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Politique

Le meeting de Vladimir Poutine du 18 mars 2022

Il synthétise l’idéologie de l’Etat russe et de sa guerre en Ukraine.

C’est une initiative politique au sens le plus pur du terme que Vladimir Poutine a pris le 18 mars 2022. Traditionnellement, le 18 mars est une journée de célébration à la fois patriotique et nationaliste du retour de la Crimée à la Russie en 2014. Cette fois, le paquet a été mis pour une démonstration de force alors que la Russie connaît une avalanche de sanctions de la part des pays capitalistes occidentaux et des pays qui leur sont directement reliés dans l’Est de l’Europe. 80 000 personnes se sont rassemblées dans le stade Loujniki à Moscou, 30 000 étant à l’extérieur devant des écrans géants, pour un concert avec, en son cœur, un discours de Vladimir Poutine.

La nature de ce discours est naturellement de la plus haute importance, puisqu’elle résume la position de l’État russe, qui plus est en quelques minutes seulement. Qu’a dit Vladimir Poutine? Il a commencé son discours déjà par les premiers mots de la longue phrase inaugurant la constitution de la Russie. Voici la phrase, les mots cités par Vladimir Poutine étant en gras.

« Nous, peuple multinational de la Fédération de Russie, uni par un destin commun sur notre terre, affirmant les droits et libertés de l’homme, la paix civile et la concorde, conservant l’unité de l’État historiquement constituée, nous fondant sur les principes universellement reconnus d’égalité en droit et d’autodétermination des peuples, vénérant la mémoire des ancêtres qui nous ont transmis l’amour et le respect de la Patrie, la foi dans le bien et la justice, faisant renaître l’État souverain de la Russie et rendant intangible son fondement démocratique, visant à assurer le bien-être et la prospérité de la Russie, mus par la responsabilité pour notre Patrie devant les générations présentes et futures, nous reconnaissant comme une part de la communauté mondiale, adoptons LA CONSTITUTION DE LA FÉDÉRATION DE RUSSIE. »

En quoi est-ce essentiel? Eh bien parce que si Vladimir Poutine rappelle ces mots pour célébrer le retour de la Crimée à la Russie, il entend en même temps souligner que la Crimée n’a pas été « siphonnée » par la Russie, mais qu’elle l’a rejoint dans une communauté de destin de type fédéral. Vladimir Poutine ne dit pas d’ailleurs « la Crimée », mais « la Crimée et Sébastopol », parce que dans la Fédération de Russie la ville de Sébastopol en Crimée a un statut de ville d’importance fédérale.

Maintenant si on raisonne sans être stupide, on comprend tout de suite ce que cela signifie pour l’Ukraine. C’est un appel du pied pour dire : n’ayez crainte, l’Ukraine ne sera en aucun cas englouti par Moscou, rejoignez la Russie pour être relié à d’autres structures de dimension fédérale, il y a tout à gagner à agir ainsi pour les régions ukrainiennes, pour les villes ukrainiennes significatives.

C’est là un point essentiel, qui se concrétise de manière symbolique à Marioupol, où l’armée met en première ligne des forces tchétchènes. Il s’agit là de souligner la dimension multi-ethnique, multi-nationale de la Russie, de manière marquée, et ce d’autant plus que ces forces se revendiquent de l’Islam et que Marioupol, c’est « la ville de Marie ».

Le bref discours de Vladimir Poutine y fait d’ailleurs référence. Il a cité les propos suivants, tirés de la Bible (Jean Chapitre 15, verset 13) :

« Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis. »

Et il a enchaîné en disant que c’était vrai pour toutes les nations et toutes les religions, que dans « l’opération spéciale » en Ukraine il y avait dans l’armée russe un tel sens du sacrifice les uns pour les autres, que les soldats luttent côte à côte, prêts à se jeter sur les balles pour empêcher les autres de mourir, etc. Il y a là la dimension mystico-religieuse de ce qui est bien entendu l’idéologie « eurasienne » de la Russie (qu’on trouve exposée dans l’article L’expansionnisme russe anti-ukrainien et sa base idéologique «eurasienne»).

« Pour un monde sans nazisme » (fond blanc)
« Pour la Russie » (fond bleu)
« Pour le Président » (fond rouge)
Avec à chaque fois un « Z » de l’alphabet latin remplaçant la lettre russe « З » se prononçant justement « Z »

On notera par ailleurs qu’il y a une forte dimension idéologique dans les forces tchétchènes en première ligne à Marioupol, car l’armée ukrainienne est là-bas composé des nazis du régiment Azov, d’ailleurs épaulés par des rebelles tchétchènes djihadistes. La ville en train de tomber dans les mains de l’armée russe va connaître un bain de sang, alors que déjà les hommes fuyant la ville voient leurs corps inspectés à la recherche de tatouages nazis.

Vladimir Poutine a conclu son discours en faisant référence à l’amiral Fiodor Ouchakov, qui a triomphé dans 40 batailles navales au 18e siècle, avant de se retirer sobrement près d’un monastère en Mordovie à la fin de sa vie. C’est une référence très subtile.

Il y a la dimension militaire, puisque l’amiral en question est resté victorieux, Vladimir Poutine rappelant que Fiodor Ouchakov voyait en ces batailles des orages qui glorifieraient la Russie. Il y a la dimension mystique puisque l’amiral est resté un pur loin des richesses et des intrigues de la Cour royale, il a d’ailleurs été canonisé par l’Église catholique orthodoxe russe en 2001.

Il y a une dimension impériale, car c’est à l’époque que la Crimée devient russe et c’est Fidor Ouchakov qui s’occupe de superviser la construction de la base navale de Sébastopol. Il a également supervisé la construction de docks d’une ville à 80 km de la Mer Noire si l’on remonte deux fleuves (le Dniestr et le Boug méridional), Kherson. Maintenant, si on dit que Kherson a été conquise par l’armée russe le 2 mars, on a tout compris…

On peut voir un large extrait du concert de Moscou ici. Et voici deux vidéos de chansons emblématiques qui y ont été joués par leurs chanteurs. La première, c’est la chanson d’Oleg Gazmanov, avec une chanson disant que mon pays c’est l’URSS (« je suis né en URSS »), avec la liste de tous les pays qui l’ont composé. Naturellement, l’Ukraine est mentionnée et ce même dès le départ.

La chanson est nostalgique de l’empire soviétique à 2000% et de par son ton, son approche, elle est une sorte d’inversion impériale « soviétique », prétentieuse et boursouflée, de la grande chanson de l’URSS des années 1930 « Vaste est ma patrie », d’orientation patriotique, « réaliste socialiste ». Elle a en même temps une fabuleuse dignité populaire pour les Russes, c’est d’une sincérité sentimentale débordante insaisissable pour les esprits cartésiens français. Il faut être russe sans doute pour avoir même la nostalgie du KGB, en effet..

La seconde, c’est la (fameuse et très belle) chanson Kukushka du groupe Kino (des années 1980), chantée par Polina Gagarina. La version de cette dernière est très connue pour avoir fait partie du film La bataille pour Sébastopol (en français « Résistance ») de 2015, un film (de qualité assez secondaire) sur la fameuse tireuse d’élite soviétique de la seconde guerre mondiale Lioudmila Pavlitchenko. La vidéo est pour le coup entraînante à souhait.

La présence des deux chanteurs avec ces deux chansons au concert moscovite en dit long, voire même résume tout.

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Guerre

La propagande occidentale sur Marioupol montre que l’OTAN veut dépecer la Russie

La démagogie est sans bornes.

20 000 mercenaires en provenance de 52 pays sont venus en soutien à l’armée du régime ukrainien, en provenance surtout de pays occidentaux, avec un esprit patriarcal-militariste et une idéologie totalement favorable au capitalisme occidental. C’est un phénomène de masse, qui a l’appui direct des États occidentaux. C’est là quelque chose d’une grande importance, car tout comme l’Ukraine sert de chair à canon pour la guerre indirecte à la Russie menée par l’OTAN, il y a une tentative de soutenir celle-ci de manière opérationnelle.

A cela s’ajoute naturellement la fourniture massive d’armements. La dernière en date est de 800 millions de dollars, décidée le 16 mars 2022 par le président américain Joe Biden (800 systèmes de défense anti-aérienne Stinger, 9 000 systèmes anti-char, 7 000 armes légères, 20 millions de munitions). C’est une autre preuve de l’engagement militaire occidental dans la guerre en Ukraine.

Et la preuve de cela, s’il en fallait une, ce sont les mensonges systématiques. La propagande sans bornes sur Marioupol reflète le positionnement conquérant des pays de l’OTAN, qui démonisent la Russie afin de justifier un programme de dépècement. Car les informations qui proviennent de Marioupol proviennent directement du régiment Azov, une structure nazie de l’armée ukrainienne. Ce que racontent les gens d’Azov est pris pour argent comptant, avec une intense rhétorique de commentateurs selon laquelle l’armée russe viserait de manière spécifique les civils, les femmes, les enfants, les maternités.

Il est pourtant absolument évident qu’on ne saurait prendre pour argent comptant ce qui est dit dans la guerre, venant d’un camp comme de l’autre. Et encore moins lorsqu’il s’agit d’un aspect clef de la guerre. Les nazis d’Azov ont ainsi fait de Marioupol, une ville de la région de Donetzk, une forteresse justement parce que c’est une ville russophone, avec des Russes faisant au moins un tiers de la population. Ils sont prêts à tout pour empêcher que cette ville tombe, même à utiliser la population civile comme bouclier, à raconter n’importe quoi.

L’affaire de la maternité bombardée est ici emblématique, avec la fameuse photo de l’instagrammeuse Mariana Vishegirskaya enceinte sur un brancard. La Russie avait prévenu plusieurs jours avant que cette maternité était occupée par le régiment Azov et qu’elle formerait une cible. C’est quelque chose d’aisément vérifiable sur les réseaux sociaux de l’État russe.

Quant au bombardement le 16 mars 2022 du théâtre dramatique régional de Marioupol, abritant des civils et où il était écrit « enfants » en grand au sol en russe, qui a particulièrement défrayé la chronique et horrifié, il apparaît que… l’abri anti-bombes aurait tenu et qu’il n’y a aucun mort. Il y a ici un réel problème. On ne peut que se dire que la Russie a raison d’accuser en fait le régiment Azov d’avoir fait exploser le bâtiment pour une opération psychologique.

Si on en est à s’imaginer que la Russie peut avoir raison – un comble vue que le régime justifie tout ce qu’il veut -, c’est que l’Ukraine ment autant, son appareil d’État ou plus précisément les services secrets étant pareillement en provenance directe de l’URSS des années 1980 et de ses opérations d’intoxication. C’est intoxication sur intoxication, avec un storytelling ininterrompu, qui sert à mobiliser, à manipuler l’opinion. Et les intoxicateurs ne dévient jamais de leur perspective, même si ce qu’ils racontent est faux et qu’ils ne peuvent pas ne pas le savoir.

Le Times of Israel a expliqué par la suite le 4 mars que le mémorial n’a pas été touché en réalité. Ce qui n’empêche pas le 6 mars des propagandistes de continuer à parler même d’un bombardement ciblé (alors que même le régime ukrainien parlait de dégâts indirects).

Tout cela a un sens : la mobilisation générale pour faire tomber la Russie. Seuls des bourgeois ou des valets de la bourgeoisie peuvent prendre pour argent comptant les discours officiels sur la « démocratie ». On est ici dans la bataille pour le repartage du monde, c’est la grande actualité, c’est la question clef de la marche du monde désormais, tout dépend d’elle. Qui ne le voit pas converge avec un camp aux visées impériales.

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Politique

La position chauvine du Parti communiste de la fédération de Russie sur la guerre en Ukraine

Lénine peut se retourner dans sa tombe.

Né en 1993, le Parti communiste de la Fédération de Russie est le successeur du Parti Communiste d’Union Soviétique qui a dirigé l’URSS ; il est sur une ligne mêlant affirmation des acquis sociaux « soviétiques » et nostalgie de l’époque où l’URSS était une grande puissance dans les années 1970-1980. Son dirigeant est Guennadi Ziouganov et c’est le principal parti d’opposition en Russie. Le parti « Russie Unie » de Vladimir Poutine fait grosso modo plus de 50%, le Parti communiste de la Fédération de Russie tout de même autour de 20% en comptant qu’il y a un bourrage des urnes en sa défaveur.

Le Pôle de Renaissance Communiste en France, qui en est très proche idéologiquement, a traduit un article exprimant sa position du 14 mars 2022, formulé par l’un de ses dirigeants, Viatcheslav Tetekin (Ukraine : ce qu’en disent les communistes russes du KPRF). Ce qu’on lit est simple : le régime russe est réactionnaire, mais… il défend les intérêts nationaux, donc il faut le soutenir. Ce qui contredit directement la thèse de Lénine selon laquelle l’ennemi est dans son propre pays. Lénine, en suivant la ligne du Parti communiste de la Fédération de Russie, aurait dû finalement bien soutenir le tsar afin de défendre les « intérêts nationaux »…

Voici comme cela est présenté : la politique étrangère expansionniste, c’est très bien, par contre sur le plan intérieur il faut davantage de social.

« Depuis 30 ans, je suis l’un des critiques les plus actifs de la politique intérieure et étrangère de l’élite russe. Dans son caractère de classe, le pouvoir oligarchique-bureaucratique en Russie n’est pas très différent du pouvoir en Ukraine (sauf sans fascisme et sans contrôle total des États-Unis).

Cependant, dans les cas malheureusement rares où les dirigeants russes poursuivent une ligne qui répond aux intérêts historiques du pays et du peuple, le principe de la critique « automatique » n’est guère approprié.

Je fais valoir depuis longtemps que les sanctions auront un effet bénéfique sur la suppression de la dépendance imposée par la Russie à l’égard de l’Occident dans divers domaines de la vie.

Le gouvernement russe fait déjà les premiers pas dans cette direction. La tâche des forces de gauche est d’encourager vigoureusement les autorités à changer non seulement la politique étrangère, mais aussi le cours socio-économique, qui ne correspond pas aux intérêts du peuple. »

Comment peut-on dire que Vladimir Poutine et ce qu’il représente – l’oligarchie et le complexe militaro-industriel russes – peuvent défendre les « intérêts historiques du pays et du peuple »? C’est aberrant. C’est typiquement la position sociale-chauvine prise pratiquement partout en 1914 : notre pays a un régime mauvais, mais celui d’en face est pire, il faut donc soutenir la guerre et il en ressortira quelque chose bien car l’ennemi le plus mauvais aura été supprimée, etc.

Car dans son article, Viatcheslav Tetekin dit bien de l’Ukraine que :

« La nature de l’État ukrainien actuel est une alliance du grand capital et de la bureaucratie de l’État, s’appuyant sur des éléments criminels et fascistes sous le plein contrôle politique et financier des États-Unis.

Enlevons comme le dit Viatcheslav Tetekin le fascisme et la soumission à la superpuissance américaine. Il reste tout de même une « alliance du grand capital et de la bureaucratie de l’État » – et c’est cette alliance qui serait capable d’orienter correctement les intérêts de la Russie comme nation, des Russes comme peuple? Lénine peut se retourner dans sa tombe. C’est la négation de la lutte des classes au profit d’une conception nationale tout à fait bourgeoise validant les intérêts de l’oligarchie russe dans son expansionnisme.

Ce que fait d’ailleurs le Parti communiste de la fédération de Russie depuis trente ans. C’est ce parti qui a ouvert la voie à la catastrophe en demandant au parlement russe la reconnaissance des républiques séparatistes du Donbass – permettant à Vladimir Poutine de s’engager dans l’invasion de l’Ukraine au nom d’une exigence « nationale ».

