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Les apéros tardifs en été sont-ils plus importants que l’heure naturelle ?

Une consultation internet lancée par l’Assemblée nationale donne une majorité de personnes favorables au maintien de l’heure d’été toute l’année. Cela reviendrait à garder en permanence un décalage d’environ deux heures par rapport à l’heure solaire, sans qu’il y ait eu de véritable débat mené à ce sujet.

L’heure n’est qu’une mesure, déterminé administrativement par les humains pour s’organiser socialement. Cette mesure n’est toutefois pas arbitraire, elle reflète la réalité naturelle de l’alternance entre le jour et la nuit.

Ainsi, la mesure de l’heure est initialement liée à la position du soleil dans le ciel, avec le midi, la mi-journée, correspondant à son zénith. Jusqu’en 1891, l’heure dans chaque département était établie en fonction d’un cadran solaire en Préfecture. Il y a en effet environ 50 minutes de décalage naturel entre Brest et Strasbourg. Pour des raisons économiques, il a bien fallu cependant unifier l’heure sur le territoire national.

Si l’on considère l’heure naturelle, c’est-à-dire l’heure solaire, et que l’on fait une moyenne par rapport au territoire français et aux normes internationales, c’est l’heure UTC 0, celle du premier fuseau horaire, qui correspond le plus à la France. Tel n’est pas le choix qui est fait puisque le pays utilise l’heure UTC +1 en hiver et l’heure UTC + 2 en été.

Le changement d’heure au printemps et en automne est au centre des débats depuis une recommandation de la Commission européenne prônant sa fin. La consultation menée sur internet par l’Assemblée nationale, avec 2 103 999 réponses, donne une large majorité (80%) en ce sens.

Cela est nullement étonnant car le changement d’heure est dénigré chaque année, particulièrement pour le passage à l’heure d’été où il faut dormir 1 heure de moins chaque matin, sans qu’on puisse convenir de l’existence de réels bénéfices par ailleurs.

Le problème par contre est qu’il n’y a pas de réel débat démocratique mené sur la question, avec la possibilité pour la population de se forger un véritable avis. Vouloir cesser le changement d’heure bis-annuel est une chose, et l’on peut considérer que celle-ci est admise, mais encore faut-il savoir quelle heure maintenir.

Cela pose un grand problème à l’Union Européenne qui n’est pas capable d’organiser quelque-chose d’aussi concret pour la vie quotidienne dans, et entre, les pays. Ainsi a-t-il été considéré que chaque pays devait choisir son fuseau horaire d’ici avril, pour une fin du changement d’heure en 2021.

La consultation lancée par l’Assemblé national pose ici un véritable problème démocratique, car elle est comme tombée du ciel, sans qu’ait pu être mené un véritable débat, selon des considérations scientifiques précises sur les plans sanitaires, écologiques et économiques.

De nombreuses personnes, a priori 2 millions si on suppose qu’il y a surtout des vrais votes individuels, ont été « choisir » entre l’heure d’été, l’heure d’hiver, l’heure UTC 0 ou le maintien de l’alternance. C’est l’heure d’été qui en sort gagnante, avec un score favorable à 59 % à l’heure UTC + 2 toute l’année.

Il n’y a aucun grand argument connu en ce sens, et on se demande bien ce qui a pu motiver un tel choix à part la considération qu’il serait dommage de ne plus profiter de journées à rallonge pour prendre l’apéro en été. Une telle motivation ne serait nullement étonnante tant on a l’impression qu’en France, il n’y a pas vraiment d’autre aspiration générale que celle de la tranquillité du camping estival.

L’enjeu est pourtant très important, et chaque personne raisonnable ne peut accepter de faire un tel choix sans une réflexion collective de fond. Ce dont il est question ici, c’est d’un rapport naturel, de notre rapport au Soleil, qui conditionne la vie de la Terre depuis 4,5 milliards d’années.

Il paraît complément dingue qu’un pays censé être moderne et démocratique comme la France soit incapable de mener une telle réflexion avant de faire un choix aussi important en avril.

Le cœur de la question est cependant bien plus complexe qu’un simple choix de fuseau horaire. Il se pose ici la question du rapport à la nature en général, ce qui a de nombreuses implications.

Le problème des horaires et des rythmes qui leurs sont liés sont ainsi largement déterminés par la question des villes et des campagnes. La ville, qui en quelque sorte est synonyme de lumière, de jour «permanent », est en contradiction avec la campagne, où la nuit rend en principe compliqué tout activité. L’humanité devrait en quelque sorte trouver une voix naturelle adéquate synthétisant ces deux aspects.

Ajoutons également que ce serait une grande erreur d’imaginer débattre sur la question du fuseau horaire sans discuter de la question des rythmes de vie eux-mêmes, de leurs calages ou décalages avec le soleil, avec l’heure naturelle.

Ne faudrait-il pas, plutôt que de changer d’heure, ou de choisir une heure très décalée par rapport au soleil, adapter les rythmes de vie à chaque saison ? Les enfants, par exemple, n’ont-t-ils pas besoin de dormir un peu plus l’hiver où les nuits sont longues, qu’en été ? Et en été justement, ne faut-il pas adapter les activités en les décalant le matin, parce qu’on se couche forcément un peu plus tard qu’en hiver ?

Voilà un véritable sujet de réflexion, que seule une société authentiquement démocratique et populaire saurait capable de mener.

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L’évolution du métro parisien en vidéo

Le métro parisien est un réseau de transport très efficace, de part son maillage très dense. Cette vidéo très sympathique de la chaîne Le Ferrovipathe en montre l’évolution depuis 1900, de manière très visuelle.

On aurait pu croire que le métro parisien était quelque chose de figé, qui se serait agencé par couches successives immuables, s’additionnant simplement. Il est impressionnant de se rendre compte, au contraire, à quel point la plupart des lignes ont elles-mêmes évolué dans le tracé, se sont adaptées, réformées, ont utilisé ici le tunnel d’une autre ligne, là fait un itinéraire bis, etc.

Petit à petit, tous les quartiers ont été desservis. Le réseau a passé un cap quand il a été unifié sous l’égide la RATP, formant une seule et même structure cohérente. La ligne 1, la première, est toujours la plus empruntée, avec ses grandes rames qui sont maintenant automatiques. Il a été estimé que pour l’année 2010, la ligne a été empruntée par 207 millions de voyageurs avec jusqu’à 750 000 personnes par jour. Tout ce trafic n’est cependant possible que parce que la ligne est reliée à une multitude d’autres lignes, elle-mêmes reliées aux autres.

On a ainsi une organisation très complexe, visant l’efficacité, pour transporter énormément de voyageurs le plus vite possible à travers Paris intra-muros. Mais justement, dès que l’on passe cette barrière symbolique du périphérique, ce schéma n’est plus le même. Être en bout de ligne, à un terminus en banlieue, n’ a rien à voir avec le fait de pouvoir profiter du métro dans Paris même. Dans certaines situations comme pour la Ligne 13 dans sa partie nord, c’est même un véritable enfer pour les gens qui l’empruntent quotidiennement.

A contrario du réseau parisien, il faut penser également à cette actualité du projet de métro du « grand Paris », qui s’avère être une entreprise très difficile, maintes fois retardée. Le problème est justement qu’il n’y a pas cette densité parisienne, parce que la ville s’est étalée autour de la capitale de manière anarchique, en considérant uniquement des intérêts individuels et, c’est lié, le déplacement en automobile.

Il n’y a pas la possibilité de faire quelque-chose de satisfaisant, d’efficace pour aller partout rapidement. Cette carte, reflétant le projet le plus aboutit de ce « Grand Paris Express », montre à quel point cela n’a rien à voir avec le métro parisien et son maillage dense, mais n’est qu’une sorte de RER amélioré faisant un périphérique en transport en commun (et pour relier la capitale aux aéroports).

Évoquons pour finir l’excellent jeu sur téléphone portable mini métro, qui restitue tout à fait l’évolution du métro de Paris. On a des cartes de grandes villes (dont Paris) à compléter au fur et à mesure qu’apparaissent de nouvelles stations, et tout l’enjeu est de savoir faire évoluer son réseau. Comme pour le vrai métro parisien, la clef est de savoir articuler des changements quantitatifs (nouvelles lignes, nouveaux tunnels, nouvelles rames) avec des changements qualitatifs, c’est-à-dire dans la nature même du réseau, son organisation générale, qui nécessite donc des changements dans le tracé des lignes elle-mêmes.

Les habitués du réseau parisien pourront également s’amuser avec cet autre jeu sympathique, sur ordinateur ou en application portable, qui permet de conduire des rames du métro parisien de manière très réaliste : Paris métro simulator !

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Et maintenant on mange quoi ? de Christophe Brusset

Le livre Et maintenant on mange quoi ? de Christophe Brusset entend dénoncer de l’intérieur les agissements de l’agro-industrie capitaliste qui tend à abaisser la qualité de la nourriture et empoisonner les consommateurs pour maximiser ses profits.

« Ce qui me choque le plus, ce n’est pas que des industriels avides nous fassent manger des crottes de rats ou des asticots de temps en temps, car cela n’aura finalement aucune incidence sur notre santé. Non, ce qui me révolte véritablement c’est qu’on légalise l’empoisonnement collectif uniquement pour assurer les profits de multinationales déjà très riches et hyperpuissantes. »

L’ouvrage de Christophe Brusset est un témoignage convainquant, venant de l’intérieur du système qu’il dénonce. Ancien acheteur dans l’alimentaire, il relève de nombreuses anecdotes présentées comme typiques et donne quelques conseils pour éviter les pires aliments. C’est une volonté démocratique qui est affichée par l’auteur, celle d’un « repenti » qui entend informer le grand public.

Y sont expliquées dans le détail tout un tas de pratiques visant à contourner les réglementations ou désorienter les consommateurs, ainsi que de nombreuses réglementations qui ne protègent pas suffisamment, voir autorisent des choses dangereuses.

Ce qu’on apprend dans son livre n’est pas malheureusement pas étonnant, c’est tout à fait conforme à la logique même du capitalisme. Il y a cependant quelque-chose de saisissant à découvrir certaines pratiques dans le détail, car il est parfois difficile d’imaginer que les choses vont aussi loin.

La plupart de ce qu’il dénonce n’est pas vraiment illégal, et c’est cela qui est le plus consternant. Il est en fait très difficile de savoir vraiment ce que l’on mange avec la nourriture industrielle. Par exemple, sur un emballage, s’il est marqué qu’un produit est fabriqué en France, rien n’indique l’origine des aliments qui le composent. Ainsi, une grande partie de la production agricole mondiale vient de Chine et beaucoup de ces aliments sont donc incorporés dans les produits industriels ici. Ce sont par exemple des tomates de très mauvaise qualité et produites avec l’usage de nombreux pesticides, sans qu’on n’en sache rien.

S’il existe des normes, par exemple pour les pesticides, il y a en fait très peu de contrôles et ceux-ci se basent souvent de toutes façons seulement sur des certificats qui peuvent facilement être falsifiés. On a en fait tout un système, qui fonctionne à l’échelle mondiale, et qui dispose d’usages et d’astuces pour contourner les règles, qui ne sont de toutes manière pas très protectrices.

À cela s’ajoute le fait que les industriels ont énormément de stratégies pour réduire le coût de leurs marchandises tout en favorisant les ventes. C’est-à-dire que même dans le cadre strictement légal, la qualité des produits alimentaires est de moins en moins bonne en raison de l’impérieuse nécessité de l’élargissement des profits.

Il en va de même pour la santé, qui est de plus en plus malmenée par l’agro-industrie capitaliste pour les mêmes raisons, qui sont directement liées. Il faut penser bien sûr à tout un tas d’additifs, comme des conservateurs qui permettent de garder plus longtemps pour vendre plus facilement, des agents de texture pour rendre un produit addictif, des colorants pour masquer des ingrédients de mauvaise qualité, etc. Ceux-ci, pris isolément et en faible quantité sont présentés comme inoffensifs, mais ils sont en fait systématiques et leurs effets s’additionnent et peuvent se mutualiser.

La question de la malbouffe est très connue, avec notamment produits très sucrés et très gras, addictifs et très nocifs, mais on aurait tort de penser que cela ne concerne que les fast-foods ou les sodas.

Christophe Brusset nous explique très bien dans Et maintenant on mange quoi ? qu’une grande majorité des restaurants ou des cantines scolaires ne sont pas épargnés par ce problème de la qualité de la nourriture, car les industriels ont totalement colonisé ces secteurs de telle manière qu’on n’y cuisine quasiment plus, ou alors que les aliments de base y sont de mauvaise qualité.

