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Le point sur l’épidémie de Covid-19 en France au 6 août 2020

Depuis plusieurs semaines déjà, il y a des signes montrant une circulation accrue du coronavirus responsable de l’épidémie de covid-19. C’est un rebond potentiel que la société ne sait pas aborder.

L’illusion comme quoi le covid-19 allait disparaître comme il est venu ne tient plus. L’humanité a joué avec le feu et provoqué des dérèglements à l’échelle planétaire, cela ne disparaîtra pas comme par enchantement. De fait, la maladie est encore très mal connue, tant en termes de conséquences (les cas sont très divers, tant dans la forme que la gravité), que dans sa façon de circuler.

La tension réapparaît ainsi en France, avec 14 départements considérés en situation de vulnérabilité :

– modérée pour Bouches-du-Rhône, Gironde, Haute-Garonne, Haute-Savoie, Ille-et-Vilaine, Nord, Val d’Oise, Paris, Seine-Saint-Denis, Hauts-de Seine et Val-de-Marne ;

– élevée pour Mayenne, Mayotte et Guyane.

Le 6 août 2020, il y a également 175 « clusters » en cours d’investigation (soit 14 de plus que la veille).

7 personnes sont officiellement décédées du covid-19 en France, avec surtout une hausse du nombre de patients en réanimation. 5060 personnes sont actuellement hospitalisées pour cette maladie, avec 21 nouvelles personnes admises en réanimation, portant le nombre total en réanimation à 390 personnes contre 384 la veille (+6).

Ce « solde » entrée/sortie de près de 400 personnes correspond à la situation juste avant le confinement, alors que le pic s’est officiellement situé à plus de 7000 personnes pendant quelques jours début avril.

Ce n’est évidemment guère rassurant. Rappelons en effet que les cas en réanimation reflètent une situation antérieure en termes de circulation du virus, puisqu’il faut plusieurs jours pour que les symptômes se développent et plusieurs jours encore pour qu’ils s’aggravent. Grosso modo, les symptômes mettent au maximum dix jours à apparaître, en admettant toutefois qu’on soit en mesure de les reconnaître comme relevant du covid-19.

Il y a donc l’hypothèse d’une vague qui va arriver à court terme ou, en tout cas, au moins l’hypothèse qu’une vague peut se produire de nouveau. Cela ne fait pas du tout les affaires des capitalistes qui, à l’instar du nouveau premier ministre, veulent relancer l’économie à marche forcée.

Ils tablent sur une meilleure organisation. En effet, la situation est différente aujourd’hui par rapport à lorsque le covid-19 est apparu, en raison des mesures sanitaires prises entre-temps, de la saison (avec la vie davantage à l’extérieur), ainsi que des capacités supérieures à mener des tests (bien que l’organisation soit faible, mal orientée, etc.).

Ces augmentations actuelles ne signifient donc pas nécessairement dans les prochains jours l’explosion qu’on a connue en mars, si l’encadrement est suffisant. On peut avoir le covid-19 comme bruit de fond, présent à de nombreux endroits mais sans se diffuser massivement, somme toute le contraire d’auparavant où il se diffusait rapidement dans des foyers localisés.

Le problème, c’est que les Français sont pétris de libéralisme et ont basculé pour certains dans un libéralisme toujours plus assumé. Cela se lit en particulier dans la jeunesse.

Ainsi l’Agence santé publique France parle pour le 6 août 2020 d’indicateurs montrant une « progression et une intensification de la transmission de l’infection à SARS-COV-2 », ce qui indique une tendance à venir d’augmentation de ces cas graves dans les jours ou semaines à venir.

Mais il est également insisté depuis plusieurs jours sur la prévalence des cas positifs dans la population jeune et c’est encore le cas dans la communication du 6 août 2020, qui évoque particulièrement les jeunes adultes.

Les jeunes se disent qu’ils ne risquent pas grand-chose et ne pensent pas à protéger les autres, ils vivent dans une bulle, d’ailleurs anxiogène. Ils ne savent pas comment se placer alors que, par définition, les jeunes veulent réaliser des choses.

Ici, la société n’a aucune réponse, paralysée par le capitalisme. Il faudrait un haut niveau d’organisation de la société et là on a l’inverse. Dans un contexte où il y a un décalage entre la diffusion du virus et sa manifestation avec les symptômes, c’est évidemment fatal. Les services de santé courent littéralement derrière une société passive et des citoyens infantilisés par des mœurs libérales-libertaires.

Le covid-19 est un défi collectif ; la réponse ne peut être que collective. Ni le capitalisme, ni l’État, ni les gens ne sont prêts à cela. Les gens n’auront pourtant pas le choix.

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Beyrouth: une explosion meurtrière dans un pays déjà à l’agonie

L’explosion survenue après un incendie sur le port de Beyrouth mardi 4 août a été puissante et dévastatrice, à l’image de l’immense crise dans laquelle s’enfonce le pays depuis plusieurs mois. Le bilan accablant d’au moins 73 morts et 3700 blessés, en plus de la destruction de toute une partie de la capitale, ne fait qu’enfoncer encore plus un Liban déjà à l’agonie.

Le souffle de l’explosion de 2750 tonnes de nitrate d’ammonium dans le port de Beyrouth a été particulièrement violent et les fumées qui s’en dégagent visibles depuis Chypre, à 200 km de là. Les rues les plus proches ont été dévastées avec de nombreux écroulements. Quasiment toutes les vitrines des quartiers Hamra, Badaro et Hazmieh ont volé en éclat, marquant toute cette partie de la ville jusqu’à plusieurs kilomètres du port.

L’impact a été tellement fort que des voitures ont été soulevées, des airbags déclenchés, des gens projetés en l’air dans leur propre appartement, des portes d’habitations arrachées jusqu’à très loin du port. Il y a même un navire militaire dépendant de l’ONU qui a été endommagé, faisant des blessés graves sur l’embarcation.

Le chef de la Croix-Rouge libanaise a parlé de « morts et des blessés partout, dans toutes les rues et dans tous les quartiers, qu’ils soient proches ou éloignés de l’explosion ». Dans la soirée, alors que les premières opérations de sauvetage sous les décombres étaient à peine lancées, le ministère de la santé libanais annonçait que les hôpitaux de la ville étaient déjà saturés, les milliers de blessés affluant en masse.

Triste coïncidence, mais terriblement significative, un grand mouvement social des infirmiers était prévu ce mercredi 5 août 2020, suite aux vagues massives de licenciement dans les hôpitaux. Ceux-ci croulent sous les dettes depuis plusieurs mois, sans aides de l’État, devant par exemple se fournir en mazout sur le marché noir pour produire l’électricité que le réseau public ne leur fournit plus, ou seulement par intermittence.

D’ailleurs, dans l’après-midi avant l’explosion survenue sur le port de Beyrouth, des manifestants prenaient d’assaut le ministère de l’Énergie en raison de ces coupures massives d’électricité, parfois pendant 20 heures par jour dans certains quartiers. Le réseau public d’électricité perd chaque année 2 milliards de dollars et est dénoncé comme un des plus gros foyers de corruption.

À l’automne 2019, le pays a connu de grandes manifestations populaires face à la généralisation de la crise. Depuis, c’est encore pire. La monnaie libanaise a perdu 80 % de sa valeur par rapport à cet automne, les épargnant n’ont plus accès à leurs dépôts, la moindre marchandise est hors de prix… quand elle est disponible. Des choses comme les médicaments, la lessive ou encore les couches pour bébé deviennent très rares. Le troc s’est généralisé.

Le salaire d’un militaire n’équivaut qu’à 100 dollars, alors que le pays vit pratiquement que d’importations commerciales. Le Liban ne produit quasiment rien et son économie est totalement dépendante des grandes puissances et de ses voisins, tandis que de nombreuses familles vivent en partie grâce à l’argent envoyé par les émigrés, une « diaspora » de millions de personnes, souvent à l’étranger depuis plusieurs générations. On sait aussi qu’à Paris vit une oligarchie libanaise au mode de vie richissime.

Naturellement, le chaos est aussi politique avec une incapacité pour les classes dirigeantes à gouverner depuis la démission du gouvernement de Saad Hariri fin octobre. Le pays est dirigé selon un système de partition communautaire intenable, n’ayant pas d’autre perspective que la soumission aux exigences du FMI. En l’absence d’un mouvement démocratique et populaire organisé, la situation est bloquée, par incapacité à bouleverser toute la chaîne de corruption, de bureaucratie et de désorganisation généralisée.

Le 23 juillet 2020, c’est le ministre des affaires étrangères français Jean-Yves Le Drian qui est venu sur place pour exiger les mesures préalables à l’« aide » du Fonds monétaire international :

« Il est aujourd’hui urgent et nécessaire de s’engager de manière concrète dans la voie des réformes, c’est le message que je suis venu transmettre à toutes les autorités libanaises. »

Ces scandaleux propos de mise sous tutelle ne se ressentent que plus douloureusement aujourd’hui. les Libanais, avec les Palestiniens, ont toujours été les premières victimes dans la région des prétendus accords de paix maintenant en réalité une chape de plomb sur les peuples et la notion même de démocratie.

Le Liban, ce petit bout d’Orient à peine plus grand que la Corse avec officiellement 5,5 millions d’habitants, paye directement sa situation historique, n’étant au fond qu’un terrain d’affrontement entre puissances mondiales et locales, avec un main-mise de grandes familles issues de la féodalité.

Créé de toute pièce par la France en 1920 dans le cadre de son mandat sur les provinces syriennes après le démantèlement de l’Empire Ottoman, il n’a jamais été en mesure de connaître un véritable développement national, avec un fractionnement religieux extrême. De ce fait, des parties entières de son territoire échappent encore aujourd’hui à toute autorité centrale, l’aspect le plus connu récemment étant le sud du pays avec la main-mise du Hezbollah.

La France, puissance en perdition, ne parvient plus à y maintenir ses positions. Symbole de cela, l’effondrement de l’enseignement chrétien francophone, concernant des centaines de milliers d’élèves.

L’explosion de cet entrepôt du port de Beyrouth où était stockée 2750 tonnes de nitrate d’ammonium est ainsi terriblement exemplaire de la situation dramatique du Liban, comme de tout le Moyen-Orient. Ces matières explosives étaient là depuis 2014, cela était tout à fait connu, la proximité du bâtiment étant évité pour cette raison, etc. Mais en l’absence d’une autorité politique efficace, démocratique et au service du peuple, la catastrophe n’a pas été empêchée.

Que celle-ci ait eu lieu sur le port de Beyrouth est d’ailleurs un terrible symbole pour le Liban, tant le pays finalement ne fonctionne que grâce à ce port et ses importations, au cœur de la situation de crise actuelle.

L’humanité a encore beaucoup de chemin à parcourir dans sa quête d’un monde pacifique, prospère et harmonieux… Particulièrement dans cette région du monde, pourtant berceau de la civilisation. Mais rien ne sera possible tant que ce ne sera pas le peuple lui-même au pouvoir, avec des exigences démocratiques élevées, assumant tant la Raison que l’héritage historique de chaque partie de la grande famille humaine. C’est le programme du XXIe siècle sur la Terre.