Cela ne veut pas dire que le régime ukrainien n’était pas (et n’est pas) une plate-forme de l’OTAN contre la Russie. Mais il faudrait savoir si oui non la thèse de Lénine et de Rosa Luxembourg comme quoi l’ennemi dans son propre pays est juste ou pas.

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Société

La société française consomme la guerre en Ukraine

Il n’y a pas de prise de conscience, seulement du subjectivisme.

La guerre en Ukraine est un événement d’une importance à la fois historique et mondial, et il faut ici souligner à quel point le fait de l’annoncer depuis avril 2021 n’a strictement rien changé pour agauche.org. Cela ne nous étonne pas du tout, nous l’avions anticipé, parce que nous savons qu’aucune prise de conscience ne peut avoir lieu spontanément en général, et en particulier avec une société capitaliste enserrant les gens jusque dans leur vie privée.

Les gens ont l’habitude de consommer et, partant de là, ils consomment même les événements les plus importants. Tout comme pour la pandémie, les gens basculent dans le subjectivisme pour interpréter les choses à « leur manière », en délirant plus moins, afin de consommer ce qui est nouveau. On dira ici : un événement n’est pas une marchandise. Oui, mais il est prétexte à des marchandises. Les réseaux sociaux sont emblématiques de comment les faits eux-mêmes sont utilisés pour que les gens « s’expriment » de manière du subjectiviste, participant ainsi au grand marché capitaliste.

Le régime ukrainien l’a bien compris d’ailleurs, en fournissant une liste sans fin d’intoxication consommable, faux de bout en bout : le pilote « fantôme de Kiev » qui aurait abattu le premier jour plusieurs avions russes, les soldats sur l’île des serpents tués après avoir « envoyé se faire foutre » le navire de guerre russe, la destruction du mémorial du massacre nazi de Babi Yar, le président Volodymyr Zelensky ayant fait un duo musical épris de paix avec sa femme juste avant la guerre, etc.

Le régime russe génère évidemment des consommables de la même manière, avec largement moins de succès et se focalisant surtout sur l’élection présidentielle à venir, mettant le paquet en ce moment en mode « tout sauf Macron » sur ses multiples médias.

Cependant, le problème n’est pas ici de manière principale que le capitalisme mette en avant la consommation, un style de vie appelant à la consommation. Le problème, ce sont les gens eux-mêmes, totalement aliénés. Même en admettant que la centaine d’articles publiés depuis avril 2021 sur la guerre à venir en Ukraine soient erronés, il y aurait dû y avoir un incroyable boom du lectorat, au moins par curiosité intellectuelle. Seulement, cet effort de l’intellect, les Français n’en veulent pas, ils veulent du twitter, de l’instagram, des remarques à l’emporte-pièce, des petites analyses stéréotypées.

Emmanuel Macron présente un excellent exemple de cela, avec les photos de la mi-mars mises en avant par sa photographe officielle Soazig de la Moissonnière, avec un hoodie CPA 10 (Commando Parachutiste de l’Air nᵒ10, une formation chargée de la protection des sites). Il a compris qu’il devait lui aussi donner une touche personnelle – en fait subjectiviste, pour être en phase avec la période.

C’est un mélange de paresse et de stupidité, ou plus exactement de suractivité nerveuse et d’intelligence entièrement orientées par le capitalisme. Il faut montrer qu’on est dépassé individuellement, mais que ce n’est pas « réel » ce qui se passe, ou du moins pas essentiel – c’est un événement « hors » capitalisme, qu’on peut prendre « comme on veut ». On prend au sérieux, et en même temps non. C’est du consumérisme.

Ainsi, le subjectivisme s’ajoute au subjectivisme, avec un jeu de surenchère, d’utilisation de préjugés, d’analyses superficielles, etc. Pour l’Ukraine c’est encore plus flagrant, car les Français ne connaissent rien à ce pays ne sachant ni où cela se situe, ni qui sont ses habitants, sans parler de la culture ou du parcours historique.

Comme en plus il faut ajouter la Russie, terre de fantasmes médiatiques, ainsi que l’OTAN, et puis la Chine, tous les pays d’Europe… là on perd carrément pied à moins d’un véritable effort prolongé, d’une ténacité intellectuelle qui ne peut être que politique.

C’est là un point essentiel : lorsque l’Histoire avance, le privé devient politique de manière flagrante, tout comme le politique devient privé. S’intéresser ou ne pas s’intéresser à telle chose a une dimension politique fondamentale. La question des animaux est un exemple notable : qui ne se tourne pas vers elle se détourne de son époque.

Et ce qui est terrible, c’est que plus l’époque fournit des défis, plus les gens fuient. C’est véritablement un effondrement civilisationnel.

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Guerre

Les exécutions sommaires dans la guerre en Ukraine

Elles sont nombreuses, inéluctablement.

Il n’y a strictement aucune information à ce sujet, et pour cause : la guerre en Ukraine n’est pas menée par des armées populaires, soucieuses de la légalité démocratique. Le régime ukrainien veut se maintenir coûte que coûte, et les nationalistes ukrainiens l’épaulent veulent élargir leur champ d’action. L’armée russe entend amener un changement de régime, aussi entend-elle se débarrasser des cadres administratifs et politiques gênants.

Aussi, de manière certaine, les exécutions sommaires sont nombreuses, voire très nombreuses. Il est certain, de par la nature du régime ukrainien, que des gens considérés comme favorables à la Russie ont été supprimés. Cette tendance existait déjà avant l’invasion russe, avec les nationalistes ukrainiens maintenant la pression pour étouffer toute opposition. Elle ne peut qu’avoir été systématisée, de par la tension et de par la diffusion massive d’armes. Des gens sont supprimés pour ne pas être en mesure d’épauler l’armée russe, c’est évident.

Du côté russe, il faut assurer le contrôle des zones envahies lors d’une invasion, une chose très difficile, rendant d’autant plus nécessaire la mise hors d’état de nuire des menaces potentielles. Il ne faut pas s’attendre à autre chose de l’envahisseur qu’est une armée russe entendant imbriquer l’Ukraine dans la Russie. C’est un passage en force et l’objectif est de supprimer ce qui est hors du cadre attendu par l’invasion.

Il est d’ailleurs totalement stupide de considérer que la Russie espérait une victoire rapide, comme la propagande occidentale ne cesse de le dire. Si une victoire rapide était possible, alors c’est que le régime ukrainien était faible et la Russie n’aurait justement pas envahi, considérant encore comme possible un renversement du gouvernement, un changement de régime. C’est précisément parce que la Russie savait que le régime ukrainien s’était solidement implantée, sous l’égide occidentale, que la solution militaire a été considérée comme incontournable, afin de réorganiser l’appareil d’Etat ukrainien (en le divisant par une décentralisation régionale, en changeant le personnel dirigeant et les cadres administratifs, etc.).

Cette situation où un régime fait face à une intervention militaire pour imposer un nouveau régime n’est nullement révolutionnaire, mais l’antagonisme reste violent, puisque c’est littéralement personnel étatique contre personnel étatique, monopole de la violence contre monopole de la violence, cadres administratifs contre cadres administratifs.

La liquidation de cadres ukrainiens existants ou de cadres pro-russes potentiels est donc clairement un aspect non-dit, mais ayant résolument lieu. Il y a depuis le début de la guerre forcément une grande purge, qui doit être particulièrement vindicative et sanglante. Dès le déclenchement de la guerre, le régime ukrainien a forcément déclenché immédiatement une opération de liquidation, tout comme la Russie a cette pratique dans ses plans d’occupation.

On apprendra cela après la fin de la guerre, même si la vérité est toujours difficile à connaître lorsque les situations militaires sont extrêmes, comme avec les villes assiégées, les contrôles militaires et la censure, la propagande, etc. Mais il faut déjà avoir conscience de cet aspect pour saisir ce qui se passe en Ukraine.

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Guerre

Guerre en Ukraine : la prochaine entrée de la Chine dans le grand jeu

La Chine va entrer en scène dans le repartage du monde.

Faire de la politique, c’est analyser le monde, présenter des évolutions à venir et fournir des positions afin d’orienter ses activités dans un sens ou dans un autre. Tout le reste est un accompagnement d’un présent en train de disparaître. Et de la même manière qu’en avril 2021, agauche.org avait annoncé le caractère inévitable de l’invasion russe de l’Ukraine, il est nécessaire d’affirmer que la Chine va rentrer en scène, enclenchant une dynamique devant la mener, espère-t-elle, au statut de superpuissance.

On dira qu’il n’y a pas forcément grand risque à dire cela, puisque cela semble une évidence. Cependant, il faut bien voir que l’ensemble des analystes dit que la Chine continue d’attendre, qu’elle n’a nullement envie de s’engager aux côtés de la Russie, bref qu’elle va en rester à la ligne qu’elle a depuis les années 1990 : investir le surplus financier à l’étranger tout en modernisant l’armée, prétendre vouloir un ordre mondial de coopération en espérant une « concorde universelle » à venir, renforcer les influences chinoises, etc.

Cette analyse est totalement fausse, car elle ne saisit pas le changement d’époque provoquée par la pandémie. Le capitalisme est entré dans le mur et il y a l’objectif de rattraper la croissance perdue par une expansion forcée, l’objectif pour chaque grande puissance étant de rester debout tout en faisant vaciller les concurrents. Objectivement, cette compétition mène à la guerre.

La Chine est ici le grand challenger, c’est la puissance désireuse de remplacer la superpuissance américaine pour l’hégémonie mondiale. Par conséquent, loin d’être un facteur de stabilité pour une croissance « discrète », sur les côtés pour ainsi dire, de l’ordre mondial, la Chine est le principal facteur de troubles. Historiquement, la Chine prend aujourd’hui la place qu’avait la puissance soviétique expansionniste des années 1970, avec sa monstrueuse bureaucratie fasciste et son armée gigantesque s’appuyant sur un complexe militaro-industriel engloutissant une large partie de l’économie.

Partant de là, la Chine va nécessairement rentrer en scène dan le cadre de la guerre en Ukraine. Sous quelle forme ? Cela va se décider concrètement, mais ce sera de telle manière à ajouter au grand vacillement recherché dans l’objectif de bouleverser l’ordre mondial. Et ce sera visible, reconnaissable. On pourra aisément voir que la Chine rentre en scène dans la grande bataille pour le repartage du monde, ce sera en quelque sorte un appel historique.

Ce point de vue est, au sens strict, totalement différent de ceux qui ne voyant pas les contradictions mondiales, s’imaginent qu’il y a d’un côté un ordre « impérialiste » et de l’autre… on ne sait trop quoi. C’est la ligne de pratiquement toute la Gauche française lorsqu’elle n’est pas ouvertement pro-OTAN. Les publications du PCF encensent la Chine, et même quand il y a une distance critique, il y a toujours une attirance indirecte pour les « trublions » venant perturber l’ordre dominant. Nathalie Arthaud, candidate de Lutte Ouvrière à la présidentielle 2022, explique ainsi au sujet de la guerre en Ukraine que :

 « On a affaire à une guerre entre brigands, entre Poutine et le camp impérialiste. »

Car la Russie serait… on ne sait quoi, tout comme Cuba, la Palestine, le Venezuela, la Syrie, la Chine, le Donbass séparatiste, voire la Corée du Nord pour les plus excentriques, délirants et malsains. Nathalie Arthaud n’a bien entendu aucune sympathie pour la Russie. Pourtant, indirectement, elle pose un ordre mondial et des forces détestables s’y confrontant, ce qui amène à réfuter la concurrence internationale, la compétition pour le repartage du monde. Partant de là, personne ne voit la guerre.

C’est bien pourtant un pas vers la 3e guerre mondiale qui est fait avec la guerre en Ukraine, avec comme protagonistes principaux la superpuissance américaine et son challenger chinois. Le grand processus de remise en cause de l’ordre mondial commence – et la Chine va commencer à peser de tout son poids pour que la stabilité soit déchirée, pour que celle-ci se reconstitue sur une base lui étant directement favorable, lui permettant l’hégémonie.

La Chine ne saurait rester à l’écart de la bataille pour le repartage du monde – alors qu’elle représente l’aspect principal des troubles allant dans le sens de ce repartage !

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Société

Facebook et Instagram autorisent à appeler à tuer Vladimir Poutine et les soldats russes

C’est le branle-le-bas de combat.

De nombreuses entreprises de la superpuissance américaine ont une présence massive dans la vie quotidienne des gens, aussi profitent-elles pour influencer massivement les mentalités. Le « venez comme vous êtes » de McDonald’s est emblématique du libéralisme libertaire, et toutes les grandes entreprises américaines font évidemment également la promotion de l’idéologie LGBTQ.

On a la preuve de cela avec l’initiative de Meta, l’entreprise qui possède Facebook et Instagram. Sur ces deux plate-formes, les appels à la violence sont normalement récusés, mais ils sont désormais autorisés sous une certaine forme pour les pays suivants : l’Arménie, l’Azerbaïdjan, l’Estonie, la Géorgie, la Hongrie, la Lettonie, la Lituanie, la Pologne, la Roumanie, la Russie, la Slovaquie et l’Ukraine. On parle ici d’appels à tuer le président russe Vladimir Poutine, le président biélorusse Alexandre Loukachenko, les soldats russes.

On ne parle pas que de l’Ukraine ici ; il s’agit clairement d’ouvrir un véritable espace politique sur Facebook et Instagram dans toute une série de pays, dans le sens d’une mobilisation au service de l’OTAN. Quand on dit politique, c’est naturellement sous une forme primitive, irrationnelle, immédiatiste, propre à ces réseaux sociaux consommateurs. C’est de l’émotion vite fait mal fait, avec une expression minimale relevant d’une conscience consumériste.

C’est aussi une manière de valider a posteriori les messages plus ou moins délirants appelant à la violence contre la Russie. Inna Shevchenko a décidé de battre tous les records en ce domaine d’ailleurs. Désormais elle raconte que la Russie menace ouvertement d’attaquer des avions commerciaux (la porte-parole du ministre des affaires étrangères parlant en réalité du marché noir découlant de l’arrivée massive d’armes occidentales). Il faudrait donc que l’OTAN intervienne, etc. Elle n’a jamais parlé de l’Ukraine avant l’invasion, ne s’en inquiétant jamais, et là elle eut une guerre à l’échelle continentale, à l’abri depuis Paris – c’est typique des réseaux sociaux.

Ce n’est pas tout : la valorisation du bataillon Azov – mis en place par les nazis et désormais une composante de l’armée ukrainienne – est désormais acceptée sur Facebook et Instagram. Ce qui a le mérite d’être absolument clair sur l’engagement total de Meta au service du régime ukrainien, dont le bataillon Azov est un dispositif d’appui essentiel.

Il n’y a là, somme toute, rien d’étonnant, même s’il est marquant que le monde des réseaux sociaux, qui se veut bisounours – LGBTQ – ultra-individualisme, assume désormais la propagande belliciste à l’occasion d’une guerre. Cependant, cela montre qu’il y a bien un 24 heures sur 24 du capitalisme, que la forme même des produits capitalistes tend à un certain style de vie.

Qui est prisonnier des réseaux sociaux, qui va au McDonald’s, se goinfre de séries…. et la liste est longue des objets capitalistes de consommation au quotidien, se voit inéluctablement corrompu d’une manière ou d’une autre. Le capitalisme est omniprésent et il ne suffit pas de prétendre le critiquer ou de vouloir le renverser, il faut une approche qui soit capable d’en vaincre l’emprise.

Sans cela, d’une partie de la solution qu’on veut être, on reste une partie du problème.

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Politique

Guerre en Ukraine : la tentative de retournement de veste du PRCF

L’invasion russe est bien une invasion russe… Pour certains c’est dur à avaler.