Les différents conseils donnés par l’auteur pour s’y retrouver dans ce chaos sont bien sûr très utiles afin d’y voir plus clair. Certains labels comme le « bio » permettent, normalement, de s’assurer une qualité certaine, sanitaire ou nutritive. Le meilleur moyen d’éviter les problèmes réside surtout dans l’achat à la base de produits locaux de bonne qualité qu’on cuisine soi-même, afin de véritablement savoir ce que l’on mange.

Il serait erroné cependant d’imaginer que la solution réside, comme le pense l’auteur, dans le choix de consommateurs qui aurait le pouvoir d’orienter la production. L’ensemble de son ouvrage montre au contraire à quel point l’agro-industrie capitaliste est puissante et piégée par sa logique propre. C’est donc la production elle-même qu’il faut changer, l’orienter dans un sens non-capitaliste, la destiner uniquement et unilatéralement à la satisfaction culturelle et sanitaire de la population en matière d’alimentation.

 

> Et maintenant on mange quoi ? de Christophe Brusset, paru en octobre 2018, est disponible aux éditions Flammarion. Cliquez sur l’image ci-dessous pour lire un extrait de l’ouvrage :

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L’assistance vidéo, cette horreur du football moderne

Les arbitres assistants vidéo ou VAR, acronyme anglais pour Video assistant referees, sont en place dans plusieurs championnats de football, et depuis la semaine dernière pour les phases finales de la Ligue des Champions. Loin d’apporter quelque-chose sur le plan sportif, ce dispositif répond surtout à la logique du football moderne, conformément aux sollicitations des clubs les plus riches.

L’Atlético de Madrid avait ouvert le score à la 70e minute lors de sa confrontation face à la Juventus en Ligue des Champions hier soir. Bien servi par Filipe Luis, Álvaro Morata venait récompenser d’une tête franche et bien placée les efforts des « Colchoneros » qui dominaient les débats. La clameur de l’Estadio Metropolitano, qui s’était transformé en une immense exaltation de joie, fut cependant douchée quelques minutes plus tard par l’arbitre. Après visionnage de la vidéo, celui-ci a estimé qu’il y avait une poussette fautive de la part du buteur contre le défenseur.

Cette décision n’a rien d’évidente, le ralenti ne permet pas rationnellement de juger l’intensité du geste de la main du défenseur ; le football étant un sport de contact, il y a sans-cesse ce type de mouvements entre les joueurs et rien ne permet avec les images d’affirmer que le défenseur ne s’est pas volontairement jeté, ou a été déséquilibré par sa propre faute.

C’est ici un cas d’école montrant l’inanité du dispositif VAR. La technologie est censée aider, mais on est en fait pas plus avancé, et il y a toujours des interprétations différentes, aucun consensus, et finalement un sentiment d’injustice qui n’en est que plus grand par rapport à une erreur d’arbitrage pendant le jeu. Un autre cas s’était d’ailleurs produit en première mi-temps où, après visionnage de la vidéo, l’arbitre s’était dédit après avoir accordé un penalty aux Madrilènes. Cette décision a semblé juste, mais là encore il n’y a rien d’établi avec certitude. C’est une question de quelques centimètres pour savoir si la faute a été commise en dehors ou dans la surface. Sa décision initiale, pendant le cours du jeu, n’avait rien d’absurde et n’aurait pas représenté quelque-chose de scandaleux.

Ces faits n’auront finalement pas changé grand-chose hier soir puisque les locaux l’ont emporté 2 à 0. Tel n’est pas le cas par contre de l’annulation du premier but de l’Ajax Amsterdam, qui a perdu 1 à 2 contre le Real Madrid la semaine dernière en Ligue des Champions également.

Il s’est passé cette fois-ci quelque-chose d’improbable où l’on ne sait pas vraiment ce qui a entraîné l’annulation du but par l’arbitre. Cela a bien sûr fait l’objet d’une grande polémique aux Pays-Bas ainsi qu’en Catalogne (où le Real Madrid n’est pas apprécié), le sentiment d’injustice étant très grand.

L’UEFA a justifié le lendemain la décision de l’arbitre sur Twitter.

Il est expliqué que Dusan Tadic était en position de hors-jeu et qu’il gênait le gardien sur le but de Tagliafico. Cela est pour le moins étrange, car le joueur ne peut pas disparaître s’il est hors-jeu, et il n’a pas fait ici délibérément action de jeu, comme le sanctionne la Loi 11 du football.

Le gardien de but du Real ne s’était d’ailleurs absolument pas plaint de cette soi-disant obstruction sur le moment ; rien ne permet de toutes façons d’affirmer que Thibaut Courtois a réellement été empêché de sauver ce ballon à cause de son adversaire considéré hors-jeu sur la vidéo.

Cette justification de l’UEFA est donc très floue, et d’ailleurs pendant la diffusion du match, le réalisateur avait choisi un autre ralenti, avec un autre hors-jeu probable juste avant, mais pas du tout cette scène.

À l’issu de la rencontre, le gardien Thibaut Courtois a expliqué qu’« heureusement qu’il y avait le VAR » et que lui-même a pensé qu’il y avait hors-jeu. Sauf qu’on ne sait pas de quel hors-jeu il parle, et s’il parle de celui-ci, il est forcément de mauvaise fois car il ne peut aucunement le constater à ce moment là puisqu’il fixe logiquement le ballon. Les explications fournies par le corps arbitral à l’entraîneur de l’Ajax, Erik ten Hag, n’étaient pas claires non-plus, et contradictoires :

« L’un d’eux m’a dit que l’annulation du but était basée sur une position de hors-jeu qui n’était pas évidente à mes yeux, un autre parce qu’il y a eu une faute sur Courtois, que je n’ai pas revue sur les images de la télé. »

On se retrouve donc avec une technologie censée permettre d’éviter les erreurs d’arbitrage qui ajoute en fait encore plus de suspicion sur la partialité du corps arbitral et exacerbe le sentiment d’injustice.

Cette affaire est d’autant plus ennuyeuse que le dispositif n’aurait dû être en place que la saison prochaine pour la compétition européenne. L’UEFA a finalement décidé au mois de décembre que les arbitres assistants vidéo seraient présents dès les phases finales de cette année, changeant les modalités du jeu en cours de compétition. Il y a là quelque-chose d’inhabituel, de pas correcte, de pas conforme à l’esprit sportif. Qu’on soit pour ou contre, l’arbitrage vidéo change fondamentalement la façon dont sont joués et arbitrés les matchs, et cela n’est pas normal de l’instaurer au milieu du tournoi contrairement à ce qui était prévu.

Le président de l’UEFA Aleksander Ceferin s’était justifié en disant : « si nous pouvons le faire avant, pourquoi pas ? » Il s’est en fait empressé de répondre aux exigences des clubs de football les plus riches. L’institution était historiquement hostile au dispositif, mais elle a finalement cédé aux injonctions de personnalités comme Andrea Agnelli, président de la Juventus et du très influent syndicat de clubs ECA, ou de Karl-Heinz Rummenigge, président du directoire du Bayern Munich.

L’arbitrage vidéo est réclamé par les grands clubs qui veulent contrôler le plus possible l’incertitude du sport. De la même manière qu’ils plaident pour une ligue fermée, afin de ne pas avoir à se qualifier chaque année pour l’Europe, ceux-ci veulent surtout assurer leurs buisiness models.

L’argent qui leur permet d’acheter les plus grands joueurs et d’écraser la concurrence ne leur suffit pas, il y a encore trop d’incertitude, de risque de se voir « flouer » par un club moins fort et ils veulent pouvoir maîtriser le plus de paramètres possibles.

L’UEFA ne fait que se plier cette exigence, comme elle l’a fait cette année en acceptant d’inscrire pour les phases finales les joueurs transférés pendant l’hiver qui avaient joué la compétition avec un autre club, ce qui est un autre recul historique.

Le discours sur l’équité sportive ou le soulagement des arbitres pour justifier le dispositif VAR n’est que du flan. L’équipe nationale du Maroc l’avait d’ailleurs constaté à ses dépens pendant la Coupe du Monde 2018, il y avait clairement eu le sentiment que « le VAR, c’est pour les grandes équipes, c’est frustrant », comme l’avait dit Nabil Dirar.

Les joueurs et les entraîneurs sont de plus en plus nombreux à s’y opposer, à l’instar de l’entraîneur du club londonien Tottenham, Mauricio Pochettino, qui affirme que « personne n’est heureux de regarder ces matches en Europe avec la VAR, personne. »

La Ligue 1 française, qui a adopté le dispositif cette saison, regorge déjà de décisions contestées après utilisation de la vidéo ou, pire encore, de moments où la vidéo n’a pas été consulté dans une situation litigieuse sans que l’on sache pourquoi. Il faut se souvenir de cette 20e journée du championnat en décembre où pas moins de quatre matchs avaient connu une polémique relative à ce nouveau mode d’arbitrage.

L’assistance vidéo n’apporte manifestement rien au football, et cela casse l’ambiance dans les stades de manière très désagréable quand un but est finalement anulé. C’est une horreur de plus du football moderne.

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La question du retour en France des soldats français de Daech

Le retour en France de plus d’une centaine de membres de l’État islamique est considéré par l’État comme un devoir juridique. Cela pose une multitude de problèmes : moraux, juridiques, politiques, avec à l’arrière-plan le fait que la France n’a jamais assumé que l’islamisme était politique. Les conséquences sont incalculables.

Les islamistes faisant des attentats en visant des personnes au hasard sont des criminels, c’est une simple évidence. Mais leur criminalité ne relève pas de la tuerie spontanée ; elle est au contraire le fruit de longues réflexions, d’innombrables analyses, au service d’un projet politique sur une base religieuse.

L’État français a bien entendu toujours su cela. Il a considéré toutefois qu’en raison de l’importance de l’immigration depuis des pays musulmans, il fallait étouffer cette dimension. Ainsi, les islamistes des années 1990 ont été frappés par une justice les considérant comme des mafieux, quand ils n’ont pas été tués de manière extra-légale. Qu’on dise que Khaled Kelkal mérite la peine de mort est une thèse qui peut se tenir, mais en attendant il n’a pas été arrêté : il a été exécuté par les forces de l’ordre.

De la même manière, les tueurs de Charlie Hebdo, pour qui il ne s’agit pas d’éprouver une quelconque sympathie, auraient pu être arrêtés. Repliés dans une imprimerie entourée de forces armées, ne comptant pas se suicider… Il aurait été facile de les épuiser, d’utiliser des gaz, etc. L’État français n’a eu cependant aucunement l’intention de se coltiner un procès ultra-médiatisé avec des activistes d’Al Qaeda.

Après les attentats sur le territoire français de l’État islamique, l’État français a envoyé des soldats spéciaux en Irak et en Syrie afin justement d’en liquider les participants. La révélation de cela par François Hollande alors président de la république avait fait scandale alors. Avec l’effondrement de l’État islamique, cela ne suffit cependant plus. L’État français risque de se retrouver avec plus d’une centaine de combattants.

La logique voudrait qu’ils soient jugés pour leurs crimes en Irak et en Syrie. D’ailleurs le peuple français ne veut plus d’eux : ils ont choisi le meurtre et l’horreur avec un sentiment de toute puissance dans un autre pays, ils doivent en payer le prix. Et puis comment les juger en France pour des actes commis si loin, comment établir les faits ? Le peuple français considère de toute façon qu’il n’y a pas à chercher et qu’ils ont choisi un camp si criminel que la justice doit être brève, expéditive.

Seulement, évidemment, l’État français est pris à son propre rôle et veut récupérer « ses » citoyens, comme si les combattants de l’État islamique étaient des touristes perdus lors de leurs vacances. L’État français applique ici, de manière mécanique, sa conception « républicaine ». C’est absolument intenable et c’est la porte ouverte à une instabilité générale pour le Droit en France.

Une réponse de Gauche à cette instabilité ne pourra pas être de l’angélisme, de la naïveté ou une lecture infantile de l’islamisme. Ce serait une trahison du principe de Justice. La lettre ouverte au président de la République, écrite par Albert Chennouf-Meyer, père d’Abel, assassiné par Mohammed Merah, est à ce titre plein de dignité. « Mon avenir est derrière moi, je mettrai tout en œuvre pour éliminer les assassins de mon fils (…). L’État, l’armée, la république a oublié ses enfants, moi, je n’oublie pas mon fils ! »

Il n’est personne dans le peuple pour ne pas savoir que ce sont là des paroles correspondant à une exigence fondamentale de vérité et de justice.