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Décès de Philippe Frémeaux, à l’origine de la revue Alternatives économiques

Journaliste, Philippe Frémeaux avait lancé la revue devenue incontournable pour la gauche postmoderne, dans une optique keynésienne ouvertement coupée du mouvement ouvrier.

Il est dans la tradition de la Gauche historique que la presse dépende des partis, que les orientations soient prises uniquement en leur sein, par leurs membres. Au contraire, la revue Alternatives économiques a été un très puissant vecteur de l’affirmation de la gauche postmoderne.

La trajectoire de Philippe Frémeaux est ici exemplaire. Il ne s’agit pas d’une figure d’un mouvement, mais d’un carriériste intellectuel. Il est d’abord professeur d’économie au lycée à partir du milieu des années 1970, maître de conférence à Sciences-Po, avant de donner des cours à l’école de communication CELSA. À côté il écrit pour Le Monde, avant de rejoindre Alternatives économiques, dont il va devenir le rédacteur en chef, ce qui va véritablement lancé la revue.

Sous son impulsion, la revue a pris un tournant commercial. Tirant à un peu moins de 100 000 exemplaires, elle se veut facile d’accès, vulgarisant les thèses keynésiennes. Elle est extrêmement sobre dans ses exigences, qui se veulent toujours « justifiés » par un mélange de « réalisme » et de « justice sociale ». Philippe Frémeaux est en même temps passé par France Info, France Culture, toute cette approche correspondant à tout un état d’esprit propre aux années 2000-2010, celle de la gauche finalement très en phase avec Lionel Jospin.

Aujourd’hui, on appelle cette idéologie « l’économie sociale et solidaire », même si évidemment, la revue Alternatives économiques a toujours revendiqué être au-dessus des idéologies. Philippe Frémeaux n’hésitait d’ailleurs pas à se revendiquer comme le patron (directeur général) de la revue et on chercherait en vain une référence politique bien délimitée. D’ailleurs, ont salué sa mémoire à la fois Benoît Hamon, Eric Piolle, Julien Bayou… tous mettant ce qu’ils veulent derrière.

On aura compris que derrière la « vulgarisation » de l’économie, il y avait en fait un appel énorme vers les milieux intellectuels petits-bourgeois, en particulier les professeurs d’économie (plus précisément de SES, sciences économiques et sociales). Il faut ici savoir qu’après 1989, l’approche des cours d’économie a totalement changé. Avant 1989, on avait pour chaque thème trois points de vue qui étaient expliqués, relevant du libéralisme, du keynésianisme et du marxisme conforme à l’interprétation du PCF. Dans un processus commençant en 1989 et se concrétisant en quelques années, il n’y a plus eu qu’un seul point de vue expliqué par les professeurs. Les professeurs d’économie se sont alors sentis investis d’une mission.

Il n’y a bien entendu pas eu que les professeurs ; au sens strict, tout le milieu intellectuel de gauche parisien a suivi, ou plus exactement des centre-villes, dans une vaste anticipation de ce qu’allait devenir EELV. Il y a ici une énorme histoire des idées à écrire, mais il y a une ligne droite allant de la revue Alternatives économiques, néo-keynésienne, à EELV. Benoît Hamon a été, si l’on veut, l’articulation entre les deux. L’Histoire a d’ailleurs été injuste avec le « passeur » Benoît Hamon.

Cependant, c’était inévitable. La petite-bourgeoisie n’existe pas historiquement, elle est une zone-tampon et se raccrocher à elle en s’imaginant qu’elle va orienter tout un pays, toute une économie, c’est rêver éveillé. D’ailleurs, personne ne se souviendra de Philippe Frémeaux ; quant à Alternatives économiques, la revue ne peut que rentrer dans le mur. Le néo-keynésianisme triomphe en effet en ce moment avec les milliards distribués à l’économie, c’est-à-dire aux entreprises. Que va-t-il en résulter ? Une facture colossale, que les travailleurs vont devoir payer, et pour qu’ils payent l’État va devoir employer une violence inouïe. Les néo-keynésiens se démasqueront alors d’autant plus que comme un simple support moderne aux entreprises, dont le temps est définitivement passé.

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«V» les visiteurs, le modèle idéologique des complotistes

Cette série des années 1980, à la fois ridicule et stupide, fournit la base même de l’approche « dissidente » des complotistes.

Produite entre 1983 et 1985, « V » est une série qui fournit tous les éléments de la démarche complotiste. Cela n’est pas dû à l’intelligence du script ni au jeu des acteurs, le tout étant d’une nullité indiscutable. C’est que la série reflète l’esprit violemment anti-communiste des États-Unis des années 1980, dont Star Wars est un exemple bien connu.

Le schéma est toujours la même. D’un côté, des populations diverses, désordonnées mais créatives, avec des individus authentiques et plein d’initiatives… De l’autre, une machine froide et anonyme, pratiquement robotique et en tout cas sans états d’âme, dont le but est d’absolument tout uniformiser.

La série « V » a toutefois une particularité qui la distingue de Tron, Rambo II, Rocky IV, Star Wars, Top Gun, etc. En effet, dans tous ces films l’ennemi est parfaitement identifié. Ce qui fait la particularité de « V », c’est sa dimension paranoïaque. On a des envahisseurs extra-terrestres voulant prendre l’eau sur Terre et manger les humains.

Au sens strict, un film comme « They live » (Invasion Los Angeles), de John Carpenter et sorti en 1988, est strictement équivalent. Seulement « They live » possède une dimension satirique, sa dénonciation de la société de consommation prime sur le reste, l’ambiance est à une révolte autant contre « l’occupant » que contre les gens qui acceptent d’être hypnotisés.

On a rien de tout cela dans « V », qui se veut le portrait de résistants se formant sur le tas. On a le même principe dans le film de John Milius de 1984, L’aube rouge, où une poignée de jeunes américains organise la guerre de guérilla contre l’occupant soviéto-cubain. Quelque chose vient s’ajouter pourtant : les « visiteurs » se déguisent en humains, alors qu’ils sont des « reptiliens ».

Ces « reptiliens » déguisés en humains, cela ne tient pas debout et la scène d’une reptilienne déguisée en humaine en train d’engloutir un cochon d’Inde vivant en deux secondes est d’une stupidité complète.

On a toutefois tous les ingrédients pour la conception d’un régime d’occupation par des forces inhumaines. Les théories nazies avaient déjà ce principe d’une « occupation » intérieure et après 1945, elles allèrent encore plus loin avec la théorie du « ZOG » (Gouvernement d’occupation sioniste). « V » apporta une inspiration en plus.

L’Anglais David Icke a ainsi directement repris la thèse au début des années 1990, avec un succès important, pour expliquer que des reptiliens extra-terrestres créés génétiquement cherchent à prendre le contrôle de planète Terre, composant notamment la famille Rothschild et la famille royale britannique, etc.

C’est aberrant, mais là n’est pas la question. Ce qui compte, c’est le modèle paranoïaque, digne des folies furieuses des années 1920 dans toute l’Europe, surtout en Allemagne. La petite-bourgeoisie avait besoin de dénoncer le capitalisme sans le dénoncer, de mobiliser les ouvriers en sa faveur, mais sans remise en cause de la propriété.

On parle évidemment de cas extrêmes mais, en même temps, le petit parti nazi totalement délirant est devenu un mouvement de masse et la SS, avec des fantasmes mystiques complètement fous, a été un organe d’État extrêmement puissant. Des millions et des millions de personnes ont perdu la vie à cause de cette idéologie servant de levier aux conquêtes nazies.

« V » n’est évidemment pas une série raciste et, d’ailleurs, il y a des allusions contre le racisme et l’antisémitisme, le nazisme est clairement dénoncé par la bande. Cependant, cette idée d’une armée d’occupation non pas « neutre », mais particulièrement agressive, avec des « dissidents » cherchant à lutter contre un ennemi invisible… on a exactement la psychologie des complotistes.

Des fanatiques des thèses nazies à l’ancienne aux gilets jaunes, des partisans de l’antisémitisme « réconciliateur » d’Alain Soral aux tenants de la quenelle, on retrouve la même logique : le système est inhumain et porté par des forces occultes, à la fois anonymes et assassines. Toute l’Histoire est mensongère, toutes les informations sont trompeuses et il faut diffuser une dissidence dont les contenus sont, par définition même, aussi flous que la petite-bourgeoisie comme classe sociale.

« V » les visiteurs est ainsi une série très intéressante, au-delà de sa nullité, car elle présente des caricatures psychologiques qu’on retrouve justement chez les complotistes. Il y a bien plus d’intérêt à cela, à saisir la nature sociale du phénomène que de perdre son temps à « expliquer » comme le font les « décodeurs » du Monde et autres anti-complotistes tout autant petit-bourgeois que les complotistes.

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Le gouvernement Jean Castex à la rescousse d’Alain Soral

L’État français a accordé une aura formidable à Alain Soral en l’interpellant pour menace aux intérêts de la nation, alors que son mouvement décrochait et qu’il y avait déjà ce qu’il suffisait pour l’embastiller.

Alain Soral a un parcours en trois temps. D’abord c’est un branché, qui traite des milieux parisiens et de la drague. Ensuite, c’est un intellectuel qui se veut post-marxiste et propose d’assumer une morale de droite dans la défense du « travail ». Enfin, c’est un activiste proposant une lecture national-socialiste du monde, avec la diffusion de toute la littérature qui va avec.

Alain Soral a obtenu d’énormes succès d’édition, notamment avec « Comprendre l’empire » et il a eu son heure de gloire au moment de la « quenelle » de l’humoriste Dieudonné. L’antisémitisme a permis aux deux agitateurs-provocateurs de disposer d’une vraie base. Ils n’ont cependant rien su en faire.

On a en effet un vrai bric-à-brac, Alain Soral se revendiquant maintenant de Julius Evola, un racialiste italien d’esprit aristocratique, ce qui ne correspond en rien à l’idée d’une « réconciliation » nationale au-delà de la couleur de peau des Français. Si on ajoute à cela la vulgarité proverbiale d’Alain Soral, son style provocateur totalement à rebours de l’approche française… cela ne pouvait que s’enliser. Son mouvement Égalité & Réconciliation était ainsi en perte de vitesse et un magnifique contre-exemple.

En effet, avoir diffusé l’antisémitisme en disant que les Juifs seraient la cause de tous les maux, alors que le Covid-19 montre l’ampleur du problème écologique et qu’on va à une guerre de repartage sino-américaine… C’est pour le moins absurde et c’est très clairement absurde.

Alain Soral a d’ailleurs dû être en secret très content de la fermeture de ses chaînes sur Youtube début juillet. Quant à une arrestation de 48 heures fin juillet, pour « provocation aux crimes et délits portant atteinte aux intérêts de la nation », il a dû sortir le champagne. Surtout qu’il est ressorti libre !

Ce qui va lui permettre, même si on est au creux de l’été, de mobiliser ses troupes, de se présenter comme le seul vrai « révolutionnaire ». Si la loi française avait réellement été appliquée, cela fait longtemps qu’il serait en prison. On applique la loi Gayssot et on envoie ce type aux oubliettes.