Le Pôle de Renaissance Communiste en France (PRCF) représente historiquement la majorité de l’aile gauche du PCF des années 1990 ; ayant pris depuis son indépendance, il propose un retour au PCF des années 1970. Il y a une dimension nostalgique qui colle tout à fait à l’idéologie des « républiques populaires » du Donbass séparatiste et le PRCF n’a pas jamais caché son intérêt pour celles-ci, voire pour la Russie considérée comme en quelque sorte anti-impérialiste malgré elle-même. Or, l’invasion russe change la donne… et le PRCF tente de retourner sa veste.

Le 28 janvier, l’article « Qui menace la paix en Ukraine ? » sur le site du PRCF disait que la Russie n’a aucune intention d’envahir l’Ukraine, que c’est un mensonge que de le prétendre, que c’est de l’hystérie anti-russe (le ministère russe des affaires étrangères disait la même chose), c’est une « menace imaginaire ».

« Pour les obsédés de l’ogre moscovite, la Russie a tous les torts. Elle ne se contente pas de menacer l’Ukraine en massant ses blindés à ses frontières, elle veut aussi installer à Kiev un pouvoir pro-russe. Singulière inversion accusatoire, qui attribue à Moscou la politique menée par les Occidentaux dans un pays qu’ils ont vassalisé à coup de subventions en espérant le transformer en futur joyau de l’OTAN (…).

Aucun char russe ne foule le territoire ukrainien, et Moscou a toujours recommandé, pour résoudre la crise interne, une solution négociée de type fédéral ménageant les intérêts des différentes composantes du peuple ukrainien. Il est ahurissant de voir l’OTAN stigmatiser la Russie pour sa politique à l’égard de ce pays, alors que la seule armée qui tue des Ukrainiens est celle de Kiev, qui bombarde quotidiennement les populations civiles des républiques sécessionnistes de Donetsk et Lougansk.

C’est l’agressivité irresponsable de cette armée, noyautée par les ultra-nationalistes et portée à bout de bras par les puissances occidentales, qui entretient un climat d’affrontement. C’est l’hystérie antirusse des puissances occidentales qui jette de l’huile sur le feu dans la région, et non cette menace imaginaire contre l’Ukraine que les affabulateurs de la presse atlantiste attribuent à la Russie. »

On est là juste un mois avant l’invasion. Qu’en est-il quinze jours avant l’invasion? C’est le même discours, le PRCF se moquant violemment de la thèse de l’invasion, le 6 février 2022, dans « La véritable invasion de l’Ukraine que les médias ne vous racontent pas » :

« Tous les jours depuis quelques semaines on nous annonce l’ « imminente » invasion russe de l’Ukraine sur les médias mainstream, nous rappelant un peu le vieux gag des comédies où le protagoniste est dans une action qu’il ne termine jamais, comme la fameuse scène de l’assaut du Château des marais par Lancelot dans le Sacré Graal des Monty Pythons. »

Le 7 février 2022, dans « Ukraine : l’Axe USA-UE-OTAN veut la guerre et déploie massivement troupes, bombardiers et missiles !« , il est expliqué que la Russie ne veut pas la guerre, elles même désignée comme « raisonnable », tout est uniquement de la faute de l’OTAN :

« Le prétexte est tiré de manœuvres militaires de la Russie sur son sol et de la Biélorussie également sur son sol. Rien de très provocant faut-il bien reconnaître pour n’importe quel observateur (…). La Russie et la Biélorussie mènent des exercices militaires, sur leur sol, dans l’intérieur de leurs frontières. Rien que de très respectueux du droits international, de leur souveraineté et de leur droit à se défendre (…).

Moscou appelle d’une part à cesser l’escalade militaire, soulignant combien ces provocations sont dangereuses. D’autre part à la diplomatie. En affichant des propositions simples. L’absence de présence supplémentaire de l’OTAN à ses frontières. C’est-à-dire que l’Ukraine et la Géorgie ne puissent rejoindre l’OTAN. En rappelant tout particulièrement l’absence de bases russes aux frontières des USA et même plus largement sur le continent américain.

Une position tellement raisonnable qu’un des chefs d’état-major de l’armée allemande, sans doute soucieux d’éviter la guerre à laquelle pousse l’Axe USA-OTAN-UE, s’est cru autorisé à approuver. Avant d’être immédiatement limogé. »

Avançons encore davantage. Le 21 février, soit trois jours avant l’invasion, alors que la tension est immense, rien n’a bougé. On lit dans l’article « En Ukraine, seul l’hégémonisme des États-Unis a intérêt à la guerre » la chose suivante, même si le titre veut tout dire :

« La Russie veut l’application des accords de Minsk et notamment la fédéralisation de l’Ukraine, laquelle permettrait de concilier les intérêts des deux parties en présence : l’octroi effectif de l’autonomie qui avait été promise garantirait les droits de la minorité russophone du Donbass tout en préservant l’intégrité territoriale ukrainienne, comme le demande à juste titre le gouvernement de Kiev.

Il est évident que pour atteindre ce double objectif, Moscou ne veut surtout pas d’une escalade militaire qui en compromettrait au contraire la réalisation. Car seul un processus politique est de nature à ménager une sortie de crise respectant les desiderata des uns et des autres.

La guerre ou la paix, il faut choisir. En demandant à l’OTAN de ne pas s’étendre davantage, la Russie a fait le choix de la paix par la négociation, et non d’un affrontement militaire qui justifierait, précisément, la mise en place d’un bouclier occidental destiné à soutenir l’Ukraine.

Qu’en est-il lorsque l’invasion se produit? Eh bien, dans l’ordre des choses, le PRCF ne considère pas que c’est une invasion, reprenant l’argumentation russe que c’est une sorte d’opération de police. La déclaration du Secrétariat National du PRCF du 24 février 2022 Sur la situation en Ukraine est totalement erronée en ce qu’il ne comprend toujours pas ce qui se passe. Il n’est toujours pas compris qu’il y a une invasion russe, il s’imagine qu’il y a seulement une sorte de petite intervention…

« Tout en constatant que le régime fascisant et pro-nazi de Kiev est le responsable et l’instigateur unique de l’agression permanente contre les Républiques populaires et ouvrières du Donbass, le PRCF considère comme disproportionnées et inconsidérées les attaques russes visant les installations militaires de Lviv et Kiev. »

En clair : la Russie « exagère ». Sauf que depuis elle a continué d’exagérer à un point où il n’est plus possible simplement de dire cela. Alors le PRCF retourne sa veste. Cela ne s’est pas produit immédiatement. D’abord il y a le 27 février 2022 un rapport extrêmement détaillé de la situation militaire de la guerre, « Ukraine : le point sur la situation militaire au 27 février avec d’importantes avancées de l’armée russe« . Cet article, qui expose l’avancée russe comme très efficace, a trois particularités. La première, c’est qu’il se veut une simple présentation militaire des faits. La seconde, c’est que la Russie est présentée comme ayant une démarche « noble », contrairement à l’Ukraine. La troisième, c’est que cette présentation des opérations est extrêmement pointue, formant même du jamais vu, tant à ce moment-là que depuis le début de la guerre.

Cet article n’a pas été suivi d’autres du même type. Et deux articles, deux semaines après le début de la guerre, viennent modifier entièrement la ligne. On a ainsi tout d’abord la Déclaration du Comité central du PRCF « Sortir définitivement de la guerre en Ukraine » du 6 mars 2022. Le début de la déclaration souligne tout de suite qu’il y a une « modification » :

« Le 24 février 2022, à la suite de l’attaque militaire soudaine de la Fédération de Russie envers l’Ukraine, le Secrétariat national du PRCF a publié une déclaration adoptée à l’unanimité au sujet des dramatiques événements survenant à l’est de l’Europe. Cette déclaration a pu donner lieu à des échanges entre camarades au sujet de la responsabilité de l’attaque et des buts de guerre. A ce sujet, tout en appuyant la déclaration du 24 février, le Comité central du PRCF tient à préciser que : »

Suit alors le classique discours du PRCF jusque-là, avec une remise en cause légèrement plus prononcée de la Russie :

« Il n’en demeure pas moins qu’en attaquant militairement l’Ukraine, Vladimir Poutine a pris une décision grave avec le risque de conséquences « disproportionnées et inconsidérées », surtout en cas d’enlisement du conflit qui pourrait dès lors se révéler encore plus meurtrier pour les travailleurs et les citoyens d’Ukraine, aussi bien de l’Ouest que de l’Est »

Puis, il y a des remerciements pour l’appel à des précisions :

« Voilà pourquoi, dans la continuité de la déclaration du 24 février 2022, et tout en remerciant les camarades qui ont communiqué leurs réflexions dans le cadre du centralisme démocratique… »

Suivent alors des mots d’ordre. On devine bien qu’il s’est passé quelque chose et surgit alors le très long article « Les quatre moteurs de la Russie poutinienne« , le 9 mars 2022, écrit par Fadi Kassem, secrétaire national du PRCF. On parle ici de quelque chose faisant l’équivalent de 12 pages A4. La phrase en gras au début de l’article indique son but :

« on ne saurait faire l’économie de l’analyse concrète de la politique poutinienne, partiellement aux antipodes de l’URSS « 

Quelque chose aux antipodes, on sait ce que c’est, mais « partiellement aux antipodes ? On comprend le fond du problème : le PRC n’a pas envie de critiquer la Russie, parce que cela amènerait à remettre en cause l’URSS des années 1980 d’où provient directement la Russie d’aujourd’hui. En même temps, la guerre part d’une invasion russe et le PRCF ne peut plus se contenter de présenter la Russie comme une pauvre victime.

Il y a donc, pour la première fois, une analyse de la Russie, critiquée pour valoriser le nationalisme chauvin grand-russien ; il est même dit :

« La Russie poutinienne cherche à restaurer une influence impériale dans la lignée de l’Empire tsariste (…).

L’offensive impérialiste a bien commencé il y a huit ans en Ukraine, sous l’impulsion centrale des États-Unis, à laquelle répond aujourd’hui, bien plus qu’une contre-offensive néo-tsariste, une offensive contre-hégémonique de la part de Russie. Car il est douteux que « les oligarques » aient déterminé l’offensive sur l’Ukraine qui, de manière prévisible, ne pouvait que déboucher sur d’énormes sanctions économiques… et sur la confiscation des biens oligarchiques détenus en Occident, par exemple à Monaco et sur la Côte d’Azur. »

Seulement voilà, si la Russie a des ambitions néo-tsaristes, tout ce que le PRCF a expliqué sur la Russie avant l’invasion russe de l’Ukraine était faux. La Russie avait bien des ambitions impériales, donc dire pendant des mois qu’elle voulait la paix, c’était tromper les masses, masquer le caractère inéluctable de l’affrontement pour le repartage du monde.

L’article de Fadi Kassem tente de s’en sortir en parlant d’un « impérialisme du pauvre », forcé par le cours des événements à intervenir en Ukraine pour faire face à la pression de l’OTAN. C’est vrai… du point de vue des ambitions néo-impériales russes. Faut-il soutenir ces ambitions? Faut-il interpréter les choses de manière « géopolitique », en cherchant à se « placer »? Pas du tout.

Et s’aveugler à ce niveau, c’est ne pas être capable de voir que la Russie relève de la tendance à la guerre, comme l’a fait le PRCF avant l’invasion, et comme il continue de le faire en cherchant à se contorsionner par des évaluations géopolitiques. Avoir l’OTAN comme obsession en étant incapable de constater les contradictions à l’oeuvre dans le monde est une erreur fondamentale – et c’est même la faute principale du PRCF, qui nie les contradictions au sein des pays capitalistes, au point de voir en la France un pays « opprimé » par la superpuissance américaine, ce qui justifierait un « patriotisme » n’étant en fait qu’un nationalisme de gauche.

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Société

Bourrage de crâne halluciné sur les Russes menant un « effacement » des Ukrainiens

C’est parti comme en 14.

C’est un phénomène de société : chacun y va de son grain de sel, reprenant à sa sauce le bourrage de crâne des couches dominantes de la société. C’est un grand laisser-aller dans le n’importe quoi, dans un grand mouvement de convergence avec l’OTAN.

Car la chose est entendue : les Russes massacrent les Ukrainiens, alors qu’ils rasent les villes. Et ils sont prêts à employer l’arme nucléaire. Poutine est un fou. Tel est le mot d’ordre, inlassablement repris par tous les médias se satisfaisant de la France capitaliste.

Le Canard enchaîné du 9 mars 2022

La Russie serait en effet en train de perdre la guerre, son armée inefficace et rétive s’effondrant sous les coups de l’armée ukrainienne et de la population ukrainienne révoltée en général. Le prétendu « blitzkrieg » contre une armée de 300 000 hommes dans un pays de grande taille espéré par le président russe Vladimir Poutine – présenté à la fois comme un malade en phase terminale et un psychopathe désireux d’appuyer sur le bouton nucléaire – aurait échoué.

C’est une propagande caricaturale, et systématique. A l’image du secrétaire d’Etat américain comparant de manière négationniste le siège de la ville de Marioupol… à celui de Leningrad. Incroyable ! Mais une telle propagande a deux raisons directes. Tout d’abord le frère de Vladimir Poutine est mort lors du siège de Leningrad. Et Marioupol encerclé a comme noyau dur de l’armée ukrainienne les fascistes du bataillon Azov, qui forment un élément essentiel du régime ukrainien qu’il s’agit de sauver à tout prix du côté américain.

Ce bourrage de crâne est un appel à la mobilisation pro-OTAN, à l’image de pseudos artistes faisant des tracts sous la forme d’avions en papier au musée Guggenheim de New York, appelant à fermer l’espace aérien de l’Ukraine, car les Russes voudraient… faire sauter la plus grande centrale nucléaire pour « effacer » les Ukrainiens. Délirant!

Le terme « effacer » se retrouve chez la Femen Inna Shechenko – qui rappelons-le n’a jamais parlé de l’Ukraine avant le déclenchement de l’invasion russe.

Tout cela correspond directement au concept du prétendu « holodomor », inventé dans les années 1980 aux Etats-Unis sur la base de la propagande des nationalistes ukrainiens émigrés. Les Russes auraient tenté, dans les années 1930, de sciemment génocider les Ukrainiens en les faisant mourir de faim. Il ne s’agit pas, comme on le lit souvent, d’un événement qui serait lié à la collectivisation des terres agricoles (les fameux kolkhozes et sovkhozes). Pour les tenants du « holodomor », dont la superpuissance américaine, le régime ukrainien, etc., il y aurait eu un véritable plan machiavélique des Russes pour exterminer les Ukrainiens.

C’est l’idéologie des nationalistes ukrainiens, qui fantasment sur une nation « pure » des Russes, des Polonais, des Juifs, des communistes, et qui a conflué avec la superpuissance américaine dans une grande convergence, dont le régime ukrainien est l’expression concrète depuis 2014. C’est une grande relecture de l’Histoire, alors que tout montre que les Russes et les Ukrainiens sont des peuples intimement liés depuis bien longtemps, y compris après le prétendu « holodomor ».

C’est une conception au service de la superpuissance américaine, qui détruit de l’intérieur la résistance nationale ukrainienne contre l’invasion russe, en l’asservissant à un autre dominateur.

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Politique

CNT : Ukraine, un nationalisme contre un autre

Une prise de position.

La position de la Confédération Nationale du Travail.Le communiqué de la Confédération Nationale du Travail – Solidarité Ouvrière peut être lu ici.

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Politique

Guerre en Ukraine: l’absence d’autocritique de « Révolution permanente »

Il était expliqué qu’il n’y aurait pas de guerre.

« Révolution permanente », une tendance trotskiste du NPA qui en a été exclu, est l’une des très rares structures de la Gauche à avoir parlé de la situation en Ukraine avant que la guerre ne se déclenche. C’est plutôt très bien. Le souci, c’est que la ligne de « Révolution permanente » a été de faire de la géopolitique – d’ailleurs cela continue – et à force de couper les cheveux en quatre, d’expliquer que la guerre n’aurait pas lieu.

