la taxation immédiate des superprofits.

pour des investissements massifs dans la bifurcation écologique, notamment l’isolation des logements, les transports en commun, les énergies renouvelables et la transition vers une agriculture écologique.

contre le report de l’âge de départ à la retraite et pour le retour à la retraite à 60 ans.

pour une allocation d’autonomie pour les jeunes dès 18 ans.

pour la régularisation des sans-papiers, contre les projets de loi sur la sécurité et l’immigration, et l’impunité policière.

Les premiers signataires

AC !
Acides : Alliance contre les crimes industriels et pour le droit à un environnement sain
Ambassade des immigrés
APEIS
Assemblée Citoyenne des Originaires de Turquie (ACORT)
Association des Marocains en France (AMF)
Association des Travailleurs maghrébins en France (ATMF)
Association pour le Changement et la Démocratie en Algérie (ACDA)
Attac France
CEDETIM
Changer de cap
Comité pour le respect des libertés et des droits de l’Homme en Tunisie (CRLDHT)
Conseil National de la Nouvelle Résistance (CNNR)
COPAF (Collectif pour l’Avenir des Foyers)
Fédération des Tunisiens pour une Citoyenneté des deux Rives (FTCR)
Fondation Copernic
La Chapelle debout
Maison du Tamil Eelam
MAN, Mouvement pour une Alternative Non-violente
Marche des solidarités
MNCP (Mouvement national des Chômeurs et Précaires)
Mouvement citoyen marseillais Nos Vies, Nos Voix
MRAP
Sang pour Sans
Stop Précarité
Unis pour le climat et la biodiversité

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Restructurations économiques

La situation énergétique de la France est catastrophique

C’est la grande panique avant l’hiver.

Lors de la conférence de presse du gouvernement pour évoquer la « situation énergétique » du pays en vu de l’hiver, il a été dit la chose suivante par la Premier ministre Élisabeth Borne :

« si chacun prend ses responsabilités, il n’y aura pas de coupures »

Si on interprète correctement, il faut comprendre : c’est tout à fait possible qu’il y ait des coupures de courant et de gaz, alors le gouvernement cherche le moyen de faire porter la responsabilités à d’autres.

D’ors et déjà il est prévu une campagne de communication à destination de la population. On y apprendra des choses du genre il faut éteindre la lumière en quittant une pièce ou lancer une machine à laver en dehors des heures pleines sur le réseau. C’est que les gens sont censés y mettre du leur, parce que la bourgeoisie française n’est plus sûre de sa capacité à fournir le standard de confort et de consommation vanté (et surtout, indispensable au capitalisme).

La crise frappe de plein fouet le pays, et cela va commencer à se voir cet hiver. Il y a clairement une panique au sommet de l’État français, terrifié de voir la population gronder face aux prix, ainsi que l’économie paralysée par des black-out en série.

La situation est en effet catastrophique. En ce qui concerne le gaz déjà, en raison de la guerre économique menée à la Russie par l’OTAN et ses pays membres. Les réserves de gaz pour l’hiver sont faites (à 94%), mais tous cela est précaire s’il n’y a pas de continuité dans l’approvisionnement.

Le directeur général de GRTgaz, le gestionnaire du réseau français, a été on ne peut plus clair dans sa conférence de presse précédent celle du gouvernement le matin même :

« Dans un hiver moyen, la France est capable de faire face à la demande de gaz tout en soutenant le système électrique et en contribuant activement à la solidarité européenne. Mais si l’hiver est froid ou très froid, on pourrait se retrouver en situation de tension plutôt en fin d’hiver, et donc il faut vraiment un effort de sobriété indispensable dès maintenant pour préserver les stockages tout au long de l’hiver ».

Difficile de faire plus explicite : si la population française ne joue pas le jeu, c’est la catastrophe annoncée. Le problème, c’est que le directeur général de GRTgaz a également parlé du mécanisme de solidarité européenne qui fait qu’à partir de la mi-octobre, du gaz doit être livré à l’Allemagne par la France : 100 GWh/jour, « soit la puissance de quatre tranches nucléaires ».

C’est gigantesque, et forcément cela ne passera pas. Les nationalistes et populistes ont déjà sauté sur l’occasion pour critiquer l’Allemagne de manière chauvine. Cela d’autant plus qu’il est déjà prévu des délestages pour les industriels gros consommateurs, c’est-à-dire les secteurs du verre, des engrais, des métaux, de la pétrochimie et de l’agroalimentaire, à moins que ceux-ci ne réduisent la voilure d’eux-mêmes.