Lire également : Lettre ouverte à Monsieur le président de la république, Emmanuel Macron, par Albert Camus-Meyer

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Lettre ouverte à Monsieur le président de la république, Emmanuel Macron, par Albert Chennouf-Meyer

Cette lettre ouverte a été publiée sur Facebook par Albert Chennouf-Meyer, père d’Abel, assassiné par Mohammed Merah il y a 7 ans.

Lettre ouverte à Monsieur le président de la république, Emmanuel Macron.

Monsieur le président, vous allez dans les semaines à venir décider, à moins que c’est déjà fait, faire revenir 130 djihadistes français dont une partie, ont les mains rouges du sang de nos enfants.

Je tiens à m’élever de toutes mes forces contre cette criminelle décision.

Vous n’êtes pas sans savoir que parmi les #islamistes de retour, qu’il y a des individus qui ont contribué à aider le terroriste musulman #MohamedMerah, l’assassin de sept innocentes personnes dont 3 enfants de moins de 8 ans ainsi que mon fils, Abel, alors âgé de 25 ans.

Je pense plus particulièrement au retour de Quentin le Brun, originaire du #Tarn.

Je vous demande solennellement de surseoir à cette décision, voire de refuser leur retour et les confier à la Syrie, pays souverain et apte à les juger.

Monsieur le président, Le 15 mars, je commémorerais le 7ème anniversaire de la disparition tragique de mon fils et je « fêterais » mon 67ème anniversaire par la même occasion.

Je jure sur l’honneur, sur la mémoire d’#Abel, mon enfant arraché très tôt à la vie à cause des préceptes arriérés d’une secte, que je ne resterai pas inactif.

Mon avenir est derrière moi, je mettrai tout en œuvre pour éliminer les assassins de mon fils. Je n’ai plus rien à perdre, l’islam m’a enlevé un fils, je ne peux pas laisser vivre paisiblement les complices de l’assassinat de mon fils de retour 7 ans après leur forfaiture. S’il faut le tuer, je le ferais !

L’État, l’armée, la république a oublié ses enfants, moi, je n’oublie pas mon fils !

Je suis sain de corps et d’esprit et je jure sur la Sainte Bible, que j’exécuterais le contrat que j’ai susurré à l’oreille de mon fils avant qu’on ferme son cercueil !

Tous les matins, ma famille affronte la question de mon petits-fils, #Éden, né après la mort de son père, qui nous demande « où est-ce qu’il est son papa ?» !

Monsieur le président, votre devoir premier selon la constitution, est de protéger le peuple. Je ne vous demande rien d’autres que d’empêcher ce barbare de revenir dans le pays qui l’a vu naître et dont il a contribué à tuer plus de 250 concitoyens.

Respectueusement Monsieur le Président !

P.S : Mes avocats, Maîtres Béatrice Dubreuil et Frédéric Picard seront informés de cette initiative, qui est personnelle et individuelle !

J’ai déposé un exemplaire de cette lettre sur le site de la Présidence.

Aldebert Camus-Meyer

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L’échec du féminisme à la «me too» devant la culture beauf

Une certaine forme de féminisme a beau s’affirmer à la suite du mouvement « me too », il ne peut pas modifier la situation. Tant que la culture beauf dispose de gigantesques moyens d’expression, elle noiera toute opposition. Quelques pointes critiques n’ébranlent pas un véritable système d’attitudes et de comportements.

#metoo

La grande question à l’arrière-plan de tout programme féministe, c’est de savoir s’il faut s’adresser aux hommes ou à chaque homme en particulier. Et si le fond du problème consiste en une culture, beauf ou patriarcale comme on voudra, ou bien en des réactions individuelles erronées. Selon qu’on voit les choses d’une manière ou d’une autre, cela change tout, tant pour la manière d’exprimer le féminisme que pour évaluer ses réussites et ses échecs.

On sait comment l’individualisme n’a eu de cesse de progresser ces dernières années ; le féminisme n’a pas échappé à cela. L’une des conséquences immédiates, c’est qu’il a perdu tout sens critique. L’affirmation d’une femme, de quelque manière que ce soit, est considérée comme du féminisme… même si dans la pratique, il s’agit d’une soumission complète aux valeurs de soumission. C’est le principe de la femme « osant » se maquiller de manière professionnelle, poser nue, avoir telle robe et tels talons aiguilles, etc.

Il y a un nombre incalculable de mannequins, actrices, chanteuses, femmes de la politique et de l’économie, intellectuelles, qui se prétendent féministes simplement parce qu’elles font carrière. Le féminisme se réduit ici à la revendication de l’avancée sociale, du projet individuel. Le féminisme disparaît ici dans une sorte de magma pro-égalitaire, où les femmes sont mises sur le même plan que les étrangers, les immigrés, les migrants, les gays, les lesbiennes, les handicapés, etc. etc.

Évidemment à chaque fois, il ne s’agit pas des immigrés ou des handicapés, mais de chaque immigré, de chaque handicapé, pas des gays ou des lesbiennes, mais de chaque gay, de chaque lesbienne. C’est toujours l’individu qui est l’alpha et l’oméga de tout ce type de raisonnement. Et, par conséquent, cela ne peut aboutir qu’à des échecs, exprimés par de dramatiques « faits divers », notamment des agressions. Celles-ci apparaissent comme toujours incompréhensibles, car s’opposant au « droit » de chacun de faire ce qu’il veut.

Ce qui est ici gommé, de manière totale, c’est la culture beauf qui traverse toute la société. Il suffit pourtant de voir que le bombardement visuel d’un clip de rap diffusant tous les clichés sexistes a un impact concret bien plus important que n’importe quelle remarque en faveur de l’égalité. Même quelqu’un qui est favorable à l’égalité peut en arriver dans sa vie quotidienne à reproduire les traditions sexistes. Et cela est vrai pour les hommes bien entendu, mais également pour les femmes.

L’une des principales erreurs du mouvement féministe à la « me too », ou bien les Femen, voire en fait la plupart des organisations et regroupements féministes, c’est de partir du point de vue que toutes les femmes sont favorables au féminisme. Ce n’est malheureusement pas vrai du tout. La majorité des femmes même, peut-on dire, a tout à fait intégré des règles du jeu où elles assument une certaine passivité, afin de manœuvrer par derrière. Cela leur semble plus pertinent, plus vraisemblable, qu’un hypothétique féminisme où elles seraient vraiment autonomes.

Les films présentent d’ailleurs de manière ininterrompue un tel modèle. Même dans les cas où la femme a des initiatives, elle dépend de l’homme qui se retrouve être le protagoniste véritable. Il suffit de voir un James Bond récent, ou bien n’importe quel film catastrophe, de science-fiction, d’action. La femme qui agit se retrouve toujours coincé à un moment, et qui vient débloquer la situation ? L’homme, bien entendu. Il y a là quelque chose pernicieux, contribuant de manière massive à la prédominance des hommes. Et pourtant, on ne trouve aucune critique massive, ou même aucun début de critique, de ces insupportables scénarios.

Finalement, que voit-on ? Que le féminisme individualiste, tourné vers l’individu, est tout à fait acceptable pour le capitalisme. Il valorise l’individu, il donne une image de progrès de la société, c’est donc tout à fait utile. Par contre, jamais la femme en tant que femme n’est valorisée. Cela serait là du « naturalisme », ce serait là lui donner une « essence », ce qui est insupportable pour une société dont le fondement est l’existence individuelle radicalement séparée de tout le reste.

Ce qui amène au problème fondamental du féminisme : considère-t-il que la femme est un homme comme les autres, ou bien est-il dans l’optique que les hommes doivent se plier aux exigences des femmes ? Et dans ce dernier cas, dans quelle mesure les femmes sont-elles différentes ou bien supérieures aux hommes ? Ce qui aboutit inéluctablement à la question du rapport à la vie : la femme est-elle supérieure à l’homme, de par son rapport plus développé à la vie ?

On est tout à fait libre de le penser, et même est-ce sans doute un devoir. L’égalité hommes-femmes ne pourra pas se mettre en place sans, disons, un certain matriarcat. Croire qu’on pourra briser la culture beauf sans une certaine révolution des mentalités, sans une certaine soumission des hommes à des valeurs de paix, d’orientation vers la nature, les animaux, est une illusion pure et simple.

Cela n’intéresse pas du tout le féminisme à la « me too ». Il n’est pas du tout dans cette problématique et n’a aucune réflexion à ce sujet. Il est simplement une expression de la volonté de carrière de femmes appartenant aux couches supérieures de la société. Il exprime la volonté de ne pas être dérangé par la culture beauf – ce qui est déjà pas mal – mais il ne compte nullement supprimer cette culture beauf. Comment toutefois penser que cela serait possible ?

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Le mariage des prêtres, entre histoire et théologie

La question du mariage des prêtres peut se prêter à un petit aperçu historique, prétexte à une compréhension plus approfondie de ce qu’est une religion. C’est un débat nécessaire pour la Gauche, qui a perdu énormément de terrain dans sa lutte anti-cléricale ou plus directement anti-religieuse.

Le mariage, Giulio Rosati, 1885

A l’occasion des propos du pape François sur le mariage des prêtres, un article publié sur agauche.org a affirmé que le refus de ce mariage était un principe théologique inaliénable du catholicisme. Aucune « modernisation » ne serait possible, ni même souhaitable finalement, car la religion ne sert que les réactionnaires.

Un lecteur a alors fait la remarque comme quoi le mariage des prêtres n’a été interdit qu’au cours du moyen âge, afin que les prêtres cessent « de léguer les propriétés religieuses à leurs familles ». La théologie, finalement, ne jouerait un rôle que secondaire.

Cette question est tout à fait intéressante, au-delà de son simple thème, car elle pose la question du rapport entre l’économie et la culture, l’idéologie, la théologie. Pour dire les choses plus crûment on a la vieille problématique que les marxistes appellent l’opposition infrastructures / superstructures, avec tout une panoplie d’évaluations différentes de leur rapport. Vu le poids des religions dans le monde, on n’échappe pas à l’approfondissement d’une telle mise en perspective.

Cependant, en ce qui concerne la question proprement dite, notre lecteur a vraisemblablement raté l’évolution, la transformation, l’actualité de ce qu’est l’Église catholique comme religion. Le refus de la réalité matérielle au profit d’un monde idéal immaculé est en effet le cœur du catholicisme et cela de plus en plus. Ou, si l’on veut, le catholicisme est bien plus que du cléricalisme : c’est un mysticisme complet. Ce que les gens religieux ne voient pas le plus souvent, parce qu’ils ne s’intéressent pas à de telles fantasmagories.

Regardons ce qu’il en est, de manière organisée. Déjà, le catholicisme refuse le mariage, par définition même, pour ceux qui font le choix de la pureté. Il fait en effet une grande distinction entre les croyants et le personnel religieux, et même au sein de ce personnel religieux il y a une hiérarchie très importante.

Cette hiérarchie est d’ordre mystique ; elle est notamment théorisée par le (pseudo) Denys l’aréopagite. Pour faire court, lors de l’Eucharistie, le pain est vraiment le corps du Christ et le vin vraiment son sang. Mais pour que cette opération qu’on peut appeler « magique » ait lieu, il faut un magicien. Ce magicien c’est le prêtre.

Et comment fait-il apparaître le corps et le sang ? En étant l’époux de l’Église. Il a, si l’on veut, des super pouvoirs parce qu’il est marié à un seul être, l’Église qui aurait été établie à la demande du Christ. S’il se mariait à quelqu’un d’autre, il perdrait ses super-pouvoirs : il ne peut donc pas se marier avec un être humain. Ou bien, on peut inverser la proposition : si avec les protestants on enlève la dimension « magique » du dimanche, alors le vin est seulement du vin, le pain seulement du pain, et le prêtre peut se marier (il est alors simplement pasteur, par ailleurs).

En termes juridiques catholiques romains, cela donne cela dans le Code de droit canonique de 1983 :

« Can. 277 – § 1. Les clercs sont tenus par l’obligation de garder la « continence parfaite et perpétuelle » à cause du Royaume des Cieux, et sont donc astreints au célibat, don particulier de Dieu par lequel les ministres sacrés peuvent s’unir plus facilement au Christ avec un cœur sans partage et s’adonner plus librement au service de Dieu et des hommes. »

Le catholicisme est ici une religion « fusionnelle », comme l’hindouisme. Ni le judaïsme, ni l’Islam ne vont aussi loin dans ce rejet de la réalité matérielle. Voilà pour la dimension théologique.