Dans l’article « Pourquoi la Russie menace-t-elle l’Ukraine ? » du 20 janvier 2022, il est ainsi dit ouvertement qu’il n’y aurait pas la guerre, que la Russie mobilisait ses troupes pour réaliser une « posture ». Même si la Russie finissait par désirer la guerre, elle n’aurait pas les moyens d’enchaîner l’Ukraine et d’ailleurs « d’un point de vue des intérêts de l’impérialisme nord-américain un affrontement avec la Russie autour de l’Ukraine ne fait aucun sens ». 

Pas de chance, les faits ont montré très exactement le contraire : la superpuissance américaine a mis tout le paquet pour une confrontation à ce sujet, et ce n’est pas fini.

Le fait que la Russie entendait envahir l’Ukraine a également été littéralement mise de côté, au nom de la dénonciation de l’OTAN. L’article du 28 janvier 2022 Crise Russie-Ukraine. Quid de l’agressivité de l’OTAN ? dresse encore et toujours un panorama géopolitique où la principale menace, ce n’est pas la Russie entendant envahir l’Ukraine. C’est erroné comme les faits l’ont montré.

« C’est donc dans ce contexte qu’il faut comprendre les frictions, les menaces de guerre, la « diplomatie armée » et les tentatives d’arrangements. Et comme on voit on est loin de l’image présentée par les médias dominants où l’escalade serait seulement du fait de la Russie.

En réalité le principal responsable de la menace de conflit est avant tout l’OTAN : cette alliance militaire impérialiste et réactionnaire qui utilise sa force collective pour contraindre les différents États à travers le monde à se plier à ses intérêts géopolitiques et économiques. »

Cette thèse de l’OTAN comme principale menace de conflit témoigne de l’incompréhension par « Révolution permanente » des contradictions entre les grandes puissances. Bien entendu, tant l’OTAN que la Russie sont dénoncés. Mais la contradiction des deux blocs n’est pas comprise en tant que tel, c’est considéré comme un arrière-plan géopolitique seulement, il n’y a pas la considération que la tendance à la guerre prime, que l’actualité historique c’est la guerre entre les blocs.

Pour preuve, dans le long document du regroupement international auquel appartient « Révolution permanente », « A bas l’escalade militaire de l’OTAN en Europe de l’Est. Ni intervention impérialiste, ni ingérence militaire russe en Ukraine ! » du 29 janvier 2022, le terme de guerre n’est présent au sens strict que… deux fois.

Le document du même regroupement, le 2 mars 2022, « Non à la guerre ! Troupes russes hors d’Ukraine ! OTAN hors d’Europe de l’est ! A bas le réarmement impérialiste !« , présente la guerre simplement comme un accrochage produit par la concurrence :

« Cette montée du militarisme et l’arrivée de la guerre au cœur de l’Europe de l’est dévoilent le mensonge selon lequel la « mondialisation » néolibérale et la fin de la Guerre froide auraient ouvert une nouvelle ère, dans laquelle le pouvoir des États se serait transformé et les guerres appartiendraient au passé. Après que le mirage d’un monde capitaliste dirigé par une seule « hyperpuissance » se soit estompé, le déclin de la puissance étatsunienne est désormais visible aux yeux de tous.

L’intégration accrue de l’économie mondiale par le biais de « chaînes de valeur » liées à la production industrielle et aux services, de même que le système financier et des télécommunications ont accru la concurrence entre monopoles et entre États, qui n’a pas du tout diminué.

La lutte pour se tailler une part accrue du pouvoir mondial, entre les États-Unis, la Chine et la Russie, mais également avec les tentatives de l’Allemagne et de la France, ainsi que du Japon, de mener une politique impérialiste plus indépendante pour renforcer leur poids respectif dans leur aire d’influence, rend l’ensemble de la situation internationale plus instable. »

On comprend pourquoi il y a une tendance de la part de « Révolution permanente » à basculer dans la géopolitique, jusqu’à reproduire des points de vue de pseudos « agences » géopolitiques comme « Strafor » (Invasion de l’Ukraine : les 4 scénarios de Stratfor sur l’issue de l’offensive russe, le 28 février 2022). C’est là profondément erroné, c’est une incompréhension que le capitalisme va inéluctablement à la guerre, c’est résumer la guerre à un militarisme accompagnant le capitalisme, comme un simple fruit de la concurrence… C’est historiquement la ligne de droite de la social-démocratie d’avant 1914.

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Société

Catastrophe : à l’occasion de la guerre en Ukraine, la France introduit le thème des armes nucléaires tactiques !

C’est littéralement du délire.

Comme en 1914, on a le droit à un bourrage de crâne forcené concernant la Russie. Ce bourrage de crâne est alimenté médiatiquement par le régime ukrainien, qui lui-même est clairement épaulé si ce n’est directement structuré par la superpuissance américaine. On a ici une narration parfaitement élaborée, visant à former un agenda. Et cet agenda, c’est la guerre. La Russie doit tomber, coûte que coûte.

La Une du Figaro du 5 mars 2022 est exemplaire d’un tel bourrage de crâne. Cela va tellement loin que d’ailleurs pratiquement personne ne peut y croire à part les gens à la marge qui sont malheureusement terrorisés et n’ont aucun recul sur les choses. Car prétendre que Vladimir Poutine agiterait sciemment le péril nucléaire en Ukraine, cela relève de la fantasmagorie la plus complète. On est là dans la mobilisation belliciste.

Cependant, il y a plus grave, car Le Figaro, clairement en service commandé pour l’armée française, introduit la thématique de l’utilisation de l’arme nucléaire à petite échelle afin de la présenter comme incontournable, inévitable. C’est ce qu’on appelle des armes nucléaires tactiques. C’est un pas terrifiant, et c’est une stratégie résolument française.

Voici l’éditorial du 5 mars 2022, qui va rester dans l’Histoire comme un saut qualitatif dans le bellicisme français. Le passage en rouge concerne les armes nucléaires tactiques.

Le Figaro ment-il au sujet de la Russie et de l’emploi des armes nucléaires tactiques? Oui, Le Figaro ment. Et il ment qui plus est par omission, car historiquement c’est la France qui considère comme possible l’emploi des armes nucléaires tactiques, c’est-à-dire de petite puissance, pour détruire par exemple quelques km2.

La doctrine russe concernant l’emploi de l’arme atomique est formelle. Elle est connue et toujours affirmée comme intangible par la Russie. Cela ne veut pas dire qu’il faille faire confiance à la Russie, mais il n’y a strictement rien qui corresponde à ce que dit Le Figaro. Jamais la Russie n’a reconnu l’usage d’armes nucléaires tactiques sur le champ de bataille.

La Russie considère que l’emploi de l’arme atomique ne peut avoir lieu de sa part que dans quatre cas de figures. Le premier cas, c’est lorsque le pays a suffisamment d’informations de qualité concernant le lancement de missiles atomiques contre lui. Le second cas, c’est en cas de l’utilisation d’armes nucléaires et de destruction massives à l’encontre du pays. Le troisième cas, c’est lors d’une attaque, quelle que soit sa forme, empêchant la possibilité de l’utilisation de la force de frappe nucléaire.

Le quatrième cas, c’est l’utilisation d’armes nucléaires tactiques sur un champ de bataille conventionnel… dans le cas où l’existence même de l’État russe est menacé. Il n’y a pas d’utilisation d’armes nucléaires tactiques en général sur un champ de bataille conventionnel. Il y a une utilisation au cas où l’existence même de l’État est menacé – concrètement dans le cas d’une invasion visant à la destruction de la Russie.

Le Figaro, par conséquent, ment. C’est très facile à vérifier. Et Le Figaro ne peut pas ne pas le savoir. La doctrine russe est bien connue, étant d’ailleurs une sorte de forme plus ou moins modifiée de la conception soviétique du début des années 1950. A l’époque l’URSS comptait que l’arme nucléaire serait interdite mondialement et la doctrine à ce sujet affirmait que jamais elle ne serait utilisée en premier. La Chine actuelle est sur la même ligne, elle aussi dans une sorte de prolongement du passé.

Par contre, Le Figaro ment par omission et cela dit tout. Car la France reconnaît l’emploi d’armes nucléaires tactiques. Cet emploi fut théorisé dans les années 1950 par les généraux Gallois, Ailleret et Beaufre, puis dans les années 1960 par le colonel Poirier, enfin dans le Livre blanc sur la défense nationale de 1972.

Il faut ici distinguer ce qui est officiel et ce qui est masqué. L’emploi officiel est dit du coup de semonce. Voici comment le premier ministre Raymond Barre le définit dans un discours aux militaires en juin 1977 :

« En ôtant a priori à l’adversaire tout espoir de contrôler étroitement le niveau de violence d’une bataille classique, au cours de laquelle il pourrait presque impunément liquider progressivement nos forces conventionnelles, et en lui interdisant donc de déclencher une telle bataille, l’atome tactique renforce considérablement, par sa seule existence, notre efficacité dissuasive à tous les niveaux.

De plus, si, par extraordinaire, l’adversaire passant outre à toutes ces menaces, décidait de nous attaquer, l’atome tactique lui donnerait très vite le dernier et solennel avertissement qui conviendrait, avant l’apocalypse. »

C’est la théorie de « l’ultime avertissement ». On indique à l’ennemi qu’on est vraiment décidé à lancer des missiles nucléaires s’il continue. L’armée française dispose pour ce faire d’une aviation. L’utilisation de l’avion a en effet la particularité d’être « visible » et une frappe d’avertissement est la preuve suprême si cela ne suffit pas.

Initialement, la France s’appuyait sur quatre éléments : les missiles stratégiques lancés des silos du plateau d’Albion, les missiles sol-sol mobiles pré-stratégiques Hadès, les missiles lancés d’avions, les missiles stratégiques lancés de sous-marins. En 1996, Jacques Chirac décida de supprimer les deux premiers éléments. Il y a donc désormais les sous-marins et les avions, ces derniers menant quatre fois par an l’exercice « poker », simulant une attaque nucléaire.

Or, c’est là que justement il faut saisir ce que cela implique. Dans son discours de 1977, Raymond Barre précise bien qu’il ne s’agit pas d’ouvrir la perspective d’une guerre prolongée avec l’emploi d’armes nucléaires tactiques. Seulement, il était prévu qu’en cas de succès de l’invasion de l’Europe de l’Ouest par le Pacte de Varsovie dans les années 1980, la France bombarderait les troupes avançant vers elle. Ce qui impliquait de bombarder la Belgique et l’Allemagne, par conséquent évidemment il n’y avait rien d’officiel.

Et, aujourd’hui, l’existence même de ces avions implique précisément la possibilité de cet emploi d’armes nucléaires tactiques. Si rien dans la doctrine française ne le préconise, rien ne l’interdit non plus. La France considère que de par sa position, elle est en droit d’utiliser comme bon lui semble son « indépendance stratégique ». Cela a une dimension extrêmement dangereuse. Et Le Figaro, en service commandé car ce genre de propos ne s’inventent pas, introduit le thème de l’utilisation de l’arme nucléaire tactique. Suivant le principe : les Russes en préconisent l’emploi, pourquoi pas nous ?

C’est effarant. Et ce qui est dramatique, c’est que cela passe comme une lettre à la poste. Le capitalisme en crise ne connaît strictement aucune opposition. Il va à la guerre en disposant d’une légitimité comme en 1914, avec pareillement qu’à l’époque une pseudo-gauche gouvernementaliste ou syndicaliste totalement insupportable de vanité et incapable de quoi que ce soit.

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Guerre

L’Ukraine martyre de la Russie, de l’OTAN et de son propre régime

La nation ukrainienne est dépecée.

Ne masquons pas les choses, disons les directement : l’Ukraine est fichue. Nous avons étudié la question ukrainienne depuis avril 2021, nous avertissons depuis cette date que la Russie allait mener une invasion, alors de la même manière que notre constat a été juste, nous pouvons augurer de la suite.

Soit la Russie gagne, et pour elle l’Ukraine réelle n’existe pas, à part comme petite-Russie. Soit l’OTAN gagne et alors l’Ukraine devient un pays défini artificiellement par le capitalisme occidental et les nationalistes ukrainiens dont l’idéologie est fasciste et se revendique de Stepan Bandera. Dans tous les cas, les destructions sont déjà significatives dans un pays déjà à l’agonie économiquement.

Il aurait fallu un troisième camp, celui, démocratique et populaire, qui refuse une Ukraine vassalisée. Ce camp n’existe pas. Il va se recomposer, mais il y en aura pour dix, vingt, trente ans, si l’Ukraine ne se fait pas découper en morceaux avant. Et dans ce jeu de massacres, l’un des grands acteurs est la France elle-même.

On sait que le régime russe est démagogique et expansionniste, de par sa nature c’est assez flagrant, et puis de loin c’est plus facile. Mais ce à quoi on assiste en France est exactement similaire, même si les modalités sont différentes. La propagande anti-Russie dégouline de partout dans notre pays. La raison est simple : l’Ukraine sert de chair à canon pour l’OTAN. Il faut donc mobiliser. Mobiliser, de manière racoleuse (Ukraine : un charity business au service du nationalisme), et délirer dans la propagande.

Vladimir Poutine aurait limogé son chef d’état-major en pleine guerre, les soldats russes saboteraient leurs véhicules (si seulement!), les soldats russes sont laissés sans nourriture ni essence, les soldats russes sont des jeunes hommes conscrits ne sachant même pas qu’ils allaient à la guerre… La liste est sans fin. La fondatrice des Femen Inna Shevchenko, qui n’a jamais rien dit sur l’Ukraine avant la guerre, est une fervente activiste de cette machinerie où il est appelé de manière irrationnelle à l’émotion :

« Des filles violées,des nouveau-nés abandonnés à côté des cadavres de leurs parents,des bébés et des adultes affamés. Je ne peux pas décrire le niveau de souffrance humaine qui a lieu en #Ukraine en ce moment. Il y a seulement 9 jours,cette nation menait une vie normale. « 

L’Ukraine est un pays en catastrophe depuis longtemps, d’ailleurs Inna Shevchenko n’y est pas retournée malgré le changement de régime en 2014, préférant Paris. 600 000 personnes par an quittent le pays, dont la population s’effondre autant que les infrastructures nullement entretenues, avec une corruption titanesque, une prostitution hautement développée, des milices fascistes opérant politiquement de manière ouverte, étant en partie même une composante des institutions.

L’Ukraine, c’était tout sauf une « vie normale ». Mais iI ne faut pas se leurrer : cela relève d’un vaste mouvement de narration. C’est immanquablement drivé par le régime ukrainien, ou plutôt l’OTAN elle-même, comme lorsque le président ukrainien Volodymyr Zelenski parle d’une apocalypse à venir si la Russie triomphe.

On trouvera un exemple parlant du rôle d’Inna Shevchenko avec une lettre ouverte sur le site de France Inter à Inna Shevchenko, d’une miévrerie et d’une stupidité complète, écrite par l’activiste féministe Anne-Cécile Mailfert. Les centrales nucléaires seraient menacées par la Russie…

« Alors tu écris “*Aujourd’hui, l’Ukraine semble se battre seule contre un ennemi puissant. Elle se bat pour les valeurs que l’Europe était censée défendre, mais dont elle a oublié le sens***.”**

Ces valeurs, tu les brandissais hier sur ta poitrine fière. Aujourd’hui c’est ton bébé que tu y serres. Les yeux rivés vers Kiev en espérant que survive son drapeau, ton peuple pluriséculaire et ses centrales nucléaires. »

C’est lyrique, pathétique, et totalement n’importe quoi. Et ce n’est qu’un petit rouage de l’intense propagande selon laquelle la Russie aurait lancé un grand assaut dans la plus grande centrale nucléaire d’Europe.