On voit là clairement que la crise renforce elle-même la crise, ici en contraignant directement les capacités productives françaises. En parlant de capacités productives françaises, c’est d’ailleurs la catastrophe en ce qui concerne le nucléaire, censé être le fleuron industriel français.

Près de la moitié des réacteurs nucléaires français, soit 26, sont à l’arrêt pour des raison de maintenance. EDF, sous la pression immense du gouvernement, a fournis un calendrier très précis : 5 réacteurs doivent repartir en septembre, 5 en octobre, puis 7 en novembre, 3 en décembre, 3 en janvier et enfin 2 en février.

Sauf que concrètement, rien ne garantit le suivi d’un tel calendrier tout simplement car il n’y a pas la main d’œuvre. La France a des millions de gens dans des bureaux, mais manque d’ouvriers. EDF manque cruellement de tuyauteurs, de soudeurs, de robinetiers, de chaudronniers, pour assurer les travaux nécessaires.

Au passage, on notera que c’est la même chose pour la branche commerciale d’EDF : l’opérateur public a subi pendant des années une fuite de clients suite à l’ouverture du marché à la concurrence. Sauf qu’avec la crise, les prix explosent littéralement chez les opérateurs privés et EDF voit affluer des masses de clients voulant revenir à l’opérateur historique pour bénéficier du tarif réglementé… mais n’a pas le personnel et les moyens techniques pour absorber cela.

En tous cas, la tension sur le réseau électrique français cet hiver va être extrême. Sans compter l’explosion de tarifs pour les collectivités, qui doivent se fournir au prix du marché. La région Ile-de-France a communiqué là-dessus : « la hausse absolument colossale des prix de l’énergie va déferler sur les transports du quotidien ».

Il est prévu une augmentation de 950 millions d’euros des coûts pour l’exploitation du réseau, soit presque un milliard, pour un budget actuellement de 11 milliards.

C’est évidemment pareil pour toutes les villes, surtout celles avec tramways ou métro. Pour la SNCF, le problème se pose également. Et puis il y a le transport de marchandises, essentiellement thermique par camion en France, qui fait face à une explosion des coûts d’exploitation, qui vont forcément être répercutés et renforcer la crise.

Le gouvernement français est face à un mur qui menace de s’effriter. Il continue à vouloir boucher les fuites une par une, en déployant ici un bouclier tarifaire limitant la hausse des prix de l’énergie à 15% en 2023, là des chèques énergie exceptionnels pour 12 millions de foyers considérés comme modestes, etc.

Cela coûterait 45 milliards d’euros à l’État en tout, car il y a aussi des mesures prévues pour les entreprises, surtout les PME. Tout cela alors que l’État français est déjà au bord de la faillite, et que la croissance capitaliste du pays va être totalement chamboulée par les pénuries énergétiques et l’inflation cet hiver.

Les français cigale, ayant chanté tout l’été, un été qui dure depuis des décennie d’abondance capitaliste, vont se trouver fort dépourvus quand la crise sera clairement venue… Ils iront forcément crier famine chez la fourmi voisine, c’est-à-dire l’État, mais il les enverra danser, comme il l’annonce déjà.

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Emmanuel Macron et « la fin de l’abondance »

Comment amener la société consommatrice à la guerre?

Jusqu’à présent, rien de bouleversé en France. Il y a eu le Tour de France, Emmanuel Macron est passé par là, tout va très bien dans le meilleur des mondes. L’été 2022 s’est déroulé sans accrocs.

L’Etat doit pourtant procéder à une vaste restructuration économique, ainsi qu’amener les gens en direction de la guerre pour le repartage du monde. Les gens sont trop passifs pour faire face aux restructurations, donc de côté-là, ça passe, mais comment les amener à la guerre ? Là, il y a un véritable problème et l’aile libérale-modernisatrice de la bourgeoisie, que représente Emmanuel Macron, doit montrer qu’elle est capable de résoudre ce problème, sans quoi… C’est l’aile nationaliste-militariste qui l’emportera, et avec elle la très haute bourgeoisie.