Maintenant, on se doute bien que si telle ou telle conception a a gagné dans l’Église catholique romaine, ce n’est pas simplement parce que son argumentaire théologique était supérieur. Il y a des intérêts matériels que les différents points de vue reflétaient. Et effectivement pour empêcher la dispersion des biens de l’Église, le célibat a été instauré de manière rigide. Auparavant les hommes mariés avant de devenir prêtres pouvaient le rester, mais devenir abstinents. Comme cela ne marchait pas vraiment et qu’on avait peur que les fils réclament le poste ou les terres ou le privilèges, il a été procédé à la fin de 1100 à la suppression de l’ordination des hommes mariés.

Seulement, on aurait tort de voir simplement une sorte de machiavélisme de l’Église. Il faut en effet voir qu’avant l’an 800, l’Église n’était pas forte comme elle le fut justement après. Ce n’est qu’avec l’appui d’une féodalité développée que la religion a connu une expansion très forte qui a, on s’en doute, demandée davantage de personnel. On passe, si l’on veut, des petits monastères dans les campagnes, des églises romanes, aux églises gothiques, aux cathédrales. Avec le célibat forcé, l’Église a juste fait le ménage dans ses nombreuses recrues.

Ce qui a été machiavélique, ce n’est pas tant de décider subitement le célibat, mais de l’avoir mis de côté simplement pour devenir une religion de masse, et une fois établie, de remettre tout en ordre… De plus, si l’Église fait ce rappel à l’ordre, ce n’est pas simplement pour ses propres intérêts. C’était aussi en rapport avec sa concurrence avec la noblesse, mais ceci nous éloigne du sujet.

Donc, il y a eu ménage de fait, qui rentre évidemment en adéquation avec ses intérêts, mais il y a bien une vie autonome de l’Église. On peut prouver cela de deux manières. D’abord, l’Église d’Orient n’applique pas ce principe, sauf pour les moines et les évêques. On peut dire que l’orient n’a pas connu la même féodalité que l’occident, mais cela ne fait que déplacer le problème : pourquoi y a-t-il telle chose en occident, telle chose en orient ?

Ensuite, et c’est le grand paradoxe, le célibat du clergé ayant reçu les sacrements est, dans l’Église catholique, une règle de discipline et non d’un point de foi. Cela signifie concrètement qu’on ne touche pas au dogme si l’on instaure le mariage des prêtres : c’est juste une mesure administrative, rien de plus. C’est donc, somme toute, assez facile à mettre en place.

Mais l’Église catholique ne veut pas le faire, elle ne cesse de le rappeler. Pourquoi ? Parce qu’elle prétend être la porte vers l’au-delà. Et une structure tournée vers l’au-delà ne peut pas prétendre en même temps être tourné vers le monde matériel. C’est pour cela que les juifs, les musulmans, les protestants vaquent à leurs occupations, tout en étant de bons juifs, de bons musulmans, de bons protestants. Chez les catholiques, ce n’est pas possible : seul compte l’au-delà.

Si jamais se pose d’ailleurs la question ici des djihadistes, qui veulent atteindre l’au-delà, il faut bien voir que leur Islam « fusionne » le monde matériel et l’au-delà. Les lois musulmanes sur Terre sont déjà une préfiguration, voire un moment de l’au-delà. C’est la conception du Tawhid, de l’unicité divine.

Chez les catholiques, l’univers est quant à lui coupé radicalement en deux, et seul l’au-delà compte. La religion n’est pas qu’une structure liée à l’économie ou des intérêts matériels : elle naît aussi comme opium du peuple, inquiétude métaphysique, quête mystique de l’au-delà. En fait, elle se nourrit de l’absence de reconnaissance du monde matériel, à quelque échelle que ce soit.

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L’Union Européenne refuse la fusion d’Alstom et de Siemens Mobility

En refusant la fusion de deux grandes entreprises du ferroviaire, l’Union Européenne s’oppose à la concentration économique, qui est en même temps une norme à l’échelle mondiale. Cela va donc provoquer des tensions immenses entre les nations et l’Union Européenne.

La commissaire européenne à la Concurrence, Margrethe Vestager, a annoncé hier le refus par son institution de la fusion d’Alstom et Siemens Mobility pour former un géant de l’industrie ferroviaire et de la signalisation. C’est là un épisode très important de la vie économique dans l’Union Européenne.

Deux points de vue semblent s’opposer. Margrethe Vestager a affirmé dans une conférence de presse, avant même son refus, que :

« Notre écosystème est plus fort s’il ne dépend pas entièrement d’une ou de quelques entreprises géantes. »

C’est là en l’apparence la défense de la libre-entreprise contre les monopoles, dans une optique de défense de l’initiative capitaliste et des consommateurs. C’est le principe selon lequel un capitalisme n’est sain que s’il est concurrentiel, tandis que le capitalisme ayant atteint des formes monopolistiques dérègle le système.

L’autre point de vue se veut quant à lui pragmatique. Jeo Kaeser, le dirigeant de Siemens, a justifié la fusion de par l’existence d’une concurrence mondiale :

« La protection des intérêts des consommateurs ne doit pas empêcher l’Europe d’affronter sur un pied d’égalité la Chine et les États-Unis. »

On a donc en apparence une opposition entre des entreprises ayant un besoin de se renforcer au niveau mondial et une Union Européenne garante des droits des petites entreprises et des consommateurs. Margrethe Vestager a particulièrement insisté à ce sujet hier, disant par exemple que :

« En l’absence de mesures compensatoires suffisantes, cette concentration aurait entraîné une hausse des prix pour les systèmes de signalisation qui assurent la sécurité des passagers et pour les futures générations de trains à très grande vitesse. »

Tout cela n’est cependant qu’une apparence, car les choses sont bien plus compliquées que cela. Car, depuis 1989, la commission européenne à la à Concurrence a approuvé 6 000 fusions et n’en a bloqué qu’une trentaine. On ne peut donc pas vraiment dire que l’Union Européenne est un frein au capitalisme de type monopolistique. Elle est un frein à certaines formes capitalistes monopolistiques.

Lesquelles ? Cela dépend tout simplement des rapports de force. Là, si la fusion a été refusée, c’est tout simplement parce que cela formerait un monstre franco-allemand, qui deviendrait une entreprise monopolistique jouant un rôle-clef dans le moteur franco-allemand. Beaucoup de pays de l’Union Européenne ne veulent pas se soumettre à ce moteur franco-allemand : ils font donc un blocage de tout processus allant en ce sens.

Évidemment, les responsables français et allemand sont fous de rage. Ils annoncent déjà qu’ils feront en sorte de modifier le cadre légal de la commission européenne à la Concurrence, pour la soumettre aux États et aux gouvernements concernés. En clair, la France et l’Allemagne disent : nous sommes les plus forts, vous serez obligés de nous suivre.

Il y a ainsi une initiative commune immédiate du ministres français de l’Économie et des Finances Bruno Le Maire et de Peter Altmaier le ministre allemand de l’Économie. Voici ce que le Français a dit de son côté :

« Je propose qu’on retienne comme marché pertinent, celui où on analyse la concurrence, le monde entier et pas que l’Europe (…). Je propose en deuxième lieu que le Conseil européen c’est-à-dire les chefs d’État puisse s’exprimer sur la décision européenne en matière de concurrence. »

Voici ce qu’a dit entre autres l’Allemand :

« N’y a-t-il pas des domaines tels que l’aviation, les chemins de fer, les banques où vous devez prendre le marché mondial comme référence plutôt que l’européen? »

De telles affirmations sont une provocation directe pour les institutions de l’Union Européenne, qui se voient ici directement remises en cause. Les deux ministres de l’économie des deux plus puissants pays annoncent ouvertement qu’ils comptent remettre en cause les règles dérangeant leurs propres intérêts.

Ils affirment également ouvertement que l’Europe n’est qu’un tremplin pour le monde, et pas une valeur en soi. Le projet européen se voit réduit à une fonction utilitaire pour les capitalismes nationaux.

À vrai dire, il n’a jamais été autre chose, malgré tel ou tel aspect concret obtenu dans une période de croissance où il y a l’illusion que le projet européen devenait autonome et concret, qu’il était un objectif atteignable, des États-Unis d’Europe.

La vraie conséquence de tout cela, surtout, cela va être que les forces nationalistes de France et d’Allemagne vont être d’autant plus renforcées, car elles vont dire que l’Union Européenne bloque l’affirmation de l’économie nationale et qu’elle n’est pas réformable, puisque même Angela Merkel et Emmanuel Macron ne parviennent pas à organiser les choses de manière adéquate.

Les propriétaires d’Alstom et de Siemens Mobility ne vont évidemment pas rester passifs, ils vont renforcer le nationalisme, la dimension « indépendante » des décisions allemandes par rapport à l’Union Européenne. Et cela sera pareil pour tous les industriels et financiers ayant « tiré la leçon » de cette histoire.

C’est là la contradiction essentielle d’un capitalisme qui s’appuie sur des entrepreneurs, mais qui aboutit à des monopoles, de manière inéluctable de par la concurrence. Et comme la concurrence est mondiale et que l’Union Européenne n’est pas une structure réelle mais « flotte » au-dessus des pays, la situation ne peut être marquée que par une explosion des instabilités, des troubles, des remises en cause, des affirmations unilatérales des égoïsmes nationaux.

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L’impossible mariage des prêtres catholiques

Les catholiques français sont très réceptifs à la possibilité pour les prêtres de se marier. Or, c’est une impossibilité théologique fondamentale, comme le pape vient de le rappeler. Ce qui se révèle ici, c’est un souhait permanent de chercher à moderniser la religion catholique afin de la maintenir, sous une forme ou sous une autre : elle n’est ainsi qu’une idéologie.

Lourdes

L’Église catholique romaine, afin de ne pas perdre ses positions en France alors que le protestantisme s’élançait (avec Hus, Calvin, Luther), a fait de ce pays sa fille aînée. Plus simplement, il a été dit à François Ier qu’il jouerait un rôle central dans la nomination de la direction catholique, en échange de quoi il ne touchait pas aux privilèges matériels du catholicisme, ni à ses importantes propriétés. Cet accord a permis l’avènement sans encombre de la monarchie absolue.

Cela a amené le catholicisme français à connaître un chemin qui lui est propre. Déjà qu’au-delà de la fiction universelle du Vatican, le catholicisme est relativement différent dans chaque pays, le catholicisme français est qui plus est très autonome. Ses positions très libérales-sociales se sont d’autant plus renforcées qu’il fallait faire face non seulement à la « modernité », mais à une offensive anticléricale, anti-religieuse. Cela amène les prêtres français à tenir un discours démagogique extrêmement ouvert, très accueillant, très universaliste, etc.

Cela fait que les catholiques français ne savent même plus que si l’on n’est pas catholique, alors une fois mort on va en enfer ; ils ne connaissent rien à la théologie, aux grands principes de leur propre religion. D’où inversement les réactions ultras de minorités catholiques, qui attribuent cette situation en réalité très française au concile dit Vatican II. Les Français sont tout simplement pétris de libéralisme et par conséquent, quand ils sont catholiques, ils ont une lecture libérale de leur religion, voilà tout.

Le même phénomène existe d’ailleurs chez les juifs, les protestants et les musulmans. La grande majorité des gens se reconnaissant dans ces religions n’en connaissent pratiquement rien dans le domaine théologique, à part donc pareillement des petites minorités ultras. La religion est une forme relevant de l’antiquité, du moyen-âge ; elle ne peut pas exister ni dans une société libérale, ni dans une société où les gens sont raisonnables, autonomes sur le plan de la pensée (il y a bien lieu de distinguer ces deux sociétés !).

Si elle se maintient, c’est qu’elle est idéologie, bien plus qu’un questionnement métaphysique, chose qu’on ne retrouve que chez les intellectuels, avec parfois une vraie interrogation de type cosmologiste ou bien sur la nature de l’humanité. Les catholiques français expriment, au moyen de leur religion, un conservatisme bienveillant, dont les scouts sont finalement les meilleurs représentants. Seulement voilà on ne fait pas une religion qu’avec des scouts. Il faut un clergé.