Cependant on sait comment le capitalisme adore les provocateurs du genre d’Alain Soral, qui proposent des voies de garage, qui cherchent à dévier la colère du peuple. Les associations juives qui se sont réjouies de l’arrestation d’Alain Soral feraient malheureusement mieux de se préparer au contraire à une énorme vague d’antisémitisme qui va profiter de l’aura que celui-ci a obtenu avec cette affaire. Alain Soral est clairement réactivé par le régime. Il est remis en selle afin de diffuser son poison et de faire des Juifs le paratonnerre de la colère populaire.

Ce n’est pas tout. En collant sur le dos d’Alain Soral une « provocation aux crimes et délits portant atteinte aux intérêts de la nation », le gouvernement introduit cette forme très rare dans la banalité de la répression. On en a déjà entendu parler au moment des gilets jaunes, mais ce n’était guère sérieux. On parle en effet du principe de violence collective de nature à mettre en péril les institutions de la République. C’est quelque chose de bien particulier mais là on est dans une démarche assumée de la part du gouvernement de faire en sorte de le généraliser.

Alain Soral a servi ici également de marche-pied à la répression future, car on peut évidemment s’attendre à d’autres accusations du même genre. Surtout qu’il y a le coup du « non suivi d’effet ». Avec une telle expression juridique, on peut justifier tout et n’importe quoi. Une ligne comme quoi il faut un soulèvement populaire pour renverser le régime, ce qu’on va trouver sur tout site d’extrême-Gauche… et on pourra faire l’accusation de « provocation aux crimes et délits portant atteinte aux intérêts de la nation ».

Alain Soral sert ici sur tous les tableaux. Il pousse à la division des masses et ses provocations servent à préparer le terrain à la répression. C’est précisément à cela qu’on reconnaît qu’il relève du fascisme.

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Décès de Gisèle Halimi, figure du libéralisme progressiste

Gisèle Halimi a été l’avocate de la cause des femmes, sauf que cette cause ne passe pas par l’éloquence, mais par le changement réel des mœurs, des mentalités, des structures mêmes de la société.

Dans son article au sujet du décès de Gisèle Halimi, le journal Libération commence de la manière suivante :

« Avocate, femme politique et écrivaine, Gisèle Halimi, décédée mardi à 93 ans, a fait de sa vie un combat pour le droit des femmes, marqué par le procès de Bobigny en 1972, qui a ouvert la voie à la légalisation de l’avortement.

Née Gisèle Taïeb le 27 juillet 1927 dans une famille modeste à La Goulette, en Tunisie, elle est très bonne élève et ne manque pas de caractère. »

On a ici une image d’Épinal assez caractéristique, qui correspond à celle de la personne qui s’est faite « toute seule » et a contribué à faire avancer les choses. En pratique, elle a tout de même son bac à 17 ans, à une époque où l’a environ 15 % d’une tranche d’âge. Cela ne colle pas vraiment. Elle part ensuite faire des études à la Sorbonne, vivant des « cours particuliers » qu’elle a donné à Tunis auparavant et d’une bourse. Tout cela est magnifiquement romancé et France Culture en raffole bien sûr.

Ses études l’amènent à être avocate. Elle le devient à un moment où le Droit en France est chamboulé, pour une raison très simple : le FLN algérien pratique des attentats meurtriers contre les civils et l’armée française réagit par la torture, ou même le viol. Gisèle Halimi devient dans ce cadre l’avocate de Djamila Boupacha, une activiste FLN torturée et violée pour avouer avoir l’intention de déposer une bombe dans un restaurant universitaire.

Ce fut un contexte où la Gauche historique, celle du mouvement ouvrier, fut totalement dépassée en France par d’un côté un nationalisme agressif et de l’autre une « seconde gauche » littéralement pro-FLN, préfigurant celle pro-migrants et pro-LGBT aujourd’hui. Cela amena le Parti socialiste à prendre l’ascendant.

Gisèle Halimi relève de ce courant. Lors de l’affaire Djamila Boupacha elle mena une intense campagne avec Simone de Beauvoir notamment ; elle devint ensuite une figure pour le droit à l’avortement. Ce thème est également particulièrement clivant et la Gauche historique n’a jamais été pour un droit unilatéral à l’avortement, qui est le point de vue du libéralisme pour qui l’individu a des prérogatives au-delà de toute réalité naturelle.

Gisèle Halimi fut ici un outil majeur du libéralisme, en contribuant à fournir un masque démocratique aux lois françaises. Ses interventions politiques sont passées par l’intermédiaire de son activité d’avocate.

Il y eut d’abord l’affaire Marie-Claire, du prénom d’une jeune femme ayant avorté illégalement à la suite d’un viol et qui heureusement, grâce à Gisèle Halimi, obtint une relaxe en 1972. Cependant, l’affaire fut en réalité employée pour généraliser le droit à l’avortement, ce que Gisèle Halimi exigeait déjà depuis 1971.

C’est pour cela qu’elle est saluée de manière unanime : pour les limites qu’elle a posé à son engagement purement institutionnel et symbolique. Les messages présidentiels en font l’aspect principal. Emmanuel Macron dit ainsi :

« Pour Gisèle Halimi, le féminisme était un humanisme. La France perd une républicaine passionnée qui, comme avocate, militante et élue, fut une grande combattante de l’émancipation des femmes. »

François Hollande, de son côté, a affirmé que :

« Gisèle Halimi a inlassablement servi la cause des femmes donc celle de la République. Elle ajoutait le courage au talent, le génie du verbe à la science du droit, l’engagement pour la dignité des peuples à la bataille pour l’égalité. Elle restera pour toutes et tous un exemple. »

C’est la théorie à la Victor Hugo de l’éloquence pour changer le monde. Gisèle Halimi a été cohérente dans sa démarche, d’ailleurs, puisqu’elle participe à la fondation du mouvement altermondialiste ATTAC.

Elle avait soutenu François Mitterrand en 1965, elle est députée apparentée socialiste de 1981 à 1984, ambassadrice de la France auprès de l’Unesco en 1985-1986, numéro deux pour les élections européennes de 1994 sur la liste du la liste du Mouvement des citoyens de Jean-Pierre Chevènement.

En 1949 elle s’était mariée à un administrateur civil au ministère français de l’Agriculture ; un de ses fils deviendra le chef du Monde Diplomatique, ce qui est ici une double référence à son parcours : institutionnel et altermondialiste. Elle s’est ensuite remarié à un secrétaire de Jean-Paul Sartre et est la marraine de Nicolas Bedos !

Toute la démarche de Gisèle Halimi, tout son milieu, absolument tout relève de la seconde gauche, celle qui rejette le mouvement ouvrier et naturellement les valeurs de la Gauche historique. Le message de Fabien Roussel, le secrétaire national du PCF, apparaît ainsi comme incompréhensible :

« Nous perdons aujourd’hui une grande avocate, celle des militant.es du FLN et des droits des femmes. Puisse son histoire, sa hauteur de vue et son intelligence accompagner encore et toujours nos combats pour l’égalité des droits humains #GiseleHalimi »

Incompréhensible, sauf si on comprend que la seconde gauche a pris le dessus à tous les niveaux. Mais voir un responsable du PCF saluer unilatéralement le FLN et quelqu’un qui est toujours restée entièrement extérieur au mouvement ouvrier, à tous les niveaux, est toujours choquant.

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Une situation compliquée au NPA

Le Monde a publié un article à sensation sur un NPA au bord de la scission. C’est une manière apolitique de voir un véritable mouvement de fond sur le plan des idées.

Le Monde a publié un article racoleur intitulé « Le Nouveau Parti anticapitaliste menacé d’implosion », avec beaucoup de sensationnalisme. Le journal avait déjà présenté en 2012 le conflit entre la « majo » et les minoritaires avec beaucoup de bile (« Au NPA, bataille autour de l’héritage financier de la LCR »). Il faut y voir une part de rancœur, puisque la personne qui a écrit l’article, Sylvia Zappi, a été elle-même une militante pendant toutes les années 1980 de la Ligue Communiste Révolutionnaire, l’ancêtre du NPA.

Durant ces années, la LCR était une organisation extrêmement sérieuse, avec des permanents, des cadres de très haut niveau, une capacité d’intervention d’une grande efficacité. La LCR est partie avec succès à la conquête des « mouvements sociaux », notamment des structures associatives, et c’est justement cela qui a produit le NPA. Cela a marqué toutes les années 1990, avec l’apogée dans les années 2000. En 2007, Olivier Besancenot obtenait alors 1,5 million de voix aux élections présidentielles, dans le prolongement de cette image à la fois sociale et urbaine, non-idéologique et concrète. C’est très exactement la stratégie que mène actuellement le PTB en Belgique.

Le Nouveau Parti Anticapitaliste remplace alors la LCR en février 2009, avec pratiquement 10 000 personnes impliquées alors dans cette structure, soit trois fois plus que la LCR. Tout a cependant tout de suite raté. Il aurait fallu le double d’adhérents pour noyer les « militants » politiques et associatifs, voire le triple. Au lieu de cela, l’ambiance a été rapidement une bataille de tendances et de courants, avec de concurrences locales et au niveau de la direction. Le NPA a pratiquement été paralysé dès le départ et il est devenu inexistant électoralement, alors qu’il avait été pensé que justement c’était acquis à ce niveau.

En même temps, cela a fait un formidable d’appel d’air pour pratiquement toutes les organisations trotskistes, qui ne parvenaient plus à tracer de perspectives. Elles ont trouvé dans le NPA une certaine orientation de masse et se sont fondés là-dessus pour se développer et se structurer. L’une des formes les plus développées est autour du média Révolution permanente, produit par le Courant Communiste Révolutionnaire. L’année dernière s’est également fondée l’alternative communiste révolutionnaire.

Le choix de « communiste révolutionnaire » est évidemment une allusion à la LCR et au trotskisme en général (qui se définit comme « communiste » mais dans une version « révolutionnaire »). Cependant, il ne faudrait pas croire une seconde que l’objectif est de refonder la LCR. Il s’agit de fonder un NPA bis, qui aurait les mêmes principes que le trotskisme anglais, notamment avec le SWP (qui relève par contre d’un autre courant du trotskisme, il y en a à peu près sept désormais). C’est un mélange d’autogestion de type libertaire, avec par contre une lecture marxiste de l’État et une tactique trotskiste des revendications sociales.

Si l’on regarde bien, l’influence de cette démarche a été énorme et pratiquement toute l’extrême-Gauche a adopté cette approche, et ce même dans les cas où elle ne revendique pas du trotskisme (OCML-VP, UCL, PCM, etc.). L’idée est de se raccrocher à un « mouvement social » (donc évidemment les gilets jaunes), de soutenir la CGT, d’avoir des principes anti-oppressifs (racisme « systémique », « LGBT » etc.), de pratiquer le populisme au maximum (contre les policiers, les ministres, le président…) et de recruter (notamment sur les réseaux sociaux) en se présentant comme toujours plus revendicatif. Un NPA bis pourrait indubitablement disposer d’un certain écho.

Les « historiques » de la LCR n’ont par contre aucune envie de repartir sur ce qu’ils voient comme de vieilles lunes. Ils ne sont pas contre les interprétations postmodernes du marxisme, mais de là à devoir les porter soi-même, c’est une autre histoire. Ils sont pour une « realpolitik », quelque chose de pragmatique, des avancées au moyen de « coups » (comme les élections municipales à bordeaux avec Philippe Poutou, les interventions médiatiques d’Olivier Besancenot, etc.) Ils pensent qu’il suffit d’attendre pour voir La France Insoumise s’enliser et le NPA former une alternative crédible… à condition de tenir.