Dans son discours introductif au Conseil des ministres, le 24 août 2022, le président Emmanuel Macron a ainsi tenu des propos visant à souligner l’ampleur de la tâche. Ce qui donne :

« Il se pourrait que d’aucuns voient notre destin comme étant perpétuellement de gérer les crises ou des urgences. Je crois pour ma part que ce que nous sommes en train de vivre est plutôt de l’ordre d’une grande bascule ou d’un grand bouleversement. »

Emmanuel Macron a dans ce cadre utilisé trois formules chocs, dont les médias français se sont très largement faits écho : c’est « la fin de l’abondance », « la fin d’une forme d’insouciance » et « la fin des évidences ».

C’est là qu’on voit qu’on est à une période charnière et que les événements vont se précipiter. On sait en effet qu’il y a la pandémie, une dette gigantesque, l’inflation, la tendance à la guerre qui se systématise, bref c’est la crise. Sauf que le capitalisme a connu une telle croissance depuis 1989 – depuis l’effondrement du bloc soviétique et l’intégration de la Chine comme usine du monde – que cela a produit une telle abondance que les gens sont encore totalement déconnectés.

A part pour l’ultra-gauche et La France Insoumise, qui pratiquent un misérabilisme outrancier, la France vit dans une opulence toute impérialiste au niveau des rapports mondiaux. Les gens sont corrompus, le rêve de tout un chacun est d’être propriétaire… quand il ne l’est pas déjà !

Et de ces Français, on ne peut pas faire des soldats ou se fonder sur eux pour une économie de guerre. Même la Russie en guerre contre l’Ukraine n’a pas osé instaurer un régime nouveau fondé ouvertement sur l’économie de guerre. Alors les Français… comment faire ?

Il y a de plus cette histoire de rentrée 2022. Il y a un remue-ménage social et l’inflation a marqué les esprits. Du point de vue de la Gauche historique, il ne peut rien se passer du tout de bien, car le niveau des consciences est lamentable. Du point de vue des spontanéistes, c’est par contre l’heure des fantasmes absolus, avec l’espoir d’un renouveau des « gilets jaunes », ce mouvement plébéien fascistoïde.

Comment, pour le régime, faire face à une telle révolte qui ne peut, par définition, qu’aller dans le sens de l’aile nationaliste ? La France Insoumise, Jean-Luc Mélenchon, François Ruffin… ne sont que des tremplins pour l’extrême-Droite. Il n’existe pas de Gauche réelle en France. Tout est à reconstruire. Tout peut aller très vite, mais tout est à faire.

Autrement dit, les Français sont corrompus, et ils ne sont bons à rien. Emmanuel Macron aimerait les garder tels quels. Mais il faut aller à la guerre… sans aller trop vite ni lambiner, auquel cas l’extrême-Droite l’emporterait. Il faut donc bousculer les Français… Ce qui va rendre les choses instables.

C’est là que la fenêtre de tir s’ouvre pour la Gauche historique. Mais le rythme risque d’être très rapide, trop rapide… La séquence qui s’ouvre va être effroyablement complexe ; dans les faits, qui n’a pas un arrière-plan réellement solide sur le plan des idées se fera entièrement balayer.

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Électricité : du sang et des larmes cet hiver?

Les masses seront sacrifiées dès qu’il le faudra.

C’est le magazine Marianne qui raconte. Un personne importante de la majorité parlementaire leur confie la teneur des discussions. Les dépenses publiques, cela suffit et on ne pourra pas continuer les chèques à l’infini.

« Il va falloir qu’on arrête de laisser croire que l’État va pouvoir tout compenser quoi qu’il arrive. Qu’il pourra payer malgré la guerre, la hausse des prix de l’énergie des matières premières. »

C’est alors qu’il  « souffle » au journaliste de Marianne son discours de « vérité » :

« Il y a un moment où il faudra passer au discours du sang et des larmes. En tout cas, je vais militer pour ça. » 

Il aurait alors précisé :

« On a commencé à le faire, en annonçant les coupures d’électricité cet hiver. »

En effet, il fallait lire le Parisien (ou Valeurs actuelles qui a repris l’article) pour voir le député Renaissance Marc Ferracci annoncer la couleur :

« Il ne faut pas se mentir, ça va être dur. L’hiver va être compliqué. Tous les efforts sont faits pour limiter les contraintes, mais il va y avoir des contraintes. »

Quelques semaines auparavant, l’idée avait été répandue, y compris par TF1, que le gouvernement prévoyait un décret permettant les coupures d’électricité chez les particuliers, sans indemnisation (contrairement à ce qui se fait pour les entreprises).