Il y a également depuis plusieurs jours d’innombrables remarques sur l’esprit « malade » de Vladimir Poutine rêvant de nous lancer des missiles nucléaires, dont le missile Satan 2 capable, selon la chaîne France info de détruire la France entière à lui tout seul (sic). C’est une propagande intense. Qui va de pair avec les nombreux appels à ce qu’il y ait un coup d’État en Russie, prôné par des experts qui servent directement de voix au camp occidental entendant bien affronter la Russie « indirectement ».

La catastrophe est complète. L’Ukraine est littéralement assassinée. Elle est utilisée dans un monstrueux jeu des grandes puissances. Et si on laisse faire, d’autres pays suivront, déchirés dans le cadre de la grande bataille pour le repartage du monde.

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Emmanuel Macron : la France n’est pas en guerre contre la Russie, mais…

Le président français prépare les esprits à la guerre.

La machine à propagande est en route, et elle tourne à plein régime. Le président Emmanuel Macron a ainsi fait une adresse aux Français mercredi 2 mars 2022 en posant avec le drapeau ukrainien aux côtés des drapeaux de la France et de l’Union européenne. Ce choix résume à lui seul sa position et la nature profonde de sa démarche.

Emmanuel Macron se présente comme un défenseur de la « liberté » et de la paix, il explique que lui et l’OTAN ont tout fait pour éviter la guerre et qu’il s’emploie désespérément à trouver une solution diplomatique. Pourtant, en pratique, il prend fait et cause unilatéralement pour le régime ukrainien avec le président Volodymir Zelensky à sa tête.

Voici comment le Président a introduit sa prise de parole :

« Françaises, Français, mes chères compatriotes,

Depuis l’attaque brutale lancée par le Président Poutine contre l’Ukraine le 24 février, les forces russes bombardent Kiev, assiègent les villes les plus importantes du pays, des centaines de civils ukrainiens ont d’ores et déjà été tués, des femmes et des enfants ont été tués encore ce jour. Les jours qui viennent seront vraisemblablement de plus en plus durs. »

Ce n’est pas là l’introduction d’un discours cherchant à construire la paix, mais un discours partisan d’un des deux camps durant une guerre, en l’occurrence le camp du régime ukrainien. La vérité est tordue, volontairement extrapolée, pour justifier une position.

En pratique, l’invasion russe de l’Ukraine, aussi odieuse et impérialiste soit-elle, bafouant le droit international et en piétinant l’ONU, n’a rien d’une marche barbare sur le pays comme voudrait le faire croire le président français, en parlant par exemple de « bombardements de Kiev », qu’aucune information, même provenant du régime ukrainien, ne vient corroborer.

L’invasion russe est menée, pour l’instant en tous cas, de manière ultra précise et fine, ciblant par des frappes chirurgicales des bâtiments précis, détruisant ou prenant de manière coordonnée des bases militaires, des aéroports, ainsi que différents points stratégiques, encerclant petit à petit les grandes villes.

Il n’y avait qu’à écouter France info, la chaîne d’information officielle du régime français, pour entendre dans la journée du 2 mars 2022 une journaliste ukrainienne francophone raconter sa journée, expliquant qu’elle a pu se déplacer librement dans la ville et faire ses courses, trouvant la plupart des produits recherchés, sauf la litière pour ses chats.

Mais ce genre de réalité n’intéresse pas Emmanuel Macron, qui a besoin au contraire de galvaniser un sentiment anti-russe et d’en rajouter. Ce qui compte, c’est d’orienter la population française vers la démarche atlantiste, celle de l’OTAN, des États-Unis et du bloc qu’ils forment, sur lequel la France est censée s’aligner.

La défense du régime ukrainien est indispensable pour cette démarche, car ce régime a été mis en place en 2014 de manière directement favorable au bloc américain pour remplacer un régime favorable à la puissance russe concurrente.

Le régime ukrainien et surtout sont président ont donc été couverts de louanges.

« Et en votre nom, j’adresse au Président Volodymir Zelensky le soutien fraternel de la France. Il est aujourd’hui, à la tête de son peuple si courageux, le visage de l’honneur, de la liberté, de la bravoure. »

En vérité, Volodymir Zelensky est surtout le visage d’un régime ultra-nationaliste, violemment anti-russe et résolument anti-Gauche (tout ce qui a un rapport de près ou de très loin avec l’URSS est interdit), laissant les fascistes faire ce qu’ils veulent, notamment organiser des milices armées, alors qu’ils sont d’ailleurs un élément officiel de l’armée (par l’intermédiaire du bataillon Azov, formant le noyau dur de l’armée d’ailleurs à Marioupol, la dernière clef du Donbass).

Concrètement, Volodymir Zelensky n’est pas un libéral-démocrate comme Emmanuel Macron, mais un populiste d’extrême-droite richissime, débarqué en politique avec un parti… reprenant le nom de la série télévisée dont il était le principal acteur. Mais cela plaît au Président français, du moment que c’est aligné sur les intérêts du bloc américain, quitte à nier l’idéologie nationaliste du régime ukrainien et la carte libre donné aux fascistes. La réalité n’intéresse pas Emmanuel Macron, pour qui seuls comptent les intérêts capitalistes.

« Cette guerre est encore moins, comme une propagande insoutenable voudrait le faire penser, une lutte contre le « nazisme ». C’est un mensonge. Une insulte à l’Histoire de la Russie et de l’Ukraine, à la mémoire de nos aînés qui ont combattu côte à côte contre le nazisme. Les dirigeants russes s’en prennent à la mémoire de la Shoah en Ukraine. Comme ils s’en prennent en Russie à la mémoire des crises du stalinisme.

Cette guerre est le fruit d’un esprit de revanche, nourri d’une lecture révisionniste de l’Histoire de l’Europe, qui voudrait la renvoyer aux heures les plus sombres des Empires, des invasions, des exterminations. »

De tels propos sont extrêmement partisans et on notera d’ailleurs que le régime ukrainien a affirmé de manière mensongère que le mémorial de Babi Yar, un haut lieu de la destruction des Juifs d’Europe, avait été détruit par les Russes. Cela avait été notamment un prétexte pour Volodymir Zelensky pour affirmer que la Russie détruisait la mémoire de l’Ukraine (ce qui est vrai en partie par ailleurs, mais Volodymir Zelensky a en tête une Ukraine mythique). On remarquera également que la mort des treize défenseurs ukrainiens de « l’île des Serpents » après avoir envoyé « se faire foutre » le navire de guerre russe était également de l’intox : les soldats ukrainiens se sont en fait rendus.

Tout cela ne doit pas étonner, de part et d’autre, car c’est la guerre et donc les opérations psychologiques sont systématiques, parallèlement à la mobilisation générale. Si Emmanuel Macron tient à préciser que « nous ne sommes pas pour autant en guerre contre la Russie », il prend dans les faits ouvertement et unilatéralement partie pour un camp contre l’autre, tout en agissant au moyen de sanctions économiques et politique comme un cobelligérant.

La neutralité n’existe jamais en politique, et encore moins en ce qui concerne les relations internationales. Emmanuel Macron n’est que le représentant d’un camp contre un autre, dans une escalade menant inévitablement à de grandes tensions guerrières.

Les quinze minutes d’allocutions du président Emmanuel Macron ont surtout comme rôle de préparer les esprits à la guerre et à l’escalade guerrière qui s’annonce. Il s’agit de galvaniser, d’entraîner le peuple derrière les intérêts et la vision du monde de la bourgeoisie française, d’annihiler toute contestation du régime.

Voici la transcription de la fin du discours d’Emmanuel Macron, qui apparaîtra dans quelques années comme un moment marquant, un jalon important dans la préparation à la guerre. La France prétend ne pas être en guerre contre la Russie, mais en pratique elle est farouchement hostile à la Russie, et elle fait tout pour aller vers cette guerre, elle est déjà dans cette guerre.

« Les équilibres de notre continent comme plusieurs aspects de notre quotidien sont d’ores et déjà bouleversés par cette guerre et connaîtront des changements profonds dans les mois qui viennent. 

Notre Europe en sera bousculée. J’aurai l’occasion d’y revenir (…).

Notre agriculture, notre industrie, nombre de secteurs économiques souffrent et vont souffrir, soit parce qu’ils dépendent des importations de matières premières venues de Russie ou d’Ukraine, soit parce qu’ils exportent vers ce pays. Notre croissance, aujourd’hui au plus haut, sera immanquablement affectée. 

Le renchérissement du prix du pétrole, du gaz et des matières premières a et aura des conséquences sur notre pouvoir d’achat : demain le prix du plein d’essence, le montant de la facture de chauffage, le coût de certains produits risquent de s’alourdir encore. 

Alors face à ces conséquences économiques et sociales, je n’ai et n’aurai qu’une boussole : vous protéger. 

Nous épaulerons les secteurs économiques les plus exposés en recherchant de nouveaux fournisseurs, de nouveaux débouchés commerciaux.  Et c’est à cette fin que je me suis entretenu avec des homologues américains, européens, moyen-orientaux.

Nous apporterons des réponses adaptées face aux perturbations des flux commerciaux et à l’augmentation des prix. Et j’ai demandé au Premier ministre d’élaborer, pour les prochains jours, un plan de résilience économique et social pour répondre à toutes ces difficultés. 

Mais ne nous trompons pas. Ces événements n’auront pas seulement des conséquences immédiates, à la trame de quelques semaines. Ils sont le signal d’un changement d’époque.
La guerre en Europe n’appartient plus à nos livres d’histoire ou de livres d’école, elle est là, sous nos yeux. La démocratie n’est plus considérée comme un régime incontestable, elle est remise en cause, sous nos yeux. 

Notre liberté, celle de nos enfants n’est plus un acquis. Elle est plus que jamais un système de courage, un combat de chaque instant.

A ce retour brutal du tragique dans l’Histoire, nous nous devons de répondre par des décisions historiques.

Notre pays amplifiera donc l’investissement dans sa défense décidé dès 2017 et poursuivra sa stratégie d’indépendance et d’investissement dans son économie, sa recherche, son innovation, déjà renforcée à la lumière de la pandémie.

Notre Europe, dans cette épreuve, démontre, comme elle l’a fait ces derniers mois, une unité remarquable. Elle doit désormais accepter de payer le prix de la paix, de la liberté, de la démocratie. Elle doit investir davantage pour moins dépendre des autres continents et pouvoir décider pour elle-même. En d’autres termes : devenir une puissance, plus indépendante, plus souveraine.

Puissance économique d’abord. Nous ne pouvons plus dépendre des autres pour nous nourrir, nous soigner, nous informer, nous financer. Voilà pourquoi, dans le prolongement des décisions prises au plus fort de la pandémie avec le plan de relance européen, nous devrons promouvoir un nouveau modèle économique fondé sur l’indépendance et le progrès. 

Puissance énergétique, ensuite. Nous ne pouvons plus dépendre des autres et notamment du gaz russe pour nous déplacer, nous chauffer, faire fonctionner nos usines. Voilà pourquoi, après avoir décidé pour la France, le développement des énergies renouvelables et la construction de nouveaux réacteurs nucléaires, je défendrai une stratégie d’indépendance énergétique européenne.  

Puissance de paix, enfin. Nous ne pouvons pas dépendre des autres pour nous défendre que ce soit sur terre, sur mer, sous la mer, dans les airs, dans l’espace ou le cyberespace. A cet égard, notre défense européenne doit franchir une nouvelle étape. 

Je réunirai les 10 et 11 mars prochains à Versailles les chefs d’Etat et de gouvernement, européens, lors d’un sommet qui aura à décider sur ces sujets. 
D’ores et déjà, notre Europe a montré unité et détermination. Elle est entrée dans une nouvelle ère. Il nous faut poursuivre.

Mes chers compatriotes,

La guerre en Ukraine marque une rupture pour notre continent et nos générations.

Je sais combien elle vous inquiète, légitimement. Elle nous mobilise et nous imposera de prendre des décisions. Je vous en rendrai compte.

Cette guerre vient aussi percuter notre vie démocratique et la campagne électorale qui s’ouvre officiellement à la fin de cette semaine. 

Cette campagne permettra un débat démocratique important pour la Nation mais qui ne nous empêchera pas de nous réunir sur l’essentiel. 

Je sais pouvoir compter sur vous, votre attachement à la liberté, à l’égalité, à la fraternité, à la place de la France dans le monde. 
   
Je ne cesserai jamais de les défendre et de les porter haut, en votre nom.

Vive la République.

Vive la France. »

La France entre de plein-pied dans la tendance à la guerre à l’échelle mondiale, elle est une partie du problème, certainement pas de la solution.

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Société

Ukraine : un charity business au service du nationalisme

L’escroquerie est totale.

« L’Ukraine se bat pour toute l’Europe » : voilà bien un slogan tout à conforme aux franges nationalistes qui décident de l’idéologie de l’État ukrainien. Et il n’y a nul hasard à le retrouver dans une campagne en « soutien » à l’Ukraine, en fait prétexte au nationalisme le plus outrancier, le plus belliciste. Car le camp démocratique et populaire a totalement failli, la question ukrainienne est entièrement sous la coupe à la fois des nationalistes ukrainiens, comme on a pu le voir tout récemment avec les rassemblements avec Yannick Jadot, soit des partisans directs de l’OTAN et de l’Union européenne, comme avec le meeting parisien du premier mars 2022, dont d’ailleurs personne n’a rien eu à faire (on peut lire ici un compte-rendu lyrique des organisateurs).

Une des propagandistes les plus acharnées est Inna Shevchenko, la fondatrice des Femen, qui pratique amalgame sur amalgame, dramatisation forcée sur dramatisation forcée. On se demandait ici dans un article le 4 avril 2021 pourquoi elle ne disait rien alors, maintenant on sait pourquoi elle a attendu la guerre : étrangère aux principes démocratiques et populaires, elle ne s’active que lorsqu’elle peut converger avec des gens pour la valoriser. Et pour cela elle est prête à tout, même à un abject relativisme historique faisant de l’invasion russe un strict équivalent du nazisme génocidant les Slaves.

Un autre exemple parlant est le squat d’artistes légalisé à Paris au 59 rue de Rivoli, avec une façade « esthétisé » qui s’est vue ajouter une banderole en ukrainien avec le slogan des fascistes ukrainiens « Gloire à l’Ukraine, Gloire aux héros ». C’est lamentable. Ces gens ne connaissent rien à rien, ils agissent pour leur bonne conscience, ils ne s’écoutent qu’eux-mêmes, ne découvrant la réalité qu’en fonction de leur subjectivisme, ils n’en ont rien à faire de l’Ukraine.

Il en va de même bien entendu pour les gens se précipitant dans les journaux pour raconter qu’ils vont partir en Ukraine, qu’ils vont accueillir des réfugiés ukrainiens. Quel cinéma, quelle orchestration. On nous demande de nous mobiliser face à la souffrance des ukrainiens : collectes de vêtements, site organisant les volontaires, manifestations jaunes et bleues… Tout comme si la guerre n’avait pas été anticipée et préparée de longue date, comme si Poutine avait pété les plombs du jour au lendemain et que les gens étaient jetés au dehors de chez eux, à demis nus, leurs enfants braillards sur les bras. Avec leur charrette comme à l’exode.

Notons d’ailleurs qu’il y a actuellement 600 000 réfugiés ukrainiens. Et que 600 000, c’est le nombre d’Ukrainiens quittant leur pays chaque année depuis 20 ans, devenant des migrants. Mais cela évidemment n’intéresse personne, car l’Ukraine n’intéresse pas ces gens « solidaires », qui n’agissent que parce que le régime le demande et parce qu’ils convergent avec leur propre capitalisme triomphant.