Comme on le voit, ce sont deux visions très sérieuses, très élaborées, et on ne peut nullement l’aborder comme le fait l’article du Monde. Le congrès du NPA en 2020 sera d’ailleurs forcément riche en points de vue, même si dans le contexte actuel, dans pratiquement six mois, cela veut dire que c’est dans une éternité.

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La fausse gauche se couvre de honte en protégeant l’ancien adjoint à la culture de la Mairie de Paris Christophe Girard

L’adjoint à la culture de la Mairie de Paris Christophe Girard a été contraint de démissionner, accusé de soutien à l’écrivain pédophile Gabriel Matzneff. Il a le soutien de toute la fausse gauche parisienne autour d’Anne Hidalgo.

Le nom de Christophe Girard est régulièrement associé à celui de l’immonde Gabriel Matzneff et sa pédophilie assumée, en mode libéral libertaire. C’est que ses agissements ont toujours été connu du « tout Paris » et d’ailleurs Matzneff ne s’est jamais caché de ses horreurs, puisqu’il les raconte dans ses livres.

Christophe Girard prétend qu’il n’en savait rien, et qu’il n’avait jamais vraiment lu ses livres. Pourtant, il s’est personnellement impliqué pour que l’écrivain pédophile, dont il n’aurait soit disant pas connu les ouvrages, obtienne une allocation annuelle à vie du Centre National du Livre.

Quand cela a été connu, assez récemment pour beaucoup de gens, notamment chez des féministes, il y a eu une sensation d’écœurement on ne peut plus logique. D’autant plus qu’il a été expliqué ici et là comment Christophe Girard était personnellement impliqué pour s’occuper de l’hôtel qu’avait occupé pendant plusieurs mois Gabriel Matzneff… pour échapper à la Brigade des mineurs.

Lire également : L’affaire esthético-littéraire criminelle Gabriel Matzneff

On à la, sur le plan moral, une association indéfendable, injustifiable. À l’occasion de la nouvelle mandature municipale à Paris, il y a donc eu une protestation lancée par des féministes, aboutissant à cette démission logique de Christophe Girard.

Cela a rendu furieuse Anne Hidalgo, qui forcément soutient son adjoint à la culture et explique qu’elle ne voit pas le problème, car Christophe Girard ne serait pas mis en cause par la justice.

On a même le groupe « communiste citoyen » de la mairie de Paris, dont la principale figure est Ian Brossat, qui défend Christophe Girard en allant encore plus loin, parlant de « remise en cause de l’État de droit » par la « vindicte de quelques-uns » (on notera que le groupe oublie ici son écriture « inclusive » qu’il utilise ailleurs dans le communiqué).

L’argument du droit est particulièrement ridicule, ou odieux, car il s’agit de politique et de culture, soit la base même du droit. Que Christophe Girard ne soit pas lui-même pédophile et que le Droit actuel n’ait rien à lui reprocher, c’est une chose. La question par contre est politico-culturelle et il s’agit de dégager une personnalité liée à toute une culture, toute une idéologie libérale libertaire ayant accepté l’inacceptable.

Pour la Gauche, la vraie Gauche, la Gauche historique, la question ne se pose même pas et il n’y a d’ailleurs même pas besoin de cette affaire pour conspuer des gens comme Christophe Girard. La fausse gauche par contre, celle des mondanités parisiennes et de l’art contemporain, est choquée que l’on puisse s’en prendre à l’un des siens.

Pour l’anecdote, de nombreux élus se sont levés pendant le Conseil de Paris pour applaudir longuement Christophe Girard… après que celui-ci ait été salué chaleureusement par le très décrié préfet de Paris Didier Lallement !

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Christophe Girard ou l’exemple de la «gauche» caviar libéral-libertaire

Paris est une ville toujours plus au service de la grande bourgeoisie et ses « élus de gauche » ne sont là que pour accompagner en douceur ce phénomène. Il suffit de regarder depuis que Bertrand Delanoë a été élu en 2001 : tout est très clair.

L’affaire Christophe Girard est exemplaire. On s’aperçoit en effet que la « Gauche » à la mairie de Paris est composée de grands bourgeois, d’affairistes, de dandys et de parasites. Ce sont des gens carriéristes, aux antipodes de la classe ouvrière.

Qui est Christophe Girard, d’ailleurs ? Il a été adjoint au maire de Paris à la Culture de 2001 à 2012. Il a été maire du très chic quatrième arrondissement parisien de 2012 à 2017. Il a été adjoint à la maire de Paris chargé des Ressources humaines en 2017-2018 et pour redevenir adjoint au maire de Paris de 2018 à , donc, juillet 2020 où il a démissionné avec perte et fracas.

Mais, en même temps, c’est un haut responsable d’Yves Saint Laurent et du groupe LVMH qu’il ne quitte qu’en 2017. Cela signifie que pendant des années, Christophe Girard avait un pied chez LVMH, un autre à la mairie de Paris à la culture.

Quelle culture pouvait-il prôner ? La culture authentique, se fondant sur le peuple, ou bien toutes les fantasmagories de l’art contemporain et de la décadence libérale-libertaire de grand bourgeois ? D’ailleurs, Christophe Girard a trois enfants. Or, il est gay et marié à un homme. D’où viennent ses enfants ? D’une opération du Saint-Esprit ?

On reconnaît ici toute de suite à quel milieu on a faire. On est dans la grande bourgeoisie « cultivée », celle des « arts », en particulier de la mode. On est dans le « raffinement », les postures décalées qui se veulent libérées. On est littéralement « au-dessus » de la société, chez ces très riches vivant avec leurs propres normes, c’est-à-dire leur absence de normes.

On ne doit donc pas être étonné de trouver dans ce milieu l’écrivain pédophile Gabriel Matzneff, car il s’agit bien d’une idéologie, celle de l’expérience transcendante et unique, de l’aventure au-delà du bien et du mal, du subjectivisme le plus complet. Les riches s’ennuient et, pour se sentir vivre, ont besoin de « chocs » réguliers, qu’ils viennent puiser dans les couches intellectuelles parasitaires ou les déclassés.

Pas étonnant que Anne Hidalgo défende bec et ongles Christophe Girard et que Ian Brossat se complaise dans un silence de bon aloi. Il est difficile de se prétendre de la Gauche lorsque le masque tombe à ce point là et qu’il révèle visage décadent et sinistre de la haute bourgeoisie.

D’autant plus que ce scandale éclabousse tout le monde : le PS et EELV, puisque Christophe Girard est passé de l’un à l’autre, mais donc aussi le PCF parisien qui n’a jamais servi que de béquille électorale et relève du même milieu corrompu.

Comme on est en effet loin de la Gauche historique et de l’esprit de bataille propre à la Gauche parisienne ! Mais cela c’était avant que l’énorme gâteau parisien n’attire les opportunistes. Gérer Paris, l’une des plus grandes villes du monde, y vivre de manière aisée, fréquenter la crème de la haute bourgeoisie… Ces gens n’ont pas résisté.

Ils ont accompagné la transformation de Paris en bastion bourgeois, en ville chère, sans âme, où tout ce qu’on y trouve de bien apparaît sous l’angle d’une certaine nostalgie. Paris a été formidable et c’est cela qu’on découvre ici ou là, en flânant. C’est désormais une machine anonyme où le capitalisme règne en maître, alors que surnagent quelques îlots de socialisation.

L’affaire Christophe Girard est une excellent exemple de la « gauche » caviar libéral-libertaire, tout comme le soutien au « Comité Justice pour Adama » est un exemple de populisme mensonger et misérabiliste. On est là dans la négation de l’ordre nouveau qu’exige le peuple. Et en l’absence de la Gauche historique, qu’il faut urgemment reconstituer, c’est l’extrême-Droite qui va arriver avec sa démagogie.

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La recomposition des positions maximalistes de la Gauche avec la crise

Dans le contexte actuel de crise, il y a des mouvements de fond qui ne trompent pas. Une partie de la Gauche cherche à se placer dans un axe de combativité avec un fond réel.

Que de nombreuses organisations de la Gauche française demandent la gratuité des masques est une chose. On peut considérer cela comme normal ou facile, en tout cas cela ne va pas très loin. Mais que le PCF diffuse une pétition où il est demandé pas moins qu’une hausse du SMIC de 20 %, là pour le coup c’est une élévation significative du niveau de combativité revendicative. D’autant plus que la pétition demande également la chose suivante :

« Interdire les licenciements des grands groupes bénéficiant de fonds publics et instaurer un droit de contre-propositions des salarié·es et des habitant·es pour sécuriser l’emploi au lieu de baisser le «coût du travail». »

Les connaisseurs auront reconnu ici très exactement la stratégie du PCF des années 1980 formulée alors par l’économiste Paul Boccara. C’est ici un coup de barre à gauche, très à gauche en tout cas, pour le PCF, ou du moins un certain « retour aux sources ». Exiger une revalorisation du SMIC à hauteur d’un cinquième, c’est s’aligner sur un maximalisme conflictuel.

Et c’est indubitablement dans l’air du temps, que ce soit en France ou en Europe. Le PCF a ainsi également mené une initiative commune européenne d’une dizaine de partis avec le groupe de la Gauche unitaire européenne (GUE/NGL) au Parlement européen, pour une autre pétition.

On y lit principalement que :

« Nous voulons garantir l’accès pour tous aux diagnostics, aux traitements et aux vaccins contre le Covid-19. Les multinationales pharmaceutiques ne doivent pas faire de profits sur cette pandémie, au détriment de notre santé (…).

La Commission européenne doit garantir que les vaccins et les traitements anti-pandémiques deviennent un bien public mondial, librement accessible à tous. »

Les signataires sont le Parti des travailleurs belges (Belgique), Podemos et Izquierda Unida (Espagne), Sinn Fein (Irlande), Socialistische Partij (Pays-Bas), AKEL (Chypre), Potere al Popolo et Rifondazione Comunista (Italie), Bildu (Pays Basque), le Parti communiste de Bohème et Moravie (République tchèque) et Die Linke au Parlement européen (Allemagne).

C’est ici une recomposition assez importante, puisqu’on a des partis post-bloc de l’Est (le PCF, die Linke, Rifondazione Comunista…) et d’autres relevant de mouvements qu’on peut définir comme basistes, souvent issus des des années 1970 (le PTB, le Sinn Fein, Bildu, Podemos…).

On ne peut pas voir cela autrement que comme un alignement : il s’agit de se placer de la manière la plus efficace possible par rapport à la prochaine constellation politique. Pour cela, il faut évidemment une base programmatique : ici la Gauche programmatique surclasse totalement une gauche « militante » à la fois déboussolée et désorientée. Déboussolée, car elle ne profite plus de ses terrains de jeux que sont les manifestations, rassemblements et autres réunions symboliques, désorientée, car n’ayant aucune base théorique, elle ne sait pas vers où se tourner.

La Gauche programmatique envoie ainsi du lourd ; on notera d’ailleurs que cette Gauche avait été le plus souvent très critique envers les gilets jaunes, voire les avaient littéralement rejetés comme relevant de la réaction.