Cela a été démenti, y compris par d’autres médias. Mais il y a malgré tout cette petite mélodie des coupures de courant qui est jouée, pour préparer les esprits. En effet, cela n’a rien de farfelu. En mars 2021, RTE (le gestionnaire du réseau électrique en France) avait prévenu dans un rapport qu’il fallait s’attendre à des hivers tendus sur le réseau jusqu’en 2024 en raison des difficultés de production du parc nucléaire.

Celui-ci est vieillissant, et surtout il a subi de plein fouet la crise sanitaire. Les travaux de maintenance ont pris énormément de retard. Et encore, le rapport date d’avant la découverte d’un problème de corrosion obligeant à la fermeture de 12 réacteurs.

Avant 2022, la France était le premier exportateurs net d’électricité (malgré les importations hivernales, elle exportait sur l’ensemble de l’année beaucoup plus). Ce n’est plus le cas et le pays est maintenant, selon un rapport publié début aout 2022, un pays importateur net en raison de ses difficultés de production.

On peut ajouter maintenant que les différentes vagues de canicule de cet été 2022 n’arrangent rien à l’affaire, bien au contraire même. Il y a des autorisation de relâcher de l’eau utilisée par les centrales pour se refroidir à une température plus haute que la normale, en prétendant que cela n’aura pas d’impact écologique.

Et puis il y a le parc automobile électrique qui se généralise, tout comme les trottinettes et vélos électriques qui, s’ils ne pèsent pas grand-chose, expriment une tendance de fond qui contribue à l’augmentation générale de la consommation électrique.

A l’heure actuelle, près de la moitié des 56 réacteurs français sont à l’arrêt. Si l’hiver est froid et avec peu de vent, alors la situation va forcément être très compliquée. Habituellement, la France joue la carte de l’importation hivernale. Sauf qu’avec la crise, et particulièrement en raison de la guerre en Ukraine et des difficultés en ce qui concerne le gaz et le pétrole, tous les pays habituellement fournisseurs vont aussi être en situation tendue.

De toute manière, les capacités françaises d’importation sont limitées pour des raisons techniques dues aux infrastructures. En décembre 2021 la France a déjà frôlé sa capacité maximale d’importation de 13 GW, ce qui n’avait jamais eu lieu auparavant.

En attendant, l’information est déjà sortie qu’EDF a repoussé sept arrêts de réacteurs pour maintenance cet hiver. Au risque de la sécurité ? Les experts en tous genre prétendront évidemment que non, mais en tous cas ce qui aurait dû être fait en termes de révision ne sera pas fait en temps et en heure.

Toujours est-il que si effectivement les particuliers français connaissent des coupures d’électricité cet hiver, cela va faire mal, très mal. Car c’est toute l’illusion de 70 ans de capitalisme stable et inaltérable qui va voler en éclat.

Il n’y a pas eu de coupures organisées, temporaires et prévenues, depuis le début des années 1950 et la généralisation sur tout le territoire d’un réseau moderne fiable et puissant par EDF. Le choc serait terrible, et à cela s’ajoute l’augmentation du prix de l’électricité justement.

La crise menace donc d’éclater au grand jour et il est évident qu’au plus haut de l’État, tout comme dans les plus hautes couches de la bourgeoisie (ce qui revient au même), cela fait trembler. La bourgeoisie envisage concrètement du sang et des larmes, car il sera hors de question pour elle de se remettre en cause, ni culturellement, ni en termes de train de vie. Et c’est aux classes populaire que sera envoyée la facture de la crise.

Quelle sera justement la réponse populaire ? Voilà tout l’enjeu de la période à venir.

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Les signes avant-coureurs d’une crise de l’euro

L’euro pourrait bientôt s’effondrer.

C’est un cap symbolique qui a été passé le 12 juillet 2022, l’euro ayant atteint la parité avec le dollar. Autrement dit, un euro = un dollar, alors qu’auparavant l’euro était systématiquement plus fort que le dollar quasiment depuis sa création. C’est le résultat d’une dépréciation de 19% depuis le début de l’année 2022 et de 37% par rapport au record d’avril 22 avril 2008, lors de la crise financière touchant de plein fouet les États-Unis.