Et étant libéraux, les catholiques français n’ont rien contre le mariage des prêtres. D’abord, parce que chacun fait ce qu’il veut, ensuite, parce que cela permettrait d’en avoir plus, d’être plus proches également du mode de vie moderne. Seulement voilà, le catholicisme est un mysticisme qui, dans la lignée d’un (saint) Augustin, d’un (saint) Thomas, (pseudo) Denys l’Aréopagite, n’en a rien à faire du monde moderne, ni même du monde matériel. Il faut aller dans le sens de la pureté divine, pas de la matière. Le mariage des prêtres est donc impossible.

Le pape était il y a peu au Panama, à l’occasion de la journée mondiale de la Jeunesse (catholique romaine), et dans l’avion qui l’a ramené à Rome, il a tenu une conférence de presse, comme il en a l’habitude. On lui a parlé du thème du mariage des prêtres, et ce pape « moderne » a été très clair :

« Personnellement je pense que le célibat est un don pour l’Église »

« Je ne le ferai pas [=autoriser le mariage des prêtres], que cela reste clair. Je peux sembler peut-être fermé là-dessus mais je ne me sens pas de me présenter devant Dieu avec cette décision. »

C’est tout à fait logique, puisque cela correspond à la base théologique du catholicisme. Le pape François a même cité (saint) Paul VI:

« Je préfère donner ma vie que de changer la loi du célibat. »

Après, il a raconté que de son point de vue on pouvait former des quarts de prêtres pour célébrer la messe dans des « endroits très éloignés », mentionnant les îles du Pacifique ou encore l’Amazonie. Mais même cela sera théologiquement très difficile à mettre en place, de par la nature « mystique » du prêtre.

Car le prêtre doit être pur, il est en liaison direct avec le divin. Il n’est pas sur le même plan que les gens qui ne font pas partie du clergé ! D’ailleurs, dans l’Église catholique orthodoxe, le clergé fait encore sa cérémonie mystique en étant masqué des présents dans l’église, car ceux-ci ne sont pas dignes d’y assister. On ne plaisante pas avec l’eucharistie chez les catholiques : le vin est vraiment considéré comme le sang de Jésus, chaque dimanche, et le pain est vraiment censé être son corps.

On boit et on mange le Christ, le dimanche à la messe. C’est évidemment difficile à avaler au 21e siècle, aussi les catholiques libéraux aimeraient bien quelques améliorations, afin de conserver leur joujou conservateur. Mais ils rentrent là en conflit avec la dimension théologique de la religion, qui en fait d’ailleurs son intérêt historique, sur le plan de l’humanisme. Un Dieu qui se fait homme, c’est le début d’une révolution intellectuelle et conceptuelle, un basculement en faveur de l’humanité. Cela mène finalement droit à l’athéisme, pour qui a une lecture humaniste et naturaliste de cette question.

Le catholicisme romain n’évitera donc pas une crise en France, de par les exigences de son public libéral ayant abandonné toute dimension théologique, et le maintien des fondamentaux…

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Mange ta soupe !

Soupe et potage sont utilisés comme des synonymes pour désigner un plat liquide composé de légumes, légumineuses et/ou de viandes, de matières grasses et d’épaississant.

gaspacho

La recette la plus simple de la soupe est la cuisson de légumes de saison dans de l’eau, assaisonnée et portée à ébullition. Une fois cuite, la préparation est mixée. La dégustation se fait alors lorsque la soupe est encore fumante.

Cette préparation peut également prendre les noms de velouté, bisque, bouillon, garbure ou consommé car ils renvoient à des recettes particulières.

La garbure est une soupe chaude gasconne servie en entrée. L’assortiment de légumes (chou vert accompagné du haricot-maïs frais ou sec, de fèves, de mange-tout, de pommes de terre, de navets, de gros pois, d’oignons, d’ail, parfois de carottes, de raves et même de laitues, de châtaignes, d’orties, voire de bourrache) est cuit longuement. Les viandes, en général, sont confites.

Le minestrone est une variante de soupe de légumes (chou vert, pommes de terre, carottes, céleri branches, petits pois, tomates, haricots blancs secs, oignon, ail, basilic) chaude, épaisse de la cuisine italienne, souvent additionnée de pâtes ou de riz, et servie en entrée, accompagnée de parmesan râpé. Il peut également être cuisiné avec de la viande, accompagné de pistou ou pesto et d’une tranche de pain de campagne.

Le velouté est une soupe enrichie de crème fraîche et d’œuf. Le principe de réalisation d’un velouté consiste à réaliser une soupe et à lui ajouter en fin de cuisson une préparation qui est un mélange de crème fraîche et de jaune d’œuf.

La bisque est un potage de la cuisine française, consistant en un coulis de crustacés très assaisonné et additionné de crème fraîche.

Le bouillon désigne le plus souvent une préparation culinaire liquide (généralement juste de l’eau), dans laquelle on cuit, assez longuement, un ou plusieurs aliments : des viandes (bœuf, volaille, etc.), des poissons, des légumes, des féculents, des graines, complétés d’aromates et d’assaisonnements.

Le consommé est un potage généralement fait à base de fond (un bouillon, généralement à base de veau ou de volaille et d’une garniture aromatique, réduit pour en augmenter la consistance)  qui a ensuite été clarifié.

Le gaspacho est un potage froid voire glacé à base de légumes crus mixés. La base est faite de tomates mixées, le tout allongé avec de l’eau ou des glaçons. Aux tomates peuvent être ajoutés de la mie de pain ainsi que des légumes tels que le concombre, le poivron ou l’oignon, cuits ou crus. Cette préparation liquide est relevée avec de l’ail, du sel, de l’huile et du vinaigre.

Les français consomment 12 litres de soupe par an et par personne. Les habitants du Sud-Ouest sont les plus forts consommateurs (15 litres par acheteur) contre ceux de la région parisienne les plus faibles (11,7 litres par acheteur). Les soupes se déclinent sous différentes formes, dans le commerce : liquides, déshydratées ou instantanées. Les potages déshydratés à cuire sont les premiers sur les tapis roulants pour 10.6 litres consommés par acheteurs. Arrivent ensuite les soupes liquides avec leur consommation de 7.5 litres. Ce mode de consommation s’explique par le prix peu élevé et la facilité de préparation de l’instantané. A moins de 1€ et une bouilloire, le consommateur boit une soupe ; contre 4€ les 50 cl en bouteille de verre.

Bien plus que le mode de préparation, c’est surtout la qualité nutritionnelle qui diffère ! 40% de légumes, de l’eau, des épices et aucun additif !

Les industriels de l’agroalimentaire n’ont pas le droit d’utiliser de conservateurs dans leurs préparations. Les soupes fraîches sont alors conservées grâce à des méthodes thermiques : la congélation et stérilisation à chaud étant les plus courantes. Selon les normes d’usage, une soupe doit contenir au moins 40 % de légumes pour bénéficier de l’appellation. La teneur en sel quant à elle, n’est pas normée. La soupe prête à consommer contient en moyenne 2 grammes de sel par bol. Ce qui est énorme au vu de l’apport journalier recommandé pour un adulte : 5 à 7 grammes.

Le potage « fait-maison » est, au niveau nutritionnel le meilleur puisque plus les légumes sont cueillis et cuits rapidement et plus ils gardent leurs vitamines et minéraux. Il faut bien sûr que la température ne soit pas trop élevée. Le gaspacho est plus vitaminé puisque les légumes ne sont pas cuits. Vient ensuite le bouillon avec sa cuisson longue à l’isotherme 100°C qui attendrit les tissus, les rend fondant sans risques de les abîmer par des températures trop élevées. Il faut pour réussir une bonne soupe, tant au niveau goût que nutritionnellement, prendre du temps. Il faut choisir les légumes, les préparer et passer à la cuisson. La soupe est souvent réalisée en grande quantité alors pourquoi ne pas la partager entre amis, voisins, collègues !

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Disparition d’Emiliano Sala : les sportifs appartiennent au peuple !

La disparition tragique du footballeur Emiliano Sala est un bouleversement à Nantes, il y a le sentiment terrible et collectif que c’est « l’un des nôtres » qui a disparu.

Il était revenu à Nantes pour le week-end puis est reparti après un au revoir à ses anciens équipiers au centre d’entraînement. L’avion dans lequel se trouvait Emiliano Sala n’a pas été retrouvé, mais si à l’heure actuelle il est encore porté disparu, il n’y a que très peu de doutes quant à son sort. Le sujet a animé la journée des Nantais amoureux de leur club hier, dans les collèges et les lycées, au travail, dans les familles ou sur les messageries entre amis. Des centaines de personnes se sont rendues le soir même dans le centre de la ville en son nom.

Un footballeur, et qui plus est le meilleur buteur du club, qui s’implique fortement sur le terrain, donne de sa personne pour l’équipe, cela plaît aux gens. Emiliano Sala a plu au public nantais tant pour sa gentillesse et son sourire que pour sa « grinta » sur le terrain et ses buts. Toujours un bonjour quand il le fallait, toujours d’accord pour un autographe ou un selfie quand on le croisait au karting ou à la boulangerie, et toujours enclin à se donner pendant les matchs.

Les intellectuels des centre-villes, les bourgeois en général, ont du mal à saisir cela. Ils ne voient en les footballeurs pros que des individus qui réussissent, adulés par des gens d’en bas qui eux n’ont pas réussi. En vérité, ce n’est pas cela qui se passe : les gens du peuple savent que les footballeurs comme Emiliano Sala sont des leurs, et inversement. C’est pour cela qu’il y a beaucoup de tristesse quant à sa disparition, car il y a de l’affection.

En arrière plan de cela, il va aussi y avoir beaucoup de colère. Car cette disparition n’aurait jamais dû arriver. C’est un drame du football moderne.

Elle est la conclusion tragique d’un insupportable épisode hivernal plein de rebondissements quant à son transfert vers le club de Cardiff City. L’entraîneur Vahid Halilhodzic ne voulait évidemment pas du départ de son buteur, surtout sans remplacement derrière, et assurait qu’il ne partirait pas.

Il y avait quand-même des rumeurs, puis un départ quasi certain finalement annulé, avant d’être enfin conclu il y a quelques jours. On ne sait jamais les choses dans le détail dans ce genre de transactions, mais la plupart des commentaires indiquaient qu’Emiliano Sala n’était pas intéressé sportivement par Cardiff. Ce serait le président du FC Nantes, Kita, qui a poussé le transfert pour récolter une grosse somme d’argent (estimée à 17 millions d’euros, dont la moitié doit revenir aux Girondins de Bordeaux en raison d’une clause sur le précédent transfert).

De son côté, le club de Cardiff a proposé au joueur un salaire très important, de 300 000 euros par mois, qu’il lui a été compliqué de refuser, ce que tout le monde à bien entendu compris, malgré la déception.

C’est un drame du football moderne, car ce genre de transferts insupportable d’un point de vue sportif ne devraient pas exister. Il ne devrait pas y avoir autant d’argent en jeu, avec une telle concurrence déloyale qui fausse toute équité. Il n’y aurait jamais dû avoir ces allez-retours improvisés entre Nantes et Cardiff dans un petit avion au-dessus de la Manche en plein milieu du championnat en hiver.

Si l’on en croit la presse, Emiliano Sala avait fait part de ses inquiétudes quant au vol à son à des amis, indiquant qu’à l’aller cela avait été compliqué et qu’il n’avait pas confiance en l’avion « sur le point de tomber en morceaux ». Cette information fait vraiment froid dans le dos, il y a quelque-chose de vraiment révoltant qui montre que les joueurs de football, même s’ils gagnent beaucoup d’argent, sont les victimes de tractations qui les dépassent, manipulés comme de simples marchandises, contraints à ce genre de voyages absurdes.

On peut même penser, d’ailleurs, qu’Emiliano Sala n’avait pas grand-chose à faire en Europe, et que le peuple argentin devrait avoir le droit de garder ses propres champions, qui quittent le pays à cause de l’argent.

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Sur le meurtre antisémite barbare du jeune Ilan Halimi

Il y a 13 ans, le 20 janvier 2006, Ilan Halimi, 23 ans, était enlevé, torturé durant 24 jours et tué parce que juif.

Le jeune et beau Ilan était vendeur de téléphones portables dans un magasin boulevard Voltaire à Paris. Dans la semaine précédent son enlèvement, il s’est fait « dragué » par Sorour Arbabzadeh, mais appelé « Emma » et « Yalda ». Ilan l’appelle pour lui proposer de passer la soirée ensemble. Elle accepte ; mais elle n’a en réalité pas du tout l’intention de passer la soirée avec lui, elle servait d’appât à la solde du Gang des barbares, mené par Youssouf Fofana, qui cherchait à enlever un juif depuis quelques temps, afin de soutirer de l’argent.