Le Parti Ouvrier Indépendant et le Parti Ouvrier Indépendant Démocratique ont ainsi choisi tant l’un que l’autre la question des licenciements comme le levier des combats à venir. Historiquement très liées au syndicalisme (avec la CGT-FO), elles tablent sur toute une série de bataille. Lutte Ouvrière élargit de son côté le terrain à la question des aides aux entreprises et s’attend à des luttes massives et déterminées. L’opposition aux licenciements ira de pair avec la question des financements gouvernementaux.

On a là des dynamiques axées sur l’économie, par des organisations très marquées par le programme de transition de Trotsky. D’autres entrevoient une sorte de rébellion plus ample.

Les maoïstes du PCF(mlm) considère qu’on est rentré dans l’époque de la seconde crise générale du capitalisme. Il faut ainsi s’appuyer sur une grille de lecture capable de voir comment la société entre en décadence à tous les niveaux, ce qui permet de lire les antagonismes se levant en réponse et de calibrer la proposition stratégique communiste.

Le PRCF, très influent sur une partie de la CGT (voire du PCF), voit lui en le plan de sauvetage européen un saut qualitatif de l’Union européenne ; il s’agit de s’y arracher par un FREXIT progressiste. L’enjeu, c’est l’unité par une Convergence nationale des résistances (CNR) fédérant communistes, Insoumis, progressistes et patriotes sincèrement antifascistes, syndicalistes de combat, travailleurs, Gilets jaunes, artistes révolutionnaires, etc.

Le PCRF a une approche à la fois similaire et différente du PRCF (ils ont la même origine, la gauche du PCF des années 1990), avec la proposition d’un Front d’Action sociale regroupant toutes les victimes du capitalisme, leurs associations de masse, syndicats, partis, contre la politique des monopoles et leurs gouvernements. Il faudrait alors en soutenir l’aile anticapitaliste.

Pour ces structures, et pour d’autres du même type, la situation actuelle est une revanche. Elles ont bu la tasse avec tout l’activisme débridé partant dans tous les sens ces derniers mois, voire ces dernières années, même si certaines ont cherché à profiter de La France Insoumise ou de la CGT. Elles profitent ici de n’avoir pas abandonné le fait de mettre en place un corpus théorique (ou de le conserver).

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PCF: «De l’argent pour l’emploi, les salaires et les services publics, pas pour le capital!»

Alors que la crise se profile, le PCF lance une campagne avec une pétition sur le thème « De l’argent pour l’emploi, les salaires et les services publics pas pour le capital ! ». On y trouve notamment les revendications d’une revalorisation du SMIC de 20% ainsi que de l’interdiction des licenciements pour les grands groupes bénéficiant de fonds publics.

Voici le document :

PCF1 PCF2

 

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Le nouveau ministre de la mer : l’extension du capitalisme français

Mercredi 22 juillet, Annick Girardin, ministre de la mer depuis le 6 juillet, était en visite dans le bassin d’Arcachon. Une manière d’affirmer le renouveau de ce ministère qui s’annonce être un énième jalon dans l’offensive capitaliste contre les écosystèmes marins et océaniques.

Créée en 1981, le ministère de la mer a été absent des gouvernements depuis 1991. On aurait tort pourtant de penser que la ré-émergence d’un tel ministère soit un bon signe pour l’océan. Le Figaro parlant de ce ministère comme du « joyau stratégique du gouvernement Castex » et Annick Girardin de préciser à France Inter le 17 juillet :

« il faut faire deux choses de manière urgente : le plan de relance, qu’est-ce que la stratégie maritime en retient de ce plan de relance ? Et puis quelles sont les différentes urgences avec l’ensemble des secteurs puisqu’ils sont nombreux »

Ajoutant plus loin : « j’ai à cœur de défendre les pêcheurs ». A ce titre, lors de sa première visite à Arcachon, la ministre de la mer a rencontré les dirigeants des chantiers navals, mais aussi, entre autres, les plongeurs qui dépolluent bénévolement les fonds marins.

A t-elle annoncé plus de moyens pour la dépollution des océans, dont tout le monde sait combien ils sont touchés par celle du plastique ? A t-elle annoncé l’interdiction des chalutiers pélagiques qui engendrent la mort de centaine de baleines sur la côté atlantique, drame qui empire d’année en année ?

Absolument pas. Au contraire, elle a annoncé demander au gouvernement d’offrir le « bonus écologique » aux chantiers navals développant la propulsion électrique. Il faut pouvoir peindre le capitalisme en vert !

C’est que la mise en avant de ce ministre de la mer répond à un agenda précis : celui de la relance du capitalisme français, avec notamment, en partie, la renégociation des zones de pêche dans la mer du Nord depuis le Brexit. Le dirigeant de la Coopérative maritime étaploise, liée au premier port de pêche du pays dans le Nord, ne s’est-il pas réjoui de ce nouveau ministère ?

Il ne fait nul doute que le ministère de la mer ne va être qu’un accélérateur de la conquête des océans par les industriels. Pour preuve encore dans la vidéo de présentation du ministère de la mer sur les réseaux sociaux, on retrouve un discours d’Emmanuel Macron aux Assises de l’économie de la mer du 3 décembre 2019. Le discours était l’expression même de l’offensive pour élargir le capitalisme :

« à chaque fois qu’elle s’est assumée comme puissance maritime, embrassant tout à la fois le grand large de l’océan et la Méditerranée, elle [La France] a su conquérir de nouveaux espaces, être une puissance tout à la fois du savoir et de la géopolitique »

L’économie dite de la mer en France représente 400 000 emplois et 91 milliards d’euros de chiffres d’affaires. Et il est régulièrement fait remarquer que la France a le deuxième plus grand espace maritime du monde.

On ne peut d’ailleurs s’empêcher de penser ici à Jean-Luc Mélenchon, lui qui a toujours fait de l’espace maritime français la toile de fond de sa stratégie social-chauvine. Dans son programme « l’avenir en commun » pour les présidentielles 2017, on retrouve une partie intitulée « la mer, nouvelle frontière de l’humanité » où il n’est jamais parler des animaux et des écosystèmes marins, mais toujours de « développement durable », de « ressources », etc.

Il est vrai que les animaux marins, pour lui, cela relève de l’aquaculture, comme dans sa réponse en 2017 au Comité National des Pêches :

Je souhaite inscrire la France dans un vaste programme de développement de l’aquaculture marine. Le projet s’articule en trois points : production de poissons pour développer l’emploi et limiter nos importations en particulier issues de pays émergeants, la culture d’algues pour les compléments alimentaires, la biotechnologie et la substitution des plastiques, la mise en culture extensive des marais littoraux dont la production biologique est une vocation afin d’assurer le maintien de leur bon état écologique.

Alors on le voit bien : la qualité de « deuxième plus grand espace maritime mondial » ne sert en rien une dynamique basée sur la défense écologique mais bien plutôt une nouvelle stratégie d’extension du capitalisme.

Et comment pourrait-il en être autrement, avec un gouvernement Jean Castex qui s’annonce prêt au combat. Dans l’actuel crise du capitalisme, un tel combat mené par la bourgeoisie est logiquement tourné contre les travailleurs et contre la nature.

Karl Marx ne disait-il pas il y a déjà un demi siècle que « le capital épuise les deux seules sources de toute richesse : la Terre et le travailleur » ? Tant que la classe ouvrière, portée par une Gauche fidèle à ses bases historiques, ne montera pas à l’assaut du ciel pour changer la vie de fond en comble, il en sera toujours ainsi.

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Union européenne: un plan de relance signant le recul de la France, de l’Espagne et de l’Italie

Historiquement, l’Union européenne est une unité économico-politique ouest-européenne sous supervision américaine, avec le moteur franco-allemand entraînant les autres pays. La tutelle américaine est partie, mais la France décroche et se fait toujours plus secondaire face à l’Allemagne. C’est là qu’était tout l’enjeu des près de 100 heures de négociations du sommet européen qui s’est terminé à 05h31 du matin mardi 21 juillet 2020.

Emmanuel Macron a prétendu avoir décroché un accord historique avec le plan de relance de 750 milliards d’euros de l’Union européenne. En réalité, il n’a fait que négocier le recul de la France face à l’Allemagne et à ses principaux alliés voire satellites que sont les Pays-Bas, l’Autriche, le Danemark et la Suède.

Les négociations furent en effet un long chemin de croix pour le président français qui devait faire face à des assauts répétés par ce qui a été appelé les pays « frugaux ». Il a même été parlé par certains médias, de manière honteusement chauvine, des pays « radins ». Ces termes ne recouvrent pourtant pas une sorte de différence de mœurs entre les pays, mais directement un rapport de force entre différentes puissances.

Ce qui se passe est simple à comprendre : avec la pandémie de Covid-19, les capitalismes de la France, de l’Espagne et de l’Italie se retrouvent fortement fragilisés, de par leur niveau déjà problématique initialement. Surtout pour l’Italie, il y a même le risque d’une faillite de l’État en raison d’une dette abyssale et de difficultés à emprunter sur les marchés financiers.

De l’autre côté, il y a le capitalisme de l’Allemagne, stable et puissant, entraînant avec lui surtout ceux des Pays-Bas, de l’Autriche, du Danemark et de la Suède, tout aussi stables. Tous ces pays – surtout l’Allemagne, très ambitieuse à l’international – n’ont aucun intérêt à l’effondrement de l’Italie et au recul drastique des économies françaises et espagnoles, alors il fallait un plan. Cela d’autant plus que tous ces pays, à part la Suède, ont la même monnaie, l’euro.

Plan il devait y avoir, plan il y a donc eu. Ce qui compte par contre, c’est la nature de ce plan. Et là, les choses sont très claires, se résumant à deux aspects, qui n’en forment finalement qu’un seul :

– l’Italie, l’Espagne et la France seront les principaux bénéficiaires des subventions et des prêts permis par le plan de l’Union européenne ;

– les subventions accordées par le plan européen seront soumises à un droit de regard particulièrement strict de l’ensemble des pays européens, et donc surtout de l’Allemagne et de ses satellites.

Autrement dit, on a là un processus très clair de vassalisation de l’Italie, de l’Espagne et de la France vis-à-vis de l’Union européenne, et donc de la puissance allemande.

Au passage, en raison de leur rapport de force particulièrement favorable, les pays dit « frugaux » se sont vu accorder une baisse de leur contribution au budget européen. Il y a également tout un tas de reculs, en ce qui concerne la recherche, le budget « Erasmus » (échanges universitaires), qui est amputé d’un tiers, le budget agricole (dont la France bénéficie beaucoup), ou encore le fonds pour la santé qui passe de 7 à… 1 milliard. C’est la même chose pour le projet porté par Emmanuel Macron d’une politique militaire européenne : cela passe dorénavant à la trappe.

Au lieu de tout cela, on va avoir des subventions, estimées à 40 milliards pour la France, 60 milliards pour l’Espagne et 80 milliards pour l’Italie. Ce sont les trois principaux bénéficiaire du plan, avec 180 milliards sur les 390 de prévus, soit pas loin de la moitié de la somme destinée aux 27 pays membres.

Cet argent doit être emprunté par la Commission européenne sur les marchés financiers, ce qui est une première historique pour de telles sommes (alors qu’il y a également 360 milliards à emprunter, en tant qu’intermédiaire pour des prêts). Cet argent doit ensuite être remboursé sur des fonds propres… qui n’existent pas encore. L’idée est de mettre en place différentes taxes européennes (taxes carbone, taxe « Gafa », taxe plastique, etc.) pour rembourser cet argent, d’ici à 2058 au plus tard.