L’euro perd donc substantiellement de la valeur, car le dollar est la valeur étalon du capitalisme mondial. Cela reflète les faiblesses de l’espace économique européen qui sera bientôt touché-coulé par la crise. Car en pratique, si l’euro baisse ainsi, c’est parce qu’il y a un mouvement général de défiance à son égard, pour des raisons objectives très simples à comprendre.

La première, c’est que la Banque centrale européenne a joué avec le feu lors de la crise sanitaire en permettant aux États européens de s’endetter encore plus massivement qu’ils ne l’étaient déjà. De l’argent magique est apparu par milliards pour sauver le capitalisme sonné par la covid-19. Mais cet argent n’avait en réalité rien de magique et voilà la facture arrive. De l’euro est sorti de nulle part, alors il y a maintenant un rattrapage avec une dévalorisation de cette monnaie.

Bien sûr, le capitalisme américain n’a pas été en reste en ce qui concerne l’argent magique. Et, en substance, la valeur du dollar aussi est menacée. Mais la situation américaine est différente en raison de l’hégémonie du dollar et de la puissance économico-politique américaine.

Cela fait que concrètement la banque centrale américaine, la FED, a agi très tôt pour contre-carrer les effets de l’argent magique. Elle a resserré sa politique monétaire (hausse des taux directeurs) depuis le mois de mars, puis une seconde fois en juin. Alors que de son côté la Banque centrale européenne ne le fait qu’en juillet. De plus, cette dernière part de très loin, car les taux d’intérêt ont été négatifs (une absurdité typique de la crise du capitalisme), ce qui n’avait pas été le cas aux États-Unis.

L’autre grande difficulté européenne est sa grande disparité. L’écart le plus significatif, et le plus regardé, est-celui entre l’Allemagne et l’Italie. D’un côté l’Allemagne est considérée comme solide, a une dette considérée comme soutenable : elle emprunte donc pour pas cher. Au contraire, l’économie italienne est considérée comme faible en raison d’une dette publique astronomique, à proprement parler insoutenable : l’Italie emprunte donc à des prix élevés.

Cette différence entre les taux allemands et italiens est scrutée de près, le termes pour la désigner est le spread. C’est en soi un sujet de discorde qui affaiblit l’euro.

Si ce spread est élevé, cela signifie une zone économique déséquilibrée, et donc une monnaie euro qui n’est pas fiable. Alors il y a la volonté de réduire artificiellement ce spread en dirigeant une politique monétaire forte vers l’Italie (entre autre) avec du rachat d’actifs italiens. Le problème, c’est que cela revient encore à produire de l’argent magique et ne fait que repousser l’échéance.

L’Allemagne considère donc qu’il n’est pas question de courir ce risque et que les pays comme l’Italie devraient tout simplement comprimer leur dette en réduisant la voilure de leurs budgets, ce que les bourgeoisies de ces pays refusent catégoriquement de faire pour l’instant. Le spread va donc continuer de grandir, ce qui continue donc d’affaiblir l’euro et de miner la confiance en cette monnaie.

Et comme l’Allemagne elle-même, moteur économique de la zone euro, est affectée directement par la crise, de manière toujours plus violente, alors il n’y a rien pour améliorer la situation de l’euro et de la zone économique européenne. Le secteur industriel allemand fait face aux pénuries de composants asiatiques et d’approvisionnements énergétiques, ce qui menace de fait tout le continent.

Il y a là une spirale négative qui va s’accélérer maintenant avec la faiblesse de l’euro par rapport au dollar. Tout simplement car maintenant, avec leurs euros, les pays européens pourront acheter moins de marchandises en dollars, la monnaie de référence mondiale. Inversement, il y a bien sûr un avantage, mais comme les pays de l’Union européenne exportent peu, ou de moins en moins, cet avantage est très relatif.

La dépréciation de l’euro face au dollar vient donc directement et concrètement renforcer l’inflation des prix, ce qui ajoute encore un problème au problème. L’Union européenne et la zone euro qui lui est liée est face à un mur. La crise ne fait que commencer et la crise de l’euro en sera probablement une première manifestation violente.

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Restructurations économiques

Investissement dans les semi-conducteurs en France, un pas de plus vers le Brexit à la française

La restructuration du capitalisme suit son cours.