Commencera pour Ilan l’horreur véritable. C’est sa copine, Monny, qui alertera en premier la police, car Ilan n’est pas rentré à son domicile la veille. Assez rapidement, Fofana rentre en contact avec la famille Halimi pour leur demander une somme exorbitante, car il est convaincu d’un préjugé antisémite féodal : « les Juifs ont de l’argent et ils sont solidaires ».

Sa demande varie entre 450 000 euros et 500 000 euros. Lorsque Fofana comprend que la famille d’Ilan n’a pas les moyens, sa mère est secrétaire et lui ne touchait que 1 200€ par mois, il appelle un rabbin choisi au hasard dans l’annuaire et le charge de « récolter l’argent dans sa communauté ».

Ilan est torturé, séquestré dans un appartement d’un HLM à Bagneux puis dans la cave de l’immeuble. Le jeune homme n’est que très peu nourri, il est humilié ; plusieurs de ses geôliers jouent de lui, il a les yeux bandés en permanence, ils lui écrasent des cigarettes et des joints sur tout le corps. Ils ne le douchent que très peu aussi. Et après 24 jours d’un cauchemar inimaginable, Ilan est découvert agonisant le 13 février le long des voies ferrées du RER C à Sainte-Geneviève-des-Bois.

Il décédera lors de son transfert à l’hôpital. L’ordure antisémite qu’est Fofana fuit en Côte d’Ivoire. La justice française ira le chercher et le ramènera en France. Lui ainsi que les 26 autres accusés sont condamnés à des peines ridicules pour leurs actes émanant de la pire barbarie antisémite.

Fofana est le seul condamné à perpétuité, avec 22 ans de sûreté. Sorour Arbabzadeh est condamnée quant à elle à seulement 9 ans de prison, et ce malgré son rôle décisif.

Justice n’a donc pas été rendu pour le jeune Ilan. Il n’a pas été la seule victime morte de l’antisémitisme ces dernières années : le 19 mars 2012, Mohammed Merah abat de sang froid Gabriel Sandler, 4 ans, Arié Sandler, 5 ans, Myriam Monsonego, 7 ans et Jonahtan Sandler, 30 ans ; le 4 avril 2017, Sarah Halimi, 65 ans est assassiné chez elle ; le 23 mars 2018, Mireille Knoll, survivante de la Shoah est poignardée chez elle.

En novembre 2018, le Premier ministre Édouard Philippe a annoncé que les actes antisémites en France étaient en très forte hausse (+ 69 %). Après un pic « record » en 2015, les actes antisémites officiellement recensés avaient reculé en 2016 puis en 2017, avec 311 actes répertoriés. Ils sont repartis à la hausse.

Ces chiffres ne montrent cependant pas deux choses : ces actes sont de plus en plus violents tandis que les personnes juives, désabusées et en perte de confiance vis-à-vis des institutions, portent de moins en moins plainte pour les actes les moins violents.

Il est nécessaire que la Gauche comprenne que l’antisémitisme n’est pas un racisme comme les autres, mais que c’est bien le « socialisme des imbéciles », qu’il est donc toujours complotiste. La tuerie de Toulouse et les assassinats d’Ilan, de Sarah et de Mireille ne doivent pas être oubliés. Pas plus que chacune des victimes quotidiennes de l’antisémitisme.

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Les Français sont des fanatiques du positivisme

Les Français râlent et protestent, mais sans jamais basculer dans un refus complet et décidé du système dominant. C’est que, pétri du positivisme d’Auguste Comte, de l’idéologie républicaine, de radicalisme et de franc-maçonnerie, ils croient dans tous les cas qu’on avance forcément vers le mieux.

La Parabole des aveugles, Pieter Brueghel l'Ancien (1568)

Les Français râlent tout le temps, se plaignent, protestent, mais cela ne va jamais plus loin qu’un certain stade ; positiviste, le Français relativise tout et considère qu’il ne faut jamais « tomber aussi bas », au point d’être négatif.

Non pas qu’il n’y ait pas de nihilisme en France, mais justement c’est là un point déterminant. Si l’on regarde les punks français, ils n’ont jamais porté de réelle dynamique négative, ils ont immédiatement été nihilistes. Ils n’ont pas porté de scène alternative, comme cela a pu être le cas dans d’autres pays. Ici c’est le « punk à chien » qui a prévalu, ou bien le squater drogué.

On aurait tort de voir en cela une anecdote. C’est bien parce qu’ils n’assumaient pas le négatif en bloc que les socialistes et les syndicalistes ont basculé dans le patriotisme en 1914. Si François Ruffin porte un maillot de football au parlement, c’est bien au parlement qu’il le fait. Et si des députés de La France insoumise viennent de demander à ce que la PMA puisse exister pour chaque femme, y compris une femme seule ou une femme se considérant comme trans et donc comme un homme, c’est bien parce que, somme toute, le système tend vers quelque chose de positif, il n’y a pas à être négatif.

Il faudrait donc accompagner ce progrès, le souligner, l’élargir, le renforcer. Il ne faut pas se leurrer, les protestations de la CGT ou les affirmations LGBTQ+ sont toutes depuis l’intérieur du système, financées par lui au moyen des financements des syndicats et des associations, des mairies, des médias, etc. Il ne s’agit pas d’un rejet négatif, pour construire autre chose, mais d’un aménagement intérieur, se présentant comme une radicalité qui n’est en fait nullement cela.

Les gens en France ont intégré cela et le vivent très bien. Ils savent qu’il y a une incohérence entre leur discours de rejet et leur confiance absolue en le régime, mais ils s’en accommodent, comme les catholiques français s’accommodent de ne pas suivre les règles du Vatican à la lettre. L’esprit français se veut au-dessus de toutes ces « mesquineries » qui ne sont rien par rapport aux avancées contre lesquelles on ne peut rien de toutes façons.

Les Français sont, finalement, tous les adeptes d’Auguste Comte et de son positivisme, idéologique qui va de paire avec les principes républicains, la franc-maçonnerie, et le parti politique historique qui va avec, celui des centristes. Ils pensent qu’on va toujours vers le mieux, dans tous les cas. Il ne peut pas y avoir de chose si catastrophique que cela.

Lorsque la guerre a été déclarée en 1914, les socialistes français n’y ont donc vu qu’un intermède ne changeant rien au progrès inéluctable. Inversement, la défaite de 1940 a laissé les Français tétanisés, totalement ébranlés dans leurs certitudes, au point d’être le peuple le plus ridicule en Europe à ce moment-là, de par son incapacité à avoir un esprit d’indépendance et de résistance.

C’est un trait français qui va avec : quand cela va, cela va parfaitement et les Français avancent avec la certitude de l’ingénieur, du géomètre, du magistrat. Toutefois quand le positivisme s’avère un leurre, le monde tombe sur la tête des Français, qui sont alors d’une paralysie historiquement dramatique.

Voilà pourquoi la Gauche doit assumer d’être négative aussi, ce que les Français n’aiment pas : ils râlent, mais détestent ce qui est négatif. C’est pourtant le négatif qui permet de faire avancer les choses vers ce qui est nouveau, c’est le principe de la transformation de la réalité. Il ne s’agit pas d’accompagner l’État et des réformes « progressistes » qui sont en fait libérales. Il en va du socialisme, de la transformation de la société, de l’ensemble des moyens de production, de l’État, des choix moraux de la société elle-même.

Il faut donc avoir le courage de dire de choses qu’elles sont mal, qu’il faut les rejeter, les combattre, non pas en les mettant de côté, mais en les éradiquant, elles et leur source. Les Français s’en sortent trop facilement en disant que tout n’est pas blanc et que tout n’est pas noir !

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Le gui et le houx

Une boule de constituée de branches de gui suspendue au plafond de la maison, des branches de houx composant la couronne de l’avent, voilà deux espèces d’individus sacrifiées pour la décoration des maisons en ces fêtes de fin d’année. On peut croire que le houx est là, par ses couleurs, pour rappeler Noël et la boule de gui pour s’embrasser en dessous au nouvel an.

houx

Et pourtant, ce sont deux symboles, chrétien pour le premier et païen pour le second, qui se côtoient. Sur le plan botanique, deux critères leur sont communs. Ils sont tous deux des espèces dioïques : il y a des plants femelles qui portent les graines et des plants mâles. Leurs fruits sont toxiques pour l’Homme mais un régal pour les oiseaux.

Le gui (viscum album) a la mauvaise réputation d’être un parasite des arbres. Et pourtant, il ne se nourrit que de la sève de certains arbres : pommiers, pin noir, peuplier, aubépiniers, saules, tilleuls et amandiers et plus rarement les chênes. Il s’accroche à ses hôtes par un suçoir qui se plante dans l’écorce sans en attaquer les cellules ni décomposer le bois de l’arbre. L’utilisation du gui a de nombreuses références païennes. On sait que le gui avait une valeur symbolique forte en Europe (les déesses Frigg et Freyja) comme dans l’Antiquité (Hermès pour les grecs et les rites druidiques pour les gaulois). On pense que les Celtes lui attribuaient des vertus magiques. De nos jours, en Europe, à minuit du premier jour de l’année nouvelle, deux individus s’embrassent sous le gui. Cet acte aurait, selon la superstition, le pouvoir d’assurer prospérité et longévité au couple.

Le gui fait également parti des expressions types de la nouvelle année. Au moyen-âge, même si cela est discuté sur le sens du mot signifiant gui, serait « au gui l’an neuf » symbolisant la reprise des germinations et l’espoir de nouvelles pousses, dans tous les sens du terme.

Le houx (Ilex aquifolium) est un arbuste au feuillage persistant. Il n’a pour lui qu’une seule symbolique chrétienne. Il serait dit que la « sainte famille » poursuivie par l’armée d’Hérode en Égypte se serait réfugiée derrière un buisson de houx. L’arbuste aurait développé ses branches pour les cacher. Une fois sortie, Marie bénit le houx afin qu’il reste vert toute l’année.

Des traditions et des symboles nous en avons en cette période de l’année, il est important de connaître leur origine et de comprendre ce que représente leur présence dans nos maisons par rapport à la nature.

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Le nivellement par le bas imposé par le capitalisme

La Gauche s’est faite engloutir par les « progressistes » qui ont renouvelé les thèses du positivisme : on irait forcément vers quelque chose de mieux, inéluctablement. Elle ne se rétablira qu’en reprenant sa propre thèse de la décadence de la société liée à la chute du capitalisme.

Sleep and his Half-brother Death (John William Waterhouse, 1874)

Le nivellement par le bas est une chose très discutée au sein des couches intellectuelles. Certains voient le niveau s’effondrer au lycée, par exemple en mathématiques ou en français, tandis que d’autres considèrent que somme toute il n’y a pas de grand changement. Et comme grosso modo le système éducatif tourne, fabriquant encore et toujours des cadres passés par Sciences Po, Polytechnique, HEC, les mines, etc., il est établi par les experts qu’il y a peut-être un changement mais qu’il ne touche pas la substance des choses.

Les deux ont tort et raison. Car c’est là un des grands paradoxes du capitalisme, qu’il y ait d’un côté il y ait une grande accumulation de connaissances, et que de l’autre tout soit particulièrement chaotique, bureaucratique, coulé par les opportunistes et les magouilleurs, récupéré dans des directions mercantiles.

On a beaucoup plus de moyens scientifiques qu’auparavant, grâce au développement des moyens productifs. Le matériel est incomparablement plus performant qu’avant, bien plus aisément accessible. En France, chaque personne peut disposer d’un ordinateur, d’internet, sauf à être profondément désocialisé. Mais en même temps les connaissances sont dispersées, incompréhensibles au grand nombre, gérées de manière inorganisée par un capitalisme qui se saisit de ce qu’il peut comme il peut.

Le capitalisme impose le nivellement par le bas en exigeant que lui soit soumis dès qu’il y a complexité. Les choses simples n’ont pas besoin de se soumettre : elles répondent simplement, automatiquement, aux lois du marché. Le capitalisme n’est donc pas inquiet de ce côté là. Ce qui l’inquiète, c’est plus des tendances le contrecarrant, qui porterait à la fois un haut niveau intellectuel et technique, combiné à la formulation d’une socialisation universelle.

Dans l’ordre des choses par exemple, les vétérinaires devraient se révolter contre la condition faite aux animaux, et exiger une compassion universelle. Ce serait un danger formidable pour le capitalisme. Mais cela n’arrive pas, pas plus qu’une révolte générale des médecins contre ce qui nuit à la santé dans le mode de vie propre au capitalisme. En fait, si on vivait dans un monde rationnel, même les policiers devraient devenir fondamentalement de Gauche et dire que le capitalisme laisse sciemment vivre les mafias.