Notons au passage que ces emprunts (en fait des obligations) ne seront émis que l’année prochaine, alors que les pays, et donc surtout la France, l’Espagne et l’Italie, vont rapidement commencer à dépenser l’argent en question.

Le ministre de l’économie Bruno Le Maire a déjà sauté de joie en expliquant que l’Union européenne allait payer presque la moitié du plan de 100 milliards prévu pour « relancer » l’économie. Il a même expliqué ouvertement que cet argent allait être dépensé dès 2020 et que « dès 2021, l’Europe remboursera ».

Dans le même registre, Emmanuel Macron se fait magicien en faisant croire que l’argent tombe du ciel par enchantement :

« cet argent viendra de l’Europe sur notre budget sans que nous ayons besoin de le financer, ni par notre propre endettement ni par nos impôts »

« ce n’est pas le contribuable français [qui] paiera »

En réalité, il n’y a pas d’argent magique, qu’il vienne de l’Union européenne ou d’ailleurs. Il faudra bien que quelqu’un paye et la bourgeoisie fera tout pour que ce soit les travailleurs qui paient. Cependant, dans le contexte de concurrence exacerbée entre les puissances européennes, les antagonismes seront de plus en plus forts et les nationalismes se feront de plus en plus puissants. En France, puissance en décrochage, la tentation du nationalisme sera d’autant plus forte, d’autant plus agressive, comme moyen d’éviter la lutter des classes et de détourner l’attention de la bourgeoisie.

> Lire également : La faillite de l’idéalisme européen face au Covid-19

Il va de soi ici que vont émerger beaucoup de tendances nationalistes anti-allemandes (Jean-Luc Mélenchon avait déjà commencé il y a quelques années de manière très brutale d’ailleurs). Et surtout, on a un capitalisme qui se fait crédit à lui-même pour tenter de survivre. C’est intenable.

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Appel « Engageons-nous – Pour l’émergence d’une force alternative à gauche »

Voici l’appel « Engageons-nous – Pour l’émergence d’une force alternative à gauche », présenté par Laurent Joffrin lundi 20 juillet 2020.

> Lire également : Laurent Joffrin veut recomposer la Gauche par le centre

« L’espoir renaît. Cette gauche qu’on disait faible, désunie, impuissante, vient de remporter des dizaines de mairies et de conquérir plusieurs métropoles. Les lugubres prophètes qui prédisaient son effacement se sont trompés : une alliance scellée par l’impératif écologique et l’exigence sociale a conduit au succès.

Dans un monde déboussolé, sur une planète menacée par la prédation, dans un pays anxieux, fragmenté où le parti de l’abstention est majoritaire, au sein d’un peuple bientôt confronté à une crise sociale terrible, des millions de citoyennes et citoyens ont montré par leur vote qu’ils refusaient de se résigner et qu’ils gardaient le goût de l’avenir.

Mais ce qui a été possible à l’échelle locale ne l’est pas encore au niveau national. Il y faut des conditions : elles ne sont pas remplies. Le scrutin a montré que la droite est encore majoritaire dans le pays ; l’extrême droite peut capter la colère populaire qui ne manquera pas de se lever à mesure que les licenciements et les fermetures d’entreprises se multiplieront ; la nécessaire unité de la gauche, enfin, suppose un programme audacieux pour convaincre mais aussi crédible, pour gouverner, un projet qui ne soit pas l’addition de revendications disparates, mais qui dessine un destin commun. L’union n’est pas la confusion. C’est la réunion d’identités différentes qui ont chacune leur légitimité, sans que l’une d’entre elles s’efface sous le prétexte qu’elle a gouverné.

Allons droit au but, il faut créer, un nouveau mouvement, qui englobe et dépasse les formations de la gauche historique, notamment le PS, et qui rassemble largement autour de lui la jeunesse éprise d’engagement pour la planète, des femmes et des hommes qui veulent que leur combat pour la justice trouve une issue globale à travers une convergence de principes et de valeurs, des entrepreneurs, des militants associatifs ou syndicaux qui savent que la politique est un débouché nécessaire. Un mouvement qui reconnait à la jeunesse sa capacité à construire le présent pour protéger l’avenir.

La gauche a besoin de cette force centrale qui fait de l’écologie, de la culture et de la participation les conditions essentielles du contrat social, qui place la protection de l’environnement et l’accès aux droits au cœur de l’action publique, qui donne à l’Etat tout son rôle pour réorganiser notre économie, qui fasse de la solidarité un impératif catégorique. Une force qui s’adresse à toute la diversité du peuple français, unie par les valeurs de la République, concrètement mises en oeuvre.

Sans cette force, la gauche et les écologistes se perdront dans de vaines manœuvres pour écarter l’un ou promouvoir l’autre autour de propositions incantatoires. Sans elle, nous aboutirons à une candidature de témoignage qui laissera le pouvoir au libéralisme, au conservatisme, ou aux deux à la fois.

Le sauvetage de la planète est prioritaire, mais la question sociale, surtout dans la période qui s’ouvre, restera centrale.

Car l’égalité n’est pas un objectif parmi d’autres. Elle est la condition de tous les autres. Sans elle, ni les classes populaires, ni les jeunes de nos quartiers, et pas davantage les oubliés de nos territoires notamment les outre-mer, ne rallieront une union aussi artificielle que bancale. Sans elle, la mutation écologique butera sur l’inquiétude légitime des Français pour leur pouvoir d’achat, leur emploi et l’avenir de leur économie. Sans elle, l’union nécessaire autour des valeurs républicaines de laïcité et d’égalité ne se fera pas et les identités dont on attise la rivalité entretiendront une suspicion mutuelle.

Si rien ne change, la prochaine échéance se résumera à une compétition entre les porte-parole de la colère et les tenants d’une écologie réduite à un parti, sous l’œil des derniers socialistes accablés par la mauvaise conscience. Dans un scrutin perdu d’avance la gauche sera éliminée dès le premier tour et, au second, contrainte d’appeler piteusement à faire barrage au Rassemblement national pour laisser cinq ans de plus un libéralisme autoritaire diviser le pays.

Encore suppose-t-on la victoire mécanique d’un front républicain rafistolé à la hâte. Mais il faut en être conscient : à la faveur de l’abstention, en jouant des anxiétés et des fantasmes, l’extrême-droite peut aussi l’emporter.

Faut-il se résigner ? Non !

La gauche qui agit, la gauche qui gouverne, doit se rénover sur la base de ses valeurs, celles qui ont inspiré dans l’histoire le mouvement socialiste. Elle doit se refonder à partir de la société, réinventer sa doctrine et son programme pour relever les défis d’aujourd’hui.

Il s’agit de changer radicalement l’orientation de l’économie pour garder une planète vivable, mais en en promouvant une écologie rationnelle fondée à la fois sur les apports de la science et le respect des équilibres naturels.

Il s’agit de chercher une croissance écologique, des activités utiles et des économies d’énergie pour créer les emplois et financer la solidarité.

Il s’agit de replacer la question sociale au cœur de la politique en luttant résolument contre les nouvelles inégalités qui ont fractionné le salariat.

Il s’agit de faire de la révolution numérique un progrès des libertés, protégé des dangers d’une vie mise en algorithmes et soumise à une surveillance digne d’Orwell.

Il s’agit de réorienter le projet européen autour d’une nouvelle donne énergétique et écologique.

Il s’agit de restaurer la souveraineté économique des peuples en recourant à la planification et à l’investissement public, outils de la gauche.

Il s’agit d’assurer la sécurité avec un Etat républicain respectueux de l’état de droit et de la laïcité.

Il s’agit d’offrir un débouché au mouvement féministe qui bouscule l’ancien patriarcat en assurant une parité réelle à tous les niveaux de responsabilité.

Il s’agit, par une politique volontaire, de mettre fin aux discriminations qui frappent les minorités.

Il s’agit enfin de réhabiliter l’action politique autour de la nation qu’on ne saurait abandonner aux nationalistes et en décuplant la consultation citoyenne dans l’Etat, dans les collectivités locales, comme dans l’entreprise.

Nous appelons donc toutes celles et tous ceux qui partagent cette vision à nous rejoindre. Alors nous lancerons le processus qui passera par la réunion d’assises sociales et écologiques, dont le caractère transparent, et participatif sera garanti.

Les adhérents de ce mouvement choisiront ensuite leurs représentants et élaboreront à partir des contributions de tous, le projet de transformation qui manque à la France et qui devra trouver son incarnation en 2022. »

> Lire également sur agauche.org : Laurent Joffrin veut recomposer la Gauche par le centre

 

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«Engageons-nous»: Laurent Joffrin veut recomposer la Gauche par le centre

Laurent Joffrin a quitté son poste à tête du journal Libération pour lancer ce 20 juillet une initiative de recomposition de la Gauche en vue de 2022. Il représente toute une frange sociale-réformiste refusant l’effacement de la Gauche… effacement auquel cette frange a pourtant largement contribué. Toutefois, elle a conscience des réalités et voudrait maintenant se relancer, alors qu’une crise de grande ampleur se profile.

Malgré une assise indéniable dans le pays, la Gauche est en bien mauvaise posture et il existe un nombre incalculable d’initiatives visant à la liquider. Celles-ci sont d’ailleurs systématiquement lancées depuis l’intérieur, ou devrait-on dire ce qui reste de l’intérieur.

On pourrait résumer cela ainsi, avec trois sortes de fossoyeurs ces dernières années :

– une forme entièrement libérale, tournée vers la Droite et dont le président Emmanuel Macron est la force centrifuge ;

– une forme populiste, tournée vers l’ultra-gauche et le social-chauvinisme, dont Jean-Luc Mélenchon est le principal représentant ;

– une forme post-sociale, tournée unilatéralement vers les thèmes sociétaux avec l’écologie comme faire-valoir, à laquelle Olivier Faure du PS propose de se rallier.

Cela est inacceptable pour tout un tas de personnes refusant d’abandonner la Gauche et cette fois, le refus vient des centristes. On a, pour résumer, tout le courant social-réformiste autour de François Hollande (qui est décrit par beaucoup comme étant à la manœuvre). Pour reprendre le terme qui est d’usage chez les franges populaires de la Gauche, il s’agit de la « gauche caviar ». Ce sont des bourgeois assumant être des bourgeois, mais reconnaissant l’importance de la question sociale et se voulant être de bons gestionnaires intégrant cette question sociale.

On a ici des cadres politiques éprouvés, des intellectuels aux réseaux denses et influents, des artistes implantés, ou encore des chefs d’entreprises avec un poids important. L’appel de Laurent Joffrin met d’ailleurs en avant dès le départ les chefs d’entreprise et emploie même l’expression « Gauche historique » en appelant à la dépasser.

Tous ces gens des couches sociales les plus favorisées et se revendiquant de la Gauche ont beaucoup eu le pouvoir, parfois longtemps, souvent ils l’ont encore, dans des mairies, des départements, des régions, des administrations, des ministères, des grandes écoles, des universités, à la radios, avec des lieux ou des événements culturels majeurs, de grandes entreprises, etc.