Ce triste théâtre du charity business qu’on nous diffuse là, c’est en fin de compte la queue de la comète de l’industrie de guerre. Un autre ordre de mobilisation générale. Les honnêtes gens qui ont peur de la guerre ne se mobiliseront pas pour la Paix, contre la guerre, encore moins contre le capitalisme passé à l’impérialisme. Ils vont se mobiliser au travers d’institutions de la classe dominante, au travers des propositions du capitalisme, pour soutenir les victimes ukrainiennes directement utilisées dans ce processus comme les soldats ukrainiens sont utilisés par l’OTAN comme chair à canon.

D’ailleurs, ne soyons pas naïfs. La Pologne, la Roumanie, l’Allemagne, la France, toute l’Union européenne et la superpuissance américaine avec, tous ces États achètent du missile depuis des semaines. Alors, pourquoi n’auraient-ils pas eu les moyens de préparer des vêtements, des tentes, des médicaments et des jouets pour les enfants ?

La vérité est que l’Ukraine est prise dans le feu du repartage du monde. Il n’y a plus personne dans le camp de la Paix, même les bonnes intentions servent directement, à leur niveau, le bellicisme du camp capitaliste occidental. Et l’Ukraine comme nation se voit disparaître sous les coup de boutoir de l’envahisseur russe et des pro-occidentaux et ultra-nationalistes le façonnant de manière fictive, identitaire, vassalisée au capitalisme occidental.

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Guerre

Le fanatisme belliciste anti-russe du ministre français de l’Économie Bruno Le Maire

Un pas de plus vers la guerre mondiale.

La France est-elle en guerre contre la Russie ? Officiellement non, mais en pratique ce n’est pas si évident. Le ministre français de l’Économie Bruno Le Maire est allé très loin mardi 1er mars 2022 dans ses propos à l’encontre de la Russie en assumant le mot « guerre » sur France info. Il a dit, avec un ton particulièrement martial :

« Nous allons livrer une guerre économique et financière totale à la Russie. »

Il a précisé à quel point il voulait atteindre la Russie, et même le peuple russe, au moyen de la guerre économique.

« Nous voulons viser le cœur du système russe, nous visons Vladimir Poutine, nous visons les oligarques, mais nous visons aussi toute l’économie russe. Et le peuple russe en paiera aussi les conséquences. On ne sait pas faire autrement. »

De manière totalement fanatique, il s’est félicité de l’efficacité (selon lui) des mesures déjà prises contre la Russie, en annonçant que le but était maintenant d’enfoncer le clou :

« Nous allons donc provoquer l’effondrement de l’économie russe. »

Ces propos sont incroyablement belliqueux, en plus d’êtres délirants dans leur contenu. C’est belliqueux, car il s’agit ici d’assumer une guerre, d’écraser un ennemi et avec lui son peuple. C’est délirant car en pratique les pays du bloc formé par les États-Unis, dans lequel s’inscrit la France, n’ont aucun moyen d’affirmer pour l’instant que l’économie russe est effectivement en train de tomber. C’est de la pure propagande de guerre, pour galvaniser l’opinion, pour mettre la pression sur l’ennemi.

Mais, emporté par son fanatisme, le ministre français est allé trop loin, en assumant trop ouvertement la position du gouvernement français et sa volonté d’écraser le régime russe. Il s’est fait recadrer et de manière pathétique, il a dû atténuer ses propos en expliquant plus tard dans la journée que « le terme de guerre utilisé ce matin sur France Info était inapproprié et ne correspond pas à notre stratégie de désescalade », en précisant que la France n’est « pas en conflit contre le peuple russe ».

Sauf que les mots ont été prononcés, et s’ils sont éventuellement maladroits, ils reflètent en tous cas l’état d’esprit du gouvernement français. Il s’agit en l’occurrence d’un alignement total sur la superpuissance américaine et sa volonté de domination mondiale, avec la confrontation à la Russie comme préalable incontournable.

La France, dans le giron des États-Unis, soutient totalement le régime nationaliste, corrompu et nationaliste-racialiste au pouvoir en Ukraine depuis 2014. Régime dont l’instauration a été soutenue par eux. La France n’en a rien à faire ni de l’Ukraine, ni du peuple ukrainien, il ne s’agit pour elle que de défendre un pré carré en le disputant à la puissance russe, elle-même tendanciellement dans le giron de la superpuissance chinoise.

D’ailleurs, l’avalanche de sanctions économiques contre la Russie a surtout comme conséquence de pousser encore plus franchement la Russie dans le sillage de la superpuissance chinoise et de renfoncer les tensions avec le bloc formé par les États-Unis. C’est la tendance à la guerre mondiale qui se dessine sous nos yeux chaque jour, comme avant 1914.

Bruno Le Maire, en tant que libéral pro-OTAN, est un défenseur acharné du capitalisme dans sa version américaine, et on voit très bien en écoutant ses propos que ce n’est que de cela qu’il s’agit. Lorsque le ministre français de l’Économie entend « provoquer l’effondrement de l’économie russe », il développe juste avant que :

« États-Unis et Europe ensemble sont de très loin le continent économique et financier le plus puissant de la planète. »

C’est là assumer l’alignement sur la superpuissance américaine. L’écrasement économique de la Russie est donc au programme du ministre de l’Économie aujourd’hui, et dans son sillage l’écrasement militaire de la Russie sera bientôt au programme de l’OTAN.

De son côté évidemment, le régime russe est très content d’une telle opposition, lui permettant d’assumer encore plus facilement ses positions, son impérialisme. La Russie peut justifier d’autant plus facilement son invasion de l’Ukraine et sa négation de la nation ukrainienne, que celle-ci est inféodée au bloc américain-européen avec le président Volodymyr Zelensky et la tendance nationaliste qu’il représente.

Dmitri Medvedev, le vice-président du Conseil de sécurité de la Fédération de Russie, ancien premier ministre et figure majeure du régime, a ainsi rétorqué dans la journée dans un message en français sur Twitter :

« Un ministre français a dit aujourd’hui qu’ils nous avaient déclaré la guerre économique. Faites attention à votre discours, messieurs ! Et n’oubliez pas que les guerres économiques dans l’histoire de l’humanité se sont souvent transformées en guerres réelles. »

On rappellera au passage que le ministre français de l’Économie Bruno Le Maire avait quelques jours auparavant parlé de manière indécente « d’arme nucléaire financière » (à propos du système bancaire SWIFT). On nage ici en pleine folie, dans une folie monstrueuse amenant à la guerre de part la concurrence acharnée entre les pays dans tous les domaines.

Ce n’est pas une folie imputable au cerveau « malade » de quelques dirigeants, pas plus celui de Vladimir Poutine que celui de Bruno Le Maire. Il s’agit simplement d’une tendance historique, du développement normal du capitalisme qui mène inéluctablement à la guerre et la crise, à la crise et la guerre. Bruno Le Maire, tout comme Vladimir Poutine, n’en sont que les vilains instruments.

Seuls les peuples peuvent s’y opposer, en France, en Russie, aux États-Unis, en Ukraine, en prenant le pouvoir pour instaurer des régimes véritablement démocratique et populaire, avec l’internationalisme prolétarien comme seul agenda diplomatique. Il n’y a pas d’autre choix ! Le monde se précipite à l’abîme. Et la conscience sociale des gens est à zéro. L’Histoire va s’accélérer sans commune mesure – dans un sens comme dans un autre.

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Communiqué de la CNT-SO sur la guerre en Ukraine

Une prise de position.

La Confédération Nationale du Travail est un syndicat d’orientation anarcho-syndicaliste / syndicaliste-révolutionnaire, née concrètement en France après 1945 à partir de militants espagnols et ayant connu une réelle émergence dans les années 1990, avec un pic au tout début des années 2000, en faisant l’une des principales structures militantes du pays. Le mouvement a depuis périclité et s’est scindé, en la Confédération Nationale du Travail (en quelque sorte maintenue) n’ayant par ailleurs pas exprimé de position concernant la guerre en Ukraine, et la Confédération Nationale du Travail – Solidarité Ouvrière dont voici à l’opposé la position.

On remarquera que, de par l’orientation anti-politique choisie, la Confédération Nationale du Travail – Solidarité Ouvrière n’aborde la question que de la manière la plus générale possible.

Communique-Ukraine-CNT-SO-1

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Politique

PCF(mlm) : La guerre en Ukraine ouvre la boîte de Pandore des conflits militaires impérialistes directs

Une prise de position.

Le point de vue communiste maoïste.

La guerre en Ukraine ouvre la boîte de Pandore des conflits militaires impérialistes directs –
la guerre populaire mondiale est la réponse historique

L’invasion de l’Ukraine par la Russie le 24 février 2022 indique que nous sommes entrés dans une nouvelle période, celle où les conflits militaires de haute intensité se présentent aux yeux des impérialistes comme un moyen réalisable d’atteindre ses objectifs. C’est là un saut qualitatif mondial dans le rapport entre les pays, entre les États ; cela correspond à un niveau de conflictualité nouveau sur le plan des contradictions inter-impérialistes.

Nous soulignons ici que nous avons prévu depuis une année un tel saut, que nous en avons analysé en amont de très nombreux aspects, parce que nous avons saisi que la pandémie ouvrait en 2020 la seconde crise générale du capitalisme. S’il est important de le dire, c’est parce que tout positionnement est par définition toujours politique et que, désormais, il l’est d’autant plus. Dans cette nouvelle situation, toute prise de position ou non-prise de position n’est pas seulement lourde de sens, mais également empreinte d’une signification majeure, dans la mesure où elle converge avec telle ou telle tendance historique.

Autrement dit, le caractère foncièrement apolitique des pays capitalistes développés, comme la Belgique et la France, est en contradiction avec le fait que ces pays se voient arrimer à un phénomène historique qui est la tendance à la guerre. Nous ne parlons pas seulement ici d’interventions militaires, comme les pays impérialistes en ont mené de manière ininterrompue depuis trente ans, mais d’une démarche de mobilisation militariste engageant l’ensemble des aspects d’un pays entier.

Dans un tel contexte où les États se structurent littéralement pour la guerre, dire certaines choses et pas d’autres, ne rien dire, faire certaines choses ou ne rien faire… s’intègrent forcément à une orientation politique, en raison d’une époque qui a changé et est désormais marquée par des conflits de haute intensité comme possibilités et même comme nécessités afin de trouver une « sortie de crise ». Il n’est pas d’apolitisme qui tienne – auparavant, c’était déjà fictif, mais dans une époque de tendance à la guerre, cela devient entièrement artificiel.

Si nous faisons de cet aspect concret l’aspect principal de notre déclaration, c’est en raison du primat de la pratique, car la dignité du réel prime toujours. La guerre impérialiste ne tombe pas du ciel, pas plus qu’il n’y a des partisans de la guerre impérialistes qui tomberaient du ciel pour prendre le pouvoir d’État et réorienter subitement, du jour au lendemain, un pays vers la mobilisation nationaliste générale. C’est dans la réalité que se produit la tendance à la guerre, c’est de la réalité que procède la tendance à la guerre, sur la base d’innombrables contradictions produites par le mode de production en capitaliste en crise.

C’est parce qu’un pays est dos au mur, qu’il a besoin d’une sortie de crise coûte que coûte, que la guerre se produit, sur une base impérialiste car relevant de ce qui forme une grande bataille pour le repartage du monde. C’est le sens de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, cette dernière étant confrontée à une crise propre à son régime oligarchique dans le cadre général imposé par la pandémie. L’impérialisme oligarchique russe ne pouvait plus tenir le rythme capitaliste et il a été obligé de chercher à modifier la situation, par le conflit de haute intensité, franchissant le pas en raison d’une nécessité historique qui lui était propre.

On ne peut pas comprendre l’invasion russe si on s’imagine qu’elle a comme base le désir d’un individu cherchant à récréer un empire dont il deviendrait le tsar ; tomber à ce niveau d’analyse où le président russe Vladimir Poutine serait un tyran est totalement hors sol. L’invasion russe procède de contradictions internes, propres au régime russe, avec notamment la contradiction entre les intérêts du complexe militaro-industriel et ceux de l’oligarchie, dans le cadre d’un capitalisme frappé au niveau général par la crise générale.

Si les oligarques étaient en mesure d’accompagner individuellement cette crise de par leur mode de vie individuel décadent et parasitaire dans les hautes sphères bourgeoises internationales, en tant que classe l’oligarchie russe est intrinsèquement lié au complexe militaro-industriel dans le cadre national capitaliste russe, et cet aspect est devenu principal avec la crise générale ouverte en 2020, car la Russie risquait de basculer dans un déclassement significatif.

Si la question de l’OTAN a été sans cesse primordiale dans l’argumentation russe, avec une réelle inquiétude devant la menace de ce bloc militaire à ses frontières, il y a fondamentalement la pression économique énorme exercée par le bloc capitaliste occidental avec la superpuissance impérialiste américaine et les pays de l’Union européenne. Ce bloc a réussi, momentanément, à bloquer les effets immédiats de la crise générale, en multipliant des crédits à très grande échelle. La Russie, de par sa nature économique à la fois bureaucratique et productrice de matières premières, n’était pas en mesure d’accompagner cette initiative capitaliste à grande échelle.

Cependant, l’analyse détaillée des contradictions internes à la Russie reste une tâche à mener et ce n’est pas l’aspect principal ici. En effet, ce qui prime avant tout, c’est que la guerre en Ukraine ouvre la boîte de Pandore des conflits militaires impérialistes directs. Il s’agit là d’un profond renversement, qui a une nature concrète concernant tous les aspects de la vie quotidienne dans les pays impérialistes.

Il faut en effet malheureusement constater que le conflit militaire en Ukraine marque l’émergence de la guerre conventionnelle au 21e siècle. Une fois qu’une telle guerre ouverte a été menée, une autre peut être menée bien plus facilement, du fait de la banalisation de ce phénomène dans les esprits, surtout si c’est présenté comme une fatalité aux yeux des opinions publiques travaillées au corps par les grandes bourgeoisies de chaque pays.

Le militarisme de chaque État va se voir encore plus accentué, encore plus « justifié ». La tendance à la guerre va se systématiser avec encore plus d’agressivité, exigeant une soumission chauvine toujours plus grande et même une mobilisation « patriotique » en ce sens.

Les institutions – de l’École aux syndicats, des services publics aux partis politiques – vont inlassablement contribuer à renforcer cette tendance, à l’inscrire dans le temps, à galvaniser dans le sens du nationalisme.

La question fondamentale qu’il y a ici, c’est de savoir dans quelle mesure il y a une capacité réelle de la part des pays capitalistes avancés à mettre en place une armée de masse, au-delà de l’armée professionnelle en place, et de savoir comment le rapport entre les deux peut se faire.

Le capitalisme est ici déchiré entre sa nature de société de consommation de masse, avec des consommateurs totalement individualisés, différenciés au point de multiplier les marchés différents, et un besoin d’organiser de manière militaire de quoi assurer l’expansion aux dépens des autres puissances, avec des soldats façonnés de manière uniforme, obéissant au doigt et à l’œil.

Il y a ici un aspect très important à prendre en compte, qui tient finalement même à la capacité du régime politique en place à se maintenir.

La crise générale du capitalisme est un défi et les régimes doivent, pour l’assumer, se réimpulser. Sans cela, ils ne sont pas capables d’être au niveau du nouveau contexte. Cela implique un renouvellement du personnel politique, une reconfiguration idéologique avec notamment une modification des partis politiques en place.

C’est un phénomène complexe et contradictoire. Le régime veut se renforcer en se renouvelant, mais en se renouvelant il déchire le tissu social existant au préalable, ce qui laisse des espaces pour l’émergence d’une opposition politique, idéologique, culturelle, sociale.

La marche à la guerre du capitalisme n’est pas une voie tranquille, elle ne peut pas se faire sans conflits tant avec les habitudes prises dans le libéralisme qu’avec des masses toujours plus pressurisées pour payer la facture de la crise et de la militarisation.