Seul le prolétariat peut cependant porter cette dimension universelle, et malheureusement pour l’instant il est très loin d’avoir un haut niveau intellectuel et technique, même si en fait c’est déjà en partie le cas de par son expérience, de par sa réalité. C’est le nivellement par en bas qui le gangrène, le capitalisme l’entraîne dans sa chute, ce qui est normal, car le prolétariat appartient au capitalisme dans sa nature même. C’est ce qu’il porte en lui qui est intéressant et cela ne ressort pas encore de manière authentique, parce que le mauvais côté l’emporte.

Dans tous les moments historiques où le prolétariat a pris les choses en main, il a combattu pour élever son niveau de conscience, d’organisation ; ses comportements et attitudes étaient entièrement différents de ce qu’il fait en ce moment en France. Aujourd’hui, il dort encore, mais hier il s’organisait de manière très solide, tout à fait consciente, après la tentative de coup d’État de février 1934. Il en va de même pour la période 1943-1947, un moment très important de confrontation avec les couches dominantes.

Les mois de mai et juin 1968 ont également été marqués par un degré d’organisation relativement important. Cela n’a rien à voir avec des marches syndicales où des cortèges traînent leurs savates avec des slogans fatigués et une morale usée, avec à l’arrivée l’odeur de graillon des merguez et alors qu’il a déjà été trinqué. Les prolétaires ne sont eux-mêmes que lorsqu’ils sont carrés ; toute autre attitude n’est qu’une dégradation, le fruit d’un nivellement par le bas.

Il va falloir qu’ils s’arrachent, qu’intellectuellement ils se lancent dans un travail de grande envergure, que sur le plan pratique ils se déconnectent de comportements beaufs. Quiconque ne souligne pas cela n’est qu’un vain populiste, qui se rabaisse au niveau des gilets jaunes.

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Un véritable cadeau de Noël ne se revend pas sur internet

La revente de cadeaux de Noël sur internet est de plus en plus pratiquée et assumée. C’est le marqueur de la décadence d’une société en perte de repères, de valeurs, où le plaisir d’offrir s’est totalement subordonné à la société de consommation et à l’individualisme le plus vil.

Le site marchand eBay France a annoncé une augmentation de ses annonces de 13 % par rapport à l’an passé pour le jour de Noël. Le site Rakuten, qui n’est pas le plus utilisé en France, recense pour sa part 500 000 annonces publiées dans la foulée du 25 décembre et en prévoit 3 millions d’ici au début des soldes. Ces chiffres sont énormes et montrent un phénomène massif.

Les Français ont-ils tant d’argent que cela à gaspiller, pour faire autant de « cadeaux » inutiles ? Car il faut bien s’imaginer que ces reventes ne correspondent pas à des choses anecdotiques, qu’on offre par défaut, mais ont au moins un minimum de valeur marchande pour être revendues sur ces sites.

Différentes enquêtes montrent que l’objet le plus revendu est le jeu vidéo de football FIFA 19, qui vaut environ 50€. Pour quelqu’un de rationnel, cela paraît complètement improbable : on n’offre pas un jeu vidéo de 50€ à quelqu’un qui ne l’a pas demandé.

Éventuellement, pour une personne ayant les moyens, on peut entendre qu’on offre un jeu d’aventure ou un jeu de rôle à quelqu’un pour lui suggérer d’y jouer en supposant que cela lui plaise. Mais cela ne concerne pas FIFA 19.

Mis à part des enfants qui l’auraient demandé pour Noël, ou à qui on fait la surprise sachant pertinemment que ça leur plaira, les adultes qui doivent avoir FIFA 19 l’ont déjà. C’est le jeu vidéo le plus vendu, et il est d’ailleurs en lui-même un phénomène de société.

Donc, quand on offre FIFA 19 à quelqu’un, il est impossible de ne pas savoir à l’avance si cela lui plaira ou non. À moins justement d’acheter pour acheter, sans aucune considération pour la personne à qui l’on offre.

C’est exactement la même chose pour les autres « records » de vente au lendemain de Noël : le dernier « Goncourt » Leurs enfants après eux de Nicolas Mathieu ou bien les derniers disques de Johnny Hallyday et Charles Aznavour.

Ces cadeaux ne sont d’aucune originalité. Ils reflètent même une grande idiotie, car il ne s’agit pas là que d’aliénation, mais de fainéantise intellectuelle et culturelle assumée au point d’« offrir » juste ce qui se vend, parce que ça se vend.

Sauf que, par définition, ce qui se vend, les gens qui doivent l’avoir l’ont déjà. Si l’on est en mesure d’apprécier l’album posthume de Johnny Hallyday, il est évident qu’on a pas attendu de se le voir offrir à Noël pour l’écouter.

C’est un peu la particularité de notre époque. Jamais dans un pays comme la France les larges masses n’ont eu autant accès aux marchandises, notamment aux marchandises culturelles et de confort. Pour un adulte, globalement, à moins de vivre dans une grande précarité ou d’avoir des goûts et des envies démesurés, on a déjà tout ce que l’on souhaite. On n’attend rarement de se faire offrir à Noël le mixer, le jeu vidéo, le jeu de société, la machine à coudre, le livre, la paire de basket qui nous plaît.

Cela rend d’autant plus compliqué, peut-être, les cadeaux de Noël :

« – Que souhaites-tu pour Noël ?
– Je ne sais pas.
– N’as-tu pas besoin de quelque-chose ?
– Si j’ai besoin de quelque-chose, je me l’achète ! »

Cela ne veut pas dire qu’il soit impossible d’offrir et de faire plaisir, mais que justement offrir et faire plaisir ne sont pas une question d’argent, mais surtout de réflexion s’intéressant à la personne à qui l’on offre.

Offrir à son cousin deux places pour l’accompagner au concert d’un groupe qu’on a découvert et qu’on apprécie ensemble, voilà par exemple un extraordinaire cadeau ! Et celui-ci ne se revend pas sur internet, car il n’a pas de prix.

De même qu’inviter ses parents à découvrir un château de la région, ou bien de connaître les goûts littéraires de sa fille et la surprendre positivement avec un roman auquel elle ne s’attendait pas.

Si l’art d’offrir un cadeau qui fasse vraiment plaisir n’est pas un exercice facile, on sait normalement que la démarche d’offrir à autant de valeur que l’objet. « C’est l’intention qui compte », dit la formule populaire.

Le problème est que c’est justement pour cette raison que les gens se sont mis à offrir tout et n’importe quoi, comme si l’intention suffisait lorsqu’elle est déconnectée de toute réalité matérielle. À un moment donnée, s’il n’y a pas de réflexion dans la démarche, celle-ci n’a plus de valeur. Et comme dans le même temps, chacun conçoit sa vie comme une petite entreprise, sans considérations d’ordre morales et, disons, sensibles, alors on n’hésite plus à revendre ses « cadeaux ».

Revendre dès le lendemain un jeu vidéo qu’on s’est fait offrir sans l’avoir essayé, ou un livre sans l’avoir lu, est pourtant une démarche abjecte, à mille lieux de l’esprit de Noël. C’est même franchement dégueulasse pour qui a un peu de valeurs. Mais rien n’est impossible pour le capitalisme triomphant, qui conquiert chaque espace, chaque moment, chaque centimètre, chaque seconde de la vie.

En 2018, à Noël, on n’offre presque plus pour faire plaisir, mais par convenance. Et les marchands s’organisent pour répondre massivement à cette convenance, puis chacun se transforme un marchand individuel sur internet pour tirer parti de cette convenance en revendant les « cadeaux » qui ne plaisent pas. C’est une bien triste époque.

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Les traditions « alsaciennes » de Noël, une source pour le folklore populaire français

L’Alsace est reconnue dans le cadre de la nation française pour ses traditions de Noël. S’il convient de les replacer dans leur juste dimension, qui n’est pas à proprement parler « alsacienne », elles ont une indéniable perspective populaire et démocratique, exprimant l’esprit de partage, la générosité et le besoin d’une vie naturelle et pacifique. Pour affirmer la dignité et la valeur de ces traditions, nous partageons à la fin de cet article une recette typiquement alsacienne de petits gâteaux appelés Bredele.

Parmi les traditions populaires qui apparaissent comme les plus typiques en Alsace, il y a donc celle des Bredele (à prononcer comme si chaque -e était accentué), qui consiste en une série de recettes de petits biscuits sucrés assortis, préparés avec des épices comme la cannelle, ou l’anis, avec des fruits secs, diverses pâtes de fruit ou confitures.

La préparation des Bredele tout au long des semaines précédents Noël, est en soi un dispositif incontournable de cette tradition, l’idée étant si possible de les réaliser collectivement, au sein de la famille ou même entre amis, en unissant les différentes générations.

Leur confection, leur cuisson, leur conditionnement dans des boîtes ou des sachets à offrir est l’occasion d’organiser un travail collectif entre proches, grands-parents, parents ou enfants. A l’approche des Fêtes, les Bredele sont ensuite offerts, à des amis, à partager au travail, entre voisins, aux professeurs des écoles ou aux animateurs qui s’occupent des enfants sur leur temps périscolaire par exemple.

Cette tradition des Bredele se retrouve dans toutes les confessions alsaciennes, chez les protestants comme chez les catholiques, y compris chez les juifs que l’on appelle en Alsace Israëlites, en particulier sous la forme du kipferl.

On trouve bien sûr tout un marché développé autour des Bredele, y compris dans le fait de pouvoir en acheter de toutes sortes dans le commerce, mais rien ne remplace le plaisir de les confectionner avec ses proches pour les offrir autour de soi. D’ailleurs, dans le passé, les Bredele constituaient même en tant que tels une des décorations du sapin de Noël, que l’on dégustait le soir de la Fête.

Le sapin de Noël justement, constitue lui aussi une autre de ces traditions « alsaciennes ». Au point que la ville de Strasbourg, se revendiquant aujourd’hui « capitale de Noël », cherche chaque année à exposer un immense sapin illuminé sur la principale place du centre-ville. Il est vrai que les plus anciennes mentions d’un sapin coupé pour le décorer sont repérables à partir de la fin du XVe siècle dans des documents du Rhin supérieur, notamment en 1546 dans un document de la ville de Sélestat, qui autorise la coupe de sapins à partir du 21 décembre, c’est-à-dire la date la plus commune du solstice d’hiver dans notre partie de l’hémisphère nord.

Il est bien entendu que cette pratique remonte à une haute antiquité, antérieure au processus de christianisation qui a accompagné la mise en place du féodalisme en Europe. D’ailleurs, il n’est pas forcément question uniquement du sapin dans ces traditions issues de l’Antiquité, mais de toutes plantes persistantes en hiver, comme le houx ou le gui. En outre, ces plantes sont fortement liées au culte rendu à cette occasion au soleil et plus généralement à la Nature hivernale, à la vie et à son triomphe. D’où tout le déploiement de lumières,  de bougies, d’illuminations, particulièrement intenses en Alsace, où les rues, les commerces, les monuments publics, les appartements ou les maisons se parent de lumières à la tombée précoce du jour.

Toutes ses traditions, et on peut y ajouter pour finir celle du Christkindel, personnage angélique et féminin accompagné du « Père fouettard » (Rubelz ou Hans Trapp dans le Nord de l’Alsace), ne sont pas fondamentalement alsaciennes toutefois. Déjà en raison du fait que si elle paraissent relativement singulières dans le cadre de la nation française, elles sont en revanche totalement partagées avec l’ensemble des pays germaniques et alpins en particulier. Ensuite, par le fait qu’elles se sont forgées très anciennement, et si elles se structurent de manière significative au XVIe siècle, donc de toute façon à des époques où l’Alsace n’existe pas encore en tant que telle, c’est avant tout dans le cadre de la Réforme, et en particulier de la Réforme luthérienne.

Il s’agissait alors de développer par la dignité accordées aux traditions populaires, une culture de Noël en mesure de renverser les traditions catholiques comme le culte de saint Nicolas, très pratiqué dans les pays rhénan.

Toutes ses traditions ont donc une incontestable dimension populaire et démocratique, elles dépassent le cadre religieux, irriguant la culture et les pratiques de sociabilité quotidienne en cette période, inspirant le folklore lié à Noël pas seulement en Alsace, mais dans tout notre pays.