Cela fait bien longtemps qu’ils ont abandonné toute référence au mouvement ouvrier. Toutefois, ils connaissent leurs classiques et, surtout, ils ont l’œil avisé pour comprendre ce qui se passe dans le pays. Cela fait toute la différence avec les fossoyeurs, d’Emmanuel Macron à Olivier Faure en passant par Jean-Luc Mélenchon, qui eux vivent pétris de leurs certitudes intellectuelles anti-populaires, de manière étrangère à la société elle-même.

Pourtant, la « Gauche caviar » n’a pas fait que tolérer des gens comme Emmanuel Macron, elle leur a donné la main pendant des années et des années. Le journal Libération, dont le comité de rédaction vient d’ailleurs de refuser à Laurent Joffrin de continuer à écrire des chroniques, a été le fer de lance du postmodernisme, des thèmes sociétaux, de l’idéologie LGBT, de l’écriture « inclusive » et ce genre d’horreurs anti-populaires. Jean-Luc Mélenchon est également un produit du Parti socialiste, tout en ayant profité du PCF pour se lancer, PCF qui s’est fait entièrement déborder et a basculé pareillement dans le post-modernisme.

Toutefois, ces gens sont éduqués et farouchement opportunistes. Comme la situation change avec l’immense crise qui se profile, il n’est plus question d’abandonner la Gauche pour les gens ayant compris l’ampleur de la catastrophe. Il y aurait trop à perdre. C’est précisément le sens de l’appel « Engageons-nous – Pour la création d’une force alternative à Gauche », lancé par Laurent Joffrin.

On y lit notamment :

« Le scrutin a montré que la droite est encore majoritaire dans le pays ; l’extrême droite peut capter la colère populaire qui ne manquera pas de se lever à mesure que les licenciements et les fermetures d’entreprises se multiplieront ; la nécessaire unité de la gauche, enfin, suppose un programme audacieux pour convaincre mais aussi crédible, pour gouverner, un projet qui ne soit pas l’addition de revendications disparates, mais qui dessine un destin commun. »

Il est affirmé ensuite, en grand et en gras :

« Le sauvetage de la planète est prioritaire, mais la question sociale, surtout dans la période qui s’ouvre, restera centrale. »

C’est une opposition claire et nette à Olivier Faure qui propose de se rallier à EELV, ainsi qu’à toute la sphère regroupant Place publique, Génération-s, et des personnalité comme comme Clémentine Autain ou Elsa Faucillon.

Il est en effet expliqué de manière très lucide et ouvertement critique envers cette « gauche » sociétale post-sociale que :

« l’égalité n’est pas un objectif parmi d’autres. Elle est la condition de tous les autres. Sans elle, ni les classes populaires, ni les jeunes de nos quartiers, et pas davantage les oubliés de nos territoires notamment les outre-mer, ne rallieront une union aussi artificielle que bancale. Sans elle, la mutation écologique butera sur l’inquiétude légitime des Français pour leur pouvoir d’achat, leur emploi et l’avenir de leur économie. Sans elle, l’union nécessaire autour des valeurs républicaines de laïcité et d’égalité ne se fera pas et les identités dont on attise la rivalité entretiendront une suspicion mutuelle. »

Bien sûr, il faut ici savoir lire entre les lignes, car en apparence on pourrait croire qu’il dit la même chose, alors qu’en réalité la perspective est entièrement différente. Ce n’est pas pour rien que le lancement du mouvement est prévu le 30 août, soit… le même week-end que l’université d’été du PS (le « campus » prévu à Blois du 28 au 30 août) !

Parallèlement, Laurent Joffrin va publier un livre intitulé « Anti-Macron », compilant tous ses éditos contre Emmanuel Macron, pour bien marquer la différence avec le centre-droit. Toutefois, cela reste une initiative centriste ; les appels du pied aux « macronistes de gauches » ont été ouverts pendant la conférence de presse de lancement de l’initiative.

On a également Olivier Dussop, député « macroniste » issu du PS, qui commente de manière bienveillante l’initiative, ce qui ne doit rien au hasard :

« C’est une illustration de plus de la fracturation de la gauche, entre celles et ceux qui croient encore à la social-démocratie, qui essayent de s’y raccrocher, et puis celles et ceux qui se mettent dans la roue de La France insoumise et qui rentrent dans une forme de protestation »

Il explique par ailleurs que des gens comme Jean-Yves Le Drian pourraient très bien se rallier à l’initiative. En fait, on peut dire que le but de l’initiative est de siphonner les restes de la Gauche gouvernementale ne s’alignant pas sur EELV.

Il faudra alors combattre pour le 3e camp : celui de la Gauche historique, qui doit se reconstituer alors que le capitalisme bascule dans une crise terriblement profonde !

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L’étrange manifestation du 18 juillet d’Alternatiba et du Comité Justice pour Adama

La « convergence des luttes » a encore frappé avec une étrange alliance, celle des bobos versions associatifs et des « antiracistes » en mode ethnique. Que ne faut-il faire pour ne surtout pas parler du capitalisme !

« On veut respirer », tel a été le mot d’ordre commun d’Alternatiba et du Comité Justice pour Adama, alors que quelques milliers de personnes ont participé au rassemblement du 18 juillet 2020 à Persan dans le Val-d’Oise.

L’idée est que la police étouffe les noirs et que le réchauffement climatique étouffe les gens en général, que tout cela revient à une seule et même problématique. Laquelle, cela n’est évidemment pas dit, car personne de sérieux ne peut voir un quelconque rapport entre tout cela.

La seule rationalité est qu’on a affaire à des gens voulant faire du bruit, dont le niveau politique est proche de zéro, sans même parler d’idées ou de culture, où là on est réduit à Facebook, Twitter et Instagram comme maîtres à penser. Il est d’ailleurs parlé de « l’alliance de deux générations : la Génération Adama et la Génération Climat ».

Preuve de ce vide absolu, voici la vision du monde formulé par le communiqué commun des organisateurs :

« Ce combat doit être porté par tout le monde, car si la violence policière s’abat particulièrement sur les jeunes hommes noirs et arabes qui vivent dans les quartiers populaires, elle vise aujourd’hui l’ensemble des mouvements sociaux, les gilets jaunes, le mouvement climat, le mouvement lycéen, les soignants, etc. Elle vise tous ceux et celles qui sont considérés comme une menace pour l’ordre établi.

Ce combat doit être porté par tout le monde, car c’est un combat pour la société que nous voulons faire naître pour faire face aux crises sociales, sanitaires et climatiques qui menacent l’humanité entière et particulièrement les populations précaires et opprimées en première ligne.

Assa Traoré dit souvent que son frère Adama est mort sous le poids de trois gendarmes, et d’un système. Il s’agit d’un système raciste qui trie les êtres humains qui ont le droit de circuler librement dans la rue en fonction de leur couleur de peau. Un système qui trie les êtres humains qui ont le droit de respirer, et vivre. Un système qui détruit la nature et les humains. C’est ce système inégalitaire et injuste, basé sur des rapports de dominations et d’oppressions, que nous refusons. »

Et pourquoi tout ce bruit donc ? En fait, ces gens ont besoin de dire que la France est raciste, que le « système » est « injuste »… Car ils ne veulent pas reconnaître la lutte des classes, car ils ne veulent surtout pas remettre en cause le capitalisme, car ils ne veulent surtout pas viser la bourgeoisie.

Et plus on s’enfonce dans la crise, plus ces gens sont obligés d’en rajouter et d’en rajouter, d’en faire des tonnes. Et les médias les aident sans commune mesure : il n’est pas difficile de voir comment il y a un écho immense à ces initiatives pourtant marginales. Et cet écho est d’autant plus important que cela ne correspond à rien historiquement.

Car ces gens ne veulent surtout pas l’Histoire. Pour eux, le monde a commencé hier, ou plutôt il recommence chaque jour sur les réseaux sociaux. Il n’y a pas d’économie, pas d’État, pas de régime politique, pas d’évolution de ceux-ci, pas de contradiction, pas de changement, pas de transformation, pas de modifications, rien.

Le capitalisme adore de tels gens. Ils sont parfaits. Il ne faut surtout pas qu’ils changent. Ils seront simplement passés à la trappe lorsque la crise va être tellement violente qu’il faudra passer à un autre contre-feu.

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La lutte des classes: une question ou une réponse?

La France est à un tournant historique. Soit elle décide de perdre son temps avec des écologistes de la dernière heure utilisant le mot « extinction » à tort et à travers, avec des anti-racistes qui ne sont que des racistes inversés, avec des syndicalistes masquant leurs privilèges derrière le bien commun… soit elle passe aux choses sérieuses et bascule dans la lutte des classes.

Cela implique naturellement de rompre avec toute une manière de vivre. Les Français en sont conscients et c’est pour cela qu’ils ne bougent pas. Ils sont pétrifiés. Ils ont pris l’habitude de poser la question de la lutte, même de la lutte des classes. Ils sont contestataires, ils savent protester. Seulement ils ont pris l’habitude de ne surtout pas faire de la lutte des classes une réponse.

Il suffit de regarder l’absence du mot bourgeoisie. Ce terme a disparu. Les gilets jaunes, contre qui protestent-ils ? Contre l’État. Qui appellent-ils à la rescousse ? L’État. Les syndicalistes, contre qui protestent-ils ? Contre l’État. Qui appellent-ils à la rescousse ? L’État. Les antiracistes version Comité justice pour Adama, contre qui protestent-ils ? Contre l’État. Qui appellent-ils à la rescousse ? L’État.

Tout cela est tout à fait exemplaire. Dénoncer les travers du capitalisme, cela passe encore. Nommer la bourgeoisie, cela, par contre, c’est impossible. Quant à toucher la notion de propriété, c’est pareillement inenvisageable. Ce qu’on touche du doigt ici, c’est la fascination française pour la petite propriété. La France est un pays de gens rêvant d’être des petits propriétaires disposant d’une large autonomie. Même les ouvriers ont été contaminés par cette approche… Surtout les ouvriers, même, de par la corruption d’un capitalisme triomphant profitant d’un tiers-monde agonisant.

Alors, bien sûr, on peut faire semblant et faire en sorte qu’il y ait un peu de casse dans une manifestation, quelques slogans anticapitalistes par-ci, quelques dénonciations des riches par-là. Cela n’en reste pas moins une comédie. Et le Covid-19, de par son ampleur sociale et sanitaire, économique et culturelle, politique et juridique, met fin à cette comédie.

Et c’est là que la France ne sait pas quoi faire. Elle a pris l’habitude de déléguer, de ne pas bouger, de ne pas prendre de responsabilités. Elle ne veut surtout pas prendre de responsabilités. Elle n’est même pas prête à prendre la responsabilité de se déresponsabiliser en confiant la responsabilité à l’extrême-Droite ou l’armée. La France n’est prête à rien.

C’est naturellement dramatique. C’est en même temps une rupture fondamentale avec toute une hypocrisie et enfin le moment où, de manière inévitable, l’Histoire reprend ses droits. Nous quittons l’époque de l’éphémère et de l’apparence, pour passer dans celle où tout devient dur, concret, solide. Et le solide, cela fait mal.