Il y a ici un espace nouveau qui doit être compris par les communistes, et pour le comprendre il ne faut pas s’attendre à ce que le niveau de conscience atteigne un réel niveau de manière spontanée.

D’abord, parce que ce n’est jamais le cas, ensuite parce que la question de la rupture est encore plus essentielle dans une société capitaliste qui, même affaiblie dans ses fondements, permet encore un très haut degré de corruption.

On le voit bien avec le déclenchement de la guerre en Ukraine, qui a soulevé le cœur des masses, mais un temps bref seulement, la vie quotidienne capitaliste reprenant quasi immédiatement le dessus.

Nous attirons l’attention sur cette question de l’évaluation du processus de la marche à la guerre, qui est essentielle pour permettre de se placer politiquement de manière adéquate ; les erreurs à ce niveau sont fatales, car en élevant à chaque fois le niveau d’un cran, le capitalisme rend les choses plus difficiles, centralisant le régime et le militarisant.

Ce qui, dialectiquement, implique de calibrer de manière adéquate les propositions politiques communistes. Le grand risque est ici le gauchisme. Plus le capitalisme se centralise, plus il devient fort, mais en même temps il rend toujours plus étroit sa base et par là-même il se fragilise.

Si la situation implique ainsi toujours plus de radicalité, le programme communiste vise pourtant dialectiquement, à court et moyen terme, toujours moins un État socialiste en tant que tel, pour se tourner vers la proposition d’un nouvel État démocratique et populaire, sur une base d’opposition au nationalisme et au militarisme, c’est-à-dire en fin de compte anti-monopoliste.

La question qui se pose avec l’irruption de la guerre comme actualité, ce n’est pas moins que celle de la nature de l’État et de ses orientations. Les impérialistes précipitent les masses dans la guerre au moyen de leurs États, aussi les communistes doivent-ils faire en sorte que les masses génèrent un nouvel État prenant une option entièrement différente.

Ces masses doivent être unies et de par la centralisation des régimes se tournant vers la guerre, il faut un programme répondant dialectiquement à cette centralisation. Il y a donc besoin de la mise en place d’un nouveau régime, démocratique et populaire, privant le pouvoir de la haute bourgeoisie et ses vassaux, en nationalisant les principaux secteurs de l’économie, en formant une armée nouvelle, de type démocratique et populaire, en brisant les idéologies nationaliste et militariste.

Le caractère démocratique et populaire de cet État – et non pas socialiste et ouvrier – tient au fait que la tendance à la guerre va de pair avec une immense décomposition sociale et que, par là-même, seul le front le plus large est en mesure de faire face à un régime précipitant toujours plus le pays dans son ensemble dans le militarisme, le nationalisme, l’aventurisme militaire.

C’est la grande leçon des années 1920 et 1930, avec la systématisation de l’action antifasciste, du Front populaire, comme proposition démocratique anti-monopoliste.

Dans un contexte de fuite en avant d’une société déboussolée, de fascisation, de nationalisme exacerbé, de militarisme se généralisant… la proposition stratégique communiste est sur la défensive, par définition.

La réalité politique, sociale, culturelle, idéologique… ne laisse aucune place aux fantasmes ultra-gauchistes, faux qui plus est car, à une époque de décadence, l’affirmation démocratique et populaire tend par elle-même, par nature, au socialisme, et ce dans un processus ininterrompu, et mondial.

La bataille pour le repartage du monde a en effet un caractère planétaire historique. Au-delà des contingences, des particularités nationales, il ne faut pas perdre de vue que, historiquement, le pendant de la guerre impérialiste, c’est la guerre populaire mondiale.

Cela, les impérialistes s’en doutent bien et c’est aussi leur inquiétude, en plus de leur obsession de repartage du monde. Comme l’a enseigné Gonzalo, le dirigeant du Parti Communiste du Pérou dans la seconde moitié des années 1980 :

« Le Président Mao nous disait : il faut se préparer et se préparer dès maintenant contre une guerre impérialiste et principalement contre une guerre atomique.

Comment allons-nous leur répondre ? Évidemment, seulement avec la guerre populaire, il n’y a pas d’autre forme, voilà le principal.

Les démasquer fait partie d’une campagne de propagande qui montre au monde leurs sinistres et macabres plans d’énorme génocide, mais jamais cela n’arrête une guerre.

Staline l’a dit clairement : ces campagnes n’arrêtent jamais une guerre.

Alors la seule chose à faire, si nous voulons empêcher une guerre, c’est de développer la révolution.

Comme l’enseigne le Président Mao : soit la révolution empêche la guerre mondiale, soit cette dernière attise la révolution. »

Il faut stopper les assassins avant qu’ils passent leurs actions et, si jamais ceux-ci commencent leurs basses œuvres, il faut les combattre dans chaque pays, sans converger avec eux. Cette perspective impose des tâches spécifiques dans chaque pays, mais relève du cadre général de l’internationalisme prolétarien, avec comme perspective la République Socialiste mondiale.

Ce qui signifie : opposer à la guerre impérialiste mondiale la guerre populaire mondiale.

Mars 2022

Parti Communiste de France (marxiste-léniniste-maoïste)

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Politique

PCRF : Russie – Ukraine : A bas les guerres impérialistes !

Une prise de position.

Le Parti Communiste Révolutionnaire de France est issu de la « gauche » du PCF des années 1990.

Russie – Ukraine : A bas les guerres impérialistes !

Depuis des mois, le PCRF alerte sur les conséquences des tensions accrues entre impérialismes (USA, pays de l’UE, Russie, Chine), qui instrumentalisent ou favorisent des conflits locaux dans l’intérêt exclusif de leurs monopoles.

C’est dans ce cadre que, le jeudi 24 février 2022, la Russie a déclenché une guerre contre l’Ukraine, à travers l’entrée de l’armée russe au Nord-Est de ce pays et les bombardements de plusieurs villes ukrainiennes.

Le PCRF condamne cette agression de la Russie capitaliste contre son voisin, et exige l’arrêt total de cette guerre qui a déjà fait de nombreuses victimes parmi les civils.

Rappelons que les tensions entre la Russie et l’Ukraine, soutenue par l’UE et l’OTAN, dont la France fait partie, ont été accentuées par la question du Donbass  : le refus de parvenir à un accord, l’augmentation des bombardements de Donetsk et de Lougansk par Kiev ont conduit à la reconnaissance par les autorités bourgeoises de la Fédération de Russie de ces républiques de l’Est de l’Ukraine, en guerre depuis 8 ans contre le pouvoir fasciste ukrainien issu du coup d’État de 2014, soutenu par la France, l’UE et les États-Unis.

Mais la première cause de ce conflit est l’affrontement inter-impérialiste entre la Russie et les pays occidentaux membres de l’OTAN. Le peuple du Donbass est devenu un otage dans la lutte entre, d’un côté, l’Ukraine nationaliste soutenue par les États-Unis et les pays européens dont la France, et de l’autre côté, la Russie de Poutine qui cherche à faire revenir l’Ukraine dans sa zone d’influence.

Indépendamment des prétextes utilisés par les deux parties, le conflit militaire en Ukraine est le résultat de l’aiguisement de la concurrence entre les deux camps belligérants, principalement axée sur les sphères d’influence, les parts de marché, les matières premières, les plans énergétiques et les voies de transport  ; la situation, les positions des uns et des autres et les contradictions au sein de l’UE ne peuvent se comprendre sans le sujet du gaz russe en Allemagne ou du gaz de schiste états-unien par exemple.

La France est aussi le troisième investisseur en Russie, le premier employeur étranger et joue également sa partition, tandis que sa présence en Mer Noire et en Méditerranée (Grèce, Italie, etc…) s’est récemment renforcée, en concurrence avec la Turquie.
Ces concurrences ne peuvent pas toujours être résolues par des moyens diplomatico-politiques et des compromis fragiles.

La responsabilité de cette guerre est donc partagée entre d’une part les États-Unis, l’OTAN et l’UE qui soutiennent le gouvernement réactionnaire de Kiev, les mécanismes paramilitaires et les groupes fascistes en Ukraine et qui, depuis des années, promeuvent leurs positions (élargissement de l’OTAN aux pays d’Europe orientale, bouclier antimissile, etc.) ; et d’autre part la Russie capitaliste qui promeut ses propres plans d’unification capitaliste des pays de l’ex-URSS et qui, ces dernières années, a procédé à l’annexion de la Crimée à la Fédération de Russie et à la récente reconnaissance de l’ »indépendance » des soi-disant « républiques populaires » de Donetsk et de Louhansk.

C’est la confirmation que la guerre est la continuation de la même politique avec d’autres moyens. C’est la preuve que la guerre impérialiste, ainsi que la mort et la destruction qu’elle provoque, découlent inévitablement de la concurrence capitaliste, de son mode de production. Rappelons que sous le socialisme, contrairement au discours antisoviétique de Poutine du 21 février 2022, les peuples russe et ukrainien vivaient en amitié et prospéraient en paix.

Fort de cette analyse, le PCRF refuse de s’associer à la propagande agressive antirusse et au matraquage médiatique préparant les esprits à la guerre contre la Russie, alors que les forces de l’OTAN, de l’UE, les États-Unis et la France ont une part écrasante de responsabilité dans cette situation. L’envoi et la présence d’un contingent français renforcé (jusqu’à 1000 hommes) en Roumanie doivent être empêchés.

À présent, ce conflit militaire peut mener à une confrontation aux dimensions imprévisibles, d’autant plus qu’elle est liée à une confrontation générale (entre les États-Unis, les pays de l’UE, la Chine, la Russie, etc.) pour la suprématie dans le système impérialiste. Les peuples des pays impliqués seront une fois de plus les victimes, car les répercussions économiques et géopolitiques de ce conflit affectent les peuples du monde entier.

Le PCRF exprime sa solidarité avec les travailleurs du Donbass, de la Russie et de l’Ukraine, qui doivent pouvoir décider, en toute indépendance, notamment à travers leurs luttes, et loin de tous les plans bourgeois et impérialistes, de leur destin en faveur de la paix. Il faut lutter contre le chauvinisme et le nationalisme, contre les pièges d’une confrontation sur des bases ethniques qui masque les véritables causes du conflit.

Face à ce nouveau drame, notre réponse de communistes, en France, est plus que jamais : À bas la guerre impérialiste, qui conduit au massacre de populations, en Ukraine, en Russie et partout dans le monde !

À ce titre, nous appelons les travailleurs de France à lutter contre les plans impérialistes des organisations comme l’OTAN et l’UE, et surtout, contre notre propre impérialisme français et ses ambitions militaristes en Europe et dans le monde.
La lutte contre l’UE et l’OTAN est indissociable de la lutte générale pour le socialisme-communisme en France et dans le monde.

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Politique

Le PCI sur l’impérialisme russe en Ukraine

Une prise de position.

Le Parti communiste international est une organisation se revendiquant de la « gauche italienne » des années 1920, également dénommée « bordiguiste », et se rattachant à l’ultra-gauche.

Dans son affrontement avec l’impérialisme américain et les impérialismes européens, l’impérialisme russe lance ses troupes à la reconquête territoriale de zones stratégiques de l’Ukraine : après la Crimée, le Donbass, puis Odessa ?

Depuis huit ans, des affrontements armés ont lieu en Ukraine dans la région du Donbass, notamment dans les provinces de Lougansk et de Donetsk, entre les séparatistes russophones et l’armée ukrainienne, en dépit des accords de Minsk de 2014 et de Minsk II de 2015, qui ont fait l’objet d’un grand battage médiatique ;  ils impliquaient l’Ukraine, la Russie, l’OSCE, les représentants des deux « républiques populaires » autoproclamées de Lougansk et de Donetsk et, dans les accords de Minsk II, également la France et l’Allemagne. Selon les médias, pas moins de 22 000 personnes sont mortes au cours de ces huit années de guerre de « basse intensité ».

Il était clair dés le début que ces accords n’avaient aucune chance d’être respectés par l’une ou l’autre des parties directement concernées –Ukraine, Russie, séparatistes russophones –, à tel point qu’il a fallu un Minsk II qui n’a pas davantage apporté la paix.

De la part de Kiev, l’engagement de reconnaître aux deux « républiques » de Lougansk et de Donetsk la grande autonomie promise, tout en maintenant une forte présence de sa propre armée, n’a pas été respecté ; de la part de ces deux « républiques », avec derrière elles la Russie en tant que véritable protagoniste, les attaques  contre l’armée ukrainienne, considérée comme «  occupante » de la partie occidentale des provinces de Lougansk et de Donetsk, n’ont jamais cessé.

En réalité, comme le souligne notre prise de position du 25 décembre dernier (cf « Tensions à la frontière ukrainienne : seul le prolétariat peut mettre fin aux affrontements impérialistes », 25/12/2021), la véritable cause de l’affrontement dans le Donbass est à rechercher dans le fait que cette région est absolument stratégique tant pour la Russie que pour l’Ukraine d’un point de vue économique et politique et, du point de vue des contrastes inter-impérialistes, également pour les impérialismes européen et américain.

Elle l’est, en effet, pour l’OTAN et l’Union Européenne, depuis qu’en 1991 – après l’effondrement de l’URSS –   tous les pays qui faisaient partie de l’empire russe s’en sont détachés, devenant indépendants de Moscou.

Mais à l’ère impérialiste, l’indépendance d’un pays par rapport aux autres, et surtout par rapport à l’impérialisme qui le dominait auparavant, reste un désir abstrait. Il y a tellement d’aspects économiques, financiers, politiques et militaires qui déterminent la politique intérieure et extérieure d’un État que celui-ci – surtout s’il se trouve dans une zone géopolitique de grande importance dans les rivalités inter-impérialistes, comme l’Europe de l’Est, est obligé de vendre son « indépendance », et donc son territoire, son économie et son gouvernement, à l’un des pôles impérialistes qui peut le mieux favoriser ses intérêts nationaux ou, au moins, le protéger des convoitises des pays ennemis. Bien entendu, le degré de soumission d’un État à un impérialisme plus puissant dépend d’une série de facteurs politiques et économiques qui varient en fonction des rapports de force entre les différents impérialismes qui dominent le marché international et, par conséquent, le monde, et du degré de faiblesse du pays soumis.

Dans le cas des anciennes républiques « populaires » et « démocratiques » d’Europe de l’Est qui faisaient partie de l’empire russe – et que la contre-révolution stalinienne, déformant totalement le marxisme, présentaient comme « socialistes » – la transformation des satellites de Moscou en satellites de l’Union Européenne et des États-Unis a pris environ quinze ans.

Elle a commencé par l’intégration de l’Allemagne de l’Est dans l’Allemagne de l’Ouest (après la chute du mur de Berlin en 1989) et s’est poursuivie avec la Pologne, la Hongrie, la Tchécoslovaquie (divisée pacifiquement en République tchèque et en Slovaquie), la Bulgarie, les États baltes, etc., tandis que d’autres pays, comme la Biélorussie et l’Ukraine, ont continué à être soumis beaucoup plus directement à une forte influence de Moscou, malgré leur « indépendance ».

Cette longue transmigration a entraîné, outre l’intégration de nombre de ces pays dans l’Union européenne, l’affiliation de beaucoup d’entre eux à l’OTAN (République tchèque, Hongrie, Pologne, Bulgarie, Estonie, Lituanie, Lettonie, Roumanie, Slovaquie).

L’OTAN, l’Alliance Atlantique militaire, a été  fondée en 1949 par les États-Unis et onze autres pays d’Europe occidentale. En 1955, l’Allemagne de l’Ouest adhéra à l’Alliance ; c’est alors que Moscou, voyant les forces militaires de l’OTAN stationnées aux portes de l’Allemagne de l’Est –notoirement le côté le plus stratégique des frontières européennes du fameux « rideau de fer » – s’est empressée d’unir, dans ce qui est devenu le Pacte de Varsovie, les forces armées de l’URSS et des autres pays d’Europe de l’Est qui faisaient partie de ses dominions occidentaux (Allemagne de l’Est, Tchécoslovaquie, Pologne, Hongrie, Roumanie, Bulgarie), constituant ainsi un important rideau défensif contre des attaques terrestres et aériennes tout au long d‘une ligne allant des frontières des États baltes à la mer Noire.    