Plutôt que de chercher à labelliser un pseudo-Noël « à l’Alsacienne » dans une démarche mercantile ou identitaire et réactionnaire, il y a lieu d’affirmer la dignité de ces traditions qui expriment si bien la tendance à la rencontre, à l’échange, à la fusion et le besoin de se rapprocher de la Nature, de renouer un rapport harmonieux aux saisons et à la biosphère.

Recette de Bredele :

Matériel nécessaire : un rouleau à pâtisserie, des emporte-pièces pour Bredele, un pinceau.

  • 1 banane trop mûre (liant en remplacement de l’oeuf)
  • 1 càs de cannelle
  • un peu de girofle moulue
  • 3 càs de beurre de cacahuètes
  • 100g de sucre roux
  • 5 càs d’huile végétale
  • 100g de poudre d’amandes
  • 300g de farine

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Selon ce que vous décidez de faire de cette pâte, vous aurez également besoin de sucre glace et de petites décorations en sucre, et/ou de gelée de fruits rouges.

Commencez par bien écraser la banane, jusqu’à avoir une consistance liquide. Ajoutez ensuite la cannelle, la girofle, le beurre de cacahuètes et le sucre roux. Mélangez bien pour que ce soit homogène et ajoutez les autres ingrédients progressivement : poudre d’amandes, huile végétale et farine.

Une fois que vous avez une pâte homogène dont vous avez réussi à faire une boule sans que ça colle trop aux doigts, vous pouvez commencer à former les Bredele. Étalez la pâte au rouleau sur votre plan de travail préalablement fariné et sortez vos emporte-pièces spécial Bredele en forme de cœurs, étoiles, sapins, cloches… et aussi des ronds tous simples pour faire des Bredele à la confiture.

Déposez vos Bredele sur une plaque de cuisson que vous aurez recouvert d’une feuille de papier sulfurisé.

Cuisez-les au four à 180°C pour environ 10 minutes.

Pour le glaçage, mélangez du sucre glace avec un peu d’eau et utilisez un pinceau pour déposer ce mélange sur vos Bredele. Saupoudrez de petites décorations en sucre avant que le glaçage ne sèche.

Si vous décidez d’en faire des Bredele à la confiture, n’oubliez pas de faire chauffer la confiture (10 secondes au micro ondes) avant de la répartir sur vos bases rondes. Déposez ensuite un « chapeau » de la même taille, creux, et ajoutez encore de la confiture.

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Faut-il une région administrative pour savoir que Nantes est en Bretagne ?

L’association Bretagne Réunie a présenté récemment une pétition de 100 000 signatures demandant un référendum sur le rattachement du département de la Loire-Atlantique à la région Bretagne. Suite à la pression exercée par cela, et alors qu’il est juridiquement obligé de prendre en compte cette demande émanant de 10 % du corps électoral de Loire-Atlantique, le conseil départemental s’en retourne finalement à l’État pour organiser un référendum décisionnel sur la question.

Entendre dire par des gens qui n’y connaissent rien à l’histoire et à la culture bretonne que Nantes ne serait pas en Bretagne est vécu comme une véritable agression culturelle par de nombreuses personnes. C’est en effet une insulte à l’histoire et à la culture, car bien-sûr le pays Nantais ou le pays de Retz sont bretons.

Ce discours niant une partie de la Bretagne est largement porté par la non-intégration administrative de la Loire-Atlantique à la région Bretagne. Le territoire complètement fictif des Pays-de-la-Loire, dont trois départements sur cinq n’ont aucun rapport avec le fleuve la Loire, s’est pour sa part développé dans une optique de modernisme capitaliste tout puissant, niant en bloc les traditions et l’héritage.

Rien que pour cette raison, les personnes progressistes en Loire-Atlantique ont en général toujours vu d’un bon œil la question bretonne, parce que c’est une question démocratique et populaire.

Les 100 000 signatures ligériennes réunies par la pétition de l’association Bretagne Réunie représentent de ce point de vue quelque-chose de très important numériquement.

Cependant, il faut bien voir que la pétition a franchi ce seuil à l’arrachée, grâce au militantisme forcené de l’association, alors que la question est posée dans le débat public depuis de nombreuses années.

D’un côté, la population est bienveillante sur cette question, comme le montrent les réguliers sondages dans la presse locale, mais de l’autre il n’y a pas non-plus de véritable mobilisation démocratique et populaire sur le sujet. C’est-à-dire que, de la même manière que les Bretons dans leur ensemble ne se considèrent pas comme oppressés nationalement par la France, car ils sont français, la plupart des ligériens connaissent leur identité et leur héritage breton, tout en ne prêtant pas vraiment attention à la région Pays-de-la-Loire qui est surtout une entité administrative et technocratique abstraite.

De ce point de vue, il faut considérer que l’intégration de la Loire-Atlantique à la région Bretagne ne représente aucun progrès démocratique et populaire. Si cela peut être satisfaisant sur le plan personnel de voir reconnaître l’histoire et la culture bretonne de la Loire-Atlantique, ce qui n’est pas un aspect négligeable, il faut surtout considérer le contexte général motivant ce rattachement.

Le mouvement « breton » qui porte cette revendication est en effet largement réactionnaire. Il s’agit typiquement d’une mobilisation petite-bourgeoise hystérique, dévoyant une question démocratique au profit d’un idéalisme identitaire. Rien que la pseudo-langue bretonne inventée de toute pièce par des universitaires d’extrême-droite, qui n’a pas de réel rapport avec la langue populaire bretonne, est quelque-chose d’insupportable, qui en dit long sur le caractère réactionnaire, stupide, de ce mouvement.

Il faut aussi bien comprendre que l’actuelle région Bretagne entend se renforcer de l’intégration de Nantes dans une perspective régionale européenne, où il s’agit de tirer son épingle du jeu économiquement, en concurrence avec d’autres grandes région. Et il ne s’agit pas là que de tourisme, mais de tout un tas de considérations économiques capitalistes.

C’est dans ce contexte concurrentiel que le Président de la région Bretagne Jean-Yves Le Drian avait fait pression auprès de François Hollande contre la fusion de la Bretagne et des Pays-de-la-Loire en 2015, alors que c’était dans l’ordre des choses au regard des fusions ayant lieu pour d’autres régions françaises avec la loi NOTRe.

C’est dans ce sens également qu’il faut comprendre le vote la semaine dernière des élus du conseil régional de Bretagne se prononçant à l’unanimité en faveur d’un référendum sur le rattachement de Nantes et son département.

Que ce choix s’appuie sur une considération culturelle légitime à la base ne change rien au problème, au contraire. Il faut bien comprendre ici que la revendication identitaire sous-jacente est celle de l’autonomie bretonne, si ce n’est de l’indépendance au moins relative.

D’un point de vue progressiste, la Gauche ne peut pas accepter un tel pas en avant dans l’autonomisation d’un territoire. Cela représenterait un recul du cadre national, donc un recul démocratique. Le cadre national est l’expression historique la plus aboutie jusqu’à présent de la collectivité. C’est le cadre le plus démocratique possible à notre époque, celui dans lequel la Gauche historiquement s’affirme et affirme le point de vue de la classe ouvrière et de l’internationalisme prolétarien.

Une injustice culturelle, aussi importante soit-elle, ne peut pas justifier un tel démantèlement démocratique du cadre national au profit d’une région, d’un particularisme local qui serait par définition un retour en arrière.

Il faut saluer et reconnaître comme juste ici le vote majoritaire au conseil départemental de Loire-Atlantique, sous l’influence de son Président socialiste Philippe Grovalet, refusant d’activer le droit d’option du département en faveur de son rattachement à la région Bretagne.

Ce vote, reconnaissant largement dans les débats l’héritage culturel breton, est accompagné du vœu de s’en remettre à l’État pour régler cette question qui concerne la nation tout entière.

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Rétablir le Droit en le rendant universel

Tout régime prétend que le droit qu’il met en place est à la fois neutre et consacré à l’égalité de tous. En réalité, il s’agit là d’un droit relatif, bien éloigné du Droit comme système de référence universelle que seule la Gauche peut porter.

Le droit est quelque chose de compliqué : quand on lit le code pénal ou bien des propositions de loi, le langage est tourné de manière tellement bizarre que l’on y comprend rien. Pourtant, le droit ce n’est pas les juges, les avocats, les experts ; le droit c’est la civilisation et donc l’humanité elle-même.

Une vrai droit serait un Droit porté par chaque personne en tant que telle, et c’est d’ailleurs là l’idéal des Lumières. Emmanuel Kant est sans doute celui qui a écrit les lignes les plus intéressantes à ce sujet, avec son fameux « impératif catégorique ». Il faut que chaque individu ait assez de maturité pour se comporter de manière naturelle en citoyen, refusant ce qui ne devrait pas être fait, faisant ce qui doit être fait.

C’est là une exigence universelle propre à qui croit que le droit doit exister en amont, comme intégrité morale, et non pas en aval, comme punition d’un comportement dérangeant la société. Or, le droit aujourd’hui n’est vraiment plus que cela. Il est une sorte de rattrapage de ce qui provoque trop de troubles, sans rien de plus.

La société française ne vise plus à éduquer, à former les esprits. Libérale, elle se contente de stopper ce qui est trop perturbant pour l’ordre dominant, avec un dédain pour le droit comme principe de formation morale. Elle a abandonné le principe selon lequel « nul ne doit ignorer la loi » dans le sens d’une explication en amont à tout le monde de ce qui est légal ou pas ; elle est juste répression.

Une répression mal gérée, où l’on peut être un récidiviste sans permis et drogué écrasant une adolescente en récoltant juste quelques mois de prison, avec des prisons par ailleurs totalement surpeuplé, aux conditions innommables. Rien que cela reflète bien que la société française pétrie par le capitalisme n’a aucune idée de ce qu’elle doit faire du droit.

Gageons ici qu’elle avancera immanquablement vers la solution américaine, avec la privatisation du système des prisons. Personne n’en a parlé jusqu’à présent, mais on peut être certain que cela va arriver sur la table. C’est dans la logique propre au libéralisme, c’est aux entreprises de gérer ce qui relève des choix individuels, et le crime est un choix individuel selon lui.

La Gauche doit par conséquent réaffirmer le droit, non pas simplement en disant qu’il est mal géré par la droite, ou bien qu’il faut construire des écoles pour ne pas avoir à construire des prisons, comme l’avait formulé le chrétien-démocrate Victor Hugo. La Gauche doit poser l’universalisme du droit, réfutant son tronçonnage d’un droit à la carte (droit des entreprises, droit du travail, droit de ceci, droit de cela), qui divise la société.

Elle doit aussi briser l’inégalité du droit, c’est-à-dire le fait que selon qu’on soit puissant ou non, on n’ait pas le même résultat. Elle doit casser le langage obscur du droit, qui ne sert que les experts au même service des classes dominantes pour empêcher qu’on le saisisse.

Elle doit, surtout, réaffirmer la croyance en l’Homme, rétablir l’exigence des Lumières mais avec le matérialisme propre à la classe ouvrière. Cela signifie qu’elle doit exiger de chaque personne une haute mentalité citoyenne, et bien souligner que cette haute mentalité est la caractéristique d’une société socialiste.

Qu’est-ce que le communisme d’ailleurs selon Marx si ce n’est une société où il n’y a plus d’État ? Tout simplement une société où le droit est partout, assumé partout, dans un sens universel, ce qui fait qu’il n’est plus besoin de policiers ni de militaires pour s’opposer au crime, car il n’y a plus de crime, plus de crime possible.

Le capitalisme prétend bien entendu que c’est impossible, que c’est là une utopie, que l’Homme est mauvais par nature, que chacun ne cherche qu’à défendre ses intérêts particuliers. C’est là un point de vue de classe, qui reflète la compétition capitaliste. C’est une idéologie qui vise à empêcher l’affirmation de l’universel et de l’universalisme.

La Gauche donc avoir conscience de cela et comprendre la dimension essentielle du droit, qui doit devenir le Droit. C’est là un élément essentiel de toute affirmation d’un programme de société démocratique, fondé sur le peuple. Démolir la domination des experts et faire en sorte que le peuple saisisse le droit, c’est la base d’une ligne de Gauche.

Le capitalisme ne craint rien de plus que la justice populaire. Il ne veut surtout pas que le peuple se fasse juge. C’est pourquoi il présente le peuple comme infantile, brutal, opposé au droit. A la Gauche d’affirmer au contraire que le peuple c’est le Droit et le Droit le peuple, et que la classe ouvrière est la clef pour y parvenir.