La France va avoir très mal. Décrocher d’une anesthésie générale de plusieurs décennies, cela va lui être douloureux. Les choses vont être tourmentées. Mais il y a un espoir : comme la France a l’habitude de poser la question sociale, la question de la lutte, de la lutte des classes, on est en droit de s’attendre à une réponse adéquate, enfin.

Il y a de puissants leviers historiques pour aller dans le bon sens. La Gauche historique a un patrimoine immense : si elle est en mesure de le réactiver, elle peut mettre en branle des millions de personnes, passer de rien à tout, par la lutte des classes. C’est le défi historique du moment, alors que la crise se développe toujours plus à tous les niveaux et que l’impact économique commence à être dévastateur. Il faut toute une génération à la hauteur.

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La crise du covid-19 en Guyane révèle le rouleau compresseur capitaliste

Alors que l’épidémie de coronavirus n’arrête pas de s’étendre en Guyane, le premier ministre Jean Castex s’est rendu ce dimanche 12 juillet dans la région. Resté seulement huit heures sur place, cela ne fut qu’une simple formalité en plus pour réaffirmer sa stratégie de combat anti-social, anti-populaire.

Jean Castex prouve son mépris pour les Guyanais en parlant de ce département comme d’une « île », réitérant la lourde erreur déjà effectuée par Emmanuel Macron en mars 2017. Cette « bourde » n’est en rien anecdotique : elle révèle combien la bourgeoisie française gère les régions d’outre-mer comme quelque chose à la marge, les délaissant en bonne partie.

La situation du covid-19 en est encore une triste illustration, avec près de 5 949 cas confirmés sur 268 700 habitants. La région ne compte que trois hôpitaux pour une trentaine de lits de réanimation et environ 600 médecins en activité. Un système de santé déjà mis à bout avec l’afflux de malades déjà atteints par le paludisme, la dengue ou la tuberculose.

Jean Castex a ainsi beau dire que « la Guyane est un territoire de la République comme un autre », il n’en est rien. Si tel était le cas, l’annonce de la fin de l’état d’urgence au 10 juillet n’engendrerait pas insouciance en métropole alors que la Guyane et Mayotte sont sous ce régime d’exception sanitaire jusqu’au 30 octobre.

Cela ne fait d’ailleurs aucunement illusion pour Yvane Goua, porte-parole du « collectif Mayouri Santé Guyane » qui déclarait ne rien attendre de la visite d’un premier ministre faisant l’aller-retour dans la journée, et précisait que :

« aujourd’hui, par habitant, je parle bien par habitant, en termes d’impact du virus, on est au-dessus de la Chine, on est au-dessus de l’Italie et pourtant on a pas les moyens en adéquation. On a 20 personnes qui arrivent par semaine, alors qu’il manque en fait aujourd’hui 300 à 400 professionnels soignants en Guyane »

Car trois ans après une importante vague de protestations, l’accord signé avec le gouvernement français n’a pas abouti à satisfaire les revendications.

Au mois de mars et avril 2017, le collectif Toukan (« 500 frères »), l’UTG (Union des Travailleurs Guyanais) et le collectif « Pou La Gwiyann dékolé » (Pour le développement de la Guyane) menaient une vague de grèves, dressant à des endroits des barricades pour réclamer, outre la lutte contre l’insécurité, l’immigration incontrôlée liée à l’orpaillage illégal, la création d’un CHU et la gestion publique du centre Centre médico-chirugical de Kourou situé à proximité de la base de lancement spatiale.

L’accord signé le 21 avril 2017 n’a toujours pas été mis en œuvre et c’est pourquoi, d’ailleurs, Emmanuel Macron s’était rendu dans la région en octobre, se disant attentif à a la situation. Et depuis ? Depuis rien. Adrien Taquet, secrétaire d’État chargé auprès du ministère de la santé, restait encore bien évasif à propos de la demande du CHU en Guyane lors d’une session parlementaire en octobre 2019.

Dans ce contexte comment ne pas être offusqué, pour ne pas dire révolté, lorsqu’on entend Jean Castex déclarer :

« je viens avec la volonté de préparer la France à une éventuelle deuxième vague mais en préservant la vie économique, la vie sociale »

L’ordre du jour est clair pour ce gouvernement : c’est la poursuite coûte que coûte du capitalisme, à marche forcée, envers et contre toutes les attentes populaires. La Guyane demande pourtant une très grande aide pour faire face à la fois à la situation sanitaire actuelle posée par le covid-19, mais aussi pour son développement social en général.

Dans une région où plus de 20 % des gens sont privés d’emplois et environ 25 % sans couverture sociale, le re-confinement de certains quartiers les plus pauvres va être dramatique. Alors que l’occupation moyenne d’un logement en métropole est de 2,3 personnes, en Guyane elle est de 3,4 personnes. C’est près d’un tiers de la population qui subit le mal-logement lié au surpeuplement….

La visite éclair du premier ministre Jean Castex prouve bien toute l’arrogance d’une personnalité technocratique, placée par en haut et n’étant là que pour gérer, de la manière la plus ferme et placide, la continuité du capitalisme français. Soit les masses populaires prennent conscience de la situation et tentent de résister, soit c’est un terrible rouleau compresseur qui va s’écraser sur elles, qui s’écrase déjà sur elles…

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Pierre de Bousquet de Florian, le directeur de cabinet « DST » du ministre de l’intérieur

Le nouveau ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a nommé comme directeur de son cabinet un homme à poigne, venu des services secrets. C’est une mise en forme du ministère pour préparer ce qui va se jouer.

Le nouveau premier ministre Jean Castex a annoncé qu’il formerait un « gouvernement de combat » et pour cela il faut des cadres. Pierre de Bousquet de Florian est de ceux-là et sa nomination comme numéro 2 du ministère de l’Intérieur montre que l’État se prépare à cogner. Son nom ne doit pas être prétexte à une moquerie simpliste de l’aristocratie : sa famille appartient au protestantisme, il relève du dernier carré relevant de la tradition d’humilité et de rigueur. C’est tout sauf un hurluberlu, un type d’extrême-Droite, etc.

Ce qui le rend encore plus dangereux. Pierre de Bousquet de Florian, c’est Jean Castex bis, c’est l’application nette, sans bavures, sans états d’âme. À sa nomination il était coordonnateur national du renseignement et de la lutte contre le terrorisme ; il a dirigé la Direction de la surveillance du territoire, il a été préfet de la Haute-Normandie, de la Seine-Maritime, du Languedoc-Roussillon, de l’Hérault, des Hauts-de-Seine, de Mayenne…

Il a été conseiller technique au cabinet du président de la République Jacques Chirac de 1995 à 1999… Il est Officier de la Légion d’honneur, Commandeur de l’ordre national du Mérite, Officier de l’ordre des Arts et des Lettres, Officier de l’ordre du Mérite maritime… Bref c’est l’argument même de pourquoi il faut une Gauche historique, à la hauteur de l’État lui-même, pour contrer des gens de ce niveau au service du consensus, du statu quo, du calme plat, etc.

Dans une époque qui devient extrêmement tourmentée, son rôle va être donc de superviser le jeune Gérald Darmanin (37 ans). Superviser quoi ? Superviser la cogne. Le gouvernement est une savante construction de personnages médiatiques et de cadres techniques du plus haut niveau. C’est un navire prêt à la parade et au combat dans les eaux troubles de la crise. Un coup de matraque par-ci, un sourire par là.

Et tout cela ne sera pas net. On ne nomme pas une figure des services secrets comme numéro deux du ministère de l’intérieur pour aider à gérer la circulation. Les coups fourrés vont se multiplier, même si bien entendu Pierre de Bousquet de Florian ne présentera jamais les choses aussi, il se contentera, dans l’esprit machiavélique propre à la France, de dire qu’il fait la chose par la bande, comme au billard. Étrange ironie de l’histoire que son rôle au 21e siècle, à lui protestant, sera d’être un homme de main d’un régime anti-démocratique qui sera équivalent à celui de Catherine de Médicis.

Pierre de Bousquet de Florian va être l’homme de main d’une chasse aux rebelles et en acceptant sa nomination, il encourage au militarisme, il donne du courage aux forces qui disent : il va y avoir une rébellion sociale, il faudra tout reprendre en main vigoureusement !

Dire qu’il y en a qui ont parlé de violences policières ces dernières années… Quelle honte leur revient ! Car c’est maintenant que la casse va commencer. Le petit cinéma des anarchistes nantais au centre-ville ou des gilets jaunes sur les Champs-Élysées, avait simplement été laissé faire, car c’était pour laisser passer les choses, pour laisser s’épuiser une contestation vaine, stérile, velléitaire.

Désormais, avec la crise, l’État ne peut plus rien laisser passer, de peur que cela contribue à l’inéluctable dilution de la société et de l’État, étouffés par un capitalisme en perdition. Le gouvernement est un gouvernement de guerre sociale : les masses doivent marcher au pas, sinon elles seront pressées de rentrer dans le rang, à tout prix.

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Communiqué de Génération-s «L’unité par la preuve»

Voici le communiqué de Génération-s, qui propose ni plus ni moins que d’accepter la tentative « écologiste » de torpiller la Gauche en validant la prétendue voie singulière de synthèse entre l’écologie politique et le social. C’est un discours strictement équivalent à celui d’Olivier Faure du Parti socialiste, avec l’idée de se ranger derrière EELV, en espérant faire son trou au sein de cette nouvelle dynamique politique.

« L’unité par la preuve : Génération·s au coeur de rentrées unitaires pour construire l’alternative écologiste et sociale

Après le succès des journées de rentrée de Génération·s à Villejuif en septembre dernier (800 personnes venues de toute la France) qui avaient rassemblé toutes les formations politiques de la gauche et de l’écologie, mais aussi des dizaines de représentant·es de la société engagée et du monde intellectuel pour débattre des solutions à apporter aux urgences du présent et aux défis du futur, Génération·s fait le choix de s’inscrire dans plusieurs démarches unitaires à la rentrée :

 – Les journées d’été des écologistes, avec EELV et ses partenaires pour amplifier la dynamique de l’écologie sociale et la mettre en situation de conquérir et d’exercer le pouvoir avec le reste de la gauche et avec la société engagée (du 20 au 22 août 2020).

 – Le Festival des idées, animé par Christian Paul et Guillaume Duval, autour de dizaines d’intellectuels, de syndicalistes, de militantes et de militants des combats communs à la gauche et aux écologistes (du 3 au 5 septembre 2020).

 L’initiative commune qui vise à rassembler la gauche et les écologistes pour faire gagner l’alternative au duo-duel Macron / Le Pen et inventer le monde d’après la crise (à l’automne).

Nous répondrons également présent·es à toutes les invitations qui nous seront formulées par des mouvements de gauche et écologistes pour participer comme invités à des discussions constructives.

Bien évidemment, Génération·s fera entendre dans tous ces rassemblements et dans ses propres initiatives sa singularité et ses propositions innovantes et audacieuses pour la transformation écologique, le partage des richesses, le changement de modèle économique et social, l’éducation, la culture, la démocratie.

Alors que nous nous apprêtons à adopter notre « projet de société » au terme d’un processus citoyen participatif, nous voulons franchir un cap nouveau dans l’unité en préférant des rentrées politiques collectives à des séquences solitaires et concurrentes. Génération·s organisera également ses propres événements publics à l’automne afin de décliner la voie singulière de synthèse entre l’écologie politique et le social. »