La crise économique issue de la pandémie de covid-19 a permis de battre en brèche un mythe relativement diffusé dans certaines sphères de la critique du capitalisme, celle d’un capitalisme fondé dorénavant sur le travail immatériel.

La pénurie de semi-conducteurs qui a commencé à l’automne 2020 a rappelé que le capitalisme d’aujourd’hui restait fondé sur le même principe que celui d’hier : l’existence d’une base productive bien matérielle. Car il n’y a ni téléphones portables ni ordinateur, ni même rien d’électronique sans les puces électroniques et donc les semi-conducteurs, ces petites plaquettes de silicium sur lesquelles sont gravées des circuits intégrés.

Mais voilà, cette base productive est massivement détenue par des pays asiatiques, et notamment des industries géantes telles que Samsung en Corée du Sud et TSMC à Taïwan.

Et si cela ne posait pas de réels problèmes jusqu’à la pandémie de Covid-19, la désorganisation en chaîne a provoqué des pénuries telles qu’elles menacent la relance de l’industrie automobile et plus généralement celle de toute l’économie.

Car la production de semi-conducteurs, ce n’est pas simplement la fabrication d’objets connectés, c’est aussi la condition pour des tas de branches industrielles de pouvoir bien fonctionner.

C’est pourquoi le plan France relance 2030 a placé au centre des investissements publics ce secteur clef, en visant une base productive existante qu’est le bassin de Grenoble où se concentrent des industriels du secteur, dont le fabricant franco-italien ST Microelectronics installée depuis 1992.

Ce mardi 12 juillet, Emmanuel Macron était ainsi à Crolles pour annoncer l’investissement de 5,7 milliards d’euros d’argent public pour la construction d’une nouvelle unité productive de semi-conducteurs de 12 nanomètres sur la base d’un partenariat entre Global Foundries, le numéro 2 de la fonderie de gaufrettes de silicium, et ST Microelectronics. Elle devient l’une des plus importantes pour cette production en France.

C’est là clairement une manière d’assurer le positionnement de la bourgeoisie française sur le marché, à la fois pour donner un signal clair dans la capacité d’accumulation en France au vu du contexte explosif de la dette publique française, et à la fois pour assurer la « souveraineté industrielle » de la France.

A ce titre, on voit combien la CGT est toujours plus intégrée à la restructuration du capitalisme français, puisque les syndicats CGT de ST Microelectronics et de Soitec (un autre leader du secteur dans le bassin grenoblois) appelaient en octobre 2021 à la naissance d’un « TSMC européen »….

Et cela entre parfaitement en adéquation avec Emmanuel Macron qui est un tenant de la ligne libérale-européenne, et c’est pourquoi il a pu compter sur la présence du commissaire européen au marché intérieur Thierry Breton, qui a rappelé l’inscription de cet d’investissement dans un plan européen plus large , le « Chips Act » ou paquet législatif sur les semi-conducteurs.

Thierry Breton a parlé d’ailleurs de « reconquête stratégique », ce qui en dit long sur la nature de l’Union européenne, qui n’est rien d’autre qu’un organisme au service des grandes entreprises principalement françaises, allemandes et italiennes.

De fait, c’est une fois de plus une marche en avant vers le Brexit à la française, car on notera la place fondamentale des semi-conducteurs dans toute la chaîne de production industrielle, mais aussi évidemment pour les équipements militaires.

Ce n’est pas pour rien si des embargos pèsent sur la Chine pour se procurer de semi-conducteurs d’une très petite taille auprès du fondeur taïwanais TSMC, tout comme la Russie est privée par les embargos occidentaux des semi-conducteurs du sud-coréen Samsung…

Derrière la souveraineté industrielle ne se cache ni plus ni moins qu’un objectif de fortification nationaliste, en vue d’assurer l’indépendance de la bourgeoisie dans sa relance de l’accumulation du capital.

Et cela ne présage évidemment rien de bon pour les ouvriers de cette industrie, dont le travail, déjà ennuyeux, très répétitif et soumis à une hiérarchie rigide, va être de plus en plus soumis à l’unité nationale avec le capitalisme.

Une perspective qui vise ni plus ni moins qu’à assurer la place de la France en tant que grande puissance dans le monde, un monde courant droit vers la guerre…