Avec l’effondrement de l’URSS, le Pacte de Varsovie s’est dissous et le rideau défensif formé par les pays de ce Pacte a disparu ; la grave crise économique et politique connue par  la Russie dans les années 1990 l’a contrainte à se replier à l’intérieur des seules frontières de la Fédération de Russie, en essayant de maintenir et de consolider les liens avec les groupes ethniques russes qui vivaient dans certains pays (pays baltes, Biélorussie, Moldavie, Ukraine).

Il suffit de regarder une carte pour comprendre qu’en étant présente en Biélorussie et en Ukraine, la Russie dispose encore, d’un point de vue militaire, d’un zone  tampon efficace, et d’un point de vue économique, surtout en ce qui concerne l’Ukraine, d’un excellent allié tant pour la production agricole que pour la production industrielle et énergétique.

De toute évidence, Moscou n’a pas vu d’un bon oeil l’inclinaison de l’Ukraine à intégrer l’Union européenne, sans parler de l’OTAN. Tout comme la Maison Blanche n’avait pas du tout apprécié en 1962  l’installation de missiles russes à Cuba, elle n’apprécierait pas du tout l’installation de missiles américains en Ukraine si celle-ci rejoignait l’OTAN. En 1962, l’Amérique menaça de faire la guerre à la Russie, déclenchant ainsi une guerre mondiale ; soixante ans plus tard, en 2022, la Russie, en occupant l’Ukraine, cherche à prévenir l’installation de missiles américains en Ukraine… « pour éviter une guerre mondiale »…  

À l’heure où les pays européens ont montré qu’ils n’avaient pas la capacité, ou l’intérêt, de s’unir politiquement  étant donné la concurrence inter-impérialiste féroce entre eux,  y compris entre l’Allemagne et la France, et à l’heure où même les États-Unis rencontrent de sérieuses difficultés à maintenir leur suprématie politique dans le dit « monde occidental », la Russie ose des opérations qu’elle n’aurait même pas imaginées il y a seulement quinze ans.

Ses interventions en Syrie et en Libye, son « alliance » subtile avec la Turquie, en profitant de l’ambition d’Ankara de se tailler une place parmi les puissances régionales du Moyen-Orient, ainsi que la conduite désastreuse de la guerre américano-européenne en Irak, en Libye, en Syrie et en Afghanistan, signent une série de pas que l’impérialisme russe, historiquement expert à attendre patiemment de se mouvoir (avec le « Général hiver » comme allié supplémentaire), est en train d’accomplir pour récupérer au moins une partie de son ancienne puissance impérialiste.

Mais l’impérialisme n’a de force que s’il repose sur des bases économiques et financières solides. Et l’impérialisme russe ne peut rivaliser en force économique et financière avec l’impérialisme américain. En revanche, il est dotée d’une puissante force militaire, et notamment nucléaire, et c’est cet aspect qui inquiète Washington, Berlin, Paris, Londres et Rome et sur lequel il mise évidemment.

Le territoire russe s’étend de l’Europe à l’Asie ; cette immensité sur deux continents s’est avérée être à la fois une force (en cas d’attaque, par exemple par l’ouest, il est possible de se replier sur un vaste territoire pour réorganiser ses forces et  contre-attaquer), mais aussi une faiblesse (en cas d’attaque des deux côtés, de l’est et de l’ouest, il est beaucoup plus difficile d’organiser la contre-attaque).

Mais occuper la Russie, prendre Moscou (ce qui reviendrait dans le cas français la France à prendre Paris), n’a jamais été une tâche facile ; Napoléon a essayé, l’Empire allemand l’a tenté pendant la première guerre mondiale, l’Allemagne nazie a essayé aussi lors de la deuxième guerre mondiale, mais personne n’y a réussi.

Une seule force a réussi à renverser le pouvoir en Russie, alors centré à Petrograd : la révolution prolétarienne et communiste de 1917 ; cette force représentait le fer de lance de la révolution mondiale qui visait à renverser les pouvoirs bourgeois non seulement en Russie mais aussi à Varsovie, Budapest, Berlin, Vienne et ensuite à Paris, Londres, en vue de la révolution en Orient, en Chine, et dans l’Occident profond, en Amérique.

Ce grand dessein révolutionnaire ne s’est pas réalisé, non seulement parce que les puissances impérialistes européennes et américaines ont résisté et contre-attaqué avec une force décuplée (comme le soutenait Trotsky), mais surtout à cause de l’oeuvre de l’opportunisme réformiste et, plus tard, stalinien, qui, tel un cancer, a débilité le prolétariat, sa lutte et les partis qui étaient censés le guider et le diriger dans tous les pays, jusqu’à les effacer de l’horizon pendant des décennies.

Au cours des cinquante dernières années qui nous séparent de la grande crise mondiale de 1975 et de la fin des grands mouvements anticoloniaux, nous avons assisté à une interminable série de guerres locales, régionales, voire tribales, dans lesquelles les différentes puissances impérialistes ont été constamment impliquées, directement ou indirectement.

Ces guerres ont presque toujours eu lieu à la « périphérie » de l’impérialisme, en Afrique, en Asie, en Amérique latine, dans les territoires où la domination coloniale la plus brutale s’est exercée pendant des siècles, tandis que l’Europe occidentale et l’Amérique apparaissaient comme des lieux où régnait la paix, continuant à faire croire aux prolétaires des métropoles que cette paix dans laquelle ils vivaient était due à la démocratie, à la civilisation moderne et au développement capitaliste.

Mais ce développement, de même qu’il conduisit à la crise mondiale de 1975, déboucha sur  l’effondrement de l’URSS et sur les heurts en Yougoslavie, qui s’est également effondrée sous les coups de la crise économique et de la guerre entre nationalismes retrouvant une force nouvelle : alors, disait-on, la guerre  frappe aux portes de l’Europe – et elle l’a fait pour toute une décennie.

Aujourd’hui, elle frappe à nouveau, toujours aux portes de l’Est, cette fois en Ukraine, mais, contrairement à la décennie yougoslave (1991-2001), aucun impérialisme occidental, pas même les Etats-Unis, n’entend s’impliquer militairement dans la défense de la très sainte souveraineté nationale de Kiev !

La Russie a bien calculé son timing : elle a laissé la porte ouverte aux discussions diplomatiques et, en même temps, elle a massé 170 à 190 mille soldats aux frontières de l’Ukraine, prêts à intervenir – comme l’ont fait à maintes reprises les États-Unis, la France et la Grande-Bretagne – en tant que « forces d’interposition » ; non pas en tant que forces d’occupation mais en tant que forces militaires défendant  la « souveraineté » des deux républiques autoproclamées, officiellement reconnues quelques jours auparavant par la Douma russe.

Le prétexte de l’attaque militaire de grande ampleur était sur la table ; Poutine n’a eu aucun mal à l’utiliser pour justifier l’intervention militaire, dont il a annoncé les deux objectifs : protéger la population des deux républiques séparatistes du Donbass de la répression ukrainienne, et démilitariser l’Ukraine du pouvoir « nazi » du gouvernement de Kiev.

La réaction américaine s’est réduite à la menace de sanctions, plus dures que celles déjà mises en place en 2014 lors de la prise de la Crimée par la Russie, tant sur le plan économique que financier . Après la rebuffade reçue par Macron et Scholtz, qui s’étaient précipités à Moscou pour dissuader Poutine d’envahir l’Ukraine, l’Union européenne a rejoint Washington : sanctions, sanctions, sanctions.

Les intérêts commerciaux et financiers de l’Allemagne, de l’Italie, de la France, de la Pologne et de beaucoup d’autres pays européens avec la Russie ont un poids important, et pas seulement en ce qui concerne le gaz naturel qui, à travers les nombreux gazoducs existants, arrive en Europe occidentale pour couvrir environ 40% de ses besoins énergétiques : un pourcentage qui ne peut être garanti que par la Russie, et qui pourrait même augmenter lorsque Nord Stream 2, le gazoduc déjà prêt et qui, au fond de la mer Baltique, arrive de la Russie directement en Allemagne sans passer par un pays tiers, commencera à fonctionner. L’Allemagne et l’Italie, les deux principaux pays industriels d’Europe, sont ceux qui dépendent de manière significative du gaz russe.

Si la Russie, en réaction aux lourdes sanctions qui lui sont infligées devait fermer les robinets de gaz à l’Europe, l’Allemagne et l’Italie seraient les pays qui paieraient immédiatement le prix le plus élevé. Bien sûr, la Russie serait également perdante, car elle ne trouverait pas facilement une alternative, pas même avec la Chine, qui dernièrement semble intéressée par le gaz russe. Par conséquent, des sanctions trop lourdes ne seront pas déclenchées de part et d’autre, malgré une pression américaine considérable sur les Européens. Les intérêts en jeu sont trop importants pour les mettre en péril juste pour plaire à Washington…

Tant qu’il s’agit de discussions, aussi dures que l’on veut… et de sanctions qui n’entraînent pas un prix trop élevé à payer, d’accord ; mais s’il s’agit de porter un coup mortel à la reprise économique qui vient de renaître après les années de pandémie…, il n’en n’est pas question, pour l’Allemagne en premier lieu, la seule à pouvoir résister à la pression de Washington et, en même temps, à celle de Moscou.

Par conséquent, l’expédition militaire de Moscou en Ukraine continuera, au milieu des cris et des pleurs de toutes les chancelleries occidentales pour la violation de la souveraineté nationale et de la démocratie; mais les affaires sont les affaires ; en 2014 face à l’intervention militaire russe en Crimée, les sanctions occidentales contre Moscou n’ont arrêté ni l’occupation ni l’annexion; comment pourraient elles arrêter l’occupation militaire russe du Donbass (qui est la région minière la plus importante d’Ukraine), voire la guerre en Ukraine ?

Il est plus probable, étant donné la situation générale actuelle des rapports de force inter-impérialistes, que ce qui s’est en partie produit en Géorgie se reproduise en Ukraine ; à savoir que la Russie 1) empêche le pays d’être affilié à l’OTAN, 2) que la partie du pays habitée par des groupes ethniques russes se détache en une république autonome et serve de tremplin à de futures opérations de plus grande envergure, 3) que les coins que représentent ces zones séparatistes portent également leurs fruits d’un point de vue économique et en termes de voies de communication avec d’autres pays directement contrôlés par le pouvoir russe, 4) qu’ils constitueront un avertissement constant pour les pays voisins de la présence militaire russe, prête à intervenir rapidement pour défendre les frontières sacrées même loin de Moscou, ou pour annexer les territoires lorsque la situation générale semble favorable à une éventuelle annexion.

Il ne faut pas oublier que l’impérialisme ne signifie pas seulement l’économie des monopoles et du capital financier, mais aussi l’occupation et l’annexion de territoires.

Comme nous l’avons écrit dans notre prise de position du 25 décembre : «L’Ukraine est l’un des endroits qui peuvent devenir un foyer de guerre impérialiste lorsque les tensions internationales aiguisées par les crises économiques, pousseront à nouveau les grands impérialismes vers un troisième conflit mondial. Les « nuées » menaçantes ne cessent de s’accumuler, mais nous ne sommes cependant pas encore à la veille d’un tel conflit ; d’ailleurs les futures alliances de guerre ne sont pas encore fixées : la Russie et les Etats-Unis réussiront-ils à s’entendre contre la Chine, ou l’axe russo-chinois contre les Etats-Unis se concrétisera-t-il? »

 Pendant ce temps, la Chine regarde ce qui se passe et enregistre les différentes réactions des impérialistes en lice, dans la position d’un futur protagoniste, désireux de comprendre le type d’attitude et de force de ceux qui pourraient devenir les alliés ou les ennemis de demain. Il ne fait aucun doute qu’à l’heure actuelle, elle souhaite justifier les actions de Moscou en fonction anti-américaine et que demain, après avoir mis la main sur Hong Kong, elle vise à s’emparer du morceau le plus savoureux, constitué par Taïwan (l’île de Formose) que Pékin a toujours considéré comme une partie intégrante de la Chine, soustraite en 1949 à l’unité territoriale nationale par l’impérialisme anglo-américain, avec la Russie à ses côtés.

L’époque impérialiste  est l’époque des guerres permanentes, à différents niveaux, en fonction de l’accumulation des contradictions sociales et de la succession des crises économiques et financières qui la caractérisent. Ce ne sont pas, comme cela ne l’a jamais été, les accords diplomatiques et de « paix » qui suivent les conflits, même les plus dévastateurs, qui empêcheront la course naturelle du capitalisme vers la guerre ; les deux guerres impérialistes mondiales du siècle dernier projettent leur ombre sur la prochaine troisième guerre mondiale vers laquelle se précipitent inexorablement les contrastes inter-impérialistes.

La seule force capable de l’empêcher ou de l’arrêter ne sera jamais bourgeoise et impérialiste, pas même sous sa forme la plus démocratique et « civilisée » ; ce sera la force sociale représentée par la classe ouvrière, par le prolétariat, qui dans le monde entier est contraint aux mêmes conditions salariales et que les mêmes contradictions économiques et sociales poussent à faire de l’antagonisme de classe qui caractérise la société bourgeoise, le ressort d’une lutte non pacifique, non démocratique, non parlementaire, mais de classe: alors la guerre impérialiste se transformera en guerre civile, comme Marx et Engels l’ont affirmé après l’expérience de la Commune de Paris et comme Lénine et l’Internationale Communiste le proclamèrent après la révolution victorieuse d’octobre 1917.

Pour que le prolétariat soit préparé à ce rendez-vous historique avec sa révolution de classe, il doit se débarrasser de l’épaisse couche de légalisme, de pacifisme et de démocratisme dont l’opportunisme collaborationniste l’a revêtu, non pas pour l’émanciper mais pour l’étouffer, l’emprisonnant dans des chaînes encore plus serrées aux besoins exclusifs du capitalisme.

Le pouvoir bourgeois dans tous les pays a fait, fait et fera toujours appel à la patrie, aux valeurs nationales, à la culture et à l’unité nationales, pour lesquelles il oblige et obligera toujours le prolétariat à donner sa sueur et verser son sang en temps de paix comme en temps de guerre.

Aujourd’hui, en dépit des cris de liberté et de souveraineté populaire, c’est le nationalisme pourri grand-russe qui se heurte au nationalisme pourri de l’Ukraine, C’est contre toutes les formes de nationalisme que les prolétaires doivent se battre car le nationalisme est l’un des vecteurs les plus dangereux et les plus efficaces de la division entre eux. L’union des prolétaires ne peut pas se faire sur le terrain de la nation, mais seulement sur le terrain classe, anticapitaliste, antibourgeois et donc internationaliste.

Contre l’embrigadement des prolétaires dans les armées nationales bourgeoises !

Contre l’effusion de sang prolétarien pour faire triompher une bande d’exploiteurs et de tortionnaires contre la bande d’exploiteurs et de tortionnaires adverse ! 

Contre toute forme de concurrence entre prolétaires !

Pour la solidarité de classe entre les prolétaires ukrainiens et russes, pour l’union des prolétaires de toutes les nationalités et ethnies par-dessus les frontières bourgeoises !

Pour la reprise de la lutte de classe menée avec des moyens et des méthodes de classe, pour la défense exclusive des intérêts immédiats et généraux  prolétariens !

Pour la reconstitution du parti de classe, du parti communiste révolutionnaire internationaliste et international !

Parti Communiste International
24 février 2022
www.pcint.org